CONCLUSION GENERALE
Une chose est évidente, c'est que le législateur
du code béninois des personnes et de la famille s'est montré
vraiment audacieux dans les innovations introduites au niveau des dispositions
sur la succession, après le traitement discriminatoire qui a
été fait pendant longtemps aux enfants nés hors mariage.
Désormais, comme l'enfant légitime, l'enfant naturel peut
librement et légalement faire constater sa filiation et prétendre
à tous les droits qui lui sont dus. C'est là une heureuse
initiative, étant donné qu'elle s'inscrit dans l'optique
d'égalité qui s'imposait par rapport à la situation des
enfants.
D'un autre côté, nous avons pu constater que le
législateur n'est pas allé jusqu'au bout de sa volonté
d'égalité : certains enfants continuent de se voir
traités moins bien encore que d'autres, et ce, sur la base de certaines
raisons qui ne nous semblent pas justifiées. D'où la
problématique de l'applicabilité du principe
d'égalité des droits consacré par le nouveau régime
des successions au Bénin.
Face à cet état de chose, et compte tenu des
réflexions faites le long de ce travail, nous estimons que le
législateur devrait procéder à une relecture des textes et
à des rectifications aux fins d'étendre aux enfants incestueux,
la possibilité d'établir leur filiation comme tous les autres
enfants et d'introduire des mesures plus dissuasives envers ceux qui se rendent
coupables d'adultère et d'inceste.
En cela, le législateur devrait étudier les
points du code relatifs à la filiation naturelle qui posent des
problèmes, étudier la possibilité d'introduire la
technique de la légitimation par autorité de justice pour tous
les enfants naturels, ainsi que des mesures dissuasives à l'encontre des
auteurs d'actes prohibés par la loi.
L'absence de dispositions explicites et suffisamment efficaces
en matière de sanction dans les divers cas de violation
(adultère, inceste) fait en effet penser à une sorte de
relâchement qui encourage le non respect de la loi. C'est une situation
anormale que le législateur devrait prendre en compte, car elle engendre
beaucoup de déconvenues à divers niveaux : les réels
coupables ne subissent aucune sanction, maintiennent leurs mauvais
comportements et entraînent d'autres personnes dans leurs vices pendant
que des enfants se voient privés de leur droit de jouir pleinement d'une
situation juridique.
A défaut de pourvoir revenir sur l'élaboration
des textes qui suscitent à polémique, nous préconiseront
aux parlementaires et juristes béninois de prévoir des lois
additives susceptibles de les préciser ou de les corriger. En tout
état de cause, il est absolument nécessaire que des dispositions
claires et sérieuses soient fixées et imposées au respect
de tous : les valeurs du mariage et de la famille légitime ne s'en
trouveraient que plus préservées, sans pour autant que des
injustices soient crées.
L'intérêt des enfants ne doit être
délaissé pour aucune raison, qu'ils soient légitimes,
naturels simples, adultérins ou incestueux. « Vi wè
nyi lé » dit un adage fon, ce qui signifie
« l'enfant est le bénéfice ». Un
enfant, comme nous le dirons toujours, est et reste un enfant. Et
l'enfant, parce qu'il est le devenir de toute société, on ne
pourrait et on ne devrait pas se désintéresser de son sort.
Il est donc important de poursuivre les réflexions sur
les conséquences réelles de la réforme du droit des
personnes et de la famille. Sur ce dernier point, c'est à la doctrine et
à la jurisprudence qu'il reviendra de peaufiner l'oeuvre entamée
et de nouvelles réformes viendront combler les failles
constatées. Aucune oeuvre humaine n'étant parfaite, tous les
systèmes législatifs sont passés par-là.
De par sa fragilité et son manque de maturité,
l'enfant est un être à protéger ; de plus il est un
homme en devenir et, dans cette perspective, la société et l'Etat
béninois se doivent absolument de créer, l'un par une attitude
non discriminatoire et l'autre par une législation appropriée,
les conditions harmonieuses de son développement dans la
société./.
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