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La possession d'état dans l'avant-projet du code camerounais des personnes et de la famille

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par Jean Noel TAMEKUE TAGNE
Université de Yaoundé II - DEA en droit privé fondamental 2008
  

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AVERTISSEMENT

Les opinions émises dans ce mémoire ne

sont pas celles de l'Université, et

par conséquent n'engagent

que son auteur.

DEDICACE

A la mémoire de ma mère,

MAGOMNO Thérèse.

REMERCIEMENTS

v A DIEU tout puissant, pour son soutien inconditionné.

v Au Pr. Paul Gérard POUGOUE qui a bien voulu diriger nos premiers pas sur les sentiers de la recherche et qui, malgré ses multiples occupations, a fait montre d'une véritable patience, disponibilité et écoute.

v Au Dr. ATANGANA-MALONGUE Thérèse, pour ses nombreux conseils, son dévouement à nous épauler tout au long de la recherche et de la rédaction de ce mémoire.

v A mon père, monsieur TAGNE Emmanuel qui a toujours cru en moi et n'a jamais cessé de m'encourager.

v A toute notre famille, à nos amis, à nos camarades de promotion ainsi que tous ceux qui de près ou de loin ont contribué à la réalisation de ce travail.

SOMMAIRE

INTRODUCTION GENERALE ................................................................................................ 9

TITRE I : LES EFFETS DE LA POSSESSION D'ETAT EN DROIT INTERNE DE LA

FAMILLE ......................................................................................................................................17

CHAPITRE I. L'EFFET PROBATOIRE DE LA POSSESSION D'ETAT.................................. 19

Section 1. La preuve de la filiation par la possession d'état .......................................................... 20

Section 2. La preuve du mariage par la possession d'état ............................................................. 35

CHAPITRE II. L'EFFET CONSOLIDATEUR DE LA POSSESSION D'ETAT ....................... 42

Section 1. Le renforcement de la filiation par la possession d'état ............................................... 43

Section 2. La consolidation du mariage par la possession d'état .................................................. 46

TITRE II : LES EFFETS DE LA POSSESSION D'ETAT EN DROIT

INTERNATIONAL PRIVE ........................................................................................................ 53

CHAPITRE I. L'EFFET PROBATOIRE DE LA POSSESSION D'ETAT EN MATIERE

DE NATIONALITE : ESSAI DE THEORISATION ................................................................... 55

Section 1. La preuve de la nationalité camerounaise par la possession d'état :

domaine et circonstance ............................................................................................... 56

Section 2. Les modalités de preuve de la nationalité camerounaise par la possession d'état... 61

CHAPITRE II. LA LOI APPLICABLE AUX EFFETS DE LA POSSESSION D'ETAT

D'ENFANT EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE DE LA FILIATION ................................ 67

Section 1. La compétence de la loi camerounaise ......................................................................... 68 Section 2. La loi applicable en cas de non résidence au Cameroun .............................................. 72

CONCLUSION GENERALE ..................................................................................................... 80

RESUME

La possession d'état peut être définie comme étant une situation de fait constituée par la possession prolongée d'une qualité juridique déterminée, c'est-à-dire ouvrant droit à un statut d'égalité civile que le législateur présume parfois à titre irréfragable, être conforme à la réalité dans le but d'assurer la stabilité de l'état et le respect de la situation établie et consacrée par l'opinion publique. Elle est généralement appréhendée à partir des trois notions latines classiques : nomen, tractatus et fama qui sont en réalité, ses principaux éléments constitutifs. La possession d'état produit ou pourrait produire des effets importants en droit, notamment l'effet probatoire et l'effet consolidateur.

En ce qui concerne l'effet probatoire, la possession d'état permet de prouver subsidiairement la filiation aussi bien légitime que naturelle ; bien que pour l'instant, le futur code camerounais des personnes et de la famille n'attache aucun effet probant à la possession d'état d'enfant naturel. Dans des circonstances bien précises, spécifiquement lorsque la légitimité des enfants issus d'un mariage est mise en doute, la possession d'état peut servir de preuve au mariage. Elle pourrait encore être un mode de preuve de la nationalité camerounaise.

L'effet consolidateur quant à lui permet d'assurer la stabilité de l'état des personnes physiques. La possession d'état raffermit la filiation préétablie en la mettant à l'abri des contestations dont elle pourrait faire l'objet. Elle permet également de maintenir la validité de l'acte de mariage et peut par ailleurs garantir le mariage contre une annulation systématique.

Sur un tout autre plan, celui du droit international privé de la filiation, les effets découlant de la possession d'état posent un problème de loi applicable. L'Avant-projet de code, dans un souci constant de préserver et de sauvegarder la paix des familles, rattache les conséquences découlant de la possession d'état d'enfant à la loi camerounaise lorsque l'enfant légitime et ses père et mère (on pourrait également ajouter lorsque l'enfant naturel et l'un de ses père et mère) sont camerounais ou résident au Cameroun. Lorsque l'enfant et ses parents ne seront ni camerounais, ni résidants au Cameroun, il faudra distinguer suivant qu'il s'agit des effets découlant de la possession d'état d'enfant légitime et suivant qu'il s'agit des effets découlant de la possession d'état d'enfant naturel. S'agissant des conséquences découlant de la possession d'état d'enfant légitime, la loi applicable sera à l'exclusion de la loi nationale de la mère légitime, la loi gouvernant les effets du mariage ou la loi personnelle de l'enfant. Quant aux effets découlant de la possession d'état d'enfant naturel, la loi applicable sera soit la loi nationale de la mère naturelle, soit la loi nationale du père naturel.

ABSTRACT

State possession can be defined as a fact situation constituted by an extend possession of a specific legal quality, that is to say giving the right to an equal civil status, that the legislator often presume peremptory conform to the reality in order to secure state stability and the respect of situation established and accepted by public opinion. The three usual Latin notions: nomen, tractatus and fama are generally used to understand it better. State possession produces or could produce important effect in law, especially proof effect and consolidate effect.

As concerns proof effect, state possession can be used to prove legitimate kinship as well as natural kinship, even if the future Cameroonian family law code do not give any effect to natural children state possession. It should be noted that, state possession is a subsidiary way of proof. It can be only used in case of deficiency of the ordinary means of proof. When the legitimacy of children is contested, state possession can be used to prove marriage. Nationality can also be proved by state possession. In order word, under certain circumstances, Cameroonian nationality can be proved by state possession.

As regards consolidate effect state possession preserves the stability of physical person status. It reinforces kinship established before while putting it away of contestations. It also allows maintaining the validity of marriage act and guaranteeing at the same time marriage against systematic annulment.

In another way, this of private international law, the effect proceed from state possession ask a question of law to be applied. The next Cameroonian family code, in a constant care of preserving and safeguarding peace of family tie consequences derive from child state possession to cameroonian law when legitimate child and his parents ( we can also add, when natural child and one of his parents) are Cameroonians or living in Cameroon. When child and his parents aren't Cameroonians or are not living in Cameroon, a distinction need to be done between effects proceed from natural child state possession and effects proceed from legitimate child state possession. Concerning consequences derive from legitimate child state possession, the law to be applied is except mother's national law, the marriage's effects law or child's personal law. When dealing with consequences derive from natural child state possession, the law to be applied is follows the case, mother's national law or father's national law.

INTRODUCTION GENERALE

1. Le droit doit être dans une certaine mesure proche des faits. Il doit être en communion avec la réalité sociologique. Le vécu quotidien nous apprend chaque jour un peu plus sur nous. Son importance dans l'élaboration des règles juridiques n'est plus à démontrer. Nier a priori son rôle ne serait qu'une fuite en avant dont les répercussions seraient des plus néfastes1(*). Pour une approbation des plus larges, le droit doit être mis à l'épreuve des faits. Il est nécessaire qu'il prenne parfois en compte les données factuelles. Il doit être flexible. Et, la prise en considération de la possession d'état par le futur code camerounais des personnes et de la famille témoigne de cette flexibilité voulue et recherchée par ses rédacteurs. En donnant valeur juridique à la possession d'état, les rédacteurs de l'Avant-projet portant code des personnes et de la famille entendent rapprocher le droit de la réalité sociologique. Et partant, affirment leur volonté d'assouplir la rigueur qui caractérise très souvent la règle de droit.

2. D'une manière générale, la possession, est l'exercice de fait des prérogatives d'un droit indépendamment du point de savoir si l'on est ou non titulaire de ce droit2(*). Posséder une chose c'est exercer sur elle les prérogatives du propriétaire, qu'on le soit juridiquement ou non. La possession entraîne des conséquences importantes dans le domaine des biens, notamment la possession d'un bien meuble fait présumer le droit de propriété en la personne du possesseur3(*). C'est à ceux qui contestent la réalité de son droit à lui faire le procès. Comparativement au droit des biens, la possession d'un état consiste dans l'exercice de fait des prérogatives attachées à celui-ci indépendamment du point de savoir si l'on en est vraiment titulaire4(*). Posséder un état, c'est en avoir l'apparence, se comporter et être considéré comme si l'on en était réellement titulaire. De même que la possession d'un bien permet de présumer la propriété, la possession d'un état ici de l'état d'enfant de tel(s) parent(s) permet de présumer la filiation5(*).

3. Selon le Dictionnaire du droit privé de Serge BRAUDO et d'Alexis BAUMANN, dans le droit de la famille, la notion de « possession d'état » désigne une présomption légale permettant d'établir la filiation d'une personne sur la base de certains faits constatés par sa famille et par son entourage relativement aux relations ayant existé entre elle et la personne dont elle se dit être le fils ou la fille.

4. D'autres auteurs ont essayé de donner une définition à cette notion. Pour monsieur Gérard CORNU « posséder un état c'est vivre conformément à cet état, l'ayant ou non (posséder l'état d'enfant légitime, c'est vivre comme un enfant légitime, qu'on le soit ou non. Posséder un état d'enfant naturel, c'est vivre comme un enfant naturel). Ici comme en matière patrimoniale, la possession est un fait qui a l'apparence du droit, mais qui peut, selon les cas, refléter fidèlement ou masquer l'état de droit (ici de la vérité), ambiguïté inhérente à la possession : posséder un état c'est vivre " comme si " on l'avait, même si on ne l'a pas »6(*). En droit des personnes et de la famille, la possession d'état correspond à l'apparence d'un état : c'est une vraisemblance, qui ne correspond pas toujours à la réalité7(*).

5. On l'appréhende généralement à partir de ses éléments constitutifs : le nomen, le tractatus et la fama. L'article 324 de l'Avant-projet de code camerounais des personnes et de la famille8(*) fait ressortir nettement ces différents éléments. Il dispose que : « La possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui indiquent les rapports de filiation et de parenté entre un enfant et la famille à laquelle il prétend appartenir, notamment :

a / l'enfant a toujours porté le nom du père qu'il prétend être le sien ;

b/ le père supposé l'a traité comme son enfant et a pourvu en cette qualité à son éducation, à son entretien, et à son établissement ;

c / l'enfant a été reconnu constamment pour tel dans la société ;

d / l'enfant a été reconnu pour tel par la famille ».

6. Le « Nomen » ou nom est le premier fait de possession9(*). Posséder un état, c'est d'abord au moins en général porter le nom correspondant à l'état que l'on prétend avoir. En droit positif camerounais, le nom de l'enfant est librement choisi par ses parents10(*). L'attribution d'un nom à l'enfant appartient concurremment à son père et à sa mère. Toutefois, en cas de désaccord, c'est au père que revient la charge d'attribuer un nom à sa progéniture. La liberté dans le choix du nom au Cameroun peut laisser croire que les parents peuvent choisir à leur convenance n'importe quel nom à l'enfant. En réalité, ce choix est orienté par le législateur. L'attribution d'un nom ou d'un prénom inconvenant et manifestement ridicule au regard de la loi, de la moralité publique, des coutumes ou croyances est interdite11(*). L'Avant-projet de code, pose lui également, le principe de la liberté de choix du nom de l'enfant par ses parents12(*). Il semble toutefois que l'Avant-projet de code n'assortit pas ce principe de conditions13(*). A notre avis, la liberté dans le choix du nom est une liberté canalisée. Les parents ne peuvent se permettre de choisir un nom à l'enfant lorsque celui-ci serait de nature à gêner son intégration dans la communauté à laquelle il appartient et risquerait, au demeurant, d'heurter les valeurs morales à la base de toute société humaine. L'ordonnance de 198114(*) dispose à cet effet que : « L'officier d'état civil est dans ce cas tenu de refuser de porter ce nom ou prénom dans l'acte15(*). Le nom de l'enfant est en effet le plus souvent un signe d'appartenance à une famille. Le fait de porter le nom d'un individu est une des manifestations sociales les plus caractéristiques du lien de filiation16(*). Mais, la règle n'est pas absolue. Le nom peut même résulter d'un hasard ou d'une inadvertance lors de la déclaration de naissance devant l'officier d'état civil17(*). De plus, il est susceptible de changement, de fluctuations. Dans ces conditions, il va de soi que le fait de ne pas ou de ne plus porter le nom d'un des parents n'exclut pas la possession d'état à son égard : par exemple, l'attribution à un enfant naturel du nom de sa mère qui l'a reconnu en premier lieu ne l'empêche nullement de se prévaloir de la possession d'état à l'égard de son père18(*). Il faut penser avec monsieur Messanvi FOLI que, ni l'erreur dans l'orthographe du nom, ni son changement n'empêche qu'il y'ait possession d'état. L'auteur estime en outre que le changement de nom ne prive pas l'enfant de la possession d'état constituée par le port du nom qu'il a abandonné19(*). Dans une perspicace analyse, madame Michelle GOBERT20(*) s'interroge sur les rapports qu'entretiennent aujourd'hui le nom et la possession d'état. Au sortir de celle-ci, on peut retenir que le « Nomen » est un indice sans grande pertinence. C'est probablement la raison pour laquelle l'ordonnance française n° 2005/759 du 4 juillet 2005 portant reforme de la filiation le classe en dernier lieu des principaux faits de la possession d'état21(*).Aussi, est-il l'élément le moins significatif de la possession d'état : elle peut exister sans lui, inversement, elle ne peut pas être constituée seulement de lui. Le nom n'est vraiment significatif que s'il est conforté par le tractatus22(*).

7. Le « tractatus » ou traitement est le second fait visé par l'Avant-projet de code. La possession d'état est fondée le plus souvent sur le comportement respectif des parents apparents : le fait pour des parents de traiter l'intéressé comme leur enfant et, réciproquement, pour celui-ci de les traiter comme ses père et mère23(*). « Traiter », est un terme générique qui englobe l'ensemble des relations parentales : communauté de vie, garde, surveillance, éducation, visites, hébergement, correspondance, manifestations d'intérêt24(*). Le comportement parental se reconnaît aussi au fait de pourvoir à l'éducation, à l'entretien et à l'établissement de l'enfant25(*) en qualité de père et (ou) de mère. Pareil comportement peut en effet s'expliquer par des raisons diverses, telle la charité ou la pitié et émaner de personnes qui n'ont qu'un lien de parenté éloigné voire pas de lien du tout avec l'enfant. Aussi, ne sera-t-il révélateur de la filiation que s'il est dépourvu de toute ambiguïté quant à la qualité de celui ou celle qui l'adopte26(*). « Par le tractatus, les possesseurs de l'état sont les acteurs de la filiation comme au théâtre, mais dans la vie, ils sont dans le personnage de la mère, dans le rôle du père. Ils jouent leur état. Ils l'incarnent. Le tractatus est le point fort de la possession : la maternité par les oeuvres, la paternité en acte, la parenté en action, la filiation en marche »27(*). Le tractatus est un élément très important28(*) de la possession d'état de sorte que la tendance des tribunaux, du moins français, est de refuser l'existence de la possession d'état quand cet élément fait défaut29(*). C'est certainement l'élément le plus riche et le plus probant30(*). Il est également à noter que le tractatus doit être réciproque. Il est l'oeuvre non seulement des parents, mais aussi de l'enfant. Cette réciprocité ne se conçoit toutefois qu'à partir d'un certain âge : tant que l'enfant est très jeune, force est de se contenter d'un tractatus « à sens unique »31(*). Et si le tractatus considéré isolément ne constitue pas une véritable possession d'état, il est souvent, sinon toujours, le support nécessaire de l'élément fama.

8. La « fama » (réputation ou renommé), est le troisième et dernier élément de la possession d'état retenu par l'Avant-projet de code. C'est le « qu'en dit-on ? » de la possession d'état32(*), le regard de l'entourage et de la société sur l'enfant. A la différence du tractatus qui exprimait une vision interne de la relation parentale, la fama est l'aspect social, c'est l'image externe du lien de filiation33(*). Celle qui se reflète dans l'opinion de l'entourage : membres de la famille, amis, voisins34(*)... Elle est l'oeuvre des tiers non des parents de l'enfant. L'enfant doit donc avoir été reconnu comme tel dans la société c'est-à-dire dans les milieux avec lesquels il s'est trouvé en contact. Notons ici une différence entre l'Avant-projet de code et le droit français. Le code à venir semble se contenter de la reconnaissance par l'entourage social ou familial. Par contre, la loi de 197235(*) en France admet aussi la reconnaissance par l'autorité publique. Peut donc être prise en considération l'opinion d'un représentant de l'administration, d'un maire, d'un commissaire de police, d'une assistance sociale, voire d'un juge36(*). Aussi, le fait que l'enfant ait été connu par les services de la sécurité sociale comme enfant à charge, le fait que les parents aient bénéficié des allocations familiales du chef de cet enfant peuvent valablement démontrer l'existence de ce troisième fait constitutif de la possession d'état.

9. Cette façon d'appréhender la possession d'état est par trop axée sur la filiation. Pourtant, il peut y avoir une possession d'état pour tous les éléments de l'état des personnes37(*). C'est la raison pour laquelle la définition formulée par monsieur LAUTOUR nous semble plus satisfaisante. Elle a le mérite d'être globalisatrice. Selon cet auteur, la possession d'état est « une situation de fait constituée par la possession prolongée d'une qualité juridique déterminée, c'est-à-dire ouvrant droit à un statut d'égalité civile que le législateur présume parfois à titre irréfragable, être conforme à la réalité dans le but d'assurer la stabilité de l'état et le respect de la situation établie et consacrée par l'opinion publique »38(*).

Ces diverses définitions nous prouvent une chose : la possession d'état est une notion complexe39(*)qui ne se laisse pas enfermer dans une formule. La possession d'état est à l'image de la vie et comme telle elle n'est pas simple40(*).

L'analyse de la possession d'état dans l'Avant-projet de code a un double intérêt : scientifique et sociologique.

Sur le plan scientifique, nous voulons à travers cette réflexion, contribuer à la rédaction du code camerounais des personnes et de la famille. En effet, plus de quarante ans après l'accession du Cameroun à l'indépendance, aucune réforme d'ensemble du droit des personnes et de la famille n'a été adoptée41(*). Les premiers textes d'envergure ont paru en 1966 et 1968 dans l'ex-Cameroun oriental42(*). La seconde réforme importante applicable dans l'ensemble du territoire est issue de l'ordonnance n° 81/02 du 29 juin 198143(*). Ce texte constitue encore aujourd'hui la principale source du droit des personnes et de la famille. L'intervention du législateur en matière familiale n'a donc été jusqu'ici qu'intermittente, partielle, voire parcellaire. Force est de reconnaître que le projet de loi portant code des personnes et de la famille viendra mettre fin au caractère disparate des textes en la matière et, surtout éviter, nous nous en réjouissons d'ailleurs, le recours au code civil français dans sa rédaction antérieure à 196044(*). La possession d'état peut jouer un rôle des plus importants en droit des personnes et de la famille. Nous comptons le mettre en exergue et attirer l'attention du législateur sur la nécessité d'accorder à celle-ci une plus grande place dans le droit positif camerounais. Le code en préparation est le lieu par excellence où pourront être formulées nos observations et propositions.

Sur le plan sociologique, ce thème nous permettra de mettre un accent particulier sur l'apport et l'importance des relations sociales humaines. La possession d'état est le reflet du comportement des individus dans la société. Les comportements sociaux s'avèrent être d'une grande utilité pour le droit. Durant nos recherches sur le terrain, nous avons fait le constat selon lequel, un bon nombre de personnes45(*) ignoraient ce qu'était la possession d'état. La question qui nous a été fréquemment posée était celle relative à la définition de la notion. Qui plus est, les implications juridiques de cette notion semblent être inconnues. Elle ne semble pas avoir fait l'objet d'un usage particulier devant nos juridictions. Nous sommes par conséquent parvenus à la conclusion qu'il fallait faire un effort dans la vulgarisation des conséquences juridiques attachées à cette notion.

10. Au regard de ce qui précède, la difficulté juridique que pose ce thème est celle de l'analyse des effets de la possession d'état en droit des personnes et de la famille. Il s'agit en effet, de mener une réflexion sur les implications de la notion de possession d'état. Quels sont les effets susceptibles d'être tirés de la possession d'état ? Quelles sont les conséquences juridiques possibles que nous pouvons tirer de la situation de fait, qu'est la possession d'état ? Quels sont les effets découlant de la possession d'état et qui pourraient, le cas échéant, être intégrés dans le futur code camerounais des personnes et de la famille ? Il s'agira aussi de procéder à l'identification et à l'appréciation de la loi applicable aux effets de la possession d'état en droit international privé de la filiation.

Ce travail ne se réduira pas au droit positif, encore moins aux dispositions de l'Avant-projet de code. Il s'agira de dépasser le cadre des textes pour rechercher des effets susceptibles de découler de la possession d'état. L'étude du droit prospectif camerounais des personnes et de la famille que nous entreprenions, ne peut et ne doit ignorer le droit positif. C'est la raison pour laquelle, nous ferons, le cas échéant, appel au droit comparé.

Pour atteindre les objectifs fixés par ce travail, une analyse des effets de la possession d'état en droit interne de la famille (TITRE I) précédera celle des effets de la possession d'état en droit international privé (TITRE II).

TITRE I

LES EFFETS DE LA POSSESSION D'ETAT EN DROIT INTERNE DE LA FAMILLE

11. Lorsque la possession d'état est constituée et prouvée, elle peut produire des effets utiles en droit interne de la famille. La possession d'état permet notamment d'assurer la paix et la tranquillité des familles. L'un de ses atouts est sa force conciliatrice et pacificatrice. Malgré ce statut, les effets attachés à la possession d'état par l'Avant-projet de code semblent être de moindre importance. Le projet de code n'octroie à cette notion que des effets limités. Le droit camerounais de la famille à venir pourrait pourtant tirer profit de cette notion en lui accordant un peu plus de place dans ses dispositions.

L'effet probatoire (CHAPITRE I) et l'effet consolidateur (CHAPITRE II) constituent l'essentiel des conséquences juridiques qu'on peut déduire de la possession d'état, en droit interne de la famille.

CHAPITRE I

L'EFFET PROBATOIRE DE LA POSSESSION D'ETAT

12. L'une des conséquences de la possession d'état est l'établissement du lien de filiation. On peut en effet prouver la filiation légitime par la possession d'état. C'est un effet classique qui a toujours été reconnu à cette notion. La possession d'état d'enfant légitime n'est pas un mode nouveau de preuve de la filiation dans les sociétés africaines. On peut même se permettre de dire que c'est presque le seul mode de preuve que connaissaient ces sociétés. En tout cas, la preuve par titre dans les droits traditionnels n'existait pas du fait même de l'inexistence des états civils dans les sociétés africaines avant la colonisation. C'est au niveau de la filiation naturelle que l'effet probatoire de la possession d'état tarde encore à être admis. Le futur code camerounais de la famille, comme l'ancien article 320 du code civil français46(*), ne considère la possession d'état que comme un moyen de preuve de la filiation de l'enfant conçu ou né dans le mariage. Il n'y a pourtant pas de raisons sérieuses justifiant le choix des rédacteurs de l'Avant-projet de code. « Le fait qu'aujourd'hui le concubinage émerge de plus en plus nettement des sphères ténébreuses du non droit, le fait encore que le droit de la filiation jette les bases d'un " vitalisme juridique" en reconnaissant le primat de la réalité vécue, invitent à placer la vieille idée de DEMOLOMBE dans une problématique nouvelle »47(*).

13. Même si le code en préparation n'accorde aucun effet probant à la possession d'état d'époux, le mariage peut dans une certaine mesure être prouvé par ce moyen. L'effet probatoire de la possession d'état s'étend par conséquent aussi bien à la filiation (SECTION I) qu'au mariage (SECTION II).

SECTION I. LA PREUVE DE LA FILIATION PAR LA POSSESSION

D'ETAT

14. Si on peut comprendre qu'à un moment donné la possession d'état n'était pas considérée comme un mode de preuve de la filiation naturelle et était par contre largement admis à l'endroit de la filiation légitime ; on ne peut aujourd'hui tolérer pareil raisonnement. De même qu'il est reconnu à la possession d'état d'enfant légitime un effet probatoire (§ 1), pareillement, la possession d'état d'enfant naturel devrait être un moyen d'établir la filiation naturelle (§ 2).

§ 1. LA PREUVE DE LA FILIATION LEGITIME PAR LA POSSESSION D'ETAT

L'examen des conditions de preuve de la filiation légitime par la possession d'état (A) précédera celui des modalités d'établissement (B).

A. LES CONDITIONS DE PREUVE DE LA FILIATION LEGITIME PAR

LA POSSESSION D'ETAT

15. L'effet probatoire de la possession d'état ne joue en matière de filiation légitime que lorsque les actes d'état civil font défaut : c'est la condition préalable (1). La possession d'état d'enfant légitime établie en même temps la filiation légitime maternelle et la filiation légitime paternelle. C'est dire qu'elle est indivisible (2).

1. La condition préalable : la défaillance des actes d'état civil48(*)

16. Le mode normal de preuve de la filiation légitime est l'acte d'état civil. Ce n'est qu'exceptionnellement que la possession d'état peut être invoquée à titre de preuve ; ainsi que l'atteste les dispositions de l'Avant-projet de code relatives à la preuve de la filiation dans le mariage. L'article 322 de ce texte préparatoire dispose que :

« (1) La filiation tant maternelle que paternelle se prouve par les actes d'état civil.

(2) À défaut d'acte d'état civil, la possession constante de l'état d'enfant peut suffire à établir la filiation ».

L'article 332 renchérit en disposant que :

« (1) La filiation d'un enfant légitime se prouve :

- par l'acte de naissance inscrit sur le registre d'état civil ;

- par l'acte de mariage de ses père et mère ;

(2) À défaut de l'acte de naissance, la filiation peut être établie par la possession constante de l'état d'enfant légitime ».

17. Il s'agit en réalité d'une application de la théorie de la subsidiarité en droit de la famille. La possession d'état est utilisée uniquement comme un moyen de secours. C'est l'ultime recours dont dispose l'enfant légitime pour pallier à l'absence de l'acte de naissance. C'est dire que, l'invocation de la possession d'état comme mode de preuve de la filiation légitime est subordonnée à la défaillance des procédés normaux de preuve. On ne peut faire appel à la possession d'état lorsqu'on dispose d'un titre de naissance, voire d'un acte de mariage.

On notera que le texte camerounais emboîte le pas non seulement au droit français de la filiation49(*), mais aussi au droit de la famille de certains pays africains comme le Sénégal, le Togo, pour ne citer que ces exemples. L'article 183 du code de la famille du Togo dispose que : « la filiation des enfants nés pendant le mariage se prouve par les actes de naissance inscrits sur les registres de l'état civil ». L'article 184 du même code ajoute que : « A défaut de ce titre, la possession constante de l'état d'enfant né dans le mariage suffit ». C'est en substance la même chose qu'on lit dans le code sénégalais de la famille50(*).

18. La possession d'état d'enfant légitime établit la filiation simultanément à l'égard du père et à l'égard de la mère. En réalité, il n'y a de possession d'état d'enfant légitime qu'autant qu'elle rattache l'enfant indivisiblement à ses père et mère.

2. l'indivisibilité de la possession d'état d'enfant légitime

19. La filiation légitime maternelle et la filiation légitime paternelle s'établissent en même temps par la possession d'état. C'est l'une des particularités de ce moyen probatoire. Elle rattache inséparablement l'enfant légitime à ses deux parents. De même que la filiation légitime qui est indivisible51(*), de même la possession d'état d'enfant légitime est elle-même indivisible52(*). Elle prouve cumulativement la filiation paternelle et la filiation maternelle. L'établissement des deux types de filiation par la possession d'état ne doit pas s'effectuer séparément.

20. La seule spécificité de la possession d'état d'enfant légitime réside dans son indivisibilité naturelle. La possession d'état d'enfant légitime est en effet, par définition même, nécessairement double lien : lien établi entre l'enfant et les deux époux, puisque posséder l'état d'enfant légitime, c'est être traité comme un enfant légitime. Posséder l'état d'enfant légitime de Madame X, c'est nécessairement, tout à la fois être considéré comme le fils de Madame X, et comme le fils de Monsieur X. Par essence, la possession d'état d'enfant légitime rattache indivisiblement l'enfant à ses deux parents et ne peut s'établir à l'égard d'un seul. En effet, soit elle existe, et c'est à l'égard des deux parents, soit elle existe qu'à l'égard d'un des époux, et elle n'est pas, alors, possession d'état d'enfant légitime mais possession d'état d'enfant naturel53(*). Si un enfant a, par exemple, par le truchement de la possession d'état établi sa filiation maternelle, il n'a plus besoin d'invoquer le même moyen pour prouver sa filiation paternelle. Elle s'est trouvée établie lors de l'établissement de la filiation à l'égard de la mère.

Les conditions de preuve de la filiation légitime par la possession d'état remplies, l'invocation de la possession d'état comme moyen de preuve doit se faire suivant des modalités précises.

B. LES MODALITES DE PREUVE DE LA FILIATION LEGITIME PAR LA

LA POSSESSION D'ETAT

21. Les modalités de preuve renvoient à ce qu'il y a lieu de faire pour prouver la filiation légitime par la possession d'état. Il ressort des dispositions de l'Avant-projet de code, qu'il faut réunir suffisamment à son actif les éléments constitutifs de la possession d'état d'enfant légitime (1), avant de s'assurer que la possession d'état dont on se prévaut a une certaine durée (2).

1. La réunion suffisante des éléments constitutifs de la possession d'état

d'enfant légitime

22. L'article 324 de l'Avant-projet de code dispose que : « La possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui indiquent les rapports de filiation et de parenté entre un enfant et la famille à laquelle il prétend appartenir, notamment :

a) l'enfant a toujours porté le nom du père qu'il prétend être le sien ;

b) le père supposé l'a traité comme son enfant et a pourvu en cette qualité à son éducation, à son entretien et à son établissement ;

c) l'enfant a été reconnu constamment pour tel dans la société ;

d) l'enfant a été reconnu pour tel dans la famille ».

23. Nomen, tractatus et fama, tels sont les trois éléments que l'Avant-projet de code a retenu comme faits constitutifs de la possession d'état. La preuve de la filiation légitime par la possession d'état passe par leur établissement. Il faut avant toute chose prouver que ces éléments sont constitués. C'est vrai qu'en lisant les dispositions de l'article 324 de l'Avant-projet de code, on a plutôt l'impression que les éléments énumérés sont ceux de la possession d'état à l'égard du père légitime54(*). Néanmoins, il ne faut pas perdre de vue qu'il y a une indivisibilité qui caractérise la possession d'état d'enfant légitime. Les faits constitutifs indiqués établissent par ricochet la filiation à l'égard de la mère légitime.

24. Deux questions au moins demeurent posées. D'abord, les faits énumérés sont-ils limitatifs ? Nous ne le pensons pas. L'énumération faite par l'Avant-projet de code n'est qu'énonciative et non limitative55(*). D'ailleurs, la législation française sur la filiation56(*) elle-même estime qu'il ne s'agit que des faits principaux. Ce qui laisse supposer qu'il peut en exister d'autres qui ne seraient que secondaires57(*). La possession d'état peut le cas échéant, s'appuyer sur d'autres éléments que ceux qui sont énumérés (album de photos, médailles, correspondances, autres souvenirs de famille)58(*). En second lieu, on peut se demander si ces éléments principaux sont exigés cumulativement. Ici aussi, la réponse est négative. Les faits analysés ne doivent pas nécessairement être tous réunis pour qu'il y ait possession d'état59(*). On peut tenir compte de ces éléments pris globalement ou séparément. Tout dépend de la consistance des éléments de preuve en présence. On estime que l'essentiel est que les faits réunis soient suffisants pour emporter la conviction des juges. En tout état de cause, à ce niveau, les tribunaux auront un large pouvoir d'appréciation.

Une possession d'état très brève, qui ne s'inscrit pas dans la durée ne peut établir le lien de filiation. En sus de la réunion suffisante des éléments constitutifs, la possession d'état doit avoir une certaine permanence.

2. Le prolongement dans le temps de la possession d'état

25. A l'instar de la possession d'un bien, qui doit être exempte de vices, la possession d'état doit présenter certaines qualités pour permettre l'établissement du lien de filiation60(*). Pour établir la filiation légitime, celui qui se prévaut de la possession d'état doit pouvoir justifier qu'elle est constante. Cette exigence ressortit clairement des dispositions de l'Avant-projet de code61(*).

26. Une difficulté subsiste dans l'appréhension de cette modalité. Selon le dictionnaire Encarta, le terme constant désigne : « ce qui n'est pas interrompu, se dit de ce qui se répète à un rythme rapide, qui est durable sans modification ». La constance, c'est la persévérance, la stabilité et l'invariabilité de quelque chose. Elle est synonyme d'inébranlable, d'inflexible, de régulier, de durable voire d'immuable. La difficulté dans la mise en oeuvre de cette exigence a poussé le législateur français à lui préférer l'appellation « continue »62(*). La constance qu'exige l'Avant-projet de code paraît une évidence : « appliquée à un état, la possession suppose nécessairement une durée. Fondée sur une façon de vivre, elle correspond à une tranche de vie. Elle est biographique. Qui la restitue se penche sur un passé lié au présent, pour reconstituer un film de l'existence, une rétrospective continuée jusqu'à l'actualité, sans failles toujours »63(*).

27. Continuité ou constance, la possession d'état exige une certaine permanence, une certaine durée, un prolongement dans le temps. Sur ce caractère même, il ne faudrait pas trahir la souplesse du futur code camerounais des personnes et de la famille. La constance n'est nécessairement ni la périodicité, ni la régularité. Elle n'est jamais que l'épreuve dans le temps de la réalité de la possession. L'essentiel est que, dans le temps litigieux de la possession, il n'y ait pas ces trous et ces interruptions qui démasquent l'absence de lien, qu'il y ait au contraire ces signes positifs qui, même inégalement répartis au long de la tranche contestée, indiquent le lien, le fil de son existence64(*).

Ce caractère habituel, n'est pas forcément lié à la communauté de vie. La communauté de vie est sans doute le support naturel et même privilégié de la possession d'état. Elle n'en est pas la condition sine qua non. Un enfant peut parfaitement jouir de la possession d'état d'enfant légitime, quand bien même il ne vit qu'avec l'un des époux par suite de leur séparation65(*).

28. La constance de la possession d'état pose encore la question de ses extrémités temporelles : doit-elle remonter à la naissance et exister encore le jour où l'on s'en prévaut ?66(*) Un certain nombre d'auteurs français estiment que tout dépend du rôle que la possession d'état est appelée à jouer et du moment où le problème est soulevé67(*). Quand la possession d'état est invoquée comme preuve de la filiation, il serait raisonnable d'exiger qu'elle remonte à la naissance. Mais, il n'est certainement pas nécessaire qu'elle soit actuelle : pareille condition enlèverait en effet tout intérêt à un mode d'établissement de la filiation qui s'avère particulièrement utile lorsque celui qui se comportait comme son parent est décédé. Aussi est-il parfaitement légitime d'affirmer que « la possession d'état doit produire ses effets alors même qu'elle aurait cessé depuis quelque temps lorsque l'instance est introduite »68(*).

29. En droit français de la filiation, la possession d'état d'enfant est dotée d'une « valeur probante incomparable », « souple », « vivante », « complète »69(*). Elle permet l'établissement aussi bien de la filiation légitime que de la filiation naturelle. Pour le moment, le code camerounais de la famille à venir est resté muet sur la question de la preuve de la filiation hors mariage par la possession d'état.

§ 2. LA PREUVE DE LA FILIATION NATURELLE PAR LA POSSESSION

D'ETAT : LE SILENCE DE L'AVANT-PROJET DE CODE

30. Le projet de code des personnes et de la famille, n'a malheureusement pas traité la question de la preuve de la filiation naturelle par la possession d'état. La possession d'état est un mode exclusif et limitatif d'établissement de la filiation des enfants nés ou conçus dans le mariage. C'est dire que, l'enfant naturel ne peut s'en prévaloir. Cette déduction est la résultante du vide juridique créé par le droit positif camerounais. Aucune disposition expresse70(*) encore moins implicite, n'étend cet effet probant de la possession d'état à la filiation naturelle. Les seuls modes de preuve de cette filiation sont : la reconnaissance et l'action en recherche de paternité. Comment interpréter le silence des rédacteurs ? Pourquoi l'admettre à l'endroit de la filiation légitime et le denier à la filiation des enfants conçus et nés hors mariage ? Nous préférons penser qu'il s'agit plutôt d'une inadvertance des concepteurs de l'Avant-projet de code que d'une volonté claire de ceux-ci.

Un plaidoyer en faveur de l'établissement de la filiation naturelle par la possession d'état (A) débouchera sur un essai de systématisation (B).

A. LE PLAIDOYER EN FAVEUR DE L'ETABLISSEMENT DE LA FILIATION

NATURELLE PAR LA POSSESSION D'ETAT

Il est indéniable que les arguments tirés de l'idée de justice et d'égalité en droit de la filiation (1) et l'exemple des droits étrangers proches du droit camerounais de la famille (2) sauront convaincre les rédacteurs du futur code à reconsidérer leur position.

1. Les arguments tirés de l'idée de justice et d'égalité en droit de la filiation

31. Le droit romain distinguait déjà les enfants naturels et les enfants légitimes. La paternité légitime était établie grâce au jeu de la présomption de paternité « pater is est ... », présomption conçue alors à la fois comme un droit et comme une obligation pour le mari, seul qualifié pour agir en désaveu par tous moyens de preuve et sans condition de délai. La filiation naturelle ne produisait effet, à l'égard du père, que par l'effet de l'adrogation, donc avec le consentement du fils. Du côté maternel en revanche, elle produisait, du moins à l'origine, les mêmes effets que la maternité légitime71(*). Sous l'influence du christianisme, la distinction évolua pour aboutir, au détriment des enfants naturels, à une véritable inégalité72(*).

32. Sous l'ancien droit, si la filiation naturelle pouvait être facilement établie, elle ne conférait aux « bâtards » qu'un simple droit à aliments. Le droit intermédiaire, pourtant gagné par l'idée d'égalité, ne sut pas la consacrer dans la filiation : il accru les droits des enfants naturels mais rendit plus difficile l'établissement du lien73(*). Inspiré par la conception patriarcale de la famille de Bonaparte, le code civil devait, tout en améliorant la condition des enfants naturels, renouer avec l'ancien droit, en manifestant à l'encontre de l'illégitimité une hostilité, plus ou moins profonde74(*).

33. Ce rappel historique nous montre que, de tout temps, la filiation naturelle a toujours été traitée différemment de la filiation légitime. Le législateur préférant celle-ci à celle-là. La situation qui vient d'être décrite n'est pas différente de celle que vit les enfants naturels au Cameroun. La condition juridique de l'enfant né hors mariage est largement inférieure à celle de l'enfant conçu ou né dans le mariage. Au Cameroun, il y a une différence de traitement suivant la catégorie d'enfant. On peut ainsi opérer une hiérarchisation suivant l'importance : l'enfant légitime qui occupe le sommet de la pyramide, l'enfant adoptif (plénitude), l'enfant naturel reconnu, l'enfant naturel simple, l'enfant adultérin a patre, l'enfant adultérin a matre (qui ne peut être reconnu par le père naturel qu'après désaveu par le mari de la mère en justice), l'enfant incestueux qui ne peut être reconnu, l'enfant issu d'un viol qui lui-même ne peut pas être reconnu par son auteur75(*). Sur le plan successoral, le droit camerounais est resté en retrait par rapport au droit français qui a renforcé la matière avec sa loi du 3 Janvier 1972. En effet, l'enfant naturel n'a de droit dans la succession de son père ou de sa mère que si la filiation a été établie76(*). A considérer que la filiation soit établie, les droits successoraux de l'enfant naturel n'en demeure pas moins limités par rapport à ceux de l'enfant légitime. En présence d'enfant légitime, l'enfant naturel n'aura droit qu'à la moitié de ce qu'il aurait pu avoir s'il avait lui-même été légitime77(*). L'enfant naturel représenterait une menace pour la famille légitime. Il faut limiter au maximum l'établissement de sa filiation78(*). Il ne faudrait pas qu'il vienne concurrencer les enfants issus d'un ménage légitime. C'est la traduction même de l'ineffectivité en droit camerounais de la famille du principe d'égalité. Ce principe voulu par les textes fondateurs79(*) est en souffrance. Il est mis à mal en droit de la famille en général et en droit camerounais de la filiation en particulier80(*).

34. Or, cette inégalité, cette discrimination, est critiquée comme inefficace, injuste et source d'incohérence81(*). On conçoit mal que la défense de l'institution du mariage à la supposer nécessaire puisse reposer sur une injustice. La possession d'état d'enfant naturel, certes différente de la possession d'état d'enfant légitime, a elle aussi un effet probatoire. Elle peut être invoquée par l'enfant naturel dans les mêmes circonstances que le ferait l'enfant légitime.

35. Depuis la convention de New York du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant82(*), aucune différenciation ne devrait plus être opérée entre les enfants. Cette assimilation paraît d'autant plus normale que l'on imagine mal des raisons qui conduiraient à refuser à la possession d'état d'enfant naturel des effets reconnus à la possession d'état d'enfant légitime83(*). Puisque la possession d'état est un mode d'établissement de la filiation légitime, pourquoi ne le serait-elle pas de la filiation naturelle84(*) ? Sans doute, une possession d'état d'enfant naturel ne peut-elle exactement se calquer sur une possession d'état d'enfant légitime puisqu'il n'existe alors aucune « famille »85(*) au sein de laquelle l'enfant pourrait prendre place. Mais il n'y a là qu'un obstacle technique. Les caractéristiques essentielles restent les mêmes. Donner à un enfant tout l'amour d'un père ou d'une mère sans que personne ne songe à nier la réalité du lien de filiation, n'est-ce pas manifester avec certitude l'existence de données biologiques ?86(*)

36. L'article 2 de la convention de 1989 interdit que l'enfant soit l'objet d'aucune forme de discrimination. Cet article, interdit notamment qu'un traitement différent soit réservé aux enfants légitimes et aux enfants naturels. On ne peut alors permettre à l'enfant légitime d'établir sa filiation par la possession d'état et le refuser à l'enfant naturel. Il s'agit d'un mode de preuve qui peut être utilisé indistinctement dans les deux types de filiation. L'article 7 de la même convention pose encore le principe selon lequel, l'enfant a dans la mesure du possible le droit de connaître ses parents et d'être élevé par eux. On parle communément ici d'un droit pour l'enfant à la connaissance de ses origines. L'enfant naturel a donc le droit de connaître son père. A défaut d'une reconnaissance, ou de l'exercice d'une action en recherche de paternité, il doit pouvoir bénéficier des vertus de la possession d'état. Toute tentative du législateur de limiter les modes d'établissement de la filiation naturelle, conduirait à nier l'effectivité du droit pour l'enfant de connaître ses origines. Ce qui est en soi une injustice criarde et une violation de la convention de New York de 1989.

37. Cette situation d'injustice risque d'être réalisée si l'Avant-projet de code est finalement adopté dans ses dispositions actuelles. En réalité, une difficulté peut surgir après la mort du père naturel, lorsque l'enfant prétend venir à la succession. En effet, le « de cujus » a pu, par ignorance ou négligence, ne pas reconnaître son enfant. De plus, sa reconnaissance peut demeurer ignorée (hypothèse du testament non découvert) ou encore les registres de l'état civil ont pu disparaître dans une catastrophe87(*). L'action en recherche de paternité naturelle n'étant plus possible, la situation de l'enfant naturel s'avère très précaire. Sans l'établissement du lien de filiation il ne peut venir à la succession. Comment remédier juridiquement à cette situation ? Les modes de preuve que constituent l'acte de reconnaissance et l'expédition du jugement sanctionnant l'action en recherche de paternité n'étant plus utilisables, une possession d'état continue de l'état d'enfant naturel devrait permettre à titre subsidiaire l'établissement de la filiation naturelle.

Certaines législations, ont consacré l'effet probatoire de la possession d'état à l'égard de la filiation naturelle. Le futur code de la famille pourrait s'en inspirer.

2. L'exemple des droits étrangers proches du droit camerounais de la famille

38. Le Cameroun, le Gabon, le Sénégal et la France se fondent dans ce que nous pouvons appeler le « cousinage juridique »88(*). Les règles juridiques françaises se retrouvent peu ou prou dans les législations des pays africains ci-dessus. Pendant que ces pays posent avec de plus en plus de précision le principe de la preuve de la filiation naturelle par la possession d'état, le Cameroun est encore à la traîne. La possession d'état permet d'établir la filiation de l'enfant naturel en France. Cet effet singulier de la possession d'état s'entrevoit également dans les législations du Sénégal et du Gabon89(*).

39. L'évolution du droit français de la filiation en ce sens est allée de la non consécration à la consécration. La valeur probante de la possession d'état à l'égard de la filiation naturelle y a été acquise plus ou moins récemment90(*). Au XIXe siècle, le rôle de la possession d'état en matière de filiation naturelle avait suscité une controverse. Contrairement à la thèse de DEMOLOMBE, qui soutenait qu'elle constituait en elle-même un mode d'établissement de cette filiation, la jurisprudence avait à ce propos adopté une attitude négative91(*). Le fait est qu'à l'époque, l'idée et la notion de possession d'état s'accordaient mal à l'esprit et aux techniques du droit de la filiation naturelle92(*). La reforme du 3 janvier 1972, et le rôle considérable conféré par elle à la possession d'état, incita divers auteurs à proposer d'admettre cette dernière comme mode de preuve autonome de la filiation naturelle93(*). Cette opinion, satisfaisante, correspondait à un développement logique de l'orientation du droit de la filiation et se révélait fidèle à une évolution tendant à rapprocher celui-ci du réel et à améliorer la situation des enfants naturels94(*). Mais en raison de l'état des textes issus de la reforme de 1972, et tout spécialement de l'article 334-8 du code civil qui prévoyait seulement l'établissement légal de la filiation naturelle « soit par reconnaissance volontaire, soit par déclaration judiciaire, à la suite d'une action en recherche de paternité ou de maternité », cette thèse évidemment liée à une conception dynamique, voire sociologique, de l'interprétation des lois nouvelles a suscité de solides résistances95(*).

40. Les arrêts de la première chambre civile de la Cour de cassation en date du 8 mai 1979 et de l'Assemblée plénière en date du 9 juillet 1982 donnèrent l'occasion aux hauts juges français de se prononcer96(*). En l'espèce, au décès du sieur Law King qui, originaire de Chine, s'était installé à la Réunion en 1927 et y était décédé en 1972, sa femme et ses enfants légitimes avaient contesté à un enfant naturel du défunt une vocation successorale à ce titre, faute de reconnaissance par le père et faute, pour l'enfant, de pouvoir agir en recherche de paternité naturelle, les délais de l'action étant expirés. Pourtant, adoptant une interprétation audacieuse, la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion accueillit, par un arrêt du 1er octobre 1976, l'action intentée par l'enfant en vue de faire constater qu'il justifiait d'une possession d'état continue d'enfant naturel. C'est cette décision que par le premier arrêt, la première chambre civile a cassé, en relevant que cette action était irrecevable. A nouveau saisie, mais sur renvoi et autrement composée, la Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion a résisté à la Cour de cassation. Et tandis qu'un nouveau pourvoi allait être tranché par la haute cour, le législateur est intervenu. C'était sans doute la voie la plus appropriée. Une proposition de loi de monsieur Jean foyer97(*) fut suivie du vote de la loi du 25 juin 198298(*), de sorte que l'article 334-8 du code civil est désormais rédigé en ces termes : « La filiation naturelle est légalement établie par reconnaissance volontaire » (alinéa 1er). Elle « peut aussi se trouver établie par la possession d'état ou par l'effet d'un jugement » (alinéa 2)99(*).

41. Cela fait plus d'un quart de siècle que la possession d'état est considérée en France comme un mode de preuve de la filiation naturelle. Le législateur français, par la loi n° 82/536, en introduisant la possession d'état comme moyen de preuve de la filiation naturelle, maternelle ou paternelle, a confirmé l'expansion du principe d'égalité des filiations légitime et naturelle, sur le terrain de leurs modes d'établissement100(*).

42. L'une des innovations majeures de certains droits africains nouveaux réside dans le fait que la possession d'état est devenue une preuve non judiciaire de la filiation naturelle101(*). C'est une rupture avec la tradition léguée par le Code civil français et le Code belge qui, à l'origine, n'utilisait ce mode de preuve que pour établir la seule filiation légitime. Le réalisme qui domine certaines législations africaines a conduit à conférer à la possession d'état le même rôle probatoire en matière de filiation maternelle naturelle qu'en matière de maternité légitime. Les législations qui attribuent à la possession d'état un rôle probatoire le disent expressément dans les textes . C'est ainsi que l'article 199 du code de la famille sénégalais, dispose que : « Pour l'établissement de la filiation maternelle, la possession d'état est établie en prouvant que l'enfant, de façon constante, s'est comporté, a été traité par la famille et considéré par la société comme étant né de la femme qu'il prétend être sa mère ». Ce texte qui ne contient aucune distinction vise à la fois la maternité naturelle et la maternité légitime. Il établit sans contestation possible le rôle probatoire de la possession d'état en matière de maternité naturelle. La même règle est aménagée dans l'article 424 du Code civil gabonais qui énonce que : « A défaut d'acte de naissance portant indication du nom de la mère ou de reconnaissance faite par la mère, la filiation maternelle d'un enfant naturel se prouve par la possession continue de l'état d'enfant ... ». Certes, on constate à la lecture de ces textes que seule la maternité naturelle est visée, mais ces législations ont au moins le mérite d'admettre la preuve de la filiation hors mariage par la possession d'état. En réalité, la paternité naturelle peut et doit aussi s'établir par ce moyen.

43. L'admission de la possession d'état comme moyen de preuve de la filiation naturelle, peut également se prévaloir des enseignements du droit espagnol. Les articles 129 à 138 du Code civil de 1889 ne prévoient que deux modes d'établissement de la filiation naturelle : la reconnaissance, volontaire ou forcée. Cependant, les impérieuses nécessités de la pratique ont conduit le législateur102(*) à admettre, à côté de l'action traditionnelle en recherche de paternité naturelle simple, une action purement déclarative qui vise à obtenir une décision de juridiction gracieuse et qui doit être fondée sur l'existence d'écrits divers impliquant sans doute possible la volonté du père à reconnaître son enfant, soit, sur la preuve d'une possession d'état constante au bénéfice de celui-ci103(*).

Au regard de ce qui précède, le silence de l'Avant-projet de code sur l'effet probatoire de la possession d'état d'enfant naturel, apparaît comme un oubli. C'est la raison pour laquelle nous ferons un essai de systématisation de l'effet probatoire de la possession d'état en matière de filiation naturelle.

B. L'ESSAI DE SYSTEMATISATION DE L'EFFET PROBATOIRE DE

LA POSSESSION D'ETAT D'ENFANT NATUREL

La preuve de la filiation naturelle par la possession d'état peut être institutionnalisée (1). Cet effort d'institutionnalisation sera suivi de l'analyse des modalités de preuve de la filiation hors mariage par la possession d'état (2).

1. L'institutionnalisation de la preuve de la filiation naturelle par la possession

d'état

44. Dans le projet de code camerounais des personnes et de la famille, la filiation de l'enfant naturel s'établit par reconnaissance de son père géniteur ou par une action en recherche de paternité. L'enfant naturel n'a pas d'autres moyens que ceux-là. Il peut cependant arriver des cas où l'enfant n'a pas été reconnu ou alors qu'il ne soit plus dans les délais pour agir en recherche de paternité. Faute d'acte de naissance, ce dernier se trouvera dans l'incapacité de prouver son lien de filiation. C'est à ce moment que peut intervenir la possession d'état. Comment d'ailleurs attribuer un rôle probatoire à l'acte de reconnaissance, aveu d'un moment, et le refuser à la possession d'état, aveu permanent manifesté par des liens affectifs et matériels ?104(*)

L'article 341 de l'Avant-projet de code dispose que : 

« (1) La filiation naturelle résulte à l'égard de la mère du seul fait de l'accouchement.

(2) À l'égard du père, elle est établie conformément aux dispositions des articles 342 et suivants du présent code ». Les articles 342 et suivants de l'Avant-projet de code sont relatifs à la reconnaissance devant l'officier d'état civil, à la reconnaissance judiciaire et à l'action en recherche de paternité naturelle.

Dans l'optique d'intégrer la possession d'état au rang des modes de preuve de la filiation hors mariage, nous suggérons que les articles 341et 342 du code en préparation soient rédigés ainsi qu'il suit :

Article 341 nouveau : « La filiation naturelle résulte :

(1) A l'égard de la mère du seul fait de l'accouchement ;

(2) A l'égard du père, elle est légalement établie par reconnaissance volontaire ou par une action judiciaire en recherche de paternité ;

(3) A défaut, la filiation naturelle peut aussi se trouver légalement établie par la possession d'état ».

Article 342 nouveau : « (1) Pour l'établissement de la filiation maternelle, la possession d'état est établie en prouvant que l'enfant, de façon constante, s'est comporté, a été traité par la famille et considéré par la société comme étant né de la femme qu'il prétend être sa mère ;

(2) La possession d'état à l'égard du père naturel est établie en prouvant que, constamment :

- l'enfant a porté le nom du père dont il prétend descendre ;

- le père l'a traité comme son enfant et a pourvu, en cette qualité, à

son éducation, à son entretien et à son établissement ;

- il a été reconnu pour tel par la société ;

- il a été traité comme tel par la famille ;

- l'autorité publique le considère comme tel ».

45. Attendu que les modalités de mise en oeuvre de la possession d'état d'enfant naturel ne sont pas totalement identiques à celles de la possession d'état d'enfant légitime, il s'avère nécessaire de faire quelques précisions.

2. Les modalités de preuve de la filiation naturelle par la possession d'état

46. Les éléments constitutifs de la possession d'état d'enfant naturel n'ont rien d'original. Il s'agit pour l'essentiel de la trilogie classique : le nomen, le tractatus et la fama. Pour l'établissement de la possession d'état, l'enfant naturel doit avoir porté, selon les cas, le nom de la mère ou de son père géniteur. Ses prétendus parents doivent l'avoir traité comme leur enfant. Et bien entendu, l'image externe du lien de filiation ne sera pas négligeable. La possession d'état doit encore s'inscrire dans la durée. Autrement dit, une possession d'état qui n'a pas une certaine permanence, ne pourra servir de preuve à la filiation naturelle.

47. Grâce à la sécurité qu'elle confère à son titulaire, le titre de naissance, reste le principal moyen de preuve de la filiation. L'effet probatoire de la possession d'état d'enfant naturel ne peut être invoqué qu'en l'absence de ce dernier. Comme dans la filiation légitime, il y aura une subsidiarité qui conditionnera la preuve de la filiation naturelle par la possession d'état.

48. À la différence cependant de la possession d'état d'enfant légitime qui est indivisible et rattache l'enfant à ses deux parents, la possession d'état d'enfant naturel est caractérisée par une divisibilité essentielle. C'est dire que la possession d'état d'enfant naturel n'établit pas en même temps la filiation maternelle et la filiation paternelle. Celles-ci s'établissent séparément.

Contrairement aux dispositions actuelles de l'Avant-projet de code, le mariage, gage de stabilité dans la famille peut aussi, et ce dans une certaine mesure, être prouvé par la possession d'état.

SECTION II. LA PREUVE DU MARIAGE PAR LA POSSESSION

D'ETAT

49. Le système de preuve du mariage dans l'Avant-projet de code est celui de la preuve préconstituée. C'est ainsi que « nul ne peut réclamer le titre d'époux et les effets civils du mariage s'il ne présente un acte de célébration de mariage inscrit sur le registre d'état civil »105(*). Dans le même ordre d'idée, il est clairement énoncé dans le projet de code que la possession d'état ne peut dispenser ceux qui l'invoqueront de présenter l'acte de célébration du mariage devant l'officier d'état civil106(*).

50. Ce n'est là, à notre avis, qu'un principe qui peut admettre une exception. L'effet probatoire attaché ici à la possession d'état est assez singulier pour que nous nous penchions de prime abord sur les conditions de son invocation (§ 1). Une fois ces conditions fixées, il s'avère nécessaire de dire comment est-ce qu'on doit s'y prendre pour prouver le mariage par la possession d'état (§ 2).

§ 1. LES CONDITIONS D'INVOCATION DE L'EFFET PROBATOIRE DE LA

POSSESSION D'ETAT MATRIMONIAL

L'effet probatoire attaché à la possession d'état ne peut être invoqué que par une catégorie de personnes (A) et dans des circonstances bien déterminées (B).

A. LES CONDITIONS D'INVOCATION QUANT AUX PERSONNES

Les personnes admises à invoquer la possession d'état pour prouver le mariage sont les enfants en mal de légitimité (2). Les époux, principaux concernés ne sont pas autorisés à y recourir (1).

1. L'exclusion des époux

51. Les époux ne peuvent quelque soit les circonstances prétendre prouver le mariage par la possession d'état. Il est vrai qu'avant le système de la preuve préconstituée introduite en France par l'ordonnance de Blois de 1579, elle même inspirée des décisions du Concile de Trente, le mariage résultait de la volonté des époux et de leur cohabitation et que la preuve en était apportée le plus souvent par la possession d'état107(*). Mais depuis l'ordonnance sus indiquée, les époux ne peuvent prouver leur mariage qu'en présentant l'acte de célébration dudit mariage108(*).

52. La possession d'état est une situation de fait créée en grande partie par les époux eux-mêmes. S'ils ne sont pas admis à prouver leur mariage par la possession d'état, c'est dans le strict souci d'éviter des cas de fraude. En effet, des gens vivant maritalement : les concubins, pourraient trop facilement l'invoquer pour établir faussement qu'ils sont mariés109(*). La fraude est par contre moins envisageable lorsque ce sont les enfants en mal de légitimité qui invoquent la possession d'état d'époux.

2. L'admission des enfants en mal de légitimité

53. La preuve du mariage est importante pour les enfants issus de l'union conjugale ; car le mariage de leurs parents est l'un des éléments d'où résultera la démonstration de leur filiation légitime. C'est le mariage des parents qui confère la légitimité aux enfants. Or, il peut arriver que cette légitimité soit mise en doute. Les enfants dont la légitimité est ainsi contestée doivent nécessairement prouver le mariage de leurs auteurs. Les hésitations entourant la mise en oeuvre de la possession d'état d'époux au profit des conjoints étaient atténuées, dans la doctrine canonique médiévale, lorsqu'il s'agissait de prouver la légitimité de la filiation : l'enfant était admis à établir le mariage de ses parents en prouvant de manière alternative, cette fois-ci, les éléments de la possession d'état d'époux, c'est-à-dire soit la renommée du mariage, soit le tractatus109(*). Cette idée, présente dans l'esprit de la doctrine de l'époque a fait son chemin et est encore d'actualité aujourd'hui110(*). La possession d'état d'époux peut être invoquée à titre de preuve du mariage par l'enfant victime d'une remise en cause du caractère légitime de son lien de filiation.

Toutefois, la preuve du mariage par la possession d'état, dans l'intérêt de l'enfant, est conditionnée par la survenance de certaines circonstances.

B. LES CONDITIONS D'INVOCATION QUANT AUX CIRCONSTANCES

54. Les enfants qui font l'objet d'une contestation de légitimité ne peuvent en appeler à l'effet probatoire de la possession d'état matrimonial que si et seulement si dans un premier temps, les époux sont décédés ou sont dans l'impossibilité de manifester leur volonté (1) ensuite et surtout, la défaillance de l'acte de mariage est certaine (2).

1. le décès des époux ou l'impossibilité pour eux de manifester leur volonté

55. Les enfants dont la légitimité est contestée ne peuvent invoquer l'effet probatoire de la possession d'état que si les parents sont tous deux décédés ou sont dans l'impossibilité de fournir toute indication sur la situation de l'acte de mariage. Si les parents sont encore en vie, il leur revient la charge de lever tout doute sur la légitimité des enfants en produisant le document nécessaire. Tant qu'ils sont vivants, les époux sont toujours à même de se procurer une expédition de l'acte de mariage du moment qu'il en a été dressé un111(*). L'impossibilité pour les époux de manifester leur volonté peut résulter d'une incapacité à la suite d'un accident ou d'une maladie par exemple. En pareil cas, il est clair qu'ils ne pourront pas fournir aux enfants les informations dont ils ont besoin pour établir leur statut d'enfant légitime.

56. Nonobstant le décès des époux ou l'impossibilité pour eux de manifester leur volonté, si les enfants ont des moyens de se procurer l'acte de mariage, l'effet probatoire de la possession d'état matrimonial ne peut jouer. L'inaptitude des enfants à produire l'acte de célébration du mariage des parents doit être manifeste.

2. Le défaut de représentation de l'acte de célébration du mariage

57. Pour invoquer la possession d'état à titre de preuve du mariage, il faut absolument que l'acte de mariage soit défaillant. Les parents étant décédés, les enfants peuvent être dans l'ignorance complète du lieu de célébration du mariage et peut-être même de la date du mariage. Ce serait sans doute une flagrante injustice que de les soumettre à toute la rigueur du système de la preuve préconstituée112(*). L'effet probatoire de la possession d'état pourra alors être invoqué.

On mesure une fois de plus toute l'importance de la possession d'état, qui comme un secouriste peut venir en aide aux enfants dont la légitimité est en mal. Encore faut-il que ceux-ci sachent comment l'invoquer.

§ 2. LA METHODE DE PREUVE DU MARIAGE PAR LA POSSESSION D'ETAT

Pour prouver le mariage par la possession d'état, l'enfant qui se dit légitime, doit d'abord établir que du vivant de ses parents, ceux-ci réunissaient les éléments constitutifs de la possession d'état d'époux (A). Ensuite, il doit démontrer qu'ils ont possédé l'état de gens mariés de façon continue jusqu'à leur décès (B).

A. L'ETABLISSEMENT DES FAITS CONSTITUTIFS DE LA POSSESSION

D'ETAT D'EPOUX

58. La preuve du mariage par la possession d'état consiste pour l'essentiel à établir l'existence des faits constitutifs de la possession d'état d'époux. « La possession d'état civil d'époux s'établit par une réunion suffisante de faits qui supposent l'existence du lien matrimonial »113(*). Il s'agit des faits traditionnels connus : le nomen, le tractatus et la fama.

59. Le nomen, il est vrai, est ici moins significatif qu'il ne l'est dans la possession d'état d'enfant légitime. Il s'agit tout de même d'un indice dont le rôle ne peut être nié. Les enfants pourront commencer par exciper que leur mère a toujours porté le nom d'une femme mariée. C'est-à-dire qu'en plus de son nom de jeune fille, elle portait le nom de leur père. Dans l'Avant-projet de code, la femme mariée a le droit de conserver son nom séparément ou conjointement avec celui de son mari114(*). C'est dire qu'elle a la faculté d'adjoindre à son nom de jeune fille celui de son époux. Cette adjonction de nom est une marque de son statut de femme mariée. En fonction du nom qu'elle porte, on peut présumer qu'une femme a la qualité d'épouse. BOMBA NGO Nicole et Madame AYISSI née BOMBA NGO Nicole115(*) sont les appellations d'une même personne. Le premier nom est celui de jeune fille, tandis que le second nom est celui de femme mariée. La seconde appellation laisse deviner que BOMBA NGO Nicole est l'épouse de monsieur AYISSI. Les enfants n'auront qu'à produire divers documents écrits et titres116(*) sur lesquelles figuraient cette seconde dénomination pour démontrer que leur mère pouvait être considérée comme l'épouse d'un monsieur X, leur père.

60. Ils doivent ensuite établir le tractatus. Il s'agit pour les enfants de montrer que les parents se sont toujours comportés comme des gens mariés117(*). Le père de son vivant doit avoir traité la mère comme son épouse et réciproquement, la mère doit avoir traité le père comme son époux. Les enfants doivent prouver que de part l'attitude des parents, il ne faisait l'ombre d'aucun doute qu'ils étaient mariés. Image interne de l'union conjugale, le tractatus est dans ce contexte difficile à prouver. Il dépend uniquement de la conduite des parents, qui peut être difficile à appréhender. Ce n'est sans doute pas l'élément le plus riche et le plus probant de la possession d'état d'époux.

61. Plus que le tractatus difficile à établir, c'est la fama, l'image externe de la relation conjugale qui pourra véritablement permettre aux enfants de prouver le mariage des parents. Les enfants devront apporter la preuve que les parents étaient reconnus et traités comme des gens mariés par la famille et par la société. Ils s'appuieront notamment sur les témoignages des membres de la famille, amis et voisins des défunts parents. Il faut dire que, l'autorité publique peut être d'un grand soutien pour les enfants. S'il y a une autorité publique qui reconnaissait les parents comme des conjoints, les enfants ne devront pas manquer d'obtenir son témoignage. La parole d'une autorité publique est assez fiable pour être considérée comme vraisemblable.

Ces éléments constitutifs ne suffisent pas à eux seuls à prouver qu'il y a eu mariage entre les parents décédés. Il faut encore établir que les parents ont possédé l'état d'époux pendant une période de temps considérable.

B. L'ETABLISSEMENT DE LA CONTINUITE DANS LA POSSESSION

D'ETAT MATRIMONIAL

62. Le temps est une entité nécessaire à la crédibilité de certaine situation de fait. Plus un fait s'inscrit dans la durée, plus on lui accorde de l'importance. Moins il ne l'est, on tergiversera alors sur le rôle à lui accorder. C'est dire que pour être prise au sérieux, la possession d'état doit avoir suivi un certain cours. La possession d'état qui fait office de preuve du mariage dans l'intérêt des enfants, est celle qui a été continue. Les enfants doivent non seulement rassembler les faits constitutifs de la possession d'état matrimonial ; ils doivent aussi prouver qu'elle a une certaine permanence, une certaine stabilité qui permet de l'invoquer à titre de preuve. Des faits épisodiques ou instantanés ne peuvent révéler le mariage. C'est pour faire face une fois de plus aux éventuels fraudeurs qu'un minimum de continuité doit être exigée. Le facteur temps, ne doit pas s'entendre comme étant synonyme de périodicité ou d'intervalle. Les enfants doivent tout simplement apporter la preuve que la possession d'état invoquée remonte à une époque donnée et qu'elle a suivi un certain cours jusqu'au décès des parents.

CONCLUSION DU CHAPITRE I

63. La possession d'état est un mode de preuve de la filiation et du mariage. La preuve du mariage par la possession d'état est admise uniquement dans l'intérêt des enfants. Lorsque la légitimité de ces derniers est sujette à discussion, à défaut de se procurer l'acte de mariage, la possession de l'état d'époux des parents est dotée d'un effet probatoire dont les enfants peuvent en tirer profit. Ils peuvent par conséquent s'en servir pour établir le mariage de leurs auteurs et, parallèlement, le caractère légitime de leur filiation. L'effet probant attaché à cette notion par l'Avant-projet de code permet aussi d'établir la parenté légitime. La parenté naturelle quant à elle semble avoir été exclue du domaine de l'effet probatoire de la possession d'état. Le vide juridique relevé dans le futur code traduit un certain malaise à accorder à l'enfant naturel les mêmes prérogatives que ceux reconnus à l'enfant légitime. On a comme l'impression que le code à venir, en s'inscrivant dans la continuité de ses devancières118(*), souhaite maintenir l'enfant conçu hors mariage dans un statut juridique inférieur à celui de l'enfant légitime. On pourrait même être tenté de dire qu'en faisant fi de l'effet probatoire de la possession d'état à l'égard de la filiation naturelle, le code en préparation essaye de limiter le développement des filiations hors mariage. Or, il n'y a pas de raison de privilégier une filiation au détriment d'une autre. Comme le rappel un bon nombre de conventions et déclarations internationales ratifiées par le Cameroun, les enfants sont tous égaux en droit. C'est dire que l'enfant naturel doit être traité de la même manière que l'enfant légitime. Si la possession d'état est un mode de preuve de la filiation des enfants conçus ou nés dans le mariage, pourquoi ne le serait-elle pas pour les enfants conçus hors mariage ?

L'effet consolidateur de la possession d'état s'étend par contre aux deux types de filiation.

CHAPITRE II

L'EFFET CONSOLIDATEUR DE LA POSSESSION D'ETAT

CHAPIT

64. Plus que l'effet probatoire, la possession d'état produit en droit interne de la famille une conséquence significative qu'il est difficile de rattacher à ses fondements classiques. Elle n'est plus envisagée uniquement comme un moyen de preuve. L'effet ici attaché à la possession d'état, touche au fond du droit119(*). La possession d'état permet notamment de consolider, d'affermir, de fortifier une qualité juridique préconstituée en la mettant à l'abri des éventuelles objections.

Elle peut en effet accroître la force d'une filiation légitime ou naturelle préétablie et rendre celle-ci incontestable (SECTION I), de même qu'elle peut éviter une annulation systématique du mariage (SECTION II).

SECTION I. LE RENFORCEMENT DE LA FILIATION PAR LA

POSSESSION D'ETAT

De la concordance entre l'acte de naissance et la possession d'état, découle une fin de non-recevoir (§ 1), dont nous nous interrogerons sur son efficacité (§ 2).

§ 1. LA FIN DE NON-RECEVOIR TIREE DE LA CONCORDANCE ENTRE LE

TITRE DE NAISSANCE ET LA POSSESSION D'ETAT

65. Lorsque la filiation ne s'appuie que sur un acte de naissance ou sur une possession d'état, a fortiori lorsqu'elle ne s'appuie ni sur l'un ni sur l'autre, le droit d'agir en justice est reconnu aux divers intéressés. Il en va autrement lorsqu'il existe un acte de naissance et une possession d'état conforme à cet acte120(*). Les rédacteurs de l'Avant-projet de code ont érigé en fin de non-recevoir la concordance entre l'acte de naissance et la possession d'état. Ils ont à raison pensé qu'en pareille occurrence, les preuves sont suffisamment solides pour que la filiation soit protégée contre des actions en justice, même si elles émanent de l'enfant lui-même et quel que puisse alors être l'intérêt de celui-ci.

C'est dire qu'en se greffant à l'acte de naissance, la possession d'état renforce le lien de filiation en limitant (A), voire en faisant obstacle aux hypothétiques actions en contestation (B).

A. LA POSSESSION D'ETAT, UNE LIMITE À LA CONTESTATION

66. La possession d'état conforme à l'acte de naissance limite les possibilités de remise en cause de la filiation préalablement établie. Il ressort en effet de l'article 336 de l'Avant-projet de code que : « Nul ne peut réclamer un état contraire à celui que lui donnent son acte de naissance et la possession d'état conforme à cet acte »121(*). Cette fin de non-valoir s'adresse particulièrement aux enfants ou aux titulaires de l'état. Ils ne sont plus autorisés à remettre en cause la filiation constatée dans leur acte de naissance dès qu'il y a une possession d'état correspondante. Lorsque le titre de naissance constate seul la filiation, celle-ci peut être contestée. La possession d'état est par contre une limite à la revendication lorsqu'elle corrobore les indications figurant dans l'acte de naissance.

67. L'intervention de la possession d'état vient donner plus de force, plus de vitalité, plus de tonus à une filiation qui pouvait être détruite. On comprend d'ailleurs pourquoi les rédacteurs de l'Avant-projet de code ont tenu à conférer à la possession d'état cet effet. L'effet consolidateur attribué ici à la possession d'état a pour objectif la protection des situations établies et consacrées par la société122(*). Il faut empêcher que ce en quoi l'opinion publique avait légitimement confiance soit perpétuellement battu en brèche. Le texte interdit toute réclamation d'état lorsque titre et possession d'état se rejoignent.

68. Quand par exemple, l'acte de naissance de l'enfant légitime est corroboré par une possession d'état d'enfant légitime conforme, il prouve la filiation légitime, non plus seulement jusqu'à la preuve contraire, mais irréfragablement123(*).Une action tendant à prouver un état contraire se heurterait à une fin de non-recevoir.

La possession d'état n'est pas seulement une limite aux actions en justice visant la réclamation d'un état contraire, elle est aussi un obstacle à la remise en cause de la filiation préconstituée.

B. LA POSSESSION D'ETAT, UN OBSTACLE A LA CONTESTATION

69. La possession d'état consolide aussi la filiation constatée dans le titre de naissance en faisant obstacle aux éventuelles contestations. L'article 354 PAR 5 du futur code dispose à ce sujet que : « Nul ne peut contester l'état de celui qui a une possession d'état conforme à son titre de naissance ».

70. Cette seconde fin de non-recevoir s'adresse spécifiquement aux tiers. Ces derniers ne peuvent pas s'attaquer à la filiation en présence d'une possession d'état conforme à l'acte de naissance. La possession d'état produit ici un effet de raffermissement du lien de filiation. Elle constitue une entrave à l'action en contestation de la filiation dans le but de préserver la paix des familles. Le souci des rédacteurs de l'Avant-projet de code est d'éviter qu'un enfant, intégré de longue date dans une famille donnée, ne subisse des troubles du fait d'un changement de parenté.

La possession d'état conforme à l'acte de naissance rend la filiation inattaquable à l'exception de quelques hypothèses bien précises.

§ 2. L'EFFICACITE DE LA FIN DE NON-RECEVOIR POSEE PAR

L'AVANT-PROJET DE CODE

71. L'effet consolidateur de la possession d'état consacre définitivement une filiation. Cela a un avantage dans la mesure où c'est un gage de sécurité et de stabilité. Mais, il faut bien admettre que le développement des filiations mensongères ne doit pas être encouragé. La fin de non-recevoir posée par l'Avant-projet de code ne peut être invoquée dans les situations suivantes : la supposition (A) et la substitution d'enfant (B).

A. UNE EFFICACITE TEMPEREE EN CAS DE SUPPOSITION D'ENFANT

72. Il y a supposition d'enfant lorsqu'une femme simule un accouchement, fait passer pour sien, déclare (ou fait déclarer) à l'état civil un enfant qu'elle a recueilli ; un tel comportement, nécessairement conscient, est souvent destiné à contourner les règles relatives à l'adoption124(*).

73. A notre avis, la possession d'état, aussi importante soit-elle ne doit pas couvrir des cas de fraude. La supposition d'enfant est un acte de mauvaise foi et de tromperie que la possession d'état ne peut légitimer. En simulant un accouchement, la femme qui se dit mère a triché et s'est jouée de la société. Elle a de façon malhonnête rattaché à elle un enfant, qui normalement n'est pas issu de ses couches. On peut se permettre de dire que dans ces conditions, la société n'a pas intérêt à accorder un quelconque effet juridique à cette filiation.

Il est par conséquent compréhensible qu'un enfant qui a été ainsi fourvoyé, puisse avoir le droit de réclamer son véritable état ; nonobstant la concordance entre la possession d'état125(*) et l'acte de naissance. Les véritables parents de l'enfant sont également admis à contester la filiation frauduleuse.

L'effet consolidateur de la possession d'état doit pareillement être écarté en cas de substitution d'enfant.

B. UNE EFFICACITE PONDEREE EN CAS DE SUBSTITUTION D'ENFANT

74. Il y a substitution d'enfant lorsque, deux femmes ayant accouché à la même époque, l'enfant de chacune est attribué à l'autre, volontairement ou involontairement, notamment en cas d'erreur commise dans une maternité126(*). Il faut dire qu'il ne s'agit pas là que d'une simple hypothèse d'école. Des inadvertances se produisent très souvent dans les maternités avec comme conséquence, l'attribution d'un enfant à une femme autre que sa mère biologique.

75. Si la confusion est décelée, et quelles que soient la chronologie des événements (interversion réalisée « soit avant, soit après la rédaction de l'acte de naissance ») et la source de ces interversions d'enfants (erreur involontaire ou non), la filiation ainsi bâtie sur le mensonge pourra être contestée127(*). En pareil cas, l'effet consolidateur de la possession d'état ne peut être invoqué.

L'effet consolidateur de la possession d'état peut encore s'apprécier sur le terrain du mariage.

SECTION II. LA CONSOLIDATION DU MARIAGE PAR LA

POSSESSION D'ETAT

76. Parler de l'effet consolidateur de la possession d'état en matière de mariage revient à dire que la possession d'état peut servir de maintien à la validité de l'acte de mariage (§ 1) tout comme, dans certains cas, elle peut éviter une annulation systématique du mariage (§ 2).

§ 1. LA POSSESSION D'ETAT, MAINTIEN DE LA VALIDITE DE

L'ACTE DE MARIAGE

77. La validité de l'acte de mariage128(*) peut être mise en cause du fait des vices de forme l'affectant. La possession d'état d'époux peut permettre de contourner ces irrégularités formelles et préserver l'acte d'une invalidité (A). Il faut tout de même dire que la possession d'état matrimonial ne peut produire cet effet dans tous les cas. L'effet confirmatif de la possession d'état admet des limites (B).

A. LA COUVERTURE DES IRREGULARITES FORMELLES DE L'ACTE DE

MARIAGE PAR LA POSSESSION D'ETAT

78. La nullité pour vice de forme dans la célébration du mariage peut être couverte, au regard des époux, par la possession d'état, c'est-à-dire par le fait que les époux vivent publiquement comme mari et femme129(*). Cette solution découle de l'article 196 du code civil de 1804, aux termes duquel, « lorsqu'il y a possession d'état, et que l'acte de célébration du mariage devant l'officier de l'état civil est représenté, les époux sont respectivement non recevables à demander la nullité de cet acte »130(*). C'est dire que la possession d'état sait prémunir l'acte de célébration du mariage de la destruction, lorsque celle-ci est invoquée par l'un des époux. La possession d'état, situation de fait prolongée, accorde ainsi un certain crédit à un acte, qui pouvait normalement être considéré comme invalide.

79. Pour l'instant, aucune disposition de l'Avant-projet de code ne traite de cette conséquence juridique de la possession d'état. Il nous semble toutefois satisfaisant de dire qu'au lieu d'annuler l'acte de mariage, avec toutes les conséquences que la nullité entraîne ; la possession d'état pourrait être utilement invoquée. En réalité, l'effet consolidateur de la possession d'état s'envisage ici comme une fin de non-recevoir, s'opposant à l'action en nullité que pourrait intenter l'un des conjoints. On admettra que les anomalies affectant l'acte de mariage sont à l'égard des époux couvertes par leur possession d'état.

La possession d'état ne maintient pas dans tous les cas la validité de l'acte de mariage.

B. LES LIMITES A L'EFFET CONFIRMATIF DE LA POSSESSION D'ETAT 

D'EPOUX

Il s'agit de la clandestinité dans la célébration du mariage (1) et de la faculté pour les tiers d'invoquer la nullité de l'acte de mariage (2).

1. La clandestinité dans la célébration du mariage

80. Le maintien de la validité de l'acte de mariage par la possession d'état suppose que le mariage n'ait pas été célébré furtivement et de manière illicite. La clandestinité dans la célébration du mariage annihile tout effet consolidateur de la possession d'état d'époux. Il va de soi que, si le mariage a été fait en catimini, les époux avaient quelque chose à cacher. On ne peut, en pareille circonstance, faire jouer l'effet de raffermissement de la possession d'état. L'acte irrégulier doit être annulé, malgré la possession d'état constituée.

81. Les mariages clandestins sont souvent faits en fraude de la loi. On ne peut par conséquent permettre que des fraudeurs, puissent tirer profit de l'effet consolidateur de la possession d'état. La possession d'état en pareil cas, est elle-même frauduleuse, et ne peut servir à rien.

La possession d'état n'aura également aucun effet consolidateur lorsque les tiers décideront de se prévaloir de leur faculté d'invoquer la nullité de l'acte de mariage.

2. La faculté pour les tiers d'invoquer la nullité de l'acte de mariage

82. Une autre limite à l'effet consolidateur de la possession d'état matrimonial est la possibilité offerte aux tiers de demander la nullité de l'acte de mariage. L'effet confirmatif de la possession d'état131(*) est restreint à l'action en nullité d'un des époux contre l'autre. Il ne prive pas les autres intéressés du droit d'invoquer la nullité. La fin de non-recevoir édictée par l'article 196 du Code civil est opposable à toute action, par laquelle, l'un des époux demande l'annulation du mariage à raison d'un vice de forme affectant l'acte de célébration du mariage132(*) sauf s'il s'agit d'un mariage contracté à l'étranger en fraude de la loi133(*). Mais les époux ne peuvent se prévaloir de cette fin de non-recevoir à l'encontre des tiers agissant en nullité134(*). Nonobstant la possession d'état constituée, les tiers sont autorisés à invoquer la nullité de l'acte de mariage.

Pour nous résumer, le maintien de la validité de l'acte de mariage par la possession d'état, s'analyse en un principe qui admet des limites. On pourrait en dire de même de l'obstacle que constitue la possession d'état à l'annulation systématique du mariage.

§ 2. LA POSSESSION D'ETAT, OBSTACLE A L'ANNULATION

SYSTEMATIQUE DU MARIAGE

83. Cet effet de la possession d'état nous est suggéré par la jurisprudence française. Dans l'article 196 du Code civil, le mot final « acte » ne désigne pas, semble t-il, le mariage lui-même en tant qu'acte juridique, mais l'acte de l'état civil. Aussi, d'après une première interprétation, cet article serait relatif à la preuve du mariage et permettrait seulement, en cas de possession d'état, d'utiliser à cette fin un acte de l'état civil dressé irrégulièrement. Mais la jurisprudence française, adoptant une autre interprétation plus large afin d'éviter la nullité du mariage, décide qu'en outre, la possession d'état prive les époux du droit de demander la nullité de leur mariage lui-même135(*), lorsque cette nullité est fondée, non pas sur un vice de fond, tel la bigamie, l'inceste ou l'impuberté (B) mais sur le défaut de publicité du mariage par exemple (A).

A. LA COUVERTURE PAR LA POSSESSION D'ETAT DU DEFAUT

DE PUBLICITE DU MARIAGE

84. Un mois généralement avant la célébration du mariage, l'officier d'état civil est saisi d'une déclaration faisant acte de l'intention des futurs époux de contracter le mariage. L'officier d'état civil saisi procède immédiatement à la publication de ladite déclaration par voie d'affichage au centre d'état civil136(*). D'après l'Avant-projet de code, le défaut de publicité est une cause susceptible de nullité137(*). C'est dire que la publication des bans est une opération indispensable à la validité du mariage138(*). Pour préserver le mariage d'une nullité assurée, ne peut-on pas admettre comme la jurisprudence française que la possession d'état d'époux confère au mariage la publicité qu'il lui faisait défaut ? La possession d'état pourra ainsi jouer un rôle confirmatif, en ce que la notoriété de la cohabitation conférera au mariage, après coup, la publicité qui lui avait fait défaut auparavant139(*).

Si la possession d'état peut couvrir le défaut de publicité du mariage, elle ne peut éviter l'annulation du mariage pour vices de fond.

B. LA NON COUVERTURE PAR LA POSSESSION D'ETAT DES VICES DE

FOND DU MARIAGE

Les vices de fond du mariage sont souvent présentés comme celles qui affectent péremptoirement le mariage. Il s'agit entre autre de la bigamie, de l'inceste ou de l'impuberté, pour ne citer que ces cas.

85. La bigamie c'est le fait pour une personne engagée dans les liens du mariage, d'en contracter un autre avant la dissolution du précédent140(*). La possession d'état ne peut donner effet à un mariage bigamique. Les époux bigames doivent se garder de croire que, la possession d'état peut consolider leur statut d'époux. L'effet consolidateur de la possession d'état d'époux n'est d'aucune utilité pour un mariage bigamique.

86. Le mariage incestueux, c'est-à-dire celui qui a été contracté alors qu'il existe entre les époux un lien de parenté ou d'alliance d'où résulte une prohibition de mariage, est atteint d'une nullité absolue, dont la possession d'état d'époux ne peut couvrir.

La possession d'état ne peut non plus consolider un mariage lorsque les époux141(*) sont impubères et n'ont obtenu aucune dispense. La bigamie, l'inceste et l'impuberté sont des causes de nullité d'ordre publique du mariage auxquelles la possession d'état, ne peut avoir aucun effet confirmatif.

CONCLUSION DU CHAPITRE II

87. Au terme de ce second chapitre, nous pouvons retenir que l'effet consolidateur de la possession d'état permet de préserver et de sauvegarder la stabilité de l'état des personnes physiques. Aussi importante soit-il, on ne doit pas perdre de vue qu'il existe des situations dans lesquelles l'effet confirmatif de la possession d'état ne peut être invoqué. Ces situations se résument pour l'essentiel aux cas de tricherie. En d'autres termes, l'effet consolidateur de la possession d'état ne doit pas être un instrument au service des fraudeurs. C'est dire que, prudence doit être observée dans la manipulation de cet autre effet de la possession d'état.

CONCLUSION DU TITRE I

88. En droit interne de la famille, la possession d'état produit deux types d'effets : un effet probatoire et un effet consolidateur.

Grâce à son effet probatoire, la possession d'état permet de prouver la filiation et dans une certaine mesure, le mariage. L'Avant-projet de code fait de la possession d'état un mode de preuve de la filiation légitime. A défaut d'acte d'état civil, la filiation légitime peut être prouvée par une possession d'état constituée. Le texte camerounais a par contre gardé le silence sur la possibilité d'établir la filiation naturelle par la possession d'état. Juridiquement, aucun obstacle ne s'oppose à l'institutionnalisation du rôle probatoire de la possession d'état d'enfant naturel. C'est pourquoi nous avons développé un vibrant plaidoyer en faveur de l'établissement de la filiation naturelle par la possession d'état.

La possession d'état pourrait également être utile aux enfants en mal de légitimité. L'effet probatoire de la possession d'état d'époux peut être invoqué dans l'intérêt des enfants pour prouver le mariage des parents. Les époux eux-mêmes ne peuvent s'en prévaloir. Ils doivent pour faire la preuve de leur mariage, produire l'acte de célébration du mariage devant l'officier d'état civil compétent.

Moyennant son effet consolidateur, la possession d'état permet de mettre l'état des personnes physiques à l'abri des contestations. En corroborant les indications figurant dans l'acte de naissance, la possession d'état consolide, raffermit, solidifie le lien de filiation préétablie. L'Avant-projet de code a d'ailleurs érigé en fin de non-recevoir la concordance entre l'acte de naissance et la possession d'état. L'effet consolidateur de la possession d'état permet aussi de pallier aux effets néfastes de la nullité du mariage. La possession d'état peut en effet être utilisée pour couvrir les irrégularités formelles de l'acte de mariage. Elle peut pareillement remédier à l'absence de publication d'intention du mariage.

On doit cependant se garder de croire que l'effet consolidateur de la possession d'état peut être invoqué en toute hypothèse. La possession d'état ne peut par exemple consolider les filiations mensongères. En cas de supposition et de substitution d'enfant, l'effet confirmatif de la possession d'état doit être écarté. La possession d'état ne peut non plus consolidé le mariage lorsqu'il y a clandestinité ou fraude à la loi.

Voilà présenter l'essentiel de ce qui ressort de la réflexion sur les effets de la possession d'état en droit interne de la famille. Qu'en est-il des effets de la possession d'état en droit international privé ?

TITRE II

LES EFFETS DE LA POSSESSION D'ETAT EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE

CHAPITRE I

89. Droit spécial applicable aux personnes privées impliquées dans les relations juridiques internationales, le droit international privé occupe une place de choix dans l'Avant-projet de code. Les rédacteurs ont posé un certain nombre de règles relatives aux conflits de lois, à la nationalité, à la condition des étrangers ou encore aux conflits de juridictions. La problématique des effets de la possession d'état en droit international privé peut être envisagée sur l'angle des conflits de lois et de la nationalité.

90. On a vu précédemment que la possession d'état d'enfant produisait deux types de conséquence : l'établissement du lien de parenté et la consolidation de la filiation préalablement établie. Aucun problème de loi applicable ne se pose lorsque tout se passe à l'intérieur des frontières du pays et que le rapport de droit ne contient aucun élément d'extranéité. La loi camerounaise en tant que règle de droit interne détermine sans difficulté les conséquences qui peuvent découler de la possession d'état d'enfant. La difficulté survient lorsque le rapport de droit intéresse plus de deux pays. Autrement dit, le juge camerounais est appelé à se prononcer sur les conséquences qu'on peut tirer de la possession d'état d'enfant de parents étrangers. Devra t-il se soumettre à sa loi ou à la loi étrangère des intéressés ? En vertu de quelle loi le juge devra t-il déterminer si la possession d'état d'enfant dont l'étranger se prévaut est par exemple un mode d'établissement de la filiation ? Le futur code camerounais de la famille a pris en compte cette difficulté et, pose à son article 326 paragraphe 3 une règle de rattachement permettant d'entrevoir un début de solution.

91. La possession d'état joue un rôle significatif en droit de la nationalité de certains pays comme la France, la Belgique142(*) et l'Algérie. Plus précisément, elle permet d'acquérir sous certaines conditions la nationalité de ces pays. Ces Etats admettent la possibilité d'invoquer la possession d'état à titre de preuve de leur nationalité. En faisant une analyse minitieuse de l'effet probatoire de la possession d'état, nous avons pensé qu'on pourrait réfléchir sur l'éventualité de la preuve de la nationalité camerounaise par la possession d'état.

L'essai de théorisation de l'effet probatoire de la possession d'état en matière de nationalité (CHAPITRE I) précédera l'identification de la loi applicable aux effets de la possession d'état d'enfant (CHAPITRE II).

CHAPITRE I

L'EFFET PROBATOIRE DE LA POSSESSION D'ETAT EN MATIERE DE NATIONALITE : ESSAI DE THEORISATION

92. La possession d'état peut être considérée comme une notion générique convenant tout aussi à la nationalité. Il s'agit en effet dans ce chapitre de répondre à cette série de questions : dans quelle mesure la possession d'état peut-elle permettre de prouver la nationalité camerounaise ? Dans quelles circonstances peut-on invoquer la possession d'état à titre de preuve de la nationalité ? Ne peut-on pas adjoindre la possession d'état aux autres modes de preuve de la nationalité ? La réflexion est ici portée sur la possibilité de prouver la nationalité camerounaise par la possession d'état.

93. Il est généralement admis qu'il peut y avoir possession d'état pour tous les éléments de l'état des personnes143(*). Attendu que la nationalité est un élément de l'état des personnes au même titre que la filiation. La filiation pouvant être prouvée sous certaines conditions par la possession d'état ; ne peut-on pas établir un parallèle avec la nationalité ? Il n'est pas exclu que la possession d'état ait le même effet probatoire en matière de nationalité qu'en matière de filiation. Le tout est de savoir comment.

L'étude du domaine et des circonstances de preuve de la nationalité camerounaise par la possession d'état (SECTION I) sera suivie de l'analyse des modalités de preuve (SECTION II).

SECTION I. LA PREUVE DE LA NATIONALITE CAMEROUNAISE

PAR LA POSSESSION D'ETAT : DOMAINE ET

CIRCONSTANCE

Il faut distinguer selon qu'il s'agit du domaine (§1) et selon qu'il s'agit des circonstances de preuve de la nationalité camerounaise par la possession d'état (§2).

§1. LE DOMAINE DE PREUVE DE LA NATIONALITE

CAMEROUNAISE PAR LA POSSESSION D'ETAT

La preuve de la nationalité camerounaise par la possession d'état concerne aussi bien la nationalité d'acquisition (B) que la nationalité d'origine (A).

A. LA PREUVE DE LA NATIONALITE D'ORIGINE

94. La nationalité d'origine ou encore nationalité d'attribution correspond à la possession de la nationalité camerounaise de plein droit sans qu'il y ait possibilité de contestation. Les nationaux d'origine sont des personnes qui possèdent le titre de camerounais depuis leur naissance. Il s'agit des individus qui ont toujours été considérés comme camerounais, de part leur filiation144(*) ou suivant leur naissance au Cameroun145(*). Ce sont des personnes intégrées dans le milieu social camerounais de longue date. Elles font corps avec lui, en constituent des éléments naturels. Elles appartiennent congénitalement à la population constitutive de l'Etat camerounais.

Pour ces dernières, il n'y a aucune difficulté à établir qu'elles ont la possession d'état de camerounais. Les éléments constitutifs de la possession d'état sont largement réunis en leur personne. C'est la raison pour laquelle nous pensons que si les circonstances s'y prêtes, la possession d'état pourrait être invoquée comme moyen permettant d'établir la nationalité d'origine.

Le Cameroun ne sera d'ailleurs pas le premier sur cette voie. Le droit algérien de la nationalité a déjà réglementé la preuve de la nationalité d'origine par la possession d'état. L'article 32 du code algérien de la nationalité de 1970 dispose en effet que : 

« Lorsque la nationalité algérienne est revendiquée à titre de nationalité d'origine, elle peut être prouvée par la filiation découlant de deux ascendants en ligne paternelle, nés en Algérie et y ayant joui du statut musulman.

Elle peut également être prouvée par tous moyens et notamment par la possession d'état. La possession d'état de national algérien résulte d'un ensemble de faits publics notoires et non équivoques établissant que l'intéressé et ses parents se sont comportés comme des algériens et ont été considérés comme tels, tant par les autorités publiques que par les particuliers.

Les dispositions qui précédent ne portent pas atteinte aux droits résultant de l'acquisition de la nationalité algérienne par le bienfait de la loi »146(*).

La possession d'état de national camerounais pourrait tout aussi être invoquée pour prouver la nationalité d'acquisition.

B. LA PREUVE DE LA NATIONALITE D'ACQUISITION

95. Les nationaux d'acquisition sont des individus à qui on a octroyé la nationalité camerounaise, après leur naissance et à la suite d'un évènement. Autrement dit, ce sont des individus nés non camerounais auxquels la nationalité camerounaise a été conférée, sans rétroactivité147(*). Selon l'Avant-projet de code, la nationalité camerounaise s'acquiert après la naissance, par l'effet du mariage148(*), par l'effet de la naturalisation, par l'effet de la réintégration et par la déclaration149(*).

On pourrait craindre que des non nationaux utilisent la possession d'état frauduleusement pour acquérir la nationalité camerounaise. Les ressortissants des pays voisins150(*), dont on partage parfois la même culture, le mêmes noms, les mêmes langues ethniques pourraient devenir trop facilement camerounais. C'est la raison pour laquelle nous avons émis des « réserves temporelles »151(*) quant à la preuve de la nationalité d'acquisition par la possession d'état.

D'une manière générale, les circonstances d'invocation de la possession d'état comme mode de preuve de la nationalité camerounaise se résument en la défaillance des modes normaux de preuve de la nationalité.

§2. LES CIRCONSTANCES DE PREUVE DE LA NATIONALITE

CAMEROUNAISE PAR LA POSSESSION D'ETAT

96. La possession d'état de camerounais ne peut être invoquée comme moyen de preuve de la nationalité camerounaise qu'à titre secondaire. Cela sous-entend nécessairement qu'il y ait eu défaillance des modes principaux de preuve de la nationalité.

La possession d'état peut par conséquent remédier à la défaillance du certificat de nationalité (A) ainsi qu'à l'absence des autres documents légaux de preuve de la nationalité (B).

A. LA DEFAILLANCE DU CERTIFICAT DE NATIONALITE

CAMEROUNAISE

97. Le moyen par excellence de preuve d'une nationalité est le certificat de nationalité. L'Avant-projet de code dispose que « le président du tribunal de première instance du lieu de résidence et à l'étranger, le chef de la mission diplomatique ou consulaire ont qualité pour délivrer un certificat de nationalité camerounaise à toute personne justifiant qu'elle a cette nationalité »152(*). Autrement dit, l'obtention d'un certificat de nationalité camerounaise est subordonnée à un préalable : la justification de la possession de la nationalité camerounaise. En pratique, cette justification est généralement faite par une copie d'acte de naissance établissant la filiation à l'égard d'un parent camerounais ou par la production de la carte d'identité nationale. L'individu qui n'a ni acte de naissance le liant à un parent camerounais, ni carte d'identité nationale ne peut justifier qu'il a la nationalité camerounaise. Il se trouve par conséquent désarmé et ne peut se voir délivrer un certificat de nationalité camerounaise. Sans ces documents, l'intéressé risque de se voir opposer une fin de non-recevoir. L'article 219 paragraphe 3 de l'Avant-projet de code dispose à cet effet que : « Le certificat de nationalité indique la disposition légale en vertu de laquelle l'intéressé à la qualité de camerounais ainsi que les documents qui ont permis de l'établir. Il fait foi jusqu'à preuve de contraire ». Si le certificat de nationalité ne mentionne pas ces documents, il sera dénué de toute valeur juridique. On ne peut d'ailleurs établir le certificat de nationalité sans avoir au préalable vérifier que ces instrumentum ont été produits par le réquérant.

98. La défaillance du certificat de nationalité constatée, que reste t-il au réquérant pour prouver qu'il est camerounais ? Ne peut-on pas penser, précisément dans ce cas que la possession d'état de national camerounais sera utilisée pour établir la nationalité ? Comme en matière de filiation, la possession d'état est ici dotée d'un effet probatoire dont on pourrait s'en servir. La possession d'état pourrait bien pallier à l'absence du certificat de nationalité. Ce rôle d'appoint que nous entendons conférer à la possession d'état n'est d'ailleurs pas qu'une imagination. Dans la circulaire n° 93/2007 du préfet de l'ALLIER (France) adressée à mesdames et messieurs les maires du département de l'ALLIER, portant sur la condition de délivrance et de renouvellement des cartes nationales d'identité ; on peut lire qu'à défaut d'obtenir de la part des usagers un certificat de nationalité française, nécessaire pour la délivrance ou le renouvellement d'une carte nationale d'identité, il y'a lieu de rechercher l'application du concept de possession d'état de français lorsque celle-ci ne soulève pas de doute. Il s'agit en réalité, d'une mesure de dispense de certificat de nationalité française par application du concept de possession d'état de français153(*). Nous en déduisons que la possession d'état peut relayer, suppléer le certificat de nationalité.

L'effet probant de la possession d'état pourrait encore être invoqué en cas de défaillance des autres documents légaux de preuve de la nationalité.

B. LA DEFAILLANCE DES AUTRES DOCUMENTS LEGAUX DE PREUVE DE

LA NATIONALITE

99. Le certificat de nationalité constitue l'instrument privilégié de preuve de la nationalité camerounaise. Néanmoins, celui qui en est dépourvu dispose d'autres modes de preuve. Il s'agit notamment des déclarations de nationalité : selon l'article 17 du décret d'application de la loi n° 68/LF/3 du 11 juin 1968154(*), la preuve d'une déclaration d'acquisition de la nationalité camerounaise s'opère par un exemplaire enregistré de cette déclaration. A défaut, l'intéressé peut produire une attestation délivrée par le ministre de la justice dans laquelle l'enregistrement est constaté.

Les décrets peuvent aussi permettre de prouver la naturalisation155(*) ou la réintégration156(*) dans la nationalité camerounaise. Concrètement, la preuve est faite par la production soit d'une ampliation, soit de l'exemplaire du journal officiel dans lequel le décret a été publié.

Il n'est pas exclu que tous ces documents soient défaillants. On peut très bien imaginer l'hypothèse où un incendie vient consumer le ministère de la justice ; détruisant de ce fait tous les documents écrits qui s'y trouve. Les décrets de naturalisation, de réintégration et autres attestations et déclarations ayant disparu, comment dès lors prouver la nationalité ?

La possession d'état constituée pourrait également dans ces hypothèses apporter son concours à la preuve de la nationalité camerounaise. Cette preuve devra se faire selon des modalités bien précises.

SECTION II. LES MODALITES DE PREUVE DE LA NATIONALITE

CAMEROUNAISE PAR LA POSSESSION D'ETAT

100. La preuve de la nationalité camerounaise par la possession d'état obéit au même schéma que celui observé en matière de filiation. Cette preuve suppose la réunion des éléments constitutifs de la possession d'état de national camerounais (§1), mais aussi et surtout l'établissement de la continuité dans la possession d'état de camerounais (§2).

§1. LA REUNION DES ELEMENTS CONSTITUTIFS DE LA

POSSESSION D'ETAT DE CAMEROUNAIS

101. La preuve de la nationalité camerounaise par la possession d'état passe par l'établissement des éléments constitutifs de la possession d'état de camerounais. Ces éléments peuvent être identifiés par référence au droit algérien de la nationalité et au droit français de la nationalité. Selon l'ordonnance algérienne de 1970 portant code de la nationalité, « la possession d'état de national algérien résulte d'un ensemble de faits publics notoires et non équivoques établissant que l'intéressé et ses parents se sont comportés comme des algériens, et ont été considérés comme tels tant par les autorités publiques que par les particuliers ». D'après le service de la nationalité du consulat général de France à Tananarive157(*), « la possession d'état de français est définie par un ensemble de faits qui traduisent l'apparence du lien de nationalité unissant une personne à l'Etat français. Ces faits sont tirés à la fois du comportement de l'intéressé(e) qui s'est conduit en tous points comme l'aurait fait un français et de la réaction de l'Etat et des administrations qui l'ont toujours, quand l'occasion s'en est présentée, tenu pour Français. De plus, le (a) déclarant(e) doit être assimilé à la culture française ».

Ressortent de ces deux exemples, deux éléments constitutifs classiques de la possession d'état : le tractatus et la fama (B). Le nomen n'a pas été pris en considération par les droits algérien et français de la nationalité. Nous estimons cependant que la preuve de la nationalité camerounaise par la possession d'état pourrait commencer par l'établissement de l'élément nomen (A).

A. LA POSSESSION D'UN NOM CAMEROUNAIS

Le nom est l'appellation servant à désigner une personne dans la vie sociale et juridique en vue de l'exercice de ses droits et de l'accomplissement de ses devoirs158(*). Elément essentiel de la personnalité, le nom marque très souvent l'appartenance d'un individu à un groupe humain, ethnique, à une communauté nationale, voire à un Etat. En fonction du nom qu'on porte, on pourra deviner que tel individu est de telle région, tel autre de telle localité. Il est vrai, la règle n'est pas absolue, mais peut être vérifiée dans bon nombre de situations. A partir du nom, on peut déjà avoir une idée sur les origines d'un individu.

102. C'est dire que la preuve de la nationalité camerounaise par la possession d'état pourra commencer de prime abord par l'établissement du port d'un nom camerounais pour ne pas dire à consonance camerounaise. Il n'y a pas un prototype de nom camerounais. Néanmoins, en fonction des coutumes, des habitudes et des usages, il existe des noms qui permettent de rattacher des individus à des groupes ethniques bien précis au Cameroun159(*). La preuve de la nationalité camerounaise d'origine par la possession d'état passe par l'établissement du fait qu'on a toujours porté un nom camerounais, transmis depuis la naissance soit par le parent camerounais, soit par l'officier d'état civil le cas échéant.

103. L'Avant-projet de code prévoit d'ailleurs la possibilité pour les étrangers en instance de naturalisation de procéder à la camerounisation des noms, patronyme ou matronyme et prénoms, lorsque ceux possédés présentent une consonance spécifiquement étrangère de nature à gêner son intégration dans la communauté nationale160(*). Ce procédé de la camerounisation des noms permet de changer un nom substantiellement étranger en un nom généralement possédé par les camerounais. L'étranger naturalisé camerounais qui n'arrive pas à prouver la nationalité camerounaise par les documents légaux requis, pourrait, accessoirement, se prévaloir de la possession d'état en invoquant d'emblée qu'il possède un nom camerounais. Il faudrait ensuite qu'il établisse le tractatus et la fama de camerounais.

B. LE TRACTATUS ET LA FAMA DE CAMEROUNAIS

104. Le tractatus c'est le traitement ou le comportement de l'intéressé comme un camerounais. Il s'agit en effet pour l'individu qui se prévaut de la possession d'état de camerounais de démontrer qu'il s'est toujours comporté comme un camerounais. Il s'agira de démontrer que l'on s'est en toute circonstance considéré comme camerounais. Le fait de se comporter comme un ressortissant camerounais s'induira nécessairement de la vie quotidienne de ce dernier. Il pourra par exemple démontrer qu'il a eu à participer aux opérations électorales comme le ferait tout bon citoyen camerounais. Le tractatus, en réalité, se résume aux actes de patriotisme. Il s'agit en effet d'établir son amour pour la patrie camerounaise. Se comporter comme un camerounais, c'est voter, payer ses impôts, participer aux opérations de défense de l'intégrité nationale lorsqu'on est requis par l'autorité publique...

Le national d'origine, ainsi que ces parents doivent s'être comportés comme des camerounais. Il doit s'être comporté en tout point comme l'aurait fait un camerounais. Le national d'acquisition doit depuis l'évènement le conférant la qualité de camerounais s'être toujours considéré camerounais. Il doit surtout être de bonne foi161(*).

105. A l'évidence, c'est la fama, troisième élément constitutif de la possession d'état qui permettra de prouver avec plus d'aisance la nationalité camerounaise. La possession d'état de camerounais ne peut être constituée sans elle. C'est l'élément le plus important. En effet, il s'agira pour la personne concernée de montrer que la société camerounaise prise globalement et plus particulièrement, l'autorité publique l'a toujours considéré comme un camerounais. Le rôle des pouvoirs publics sera ici, plus accentué qu'il ne l'était en matière de filiation. La nationalité est un élément de l'état qui entraîne des droits et des devoirs aussi bien à l'égard du possesseur qu'à l'égard de l'état. En matière de nationalité, la fama sera d'avantage l'oeuvre des administrations publiques camerounaises que celle de simples particuliers. L'individu en question devra par exemple établir qu'il a participé à plusieurs concours publics réservés uniquement aux nationaux. On lui a confié des postes de responsabilité dans l'administration camerounaise dont l'une des conditions sine qua non d'obtention dudit poste était le statut de camerounais. Il a accompli des obligations de nature militaire. Ses amis et voisins de nationalité camerounaise doivent l'avoir toujours traité comme un camerounais. A leurs yeux, il ne devra faire l'ombre d'aucun doute que le prétendu camerounais ne l'est pas. De plus, l'intéressé doit être assimilé à la culture camerounaise. Il doit pouvoir s'identifier par rapport à elle.

Les éléments ci-dessus sont les éléments constitutifs de la possession d'état de camerounais. Ces faits doivent être notoires et non équivoques. Il ne suffit pas seulement de les réunir pour que la possession d'état de national camerounais soit constituée et fasse office de preuve de la nationalité. Encore faut-il que cette possession d'état ait une certaine constance.

§2. LA CONSTANCE DANS LA POSSESSION D'ETAT DE

CAMEROUNAIS

Il faut distinguer suivant qu'il s'agit des nationaux d'origine (A) et suivant qu'il s'agit des nationaux d'acquisition (B). C'est à ce niveau que s'analyseront les « réserves temporelles » annoncées plus haut.

A. LA CONSTANCE DANS LA POSSESSION DE LA NATIONALITE

D'ORIGINE

106. La constance dans la possession de la nationalité d'origine suppose que la possession d'état de camerounais remonte nécessairement à la naissance et existe encore au jour où l'on s'en prévaut. A aucun moment donné l'individu ne doit s'être prévalu d'une autre nationalité. Si c'est le cas, on risque d'aboutir à des situations équivoques, empêchant de déterminer avec plus de précision la nationalité effectivement possédée. Il doit y avoir tout au long du fil de l'existence une continuité dans la possession d'état de camerounais d'origine. Autrement dit, la possession d'état qui permettra de prouver la nationalité camerounaise est celle qui aura été ininterrompue162(*). Non seulement la possession d'état doit remonter à la naissance, elle doit encore être actuelle. L'actualité de la possession d'état est une modalité indispensable à la preuve, bien entendu à titre subsidiaire, de la nationalité camerounaise.

La preuve de la nationalité d'acquisition par la possession d'état doit également satisfaire à l'exigence du temps.

B. LA CONSTANCE DANS LA POSSESSION DE LA NATIONALITE

D'ACQUISITION

107. La preuve de la nationalité d'acquisition par la possession d'état est plus délicate que celle de la nationalité d'attribution, du fait des facilités de fraude. C'est la raison pour laquelle il est nécessaire de prendre quelques précautions.

En droit français, toute personne qui a joui, pendant dix ans, de façon constante et de bonne foi, de la possession d'état de français, peut acquérir par déclaration la nationalité française163(*). Nous nous alignons sur cette démarche du législateur français pour soumettre la preuve de la nationalité d'acquisition par la possession d'état à l'épreuve du temps. Autrement dit, pour que la possession d'état puisse être invoquée comme mode de preuve de la nationalité d'acquisition, elle doit avoir duré au moins dix ans. Le décompte de ces dix années a pour point de départ l'évènement qui aura donné lieu à l'acquisition du statut de camerounais. Les nationaux d'acquisition doivent donc s'assurer qu'ils possèdent l'état de camerounais au moins depuis dix ans, avant de l'invoquer comme moyen de preuve. Ils seront tenus de faire la preuve de cette possession décennale, sous peine de se voir opposer une fin de non-recevoir.

En bref, l'établissement de la nationalité d'acquisition par la possession d'état suppose non seulement la réunion des faits constitutifs, mais aussi et spécialement, la continuité de la possession d'état de national camerounais durant les dix ans qui ont suivi l'événement ou l'acte conférant à l'intéressé la qualité de camerounais.

CONCLUSION DU CHAPITRE I

Il était question dans ce chapitre de vérifier si les conditions traditionnelles de la possession d'état pouvaient se réunir en matière de nationalité. Il s'agissait en d'autres termes de réfléchir sur la part de la possession d'état dans la preuve de la nationalité camerounaise. Attendu que ce rôle de la possession d'état n'est envisagé par aucun texte de loi, nous avons fait un effort dans l'énoncé du principe. Il ressort de cette analyse que la possession d'état pourrait avoir en matière de nationalité le même effet probatoire qu'en matière de filiation.

Il faut relever que la démonstration n'a pas été aisée en raison de la délicatesse de la question de la nationalité. Nous espérons toutefois avoir ouvert une porte de réflexion sur la possibilité de prouver la nationalité camerounaise par la possession d'état.

CHAPITRE II

LA LOI APPLICABLE AUX EFFETS DE LA POSSESSION D'ETAT D'ENFANT EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE DE LA FILIATION

108. La possession d'état d'enfant produit en droit interne deux types de conséquence : l'établissement du lien de filiation et la consolidation de la filiation préalablement établie au moyen d'un titre de naissance. Ces effets peuvent poser en droit international privé de la filiation un problème de loi applicable. C'est notamment le cas lorsque le rapport de droit soumis au juge intéresse plusieurs ordres juridiques. En pareille occurrence, en vertu de quelle loi le juge camerounais devra t-il par exemple déterminer si oui ou non la possession d'état invoquée est un mode de preuve de la filiation ?

L'Avant-projet de code apporte un début de solution en rattachant les effets découlant de la possession d'état d'enfant à la loi camerounaise, lorsque l'enfant, ses père et mère sont camerounais ou en situation de résidence au Cameroun (SECTIONI). Quelle est par contre la loi applicable aux effets de la possession d'état lorsque l'enfant et ses père et mère ne seront ni camerounais, ni résidants au Cameroun (SECTION II) ?

SECTION I. LA COMPETENCE DE LA LOI CAMEROUNAISE

L'examen des conditions et du domaine d'application de la loi camerounaise (§1) sera suivi d'une interrogation sur le bien fondé du choix de la loi camerounaise comme loi applicable aux conséquences découlant de la possession d'état d'enfant résidant au Cameroun (§2).

§1. LES CONDITIONS ET LE DOMAINE D'APPLICATION DE

LA LOI CAMEROUNAISE

La compétence de la loi camerounaise est subordonnée à la satisfaction de deux conditions (A). Nous verrons par la suite que le domaine d'application de la loi camerounaise s'étend au-delà de celui prévu par l'Avant-projet de code (B).

A. LES CONDITIONS D'APPLICATION DE LA LOI CAMEROUNAISE

109. Selon l'article 326 paragraphe 3 de l'Avant-projet de code, « Lorsque l'enfant, ses père et mère sont camerounais ou résident au Cameroun, la possession d'état produit toutes les conséquences qui en découlent, conformément à la loi camerounaise ». Au regard de cet article, pour que la loi camerounaise soit applicable aux effets de la possession d'état d'enfant, les intéressés doivent être de nationalité camerounaise. S'ils ne sont pas de nationalité camerounaise, ils doivent tout au moins résider au cameroun. En d'autres termes, les effets de la possession d'état d'enfant seront déterminés par la loi camerounaise chaque fois que l'enfant et ses père et mère seront camerounais. Si ce sont des étrangers, le juge appliquera la loi camerounaise toutes les fois que ces derniers auront le statut de résidant.

Pour la définition de la résidence, il suffit de se référer aux concepts élaborés par la jurisprudence Rivière164(*) à propos du divorce. La résidence s'entend du lieu où vivent habituellement et effectivement le père et la mère avec l'enfant. Le texte camerounais ne nous dit pas si cette résidence doit être commune ou alors séparée165(*). Peu importe en réalité qu'elle soit commune ou séparée. L'essentiel c'est que le Cameroun soit le lieu de l'établissement effectif de l'enfant et de ses père et mère.

La nationalité camerounaise et la résidence au Cameroun sont les deux conditions d'application de la loi camerounaise aux conséquences découlant de la possession d'état d'enfant. Le domaine d'application de cette loi couvre non seulement les effets découlant de la possession d'état d'enfant légitime, mais aussi les effets issus de la possession d'état d'enfant naturel.

B. LE DOMAINE D'APPLICATION DE LA LOI CAMEROUNAISE

110. L'Avant-projet de code n'a posé la règle de rattachement des effets découlant de la possession d'état d'enfant qu'en visant la filiation légitime. La règle de conflit de l'article 326 figure en effet dans les dispositions du futur code relatives à la filiation de l'enfant conçu ou né dans le mariage. On peut par conséquent penser que l'enfant dont il est question dans ledit article, c'est uniquement l'enfant légitime. Qu'en est-il des conséquences découlant de la possession d'état d'enfant naturel ? Le code à venir n'a pas déterminé la loi applicable aux effets découlant de la possession d'état lorsque l'enfant naturel et ses père et mère ou l'un de ses père et mère sont camerounais ou résidants au Cameroun166(*). On peut trouver une explication au silence de l'Avant-projet de code par le fait qu'en amont, le code en préparation n'a conféré aucun effet à la possession d'état d'enfant naturel. Or, la possession d'état d'enfant naturel produit les mêmes effets que la possession d'état d'enfant légitime pourrait produire. Elle permet notamment de prouver la filiation de l'enfant conçu hors mariage. Elle consolide également la filiation naturelle préalablement établie.

111. On peut retenir en définitive que la loi camerounaise est compétente pour déterminer les effets découlant de la possession d'état d'enfant lorsque l'enfant légitime et ses père et mère, l'enfant naturel et l'un de ses père et mère sont camerounais ou résident au Cameroun167(*). Le domaine d'application de la loi camerounaise ne se limite pas aux conséquences découlant de la possession d'état d'enfant légitime. Elle couvre également les effets découlant de la possession d'état d'enfant naturel.

Si on peut aisément comprendre l'application de la loi camerounaise aux conséquences découlant de la possession d'état lorsque l'enfant et ses père et mère sont camerounais, On peut par contre s'interroger sur les raisons du choix d'appliquer la loi camerounaise aux effets découlant de la possession d'état d'enfant résidant au Cameroun.

§2. L'APPRECIATION CRITIQUE DE LA COMPETENCE DE

LA LOI CAMEROUNAISE

Bien que la compétence de la loi camerounaise pour régir les conséquences découlant de la possession d'état d'enfant résidant au Cameroun soit justifiée (A), des difficultés peuvent surgir dans sa mise en oeuvre (B).

A. LA COMPETENCE JUSTIFIEE DE LA LOI CAMEROUNAISE

112. Le rattachement à la loi camerounaise, à l'exclusion de toute autre, des effets de la possession d'état d'enfant est justifié par l'idée que les effets attachés à la possession d'état ont pour but de protéger la paix des familles. Il faut donc éviter que celle-ci puisse être troublée sur la base de l'application d'une loi étrangère168(*). Cette règle de rattachement a pour objectif prioritaire la protection des situations établies contre la perturbation éventuelle apportée par une loi étrangère rendue applicable du fait de la règle normale de conflit, dès lors que celles-ci sont reconnues par la loi camerounaise et intégrées au milieu social camerounais.

113. En outre, la possession d'état d'enfant résidant au Cameroun est constituée sur le sol camerounais. C'est une situation de fait qui a pris corps dans le milieu social camerounais. C'est tout à fait normal que les rédacteurs la rattachent à l'ordre juridique camerounais, qui apparaît le mieux approprié pour régir le rapport de droit en question. On peut également trouver une justification à la compétence de la loi camerounaise par l'idée de protection des enfants d'immigrés. L'objectif est de faire bénéficier les enfants de parents étrangers des effets de la possession d'état en droit camerounais. Il est à craindre que la loi désignée par la règle normale de conflit n'attache aucun effet à la possession d'état.

La mise en oeuvre de la loi camerounaise n'est pas sans difficulté.

B. LES EVENTUELLES DIFFICULTES DANS LA MISE EN OEUVRE

DE LA LOI CAMEROUNAISE

114. La doctrine française de droit international privé nous offre toute une série d'arguments, permettant d'apprécier le rattachement à la loi camerounaise des effets découlant de la possession d'état d'enfant résidant au Cameroun. Nous sommes d'avis que les reproches faites au sujet de la règle de rattachement posée par l'article 311-15 de la loi française de 1972, peuvent également être faites à l'encontre de la règle de conflit posée par l'article 326 paragraphe 3 de l'Avant-projet de code.

115. En vérité, l'application de la loi camerounaise qu'aux « conséquences » qui « découlent » de la possession d'état laisse subsister l'application de la loi désignée par la règle de conflit bilatérale, aux autres aspects de la filiation. Il est en définitive, effectivement difficile de prévoir comment pourra s'organiser la coexistence de la loi camerounaise pour régir les effets de la possession d'état, et la loi étrangère pour les autres éléments de la filiation169(*). Une critique autorisée affirme d'ailleurs que, les effets de la possession d'état apparaissent trop intimement liés aux règles d'établissement de la filiation pour pouvoir être soumis rationnellement à une loi différente170(*). Selon cette critique, il n'y a véritablement pas de raisons à ce que les effets de la possession d'état d'enfant soient détachés des autres éléments de la filiation, quant à la recherche de la loi applicable. Selon cet auteur, ce n'est pas uniquement les effets découlant de la possession d'état qui devraient être régis par la loi du for, mais par souci de cohérence, la filiation en entier.

116. Une autre difficulté dans la mise en oeuvre de la loi camerounaise est le risque d'inégalité entre enfants. Le rattachement opéré par l'Avant-projet de code risque de conduire à des inégalités entre enfants lorsque ceux-ci résideront dans des pays différents. Celui qui réside seul à l'étranger ne pouvant comme son frère résidant au Cameroun avec ses parents, invoquer le bénéfice de la possession d'état, par exemple pour prouver sa filiation légitime, si la loi désignée par la règle de conflit appropriée ne connaît pas ce mode de preuve171(*).

L'Avant-projet de code a désigné la loi camerounaise compétente pour déterminer les conséquences découlant de la possession d'état d'enfant résidant au Cameroun. Qu'en est-il de la loi applicable aux effets de la possession d'état lorsque l'enfant et ses père et mère ne sont ni camerounais, ni résidants au Cameroun ?

SECTION II. LA LOI APPLICABLE EN CAS DE NON RESIDENCE

AU CAMEROUN

117. Les critères d'application de la loi camerounaise tels que nous l'avons souligné plus haut sont : la nationalité camerounaise et la résidence au Cameroun. Quelle loi faudra t-il appliquer lorsque les intéressés seront des étrangers et ne résideront pas au Cameroun ? La détermination de la loi applicable aux effets découlant de la possession d'état d'enfant légitime (§1) précédera l'identification de la loi applicable aux conséquences découlant de la possession d'état d'enfant naturel (§2).

§1. LA LOI APPLICABLE AUX EFFETS DE LA POSSESSION D'ETAT

D'ENFANT LEGITIME

Le rejet de la compétence de la loi nationale de la mère (A) est compensé par l'admission de la compétence de la loi gouvernant les effets du mariage et de le loi personnelle de l'enfant (B).

A. LE REJET DE LA COMPETENCE DE LA LOI NATIONALE DE LA MERE

118. L'article 326 paragraphe 1 de l'Avant-projet de code rattache la filiation légitime à la loi nationale de la mère. C'est le même rattachement qu'a opéré la reforme française de 1972 sur la filiation172(*). Les effets découlant de la possession d'état d'enfant légitime étant un élément de la filiation légitime, si on fait application de la règle de rattachement de l'article 326, la loi nationale de la mère serait compétente pour déterminer les conséquences découlant de la possession d'état d'enfant légitime non résidant au cameroun.

119. Or, l'application de la loi nationale de la mère à la filiation légitime a fait l'objet de vives contestations dans la doctrine française de droit international privé. Cette dernière a été critiquée comme inexacte, inégalitaire et inadaptée. L'inexactitude du choix de la loi nationale de la mère a été opposée à l'argument avancé par monsieur Jean FOYER173(*). Celui-ci s'était fondé sur la célèbre règle « mater semper certa est ». La mère est toujours connue alors que le père ne l'est pas toujours. L'argument n'a pas convaincu174(*). L'inégalité qui a été et est encore le plus souvent invoquée tient au choix de la mère au détriment de celle du père. Le rattachement apparaissant contraire au principe général d'égalité entre les sexes. Ce rattachement opère une rupture d'égalité des époux devant la règle de conflit. Le dernier grief, très lié au précédent, est celui de son inadaptation, résultant de la soumission d'une relation à trois personnes à la loi d'une seule175(*). Le choix de la mère apparaît de prime abord arbitraire dans une relation personnelle au moins triangulaire176(*). L'inadaptation tient également au fait que l'établissement de la filiation légitime paternelle soit soumis à la loi nationale de la mère177(*).

120. De même que l'application de la loi nationale de la mère à la filiation légitime est rejetée par la doctrine française, de même nous rejetons l'application de la loi nationale de la mère aux conséquences découlant de la possession d'état d'enfant légitime. Nous avons vu précédemment que la possession d'état d'enfant légitime rattachait l'enfant indivisiblement à ses deux parents. C'est dire qu'elle établit en même temps la filiation légitime paternelle et la filiation légitime maternelle. Il serait dès lors inexact de demander uniquement à la loi nationale de la mère quels sont les effets découlant de la possession d'état d'enfant légitime. Parmi les conséquences découlant de la possession d'état d'enfant légitime, on peut noter, l'établissement de la filiation. Or, l'établissement de la filiation légitime par la possession d'état est indivisible. Il concerne autant la filiation à l'égard de la mère qu'à l'égard du père. Comment donc soumettre cette relation à la loi d'un seul des parents.

En tout état de cause, il est difficilement admissible de rattacher une relation d'au moins trois personnes à la loi d'une seule. Il nous semble que la loi nationale de la mère n'est pas appropriée pour régir les conséquences découlant de la possession d'état d'enfant légitime. La loi gouvernant les effets du mariage et la loi personnelle de l'enfant sont plus satisfaisantes.

B. L'ADMISSION DE LA COMPETENCE DE LA LOI GOUVERNANT LES

EFFETS DU MARIAGE ET DE LA LOI PERSONNELLE DE L'ENFANT

121. L'article 18 de l'Avant-projet de code dispose que : « La filiation de l'enfant né pendant le mariage est régie par la loi qui gouverne les effets du mariage. Lorsque l'enfant et ses parents prétendus ont des nationalités différentes, la loi applicable est celle de l'enfant ou, à défaut, celle du lieu de naissance de l'enfant ». Il est plus satisfaisant de rattacher les conséquences découlant de la possession d'état d'enfant légitime aux lois désignées par cet article que de les rattacher à la loi nationale de la mère.

Il est plus convenable de rattacher les effets de la possession d'état d'enfant légitime à la loi gouvernant les effets du mariage, parce que ce rattachement est, à l'opposé de la loi nationale de la mère, commun aux deux parents et généralement aussi à l'enfant (loi nationale commune, ou, à défaut, loi du domicile commun). On ne peut en outre reprocher à ce rattachement d'être arbitraire, et inadapté. Le choix de la loi gouvernant les effets du mariage est dicté par le fait qu'elle réalise l'égalité entre la mère et le père légitimes devant la règle de conflit. Il ne s'agit plus d'appliquer la loi d'une seule personne à une relation triangulaire, mais de tenir compte des différents intérêts en question. Cette loi est à notre avis, celle qui convient le mieux à la situation décrite. Aussi bien l'enfant que les parents légitimes s'y retrouvent. Elle est commune aux trois personnes intéressés par les effets découlant de la possession d'état d'enfant légitime.

122. On peut également dire qu'à défaut de nationalité commune entre l'enfant et ses prétendus parents, les conséquences découlant de la possession d'état d'enfant seront déterminées conformément à la loi personnelle de l'enfant. Il s'agit là d'un rattachement neutre qui ne privilégie ni le père, ni la mère. On peut en plus penser qu'étant donné que c'est de l'enfant qu'il s'agit, la loi personnelle de ce dernier sera plus apte à déterminer les effets attachés à sa possession d'état.

L'identification de la loi applicable aux conséquences découlant de la possession d'état d'enfant naturel ne pose aucun problème.

§2. LA LOI APPLICABLE AUX EFFETS DE LA POSSESSION D'ETAT

D'ENFANT NATUREL

La loi applicable aux conséquences découlant de la possession d'état d'enfant naturel ne résidant pas au Cameroun est selon le cas la loi nationale de la mère (A) ou la loi nationale du père (B).

A. LA COMPETENCE DE LA LOI NATIONALE DE LA MERE NATURELLE

123. A la différence de la filiation légitime, la possession d'état d'enfant naturel est divisible. Elle s'établit non pas parallèlement et en même temps à l'égard des père et mère comme en matière de filiation légitime, mais tisse au contraire séparément la filiation maternelle et la filiation paternelle178(*). De même que la possession d'état d'enfant naturel est divisible, de même les conséquences découlant de celle-ci sont elles aussi divisibles. La possession d'état d'enfant naturel à l'égard de la mère établit la filiation naturelle maternelle et rien que celle-ci. Lorsque la possession d'état d'enfant naturel sera invoquée à titre de preuve de la maternité naturelle, c'est à la loi nationale de la mère qu'il faudra s'en référer. Autrement dit, la loi nationale de la mère est compétente pour déterminer les conséquences découlant de la possession d'état d'enfant naturel maternel.

Il en est de même en matière de filiation naturelle paternelle.

B. LA COMPETENCE DE LA LOI NATIONALE DU PERE NATUREL

124. Comme la possession d'état d'enfant naturel maternel, La possession d'état d'enfant naturel à l'égard du père établit uniquement la filiation naturelle du côté du père. C'est dire que si la possession d'état a pour but l'établissement de la filiation paternelle ou la consolidation de la filiation paternelle, c'est à la loi nationale du prétendu père naturel que le juge devra s'en referer.

En d'autres termes, lorsque l'enfant naturel et son prétendu père ne seront ni camerounais, ni résidants au Cameroun, la possession d'état produira toutes les conséquences qui en découleront conformément à la loi nationale du père.

Laconiquement, lorsque les conséquences découlant de la possession d'état se rattacheront à la filiation paternelle, la loi nationale du père naturel sera compétente. Dans le cas où les effets de la possession d'état se rattacheront plutôt à la filiation maternelle, la loi nationale de la mère naturelle sera applicable.

CONCLUSION DU CHAPITRE II

125. La loi applicable aux conséquences découlant de la possession d'état d'enfant en droit international privé de la filiation est la loi camerounaise lorsque l'enfant et ses père et mère ou l'un de ses père et mère sont camerounais ou résident au Cameroun. Lorsque l'enfant et ses parents ne sont ni camerounais, ni résidants au Cameroun, il faut distinguer suivant qu'il s'agit des effets découlant de la possession d'état d'enfant légitime et suivant qu'il s'agit des effets découlant de la possession d'état d'enfant naturel.

S'agissant des conséquences découlant de la possession d'état d'enfant légitime, la loi applicable est à l'exclusion de la loi nationale de la mère légitime, la loi gouvernant les effets du mariage ou la loi personnelle de l'enfant.

En ce qui concerne les effets découlant de la possession d'état d'enfant naturel, la loi applicable est soit la loi nationale de la mère naturelle, soit la loi nationale du père naturel.

CONCLUSION DU TITRE II

126. L'examen des effets de la possession d'état dans ce second titre s'est intéressé à deux domaines traditionnels du droit international privé : la nationalité et les conflits de lois. Il s'agissait en effet de savoir si l'effet probatoire de la possession d'état pouvait recevoir une application en matière de nationalité. Autrement dit, pouvait-on dans une certaine mesure prouver la nationalité camerounaise par la possession d'état, en suivant le même cheminement qu'en matière de filiation ? Il s'est avéré à la suite de nos développements qu'on pouvait en partant des conditions générales de la possession d'état, procéder à une théorisation de l'effet probatoire de la possession d'état en matière de nationalité. La réflexion sur la possibilité de prouver la nationalité camerounaise par la possession d'état s'est prévalue du droit comparé, notamment, les droits algérien, belge et français de la nationalité. Ces différentes législations considèrent la possession d'état comme un mode d'acquisition de leur nationalité ou comme un mode de preuve.

127. En ce qui concerne l'aspect conflit de lois de ce second titre, Il s'agissait d'identifier et d'apprécier la loi applicable aux effets de la possession d'état d'enfant en droit international privé de la filiation. L'Avant-projet de code a posé à l'article 326 paragraphe 3 une règle de conflit unilatérale désignant la loi applicable à ce rapport de droit. Cette règle rattache les effets découlant de la possession d'état d'enfant à la loi camerounaise, lorsque l'enfant et ses père et mère sont camerounais ou résident au Cameroun. Si on peut comprendre le rattachement à la loi camerounaise des effets découlant de la possession d'état lorsque l'enfant et ses père et mère sont camerounais, on peut s'interroger sur le choix du futur code de rattacher à la loi camerounaise les conséquences découlant de la possession d'état d'enfant étranger, résidant au Cameroun. La stabilité des situations établies dans le milieu social camerounais et plus précisément, la paix des familles semble justifier le choix des rédacteurs. Si le code en préparation à déterminer clairement la loi applicable aux effets de la possession d'état d'enfant en cas de résidence au Cameroun, la loi applicable lorsque l'enfant et ses père et mère ne seront ni camerounais, ni résidants au Cameroun devait être précisée. Nous avons opéré une distinction selon qu'il s'agissait de la filiation légitime et selon qu'il s'agissait de la filiation naturelle. La loi applicable aux effets découlant de la possession d'état d'enfant légitime est après le rejet de la loi nationale de la mère, la loi gouvernant les effets du mariage ou la loi personnelle de l'enfant. La loi applicable aux effets découlant de la possession d'état d'enfant naturel est en vertu de la séparabilité de la possession d'état d'enfant naturel, soit la loi nationale de la mère, soit la loi nationale du père.

CONCLUSION GENERALE

128. La possession d'état s'entend comme une situation de fait constituée par la possession prolongée d'une qualité juridique déterminée, c'est-à-dire ouvrant droit à un statut d'égalité civile que le législateur présume parfois à titre irréfragable, être conforme à la réalité dans le but d'assurer la stabilité de l'état et le respect de la situation établie et consacrée par l'opinion publique. C'est l'apparence d'un état. C'est une vraisemblance à laquelle le législateur attache parfois des effets de droit. Prosaïquement, la notion de possession d'état se définit par référence aux trois notions latines consacrées : le nomen, le tractatus et la fama. Posséder un état c'est au moins en général porter le nom correspondant à l'état que l'on prétend avoir. C'est se comporter comme le véritable titulaire de l'état. C'est aussi le fait d'avoir été considéré par la société, par l'entourage et même par les autorités publiques comme ayant l'état que l'on prétend avoir.

129. La possession d'état produit ou pourrait produire des effets importants en droit. Elle est notamment dotée d'un effet probatoire et d'un effet consolidateur. C'est un mode subsidiaire de preuve de la filiation légitime. A défaut d'acte de naissance, la preuve de la filiation de l'enfant conçu ou né dans le mariage peut être rapportée par la possession d'état d'enfant légitime. Il s'agira notamment d'établir que l'enfant a toujours porté le nom de ceux dont on le dit issu, qu'il les a traité comme ses père et mère légitimes, que les prétendus parents légitimes l'ont traité comme leur fils ou leur fille, que la famille et la société l'ont constamment reconnu comme un enfant légitime.

130. Si dans l'Avant-projet de code la possession d'état est un mode de preuve de la filiation légitime, il n'en est pas de même de la filiation hors mariage. Le futur code a en effet gardé le silence sur l'effet probatoire de la possession d'état d'enfant naturel. L'enfant né hors mariage ne peut pas comme l'enfant légitime invoquer le cas échéant la possession d'état pour établir son lien de filiation. Rien ne justifie pourtant pas la limitation de l'effet probatoire de la possession d'état d'enfant à la filiation légitime. Fort de ce constat, nous avons développé un plaidoyer en faveur de l'établissement de la filiation naturelle par la possession d'état. Ce plaidoyer s'est articulé autour de la convention de New York de 1989 relative aux droits de l'enfant qui proscrit toute forme de discrimination et prône l'égalité entre enfants. Nous nous sommes également appuyés sur l'état du droit de la filiation de certains pays à l'instar de la France, de l'Espagne, du Sénégal et du Gabon, qui considèrent la possession d'état comme un mode de preuve de la filiation naturelle.

131. La possession d'état est encore, sous certaines conditions, un mode de preuve du mariage. L'effet probatoire de la possession d'état d'époux peut être invoqué par les enfants en mal de légitimité pour prouver le mariage de leurs auteurs. Lorsque le caractère légitime de la filiation d'un enfant est contesté et qu'il est dans l'impossibilité de produire l'acte de célébration du mariage de ses parents, il serait injuste de soumettre ce dernier à toute la rigueur du système de la preuve préconstituée. On admet de façon exceptionnelle que cet enfant puisse se prévaloir de l'effet probatoire de la possession d'état matrimonial.

132. La possession d'état n'est pas qu'un mode subsidiaire de preuve de la filiation ou du mariage. Lorsqu'elle est constituée, elle permet également de consolider, de renforcer une situation préalablement établie. Son effet consolidateur permet de renforcer une filiation préconstituée en la mettant à l'abri des contestations et des réclamations. C'est ainsi que nul ne peut réclamer un état contraire à celui que lui donne son acte de naissance et la possession d'état conforme à cet acte. De même que nul ne peut contester l'état de celui qui a une possession d'état conforme à son titre de naissance. L'effet consolidateur de la possession d'état ne peut cependant pas être invoqué dans deux hypothèses : la substitution et la supposition d'enfant. Dans ces deux cas, la filiation est mensongère et, prive la possession d'état constituée de tout effet consolidateur. La filiation ainsi construite sur le mensonge peut être attaquée et détruite par tout ceux qui y ont intérêt.

133. L'effet consolidateur de la possession d'état s'étend aussi au mariage. La possession d'état d'époux peut couvrir les irrégularités formelles affectant l'acte de célébration du mariage et empêcher la nullité de celui-ci. Le Code civil a en effet érigé en fin de non-recevoir l'action que pourrait intenter l'un des conjoints pour annuler l'acte de mariage, lorsqu'ils auront la possession d'état. Cette fin de non-recevoir se limite à l'action d'un des conjoints contre l'autre. Les époux ne peuvent se prévaloir de cette fin de non-recevoir à l'encontre d'un tiers agissant en nullité. L'effet consolidateur de la possession d'état a un objectif : c'est de préserver la stabilité et la paix des familles. Cet objectif sera pleinement atteint si le mariage n'a pas été célébré clandestinement. C'est dire que la clandestinité du mariage enlève tout effet consolidateur à la possession d'état matrimonial.

134. Dans le cadre de ce travail, nous nous sommes également intéressés au Droit international privé. Il fallait en effet réfléchir sur l'éventualité de la preuve de la nationalité camerounaise par la possession d'état et procéder à l'identification de la loi applicable aux conséquences découlant de la possession d'état d'enfant.

Sur le premier point, il nous a été donné de constater qu'en partant des conditions générales de la possession d'état, on pouvait procéder à l'énoncé du principe de la preuve de la nationalité camerounaise par la possession d'état. Nous avons été conforté dans notre analyse par des exemples tirés des droits étrangers notamment, le droit algérien de la nationalité, le droit belge de la nationalité et le droit français de la nationalité. Ces illustrations nous ont permis de progresser prudemment dans la réflexion en ayant conscience que la démarche adoptée n'était pas hasardeuse.

Sur le second point, on peut retenir que la loi applicable aux effets découlant de la possession d'état d'enfant en droit international privé de la filiation est la loi camerounaise lorsque l'enfant et ses père et mère ou l'un de ses père et mère sont camerounais ou résident au Cameroun. Lorsque l'enfant et ses parents ou l'un de ses parents ne sont ni camerounais, ni résidants au Cameroun, la loi applicable doit être identifiée en distinguant la filiation naturelle de la filiation légitime. Nous avons par conséquent rattaché les conséquences découlant de la possession d'état d'enfant légitime à la loi gouvernant les effets du mariage ou à la loi personnelle de l'enfant. Les conséquences découlant de la possession d'état d'enfant naturel ont été quant à elles rattachées à la loi nationale de la mère ou à la loi nationale du père, selon qu'il s'agit de la possession d'état d'enfant naturel maternel et selon qu'il s'agit de la possession d'état d'enfant naturel paternel.

Ces propos nous révèlent que les effets de la possession d'état ne se limitent pas à l'établissement de la filiation, encore moins au droit interne de la famille. Ils s'intègrent dans un ensemble plus vaste englobant la nationalité, le mariage et même le droit international privé de la famille.

ANNEXES

SOMMAIRE DES ANNEXES

I - Avant-projet portant code camerounais des personnes et de la famille. Mouture d'avril 2007 (extrait).

II - Arrêt de la première chambre civile de la Cour de Cassation française, audience publique du 11 janvier 2005 : réclamation de la nationalité française par déclaration du fait de la possession constante d'état de français.

III - Circulaire n° 93/2007 du préfet de l'ALLIER (France) sur la condition de délivrance et de renouvellement des cartes nationales d'identité (possibilité d'invoquer la possession d'état pour remédier à l'absence du certificat de nationalité française).

IV - Code sénégalais de la famille (extrait).

V - Déclaration de la nationalité française à raison de la possession d'état de français (article 21-13 du code civil).

VI - Loi n° 72/3 du 3 janvier 1972 sur la filiation en France (extrait).

VII - Loi n° 82/536 du 25 juin 1982, modifiant l'article 334-8 du code civil français relatif à l'établissement de la filiation naturelle.

VIII - Ordonnance française n° 2005/759 du 4 juillet 2005 portant reforme de la filiation.

IX - Ordonnance n° 70/86 du 15 décembre 1970 portant code de la nationalité algérienne.

X - Ordonnance malgache n° 62/089 du 1er octobre 1962 relative au mariage.

I- AVANT-PROJET PORTANT CODE DES PERSONNES ET DE LA FAMILLE

MOUTURE D'AVRIL 2007

TITRE PRELIMINAIRE

Article 1er. - (1) La présente loi porte code des personnes, et de la famille.

(2) A ce titre, elle :

a) régit, sans préjudice des dispositions de la constitution, la force obligatoire des conventions et traités internationaux, des lois, ordonnances, règlements et autres actes de l'autorité publique ;

b) fixe les règles relatives :

- à la personnalité humaine et à ses droits ;

- au nom ;

- au domicile ;

- à l'état civil ;

- à la nationalité ;

- aux liens conjugaux ;

- à la filiation ;

- à la parenté et l'alliance ;

- à la minorité et à la majorité ;

- aux régimes matrimoniaux ;

- aux successions.

Article 18. - (1) La filiation de l'enfant né pendant le mariage est régie par la loi qui gouverne les effets du mariage.

(2) La filiation de l'enfant né hors mariage est régie par la loi nationale de la mère et en cas de reconnaissance, par celle du père.

(3) Lorsque l'enfant et ses parents prétendus ont des nationalités différentes, la loi applicable est celle de l'enfant ou, à défaut, celle du lieu de naissance de l'enfant.

TITRE II : DES PERSONNES

CHAPITRE IV : DU NOM

Article 73. - (1) La femme mariée a le droit de conserver son nom séparément ou conjointement avec celui de son mari.

(2) la femme séparée de corps ou divorcée conserve le cas échéant l'usage du nom de son mari, sauf opposition de ce dernier et décision contraire du juge.

TITRE V : DES LIENS CONJUGAUX

Article 255. - Sous réserve du régime applicable, nul ne peut réclamer le titre d'époux et les effets civils du mariage s'il ne présente un acte de célébration de mariage inscrit sur le registre d'état civil.

Article 256. - La possession d'état ne peut dispenser ceux qui l'invoqueront de présenter l'acte de célébration du mariage devant l'officier d'état civil.

TITRE VI : DE LA FILIATION

CHAPITRE I : DISPOSITIONS GENERALES

Article 308. - (1) La filiation peut être légitime, naturelle ou adoptive.

(2) Tous les enfants dont la filiation est légalement établie ont les mêmes droits et les mêmes devoirs dans leurs relations avec leurs père et mère.

(3) L'enfant ne peut avoir qu'une seule filiation, que celle-ci résulte d'une présomption, d'une reconnaissance ou d'un acte judiciaire.

Article 309. - (1) La filiation maternelle résulte du fait de l'accouchement.

(2) Elle est établie par l'indication du nom de la mère sur l'acte de naissance de l'enfant.

Article 310. - La filiation paternelle résulte, soit d'une déclaration de naissance devant l'officier d'état civil dans les formes prévues aux articles 123 et suivants du présent code, soit des présomptions légales, soit d'une reconnaissance judiciaire, soit d'une action en recherche de paternité.

CHAPITRE III : DE LA FILIATION LEGITIME

Article 322. - (1) La filiation tant maternelle que paternelle se prouve par les actes d'état civil.

(2) À défaut d'acte d'état civil, la possession constante de l'état d'enfant peut suffire à établir la filiation.

Article 324. - La possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui indiquent les rapports de filiation et de parenté entre un enfant et la famille à laquelle il prétend appartenir, notamment :

b) l'enfant a toujours porté le nom du père qu'il prétend être le sien ;

c) le père supposé l'a traité comme son enfant et a pourvu en cette qualité à son éducation, à son entretien et à son établissement ;

d) l'enfant a été reconnu constamment pour tel dans la société ;

e) l'enfant a été reconnu pour tel par la famille.

Article 326. - (1) La filiation est régie par la loi nationale de la mère au jour de la naissance de l'enfant.

Si la mère n'est pas connue, la filiation est régie par la loi camerounaise.

(3) Lorsque l'enfant, ses père et mère sont camerounais ou résident au Cameroun, la possession d'état produit toutes les conséquences qui en découlent, conformément à la loi camerounaise.

Article 332. - (1) La filiation d'un enfant légitime se prouve :

- par l'acte de naissance inscrit sur le registre d'état civil ;

- par l'acte de mariage de ses père et mère ;

(2) À défaut de l'acte de naissance, la filiation peut être établie par la possession constante de l'état d'enfant légitime.

Article 336. - Nul ne peut réclamer un état contraire à celui que lui donnent son acte de naissance et la possession d'état conforme à cet acte.

CHAPITRE IV : DE LA FILIATION NATURELLE

Article 340. - L'enfant conçu et né hors mariage est un enfant naturel.

Article 341. - (1) La filiation naturelle résulte à l'égard de la mère du seul fait de l'accouchement.

(2) À l'égard du père, elle est établie conformément aux dispositions des articles 342 et suivants du présent code.

Article 354. - (1) L'action en contestation de la filiation est ouverte à toute personne intéressée, ainsi qu'au ministère public.

(2) Elle est dirigée contre la personne qui bénéficie de présomptions légales.

(3) Elle est imprescriptible et n'est susceptible, ni de transaction, ni de réconciliation, sauf si elle est fondée sur un intérêt exclusivement pécuniaire.

(4) La cause est instruite et débattu en chambre du conseil, le ministère public entendu en présence du travailleur social. Le jugement est rendu en audience publique.

(5) Nul ne peut contester l'état de celui qui a une possession d'état conforme à son titre de naissance.

II - ARRET DE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE DE LA COUR DE CASSATION : RECLAMATION DE LA NATIONALITE FRANCAISE PAR DECLARATION DU FAIT DE LA POSSESSION CONSTANTE D'ETAT DE FRANÇAIS.

 

Audience publique du 11 janvier 2005

Cassation


N° de pourvoi : 03-11115
Publié au bulletin

Président : M. ANCEL


 

REPUBLIQUE FRANCAISE


 

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

 

Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :

 

Vu les articles 21-13 du Code civil et 17 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que peuvent réclamer la nationalité française par déclaration, les personnes qui ont joui, d'une façon constante, de la possession d'état de Français, pendant les dix années précédant leur déclaration et du second que le déclarant doit fournir notamment tous documents émanant des autorités françaises justifiant qu'il jouit de façon constante de la possession d'état de Français depuis dix ans tels que carte nationale d'identité, passeport français, carte d'électeur, pièces militaires, immatriculation dans les consulats de France ainsi que, le cas échéant, le jugement ou la décision administrative lui opposant son extranéité ;

Attendu que pour infirmer le jugement du tribunal de grande instance ayant décidé que M. X... avait acquis la nationalité française par la possession d'état et constater son extranéité, l'arrêt retient qu'un certificat de nationalité française délivré le 21 février 1986 par le juge du tribunal d'instance de Romans-sur-Isère a été annulé par jugement définitif du 5 mai 1993 signifié régulièrement à l'intéressé, en mairie, le 17 mai 1993, à l'adresse qu'il avait lui-même déclarée, de sorte que depuis cette date, M. X..., réputé avoir eu connaissance de son extranéité, ne peut invoquer la possession d'état de Français de bonne foi ; qu'il ajoute que, depuis la date de ce jugement ayant acquis force de chose jugée, l'Etat français n'a pas reconnu le déclarant comme Français ;

 

Attendu qu'il résulte cependant des constatations des juges du fond qu'étaient produits un second certificat de nationalité française du 23 février 1988, une carte nationale d'identité du 13 mai 1988, valable jusqu'au 13 mai 1998, un passeport établi le 8 septembre 1993 et des cartes d'électeurs utilisées lors de scrutins en 1995, 1997 et 1998 ;

 Qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher d'abord si ces éléments n'étaient pas constitutifs d'une possession d'état et ensuite si M. X..., ainsi qu'il le soutenait, n'avait pas connu la décision du 5 mai 1993 tardivement, à une date proche de sa déclaration du 26 juin 1998, la cour d'appel n'a donné de base légale à sa décision ni au regard de l'article 17 du décret du 30 décembre 1993 qui implique que l'intéressé connaisse son extranéité ni à celui de l'article 21-13 du Code civil qui suppose seulement que le réclamant souscrive sa déclaration dans un délai raisonnable à compter de cette connaissance ;

PAR CES MOTIFS :

 CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 octobre 2002, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

 Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

 Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille cinq.


Décision attaquée : cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre B) 2002-10-10
 

III - CIRCULAIRE N° 93/2007 DU PREFET DE L'ALLIER : POSSIBILITE D'INVOQUER LA POSSESSION D'ETAT POUR REMEDIER A L'ABSENCE DU CERTIFICAT DE NATIONALITE FRANCAISE.

PREFECTURE DE L'ALLIER

Moulins, le 26 septembre 2007

Direction de la réglementation

des libertés publiques

et de l'environnement

Bureau de la nationalité et des étrangers

CNI/Passeports

Tel. 04 70 48 33 33 ou 04 70 48 33 34

N° 93/2007

Le Préfet de l'Allier

Circ. 93/2007

Mot clé : CNI - PASSEPORTS

Thématique : Etat civil - CNI - D1

A

Mesdames et Messieurs les Maires

du département de l'Allier

(en communication à Messieurs les

Sous-préfets de Montluçon et Vichy)

OBJET: Condition de délivrance et renouvellement des cartes nationales d'identité.

L'attention de Madame le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a été de nouveau appelée sur les difficultés rencontrées par des usagers auquel il est demandé de produire un certificat de nationalité française pour obtenir la délivrance ou le renouvellement d'une carte nationale d'identité.

Il m'a semblé utile de vous rappeler les règles qui prévalent en la matière.

Dans le cas où l'usager est en mesure de produire une carte plastifiée, dite« sécurisée », ce titre établit une présomption de possession de nationalité française en faveur du demandeur.

Dans l'hypothèse où l'usager ne peut produire qu'une précédente carte cartonnée, il y a lieu de rechercher l'application du concept de possession d'état de français, lorsque celle-ci ne soulève pas de doute.

Cette possession d'état suppose la réunion de trois éléments :

- la bonne foi du demandeur s'étant toujours cru français,

- la continuité de cette possession d'état durant les dix ans précédant la date de la demande,

- un faisceau d'indices pouvant indiquer que la personne a été également considérée comme française par les pouvoirs publics. Ainsi, la production d'une ancienne carte nationale d'identité, même périmée, devra s'accompagner de documents de nature plus diverse manifestant un lien avec la qualité de Français (passeport, carte d'électeur, pièce justifiant l'appartenance à la fonction publique française ou l'accomplissement des obligations militaires par exemple).

Je vous rappelle que les catégories de personnes suivantes peuvent entrer dans le champ d'application de la mesure de dispense de certificat de nationalité française par application du concept de possession d'état de Français :

1° les personnes nées à l'étranger qui peuvent justifier soit de leur inscription et de celle de leurs parents au registre des Français établis hors de France, soit de leur possession d'état de Français et de celle d'au moins un de leurs parents.

2° les mineurs nés à l'étranger dont l'acte de naissance a fait l'objet d'une transcription sur les registres consulaires français et dont l'un au moins des parents figure au registre des Français établis hors de France.

3° les femmes d'origine étrangère ayant épousé un français entre le 14 août 1927 et le 12 janvier 1973.

4° les personnes nées dans un département ou territoire précédemment sous administration française et les rapatriés d'Afrique du Nord.

5° les personnes nées en France de parents étrangers, entre le 26 janvier 1889 et le

1er janvier 1976.

6° les femmes d'origine étrangère ayant épousé un Français durant la seconde guerre mondiale.

7° les Alsaciens-Mosellans.

Dans tous les cas où vous serez confronté à l'application du concept de possession d'état de Français vous recevrez le dossier de demande, sans porter d'appréciation sur la valeur des titres produits et vous me le transmettrez en l'état et dans les meilleurs délais en enregistrant, le cas échéant, la volonté de l'usager de se voir reconnaître la possession d'état de Français.

Eu égard au caractère sensible de cette question, je vous remercie de veiller à la bonne application de ces instructions.

Pour le Préfet,

Le Secrétaire Général

Signé

Patrick LAPOUZE

IV- CODE DE LA FAMILLE SENEGALAIS

LIVRE PREMIER : DES PERSONNES

Article 98. - La loi fixe pour chacune des actions d'état l'objet et les moyens de preuve autorisés.

Lorsque la loi autorise la preuve par la possession d'état, le demandeur établit par tous moyens que, de façon constante, il s'est comporté, a été traité par la famille et considéré par la société comme ayant l'état auquel il prétend.

LIVRE III : DE LA FILIATION

CHAPITRE PREMIER : DE LA FILIATION D'ORIGINE

Article 197. - La filiation tant maternelle que paternelle se prouve par les actes de l'état civil.

A défaut d'acte, la possession constante de l'état d'enfant peut suffire à établir la filiation.

Article 198. - La possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui indiquent le rapport de filiation et de parenté entre un enfant et la famille à laquelle il prétend appartenir.

Elle est prouvée et constatée par témoins.

Article 199. - Pour l'établissement de la filiation maternelle, la possession d'état est établie en prouvant que l'enfant, de façon constante, s'est comporté, a été traité par la famille et considéré par la société comme étant né de la femme qu'il prétend être sa mère.

Article 200 (Loi n° 89-01 du 17 janvier 1989). - La possession d'état à l'égard du père légitime est établie en prouvant que, constamment :

- l'enfant a porté le nom du père dont il prétend descendre ;

- le père l'a traité comme son enfant et a pourvu, en cette qualité, à son éducation, son entretien et son établissement ;

- il a été reconnu pour tel par la société ;

- il a été traité comme tel par la famille.

V - DECLARATION DE LA NATIONALITE FRANCAISE A RAISON DE LA POSSESSION D'ETAT DE FRANÇAIS (ARTICLE 21-13 DU CODE CIVIL)

MINISTERE DES AFFAIRES ETRANGERES ET EUROPEENNES

CONSULAT GENERAL DE FRANCE A TANANARIVE (MADAGASCAR)

SERVICE NATIONALITE

3, rue Jean Jaurès - B.P. 897 - Ambatomena

Tananarive 101 (Madagascar)

(261.20) 22.398.50

Télécopieur : (261.20) 22.398.84.

Service de la Valise Diplomatique

128 Bis, rue de l'Université - 75351 Paris Cedex 07 SP

-

DECLARATION DE LA NATIONALITE FRANÇAISE A RAISON

DE LA POSSESSION D'ETAT DE FRANÇAIS

(Article 21-13 du Code Civil)

I. CONDITIONS DE RECEVABILITE DE LA DECLARATION

Cette disposition offre aux personnes qui ont été considérées à tort comme française pendant dix années au moins avant la découverte de leur extranéité, la possibilité de « régulariser » leur situation en souscrivant une déclaration acquisitive de nationalité dans un délai fixé à environ un an.

La possession d'état de Français est définie par un ensemble de fait qui traduisent l'apparence du lien de nationalité unissant une personne à l'Etat français. Ces faits sont tirés à la fois du comportement de l'intéressé(e) qui s'est conduit en tous points comme l'aurait fait un Français et de la réaction de l'Etat et des administrations qui l'ont toujours, quand l'occasion s'en est présentée, tenu pour Français.

De plus, le (a) déclarant(e) doit être assimilé à la culture française.

II. PIECES JUSTIFICATIVES A FOURNIR

1.1. Par le (a) déclarant(e)

õ copie intégrale de son acte de naissance (original + photocopie) datant de moins de 3 mois et, le cas échéant, l' (des) acte(s) de reconnaissance le (a) concernant :

· en cas de mariage : acte de mariage délivré par l'autorité française (original + photocopie) et deux photocopies du livre de famille français

· en cas de mariage(s) antérieur(s) dissous par divorce : copie intégrale de l'acte de mariage mis à jour, jugement de divorce et certificat de non appel (original + photocopie)

· en cas de mariage(s) antérieur(s) dissous par veuvage : copie intégrale de l'acte de mariage et copie intégrale de l'acte de décès (original + photocopie)

õ tous documents émanant des autorités françaises justifiant la jouissance de façon constante de la possession d'état depuis 10 ans (original + deux photocopies) : accomplissement des obligations militaires, inscription sur les listes électorales, carte nationale d'identité, passeport, certificat de nationalité française, carte d'électeur, carte d'immatriculation consulaire, etc.

õ le cas échéant, le jugement ou la décision administrative opposant l'extranéité mentionnant l'avis de

Madame le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, Bureau de la Nationalité (13, Place Vendôme

- 75042 Paris Cedex 01)

õ le cas échéant, actes de naissance des parents et/ou de mariage des parents qui auraient été délivrés par l'autorité française et photocopie de leur livret de famille français

õ curriculum vitae avec cursus scolaire mentionnant les diplômes obtenus et les divers emplois occupés tant en France qu'à Madagascar ou autre pays (original + photocopie)

1.2. enfant(s) mineur(s) étranger(s) non marié(s) naturel(s) ou légitime(s)

õ copie intégrale l'(des) acte(s) de naissance et éventuellement de reconnaissance (original + photocopie)

õ photocopie en deux exemplaires de tous documents français qui auraient été délivrés par les autorités française

õ documents établissant cet (ces) enfant(s) a (ont) la même résidence habituelle que le (a) déclarant (e) et son conjoint ou réside (nt) alternativement avec eux en cas de divorce (original + photocopie) : par exemple : certificat(s) de scolarité, certificat(s) de résidence, prise en charge, etc.

III. FORMALITES

Deux comparutions personnelles du postulants au Service de la Nationalité devront être prévues : la première pour le dépôt du dossier complet, la deuxième pour la signature de la déclaration.

./.

VI - LOI N° 72/3 DU 3 JANVIER 1972 SUR LA FILIATION EN FRANCE

Article 1er. - Le titre septième (De la paternité et de la filiation) au livre 1er du code civil, est remplacé par les dispositions suivantes :

TITRE SEPTIEME : DELA FILIATION

CHAPITRE PREMIER : DISPOSITIONS COMMUNES A LA FILIATION LEGITIME ET A LA FILAITION NATURELLE

Article 311. - La loi présume que l'enfant a été conçu pendant la période qui s'étend du trois centième au cent quatre-vingtième jour, inclusivement, avant la date de la naissance.

La conception est présumée avoir eu lieu à un moment quelconque de cette période, suivant ce qui est demandé dans l'intérêt de l'enfant.

La preuve contraire est recevable pour combattre ces présomptions.

Article 311-1. - La possession s'établit par une réunion suffisante de faits qui indiquent le rapport de filiation et de parenté entre un individu et la famille à laquelle il est dit appartenir.

La possession d'état doit être continue.

Article 311-2. - Les principaux de ces faits sont :

Que l'individu a toujours porté le nom de ceux dont on le dit issu ;

Que ceux-ci l'ont traité comme leur enfant, et qu'il les a traités comme ses père et mère ;

Qu'ils ont, en cette qualité, pourvu à son éducation, à son entretien et à son établissement ;

Qu'il est reconnu pour tel, dans la société et par la famille ;

Que l'autorité publique le considère comme tel.

Article 311-3. - Les parents ou l'enfant peuvent demander au juge des tutelles que leur soit délivré, dans les conditions prévues aux articles 71 et 72 du présent code, un acte de notoriété faisant foi de la possession d'état jusqu'à preuve contraire ;

Sans préjudice de tous autres moyens de preuve auxquels ils pourraient recourir pour en établir l'existence en justice, si elle venait à être contestée.

Article 311-14. - La filiation est régie par la loi personnelle de la mère au jour de la naissance de l'enfant ; si la mère n'est pas connue, par la loi personnelle de l'enfant.

Article 311-15. - Toutefois, si l'enfant légitime et ses père et mère, l'enfant naturel et l'un de ses père et mère ont en France leur résidence habituelle, commune ou séparée, la possession d'état produit toutes les conséquences qui en découlent selon la loi française, lors même que les autres éléments de la filiation auraient pu dépendre d'une loi étrangère.

CHAPITRE II : DE LA FILIATION LEGITIME

Article 319. - La filiation des enfants légitimes se prouve par les actes de naissance inscrits sur les registres de l'état civil.

Article 320. - A défaut de ce titre, la possession de l'état d'enfant légitime suffit.

Article 321. - Il n'y a de possession d'état d'enfant légitime qu'autant qu'elle rattache l'enfant indivisiblement à ses père et mère.

Article 322. - Nul ne peut réclamer un état contraire à celui que lui donnent son titre de naissance et la possession conforme à ce titre.

Et réciproquement, nul ne peut contester l'état de celui qui a une possession conforme à son titre de naissance.

Article 322-1. - Toutefois, s'il est allégué qu'il y a eu supposition d'enfant, ou substitution, même involontaire, soit avant, soit après la rédaction de l'acte de naissance, la preuve en sera recevable et pourra se faire par tous moyens.

CHAPITRE III : DE LA FILIATION NATURELLE

Article 334-8. - La filiation naturelle est légalement établie, soit par reconnaissance volontaire, soit par déclaration judiciaire, à la suite d'une action en recherche de paternité ou de maternité.

La filiation naturelle peut aussi se trouver légalement établie par l'effet nécessaire d'un jugement, notamment à la suite d'une action en désaveu ou en contestation de légitimité.

Article 334-9. - Toute reconnaissance est nulle, toute demande en recherche est irrecevable, quand l'enfant a une filiation légitime déjà établie par la possession d'état.

VII - LOI N° 82/536 DU 25 JUIN 1982 MODIFIANT L'ARTICLE 334-8 DU CODE CIVIL FRANÇAIS RELATIF A L'ETABLISSEMENT DE LA FILIATION NATURELLE

Article 1er. - L'article 334-8 du code civil est modifié ainsi qu'il suit :

 Article 334-8. - La filiation naturelle est légalement établie par reconnaissance volontaire.

La filiation naturelle peut aussi se trouver légalement établie par la possession d'état ou par l'effet d'un jugement.

Article 2. - Les dispositions de la présente loi sont applicables aux enfants naturels nés avant son entrée en vigueur. Ceux-ci ne pourront néanmoins demander à s'en prévaloir dans les successions déjà liquidées.

La présente loi sera exécutée comme loi de l'Etat.

VIII - ORDONNANCE N° 2005/759 DU 4 JUILLET 2005 PORTANT REFORME DE LA FILIATION EN FRANCE

JORF n°156 du 6 juillet 2005 page 11159
texte n° 19

Le Président de la République,
Sur le rapport du Premier ministre et du garde des sceaux, ministre de la justice,
Vu la Constitution, notamment son article 38 ;
Vu la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie, notamment son article 21 (III, 4°) ;
Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, notamment son article 7 (4°) ;
Vu le code civil ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code pénal ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 2002-304 du 4 mars 2002 relative au nom de famille, modifiée par la loi n° 2003-516 du 18 juin 2003 ;
Vu la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 modifiée conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de territoire d'outre-mer, notamment son article 4 ;
Vu la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte, notamment son article 3 (2°) ;
Vu la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, notamment son article 4 ;
Le Conseil d'Etat entendu ;
Le conseil des ministres entendu,
Ordonne :

· Chapitre Ier : Dispositions modifiant le code civil

Article 1
Le code civil est modifié conformément aux articles 2 à 18 de la présente ordonnance.

Article 2


Les articles 310, 310-1, 311-23, 311-4, 311-5, 311-6, 311-9, 311-10, 341-1 et 340 deviennent respectivement les articles 309, 310, 311-24, 318, 318-1, 319, 323, 324, 326 et 327.
Le deuxième alinéa de l'article 311-1 devient l'article 311-2.
Toute référence à l'un des articles dont la numérotation est modifiée par les alinéas qui précèdent est remplacée par la référence correspondant à la nouvelle numérotation.

Article 3


Le titre VII du livre Ier comprend les articles 310 à 342-8, tels qu'ils résultent de la présente ordonnance. Il est organisé comme suit :


« Chapitre Ier


« Dispositions générales »


Comprenant les articles 310-1 à 311-24 et organisé comme suit :


« Section I


« Des preuves et présomptions »


Comprenant les articles 310-3 à 311-2.


« Section II


« Du conflit des lois relatives à la filiation »


Comprenant les articles 311-14 à 311-18.


« Section III


« De l'assistance médicale à la procréation »


Comprenant les articles 311-19 et 311-20.


« Section IV


« Des règles de dévolution du nom de famille »


Comprenant les articles 311-21 à 311-24.


« Chapitre II


« De l'établissement de la filiation »


Comprenant les articles 311-25 à 317 et organisé comme suit :


« Section I


« De l'établissement de la filiation par l'effet de la loi »


« Paragraphe I


« De la désignation de la mère dans l'acte de naissance »


Comprenant l'article 311-25.


« Paragraphe II


« De la présomption de paternité »


Comprenant les articles 312 à 315.


« Section II


« De l'établissement de la filiation par la reconnaissance »


Comprenant l'article 316.


« Section III


« De l'établissement de la filiation par la possession d'état »


Comprenant l'article 317.


« Chapitre III


« Des actions relatives à la filiation »


Comprenant les articles 318 à 337 et organisé comme suit :


« Section I


« Dispositions générales »


Comprenant les articles 318 à 324.


« Section II


« Des actions aux fins d'établissement de la filiation »


Comprenant les articles 325 à 331.


« Section III


« Des actions en contestation de la filiation »


Comprenant les articles 332 à 337.


« Chapitre IV


« De l'action à fins de subsides »


Comprenant les articles 342 à 342-8.

Article 4


I. - L'article 310-1 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 310-1. - La filiation est légalement établie, dans les conditions prévues au chapitre II du présent titre, par l'effet de la loi, par la reconnaissance volontaire ou par la possession d'état constatée par un acte de notoriété.
« Elle peut aussi l'être par jugement dans les conditions prévues au chapitre III du présent titre. »
II. - Après l'article 310-1 est inséré un article 310-2 ainsi rédigé :
« Art. 310-2. - S'il existe entre les père et mère de l'enfant un des empêchements à mariage prévus par les articles 161 et 162 pour cause de parenté, la filiation étant déjà établie à l'égard de l'un, il est interdit d'établir la filiation à l'égard de l'autre par quelque moyen que ce soit. »

Article 5


I. - Après l'article 310-2 est inséré un article 310-3 ainsi rédigé :
« Art. 310-3. - La filiation se prouve par l'acte de naissance de l'enfant, par l'acte de reconnaissance ou par l'acte de notoriété constatant la possession d'état.
« Si une action est engagée en application du chapitre III du présent titre, la filiation se prouve et se conteste par tous moyens, sous réserve de la recevabilité de l'action. »
II. - L'article 311-1 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 311-1. - La possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui révèlent le lien de filiation et de parenté entre une personne et la famille à laquelle elle est dite appartenir.
« Les principaux de ces faits sont :
« 1° Que cette personne a été traitée par celui ou ceux dont on la dit issue comme leur enfant et qu'elle-même les a traités comme son ou ses parents ;
« 2° Que ceux-ci ont, en cette qualité, pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation ;
« 3° Que cette personne est reconnue comme leur enfant, dans la société et par la famille ;
« 4° Qu'elle est considérée comme telle par l'autorité publique ;
« 5° Qu'elle porte le nom de celui ou ceux dont on la dit issue. »
III. - L'article 311-2, tel qu'il résulte de l'article 2 de la présente ordonnance, est complété par les mots : «, paisible, publique et non équivoque. »

Article 6


A l'article 311-15, les mots : « l'enfant légitime et ses père et mère, l'enfant naturel et l'un de ses père et mère » sont remplacés par les mots : « l'enfant et ses père et mère ou l'un d'eux ».

Article 7


L'article 311-20 est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa, les mots : « en contestation de filiation ou en réclamation d'état » sont remplacés par les mots : « aux fins d'établissement ou de contestation de la filiation » ;
2° Le cinquième alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :
« En outre, sa paternité est judiciairement déclarée. L'action obéit aux dispositions des articles 328 et 331. »

Article 8


I. - Le troisième alinéa de l'article 311-21 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Lorsqu'il a déjà été fait application du présent article ou du deuxième alinéa de l'article 311-23 à l'égard d'un enfant commun, le nom précédemment dévolu ou choisi vaut pour les autres enfants communs. »
II. - L'article 311-23 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 311-23. - Lorsque la filiation n'est établie qu'à l'égard d'un parent à la date de la déclaration de naissance, l'enfant prend le nom de ce parent.
« Lors de l'établissement du second lien de filiation et durant la minorité de l'enfant, les parents peuvent, par déclaration conjointe devant l'officier de l'état civil, choisir soit de lui substituer le nom de famille du parent à l'égard duquel la filiation a été établie en second lieu, soit d'accoler leurs deux noms, dans l'ordre choisi par eux, dans la limite d'un nom de famille pour chacun d'eux. Le changement de nom est mentionné en marge de l'acte de naissance.
« Toutefois, lorsqu'il a déjà été fait application de l'article 311-21 ou du deuxième alinéa du présent article à l'égard d'un autre enfant commun, la déclaration de changement de nom ne peut avoir d'autre effet que de donner le nom précédemment dévolu ou choisi.
« Si l'enfant a plus de treize ans, son consentement personnel est nécessaire. »
III. - A l'article 311-24, tel qu'il résulte de l'article 2 de la présente ordonnance, la référence à l'article 334-2 est remplacée par la référence à l'article 311-23.

Article 9


Après l'article 311-24, tel qu'il résulte de l'article 2 de la présente ordonnance, est inséré un article 311-25 ainsi rédigé :
« Art. 311-25. - La filiation est établie, à l'égard de la mère, par la désignation de celle-ci dans l'acte de naissance de l'enfant. »

Article 10


I. - Au premier alinéa de l'article 312, après le mot : « conçu », sont ajoutés les mots : « ou né ».
II. - Les articles 313 à 315 sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Art. 313. - En cas de demande en divorce ou en séparation de corps, la présomption de paternité est écartée lorsque l'enfant est né plus de trois cents jours après la date soit de l'homologation de la convention réglant l'ensemble des conséquences du divorce ou des mesures provisoires prises en application de l'article 250-2, soit de l'ordonnance de non-conciliation, et moins de cent quatre-vingts jours depuis le rejet définitif de la demande ou la réconciliation.
« Néanmoins, la présomption de paternité se trouve rétablie de plein droit si l'enfant a la possession d'état à l'égard de chacun des époux et s'il n'a pas une filiation paternelle déjà établie à l'égard d'un tiers.
« Art. 314. - La présomption de paternité est écartée lorsque l'acte de naissance de l'enfant ne désigne pas le mari en qualité de père et que l'enfant n'a pas de possession d'état à son égard.
« Art. 315. - Lorsque la présomption de paternité est écartée dans les conditions prévues aux articles 313 et 314, ses effets peuvent être rétablis en justice dans les conditions prévues à l'article 329. »

Article 11


L'article 316 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 316. - Lorsque la filiation n'est pas établie dans les conditions prévues à la section I du présent chapitre, elle peut l'être par une reconnaissance de paternité ou de maternité, faite avant ou après la naissance.
« La reconnaissance n'établit la filiation qu'à l'égard de son auteur.
« Elle est faite dans l'acte de naissance, par acte reçu par l'officier de l'état civil ou par tout autre acte authentique.
« L'acte comporte les énonciations prévues à l'article 62 et la mention que l'auteur de la reconnaissance a été informé du caractère divisible du lien de filiation ainsi établi. »

Article 12


L'article 317 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 317. - Chacun des parents ou l'enfant peut demander au juge que lui soit délivré, dans les conditions prévues aux articles 71 et 72, un acte de notoriété qui fera foi de la possession d'état jusqu'à preuve contraire.
« Quand le parent prétendu est décédé avant la déclaration de naissance de l'enfant, l'acte de notoriété peut être délivré en prouvant une réunion suffisante de faits au sens de l'article 311-1.
« La délivrance de l'acte de notoriété ne peut être demandée que dans un délai de cinq ans à compter de la cessation de la possession d'état alléguée.
« La filiation établie par la possession d'état constatée dans l'acte de notoriété est mentionnée en marge de l'acte de naissance de l'enfant. »

Article 13


I. - A l'article 319, tel qu'il résulte de l'article 2 de la présente ordonnance, les mots : « de délit » et : « d'un individu » sont remplacés respectivement par les mots : « d'infraction » et : « d'une personne ».
II. - Les articles 320 à 322 sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Art. 320. - Tant qu'elle n'a pas été contestée en justice, la filiation légalement établie fait obstacle à l'établissement d'une autre filiation qui la contredirait.
« Art. 321. - Sauf lorsqu'elles sont enfermées par la loi dans un autre délai, les actions relatives à la filiation se prescrivent par dix ans à compter du jour où la personne a été privée de l'état qu'elle réclame, ou a commencé à jouir de l'état qui lui est contesté. A l'égard de l'enfant, ce délai est suspendu pendant sa minorité.
« Art. 322. - L'action peut être exercée par les héritiers d'une personne décédée avant l'expiration du délai qui était imparti à celle-ci pour agir.
« Les héritiers peuvent également poursuivre l'action déjà engagée, à moins qu'il n'y ait eu désistement ou péremption d'instance. »
III. - Le premier alinéa de l'article 324, tel qu'il résulte de l'article 2 de la présente ordonnance, est remplacé par les dispositions suivantes :
« Les jugements rendus en matière de filiation sont opposables aux personnes qui n'y ont point été parties. Celles-ci ont le droit d'y former tierce opposition dans le délai mentionné à l'article 321 si l'action leur était ouverte. »

Article 14


I. - L'article 325 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 325. - A défaut de titre et de possession d'état, la recherche de maternité est admise sous réserve de l'application de l'article 326.
« L'action est réservée à l'enfant qui est tenu de prouver qu'il est celui dont la mère prétendue a accouché. »
II. - Le second alinéa de l'article 327, tel qu'il résulte de l'article 2 de la présente ordonnance, est remplacé par les dispositions suivantes :
« L'action en recherche de paternité est réservée à l'enfant. »
III. - Les articles 328 à 331 sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Art. 328. - Le parent, même mineur, à l'égard duquel la filiation est établie a, pendant la minorité de l'enfant, seul qualité pour exercer l'action en recherche de maternité ou de paternité.
« Si aucun lien de filiation n'est établi ou si ce parent est décédé ou dans l'impossibilité de manifester sa volonté, l'action est intentée conformément aux dispositions de l'article 464, alinéa 3.
« L'action est exercée contre le parent prétendu ou ses héritiers. A défaut d'héritiers ou si ceux-ci ont renoncé à la succession, elle est dirigée contre l'Etat. Les héritiers renonçant sont appelés à la procédure pour y faire valoir leurs droits.
« Art. 329. - Lorsque la présomption de paternité a été écartée en application des articles 313 ou 314, chacun des époux peut demander, durant la minorité de l'enfant, que ses effets soient rétablis en prouvant que le mari est le père. L'action est ouverte à l'enfant pendant les dix années qui suivent sa majorité.
« Art. 330. - La possession d'état peut être constatée à la demande de toute personne qui y a intérêt dans le délai mentionné à l'article 321.
« Art. 331. - Lorsqu'une action est exercée en application de la présente section, le tribunal statue, s'il y a lieu, sur l'exercice de l'autorité parentale, la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant et l'attribution du nom. »

Article 15


Les articles 332 à 337 sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Art. 332. - La maternité peut être contestée en rapportant la preuve que la mère n'a pas accouché de l'enfant.
« La paternité peut être contestée en rapportant la preuve que le mari ou l'auteur de la reconnaissance n'est pas le père.
« Art. 333. - Lorsque la possession d'état est conforme au titre, seuls peuvent agir l'enfant, l'un de ses père et mère ou celui qui se prétend le parent véritable. L'action se prescrit par cinq ans à compter du jour où la possession d'état a cessé.
« Nul ne peut contester la filiation lorsque la possession d'état conforme au titre a duré au moins cinq ans depuis la naissance ou la reconnaissance, si elle a été faite ultérieurement.
« Art. 334. - A défaut de possession d'état conforme au titre, l'action en contestation peut être engagée par toute personne qui y a intérêt dans le délai prévu à l'article 321.
« Art. 335. - La filiation établie par la possession d'état constatée par un acte de notoriété peut être contestée par toute personne qui y a intérêt en rapportant la preuve contraire, dans le délai de cinq ans à compter de la délivrance de l'acte.
« Art. 336. - La filiation légalement établie peut être contestée par le ministère public si des indices tirés des actes eux-mêmes la rendent invraisemblable ou en cas de fraude à la loi.
« Art. 337. - Lorsqu'il accueille l'action en contestation, le tribunal peut, dans l'intérêt de l'enfant, fixer les modalités des relations de celui-ci avec la personne qui l'élevait. »

Article 16


I. - Au premier alinéa de l'article 342, le mot : « naturel » est supprimé.
II. - A l'article 342-6, les références aux articles 340-2, 340-3 et 340-5 sont remplacées par les références aux articles 327, alinéa 2, et 328.

Article 17


I. - Aux articles 18, 19-3, 161, 162, 348-6 et 1094, les mots : « légitime ou naturel » ou « légitimes ou naturels » sont supprimés.
II. - A l'article 22-1, les mots : «, légitime, naturel, ou ayant fait l'objet d'une adoption plénière, » sont supprimés.
III. - Dans l'intitulé de la section III du chapitre II du titre II du livre Ier et à l'article 62, les mots : « d'un enfant naturel » sont supprimés.
IV. - Aux articles 57, 57-1, 374-1 et 392, le mot : « naturel » ou : « naturelle » est supprimé.
V. - A l'article 163, les mots : « que la parenté soit légitime ou naturelle. » sont supprimés.
VI. - A l'article 390, les mots : « naturel, s'il n'a ni père ni mère qui l'aient volontairement reconnu » sont remplacés par les mots : « qui n'a ni père ni mère ».
VII. - A l'article 733, les mots : « entre la filiation légitime et la filiation naturelle » sont remplacés par les mots : « selon les modes d'établissement de la filiation ».
VIII. - A l'article 913, les mots : « ; sans qu'il y ait lieu de distinguer entre les enfants légitimes et les enfants naturels » sont supprimés.
IX. - A l'article 960, les mots : « d'un enfant légitime du donateur, même d'un posthume, ou par la légitimation d'un enfant naturel par mariage subséquent, s'il est né depuis la donation » sont remplacés par les mots : « d'un enfant du donateur, même posthume ».
X. - A l'article 962, les mots : « ou sa légitimation par mariage subséquent » sont supprimés.
XI. - A l'article 1094-1, les mots : « soit légitimes, » et : « soit naturels, » sont supprimés.

Article 18


Les articles 158, 159 (deuxième alinéa), 311-3, 311-7 et 311-8, 311-11 à 311-13, 311-16, 312 (deuxième alinéa), 316-1 et 316-2, 318-2, 322-1, 331-1 et 331-2, 338 et 339, 340-2 à 340-7, 341, 342-1, 342-3 et 2291 sont abrogés.

· Chapitre II : Dispositions diverses, transitoires et finales

Article 19


I. - Aux articles 227-3, 227-7, 227-15 et 227-17 du code pénal, les mots : « légitime, naturel ou adoptif » sont supprimés.
II. - A l'article L. 521-2 du code de la sécurité sociale, les mots : « légitime, naturel ou adoptif » et : « légitime, naturelle ou adoptive » sont supprimés.
III. - A l'article L. 9 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les mots : « légitime, naturel ou adoptif, » sont supprimés.
IV. - A l'article L. 19 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre :
1° Le mot : « légitime » est supprimé ;
2° Le deuxième alinéa est abrogé.
V. - Aux articles L. 314-9 et L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mots : « légitime ou naturel ayant une filiation légalement établie ainsi que de » sont remplacés par les mots : « ayant une filiation légalement établie, y compris ».

Article 20


I. - Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, la présente ordonnance est applicable aux enfants nés avant comme après son entrée en vigueur.
II. - Toutefois :
1° Les enfants nés avant l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ne peuvent s'en prévaloir dans les successions déjà liquidées ;
2° Les modifications des articles 960 et 962 du code civil par les IX et X de l'article 17 de la présente ordonnance ne s'appliquent qu'aux donations faites à compter de son entrée en vigueur ;
3° L'application de l'article 311-25 du code civil, tel qu'il résulte de la présente ordonnance, aux enfants nés avant son entrée en vigueur ne peut avoir pour effet de changer leur nom ;
4° Les dispositions du troisième alinéa de l'article 311-21 et du troisième alinéa de l'article 311-23 du même code, tels qu'ils résultent de la présente ordonnance, ne sont applicables qu'aux déclarations faites à compter de l'entrée en vigueur de ces articles ;
5° Les dispositions du deuxième alinéa de l'article 311-23 du même code, tel qu'il résulte de la présente ordonnance, ne sont applicables qu'aux enfants nés à compter du 1er janvier 2005 et, à Mayotte, à compter de l'entrée en vigueur de la même ordonnance.
III. - Lorsque l'instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente ordonnance, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation.
IV. - Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les actions prévues par les articles 327 et 329 du code civil, tels qu'ils résultent de la présente ordonnance, peuvent être exercées, sans que puisse être opposée la forclusion tirée de la loi ancienne, lorsque, à la date de l'entrée en vigueur de cette ordonnance, la prescription prévue par l'article 321, tel qu'il résulte de la même ordonnance, n'est pas acquise. L'action doit alors être exercée dans le délai restant à courir à la date d'entrée en vigueur de la présente ordonnance, sans que ce délai puisse être inférieur à un an.

Article 21


La présente ordonnance entre en vigueur le 1er juillet 2006.

Article 22


Le Premier ministre, le garde des sceaux, ministre de la justice, et le ministre de l'outre-mer sont responsables, chacun en ce qui le concerne, de l'application de la présente ordonnance, qui sera publiée au Journal officiel de la République française.


Fait à Paris, le 4 juillet 2005.


Par le Président de la République,

Jacques Chirac


Le Premier ministre,

Dominique de Villepin

Le garde des sceaux, ministre de la justice,

Pascal Clément

Le ministre de l'outre-mer,

François Baroin

IX - ORDONNANCE N° 70/86 DU 15 DECEMBRE 1970 PORTANT CODE DE LA NATIONALITE ALGERIENNE

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CODE DE LA NATIONALITE

 

Ordonnance No.70-86 du 15 décembre 1970 portant code de la nationalité algérienne


CHAPITRE I - DISPOSITIONS GENERALES
CHAPITRE II - DE LA NATIONALITE D'ORIGINE
CHAPITRE III - DE L'ACQUISITION DE LA NATIONALITE ALGERIENNE
CHAPITRE IV - DE LA PERTE ET DE LA DECHEANCE
CHAPITRE V - FORMALITES ADMINISTRATIVES
CHAPITRE VI - DE LA PREUVE ET DU CONTENTIEUX
CHAPITRE VII - DISPOSITIONS PARTICULIERES

CHAPITRE I - DISPOSITIONS GENERALES

Article 1
Les conditions nécessaires pour jouir de la nationalité algérienne sont fixées par la loi et, éventuellement, par les traites ou accords internationaux ratifiés et publiés.
Article 2
Les dispositions relatives à l'attribution de la nationalité algérienne comme nationalité d'origine, s'appliquent aux personnes nées avant la date de mise en vigueur de ces dispositions.
Cette application ne porte, cependant, atteint à la validité des actes passés par les intéressés sur le fondement des lois antérieures, ni aux droits acquis par des tiers sur le fondement des mêmes lois.
Les conditions d'acquisition ou de perte de la nationalité algérienne sont régies par la loi en vigueur à la date des faits ou des actes propres à entraîner cette acquisition ou cette perte.
Article 3
L'acquisition de la nationalité algérienne est subordonnée à la déclaration de répudiation de la nationalité d'origine.
Cette déclaration prend effet à compter de l'obtention de la nationalité algérienne.
Article 4
Est majeure au sens de la présente ordonnance, toute personne de l'un ou de l'autre sexe ayant atteint l'âge de 21 ans. [1]*
Les âges et délais prévus au présent code, se calculent suivant le calendrier grégorien.
Article 5
L'expression "en Algérie" s'entend de tout le territoire algérien, des eaux territoriales algériennes, des navires et aéronefs algériens.

[1]La majorité est fixée à 19 ans révolus (Ordonnance n° 75-58 du 26-9-1975 portant code civil - art. 40.)

CHAPITRE II - DE LA NATIONALITE D'ORIGINE

Article 6
Est de nationalité algérienne, par filiation:
(1) l'enfant né d'un père algérien;
(2) l'enfant né d'une mère algérienne et d'un père inconnu;
(3) l'enfant né d'une mère algérienne et d'un père apatride.
Article 7
Est de nationalité algérienne par la naissance en Algérie:
(1) L'enfant né en Algérie de parents inconnus.
Toutefois, l'enfant né en Algérie de parents inconnus sera réputé n'avoir jamais été Algérien si, au cours de sa minorité, sa filiation est également établie à l'égard d'un étranger et s'il a, conformément à la loi nationale de cet étranger, la nationalité de celui-ci.
L'enfant nouveau-né trouvé en Algérie est présumé, jusqu'à preuve du contraire, né en Algérie.
(2) L'enfant né en Algérie d'une mère algérienne et d'un père étranger, lui-même né en Algérie, sauf répudiation de la nationalité algérienne par l'enfant dans le délai d'un an qui précède sa majorité.
Article 8
L'enfant qui est de nationalité algérienne, en vertu des articles 6 et 7 ci-dessus est réputé l'avoir été dès sa naissance, même si l'existence des conditions requises par la loi pour l'attribution de la nationalité algérienne n'est établie que postérieurement à sa naissance. L'attribution de la qualité de national algérien dès la naissance ainsi que le retrait ou la répudiation de cette qualité, en vertu des dispositions de l'article 6, paragraphe 3 et de l'article 7, paragraphes 1 et 2 ci-dessus, ne portent pas atteinte à la validité des actes passés par l'intéressé, ni aux droits acquis par des tiers sur le fondement de la nationalité apparente antérieurement possédée par l'enfant.

CHAPITRE III - DE L'ACQUISITION DE LA NATIONALITE ALGERIENNE

Acquisition par le bienfait de la loi

Article 9
Acquisition de la nationalité algérienne par la naissance et la résidence en Algérie:
Sauf opposition du ministre de la justice, conformément à l'article 26 ci-après, acquiert la nationalité algérienne si, dans les 12 mois précédant sa majorité, il déclare vouloir acquérir cette nationalité et si, au moment de la déclaration, il a une résidence habituelle et régulière en Algérie:
-l'enfant né en Algérie, d'une mère algérienne et d'un père étranger né hors du territoire algérien.
Le silence du ministre de la justice, après le délai de 12 mois, à compter de la formalisation complète du dossier, vaut acquiescement.

Naturalisation

Article 10
L'étranger qui en formule la demande, peut acquérir la nationalité algérienne, à condition:
(1) d'avoir sa résidence en Algérie depuis 7 ans au moins au jour de la demande;
(2) d'avoir sa résidence en Algérie au moment de la signature du décret accordant la naturalisation;
(3) d'être majeur;
(4) d'être de bonne moralité et de n'avoir fait l'objet d'aucune condamnation infamante;
(5) de justifier de moyens d'existence suffisants;
(6) d'être sain de corps et d'esprit;
(7) de justifier de son assimilation à la communauté algérienne.
La demande est adressée au ministre de la justice qui peut toujours la rejeter dans les conditions de l'article 26 ci-après.

Dérogations

Article 11
Le Gouvernement peut ne pas tenir compte de la condamnation infamante intervenue à l'étranger.
Le délai de 7 ans prévu par l'article 10, alinéa 1er ci-dessus, est ramené à 18 mois pour l'enfant né à l'étranger d'une mère algérienne et d'un père étranger.
Peut être naturalisé, nonobstant les dispositions du paragraphe 6 de l'article 10 ci-dessus, l'étranger dont l'infirmité ou la maladie a été contractée au service ou dans l'intérêt de l'Algérie.
Peut être naturalisé, nonobstant les conditions prévues à l'article précédent, l'étranger qui a rendu des services exceptionnels à l'Algérie ou dont la naturalisation présente un intérêt exceptionnel pour l'Algérie. La femme et les enfants de l'étranger décédé qui aurait pu de son vivant entrer dans la catégorie visée au présent paragraphe, peuvent demander sa naturalisation, a titre posthume, en même temps que leur propre naturalisation.
Article 12
La naturalisation est accordée par décret.
L'acte de naturalisation pourra, à la demande de l'intéressé, modifier ses nom et prénoms.
Sur simple production de l'acte de naturalisation, l'officier d'état civil rectifie, sur les registres, toutes les mentions relatives à la naturalisation et, éventuellement, aux noms et prénoms.

Article 13
Le bénéfice de la naturalisation peut toujours être retiré à son bénéficiaire s'il apparaît, deux ans après la publication du décret de naturalisation au Journal Officiel de la République algérienne démocratique et populaire, qu'il ne remplissait pas les conditions prévues par la loi ou que la naturalisation a été obtenue par des moyens frauduleux.
Le retrait a lieu dans les mêmes formes que l'octroi de la naturalisation. Cependant, l'intéressé, dûment averti, a la faculté, dans le délai de deux mois de l'avertissement, de produire des pièces et mémoires.
Lorsque la validité des actes passés antérieurement à la publication de la décision de retrait, était subordonnée à la possession par l'intéressé de la qualité d'Algérien, cette validité ne peut être contestée pour le motif que l'intéressé n'a pas acquis la nationalité algérienne.

Réintégration

Article 14
La réintégration dans la nationalité algérienne peut être accordée par décret à toute personne qui, ayant possédé cette nationalité comme nationalité d'origine et l'ayant perdue, en fait la demande après 18 mois au moins de résidence habituelle et régulière en Algérie.

Effets de l'acquisition

Article 15
Effet individuel: La personne qui acquiert la nationalité algérienne jouit, à dater du jour de cette acquisition de tous les droits attachés à la qualité d'Algérien.
Article 16
Néanmoins, pendant un délai de 5 ans [2]*, l'étranger naturalisé Algérien ne peut être investi de mandats électifs. Il peut, toutefois, être relevé de cette incapacité par le décret de naturalisation.


Article 17
Effet collectif: Les enfants mineurs des personnes qui acquièrent la nationalité algérienne, en vertu de l'article 10 du présent code, deviennent Algériens en même temps que leur auteur.
Les enfants mineurs, non mariés, de la personne réintégrée, lorsqu'ils demeurent effectivement avec cette dernière, recouvrent ou acquièrent, de plein droit, la nationalité algérienne.
L'acte de naturalisation peut accorder la nationalité algérienne aux enfants mineurs de l'étranger naturalisé. Cependant, ils ont la faculté de renoncer à la nationalité algérienne entre leur dix-huitième et leur vingt-et-unième année.

[2]A noter que la loi n° 80-08 du 25-10-1980 portant loi électorale a fixé ce délai à 10 ans pour l'éligibilité aux assemblées populaires communales et de Wilaya (Art. 69).

CHAPITRE IV - DE LA PERTE ET DE LA DECHEANCE

Perte

Article 18
Perd la nationalité algérienne:
1. L'Algérien qui a acquis volontairement à l'étranger, une nationalité étrangère et qui est autorisé par décret à renoncer à la nationalité algérienne;
2. L'Algérien, même mineur qui, ayant une nationalité étrangère d'origine, est autorisé par décret à renoncer à la nationalité algérienne;
3. La femme algérienne qui, épousant un étranger, acquiert effectivement du fait de son mariage, la nationalité de son mari et a été autorisée par décret, à renoncer à la nationalité algérienne;
4. L'Algérien qui déclare répudier la nationalité algérienne dans le cas visé au 3ème alinéa de l'article 17 ci-dessus.
Article 19
Peut perdre la nationalité algérienne, l'Algérien qui, occupant un emploi à l'étranger ou dans une organisation internationale dont l'Algérie ne fait pas partie ou, plus généralement, leur apporte son concours, n'a pas renoncé à son emploi ou cessé son concours, nonobstant l'injonction qui lui aura été faite par le Gouvernement algérien. L'injonction fixera un délai qui ne peut être inférieur à quinze jours, ni supérieur à deux mois.

Article 20
La perte de la nationalité prend effet:
1. Dans les cas visés aux paragraphes 1°, 2° et 3° de l'article 18, à compter de la publication au journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire, du décret qui autorise l'intéressé à renoncer à la nationalité algérienne.
2. Dans le cas visé au paragraphe 4, à compter du jour où a pris date la demande souscrite valablement par l'intéressé et adressée au ministre de la justice.
3. Dans le cas visé à l'article 19 ci-dessus, à compter de la publication au journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire, du décret déclarant que l'intéressé a perdu la nationalité algérienne et à condition qu'il ait été à même de présenter ses observations.
Le décret peut être rapporté s'il est établi que l'intéressé a été, au cours du délai imparti, dans l'impossibilité de renoncer à son emploi à l'étranger ou de cesser son concours.


Article 21
La perte de la nationalité algérienne étend, de plein droit, ses effets aux enfants mineurs non mariés de l'intéressé, vivant effectivement avec lui, dans les cas prévus aux paragraphes 1°, 2° et 4° de l'article18 ci-dessus.

Déchéance


Article 22
Toute personne qui a acquis la nationalité algérienne peut en être déchue:
1. Si elle est condamnée pour un acte qualifié crime ou délit contre la sûreté de l'Etat algérien;
2. Si elle est condamnée en Algérie ou à l'étranger pour un acte qualifié crime, à une peine de plus de 5 ans d'emprisonnement;
3. Si elle s'est volontairement soustraite au service national;
4. Si elle a accompli, au profit d'un Etat étranger, des actes incompatibles avec la qualité d'Algérien et préjudiciables aux intérêts de l'Etat algérien.
La déchéance n'est encourue que si les faits reprochés à l'intéressé se sont produits dans un délai de 10 ans, à compter de la date de l'acquisition de la nationalité algérienne.
Elle ne peut être prononcée que dans un délai de 5 ans à compter desdits faits.

Article 23
La déchéance est prononcée par décret, après que l'intéressé ait été mis à même de présenter ses observations.
Il aura pour ce faire, un délai de 2 mois.

Article 24
La déchéance peut être étendue à la femme et aux enfants mineurs de l'intéressé.
Elle ne peut, toutefois, être étendue à ceux ci, si elle ne l'est également à leur mère.

CHAPITRE V - FORMALITES ADMINISTRATIVES

Article 25
Les demandes et déclarations faites en vue d'acquérir sa nationalité algérienne, d'y renoncer, de la répudier ou de la réintégrer, sont adressées au ministre de la justice.
Y sont joints les titres, pièces et documents de nature:
a. à établir que la demande ou déclaration satisfait aux conditions exigées par la loi;
b. à permettre d'apprécier si la faveur sollicitée est justifiée au point de vue national.
Lorsque l'auteur de la demande ou de la déclaration réside à l'étranger, il peut l'adresser aux agents diplomatiques ou consulaires de l'Algérie. Les demandes ou déclarations prennent date, du jour indiqué sur le récépissé délivré par l'autorité qualifiée pour les recevoir ou figurant sur l'accusé de réception postal.

Article 26
Si les conditions légales ne sont pas remplies, le ministre de la justice déclare la demande ou la déclaration, irrecevable par une décision motivée qui est notifiée à l'intéressé.
Si les conditions légales sont remplies, le ministre de la justice peut, par une décision qui est notifiée à l'intéressé, prononcer le rejet de la demande ou faire opposition à la déclaration, dans le cas où cette dernière faculté lui est reconnue.

Article 27
Lorsque le ministre de la justice est saisi d'une déclaration ou d'une demande, il doit statuer dans les 12 mois, à compter de la formalisation complète du dossier. Sauf en matière de naturalisation, le silence du ministre, passé ce délai, vaut acquiescement. La déclaration ou la demande qui n'a pas fait l'objet d'une décision d'irrecevabilité ou d'opposition, produit effet du jour où elle a pris date. La décision d'acquiescement à la déclaration d'option pour la nationalité algérienne visée à l'article 9 du présent code, pourra, à la demande de l'intéressé et lorsqu'elle est expresse, modifier les nom et prénoms de ce dernier.
Sur simple production de cette décision, l'officier d'état civil rectifie sur ses registres, toutes les mentions relatives à la nationalité et, éventuellement, les nom et prénoms.

Article 28
La validité d'une déclaration ou d'une demande ayant fait l'objet d'un acquiescement exprès ou tacite, peut être contestée par le procureur de la République du ressort du domicile du déclarant ou du demandeur devant le tribunal territorialement compétent. Le procureur de la République peut être saisi par toute personne intéressée.
Cette action en contestation se prescrit par deux ans, à dater de la publication au journal officiel de la république algérienne démocratique et populaire.

Article 29
Les décrets pris en matière de nationalité sont publiés au journal officiel de la république algérienne démocratique et populaire.
Ils produisent effet à l'égard des tiers, à dater du jour de cette publication.

Article 30
La juridiction administrative est compétente pour statuer sur recours en annulation pour excès de pouvoir contre les décisions administratives en matière de nationalité.

CHAPITRE VI - DE LA PREUVE ET DU CONTENTIEUX

Article 31
La charge de la preuve en matière de nationalité, incombe à celui qui, par voie d'action ou d'exception, prétend que lui-même ou une autre personne a ou n'a pas la nationalité algérienne.

Article 32
Lorsque la nationalité algérienne est revendiquée à titre de nationalité d'origine, elle peut être prouvée par la filiation découlant de deux ascendants en ligne paternelle, nés en Algérie et y ayant joui du statut musulman.
Elle peut également être prouvée par tous moyens et notamment par la possession d'état.
La possession d'état de national algérien résulte d'un ensemble de faits publics notoires et non équivoques établissant que l'intéressé et ses parents se sont comportés comme des Algériens et ont été considérés comme tels, tant par les autorités publiques que par les particuliers.
Les dispositions qui précèdent, ne portent par atteinte aux droits résultant de l'acquisition de la nationalité algérienne par le bienfait de la loi.

Article 33
Dans le cas où l'acquisition de la nationalité algérienne résulte d'un décret, la preuve en est faite par la production de l'ampliation de ce décret ou d'une copie délivrée par le ministre de la justice.
Dans le cas où la nationalité algérienne dérive d'un traité, la preuve doit en être faite conformément à ce traité.

Article 34
La preuve de la nationalité algérienne peut être faite par la production d'une attestation de nationalité délivrée par le ministre de la justice ou par les autorités habilitées à cet effet.

Article 35
La perte de la nationalité algérienne s'établit dans les cas prévus aux paragraphes 1°, 2° et 3° de l'article 18 ci-dessus, par la production de l'acte d'où la perte est résultée ou de sa copie officielle.
Lorsque la perte résulte de la déclaration de renonciation visée par l'article 17, alinéa 3, ci-dessus, la preuve en est faite par la production d'une attestation délivrée par le ministre de la justice, constatant que la déclaration de répudiation a été valablement souscrite.
La déchéance de la nationalité algérienne s'établit par la production de l'acte ou d'une copie officielle de l'acte qui l'a prononcée.

Article 36
En tout état de cause, la preuve qu'une personne a ou n'a pas la nationalité algérienne peut être faite par la production d'une expédition de la décision judiciaire qui, à titre principal, a tranché définitivement la question.

Article 37
Les tribunaux sont seuls compétents pour connaître des contestations sur la nationalité algérienne.
Lorsque de telles contestations sont soulevées par voie d'exception devant d'autres juridictions, celles-ci doivent surseoir à statuer jusqu'à leur solution par le tribunal territorialement compétent qui devra être saisi dans le mois de la décision de sursis par la partie qui conteste la nationalité; faute de quoi, il sera passé outre à l'exception.
Les jugements des tribunaux relatifs aux contestations sur la nationalité algérienne sont susceptibles d'appel.
Lorsqu'à l'occasion d'un litige il y a lieu à une interprétation de dispositions de conventions internationales relatives à la nationalité, cette interprétation doit être demandée par le ministère public au ministère des affaires étrangères.
L'interprétation ainsi donnée s'impose aux tribunaux.

Article 38
Toute personne peut intenter une action ayant pour objet principal et direct de faire juger qu'elle a ou n'a pas la nationalité algérienne. L'action est alors dirigée contre le ministère public, sans préjudice du droit d'intervention des tiers intéressés.
Le ministère public a seule qualité pour intenter contre toute personne, une action dont l'objet principal et direct est d'établir si le défendeur a ou n'a pas la nationalité algérienne. Il est tenu d'agir s'il en est requis par une administration publique.

Article 39
Les contestations, en matière de nationalité, sont instruites et jugées suivant les règles de la procédure ordinaire.
Le ministère public doit toujours être en cause et déposer des conclusions écrites.
Lorsque la requête émane d'un particulier, elle est notifiée, en double exemplaire, au ministre de la justice.
Le ministère public est tenu de conclure dans le délai de 2 mois, à compter de la notification. Après le dépôt des conclusions ou à l'expiration du délai de 2 mois, il est statué au vu des pièces du demandeur.

Article 40
Les jugements et arrêts définitifs rendus, en matière de nationalité, dans les conditions visées aux articles 37 à 39 ci-dessus, font l'objet de publicité et ont, à l'égard de tous, l'autorité de la chose jugée.

CHAPITRE VII - DISPOSITIONS PARTICULIERES

Article 41
Est abrogée la loi n° 63-96 du 27 mars 1963 portant code de la nationalité algérienne.
Article 42
La présente ordonnance sera publiée au journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.

X - ORDONNANCE MALGACHE N° 62/089 DU 1er OCTOBRE 1962 RELATIVE AU MARIAGE

Afrique de l'Est et Océan indien - Madagascar - Législation - 1962 - Ordonnance 62-089 du 1 octobre 1962 relative au mariage (JO no 250 du 19.10.62, p. 2366) modifiée et complétée par la loi no 64-017 du 14 novembre 1964 (JO du 21.11.64, p. 2498), la loi no 90- 013 du 20 juillet 1990 (J.O. no 2008 E.S. du 23.07.90, p. 1295) et par la loi no 98-023 du 25 janvier 1999 (JO no 2560 du 08.02.99, p. 789).

Date :

01-10-1962

Source :

SIJIP - Système d'informations juridiques, institutionnelles et politiques (A.I.F.)

Référence

MDG 1962 LOI 20 (DF)

1. CHAPITRE PREMIER : CARACTERES GENERAUX DU MARIAGE.

o Article premier à Article 2

2. CHAPITRE II : DES CONDITIONS REQUISES POUR CONTRACTER MARIAGE.

o Article 3 à Article 13

3. CHAPITRE III : DE LA FORMATION DU MARIAGE.

o Article 14 à Article 28

4. CHAPITRE IV : DE LA CELEBRATION DU MARIAGE.

o Article 29 à Article 36

5. CHAPITRE V : DE LA PREUVE DU MARIAGE.

o Article 37 à Article 40

6. CHAPITRE VI : DE LA SANCTION DES CONDITIONS DU MARIAGE.

o Article 41 à Article 51

7. CHAPITRE VII : DES EFFETS DU MARIAGE.

o Article 52 à Article 65

8. CHAPITRE VIII : DE LA DISSOLUTION DU MARIAGE.

o Article 66 à Article 78

9. CHAPITRE IX : DE LA PROCEDURE DE DIVORCE.

1. SECTION I : DU DIVORCE EN CAS DE MARIAGE CELEBRE DEVANT L'OFFICIER DE L'ETAT CIVIL.

§ Article 79 à Article 93

2. SECTION II : DU DIVORCE EN CAS DE MARIAGE CELEBRE SELON LES TRADITIONS.

§ Article 94 à Article 108

EXPOSE DES MOTIFS

Poursuivant la rédaction du nouveau Code civil malgache, la commission de rédaction du Code civil créée par le décret du 27 avril 1960 a rédigé les dispositions législatives appelées à régir le mariage.

Base naturelle et morale de la famille, le mariage avait fait l'objet de nombreuses règles écrites et orales dans les coutumes malgaches, et il était naturel que la commission, avant de se consacrer à la rédaction des articles ait eu le souci d'étudier toutes les dispositions coutumières régissant le mariage dans les divers systèmes juridiques malgaches. En raison de l'importance de la matière, la connaissance avait particulièrement pris soin de procéder aux plus larges consultations tandis que le Gouvernement s'était soucié de faire participer la population elle-même à l'élaboration d'une loi qui l'intéresse au premier chef.

L'étude préalable des coutumes malgaches s'est déroulée selon les phases suivantes :

1o Une enquête nationale sur les coutumes juridiques s'est déroulée dans toutes les sous-préfectures du 1er décembre 1960 du 30 mai 1961 : organisée par les services du Ministère de la justice, elle a pu s'effectuer auprès des élus, des notables, des ray aman-dreny, des municipalités et des fokonolona ;

2o Toutes les réponses à cette enquête ont été examinées par des commissions provinciales de constatation des coutumes présidées par les secrétaires d'Etat délégués et composées notamment de parlementaires, de conseillers généraux, de représentants des Missions religieuses et des Eglises, de membres du corps enseignant.

Ces commissions ont remis au gouvernement des rapports de synthèses ;

3o Un rapport général de synthèse de cent trente trois pages sur les coutumes a été présenté à la commission de rédaction du Code civil qui l'a étudié et a présenté à son tour au Gouvernement des conclusions générales qui ont été approuvées en conseil des Ministres le 28 mars 1962 ;

4o Ces conclusions ont été soumises à tous les conseils généraux durant leur session du mois d'avril 1962. Les conseils généraux les ont approuvées en assortissant leurs résolutions de voeux et de suggestions.

C'est après avoir pris connaissance de l'ensemble des divers documents ainsi réalisés que la commission de la rédaction a commencé à rédiger les dispositions soumises aujourd'hui à votre approbation.

Les principes de travail qui ont guidé les rédacteurs du projet ont été les suivants :

1o Faire un texte authentiquement malgache tenant compte dans la plus large mesure des coutumes constamment suivies et de l'esprit qui anime les institutions traditionnelles ;

2o Ne pas figer ou cristalliser les coutumes mais doter le peuple malgache de lois modernes lui offrant de larges possibilités d'évolution sans rompre brutalement avec ses traditions ;

3o Unifier pour tous les citoyens malgaches le droit du mariage ;

4o Assurer, conformément aux termes du préambule de la Constitution la cohésion de la famille ;

5o Amener la population, et notamment la population rurale à avoir recours à l'officier de l'état civil. En cela, le législateur malgache se conforme au projet de convention et de recommandation de la troisième commission de l'O.N.U. sur le mariage qui dispose en son article 3 que "tous les mariages doivent être inscrits par l'autorité compétente sur un registre officiel".

Les simplifications introduites pour faciliter la procédure du mariage complètent heureusement les mesures exceptionnelles et transitoires de la loi du 5 octobre 1961 sur l'état civil qui permettent la régularisation des unions coutumières.

L'ordonnance comporte neuf chapitres concernant successivement les matières suivantes :

Les caractères généraux du mariage, les conditions requises pour contracter mariage, la formation et la célébration, et la preuve du mariage, la sanction des conditions du mariage, les effets et la dissolution du mariage, la procédure du divorce.

Les principales dispositions qui requièrent une attention particulière en raison de leur originalité peuvent être ainsi résumées :

1o Définition du mariage : au risque de donner à la nouvelle loi une allure doctrinale, les auteurs du projet ont tenu à définir dans les deux premiers articles l'institution du mariage. Ils ont conclu par-là caractériser le mariage par rapport aux autres unions traditionnelles ou fortuites, et assurer la stabilité du lien matrimonial (Article premier et Article 7) ;

2o Formes du mariage : le mariage peut être contracté sous l'une des deux formes prévues à l'article 2 : célébration par l'officier de l'état civil et célébration selon les traditions suivie de l'enregistrement à l'état civil.

Cette deuxième forme du mariage n'est qu'une consécration de la coutume. Traditionnellement en effet, le mariage est conclu dès lors que les formalités coutumières ont été accomplies et principalement lorsque la donation du vodiondry ou fandeo, fafy, diafotaka, orimbato, fanokoana, etc., a été faite (Article 2, Article 29 à 36 du projet).

La célébration du mariage dans l'une ou l'autre forme est suivie de la rédaction d'un acte de mariage par l'officier de l'état civil compétent, dans le premier cas immédiatement après la célébration, dans le second cas au vu du procès-verbal dressé par le représentant de l'autorité qui a assisté aux cérémonies traditionnelles ;

3o L'intervention de la famille dans la conclusion du mariage : cette intervention qui est traditionnelle chez les Malgaches a été aménagée de telle sorte que la tradition soit respectée sans que toutefois les droits de l'individu soient lésés. L'article 5 du projet prévoit en cas de mariage d'un mineur, l'autorisation préalable "du père, de la mère ou à leur défaut de la personne qui selon l'usage (c'est à dire selon les règles coutumières) ou la loi a autorité sur lui".

La notion de majorité matrimoniale différente de celle de majorité civile a été consacrée par le législateur dans cet article 5. Cette majorité matrimoniale a été fixée à dix-huit ans.

Par ailleurs, les modalités de l'opposition au mariage sont réglées par les articles 16 à 28 du projet qui organisent une procédure rapide : susceptible d'éviter les manoeuvres manifestement destinées à retarder sans motifs valables la célébration d'un mariage ;

4o Bien que les coutumes malgaches ne connaissent pas le délai de viduité, il a été prévu, que la femme ne pouvait contracter une nouvelle union avant l'expiration d'un délai de cent quatre vingt jours à compter de la dissolution de l'union précédente, ceci dans l'intérêt de l'enfant qui viendrait à naître et pour éviter la "confusion de parts".

5o L'ancienne législation malgache ne connaissait pas de théorie générale des nullités du mariage.

Les articles 41 à 51 précisent les règles relatives à la sanction des conditions du mariage et énumère les effets du mariage putatif 48 à 51 ;

6o Au risque de se désagréger, la famille doit être fortement organisée, ce qui suppose une unité de direction. L'article 53 désigne le mari comme chef de famille.

Toutefois, l'évolution sociale récente et la nécessité de donner une place de plus en plus importante à la femme dans la famille et dans la vie en société ont amené les auteurs du projet à prévoir un concours effectif de la femme à la direction morale et matérielle de la famille (Article 53), à maintenir son droit connu sous le nom de misintaka (Article 55) et à consacrer sa pleine capacité (Article 56, 59, notamment) ;

7o La solidarité qui règne au sein des familles malgaches trouve sa consécration dans les articles 62 à 65 du projet qui précisent la portée et l'étendue de l'obligation alimentaire de nourriture et d'entretien entre les membres de la famille ;

8o Les chapitres VIII et IX consacrés à la dissolution du mariage prévoient les causes de divorce et la procédure qui y fait suite : le législateur a traduit en termes concis la diversité des causes de divorce (Article 66 et 67) et a tenté de concilier deux impératifs sociaux : d'une part, permettre à des époux qu'une mésintelligence grave et persistante sépare de mettre fin à une union définitivement compromise. C'est dans cette perspective que la séparation de corps a été écartée et que la procédure du divorce a été allégée (Article 79 à 107), d'autre part, de ne jamais encourager le divorce en permettant les décisions précipitées pouvant nuire à l'intérêt de la famille. C'est en ce sens que le principe du divorce judiciaire a été maintenu, que toute chance de conciliation a été préservée (Article 78, 84 et 96) et que la faculté est toujours laissée au juge de donner aux époux un délai de réflexion et d'apaisement (Article 92 et 103).

Le législateur a introduit une innovation importante en matière de divorce en créant exceptionnellement une juridiction traditionnelle appelée à statuer sur les demandes en divorce introduites dans le cas où le mariage a été célébré selon les traditions.

Ces dispositions ont pour objet de rapprocher la justice du justiciable et d'assurer le respect des coutumes traditionnelles.

Les auteurs du projet n'ont pas cru devoir encore réglementer les régimes matrimoniaux en raison de la complexité des problèmes posés et des études préliminaires qu'ils supposent.

Il convient toutefois de rappeler que conformément aux règles posées par l'article 5 de l'ordonnance no 60.171 du 3 octobre 1960, les époux peuvent toujours, par la voie de l'option spéciale de législation, écarter le régime du kitay telo an-dàlana en passant un contrat de mariage portant sur un régime matrimonial qu'ils choisissent de plein gré.

CHAPITRE PREMIER : CARACTERES GENERAUX DU MARIAGE.

Article premier

Le mariage est l'acte civil, public et solennel par lequel un homme et une femme qui ne sont engagés ni l'un ni l'autre dans les liens d'un précédent mariage établissent entre eux une union légale et durable dont les conditions de formation, les effets et la dissolution sont déterminés par le présent titre.

Article 2

Il y a mariage :

1o lorsqu'un homme et une femme ont comparu devant l'officier d'état civil en vue du mariage et que celui-ci a reçu l'échange de leurs consentements ;

2o lorsqu'un homme et une femme ayant accompli les cérémonies traditionnelles constitutives d'une union permanente entre eux, cette union a été enregistrée à l'état civil.

(Loi no 98-023 du 25.01.99) Est prohibé le mariage entre deux personnes de sexe identique, qu'il soit célébré devant l'officier de l'état civil ou accompli suivant les cérémonies traditionnelles.

CHAPITRE II : DES CONDITIONS REQUISES POUR CONTRACTER MARIAGE.

Article 3

Sauf dispense d'âge accordée pour des motifs graves par le président du tribunal du lieu de la célébration du mariage, l'homme avant dix-sept ans révolus, la femme avant quatorze ans révolus, ne peuvent contracter mariage.

Article 4

Le consentement n'est point valable s'il a été extorqué par violence ou s'il n'a été donné que par suite d'erreur sur une qualité essentielle telle que l'autre époux n'aurait pas contracté s'il avait connu l'erreur.

Article 5

L'enfant ne peut contracter mariage avant l'âge de dix huit ans révolus sans l'autorisation de son père ou de sa mère, ou à leur défaut, de la personne qui selon l'usage ou la loi a autorité sur lui.

On entend par mineur, au sens du présent texte, l'enfant âgé de moins de dix huit ans.

Article 6

L'autorisation pourra être donnée de vive voix au moment de la célébration, ou par écrit si la personne qui autorise n'assiste pas au mariage.

Dans les deux cas, elle devra être mentionnée par l'officier d'état civil dans l'acte de mariage.

L'autorisation par écrit doit être donnée, soit par un acte authentique, soit par un acte authentifié, soit par acte dressé sur la demande de la personne dont l'agrément est requis, par un officier d'état civil de son choix.

Article 7

On ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier.

Au cas où le mariage est dissout par le divorce, une nouvelle union ne peut être contractée par l'un ou l'autre des conjoints avant la transcription du jugement ou de l'arrêt ayant prononcé le divorce.

Article 8

La femme ne peut contracter une nouvelle union avant l'expiration d'un délai de cent quatre vingt jours à compter de la dissolution de l'union précédente.

(Loi no 64-017 du 14.10.64) Le président du tribunal dans le ressort duquel le mariage doit être célébré peut, par ordonnance sur simple requête préalablement communiquée au Ministère public abréger le délai prévu lorsqu'il résulte avec évidence des circonstances que depuis 150 jours, le précédent mari n'a pas cohabité avec sa femme. En cas de rejet de la requête, il peut être interjeté appel.

Article 9

En cas d'annulation du mariage, de divorce, ou de décès du mari intervenant au cours d'une instance en divorce ce délai court de la décision judiciaire autorisant les époux à avoir une résidence séparée, ou, à défaut, du jour où le jugement d'annulation, ou de divorce est devenu définitif.

Article 10

En toute hypothèse, ce délai prend fin en cas d'accouchement.

Article 11

Entre parents et alliés légitimes ou naturels, le mariage est prohibé :

1o en ligne directe à tous degrés ;

2o en ligne collatérale, entre frère et soeur, oncle et nièce, tante et neveu.

Article 12

La prohibition du mariage entre cousins, ou entre toutes autres personnes tenues soit par des liens de parenté légitime, naturelle, ou adoptive, soit par des liens d'alliance présents ou passés, obéit aux règles coutumières.

Article 13

En l'absence d'une filiation légalement établie, l'existence d'un lien notoire de filiation suffit à entraîner les empêchements prévus aux articles 11 et 12.

Ce lien peut être établi par la commune renommée.

CHAPITRE III : DE LA FORMATION DU MARIAGE.

Article 14

Avant la célébration ou l'enregistrement du mariage, chacun des époux doit remettre, ou faire parvenir à l'officier de l'état civil une copie conforme de son acte de naissance délivré depuis moins de six mois, ainsi que le cas échéant, toutes autres pièces établissant qu'il remplit les conditions requises pour se marier.

Article 15

Celui des futurs époux qui est dans l'impossibilité de se procurer la dite copie peut y suppléer en rapportant un acte de notoriété délivré conformément aux articles 65 et suivants de la loi sur les actes de l'état civil.

Article 16

Le père, la mère, ou, à leur défaut, la personne ayant autorité sur l'un ou l'autre des futurs époux, ainsi que la personne déjà engagée par mariage avec l'un de ceux-ci, peuvent former opposition à la célébration du mariage si les conditions et formalités prescrites par la loi sont enfreintes ou étudiées.

Le même droit appartient au ministère public.

Article 17

L'opposition se fait par simple déclaration à l'officier d'état civil du lieu où doit être célébré le mariage, ou au représentant de l'autorité appelé à assister aux cérémonies traditionnelles constitutives du mariage.

Article 18

Il en est donné récépissé à l'opposant.

Article 19

L'opposition est valablement faite jusqu'au moment de la célébration du mariage.

Toutefois, dans les huit jours de son opposition, l'opposant doit en saisir le tribunal du lieu de la célébration par requête énonçant, à peine d'irrecevabilité, la qualité lui donnant le droit de la former, ainsi que les motifs précis d'opposition.

A l'expiration de ce délai, et si le tribunal n'a pas été saisi, l'opposition est considérée comme nulle et il sera passé outre.

Article 20

Le tribunal saisi admettra ou rejettera l'opposition dans les quinze jours de la réception de la requête en validation.

Toutefois, il pourra être exceptionnellement sursis à statuer si des vérifications s'imposent.

Article 21

Qu'il soit contradictoire ou non, le jugement qui statue sur une opposition n'est susceptible que d'appel.

Article 22

L'appel est formé par déclaration au greffe de la juridiction qui a statué dans un délai de trois jours francs qui courra du jour du prononcé du jugement. Les pièces de procédure seront transmises dans les quarante-huit heures à la diligence du juge, au greffe de la juridiction d'appel.

Article 23

Dès réception des pièces, la cause sera inscrite à la première audience utile et le jugement rendu à l'audience suivante, parties présentes ou absentes.

Article 24

Qu'elle soit contradictoire ou non, la décision rendue sur appel est définitive et ne peut en aucun cas faire l'objet d'un pourvoi en cassation.

Article 25

Le délai d'appel ainsi que l'appel sont suspensifs.

Article 26

Les jugements donnant mainlevée d'une opposition ne peuvent être déclarés exécutoires par provision.

Article 27

Quand une opposition aura été rejetée, elle ne pourra être renouvelée pour les mêmes causes par une autre personne, ni pour une autre cause par la même personne.

Article 28

Si l'opposition est rejetée, l'opposant, autre que les ascendants, pourra être condamné à des dommages-intérêts.

CHAPITRE IV : DE LA CELEBRATION DU MARIAGE.

Article 29

Au jour fixé par les parties, le mariage sera célébré publiquement à la mairie par-devant l'officier de l'état civil. Celui-ci, en présence de deux témoins âgés d'au moins vingt et un ans, parents ou non des parties, fait lecture aux futurs époux du projet d'acte de mariage.

Si les pièces produites par l'un des futurs époux ne concordent point entre elles quant aux prénoms ou quant à l'orthographe des noms, il interpelle celui qu'elles concernent, et, lorsque celui-ci est mineur, ses plus proches parents à la célébration, d'avoir à déclarer que les défauts de concordance résultent d'une omission ou d'une erreur.

Si l'un des futurs époux est mineur, l'officier de l'état civil interpelle, s'ils sont présents, les parents dont le consentement est requis ; s'ils sont absents, il fait lecture de l'acte par lequel ce consentement a été donné.

L'officier de l'état civil interpelle également chacun des futurs époux d'avoir à déclarer leurs nationalités respectives, à indiquer, s'il y a lieu, le régime matrimonial par eux choisi, enfin, s'il a été fait un contrat de mariage, à préciser sa date ainsi que les noms et lieu de résidence de l'officier qui l'aura reçu.

Il reçoit de chaque partie l'une après l'autre la déclaration qu'elles veulent se prendre pour mari et femme ; il prononce au nom de la loi qu'elles sont unies par le mariage et il en dresse acte sur le champ.

Article 30

En cas d'empêchement grave, le président du tribunal du lieu de la célébration peut autoriser l'officier de l'état civil à se transporter auprès de l'une des parties pour célébrer le mariage. En cas de péril imminent de mort de l'un des futurs époux, l'officier de l'état civil peut s'y transporter avant toute autorisation. Mention en est faite dans l'acte de mariage.

Article 31

En dehors des communes urbaines, le mariage peut être célébré suivant les traditions.

Article 32

L'accomplissement des cérémonies traditionnelles sera constaté dans un procès-verbal par un représentant de l'autorité désigné dans les conditions prévues par décret.

Article 33

Ce procès-verbal, établi en double exemplaire, énoncera :

1o la date des cérémonies ;

2o les noms, prénoms, profession, date et lieu de naissance, filiation et domicile des futurs époux ;

3o les noms, prénoms, âge et domicile des témoins ;

4o la nationalité des futurs époux ;

5o l'indication du régime matrimonial choisi, et, s'il a été fait un contrat de mariage, sa date, ainsi que les noms et lieu de résidence de l'officier public qui l'a reçu ;

6o la constatation par le représentant de l'autorité que les futurs époux ont personnellement consent à se marier et que les traditions ont été respectées ;

7o si l'un des futurs époux est mineur, les noms, prénoms, profession du père, de la mère ou de toute autre personne ayant autorité sur lui et ayant assisté aux cérémonies traditionnelles.

Ce procès-verbal, dont un exemplaire sera remis aux époux, portera en outre la signature des futurs époux, des parents, des parents, des témoins et du représentant de l'autorité.

S'ils ne savent signer, mention en sera faite.

Article 34

Le procès-verbal fera foi jusqu'à inscription de faux.

Article 35

Le représentant de l'autorité devra dans un délai de douze jours, et sous peines prévues à l'article 472 du Code pénal, remettre l'autre exemplaire à l'officier d'état civil.

Celui-ci dressera immédiatement l'acte de mariage au vu du procès-verbal et des pièces à lui remises soit par les époux, soit par le représentant de l'autorité.

Article 36

En cas d'opposition régulière en la forme, dans les termes de l'article 17, il ne sera pas dressé de procès-verbal.

CHAPITRE V : DE LA PREUVE DU MARIAGE.

Article 37

Nul ne peut réclamer les effets civils du mariage s'il ne présente un acte de mariage.

Article 38

La possession d'état civil d'époux s'établit par une réunion suffisante de faits qui supposent l'existence du lien matrimonial.

Article 39

Lorsqu'il y a possession d'état d'époux, et que l'acte de mariage est représenté, nul ne peut se prévaloir des irrégularités formelles de cet acte.

Article 40

La possession d'état ne pourra dispenser les prétendus époux qui l'invoqueront respectivement, de représenter l'acte de mariage.

CHAPITRE VI : LA SANCTION DES CONDITIONS DU MARIAGE.

Article 41

L'inobservation des dispositions prévues aux articles 3, 7, 11 et 12, l'identité de sexe, le défaut de consentement ainsi que la célébration d'un mariage au mépris d'une opposition validée par une décision définitive entraînent la nullité absolue du mariage.

Article 42

L'inobservation des formalités concernant le caractère public de la cérémonie, la célébration devant un officier d'état civil incompétent, la violation des articles 30 et 31 ainsi que l'inaccomplissement des cérémonies traditionnelles essentielles entraînent également la nullité absolue du mariage ;

Toutefois, les juges possèdent à cet égard un pouvoir souverain d'appréciation.

Article 43

L'action en nullité absolue peut-être exercée par les deux époux, par toute personne qui y a intérêt et par le ministère public.

Article 44

Néanmoins :

1o l'action en nullité pour défaut de consentement ne peut être exercée par celui des époux dont le consentement n'a pas été donné, ou par son conjoint ;

2o en cas d'action en nullité pour bigamie, et si les nouveaux époux invoquent la nullité du premier mariage, il sera préalablement statué sur la validité ou la nullité de ce mariage ;

3o l'action fondée sur la violation de l'article 4 ne peut être exercée que par l'époux dont le consentement n'a pas été libre ou qui a été induit en erreur.

Celui qui a contracté mariage sous l'empire de la violence ou d'une erreur sur une qualité essentielle n'est plus recevable à exercer l'action en nullité six mois après que la violence a cessé ou que l'erreur a été par lui reconnue.

Article 45

Tout mariage célébré en violation des articles 5 et 6 peut être annulé par le tribunal.

L'action en nullité ne peut être exercée que par l'un des deux époux et dans un délai de six mois à compter du mariage.

Le requérant doit toutefois prouver qu'il ne connaissait pas la cause de nullité, lors de la célébration.

En tout état de cause cette action ne pourra être exercée si la femme a conçu.

Article 46

Le jugement prononçant la nullité du mariage n'a autorité de la chose jugée à l'égard des tiers que si les deux époux ont été mis en cause.

Article 47

Le dispositif du jugement prononçant la nullité est transcrit et mentionné conformément aux règles régissant l'état civil.

Article 48

Sauf lorsqu'il est prouvé que l'un et l'autre époux connaissaient, au moment de la célébration du mariage, la cause de nullité, le mariage nul produit ses effets comme s'il avait été valable jusqu'au jour où la décision prononçant la nullité est devenue définitive.

Il est réputé dissous à compter de ce jour.

Article 49

La dissolution de la communauté entre les époux prend effet du jour où l'action est exercée.

Toutefois, elle n'est opposable aux tiers que du jour de la transcription prévue à l'article 47.

Article 50

Si un seul des époux est de bonne foi, le mariage nul est réputé n'avoir jamais existé à l'égard de l'autre époux.

L'époux de bonne foi bénéficie des dispositions de l'article 48 ci-dessus.

Article 51

Quant aux enfants issus du mariage, ou légitimés, ils conservent vis-à-vis de leurs père et mère la qualité qui leur avait été conférée par le mariage, sans que l'époux de mauvaise foi puisse échapper aux obligations attachées à la qualité de père ou de mère et néanmoins se prévaloir de cette qualité à leur encontre.

CHAPITRE VII : DES EFFETS DU MARIAGE.

Article 52

Les époux se doivent mutuellement fidélité, secours et assistance.

Article 53

Le mari est le chef de famille.

La femme concourt avec lui à assurer la direction morale et matérielle de la famille et à élever les enfants. Si le mari est indigne, incapable ou empêché, ou s'il abandonne volontairement la vie commune, la femme exerce seule les attributions prévues à l'alinéa précédent.

Article 54

Les époux sont tenus de vivre ensemble.

Ils fixent d'un commun accord la résidence commune.

Toutefois, en cas de survenance, au cours du mariage, de désaccord entre les époux, sur le choix d'une résidence commune, l'époux le plus diligent peut saisir du différend le juge des référés.

Article 55

Néanmoins, pour des motifs graves, la femme peut quitter temporairement le domicile conjugal, dans les formes et conditions prévues par la coutume.

Article 56

Le mariage ne porte pas atteinte à la capacité juridique des époux mais leurs pouvoirs peuvent être limités par le régime matrimonial.

Article 57

Chacun des époux peut donner à son conjoint mandat général ou particulier de le représenter.

Article 58

Chaque fois que l'exige l'intérêt de la famille, lorsque l'un des époux est incapable ou défaillant, l'autre époux peut se faire habiliter par justice à présenter son conjoint, soit d'une manière générale, soit pour des actes particuliers.

Les conditions et l'étendue de cette représentation sont fixées par le juge.

Article 59

Chacun des époux a le pouvoir de faire tous les actes justifiés par les charges du mariage. Toute dette contractée pour cet objet oblige solidairement les deux époux à l'égard des tiers, sauf refus de l'autre époux porté préalablement à la connaissance du créancier.

Article 60

Si les époux n'ont pas réglé leur participation aux charges du mariage, ils contribuent à celle-ci selon leurs facultés respectives.

Si l'un des époux ne remplit pas ses obligations, l'autre époux peut demander au juge, par requête, l'autorisation de saisir, arrêter et toucher dans la proportion de ses besoins, tout ou partie des revenus de son conjoint, de ceux qu'il perçoit en vertu du régime matrimonial, des produits de son travail ou de toutes autres sommes qui lui sont dues par des tiers.

L'ordonnance du juge fixe les conditions de l'autorisation, ainsi que le montant à concurrence duquel elle est accordée. Elle est opposable à tout tiers débiteur après notification du greffier.

Elle est exécutoire par provision, nonobstant opposition ou appel mais elle est toujours susceptible de révision.

Article 61

Le juge peut ordonner non seulement aux époux mais même aux tiers la communication des renseignements ou la représentation des livres de commerce ou pièces comptables.

Article 62

Les époux contractent ensemble par le seul fait du mariage, l'obligation de nourrir, entretenir, élever et instruire leurs enfants.

Article 63

Les enfants doivent des aliments à leur père et mère et autres ascendants qui sont dans le besoin et réciproquement.

Article 64

Dans les mêmes circonstances et mêmes conditions de réciprocité, les gendres et belles-filles doivent des aliments à leur beau-père et belle-mère.

Cette obligation cesse lorsque l'un des époux est décédé ou lorsque le mariage est dissous par le divorce.

Article 65

Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame et de la fortune de celui qui les doit.

CHAPITRE VIII : DE LA DISSOLUTION DU MARIAGE.

Article 66

Lorsqu'un des époux aura gravement manqué soit aux obligations résultant du mariage, soit aux règles traditionnelles déterminant les devoirs réciproques des époux, et que ce manquement aura rendu intolérable le maintien de la vie commune, l'autre époux pourra demander le divorce au tribunal compétent.

Article 67

L'adultère du conjoint ou sa condamnation à une peine afflictive et infamante sera pour l'autre conjoint une cause suffisante de divorce.

Toutefois, s'il est prouvé par le conjoint défendeur que ces motifs n'ont pas rendu intolérable le maintien de la vie commune, le juge appréciera souverainement s'il convient ou non de retenir le grief allégué.

Article 68

La demande en divorce doit être rejetée en cas de réconciliation des époux survenue soit depuis que le demandeur a eu connaissance des faits allégués dans sa demande, soit depuis cette demande.

Article 69

L'action s'éteint par le décès de l'un des époux survenu avant que soit prononcé définitivement le divorce.

Article 70

Le dispositif de la décision prononcée par la juridiction traditionnelle visée à l'article 95 du présent texte du jugement ou de l'arrêt prononçant le divorce est transcrit à la diligence des parties ou du ministère public sur les registres de l'état civil du lieu où le mariage a été célébré ou enregistré ou du lieu du dernier domicile des époux à Madagascar si le mariage a été célébré à l'étranger.

Cette transcription doit avoir lieu dans le mois de la décision.

Article 71

La décision prononçant le divorce dissout le mariage à dater du jour où elle devient définitive.

Ses effets entre époux, en ce qui concerne leurs biens, remontent au jour de la demande.

Elle n'est opposable aux tiers que du jour de la transcription prévue à l'article 70.

Article 72

En aucun cas l'époux divorcé ne peut avoir l'usage du nom de son conjoint.

Article 73

L'époux aux torts duquel le divorce a été prononcé perd de plein droit, dès la transcription, nonobstant toutes clauses contraires, tous les avantages qui lui ont été conférés par l'autre époux, soit par convention matrimoniale, soit pendant le mariage.

Par contre, l'époux qui a obtenu le divorce les conserve encore qu'ils aient été stipulés réciproques et que la réciprocité n'ait pas lieu.

Article 74

Le juge peut accorder à l'époux en faveur duquel a été prononcé le divorce et auquel ce divorce a causé préjudice une réparation sous la forme d'une indemnité définitivement et irrévocablement fixée par le jugement ou l'arrêt prononçant le divorce.

(Loi no 64.017 du 14.11.64) Il fixe le cas échéant, les modalités de paiement.

Article 75

Chacun des parents demeure tenu de contribuer à l'entretien des enfants communs proportionnellement à ses revenus.

Article 76

La garde des enfants est dévolue conformément aux coutumes.

Toutefois, le tribunal peut ordonner, même d'office, dans l'intérêt des enfants que tous ou quelques uns d'entre eux pourront être confiés soit à l'un ou l'autre des parents, soit à une tierce personne.

L'exercice du droit de visite est soumis à l'appréciation du juge qui statue selon l'intérêt des enfants.

Article 77

Les avantages, que les enfants tiennent de leurs père et mère, soit par la loi, soit par le contrat de mariage, ne sont pas modifiés par le divorce.

Article 78

Avant la procédure judiciaire, les parties ont la faculté de soumettre leur différend à l'assemblée du Fokonolona, au maire ou à un conseiller par lui désigné, qui tentent de les concilier.

Cette conciliation qui fait l'objet d'un procès-verbal lie les parties sauf dans ses dispositions qui apparaîtraient contraires à l'ordre public.

CHAPITRE IX : DE LA PROCEDURE DE DIVORCE.

SECTION I : DU DIVORCE EN CAS DE MARIAGE CELEBRE DEVANT L'OFFICIER DE L'ETAT CIVIL.

Article 79

Lorsque le mariage a été célébré par l'officier de l'état civil conformément aux articles 29 et 30 de la présente ordonnance la demande en divorce est portée devant le tribunal du lieu du domicile du mari.

Toutefois, si la femme, défenderesse à l'instance, a suspendu la cohabitation ou quitté le domicile conjugal dans les conditions prévues à l'article 55, la demande est portée devant le tribunal du lieu de sa résidence effective.

Article 80

La demande doit contenir un exposé sommaire des faits allégués par le demandeur ainsi que l'indication des mesures provisoires qu'il entend voir ordonner, relatives notamment à la garde des enfants issus du mariage et à la pension alimentaire pour la durée de l'instance.

Elle est signée du demandeur, ou, s'il ne sait signer, certifiée sincère et véritable par un officier public de son choix.

Article 81

Dans la quinzaine du dépôt de la demande au greffe, le président du tribunal invite les époux à comparaître devant lui, au jour et à l'heure indiqués, aux fins de conciliation.

Article 82

Les parties doivent comparaître en personne, sans se faire assister de parents ou de conseils, ni se faire représenter par mandataire.

Si le défendeur à l'instance est empêché de se présenter, le juge, appréciant souverainement l'empêchement, détermine, le cas échéant, le lieu où sera tentée la conciliation ou donner commission rogatoire aux fins de l'entendre, à moins qu'il ne renvoie la tentative de conciliation à une date ultérieure.

Article 83

Le juge entend les parties, séparément d'abord, puis ensemble en vue de les concilier.

Article 84

Si les époux se concilient, le juge dresse de la réconciliation un procès-verbal, signé des parties, qui est déposé aux archives du greffe.

Copie peut en être délivrée, en cas de renouvellement de la demande en divorce, à l'époux qui entend se prévaloir de la fin de non-recevoir prévue à l'article 68.

Article 85

Si les époux ne se concilient pas, le juge rend une ordonnance constatant la non-conciliation et transmet la procédure, dans son état, devant la juridiction compétente pour statuer sur la demande en divorce.

La date de cette ordonnance engage l'instance et fixe définitivement la compétence de la juridiction saisie, quel que soit le changement pouvant intervenir ultérieurement quant à la résidence de l'un ou l'autre époux.

Article 86

L'ordonnance de non-conciliation peut, en tant que de besoin, autoriser les époux à avoir une résidence séparée, confier à l'un ou à l'autre la garde des enfants issus du mariage, statuer, sur les demandes relatives aux aliments pour la durée de l'instance et sur les autres provisions ordonner la remise d'effets personnels. Et, généralement, prescrire toutes mesures provisoires jugées utiles tant dans l'intérêt des époux et des enfants que pour la conservation du patrimoine familial.

Article 87

Cette ordonnance, exécutoire par provision, n'est susceptible que d'appel.

Article 88

L'appel peut être interjeté dans le délai d'un mois pour compter du jour de l'ordonnance si les époux ont tous deux comparu en personne, ou du jour de sa notification à l'époux défendeur, si celui-ci ne s'est pas présenté.

Cette notification est faite dans la huitaine de l'ordonnance par les soins du greffe.

Article 89

L'appel est régi par les dispositions du Code de procédure civile relatives aux ordonnances des référés.

Article 90

Si le demandeur en divorce ne se présente pas à la conciliation, invoquant un empêchement, le juge apprécie souverainement les raisons de l'empêchement et remet, le cas échéant, la tentative de la conciliation à une autre date.

Article 91

Si le défendeur fait défaut, sans justifier de son absence, il sera statué comme en cas de non-conciliation.

Article 92

En cas de non-conciliation, le juge peut toujours, suivant les circonstances, ajourner les parties pour une durée qui ne pourra excéder six mois, après les avoir expressément avisés que ce délai leur est donné dans un but de réflexion et d'apaisement.

Il peut, nonobstant l'ajournement, prescrire toutes mesures provisoires qu'il estime nécessaire dans l'intérêt des époux, de leurs enfants ou du patrimoine familial.

Article 93

A l'expiration du délai qui précède, l'époux demandeur devra présenter une demande de reprise d'instance en divorce.

Le juge, par une ordonnance de non-conciliation prescrit les mesures prévues à l'article 85 et transmet la procédure à la juridiction de jugement.

Article 94 La cause est inscrite au rôle, instruite et jugée, après débats en chambre de conseil et, le cas échéant, après conclusion du ministère public, suivant les règles éditées par le Code de procédure civile.

Sont néanmoins respectées les dispositions qui suivent :

1o le tribunal saisi peut toujours, à tout moment, rapporter ou modifier les mesures provisoires précédemment prescrites, ou en ordonner de nouvelles ;

2o (Loi no 64.017 du 14.11.64) s'il y a lieu à enquête et à audition de témoins, ceux-ci seront obligatoirement entendus en chambre de conseil et contradictoirement, en présence des époux, ou ceux-ci dûment convoqués ;

3o peuvent être entendus comme témoins, à l'exception des descendants, les parents, ainsi que les domestiques des époux ;

4o les demandes reconventionnelles en divorce peuvent être introduites, en instance comme en appel, par simple acte de conclusions, et sans nouvelle tentative de conciliation ;

5o sauf en ce qui concerne les mesures provisoires, le pourvoi en cassation est suspensif, ainsi que les délais d'opposition, d'appel et de pourvoi ;

6o le jugement ou l'arrêt qui prononce le divorce n'est pas susceptible d'acquiescement ;

7o le dispositif du jugement ou de l'arrêt qui prononce le divorce doit énoncer la date de l'ordonnance qui a autorisé les époux à avoir des résidences séparées ;

8o toutefois, le jugement et l'arrêt sont rendus en audience publique.

SECTION II : DU DIVORCE EN CAS DE MARIAGE CELEBRE SELON LES TRADITIONS.

Article 94

Lorsque le mariage a été célébré selon les traditions, conformément aux articles 31 à 36, les époux peuvent porter leur différend, soit devant le tribunal conformément aux articles 79 et suivant ci-dessus, soit devant une juridiction traditionnelle composée d'un fonctionnaire désigné par le sous-préfet ou le chef d'arrondissement, du maire de la commune ou son adjoint et de deux membres du fokonolona du lieu de la dernière résidence des époux.

Cette juridiction siège au chef-lieu de la commune rurale.

Article 95

L'introduction de la demande en divorce est obligatoirement procédée d'une tentative de conciliation d'abord devant le conseil de famille ensuite, le cas échéant, devant le fokonolona.

Article 96

La juridiction traditionnelle est saisie, soit par requête écrite, soit par déclaration verbale reçue par l'un de ses membres.

Cette requête doit préciser les motifs de divorce invoqués.

Article 97

La demande en divorce est portée devant la juridiction traditionnelle du lieu du domicile du mari.

Toutefois si la femme, défenderesse, a quitté le domicile conjugal dans les conditions prévues à l'article 55, la demande est portée devant la juridiction traditionnelle du lieu de sa résidence effective.

Article 98

Dans la quinzaine de la requête, les époux sont invités à comparaître devant la juridiction traditionnelle au jour et à l'heure indiqués, aux fins de conciliation.

Article 99

Les parties doivent comparaître en personne, sans se faire assister de parents ou de conseils, ni se faire représenter par mandataire.

Si l'un des époux est empêché de se présenter, la juridiction traditionnelle renvoie la tentative à une date ultérieure.

Article 100

La juridiction traditionnelle entend les parties, séparément d'abord, puis ensemble en vue de les concilier.

Article 101

Si les époux se concilient, il est dressé un procès-verbal de conciliation, signé des parties et des membres de la juridiction traditionnelle.

Cette conciliation lie les parties sauf dans ses dispositions qui apparaissent contraires à l'ordre public.

Article 102

Si les époux ne se concilient pas ils sont entendus en leurs explications. Ils exposent leurs moyens et proposent leurs preuves.

Toutefois, suivant les circonstances, la juridiction traditionnelle peut ajourner les parties pour une durée qui ne pourra excéder six mois après les avoir expressément avisés que ce délai leur est donné dans un but de réflexion et d'apaisement. Elle peut ordonner toute mesure d'information qu'elle juge utile.

Article 103

A l'expiration du délai prévu ci-dessus, chacun des époux pourra présenter une nouvelle requête.

Article 104

La décision de la juridiction traditionnelle est rendue en présence des parties.

Elle fait l'objet d'un procès-verbal dont une copie est immédiatement adressée au sous-préfet.

Article 105

Dans le délai d'un mois, cette décision est susceptible d'appel devant le tribunal de première instance ou sa section, par l'une des parties ou par le sous-préfet.

Article 106

L'appel est régi par les dispositions du Code de procédure civile relative aux ordonnances des référés.

Dispositions diverses et transitoires

Article 107

Les régimes matrimoniaux demeurent régis par les dispositions législatives ou coutumières antérieures.

Article 108

La présente ordonnance, qui abroge toutes dispositions antérieures contraires, entrera en application le 1er Janvier 1963.

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* 1 Une règle de droit qui est en contradiction flagrante avec le comportement naturel des individus dans la société, s'expose à une désapprobation.

* 2 F. TERRE et D. FENOUILLET, Droit civil. Les personnes, la famille, les incapacités. Paris, Dalloz, 6e éd., 1996, n° 135, p. 115.

* 3 Cf. art. 2279 et ss. Cciv.

* 4 F. TERRE et D. FENOUILLET, op.cit.

* 5 J. HAUSER et D. HUET-WEILLER, La famille, fondation et vie, Paris, LGDJ, 2e éd., 1993, n° 484, p. 249. Les auteurs estiment que la plus belle définition de la possession d'état est celle que Marcel PAGNOL met dans la bouche de César (Fanny, acte III, scène 10). A Marius qui déclare que le père c'est « celui qui a donné la vie », César rétorque « quand le petit est né, il pesait quatre kilos, quatre kilos de la chair de sa mère. Mais aujourd'hui il pèse neuf kilos et tu sais ce que c'est, ces cinq kilos de plus, c'est cinq kilos d'amour ». Et César de conclure : « le père, c'est celui qui aime ».

* 6 G. CORNU, Droit civil, la famille, Paris, Montchrestien, 8e éd., 2003, n° 205, p. 332.

* 7 V. « possession d'état », encyclopédie juridique Dalloz. Répertoire de droit civil, tome 6, 2003, par F. GRANET-LAMBRECHTS, n° 2, p. 2.

* 8 Dans le cadre de ce travail, cette expression sera remplacée par celle abrégée « d'Avant-projet de code ».

* 9 Cf. art. 324 PAR a de l'APCPF, art. 311-2 de la loi française n° 72/3 du 3 Janvier 1972 portant sur la filiation, art. 200 du code de la famille sénégalais.

* 10 V. arts. 35 et ss. de l'ordonnance n° 81/02 du 29 juin 1981 portant organisation de l'état civil et diverses dispositions relatives à l'état des personnes physiques.

* 11 Idem. Spéc. Le paragraphe 2 de l'art. 35.

* 12 L'art. 68 PAR 2 dispose à cet effet que : « Les nom et prénoms sont librement choisis lors de la déclaration de naissance à l'officier d'état civil ».

* 13 Nous le soulignons parce que les dispositions de l'Avant-projet de code relatives au choix du nom, patronyme ou matronyme n'ont fait aucune part à la réserve de l'art. 35 de l'ordonnance de 1981.

* 14 Il s'agit de l'ordonnance camerounaise n° 81/02 du 29 juin 1981 précitée.

* 15 V. art. 35 précité.

* 16 M. FOLI, Encyclopédie Juridique de l'Afrique, tome 6, NEA 1982, v. « la preuve de la filiation légitime », p. 337.

* 17 F. GRANET-LAMBRECHTS, Répertoire Dalloz de Droit Civil, tome 8, 2003, v. « possession d'état », n° 14, p. 3.

* 18 J. HAUSER et D. HUET-WEILLER, op. cit., n° 493, p. 256.

* 19 M. FOLI, op. cit. V. également, l'arrêt Ader .Cass. Civ. 23 juin 1869, Sirey 1869 s-445 et l'art 334-6 Cciv.

* 20 M. GOBERT « Le nom ou la redécouverte d'un masque », JCP 1980, I, 2966.

* 21 V. art. 5 PAR. 2 de cette ordonnance en annexe. Plus spécifiquement, les modifications apportées à l'art. 311-1.

* 22 V. Cour d'appel de Paris, 19 janvier 1982. Défrénois 1983. p. 323, obs. J. MASSIP. A défaut des décisions de justice provenant des cours et tribunaux camerounais, qui, il faut le dire sont pratiquement inexistants en ce domaine ; nous nous permettrons de citer dans le cadre de notre recherche la jurisprudence française. Ce qui ne nuit en rien à cette étude puisque l'Avant-projet de code n'est pas très différent des textes français sur ce point.

* 23 G.CORNU, op. cit., n° 205, p. 333.

* 24 V. arts. 371-1 et 371-2 Cciv.

* 25 Cf. PAR b de l'art. 324 de l'APCPF et l'art. 311-2 de la loi française de 1972 précitée.

* 26 V. par exemple C.A. Versailles, 12 avril 1983 : D. 1983, p.554, note HUET-WEILLER.

* 27 V. G. CORNU, op. cit.

* 28 C'est probablement la raison pour laquelle, l'ordonnance française n° 2005/759 précitée, énumère les principaux faits de la possession d'état en commençant par le tractatus.

* 29 V. l'arrêt SCHWARTZ, cass. civ. 25 août 1812. Dalloz Sirey 1812. 1. p. 177.

* 30 Contra : M.-L. RASSAT, « propos critique sur la loi du 3 janvier 1972 portant réforme du droit de la filiation », RTD civ. 1973, p. 207, Spéc. n°37. L'auteur retient comme élément prédominant la fama.

* 31J. HAUSER et D. HUET-WEILLER, op. cit., n° 494, p. 257.

* 32 G. CORNU, op. cit.

* 33 J. HAUSER et D. HUET-WEILLER, op. cit., n° 495, p. 258.

* 34 J. HAUSER et D. HUET-WEILLER, Idem.

* 35 Cf. art. 311-2 de cette loi, en annexe.

* 36 V. par exemple, Tribunal de grande instance de Strasbourg, 13 juin 1973, D. 1974, p. 64, note COLOMBET. (Ordonnance du juge des enfants confiant deux enfants à leur « père » par mesure d'assistance éducative.

* 37 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit., n° 744, p. 616. On peut aussi parler de possession d'état en matière de nom, de mariage, de nationalité...

* 38 V. J. LAUTOUR, La possession d'état, thèse de doctorat en droit, Université de Paris II, 1973.

* 39 La complexité et le flou de la notion font en sorte qu'elle ne soit consacrée que par très peu de pays. Elle reste inconnue de certains droits européens comme les droits allemand, autrichien, suisse. Aucune disposition du code malien de la famille et bien d'autres législations africaines, ne donnent effet juridique à cette notion.

* 40 J. GROSLIERE, « La possession d'état : pivot du droit de la filiation ou le danger d'une vérité sociologique », D. 1991, chronique, p.153.

* 41Contrairement à certains pays africains : la Côte d'ivoire, le Gabon, le Mali, le Rwanda, le Sénégal et le Togo qui ont légiféré en matière familiale.

* 42 Il s'agit de la loi du 7 juillet 1966 portant diverses dispositions relatives au mariage, de la loi n°68/LF/2 portant organisation de l'état civil et de la loi n° 68/LF/3 du 11 juin 1968 portant code de la nationalité camerounaise. Pour cette dernière loi, v. J.O.R.F.C 1968, p. 24 ; v. aussi, Répertoire chronologique du droit camerounais, tome VIII, année 1968.

* 43 V. supra. P. 3, note de bas de page n° 10.

* 44 Il est tout de même étonnant que plus de quatre décennies après l'indépendance politique du Cameroun que celui-ci dépende plus ou moins encore des textes du colonisateur.

* 45 Simples citoyens, responsables dans les ministères, dans les cours et tribunaux de la République...

* 46 Initialement, le code civil n'assignait à la possession d'état qu'un rôle limité. D'après la conception du législateur de 1804, la possession d'état ne fait pas présumer l'existence de l'état au profit du possesseur ; celui - ci doit établir cette existence par les modes de preuves légaux. C'est exceptionnellement que le code civil y attachait une certaine valeur probante. La possession d'état peut notamment servir à prouver la filiation légitime (article 320) et uniquement celle - ci. Aucune autre disposition ne conférait valeur probatoire à la possession d'état d'enfant naturel.

* 47 E. AGOSTINI, « note sous Tribunal de grande instance de Paris, 25 mars 1975 », D. 1976, p. 129.

* 48 La défaillance de l'acte d'état civil s'entend, de son inexistence, de sa perte, de sa destruction à la suite d'un incendie par exemple.

* 49 Cf. les arts. 319 et 320 de la loi n° 72/3 du 3 janvier 1972, en annexe.

* 50 Cf. art. 197 de ce code, en annexe.

* 51 J. BIGOT, « indivisibilité ou divisibilité de la filiation après la reforme de 1972 », RTD Civ. 1977, p. 243

* 52 F. GRANET-LAMBRECHTS, op. cit., n° 27, p. 4.

* 53 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit. , n° 751, p. 621.

* 54 Nous le pensons parce que, les deux premiers faits de possession énumérés par l'art. 324 de l'APCPF renvoient au père. Le nomen correspond au nom du prétendu père légitime, porté par l'enfant. Le tractatus est essentiellement l'oeuvre du père. Aussi, l'énumération faite par le texte camerounais, correspond à celle faite par le code sénégalais de la famille (voir art. 200 de ce code en annexe) pour qualifier les principaux faits de la possession d'état à l'égard du père légitime. Or, l'intention du rédacteur camerounais est de lister les éléments constitutifs de la possession d'état d'enfant légitime dans son ensemble ( l'art. 324 du futur code dispose que : « la possession d'état s'établit .... », et non que : « la possession d'état à l'égard du père légitime s'établit en prouvant que : l'enfant a toujours porté le nom du père qu'il prétend être le sien, le père supposé l'a traité comme son enfant ... »). Pourquoi dès lors mentionner l'élément nomen et l'élément tractatus en les limitant au prétendu père légitime ? La possession d'état d'enfant légitime concerne aussi bien la prétendue mère légitime que le prétendu père légitime. S'il fallait énumérer les éléments constitutifs de la possession d'état d'enfant légitime dans son ensemble, il n'était pas, à notre avis, souhaitable d'énoncer le nomen et le tractatus en faisant uniquement référence au père. Peut-être que par souci de clarté, aurait-il fallu rédiger l'art. 324 en ces termes : « La possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui indiquent les rapports de filiation et de parenté entre un enfant et la famille à laquelle il prétend appartenir, notamment :

a/ L'enfant a toujours porté le nom de ceux dont on le dit issu ;

b/ Que ceux-ci l'ont traité comme leur enfant, et ont pourvu en cette qualité à son éducation, à son entretien et à son établissement ;

c/ L'enfant a été reconnu constamment pour tel dans la société ;

d/ L'enfant a été reconnu pour tel dans la famille ».

* 55 L'emploi de l'adverbe « notamment » dans l'art. 324 du futur code vient en soutien de notre intuition. Cet adverbe, qui signifie : entre autre, spécialement, principalement, spécifiquement, par exemple, laisse deviner qu'en sus des éléments cités, d'autres peuvent être pris en compte.

* 56 V. art. 311-2 de la loi française n° 72/3 du 3 janvier 1972 sur la filiation ; voir également, art. 5 PAR 2 de l'ordonnance n° 2005/759 du 4 juillet 2005 portant reforme de la filiation.

* 57 M. FOLI, op. cit., p. 341.

* 58 G. CORNU, op. cit. , n° 206, p. 334.

* 59 V. en ce sens, Cass. 1re Civ., 5 juillet 1988, D. 1989, p.389, concl. CHARBONNIER. Cass. 1re Civ., 6 mars 1996 : JCP 1996, IV, 990 ; Bull. I, n° 120, p. 85 ; RTD Civ. 1996, p. 374, obs. HAUSER. Cass. 1re Civ., 16 mars 1999 : JCP 1999, IV, 1890; Bull. I, n° 98, p. 65.

* 60 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit. , n° 747, p. 618.

* 61 V. arts. 322 PAR. II, 332 PAR II, en annexe.

* 62 Il ressort de l'art. 311-1 al. 2 de la loi n° 72/3 du 3 janvier 1972 sur la filiation que : « la possession d'état doit être continue ».

* 63 G. CORNU, op. cit.

* 64 G. CORNU, idem.

* 65 En ce sens, Cass. Civ. 1re, 3 mars 1992, Bull. civ. I, n° 69 ; D. 1993, p. 133, obs. J. MASSIP; RTD civ. 1993, p. 109, obs. J. HAUSER.

* 66 V. F. GRANET-LAMBRECHTS, op. cit., p. 4.

* 67 J. HAUSER et D. HUET-WEILLER, op. cit., n° 500, p. 263. V. aussi, M.-L. RASSAT, « propos critique sur la loi du 3 janvier 1972 portant réforme du droit de la filiation », RTD civ. 1973, p. 207, Spéc. n° 39 et ss.

* 68 V. Cour d'appel de Versailles, 12 avril 1983, D. 1983, p. 554, note D. HUET-WEILLER.

* 69 REMOND-GOUILLOUD, « la possession d'état d'enfant (À propos de la loi du 3 janvier 1972) », RTD Civ. 1975, n° 22, pp. 459 et ss.

* 70 Notons que l'ordonnance n° 81/02 du 29 juin 1981, l'une des sources les plus importantes actuellement du droit des personnes et de la famille n'a prévu aucune disposition concernant cette question. Le législateur camerounais semble donc l'ignorer.

* 71 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit., n° 670, p. 551.

* 72 L'enfant naturel était considéré comme l'enfant du péché. On le voyait comme étant le fruit des rapports immoraux et faisait l'objet d'une réprobation sociale.

* 73 V. Loi française du 12 brumaire An II.

* 74 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit.

* 75 V. arts. 41 et ss. de l'ordonnance n° 81/02 du 29 juin 1981. V. aussi, F. ANOUKAHA, « la filiation naturelle au Cameroun après l'ordonnance n° 81/02 du 29 juin 1981 », RCD n° 30-1985, p. 25 à 50 ; PENANT n° 793-1987, p. 7 et ss. V. L. ELOMO NTONGA, l'enfant naturel en droit camerounais, étude de jurisprudence des tribunaux de l'ex-Cameroun oriental, mémoire de master's degree, Université de Yaoundé, 1979.

* 76 V. art. 756 Cciv de1804.

* 77 V. art. 760 Cciv de 1804. Une lueur semble toutefois jaillit de l'Avant-projet de code. L'art. 343 dispose que : « Les droits de l'enfant naturel reconnu sont égaux à ceux de l'enfant légitime ». Il est vrai, beaucoup reste à faire pour que le principe d'égalité entre les enfants soit effectif en droit camerounais. Les efforts visant à diminuer le fossé entre l'enfant légitime et l'enfant naturel doivent être encouragés.

* 78 C'est surtout la filiation naturelle paternelle qui fait problème.

* 79 Constitution du Cameroun (préambule), Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, Convention de New York sur les droits de l'enfant, Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, Charte africaine sur les droits et le bien-être de l'enfant ...

* 80 Pour une appréciation générale du principe d'égalité en droit camerounais de la famille, v. T. ATANGANA-MALONGUE, « L'égalité en droit de la famille », RASJ, n° 3, vol. 1, 2003.

* 81 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit., n° 671, p. 553.

* 82 Convention ratifiée par le Cameroun le 11 Janvier 1993 et entrée en vigueur le 10 février de la même année.

* 83 J. MASSIP, « note sous Cass. Civ. 1re , 8 mai 1979 », Gaz. Pal. 1979, 2, p. 426.

* 84 D. HUET-WEILLER, « l'établissement de la filiation naturelle par la possession d'état (commentaire de la loi du 25 juin 1982 modifiant l'art. 334-8 al. 2 c. civ.) », D. 1982, chron. , n°4, p. 186.

* 85 La famille se définit au sens large, comme l'ensemble des personnes descendant d'un auteur commun et rattachées entre elles par le mariage et la filiation. V. Lexique des termes juridiques, Dalloz, 13e éd., 2001.

* 86 M-J. GEBLER, Le droit français de la filiation et la vérité, thèse publiée, Paris, LGDJ, 1970, p. 253.

* 87 Ph. JESTAZ, « Commentaire de la loi du 25 juin 1982 », RTD Civ 1982, p. 672.

* 88 Ce sont des cousins juridiques. C'est-à-dire que le système juridique qu'on retrouve au Cameroun est proche de celui du Gabon, du Sénégal. D'un pays à un autre, les règles juridiques sont quasi similaires. Elles ont le même fondement : le système romano-germanique hérité de la colonisation française.

* 89 V. infra.

* 90 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit. , n° 752, p. 622. Elle est l'oeuvre de la loi n° 82/536 du 25 juin 1982 modifiant l'article 334-8 du code civil français relatif à l'établissement de la filiation naturelle.

* 91 Arrêt BOISSIN : cass. Civ. 17 février 1851, Sirey 1851, 1, p. 161, D. 1851, 1, p. 113. Arrêt MIQUEL : cass. Civ. 3 avril 1872, Sirey 1872, 1, p.126, D. 1872, 1, p. 113.

* 92 H. CAPITANT, F. TERRE, Y. LEQUETTE, « note sous Cass. Civ., 1re, 8 mai 1979 et Ass. Plén. 9 juillet 1982 », GAJC, n° 43- 44, t. 1, Dalloz, 11e éd., 2000, p. 236.

* 93 SAVATIER, « Parenté et prescription civile », RTD Civ. 1975, pp.1 et ss. ; AGOSTINI, « note sous Trib. Gr. Inst. Paris, 25 mars 1975 », D. 1976, p. 126.

* 94 Une telle orientation du droit de la filiation n'est malheureusement pas perceptible au Cameroun. On décèle encore chez le législateur camerounais, une certaine manifestation d'hostilité vis-à-vis de la filiation naturelle, voire de la famille naturelle. La famille « légitime » reste et demeure privilégiée. Le fait que le concubinage n'ait pas encore acquis une valeur juridique ne facilite pas la protection des enfants naturels au Cameroun.

* 95 R. NERSON et RUBELLIN-DEVICHI, obs., RTD Civ. 1979, pp. 791 et ss. ; P. RAYNAUD, « L'inégalité des filiations légitime et naturelle quant à leur mode d'établissement. Où va la jurisprudence ? », D. 1980, chron. p. 1 et ss.

* 96 Aussi dans le sens de l'admission de la possession d'état ; v. Cour d'appel de Paris, 11 juillet 1978, D. 1979, p. 425, note J. MASSIP.

* 97 Rapporteur à l'assemblée nationale française à l'époque.

* 98 V. annexe.

* 99 H. CAPITANT et al., op. cit., p.237.

* 100 C. LABRUSSE-RIOU, Répertoire Dalloz de droit civil, t. 6, 2003, v. « Filiation », n° 93, p. 20.

* 101 L. SIDIME, « La filiation hors mariage », Encyclopédie juridique de l'Afrique, Droit des personnes et de la famille, N.E.A 1982, p. 366.

* 102 V. art. 49 de la Ley del registro civil, du 8 juin 1957.

* 103 E. AGOSTINI, op. cit.

* 104 L. SIDIME, op. cit., p. 367.

* 105 V. art. 255 de l'APCPF.

* 106 V. art. 256 de l'APCPF.

* 107 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit., n° 370, p. 296. On peut dire la même chose du Cameroun. Avant l'introduction du système des registres civils, le mariage était célébré coutumièrement, sans consignation, ni écrit. Le seul mode de preuve du mariage dans ce cas ne pouvait être que la possession d'état.

* 108 Cf. art. 194 du c. civ. et art. 255 de l'APCPF.

* 109 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit.

* 109 L. BRUNET et F. DEMOULIN, « Propos circonspects sur une notion séduisante, la possession d'état de couple », Le banquet, n° 12, 1998, pp. 3 et 4.

* 110 L. BRUNET et F. DEMOULIN, idem.

* 111 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit., n° 371, p. 297.

* 112 Idem.

* 113 V. art. 38 de l'ordonnance malgache de 1962, en annexe.

* 114 V. art. 73 PAR. 1 et 2 de l'APCPF en annexe.

* 115 On pourrait également écrire ces noms de cette façon ; BOMBA NGO Nicole et BOMBA NGO Nicole épouse AYISSI. C'est aussi de cette manière qu'est libellé le nom d'une femme mariée, lorsqu'elle décide de porter le nom de son mari.

* 116 Attestations, titres professionnels, carte d'identité, reçus, documents bancaires comme les chèques...

* 117 Vie commune, cohabitation. Quand un homme et une femme mènent une vie commune de façon continue, le résultat est la stabilité que l'on retrouve dans le mariage. Cette assise, peut faire présumer qu'il y a effectivement mariage entre les concernés.

* 118 Code civil de 1804, Ordonnance n° 81/02 du 29 juin 1981.

* 119 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit. , n° 755, p. 625 et ss.

* 120 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit., n° 756, p. 626.

* 121Cf. art. 322 de la loi de 1972 en France Sur la filiation ; et art. 185 du code de la famille du Togo qui disposent que : « Nul ne peut réclamer un état contraire à celui que lui donnent son titre de naissance et la possession conforme à ce titre ».

* 122 Il s'agit en réalité, de protéger la paix des familles.

* 123 V. ETAT ET CAPACITE DES PERSONNES, Encyclopédie juridique Dalloz, répertoire de droit civil, t. v, n° 101, p. 14.

* 124 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit., n° 756, p. 627.

* 125 La possession d'état n'a aucun intérêt ici; puisqu'elle est mensongère. Elle est faussée dès le départ.

* 126 F. TERRE et D. FENOUILLET, idem.

* 127 Ibid.

* 128 Il s'agit de l'acte d'état civil et non de l'acte juridique qu'est le mariage.

* 129 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit., n° 415, p. 332.

* 130 Cf. art. 39 de l'ordonnance malgache de 1962 sur le mariage qui dispose que : « Lorsqu'il y a possession d'état d'époux, et que l'acte de mariage est représenté, nul ne peut se prévaloir des irrégularités formelles de cet acte ».

* 131 Pour couvrir la nullité, la possession d'état doit être constante, c'est-à-dire n'avoir pas été interrompue et avoir duré jusqu'à la demande en nullité (Req. 7 Janvier 1929, DH 1929, p. 50).

* 132 Cass. 1ère civ. , 1er août 1930, 1, p. 169, note Lalou.

* 133 Paris, 2 déc. 1966 : JCP 1967, IV, p. 70 ; RCDIP 1967, 530, note Malaurie, 1ère esp.

* 134 Cass. Req. , 16 Juin 1915 : S. 1920, 1, p. 107.

* 135 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit.

* 136 Art. 54 de l'ordonnance de 1981.

* 137L'art. 259 de l'APCPF dispose que : « Le mariage peut également être annulé pour (...) défaut de publication du mariage (...) ».

* 138 Il est vrai que le procureur de la république peut, pour des motifs graves requérant célérité, accorder une dispense partielle ou totale de la publication d'intention de mariage (art. 55 de l'ordonnance de 1981).

* 139 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit.

* 140 Plus spécifiquement, c'est le fait, pour un homme marié sous le système de la monogamie de contracter un second mariage, sans avoir dissout le premier. C'est le fait encore pour une femme de contracter un nouveau mariage, sans mettre un terme au précédent. La polyandrie n'étant pas d'actualité au Cameroun.

* 141 Ou l'un d'eux seulement.

* 142 V. C-L CLOSSET, Traité de la nationalité en droit belge, Larcier, 2e éd., 2004 (mise à jour, Bernadette RENAULD). L'auteur y présente la nouveauté de la possession d'état comme mode d'acquisition de la nationalité belge, s'interroge sur le principe et dégage les effets de l'acquisition de la nationalité belge à raison de la possession d'état.

* 143 V. F. TERRE et D. FENOUILLET, op. Cit., n° 744, p. 616.

* 144 On parle alors de jus sanguinis ou droit du sang. Il faut souligner que le code de 1968 a institué une discrimination entre les filiations légitimes et naturelles et entre les filiations paternelles et maternelles. Ainsi, dans le code actuel de la nationalité, la filiation légitime est privilégiée par rapport à celle naturelle. On peut relever à titre d'exemple qu'alors que l'établissement de la filiation légitime est automatique, l'établissement de la filiation naturelle à l'égard de la mère connaît une primauté. Les conséquences sont les mêmes au niveau de la nationalité. Le code de 1968 attribue automatiquement la nationalité camerounaise à l'enfant légitime dont l'un des parents est camerounais. Dans le système actuel, l'enfant naturel ne bénéficie pas de la même automaticité. En fait, cette situation varie selon que l'un de ses parents ou tous les deux sont camerounais. L'enfant naturel dont les deux parents sont camerounais se voit attribuer la nationalité camerounaise sans faculté de répudiation. Par contre, l'enfant naturel dont l'un seulement des parents est camerounais se verra attribuer la nationalité camerounaise si et seulement si sa filiation a d'abord été établie à l'égard du parent camerounais. L'Avant-projet de code apporte des corrections à cette situation en refusant de tenir compte de la qualité de la filiation dans l'attribution de la nationalité camerounaise. Elle introduit une formule simple qui peut être considérée comme un facteur d'amélioration de la situation de l'enfant naturel. En effet est désormais camerounais, l'enfant dont l'un des parents au moins est camerounais. Désormais, il n'existe que deux cas d'attribution de la nationalité camerounaise par la filiation. Le cas de l'enfant né de deux parents camerounais et celui de l'enfant dont un seul des parents est camerounais. Dans la première hypothèse, l'enfant est camerounais à titre définitif quelque soit le lieu de naissance, et il est camerounais sans faculté de répudiation. Dans la seconde hypothèse, l'enfant a la nationalité camerounaise avec faculté de répudiation.

* 145 On parlera dans ce cas de jus solis. Notons également à ce niveau une grande différence entre le code actuel et l'Avant-projet de code. Dans le code actuel, la nationalité à titre originaire fondée sur le droit du sol est attribuée soit par la simple naissance au Cameroun, soit par la double naissance. C'est le cas de l'enfant légitime né au Cameroun de parents étrangers si l'un d'eux y est lui-même né. Il s'agit encore de l'enfant naturel né au Cameroun lorsque celui des parents étrangers à l'égard duquel la filiation a d'abord été établie y est né lui-même. Dans les deux cas, il s'agit du système de la double naissance. Ce système est totalement modifié par le futur code camerounais des personnes ; puisque désormais, les deux parents qu'ils soient ou non étrangers n'influencent pas l'attribution de la nationalité au titre du droit du sol. Il y a dans l'Avant-projet de code, une consécration du système de la simple naissance. Ainsi , la nationalité camerounaise est attribuée du seul fait de la naissance sur le territoire national sans tenir compte du fait que l'un des parents est né au Cameroun.

* 146 V. ord. N° 70/86 du 15 décembre 1970 portant code de la nationalité algérienne. (Annexe).

* 147 Pour la définition de la nationalité d'acquisition, v. P. MAYER et V. HEUZE, Droit international privé, Montchrestien, 8e éd., 2004, n° 883, p. 633.

* 148 En réalité, l'Avant-projet de code ne s'est intéressé qu'à cette cause d'acquisition de la nationalité camerounaise. A ce propos, il reconnaît à l'homme étranger qui épouse une camerounaise, la possibilité d'acquérir la nationalité camerounaise de sa femme.Il faut dire que l'évolution sur cette question est très importante. En effet, dans la loi de 1968, la situation de l'homme et de la femme sont différentes. La discrimination est effectuée au profit de la femme étrangère qui épouse un camerounais. Selon l'art. 17 du code de la nationalité, la femme peut sur sa demande expresse acquérir la nationalité camerounaise au moment de la célébration du mariage. Le même texte ne reconnaît pas au conjoint étranger de la femme camerounaise un avantage similaire.

* 149 V. arts. 196 à 207 de l'APCPF pour plus de détails.

* 150 Gabon, Guinée équatoriale, République centrafricaine, Congo ...

* 151 V. infra.

* 152 V. art. 219 par. 1 de l'APCPF.

* 153 La circulaire dans son entier se trouve en annexe.

* 154 V. supra, p. 7, note de bas de page n° 42.

* 155 On parle de décret de naturalisation.

* 156 On parle de décret de réintégration.

* 157 Ce service fixe les conditions de recevabilité, les pièces justificatives à fournir et les formalités de la déclaration de la nationalité française à raison de la possession d'état de français. Voir annexe.

* 158 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. Cit. , n° 152, p. 127.

* 159 Le nom TAGNE laisse deviner qu'un individu est de l'ouest Cameroun par exemple.

* 160 Art. 78 de l'APCPF. C'est dire qu'il y a des noms qui peuvent être considérés comme camerounais et d'autres à forte consonance étrangère, qui ne sont généralement pas portés par des nationaux camerounais.

* 161 La mauvaise foi du national d'acquisition se présumera si depuis l'acte lui conférant la qualité de camerounais, il a accompli des services pour le compte d'un Etat étranger spécifiquement réservés aux nationaux de ce pays. Il doit s'être détaché totalement du pays de son ancienne nationalité. La bonne foi sera également remise en cause si à un moment donné, l'intéressé a posé des actes susceptibles de le considérer non pas comme un camerounais, mais plutôt comme un étranger.

* 162 On peut noter à ce niveau une différence notable avec la possession d'état d'enfant, qui contrairement à la possession d'état de camerounais n'a pas à être ininterrompue et peut même ne plus exister le jour où l'on s'en prévaut.

* 163 P. MAYER et V. HEUZE, op. Cit. , n° 905, p. 645.

* 164 Pour une analyse prospective de cette jurisprudence, v. P. LAGARDE, « Destinées de l'arrêt Rivière », JDI 1971, pp. 241 à 257.

* 165 Contrairement à son homologue français qui parle de « résidence habituelle, commune ou séparée ». Cf. art. 311-15 de la loi française de 1972, précitée.

* 166 Le législateur français a quant à lui pris le soin de poser une règle de rattachement englobant tout à la fois les effets de la possession d'état d'enfant légitime et d'enfant naturel. L'art. 311-15 de la loi française de 1972 dispose à cet égard que : « Toutefois, si l'enfant légitime et ses père et mère, l'enfant naturel et l'un de ses père et mère ont en France leur résidence habituelle, commune ou séparée, la possession d'état produit toutes les conséquences qui en découlent selon la loi française, lors même que les autres éléments de la filiation auraient pu dépendre d'une loi étrangère ».

* 167Nous estimons que pour plus de clarté, l'article 326 de l'Avant-projet de code devrait plutôt figurer dans les dispositions générales applicables à la filiation légitime et à la filiation naturelle. Il pourra être rédigé de la manière suivante : « Lorsque l'enfant légitime et ses père et mère, l'enfant naturel et l'un de ses père et mère sont camerounais ou résident au Cameroun, la possession d'état produit toutes les conséquences qui en découlent conformément à la loi camerounaise ».

* 168 J. MASSIP, G. MORIN, J-L. AUBERT, « La loi du 3 janvier 1972 sur la filiation », Défrénois 1972, pp. 523 et ss.

* 169 Dans une tentative de simplification, le Sénat français, avait proposé de faire régir, aux conditions de résidence prévues par le projet de loi de 1972, « la filiation ... par la loi française ». V. I. FADLALLAH, op. cit. n° 311, p. 283.

* 170 V. A. PONSARD, « La loi française du 3 janvier 1972 et les conflits de lois en matière de filiation », JDI 1972, n° 20, p. 778.

* 171 C'est une analyse empruntée à MM. BATIFFOL et LAGARDE. V. en ce sens, H. BATIFFOL et P. LAGARDE, op. cit., p.10.

* 172 L'art. 311-14 de cette loi dispose en effet que : « La filiation est régie par la loi personnelle de la mère au jour de la naissance de l'enfant ; si la mère n'est pas connue, par la loi personnelle de l'enfant ».

* 173 JOAN CR, 7 oct. 1971, p. 4301.

* 174 V. P. BOUREL, «Filiation. Introduction générale. Etablissement de la filiation : détermination de la règle de conflit », J.- cl. Dr. Int., fasc. 548-1, n° 34. Aussi, I. FADLALLAH, La famille légitime en droit international privé (le domaine de la loi applicable aux effets du mariage), Paris, Dalloz, 1977, n° 301, pp. 272 et ss.

* 175 V. H. BATIFFOL et P. LAGARDE, « l'improvisation de nouvelles règles de conflit de lois en matière de filiation », RCDIP 1972, pp. 5 et ss. Voir également BOUREL (P.), op. cit., n°37.

* 176 I. FADLALLAH, op. cit., n° 298, p. 271.

* 177 V. A. PONSARD, « la loi française du 3 janvier 1972 et les conflits de lois en matière de filiation », JDI 1972, n° 14, p. 775. Sur l'ensemble de cette critique, v. P.BOUREL, op. cit., n° 34 et ss. Et les auteurs cités.

* 178 F. TERRE et D. FENOUILLET, op. cit., n°752, p.623.






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