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Problématique de l'égalité des droits des enfants légitime et naturel dans le nouveau régime des successions du Bénin

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par Julien HOUNKPE
Université d'Abomey Calavi (Bénin) - Maitrise en Droit 2006
  

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SECTION II: LES PESANTEURS PSYCHO SOCIOLOGIQUES

Les pesanteurs psychosociologiques qui pourraient rendre difficiles l'attribution de droits successoraux aux enfants naturels sont nombreuses et variées.

Paragraphe 1 - Le respect du mariage et de la famille légitime

Le nouveau statut qui est souhaité pour l'enfant naturel n'a pas à léser les droits de la famille légitime. Le législateur béninois dans son élan vers une amélioration du statut des enfants naturels devra servir la cause du mariage et protéger les membres de la famille légitime.

A- La remise en cause de l'institution du mariage

L'une des obligations découlant du mariage est le devoir de fidélité imposé aux conjoints. Par conséquent, l'adultère est proscrit dans les relations conjugales et constitue une cause péremptoire de divorce aux termes des articles 229 et 230 du code civil. Le mariage est une noble institution que la loi et la société entendent protéger. C'est donc dans l'intérêt de la famille légitime que le code limitait de manière importante les droits successoraux des enfants naturels.

Et si l'enfant naturel est traité comme un enfant légitime, l'adultère serait-il encore puni ? Devons-nous aller vers une certaine dépénalisation du délit d'adultère ? Le mariage monogamique aura-t-il encore un sens ? Dans cette situation, on tendra vers une prolifération de la polygamie24(*). Or en raison des nombreux aspects négatifs de la polygamie, les législateurs de tout temps, dans l'intérêt des enfants, ont toujours prôné la monogamie. Ainsi, si tous les enfants doivent avoir les mêmes droits, c'est légaliser d'une manière ou d'une autre toutes les relations extraconjugales ; mais comment qualifier ces relations d'un point de vue juridique ? N'est-ce pas une forme de polygamie qui ne dit pas son nom ? Dans ces conditions, quel avenir pour la monogamie ? Et qu'adviendrait-il des ménages monogames ?

En d'autres termes, l'innovation en matière de filiation apportée par le code des personnes et de la famille risque d'ébranler la morale sociale. Ainsi, le mariage de ses parents ne crée plus de privilège pour l'enfant légitime : légitime, naturel simple, adultérin ou incestueux, il bénéficie du même statut successoral. L'assimilation crée un sentiment de frustration pour les enfants légitimes. De même, la femme épouse survivante du de cujus doit concourir avec les enfants naturels de son mari prédécédé. Le mariage est donc vidé de son sens.

L'assimilation de l'enfant naturel à l'enfant légitime, du point de vue successoral, affaiblit la famille légitime fondée sur le ma riage.

B- Le protection des droits de la famille légitime

Le Bénin semble, à travers le code des personnes et de la famille, avoir fait le choix de défendre les intérêts de l'enfant naturel. Mais cette option prend t-elle en compte les convictions religieuses et morales des béninois ? Cette option protège-t-elle la famille légitime ?

Pour la majorité des doctrinaires, les enfants naturels malgré tout, conservent un aspect immoral parce qu'ils sont nés de relations extraconjugales, ce qui fait que l`idée d'une éventuelle égalité entre eux et les enfants légitimes procède d'une gageure. Pour Lamine SIDIME par exemple « Les enfants adultérins présentent cette particularité qu'issus de personnes non mariées entre elles, leur naissance est en outre affectée d'une « illicéité » et d'une immoralité supplémentaire en ce qu'elle est le fruit de l'adultère25(*) ».

Cette situation fait que si la législation n'institue aucune différence entre l'enfant adultérin et l'enfant légitime, il est à craindre que le respect des droits de la famille légitime soit compromis dans l'opinion publique. En effet, en proclamant l'infériorité légale des « enfants illégitimes », le législateur sert la cause de la famille légitime. En d'autres termes, toute mesure qui tend à rapprocher les effets des deux filiations légitime et naturelle est une « prime à la débauche et à l'union libre ».

La législation béninoise doit évoluer mais progressivement. Dans le domaine du droit de la famille, il serait raisonnable au fond de ne rien brusquer, de laisser s'édifier progressivement les fondements d'une société nouvelle d'ailleurs en pleine gestation. Colette SAUJOT écrivait à propos de la condition juridique des enfants adultérins que « Protection de l'enfant adultérin, défense de la famille légitime, tels sont les deux impératifs entre lesquels le juriste doit choisir et son choix dépendra des moeurs, des conceptions religieuses et morale de l'époque »26(*).

* 24 Entendre par polygamie ici, polygynie seulement.

* 25 LAMINE Sidimé, in Encyclopédie Juridique d'Afrique, op.cit. p.393

* 26 C. SAUJOT La condition juridique des enfants adultérins, Revue Trimestrielle de Droit Civil, 1966

p. 144.

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