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Le rétablissement de l'Etat de droit dans une société en reconstruction post-conflictuelle: l'exemple de la sierra léone

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par Jukoughouo Halidou Ngapna
Institut des Droits de l'Homme de Lyon & Université Pierre Mendès France de Grenoble - Master 2, Recherche, Histoire du Droit, Droit et Droits de l'Homme 2007
  

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II. L'impression de travail inachevé : la répression du mercenariat et la responsabilité des chefs d'Etat en exercice

Au milieu des années 1990, le conflit sierra léonais a connu une mutation à cause de la participation des mercenaires (A). Cette participation a été favorisée par Charles TAYLOR dont le cas est traité de façon exceptionnelle (B).

A. La participation des mercenaires au conflit Sierra léonais

Les mercenaires ont occupé dans l'histoire une place particulière dans les cours des conflits armés. Ils ont souvent, aussi bien que les soldats-citoyens influencé le cours des évènements. La définition de mercenaire a évolué avec le temps (1) et leur participation aux conflits armés a connu une interdiction récente, tant en droit international qu'en droit interne (2).

1. La définition de l'acception « mercenaire » par le droit international

Aymeric PHILIPON fait une différence entre les mercenaires classiques et les mercenaires modernes139(*). Le mercenaire moderne est celui qui fournit à une partie au conflit une assistance matérielle, un savoir faire militaire ou des protections de sécurité privée. C'est une assistance fournie par des entreprises telles Executive Outcomes (EO) qui, avec leur participation directe de 1995 à 1997, ont pu influer considérablement dans les rapports de force entre le gouvernement et les rebelles du RUF. EO est à l'avant-garde des grandes sociétés lancées à la conquête des richesses minérales d'Afrique. Après ses missions pour le moins fructueuses en Angola140(*), elle s'est engagée avec la junte militaire au pouvoir en 1995 par un contrat de 21 mois dont l'estimation s'élève à 35 millions de dollars. La mission d'EO était essentiellement liée à la lutte antiguérilla, notamment, au soutien aérien sérieux141(*) et financée par l'intermédiaire de la compagnie Heritage qui avance les fonds en échange des concessions minières142(*).

La qualité de mercenaire classique a été définie par le droit international à partir de 1977 au moyen du Protocole additionnel I aux Conventions de Genève. Cette définition comporte, comme celle de la Convention de l'OUA sur l'élimination du mercenariat en Afrique trois éléments : l'élément personnel, l'élément matériel et le mobile. S'adonne à une activité mercenaire celui qui est spécialement recruté dans son pays ou à l'étranger pour combattre dans les rangs d'une des parties au conflit dont il n'est pas ressortissant et qu'il ne soit pas envoyé en mission par l'armée régulière de son propre pays143(*). Il faut, pour valider l'élément matériel participer directement aux hostilités. La Convention de l'OUA ajoute même que les personnes morales, du fait qu'elles « abritent, organisent, financent, assistent, entraînent, forment, soutiennent ou emploient de quelque façon que ce soit les mercenaires » peuvent être considérées elles-mêmes comme tel. L'élément moral quant à lui est relatif au mobile du mercenaire. C'est celui qui participe directement dans le conflit avec le mobile de recherche d'un avantage personnel « qui est effectivement promise par une partie au conflit ou en son nom ou d'une rémunération supérieure à celle qui est promise ou payée à un combattant ayant un rang comparable dans la force armée de cette partie144(*) ». Le mercenaire doit avoir pour autre but la déstabilisation du Pays, c'est-à-dire qu'il intervient directement pour renverser un gouvernement ou porter atteinte à l'ordre constitutionnel de l'Etat145(*) et l'opposition à un mouvement de libération nationale146(*). L'appui d'EO aux forces gouvernementales sierra léonaises a eu un très grand succès dont Doug BROOKS, le président de l'IPOA, une des plus grandes entreprises de guerre en Afrique du Sud, fait largement écho lors de ses conférences dans le pays147(*).

Les définitions du mercenaire, que ce soit par les conventions à vocation universelle que la convention africaine, manquent de précision148(*). Les critères contenus dans les trois éléments (personnel, matériel et mobile) constitutifs de l'infraction sont cumulatifs et difficilement atteignables par les personnes susceptibles de mener une activité criminelle. Ces données influent énormément sur la répression de la participation des mercenaires au conflit armé149(*).

2. La répression de la participation des mercenaires à un conflit armé

L'article 47 du Protocole additionnel I aux Conventions de Genève définissant le mercenaire ne lui attribue pas un régime répressif. L'intérêt de cette définition réside dans l'exclusion du mercenaire à l'accès aux droits, privilèges et avantages liés à la qualité de combattant. Ce qui implique qu'il ne soit pas possible en droit, lors d'un conflit armé, d'appliquer la qualité de prisonnier de guerre aux mercenaires capturés, le mercenariat étant considéré comme un crime de droit commun. La criminalisation du mercenariat en droit international s'inspirera de cette initiation astucieuse du Protocole I pour édicter des prescriptions aux Etats.

L'article 6 in fine de la Convention de l'OUA relative à l'interdiction du mercenariat stipule que les Etats doivent prendre toutes les mesures notamment législatives, règlementaires, administratives et judiciaires, pour empêcher la formation, le transfert, le soutien ou le financement des mercenaires sur leur territoire. Les Etats doivent coopérer et s'échanger des informations pour faciliter les enquêtes affin de retrouver et mettre hors d'état de nuire d'éventuels mercenaires. Le mercenariat étant érigé à l'article 9 comme crime de droit commun, les Etats doivent infliger les peines les plus sévères à ceux qui s'adonnent à cette pratique. Au niveau de la coopération judiciaire internationale, les Etats doivent extrader les mercenaires présumés vers les pays agressés afin que leur jugement puisse se faire. A défaut, un jugement équitable doit leur être accordé dans le pays en question (art. 10 et 11).

La Convention internationale contre le recrutement, l'utilisation, le financement et l'instruction des mercenaires abonde dans le même sens avec l'édiction d'obligations internationales vis-à-vis des Etats. Cependant, son faible taux d'adhésion150(*) limite considérablement sa portée. Une grande marge est donc laissée à la volonté politique des Etats qui, bien qu'en signant les conventions internationales, doivent les préciser après ratification, par l'adoption des mesures plus concrètes et claires qui définissent les modalités d'application par les autorités internes des normes définies en termes généraux dans les conventions.

Au plan interne, l'un des éléments majeurs est l'adoption d'un dispositif répressif en Afrique du Sud, principale puissance africaine dans la fourniture de services militaires privés. La Loi sud-africaine avait pour vocation première de réhabiliter l'image de marque du pays qui a longtemps été réputé pour le laxisme des autorités face aux activités des compagnies de sécurité privé dans les pays de la sous-région et ailleurs en Afrique et dans le monde.

La Regulation Foreigh Military Assistance Act du 26 février 1998 dite loi anti-Executive Outcomes interdit (art. 2) « à tout citoyen ou résident d'Afrique du Sud de recruter, entraîner des personnes en vue d'activités mercenaires151(*) ou de financer ces activités ». A l'exception des opérations humanitaires (déminage humanitaire par exemple), l'article 3 prohibe le « principe d'assistance militaire à l'étranger », c'est-à-dire, la fourniture, sous les bases privées, de la logistique, du support en sens de personnel et de finances, des services de renseignement, d'assistance opérationnelle, des conseils, de la formation, du recrutement, des services médicaux et paramédicaux, l'acquisition de matériel, des moyens de sécurité destinés à renverser l'ordre constitutionnel, l'intégrité et la souveraineté d'un Etat.

Ce principe d'interdiction est tempéré par les dérogations prévues aux articles 4 et 5 qui prévoient la possibilité pour les entreprises privées d'obtenir une habilitation d'exercer auprès des autorités et solliciter leur agrément à chaque fois qu'ils sont entrain de vouloir signer un nouveau contrat. Le Comité national de contrôle des armes conventionnelles vérifie la conformité de chaque opération commerciale dans le domaine des prestations militaires ou paramilitaires avec les intérêts de l'Etat sud-africain. Le régime de sanction relatif à la violation de cette Loi est relativement sévère. En effet, tout contrevenant s'expose à un million de rands (125 000 €) et/ou 10 ans d'emprisonnement. Si les mercenaires sont des aventuriers qui recherchent un gain matériel dans la participation des hostilités, les membres des forces armées de maintien de la paix recherchent au contraire à préserver les intérêts de la communauté internationale. Bien que combattant pour une interposition sous la bénédiction de la communauté internationale, ils sont néanmoins responsables d'éventuelles atrocités qu'ils ont commises.

Aux côtés des mercenaires sud africains qui ont participé au conflit en Sierra Léone Charles TAYLOR a été considéré comme le principal acteur dans la crise. Mais l'attraire devant la Cour spéciale na pas été chose facile.

* 139 Aymeric PHILIPON, «Les activités mercenaires et de sûreté face au droit », dans Mercenaires et polices privées : la privatisation de la violence armée, UNIVERSALIS, France 2005, pp 49 - 65.

* 140 Kharen PECH et David BEREFORD, « Africa's New Look Dogs of War», Mail and Guardian, Johannesburg, 24 janvier 1997.

* 141 Hélicoptères MI-24, MI-17 et MIG-23. Philipe CHAPLEAU, Sociétés militaires privées : enquête sur les soldats sans armées, page 136.

* 142 Idem.

* 143 C'est du moins ce qui ressort de l'article 1er de la Convention de l'OUA du 3 juillet 1977 sur l'élimination du mercenariat en Afrique et de l'article 47 du Protocole I aux Conventions de Genève.

* 144 Article 47 f) du Protocole I de 1977.

* 145 Convention internationale contre le recrutement, l'utilisation, le financement et l'instruction des mercenaires du 4 décembre 1989.

* 146 Ajoute la Convention panafricaine à l'article 1 § 2.

* 147 Selon lui, « pour 36 millions de dollars, avec 300 hommes, EO a sécurisé Freetown, libéré les mines, mis les rebelles en déroute et gagné la guerre », il renchérit par comparaison avec les Nations unies qui, selon lui « pour 500 millions de dollars, avec 8 000 à 14 000 hommes, a évacué Freetown, vu ses soldats pris en otages et perdu la paix.

* 148 Des sénateurs français ont reconnu cette ambiguïté lors des débats d'adoption de la loi de ratification de le Convention onusienne. Ils relevaient notamment que « ... une imprécision qui ne permet pas d'exclure clairement de la notion de mercenaire des personnes qui sont envoyées par leur Etat au titre de l'assistance militaire...». Rapport sénatorial cité par Aymeric PHILIPON, dans « Les activités mercenaires et de sûreté face au droit » op cit. page 53.

* 149 Le rapporteur spécial des Nations unies sur le mercenariat dans son rapport du 24 décembre 2003 aura à cet effet préconisé une nouvelle définition « précise, exhaustive et sans ambiguïté » pendant que la Commission des droits de l'homme demande aux Etats dans la Résolution du 8 avril 2004 de prendre des mesures nationales pour palier à cette lacune.

* 150 25 Etats seulement ont ratifié cette convention.

* 151 Le mercenaire étant définit par la même loi comme étant celui qui participe directement dans les hostilités, entant que combattant contre un gain privé.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway