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Le cycle politico-budgetaire au Cameroun

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par Dorothe Virginie Ngondjeb Yong
Universite de Yaounde II Soa - DEA en sciences economiques et Gestion 2004
  

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    INTRODUCTION GENERALE

    L'observation de l'évolution de l'économie mondiale laisse de plus en plus apparaître le poids des décisions politiques sur les orientations économiques que peuvent adopter les gouvernements. Il n'est d'ailleurs pas surprenant d'observer à la veille des différentes échéances électorales, des décisions qui épousent tant bien que mal les aspirations des électeurs. Ceci a notamment été le cas aux Etats-Unis où, à l'approche des élections présidentielles de Novembre 2004, l'administration Bush quelques mois auparavant, adoptait des politiques visant à rehausser son image auprès de l'opinion publique. De ce fait, au souci relatif à la sécurité intérieure, cette administration demandait au Congrès une rallonge du budget alloué à la défense en vue de l'intervention en Irak. Par ailleurs, l'on a pu observer des baisses consécutives du taux d'intérêt de la Réserve Fédérale en vue de relancer la consommation et donc l'économie. De même, l'adoption d'une politique du dollar faible par rapport à l'euro, les subventions accordées aux producteurs de coton américains, ainsi que l'embargo sur certains produits de l'Union Européenne (notamment l'acier) laissent entrevoir une volonté non seulement de relancer la compétitivité de l'économie Américaine sur le plan international, mais également de rehausser l'image de l'administration en place auprès de l'opinion publique américaine.

    En France, l'insécurité a constitué pour le Président sortant Chirac un véritable cheval de bataille lors de la campagne présidentielle d'avril 2002, occultant de ce fait les bons résultats économiques obtenus par le gouvernement socialiste en place quelques mois auparavant. La lutte contre l'insécurité a alors occasionné un accroissement du budget du Ministère de l'Intérieur, marqué notamment par une augmentation des effectifs de la police et de la gendarmerie française. Aussi, la réduction des impôts, la résorption du chômage pour ne citer que ces deux exemples deviennent au fil des temps de véritables enjeux électoraux ; peu importe l'aptitude ou non des politiciens à pouvoir les réaliser une fois élus. Ce qui conduit inéluctablement à établir une relation de plus en plus croissante entre les prévisions macroéconomiques et les échéances électorales.

    Certaines études (Fouda ; 1997) ont pu mettre en exergue le lien entre la politique et l'économie au début des années 1990 au Cameroun. En effet, le paysage politique Camerounais depuis les indépendances était marqué par l'existence d'un seul parti. De ce fait, que ce soit au sein du tout premier régime qu'à l'intérieur de celui qui lui a succédé, les gouvernants successifs étaient préoccupés aussi bien par leur réélection que par leur popularité.

    Le déclenchement de la crise économique au milieu des années 1980 au Cameroun a suscité davantage l'intérêt porté à l'analyse des comportements des gouvernants relatif à leur capacité à prendre des décisions économiques adéquates. De plus, l'avènement du processus de démocratisation au Cameroun au début des années 1990 a posé les jalons d'une possibilité d'alternance politique, provoquant alors chez les gouvernants en place le souci plus accru de leur réélection. Dès lors, la conduite de la politique économique et notamment la manipulation des prévisions budgétaires par les gouvernants intègre progressivement la variable électorale.

    Toutefois, « de manière générale, bien que les interactions entre la politique et l'économie dans les pays en développement soient aujourd'hui couramment admises, notamment par les travaux sur la faisabilité des programmes d`ajustements structurels, les voies de transmissions de ces interactions n'ont pas encore été toutes jusqu'ici clairement définies et identifiées» (Fouda ; 1997).

    L'intérêt de notre sujet est alors consécutif à la possibilité qui nous est offerte dans notre recherche de mettre en exergue la manipulation du budget par les dirigeants politiques entre les différentes échéances électorales au Cameroun.

    L'analyse des expériences de politique économique a permis l'émergence d'une nouvelle perspective d'examen théorique de la politique économique, prenant en compte le poids déterminant des variables significatives de la rationalité politique Greffe (1989). De ce fait, il devient délicat pour les gouvernants en place de se soucier uniquement de la rationalité économique au détriment de la rationalité politique dont l'une des variables est la réélection. Cette dernière étant une préoccupation permanente des hommes politiques, elle devient dans certains cas, tributaire du succès de la stratégie économique adoptée. Cette nouvelle donne révèle le concept de cycle politico-économique. Greffe (1989) pense à cet effet que « tout gouvernement analysera ses décisions à la lumière d'une contrainte de réélection, préoccupation d'autant plus importante que l'on se rapproche des échéances électorales ». Abondant dans le même sens, Paldam (1979) avait établit que le cycle politico-économique est la fluctuation d'une économie autour de son sentier d'équilibre de long terme généré par le système politique. En d'autres termes, le CPE étudie la manière dont les groupements d'intérêt et les pressions politiques au sein d'un pays influencent les performances macro-économiques (Yasemin Kuzu, 2004).

    Il ressort de ce qui précède, un élément fondamental: la périodicité des décisions de politique économique sous la contrainte des échéances électorales. De plus, pendant l'année de l'élection, des hommes politiques lorsqu'ils veulent agir dans le sens de leur intérêt manipulent les variables budgétaires telles que les dépenses totales, les payements de la sécurité sociale, les dépenses du secteur agricole, les transferts (Blais et Nadeau, 1992).

    Il apparaît dès lors que l'examen du cycle politico budgétaire, reposant sur les mêmes fondements théoriques que le cycle politico-économique traditionnel, traduit une analyse des comportements du budget de l'Etat à la veille et au lendemain d'échéances électorales.

    La prise en compte dans l'analyse économique des données politiques à fait l'objet d'une littérature considérable. En effet, si à travers la révolution marginaliste à la fin du 18è siècle, l'économie néo-classique commençait à exercer une domination sans précédent, elle ne prenait cependant pas en compte l'effet que pouvait avoir les Institutions Politiques sur l'économie. Cette nouvelle approche venait trancher avec certains auteurs classiques (Adam Smith dans sa «Richesse des Nations » 1776, John Stuart Mill dans « Principes d'Economie Politique » 1848) et mêmes physiocrates (De Montchretien (1915), qui à travers le concept d'Economie Politique avaient auparavant établi un lien étroit entre la politique et l'économie.

    D'un autre côté, les chercheurs en science politique ont développé des théories normatives sans faire appel aux concepts propres à la science économique, conséquence du relâchement de l'interdisciplinarité marqué notamment par une évolution en rangs dispersés des recherches en sciences économiques et en sciences politiques jusqu'aux années 1960.

    Le regain d'intérêt porté sur le lien entre la politique et l'économie s'est révélé à nouveau après les années 1960 avec l'avènement de la «Nouvelle Economie Politique ». Cette dernière impose la prise en compte progressive des Institutions Politiques non plus comme des variables exogènes à la politique macroéconomique, mais elle leur fournit désormais le statut de variables endogènes (Yasemin Kuzu, 2004). Il apparaît dès lors une catégorie d'économistes qui met en exergue le concept de cycle politico-économique au milieu des années 1970.

    Ce concept est initialement dû aux travaux de Kalecki (1943). Mais c'est à partir du milieu des années 1970 qu'apparaissent les véritables contributions y relatives. Nordhaus (1975) en s'inspirant de la courbe de phillips (1958) admet que les électeurs apprécieront la gestion des hommes politiques et leur renouvelleront leur confiance en fonction des performances atteintes dans le passé en matière de lutte contre l'inflation et le chômage. Kempf (2003) pour sa part établit que « le cycle politico-économique décrit une variation cyclique de l'activité économique agrégée, qui découle des considérations politiques ».

    Une première vision des cycles politico-économiques décrit des modèles théoriques qui confèrent aux dirigeants politiques un comportement opportuniste. Autrement dit les hommes politiques mettent sur pied avant les élections des politiques économiques opportunistes pour augmenter leurs chances d'élection ou de réélection. L'idée sous jacente est que les partis politiques n'obéissent à aucune idéologie et pratiquent des politiques économiques susceptibles de les faire gagner les élections. La première contribution relative au cycle opportuniste est faite par Nordhaus en 1975. Il établit que la pratique par des candidats d'une politique monétaire expansionniste mène à une augmentation provisoire de l'activité économique, suivie avec un retard de l'augmentation de l'inflation. Autrement dit, la performance économique dans une période est mesurée par le comportement d'inflation et de chômage. Toutefois, l'étude des cycles opportunistes révèle deux nuances théoriques. D'une part l'on admet l'existence des cycles opportunistes rationnels et, d'autre part celle des cycles opportunistes traditionnels. Ces derniers sont également étudiés pour la première fois par Nordhaus (1975) dans un modèle représentant le dilemme inflation chômage auquel sont confrontés les électeurs.

    Dans ce type de cycle, les agents économiques forment des anticipations d'inflation adaptatives c'est-à-dire qu'ils prévoient l'évolution de l'inflation à partir des informations obtenues sur cette inflation dans le passé. Ainsi, indépendamment de leur considération idéologique, les gouvernants ont tendance à manipuler les instruments de politique économique avant les élections. Il faut cependant noter que les études empiriques menées par certains auteurs et notamment par Alesina, Robini et Cohen (1997) ne confirment pas l'existence de ce type de cycle pour un ensemble de pays de l'OCDE au cours de la période 1960 -1993 en ce qui concerne les grandeurs économiques tels que la croissance du PIB et le taux de chômage. Ils montrent à cet effet qu'avant les élections, la croissance du PIB n'augmente pas de façon significative. Ce qui signifie que pour le groupe de pays de l'OCDE au cours de cette période là, les politiques économiques mises en place lors des échéances électorales n'obéissent pas à un comportement opportuniste traditionnel des hommes politiques. Allant dans le même sens, les auteurs tels que MC Callum (1978), Paldam (1979), Lewis- Beck (1988), Faust et Irons (1999) ne trouvent aucune évidence pour un modèle de CPE de Nordhaus pour le chômage ou la croissance dans des économies développées en dehors des USA.

    S'agissant des cycles opportunistes rationnels, la rationalité tient ici au fait que les agents économiques forment des anticipations d'inflation non plus adaptatives mais rationnelles. C'est-à-dire que ces agents ne tiennent pas seulement compte des informations sur le passé pour faire des prévisions, mais également sur toutes les informations qu'ils détiennent et qui pourraient avoir une influence sur l'inflation dans l'avenir. Ce type de cycle opportuniste découle des travaux de bon nombre d'auteurs tels que Cuckieman-Meltzer (1986); Person et Tabellini, (1990) ; Rogoff (1990) ; et Rogoff et Sibert(1998). Les études empiriques des cycles opportunistes rationnels aboutissent à des résultats contrastés relevant de nombreux travaux économétriques appliqués aux pays occidentaux. Si Alesina, Cohen et Roubini (1992) peuvent faire ressortir des résultats positifs, d'autres auteurs n'ont pas pu confirmer l'existence de tels cycles dans les mêmes pays. Dans tous les cas, il apparaît au vu des études empiriques menées que les fluctuations économiques que l'on observe lors des échéances électorales n'épousent pas toujours un comportement opportuniste des hommes politiques. Cet état des faits s'accentue encore plus lorsque l'on considère le cas ou les agents économiques forment des anticipations d'inflation rationnelles.

    Ensuite dans une deuxième vision, les politiciens sont partisans d'une idéologie politique qu'ils poursuivent activement. Ces derniers sont développés pour la première fois aux États-Unis par HIBBS (1977). Cette théorie prend en compte le fait que les agents économiques et notamment les électeurs opèrent des anticipations adaptatives en ce qui concerne l'inflation. Cependant, cette théorie ne trouve pas de confirmation empirique valable. Une telle situation favorise une approche alternative des cycles politiques partisans prenant en compte le comportement rationnel des agents économiques. Si Hibbs (1977) s'est penché sur le modèle de Nordhaus et a admis l'influence des élections sur les fluctuations économiques, il relève toutefois que les partis de la droite et de la gauche ont différentes positions sur les questions économiques et par conséquent de différents objectifs macro-économiques. En effet, en terme de fonctions objectives ils ont différentes préférences concernant l'inflation et le chômage. Cependant, la théorie partisane de Hibbs trouve une critique empirique originale dans la mesure qu'elle suppose de manière incorrecte que les anticipations sont irrationnelles. Ainsi, si l'on suppose que la politique monétaire est employée pour frapper les objectifs partisans du chômage et de la croissance, l'explication du cycle politico-économique apparaît insuffisante.

    La prise en compte des anticipations rationnelles dans le cycle politico-économique a été l'oeuvre pionnière d'Alesina (1987,1988). Il établit qu'avec les anticipations rationnelles, seules l'inflation de surprise affecte le rendement. Cette théorie rencontre un accord général sur l'existence des effets partisans particulièrement sur l'activité économique. L'évidence empirique en faveur de cette théorie est rapportée par les travaux d'Alesina, Roubini et Cohen (1997) qui rapportent des résultas favorables concernant la croissance du PIB et du chômage sur un échantillon de 18 pays de l'OCDE au cours de la période 1960-1993. Il apparaît en effet que, le taux d'inflation est plus élevé après les élections (pendant quelques trimestres). Ce qui laisse supposer une utilisation avant les élections des instruments de politique économique qui est marquée après par des différences partisanes temporaires entre les gouvernements de gauche et de droite.

    Dans cette optique, Alesina, Robini et Cohen montrent à travers leurs tests empiriques sur un groupe de pays de l'OCDE dont la France, pour la croissance économique et pour le taux de chômage, que la croissance économique est plus significativement élevée avec un gouvernement de gauche qu'avec un gouvernement de droite pendant quelques trimestres après les élections, et que le chômage est significativement plus bas avec un gouvernement de gauche qu'avec un gouvernement de droite, pendant quelques trimestres après les élections, surtout quand il y a changement de majorité. Il est à noter que la validation empirique de la théorie partisane rationnelle faite par ce groupe d'auteurs tient compte de la surprise électorale qui reste inchangée après chaque changement de majorité. De ce point de vue, une étude empirique de la théorie partisane par les auteurs a donné des résultats favorables aux États-Unis, en précisant toutefois que dans ce dernier cas, les auteurs ne considèrent plus le degré de surprise électorale comme constant, mais plutôt comme variable pour chaque élection. Si la justification de l'influence du cycle électoral sur les fluctuations économiques trouve un début d'explication avec la théorie rationnelle dans certains cas, dans d'autres, les résultats des tests empiriques sont défavorables. Ainsi Carlsen et Pederman (1999) ne confirment pas cette théorie aux États-Unis en ce qui concerne la croissance, même en intégrant à la fois le degré de surprise électorale et la différence idéologique (démocrate ou républicain) pendant quelques trimestres après les élections (avec ou sans changement d'administration). Pour Gärtner (1994), les résultats empiriques pour l'inflation, la croissance économique et le chômage sur un échantillon de pays de l'OCDE ne sont pas expliqués par les cycles politiques partisans rationnels (il n'y a pas d'effets partisans permanents sur la politique monétaire mais il y a des effets opportunistes avant les élections).

    L'étude des différentes contributions théoriques sur l'explication des cycles politico-économiques laisse apparaître de toute évidence une influence des élections sur les fluctuations économiques. Tout le débat portant désormais sur la nature de ces derniers. En effet, l'on remarque d'une part que ces cycles se subdivisent en cycles opportunistes (étudiés initialement par Nordhaus (1975) et en cycle partisans (mis en évidence par Hibbs) et, d'autre part, tant pour les cycles opportunistes que les cycles partisans, l'on admet des modèles traditionnels (où les agents économiques forment des anticipations d'inflation adaptatives) et les modèles rationnels (où les mêmes agents économiques forment des anticipations rationnels). Il faut toutefois remarquer que les tests empiriques effectués aussi bien dans les pays de l'OCDE qu'aux Etats-Unis ont tendance à refuter l'existence des modèles traditionnels ou, tout simplement les tests empiriques des modèles traditionnels n'aboutissent pas des résultats favorables.

    Par contre, la justification des cycles politico-économiques intégrant des modèles rationnels découle des tests empiriques aux résultats dans l'ensemble favorables, mais où quelques exceptions subsistent. Ces dernières découlent de l'infirmation ou des résultats défavorables des modèles rationnels en tenant compte de certains spécificités liées aux pays.

    C'est notamment le cas de la France, où bien que le test empirique de la théorie rationnelle partisane donne des résultats favorables en ce qui concerne la croissance et le chômage pour un ensemble de pays de l'OCDE dont la France, la théorie rationnelle partisane ne correspond pas parfaitement à la situation économique de la France. En effet, elle n'est pas validée empiriquement pour l'inflation, même si elle l'est quand on considère un échantillon de pays de l'OCDE (dont fait partie la France). En plus, « cette théorie (théorie partisane rationnelle) ne prend en compte que les effets post-électoraux, alors que les gouvernements peuvent prendre avant les élections des mesures de politique économique pour favoriser leur réélection (l'inflation est plus élevée pendant quelques trimestres après les élections) » (Antoine Auberger, 2004).

    Toutefois que ce soit par opportunisme ou par idéologie, la manipulation des grandeurs macroéconomiques telles que l'inflation, le PIB, le chômage, s'avère complexe pour les gouvernants. En effet, le budget est plus facile à manipuler que ces grandeurs dans la mesure où les gouvernants contrôlent leur budget alors qu'ils espèrent avoir uniquement un impact pour l'économie (Golden et Poterba, 1980 ; Brown et Stein, 1982). C'est ainsi que des auteurs à l'instar de Tufte (1978), Frey et Shneider (1978, 1979) établissent une relation entre les prévisions budgétaires et les échéances électorales, mettant ainsi en lumière les cycles politico budgétaires dans les pays tels que les Etats Unis, l'Angleterre et l'Allemagne.

    Toutes les contributions théoriques relatives au lien entre le budget et les élections laissent apparaître une volonté des décideurs publics de manipuler le budget en fonction qu'on soit en présence ou non d'élections. Tufte (1978) ne s'y trompe d'ailleurs pas lorsqu'il montre qu'aux Etats Unis, le payement de la sécurité sociale augmente dans les années de l'élection, alors que les contributions augmentent après les années de l'élection.

    L'appréhension du lien entre la politique et l'économie a très souvent marqué la littérature économique. Cependant, une orientation des études sur cette liaison dans le sens de l'établissement des cycles politico-économiques a révélé des insuffisances. Ces dernières sont relatives à l'incapacité des décideurs publics à influencer certaines grandeurs macro-économiques à l'instar de la masse monétaire, dont le contrôle dépend de la Banque centrale (Drazen, 2000b). Cet état des faits est également observable au Cameroun où la conduite de certaines politiques économiques est sujette à des rigidités. En effet la politique monétaire est élaborée et conduite par la banque centrale sous régionale BEAC, dont l'indépendance vis à vis du gouvernement ne permet pas aux dirigeants en place (hommes politiques) de manipuler les disponibilités monétaires aux fins électoralistes. Dès lors, le budget apparaît comme l'une des variables sinon la principale qui peut être sujette à une manipulation probable. De plus, « ... augmenter les dépenses juste avant les élections apparaît comme une stratégie beaucoup plus simple et potentiellement profitable, que d'essayer de mettre sur pied, un cycle économique à travers des politiques fiscales et monétaires appropriées » (Blais et Nadeau 1992).

    L'étude des comportements du budget au Cameroun nous pousse à nous interroger sur l'existence d'une relation de causalité entre les échéances électorales et l'évolution du budget au Cameroun. En d'autres termes peut-on étendre l'analyse des cycles politico-budgétaires au cas du Cameroun ? La réponse à cette interrogation favoriserait la compréhension de l'influence ou non des élections sur l'élaboration du budget au Cameroun.

    La rareté des études consacrées aux cycles politico-budgétaires en Afrique et au Cameroun notamment, consacre l'objectif principal de cette étude qui est celui d'étendre l'analyse des cycles politico-budgétaires au Cameroun. Spécifiquement il s'agira :

    Ø De mettre en évidence le cycle politico-budgetaire.

    Ø De dégager les déterminants éventuels du cycle politico-budgetaire au Cameroun.

    Une conduite satisfaisante de notre étude nécessite la prise en compte de deux hypothèses :

    H: les dépenses budgétaires ayant un impact direct sur les électeurs augmentent lors de l'exercice budgétaire correspondant à l'année de l'élection et diminuent l'année d'après.

    H: les recettes fiscales qui également ont un impact sur les électeurs diminuent l'exercice budgétaire correspondant à l'année de l'élection et augmentent l'exercice d'après.

    La traduction des hypothèses en variables mesurables empiriquement nous donne les grandes lignes sur lesquelles la recherche sera axée. Ainsi donc, dans l'optique de mesurer l'action de l'indécision électorale sur le budget au Cameroun, il nous semble nécessaire d'adopter deux approches :

    Ø Une approche statistique où l'on s'attellera à observer et à commenter des variations du budget sous l'influence électorale.

    Ø Une approche économétrique où à l'aide du modèle mis sur pied par BLAIS et NADEAU (1992) nous mettrons en exergue la même relation.

    L'étude que nous présentons ici s'étend sur la période 1970-2002 et enregistre des données relatives au budget de l'Etat Camerounais et aux différentes échéances électorales tenues au cours de cette période. Les données collectées ici l'on été par le biais de la consultation des documents portant des données statistiques sur les recettes et les dépenses budgétaires d'une part et les échéances électorales sur la période 1970-2002 d'autre part. Ces données proviennent aussi bien de la Direction de la statistique et de la comptabilité nationale (DSCN) que des archives de l'Assemblée Nationale. La conduite de l'analyse révèle quelques difficultés qui se traduisent principalement par le déficit de statistiques sur la période 1960-1970, l'absence d'une fonction de popularité pour bien juger le résultat des élections, la non coïncidence entre l'exercice budgétaire et l'année civile et le changement perpétuel des dénominations des ministères et de leurs attributions.

    Notre étude sera présentée à travers deux parties. La première partie intitulée : politique budgétaire et cycle électoral : deux notions indissociables, et la deuxième partie libellée : Analyse du cycle politico-budgetaire au Cameroun.

    PREMIERE PARTIE :

    POLITIQUE BUDGETAIRE ET CYCLE ELECTORAL: DEUX NOTIONS INDISSOCIABLES

    Dans cette première partie, avant de décrire la mise en évidence du cycle politico-budgétaire au Cameroun, il convient que nous évoquions dans un premier temps la politique budgétaire comme fondement du cycle politico-bugétaire.

    CHAPITRE I :

    LA POLITIQUE BUDGETAIRE : FONDEMENT DU CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN

    La justification des cycles politico-économiques amorcée à l'introduction nous a permis d'établir une influence des échéances électorales sur les grandeurs budgétaires dans les pays industrialisés. La confirmation de cette influence dans les pays africains et au Cameroun notamment, nécessite que l'on se penche sur la grandeur économique qui apparaît la plus à même à être manipulable par les gouvernants, en l'occurrence le budget de l'Etat. Parler du budget de l'Etat renvoie nécessairement à la politique budgétaire. Celle-ci s'appuie sur l'élaboration du budget de l'Etat qui n'est autre chose que la prévision de l'ensemble des recettes et dépenses de l'Etat pour l'ensemble de l'année. La politique budgétaire est alors un instrument de politique économique dont l'objet est l'utilisation des dépenses et des recettes publiques pour modifier l'équilibre global de l'économie. En ce sens donc, étant élaborée par le gouvernement, la politique budgétaire peut être sujette à des manipulations aux fins électoralistes.

    Aussi nous parait t-il propice dans le présent chapitre, dans un souci perpétuel d'établir une éventuelle liaison entre les grandeurs budgétaires et l'agenda électoral au Cameroun, d'évoquer avant l'évolution du budget de l'Etat Camerounais, la mise en oeuvre de la politique budgétaire

    I : LA MISE EN OEUVRE DE LA POLITIQUE BUDGETAIRE AU CAMEROUN

    L'examen de la politique budgétaire au Cameroun en tant qu'instrument de la politique économique, voire comme sous-catégorie de politique économique, permet de poser les jalons de l'explication d'une éventuelle influence du calendrier électoral sur les décisions publiques dans ce pays. Ainsi, de par l'importance qu'elle revêt, il nous semble pertinent avant d'évoquer sa mise en oeuvre au Cameroun, de faire un arrêt sur les caractéristiques de la politique budgétaire en général.

    I.1 LA POLITIQUE BUDGETAIRE UN INSTRUMENT SOUMIS A PLUSIEURS CONTRAINTES

    L'évocation de la politique budgétaire se traduit aussi bien par la définition du concept que par les dilemmes qui peuvent entourer sa mise en oeuvre.

    I.1.1 INSTRUMENT DE POLITIQUE ECONOMIQUE OU SOUS CATEGORIE DE POLITIQUE ECONOMIQUE

    Toute politique économique consiste à poursuivre un certain nombre d'objectifs, à l'aide d'instruments. Et à ce titre , les instruments qu'on relève traditionnellement sont la politique budgétaire et la politique monétaire , auxquelles l'on peut ajouter ou associer la politique de revenus( liée à la politique budgétaire ) et la politique de change.

    La politique budgétaire comme tous les autres instruments permet alors d'atteindre des objectifs de politique économique, au quel cas, elle constitue elle-même, une sous-catégorie de politique économique. Silem et Albertini (1992) la définissent d'ailleurs comme « une politique économique conduite au moyen du budget de l'Etat pris globalement, incluant l'action par les recettes et l'action par les dépenses publiques ».

    Toutefois, si l'on admet que la politique budgétaire a toujours existé, il faut reconnaître que c'est avec la publication de « la théorie générale » de Keynes en 1936 qu'elle est consacrée. En effet, la politique budgétaire apparaît dès lors comme le moyen le plus efficace pour résorber le chômage et entretenir une forte croissance. En s'appuyant sur l'élaboration du budget et notamment sur le solde de celui-ci, les décideurs publics peuvent agir sur l'activité économique du pays. Aussi, dans une perspective keynésienne, grâce au multiplicateur d'investissement notamment, un déficit budgétaire peut permettre de relancer l'activité économique grâce au supplément de revenu distribué aux agents économiques. La croissance des revenus qui en résulte va permettre, en retour, d'augmenter les recettes fiscales et de diminuer le déficit budgétaire. Par exemple, une redistribution des revenus par l'intermédiaire du budget au profit des ménages à forte propension à consommer peut permettre un soutien de la demande ou de la consommation. D'un autre côté les économistes favorables à la politique budgétaire estiment que cette dernière peut lutter efficacement contre les tensions inflationnistes. Pour eux l'accroissement du taux d'imposition diminue les revenus d'un montant plus élevé que sa cause et cet effet entraîne à son tour une réduction de la demande. La réduction des dépenses publiques ou leur stagnation nominale diminue la demande réelle de l'Etat puis par effet de multiplication, le revenu des autres agents et enfin leur demande.

    Cependant si la politique budgétaire peut être préconisée, elle reste tout de même soumise à plusieurs contrariétés.

    I.1.2 UN INSTRUMENT SOUMIS À PLUSIEURS ENTRAVES

    La mise en oeuvre de la politique budgétaire se heurte très souvent à bon nombre de difficultés liées aux limites et contraintes qui l'entourent.

    A-LES LIMITES DE LA POLITIQUE BUDGETAIRE

    La politique budgétaire rencontre un certain nombre de limites qui remettent en cause son efficacité dans la conduite de l'activité économique.

    1-Les anticipations des agents économiques

    Si l'on se réfère à la théorie des anticipations rationnelles, les effets de la politique budgétaire ne se réalisent que dans de faibles proportions. Les agents économiques anticipent les effets d'un déficit budgétaire. Que celui-ci soit financé par emprunt (anticipation d'une hausse future des impôts, pour rembourser plus tard) ou par création monétaire (anticipation d'une inflation future), les ménages vont épargner pour faire face aux échéances futures (hausse des impôts, hausse des prix des biens et services). Par ailleurs, toujours selon la théorie des anticipations rationnelles, un budget en équilibre peut être interprété comme une volonté durable de réduire les impôts. Une anticipation de la baisse des impôt conduirait alors les ménages à consommer davantage : une croissance de la demande permettrait ainsi de soutenir l'activité économique. D'où l'inefficacité de l'utilisation du solde budgétaire par les pouvoirs publics.

    2-L'incohérence temporelle des décisions publiques

    Les dernières contributions des prix NOBEL d'économie 2004, Kydland et Prescott viennent corroborer l'idée d'une inefficacité des politiques économiques. L'idée de base de leurs travaux est que les politiques économiques de régulation conjoncturelle sont totalement inefficaces. Et ici, c'est l'incohérence temporelle qui met en cause l'efficacité des décisions publiques. En effet, pour Kydland et Prescott (1977), les agents privés forment des prévisions bien informées des évènements futurs en s'appuyant une connaissance pertinente des rouages de l'économie. Dès lors que l'on considère qu'ils peuvent anticiper le comportement du gouvernement, les actions publiques ne sont pas temporellement cohérentes. Ils peuvent ainsi envisager que le décideur public est porté à enfreindre ses engagements et réviser en conséquence leurs décisions.

    Si cette contribution vient enrichir l'idée de l'inefficacité de la politique budgétaire, les conclusions qui en découlent sont encore plus contraignantes pour la politique économique en général et la politique budgétaire en particulier. Ces auteurs stipulent que du fait de l'incohérence temporelle des décisions publiques, les gouvernements doivent opter pour des règles fixes et explicites en mesure d'assurer la crédibilité et la transparence de leurs décisions et de créer les conditions nécessaires à la stabilité de l'économie. C'est ainsi que les règles de convergence à l'instar d'un déficit budgétaire ne pouvant dépasser le seuil de 3% du PIB, agissent au sein de l'Union Européenne comme une véritable épée de Damoclès pour les gouvernements de la communauté. Ceci a pour conséquence d'encadrer la politique budgétaire et de restreindre encore un peu plus la marge de manoeuvre d'un tel instrument.

    3-Le pouvoir des parlements démocratiques

    Il n'est pas facile d'augmenter les impôts ni de baisser les dépenses tant les parlements exercent aujourd'hui une influence considérable sur le budget. Car une modification des composantes du budget ne peut se faire en régime démocratique parlementaire qu'en réunissant les représentants de la nation. Et quand on connaît la versatilité des parlements dans ce type de régime, la présentation des projets des lois de finances donne souvent lieu à des débats importants au sein des hémicycles de telle sorte que le projet de départ se retrouve sinon rejeté , tout au moins considérablement amendé . Les gouvernants en place se lancent parfois dans la recherche des coalitions lorsqu'ils ne sont pas majoritaires. L'exemple des difficultés de l'actuel gouvernement allemand d'Angela Merkel est patent.

    4-Les délais

    La politique budgétaire exige des délais de mise en oeuvre et risque par conséquent d'être incompatible avec les faits nouveaux ; bien que les lois de finances rectificatives, l'institution d'un fonds d'actions conjoncturel apportent de la souplesse à ce système.

    5-Le principe de cohérence de Timbergen

    D'après la règle de Tinbergen, une politique économique à des objectifs fixés (taux de chômage, taux d'inflation, solde des échanges extérieurs etc.), doit avoir au moins autant d'instruments (taux d'imposition, taux d'intérêt, solde budgétaire etc.) que d'objectifs. Ainsi, chaque instrument doit pouvoir permettre de poursuivre un objectif indépendant. Or, le problème essentiel de toute politique économique réside dans le fait que , d'une part les objectifs ne sont pas toujours indépendants, et d'autre part, que le nombre d'instruments indépendants est insuffisant par rapport au nombre d'objectifs. C'est ainsi que lorsque l'on utilise la politique budgétaire pour influencer l'activité économique, le déficit budgétaire peut agir sur deux objectifs : le chômage et l'inflation. Sur le plan théorique, le principe de cohérence se trouve violé.

    B-LES CONTRAINTES DE LA POLITIQUE BUDGETAIRE

    Elles sont considérables et se déclinent en contraintes internes et contraintes externes.

    1. Les contraintes internes

    Comme nous l'avons évoqué plus haut, les dilemmes de la politique budgétaire découlent de son utilisation comme instrument de politique économique pour atteindre des objectifs. Le dilemme inflation/chômage est l'un des plus célèbres des dilemmes en économie qui a été révélé à la suite des travaux de l'économiste britannique Philips en 1958. En effet, il est établi que toute poursuite de l'un des deux objectifs (inflation ou chômage) se fait au détriment de l'autre. C'est ainsi que le déficit budgétaire en poursuivant le plein-emploi, conduirait à une hausse des salaires sur le marché du travail, et donc à une hausse des prix, pour que se rétablissent les profits de l'entreprise. Même si cette allégation a perdu de sa verve par la suite avec le phénomène de « stagflation » observée dans les années 70, depuis le début des années 90, la liaison inflation-chômage semble correspondre à la logique de Philips. A cela nous ajoutons les contraintes des capacités de production, les contraintes de financement de la protection sociale.

    2- Les contraintes d'ordre externes

    Souvent plus nombreuses et plus fortes que les contraintes internes, du fait de la mondialisation et de l'interdépendance des économies nationales.

    Les politiques de relance de l'activité sont souvent utilisées pour favoriser la croissance économique. Ces politiques visent à assurer un soutien à la consommation et/ou à l'investissement. L'instrument de prédilection est alors la politique budgétaire. Mais ces politiques se heurtent malheureusement à la hausse des importations (équipement), préjudiciable à l'équilibre extérieur. Les effets de la croissance sur l'équilibre extérieur dépendent de l'élasticité des importations par rapport au PIB. De plus si l'activité est restreinte chez les principaux partenaires commerciaux du pays, la croissance de la production nationale aura toutes les difficultés à trouver des débouchés extérieurs.

    En somme, si la politique budgétaire reste un instrument utilisable, il faut dire que son efficacité dépend de la prise en compte de plusieurs contraintes et limites lors de sa mise en oeuvre et notamment au Cameroun.

    I.2 - LA POLITIQUE BUDGETAIRE AU CAMEROUN

    La politique budgétaire s'appuyant sur l'élaboration du budget de l'Etat, il apparaît donc nécessaire dans le cadre de l'examen et de la mise en oeuvre de la politique budgétaire au Cameroun de se pencher aussi bien sur les composantes et les principes du budget de l'Etat que sur les choix publics au Cameroun en matière budgétaire.

    I.2.1- COMPOSANTES ET PRINCIPES BUDGETAIRES AU CAMEROUN
    A- LES COMPOSANTES DU BUDGET DE L'ETAT

    Dans sa définition classique du budget, le décret français du 31 Mai 1862 établit que : « Le budget est un acte par le quel sont prévues et autorisées les recettes et les dépenses annuelles de l'Etat, et les autres services que la loi assujettit aux mêmes règles ». Cette définition du budget est devenue obsolète avec le temps. En effet, l'article 1er de l'ordonnance N° 62-DF-4 du 7 Février 1962 sur le régime financier au Cameroun établit que « le budget de l'Etat prévoit et autorise en la forme législative les charges et les ressources de l'Etat. Il est arrêté par le parlement dans la loi des finances qui traduit les objectifs économiques et financiers du gouvernement ». Cette définition fait apparaître clairement que le budget du Cameroun s'articule au tour de deux composantes : les dépenses et les recettes.

    a- Les recettes publiques

    Il s'agit pour l'essentielle (à plus de 90%) des ressources fiscales et droits douaniers (plus les dividendes des entreprises publiques et les recettes de privatisation des entreprises publiques par exemple)

    Suivant l'article 13 de l'ordonnance de 1962, les recettes du budget comprennent :

    § Les revenus du domaine ;

    § Les rémunérations des services rendus ;

    § Les contributions, subventions ;

    § Les remboursements des prêts et avances ;

    § Les produits des emprunts de l'Etat et les prélèvements exceptionnels ;

    § Les avances et les subventions accordées à l'Etat ;

    § Les prélèvements sur les fonds de réserve ;

    § Les produits divers ;

    § Les fonds de concours ;

    § Les impôts, les contributions et les taxes.

    Il est classique de distinguer les impôts directs et indirects. Les premiers comprennent principalement l'impôt sur les revenus des personnes physiques, l'impôt sur les sociétés et de manière marginale l'impôt de solidarité sur la fortune. Les impôts indirects les plus élevés dans notre pays sont pour l'essentiel les taxes sur la consommation, la première d'entre elles est la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

    b- Les dépenses publiques

    Les dépenses publiques votées par le parlement correspondent aux dépenses dont la reconduction est nécessaire, afin que la gestion des services publiques soit assurée de façon permanente et que les obligations de l'Etat, à l'exemple du paiement des intérêts de la dette publique, puissent être remplies. La classification des dépenses publiques adoptée par la législation camerounaise est la classification économique qui se subdivise en deux : d'un côté les dépenses administratives et les dépenses de transfert et de l'autre les dépenses de fonctionnement et les dépenses d'investissement. Mais pour un souci de bien appréhender l'étude du budget au Cameroun nous nous appuierons sur la classification fonctionnelle du budget car, «  si le budget dans sa présentation officielle évalue les moyens financiers nécessaires à l'accomplissement des tâches de l'Etat, il ne donne pas en revanche d'indication précise sur le résultat de ses interventions .......de plus, la présentation fonctionnelle du budget s'efforce de répondre à cette préoccupation ,puisqu'elle contribue à l'évaluation des coûts liés à la fourniture d'un service ou à l'accomplissement d'une tâche particulière par l'Etat ( à l'exemple de la construction d'une longueur donnée d'autoroute, de la fourniture à chaque élève d'un type d'enseignement déterminé,des actions menées en vue de la prévention et de l'éradication de telle ou telle épidémie frappant la population,etc. » ( Cros ; 1994)

    La conception fonctionnelle ou « performance budget » en Anglais, fait ressortir le coût des services administratifs et de leur rendement. Le budget fonctionnel est utilisé par les pays tels que : Les USA depuis 1947, la Hollande depuis 1952.

    En somme, cette classification fait ressortir :

    1) Les dépenses de fonctionnement qui sont l'ensemble des dépenses nécessaires pour faire fonctionner l'Etat, dont principalement la rémunération des fonctionnaires.

    2) Les dépenses d'intervention qui regroupent l'ensemble des interventions économiques et sociales de l'Etat : versement des revenus, d'aide, de subvention et d'indemnisation aux ménages, entreprises et collectivités territoriales ; mais aussi les dépenses d'investissement civils et militaires.

    3) Le remboursement de la dette publique, qui est la conséquence des déficits budgétaires accumulés par l'Etat sur laquelle nous reviendrons plus bas.

    L'élaboration des dépenses et des recettes publiques doit respecter des contraintes institutionnelles.

    B-LES PRINCIPES BUDGETAIRES

    L'élaboration, l'exécution et le contrôle du budget de l'Etat sont assis sur des principes essentiels qui sont : la périodicité, l'autorisation, la prévision, la loi.

    a- Le budget est un acte de prévision à caractère financier

    Dans le souci de faire face à ses engagements, l'Etat énumère des voies et Moyens pouvant lui permettrent d'atteindre cet objectif. C'est ainsi que le gouvernement élabore un tableau qui retrace l'ensemble des dépenses à effectuer et des recettes à réaliser. BIDIAS (1971) le considère comme « un devis de dépenses nécessaires au fonctionnement de l'administration du pays pendant une période déterminée et une énumération des voies et moyens devant permettre de faire face à ces dépenses». Le budget de l'Etat revêt de ce fait un caractère évaluatif qui le différencie du bilan d'une société où sont répertoriés les éléments positifs et négatifs sous forme d'actif et de passif.

    b- Le budget est un acte d'autorisation à caractère politique

    S'il constitue un acte qui donne l'autorisation d'engager les dépenses et de percevoir des recettes, il s'apparente également à une sorte de délégation limitative accordée aux gouvernements pour effectuer ces dépenses et réaliser ces recettes. Il faut noter en plus que non seulement cet acte d'autorisation est délivré par le parlement (à travers le vote de la loi des finances), mais également et surtout le gouvernement se soumet aux sanctions liées au non-respect du budget. Ces sanctions peuvent être des questions écrites lors du vote du budget, la réduction des crédits.

    c- Le budget est un acte périodique

    L'exercice budgétaire au Cameroun s'étend sur une période d'un an. Il a longtemps chevauché entre deux années s'écartant ainsi de l'année civile et épousant plutôt des raisons politiques (rentrée parlementaire). Jusqu'en 2003, cet exercice allait du 1er juillet de l'année N au 30 Juin de l'année N+1. Mais depuis 2004 il épouse l'année civile c'est-à-dire du 2 Janvier de l'année N au 31 Décembre de l'année N. L'étendue de la période budgétaire est donc annuelle au Cameroun. Autrement dit les recettes et les dépenses de la loi des finances ne sont valables que pour un an. Toutefois, le budget d'une année peut être reconduit l'année suivante si le parlement n'a pas pu voter la loi des finances qui lui est présentée. Le Président dispose alors du droit de reconduire par douxième le budget en cours jusqu'à ce qu'une nouvelle loi des finances soit votée.

    d- Le budget est une loi

    Le socle du budget est la loi des finances qui « n'est pas une loi comme les autres. En effet, tandis que la loi est un acte-régle qui édicte en général des règles impératives, permanentes, applicables pour tous, la loi des finances, elle, est un acte condition, car son existence est indispensable pour déclencher les règles régissant les recettes et les dépenses publiques » BIDIAS (1971).

    En plus de ces quatre caractéristiques, l'on peut ajouter les principes d'une part de l'unité et de l'universalité et d'autre part de l'équilibre.

    e-Le principe de l'unité et de l'universalité

    Pour SEMEDO (2001) ce principe traduit que « le budget doit contenir les recettes et les dépenses de l'Etat dans un seul document ; il ne s'agit pas du solde par opération, mais d'un tracé poste par poste indiquant les recettes et les déboursements ».Ce qui permet d'apprécier l'ordonnancement et saisir d'un coup d'oeil les grandes lignes.

    f-Le principe d'équilibre

    L'équilibre du budget signifie que le montant des dépenses publiques est égal au montant des recettes publiques classiques (impôts notamment). Il traduit le fait qu'en principe il ne devrait exister ni d'excèdent ni de déficit. Et que toute dépense se devait d'être justifiée par des contributions témoignant du souci des individus de consentir à la « levée de l'impôt ».

    A la suite de ces contraintes nous pourront relever d'autres contraintes qui doivent être prisent lors de l'élaboration de la politique budgétaire au Cameroun.

    I.2.2- DES CHOIX PUBLICS FORTEMENT INFLUENCES

    L'examen de la politique budgétaire que nous avons effectué plus haut laisse présager un instrument de politique économique qui reste confronté à certains aléas. Cette réalité au niveau général se retrouve également au Cameroun lorsqu'on vient parler de la mise en oeuvre de la politique budgétaire. En effet, celle-ci reste très influencée par plusieurs facteurs, parmi lesquels la conjoncture économique occupe une place prépondérante.

    A-L'EFFET DE LA CONJONCTURE

    S'il est vrai que la politique budgétaire est un instrument à la portée des décideurs publics dans l'optique d'atteindre les objectifs de politique économique, il faut aussi noter que celle-ci s'accommode au Cameroun des différentes situations économiques.

    L'on peut relever pour bien évoquer les effets de la conjoncture sur les choix publics au Cameroun, trois périodes : une période d'envol de l'économie de 1960 à 1985 ; une période de grande morosité économique de 1986 à la mi-1994 et une période de reprise depuis la mi-1994. A ces trois périodes correspondent également trois types de décisions publiques ou de politique budgétaire.

    1-1970-1985 : U ne politique expansionniste

    1960 marque la prise des rennes du pouvoir par des dirigeants nationaux, suite à l'indépendance du pays. Longtemps cantonnée entre les mains des colonisateurs, l'économie camerounaise est dorénavant aux mains de ses fils.

    Le début de la période est marqué par un patriotisme des gouvernants qui veulent construire le pays et le doter d'infrastructures et d'un système productif de bonne qualité. C'est la période de gros investissements de l'Etat financés en grande partie par les recettes d'exportations des produits de base dont les cours sont très flatteurs. La politique économique menée à cette période s'apparente à une politique de relance de l'activité économique. En effet, au cours de cette période les décideurs politiques soutiennent la croissance de la production, et donc l'emploi, par une politique budgétaire expansionniste. Ceci s'aperçoit par la création de plusieurs entreprises publiques dans les années 1970 et surtout dans le secteur agricole. Au début des années 1980, l'industrie pétrolière va bénéficier du même engagement étatique.

    L'intervention de l'Etat s'effectue par des aides à la consommation, des revenus appréciables et surtout des subventions à l'investissement, dans le cadre du déficit budgétaire. Il en résulte des rentrées fiscales supplémentaires, une baisse des coûts unitaires de production (économies d'échelle) qui réduisent les tensions inflationnistes et permettent de maintenir l'équilibre extérieur.

    De plus, l'embellie pétrolière du début des années 80 permet au Cameroun de faire face à la chute des cours des produits d'exportation qui plonge déjà d'autres économies de la Zone Franc comme la Côte d' Ivoire dans une crise économique

    Les pouvoirs publics ont adopté une politique de stérilisation partielle des recettes dans le souci d'utiliser la manne pétrolière durablement. Cette politique budgétaire apparemment prudente, va s'avérer par la suite insuffisante au regard des années qui suivront le boom pétrolier. Au niveau de la fiscalité, les décideurs publics orientent leurs efforts sur la fiscalité pétrolière au détriment des autres types d'impôts.

    2-De 1985 à la mi- 1994 : Une politique de rigueur

    1985 marque le début de l'effondrement de l'économie Camerounaise. La crise économique qui s'en suit trouve son origine dans un premier temps dans des facteurs externes. La crise économique a fait son apparition avec la baisse des cours des produits d'exportations entre 1985 et 1988, combinée à la dépréciation du dollar américain, monnaie en laquelle étaient valorisées les exportations. Ce qui entraîne une chute conséquente des recettes de l'Etat à partir de 1989. En revanche, le développement de la crise est dû très largement à des facteurs internes que les possibilités offertes par la manne pétrolière masquaient.

    La prise de conscience de cet état de crise par l'ensemble des classes de la société n'apparaît réellement qu'à la fin 1993, lorsque la baisse cumulée des salaires de la fonction publique atteint près de 70. Ainsi, ce choc externe de grande ampleur, relayé par un ajustement des finances publiques douloureux et tardif, révèle les bases fragiles d'une politique budgétaire tournée plus vers la captation des rentes que vers le développement diversifié de son secteur productif. La gestion de la nouvelle source de revenus que constituait la rente pétrolière a renforcé le poids de l'action discrétionnaire des pouvoirs publics sur l'économie ; « une économie où la redistribution de la rente pétrolière jouait un rôle central mais excessif » (Aerts, Cogneau, Herrera, De Monchy, Roubaud ; 2000). Les pouvoirs publics n'ont qu'une marge de manoeuvre limitée face à ce choc externe. Ils décident un allègement de la fiscalité sur le pétrole dans l'espoir de relancer la production. La seule solution possible pour équilibrer son budget est de réduire ses dépenses, avec des conséquences plutôt négatives sur la croissance économique du pays, et d'augmenter son endettement.

    La réduction des salaires de la fonction publique en 1993, a été fortement critiquée car en terme d'efficacité « il aurait mieux valu réduire le nombre d'agents plutôt que de baisser arbitrairement leurs salaires. Mais dans le contexte politique de l'époque, il était difficile d'appliquer une telle mesure, le gouvernement étant politiquement fragile et fortement contesté pour sa gestion passée. » (Dubois, 1997).

    Enfin il faut noter que c'est à cette période que le Cameroun entre dans le cycle de réformes économiques menées sous l'égide des bailleurs de fonds et notamment le FMI et la Banque Mondiale, réformes dans lesquelles se trouve encore actuellement le pays.

    3-Depuis la mi-1994 : Une politique de relance

    L'annonce de la dévaluation du FCFA a créé une onde de choc sur l'ensemble de la population, entraînant une prise de conscience plus forte de la réalité de la crise économique. Les résultats macroéconomiques se sont peu à peu améliorés. On assiste à une augmentation des recettes fiscales, une hausse des importations et une relative stabilité des prix.

    Depuis 1994, on assiste à une discipline en matière de finances publiques. Les déficits sont de plus en plus maîtrisés du fait non seulement de meilleurs choix en matière de collecte de l'impôt, mais également au niveau de l'affectation des ressources. L'on observe une reprise de l'investissement, un abandon progressif par l'Etat du système productif au profit du privé et un service de la dette tant intérieure qu'extérieure, plus régulier .Toutefois Le problème de la reprise de la croissance sur le long terme et de ses retombées en termes sociaux reste entier. La charge fiscale demeure forte sur les entreprises, de même que l'endettement national. Si bien que « toute nouvelle chute des cours sur les marchés mondiaux ou l'apparition des troubles sociaux ou politiques graves peuvent remettre en cause à tout moment, le fragile équilibre actuel et mettre à nouveau le pays hors du cadre macroéconomique actuel défini avec les bailleurs de fonds » (Dubois, 1997). D'où une menace plausible sur le point d'achèvement de l'initiative PPTE en cours.

    Il découle de tout ce qui précède que la mise en oeuvre de la politique budgétaire au Cameroun reste influencée par la conjoncture économique. Mais d'autres facteurs peuvent aussi être relevé.

    B--LES AUTRES FACTEURS

    Parmi les autres facteurs qui influencent la mise en oeuvre de la politique budgétaire l'on peut relever aussi bien l'importance de l'opinion publique , la présence des bailleurs de fonds accrus par le poids devenu insoutenable de la dette.

    1-L'effet d'éviction du service de la dette extérieure

    L'un des facteurs qui influencent fortement la mise en oeuvre de la politique budgétaire au Cameroun est l'encours de la dette extérieure et, partant, son service. Il convient de rappeler ici que suite au retournement de la conjoncture économique au milieu des années 80, les finances publiques laissent apparaître un déficit budgétaire chronique. Le financement du déficit primaire est alors assuré pour l'essentiel, par un recours au financement extérieur. Ceci a pour conséquence, à partir de 86/87, un gonflement durable des tirages sur l'extérieure et un accroissement très sensible du service de la dette. La situation n'a d'ailleurs guère changé avec une dette extérieure estimée à 8,5 milliards de dollars en 2002.

    La charge de la dette absorbe une part disproportionnée des recettes publiques, freinant l'investissement public, empêchant la relance de la demande intérieure, et risquant au moindre problème social, ou politique, de contraindre le pays à quitter de nouveau le cadre d'équilibre macro-économique négocié avec les bailleurs de fonds. Le gouvernement ne possède alors qu'une très étroite marge de manoeuvre pour mener à bien les réformes nécessaires. Le service de la dette a ainsi influencé sur la croissance (croissance négative sur plusieurs années), en évinçant les investissements privés et en modifiant la composition des dépenses publiques. Dès lors le lourd service de la dette extérieure a occasionné l'accroissement de la facture des intérêts et du déficit budgétaire de l'Etat, de même que l'on a assisté à une réduction de l'épargne publique. Une telle situation a conduit les gouvernements successifs à négocier des allègements de la dette contre l'application des réformes économiques contenus dans les programmes d'ajustement structurels , renforçant ainsi le pouvoir et l'influence des bailleurs de fonds sur l'élaboration des politiques économiques au cameroun.

    2-Des bailleurs de fonds plus présents

    Parler de l'influence des bailleurs de fonds dans la mise en oeuvre des politiques économiques et de la politique budgétaire au Cameroun, c'est reconnaître que celle-ci intervient à la suite de la crise d'endettement dans laquelle vit le pays. Aussi bien les bailleurs de fonds multilatéraux que bilatéraux, leur intervention croissante effective ou apparente dans la gestion publique découle de l'insoutenabilité de la dette publique extérieure. Il faut cependant noter que, et contrairement à bon nombre de pays africains, ce n'est qu'en 1988 que le Cameroun se voit appliqué les premiers programmes d'ajustement structurels énoncés par le FMI et la Banque Mondiale. Le pays signe alors un protocole d'accords de réformes macroéconomiques, marqués notamment par le respect des différents équilibres monétaires et financiers. Il est demandé au pays de procéder notamment à une meilleure discipline budgétaire marquée par une restructuration de ses dépenses et de ses recettes. Rappelons nous que lors de la période faste (1980-mi-1986), les principales recettes de l'Etat étaient assises sur des variables instables comme le prix du baril de pétrole et le taux de change du Fcfa. Aussi, les dépenses à l'instar de la masse salariale étant, par nature , une variable peu flexible à la baisse, son développement aurait dû être conçu à long terme, et donc en fonction des potentialités de croissance en volume . C'est à dire en adoptant un comportement plus prudent pour un pays soumis à des fluctuations des termes de l'échange qu'il ne peut maîtriser.

    a-La prépondérance des institutions de Bretton Woods

    Le laxisme dans la gestion publique va coûter très cher au pays lorsque celui-ci entre dans le cycle de reformes, surtout en termes de souveraineté des décisions budgétaires. Même l'Aide Publique au Développement est conditionnée par l'application de ces réformes. C'est ainsi que si la convention de Lomé IV ne fait pas explicitement référence, dans son texte, aux institutions de Bretton-Woods, elle insiste cependant sur le fait qu'un accord sur le programme de réformes envisagé doit préexister avec les principaux bailleurs de fonds multilatéraux pour que l'éligibilité soit automatique. Ces institutions sont, en effet considérés comme les plus compétentes en matière d'analyse macro-économique, notamment monétaire et financière , de mise à jour des rigidités structurelles des différents secteurs de l'économie, et d'évaluation des capacités de financement nationales. Alors que le FMI met surtout l'accent sur l'équilibre des agrégats monétaires et financiers, et sur le contrôle de la demande globale, la Banque Mondiale insiste davantage sur la restructuration des appareils productifs et administratifs, sur la formation d'un capital national, physique, social et humain et sur le renforcement de l'offre globale. Ces deux institutions jouent de facto un rôle de leader incontestable dans ces domaines, ce qui leur permet de débattre dans un dialogue permanent avec les gouvernements successifs camerounais, des orientations de la politique économique qui sont reprises dans des documents officiels.

    b. Des bailleurs de fonds bilatéraux solidaires des prescriptions du FMI et de la Banque mondiale.

    Les autres bailleurs de fonds ont souvent la responsabilité d'animation des secteurs particuliers. Ainsi par exemple, l'Union Européenne assure le leadership dans le domaine des infrastructures, la France dans ceux de l'éducation en français et de la restructuration de l'administration économique et financière, la Belgique et l'Allemagne dans la santé etc. ces interventions sectorielles s'intègrent dans le cadre macro-économique défini par les négociations entre les institutions de Bretton-Woods et le gouvernement camerounais.

    S'il est indéniable que les réformes structurelles sont indispensables au Cameroun, plusieurs voix s'élèvent toutefois pour fustiger les mesures de ces institutions. En effet ces dernières ont tendance à considérer le développement comme le résultat d'une combinaison de techniques particulières issues des concepts et de démonstrations de la science économique et validées par des résultats des applications empiriques qui s'en déduisent. Plus généralement, les considérations sociales ou politiques qui reflètent les objectifs de cohésion sociale et d'internalisation des procédures économiques, sont souvent considérés comme secondaires par rapport à la recherche d'un sentier de croissance optimal, basé sur le respect des équilibres monétaire et financier et à la nécessité d'un taux de croissance élevé du PNB. Toutefois, la récente prise en compte des aspects de bonne gouvernance, de formation du capital humain, de préservation du capital social et de lutte contre la pauvreté permet d'infléchir cette vision dans un sens plus holistique.

    3. L'interdépendance des économies nationales dans le cadre de la
    Zone CEMAC

    Tout comme pour le cas des programmes d'ajustement structurels et autres initiatives PPTE, l'appartenance du Cameroun à un ensemble économique et surtout monétaire qu'est la zone franc, restreint l'autonomie du pays en matière d'élaboration de la politique budgétaire. D'après l'un des critères de surveillance multilatérale le déficit budgétaire ne pouvant pas excéder les 3% du PIB dans la Zone CEMAC, ceci ne permet pas au Cameroun d'utiliser facilement un solde budgétaire déficitaire comme un instrument de politique économique. pourtant dans une perspective Keynésienne (rôle du multiplicateur d'investissement) un déficit budgétaire peut permettre de relancer l'activité économique grâce au supplément de revenu distribué aux agents économiques. La croissance des revenus qui résulte va permettre en retour, d'augmenter les recettes fiscales et de diminuer le déficit budgétaire.

    Tout ceci laisse donc entrevoir une possible influence de la politique sur les grandeurs budgétaires.

    Il ressort de l'examen de la mise en oeuvre de la politique budgétaire au Cameroun que celle-ci demeure comme dans les autres pays un instrument de politique économique soumis à plusieurs contraintes. Ces contraintes au Cameroun si elles découlent de la conjoncture qui prévaut elles laissent paraître une possible influence de la politique. Cet impact de la politique sur les grandeurs budgétaires peut trouver un début d'explication à travers l'examen de l'évolution des variables budgétaires au Cameroun.

    II : EVOLUTION DU BUDGET DE L'ETAT AU CAMEROUN

    La description faite du budget de l'Etat dans la première section à travers tous les éléments qui le caractérisent a posé les jalons d'une étude de ce budget en terme d'évolution. Car en effet, s'il est un acte annuel, il intègre également les différents éléments de la conjoncture économique qui prévaut au moment de son élaboration. Aussi, le volume de dépenses publiques peut être différent selon qu'on se trouve en période de croissance soutenue ou de récession. Ainsi, il s'agit au niveau de cette section d'essayer de présenter le comportement du budget de l'Etat au Cameroun à la lumière des différentes situations économiques qu'a connu le pays depuis son accession à l'indépendance. Ceci se fera alors d'une part, à travers les recettes et d'autres part, du point de vu des dépenses publiques.

    II.1-EVOLUTION DES DEPENSES PUBLIQUES

    Les dépenses constituent comme nous l'avons vu, l'ensemble des engagements que se donne le gouvernement au cours d'une année. Aussi, il s'agit ici d'observer cette évolution des dépenses publiques au Cameroun sous deux aspects : Une évolution en taux de croissance et une évolution en niveau.

    II.1.1-EVOLUTION EN NIVEAU DES DEPENSES PUBLIQUES

    Il s'agit ici d'observer l'évolution en termes de quantité des dépenses totales, des dépenses de fonctionnement et des dépenses d'investissement. Le graphique 1 ci-dessous illustre l'évolution de 3 types ces dépenses.

    Graphique 1 : Evolution en niveau des dépenses Totales, d'investissement et de fonctionnement

    Source : Construit par l'auteur à partir des données de la DSCN

    a- Dépenses Totales

    L'observation de la courbe des dépenses totales laisse entrevoir 3 phases :

    La première phase traduit un accroissement des dépenses totales de l'exercice 70/71 jusqu'à l'exercice 86/87 atteignant de ce fait 800 milliards de Frs CFA.

    La deuxième phase traduit une diminution modérée de ces dépenses jusqu'en 94/95.

    A partir de 95/96, survient une reprise de l'accroissement jusqu'en 2002. L'on peut toutefois noter un léger répit à l'exercice 98/99.

    b- Dépenses de fonctionnement

    La courbe des dépenses de fonctionnement connaît une évolution identique de la courbe des dépenses totales, dans la première phase de celle-ci après le pic de 86/87, 460 Millions, on observe plutôt de légères fluctuations jusqu'en 97/98. Exercice à partir du quel les dépenses s'accroissent.

    c- Dépenses d'Investissements

    L'observation des dépenses d'investissement traduit une évolution similaire à celle des dépenses de fonctionnement dans leur première phase. Ensuite l'on observe des fluctuations légères les exercices suivants. Tout en remarquant que ces dépenses d'investissement n'ont plus pu atteindre jusqu'en 2002 leur niveau le plus élevé de l'exercice 86/87 qui était de 340 millions

    II.1.2- EVOLUTION EN TAUX DE CROISSANCE DES DEPENSES PUBLIQUES

    Les taux de croissance nous permettent de mesurer l'ampleur de l'évolution des dépenses publiques. Les graphiques ci-dessous en font illustration.

    a- Les Dépenses Totales

    Graphique 2 : Evolution en taux de croissance des dépenses totales

    Source : Construit par l'auteur à partir des données de la DSCN

    Une vue d'ensemble du graphique 2 ci-dessus laisse apparaître des fluctuations du taux de croissance des dépenses totales que l'on peut subdiviser en trois phases :

    - Une première phase de fluctuations positives et modérées qui va de l'exercice 70/71 jusqu'à l'exercice 86/87 avec un maximum de 0,3 % en 72/73 et un minimum de moins de (+ 0,07 %) en 77/78. Ce qui nous donne un écart de plus de + 0,2 % entre le taux de croissance le plus élevé et le taux de croissance le plus bas des dépenses totales.

    - Une seconde phase de fluctuations négatives et modérées qui va de 87/88 à 92/93 avec un minimum de plus de (- 0,2 %) et un maximum de 0. Il faut toutefois relever à ce niveau une période de stabilité de ce taux de croissance qui avoisine les 0 % les exercices 91/92 à 94/95.

    - Une troisième et dernière phase qui va de 94/95 à l'exercice 2001/2002 où les taux fluctuent positivement avec un minimum qui avoisine 0 % en 98/99 et un maximum de + 0,4 % en 96/97.

    b- Les Dépenses de fonctionnement

    Graphique 3 : Evolution en taux de croissance des dépenses de fonctionnement

    Source : Construit par l'auteur à partir des données de la DSCN

    L'observation du graphique 3 laisse apparaître des fluctuations du taux de croissance des dépenses de fonctionnement que l'on peut subdiviser en trois phases :

    - Une phase de fluctuations positives d'une amplitude assez faibles +0,2 % de l'exercice 70/71 à 86/87 avec un maximum de plus de + 0,3 % et un minimum de moins de + 0,1 % en 86/87.

    - Une seconde phase de fluctuations à la fois négatives et positives d'une grande amplitude mais relativement constante avec un maximum d' un peu plus de + 0,1 % en 90/91 et un minimum de moins de - 0,1 % en 92/93.

    - Une troisième et dernière phase de fluctuations positives du taux de croissance allant de l'exercice 96/97 à l'exercice 2001/2002.

    c- Les Dépenses d'Investissement

    Graphique 4: Evolution en taux de croissance des dépenses d'investissement

    Source : Construit par l'auteur à partir des données de la DSCN

    On observe également une fluctuation du taux de croissance des dépenses d'investissement.

    Cependant, l'on peut remarquer deux types de fluctuations laissant entrevoir deux phases principales :

    - Une première phase de fluctuations positives et modérées de 70/71 jusqu'en 86/87 avec un maximum de près de (+ 0,5%) et un minimum en 74/75 de près de (+ 0,1%) en 79/80

    - Une seconde phase de fluctuations positives et négatives d'une amplitude forte (+0,8%) avec un maximum de près de (+ 0,4%) en 95/96 et un minimum de près de moins (-0,4%) en 2000/201 cette période de 86/87 à 2001/02.

    En somme, l'évolution des dépenses budgétaires tant à niveau qu'en taux de croissance que nous venons de faire laisse apparaître : Pour les dépenses totales, une phase d'expansion suivie d'une phase de récession et d'une phase de reprise. Les dépenses de fonctionnement et d'investissement quant à elles ne laissent pas apparaître aussi clairement cette subdivision.

    En effet, les dépenses de fonctionnement si elles ont connu une phase d'expansion jusqu'au milieu des années 1986/ 1987 ont plutôt connu ensuite une petite phase de stabilité de 87 à 97 et une reprise à partir de 98, cette dernière se traduisant par une augmentation du niveau de ces dépenses dépassant leur niveau le plus élevé atteint dans le passé. Les dépenses d'investissement à l'inverse ont connu une phase d'expansion jusqu'en 87 suivie d'une diminution et augmentation alternative jusqu'en 2002 ; mais jamais n'ont pu atteindre leur niveau élevé de 1986/87. Cette évolution des dépenses budgétaires peut traduire dans une certaine mesure l'évolution de la situation économique au Cameroun entre 1970/2002. En effet, le Cameroun au contraire de nombreux pays d'Afrique subsaharienne a longtemps été considéré comme un modèle de prospérité économique. Dans les années 1970, bien que très dépendant de la production de produits primaires, dynamisme repose un tissu économique diversifié et une main d'oeuvre relativement bien adapté à ses besoins.

    Au début des années 1980 voire dès la fin de la décennie précédente alors que la plupart des pays voisins entrent en phase d'ajustement, le Cameroun connaît une prospérité forte et rapide qui s'interrompt brutalement au milieu de la décennie.

    -De 1970 à 1986, la croissance du Cameroun s'accélère en termes réels : le PIB par tête double tandis que la consommation des ménages par habitant est multipliée par 1,5. Au cours de cette envolée on distingue 3 sous périodes. De 1970 à 1977, la croissance atteint un rythme moyen annuel d'environ 4%, permettant une lente amélioration du PIB par tête.

    -De 1977 à 1981, la croissance s'accélère (+13% en moyenne) à la suite de la découverte du pétrole et de sa mise en exploitation. De 1982 à 1985, la croissance se maintient à un rythme soutenu (autour de 8%)

    - Au cours de la période de 1970-1985, la structure des dépenses de l'Etat, apprécie en part du PIB évolue de la façon suivante :

    - Stabilité des poids des salaires aux alentours de 5,4% ;

    - Forte montée de l'investissement qui passe de 5% à 10,7% de 80 à 85;

    - Poussée des dépenses en matériel jusqu'en 1983, où elles représentent un niveau voisin de la masse salariale, suivie d'un reflux jusqu'en 1985 où leur part revient à un niveau voisin 1980 ;

    - Les subventions accompagnent la croissance et se maintiennent aux alentours de 1,5% du PIB ;

    - Le poids des intérêts reste faible signe d'un développement de la croissance de l'Etat largement autofinancée.

    A la fin de l'année 1985, sans être parfaite, la situation du Cameroun est relativement favorable. Les perspectives de croissance sont correctes et, grâce aux recettes pétrolières, le pays dispose d'une bonne marge de manoeuvre. Deux ans plus tard, tout s'effondre prenant de cours l'administration camerounaise. L'origine de cette crise est à observer dans les facteurs externes : réajustement à la baisse du prix de pétrole et des autres matières premières, en particulier le café, le cacao, le coton, mais aussi la modification et la parité du dollar en francs CFA. En revanche, son développement rapide est dû très largement à des facteurs internes que les possibilités offertes par la manne pétrolière masquaient, le retard pris par l'Etat dans l'ajustement de ses dépenses, puis de la masse salariale dans les années qui suivent. L'exécution de l'exercice budgétaire 1986/87 fait apparaître une hausse sensible des dépenses de l'Etat (+ 61 milliards de Frs CFA par rapport à 1985/86, dont + 26 Milliards de masse salariale et + 20 Milliards du matériel). Les années 85/86 et 86/87 sont marquées par une croissance soutenue des dépenses + 18% : des dépenses de fonctionnement (dont 14% de hausse de masse salariale).

    Le retard pris à ajuster les dépenses, en particulier des dépenses d'investissement financées pour l'essentiel par des ressources pétrolières, est sans contester à l'origine de la crise. En 1987/88, les autorités mettent en place de façon autonome, un programme qui conduit à une réduction de 40% de dépenses d'investissement. Sous l'impulsion du FMI et de la BM, cette contraction des dépenses se poursuit en 1988/89 et 89/90 : l'investissement se réduit encore de 15% par rapport à 87/88. Ce programme atteint aussi les dépenses de matériel et les subventions, mais la masse salariale continue à croître jusqu'en 1991/92. Ce n'est qu'en janvier 1993 que les mesures fortement restrictives permettent de réduire ce poste de manière significative. Il en résulte une succession de déficits du solde primaire dont le montant cumulé atteint près de 500 milliards à la fin de l'exercice budgétaire. Malgré les efforts d'ajustement réel, la compétitivité globale de l'économie apparaît comme fortement dégradée et seul un ajustement monétaire peut permettre de corriger une telle différence de prix.

    En doublant la valeur en monnaie nationale des exportations pétrolières et en accroissant les recettes fiscales indirectes, la dévaluation doit également conduire à un rétablissement moins douloureux du déficit primaire de l'Etat. L'ajustement des dépenses se maintient les années suivantes, la stabilité des taux de salaire moyen des fonctionnaires occasionne de nouvelles pertes de pouvoir d'achat après les fortes baissent de 1993. Un programme de réduction de réduction des effectifs (POE) est mis en place. Le nombre de fonctionnaire se réduit de 10% entre 1993 et 1997, 1994 et 1995 voient une reprise notable des exportations non pétrolières et de l'investissement privé, dopé par les retours de capitaux et l'apurement des arriérés de paiement intérieur de l'Etat. Cette amélioration de la situation économique des dépenses se poursuit jusqu'en 2002.

    Le budget de l'Etat étant par principe équilibré, l'examen de l'évolution des dépenses publiques implique naturellement un examen similaire des recettes publiques.

    II.2- EVOLUTION DES RECETTES PUBLIQUES

    Tout comme pour les dépenses publiques nous ferons ici une évolution en niveau et une évolution en taux de croissance des recettes budgétaires.

    II.2.1- EVOLUTION EN NIVEAU DES RECETTES BUGETAIRES

    Graphique 5 : Evolution en niveau des taux des recettes publiques

    Source : Construit par l'auteur à partir des données de la DSCN

    L'on peut remarquer en observant le graphique ci-dessus que l'évolution des recettes budgétaires est similaire à celle des dépenses budgétaires. Cette similarité dans l'évolution des deux grandeurs budgétaires peut être expliquée par le principe d'équilibre budgétaire qui sous-tend la préparation du budget. En effet si les principales recettes (impôts et droit douanier) ne peuvent financer toutes les dépenses prévues dans le budget, le gouvernement peut équilibrer le budget en procédant aux emprunts qu'il devra ensuite rembourser.

    Aussi peut-on observer une évolution en trois phases :

    - Une première phase allant de l'exercice 70/71à 86/87marquée par une augmentation modérée des recettes budgétaires.

    - Une seconde phase allant de l'exercice 88/89 jusqu'en 94/95 marquée par une diminution et une stagnation des recettes budgétaires.

    Une troisième et dernière phase allant de 95/96 jusqu'en 2001/2202 marquée par une reprise de l'accroissement des recettes budgétaires. A une telle évolution de ces recettes correspond des taux de croissance.

    II.2.2- EVOLUTION EN TAUX DE CROISSANCE DES RECETTES BUDGETAIRES

    Graphique 6 : Evolution en taux de croissance des recettes budgétaires

    Source : Construit par l'auteur à partir des données de la DSCN

    Tout comme les quantités, les taux de croissance évoluent en trois phases. Cependant, à ce niveau on observe des phases de fluctuations.

    - La première phase correspond à des fluctuations positives et modérées de l'exercice 70/71 jusqu'à l'exercice86/87

    - La seconde phase établit des fluctuations négatives revenant tout au plus à un niveau avoisinant 0. Le minimum se situant à plus de (-0.2%.

    - La troisième et dernière phase établit des fluctuations positives. Le taux de croissance maximum à ce niveau se fixant à près de 0,4% entre 97/98 et 98/99.

    En somme, les recettes budgétaires ont une évaluation tant en niveau qu'en croissance qui s'apparente à l'évolution des dépenses publiques. Et tout comme ces dépenses, les recettes obéissent à l'évolution de la conjoncture dans le pays de 1970 à 2002. En effet, la hausse de la part de l'impôt sur les revenus et les profits dans le PIB reflète la hausse des revenus tirés du pétrole par l'Etat, à travers la redevance SNH (Société Nationale d'Hydrocarbure) et la fiscalité sur les compagnies pétrolières.

    - De 1980 à 1985, la hausse de la part de cette catégorie d'impôt dans le PIB (de 8 à 12%) et, partant de l'ensemble des recettes de l'Etat est considérée avec celle de la part des impôts directs dans les exportations de pétrole (40 à 70 %).

    - Avant les années 1985 à 1993, la forte réduction des recettes pétrolières est à l'origine du déséquilibre des finances publiques au Cameroun. Entre 1985/86 et 1992/93, les recettes de l'Etat diminuent de moitié passant de 877 à 431 milliards de FCFA. En pourcentage du PIB. Les recettes budgétaires baissent de 21 % à 16 % de 1985 à 1987 aux années 1988 - 90 pour remonter de près d'un point en fin de période.

    - A partir des années 1994, le rebond des prix du pétrole (+ 10 % puis + 6 %) permet une stabilisation des recettes pétrolières à l'exportation. Les recettes agricoles et la baisse du taux d'épargne (gains de richesse) permettent une hausse importante de la consommation des ménages. Pour provoquer une amélioration du taux de pression fiscale ; plusieurs facteurs se combinent : un rétablissement des taux de recouvrement des impôts sur la production intérieure et sur les importations, l'augmentation du prélèvement pétrolier, la forte augmentation des taux de TVA liée à la réforme fiscalo-douanière, et enfin la mise en place d'un droit unique de sortie sur les exportations agricoles. La hausse des recettes et la poursuite de l'ajustement des dépenses débouchent sur un rétablissement spectaculaire du déficit public, qui atteint - 2.8 % du PIB en 95/96, et même - 1,1 % en 96/97 selon les estimations.

    Au terme de ce chapitre, l'on peut commencer à comprendre pourquoi la politique budgétaire est un élément fondamental dans l'analyse des cycles politico-budgétaires. En effet, pour mener à bien les décisions publiques que les dirigeants politiques prennent, un instrument de politique économique est à leur disposition : Il s'agit de la politique budgétaire. Bien que celle-ci garde son caractère d'instrument de politique économique, il ne demeure pas moins qu'elle constitue également une sous-catégorie de politique économique, dans le sens où la manipulation des éléments comme le solde budgétaire peut permettre d'atteindre des objectifs de politique économique tels que la croissance ou le plein-emploi. Cependant, il faut noter que comme tout instrument de politique économique, la politique budgétaire est soumise à des rigidités qui réduisent sa marge de manoeuvre. Au rang de ces dernières l'on peut citer les anticipations des agents économiques, l'incohérence temporelle, qui remettent en cause l'efficacité de l'utilisation d'un tel instrument. D'un autre côté, elle fait l'objet de quelques dilemmes à l'instar de l'arbitrage entre le chômage et l'inflation, ou entre la croissance et l'équilibre du solde extérieur.

    Toutes ces caractéristiques, du moins une grande partie de celle-ci peuvent être applicables à la façon dont la politique budgétaire est mise en oeuvre au cameroun. La politique budgétaire au Cameroun est très influencée par la conjoncture mais également par d'autres facteurs tels que la dette (qui favorise l'omniprésence des bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux), l'interdépendance des économies de la zone CEMAC et une opinion publique de plus en plus intéressée par le débat politique.

    Si tous ces facteurs conditionnent la mise en oeuvre de la politique budgétaire au Cameroun, notre souci ici est d'analyser le comportement des dirigeants camerounais en matière budgétaire à la lumière de réaction de l'opinion publique dans le cadre des échéances électorales, ceci afin de mettre en évidence le cycle politico-budgétaire au Cameroun.

    CHAPITRE II :

    LA MISE EN EVIDENCE DU CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN

    L'examen de la littérature sur les cycles politico-économiques que nous avons fait à l'introduction montre que les connaissances sur les interactions entre la politique et l'économie dans les pays développés se sont beaucoup accrues. En effet, depuis 25 ans, un ensemble de travaux portant sur les réactions politiques aux indicateurs économiques, les fonctions de la popularité, et les modèles politico-économiques ont sans cesse posé les bases de la justification de l'existence des cycles politico-économiques dans les pays occidentaux.

    En revanche, du point de vue des pays en développement en général, et ceux d'Afrique en particulier, on dispose de très peu d'études alors que « les faits montrent que les interactions entre la politique et l'économie y sont décisives ». (Morisson, Lafay, Dessus ; 1993). Plusieurs raisons peuvent justifier cet état des choses : l'instabilité politique constante qui fait de l'Afrique « la région par excellence des coups d'Etat » (JOHNSON, SLATER et MC Govan ; 1984 ; Okane, (1981). Par ailleurs, le cadre institutionnel qui se décrit à travers les régimes autocratiques ou quasi-autocratiques donne lieu à une fréquence très faible des échéances électorales et même très souvent à des cas où, celles-ci ont lieu dans des conditions éloignées des scrutins libres et équitables rencontrés dans les pays développés rompus à la démocratie (Morisson, Dessus, Lafay ; 1993). Qu'à cela ne tienne, l'intérêt pour l'analyse des interactions entre la politique et l'économie dans les pays africains semble s'être ravivé au cours de ces dernières années en raison de la crise économique qui frappe durement le continent depuis le début des années 1980 (Fouda,1997).

    Dans l'optique de mettre en exergue l'influence de la politique sur l'économie à travers les comportements qu'adoptent les politiciens au Cameroun, il nous paraît propice de décrire les observations qui laissent entrevoir l'existence du cycle politico-économique dans ce pays. Aussi nous paraît-il important avant d'effectuer une analyse statistique des donnés budgétaires à la lumière de l'agenda électoral de revenir sur le cycle électoral et la nature des choix publics au Cameroun.

    I : DU CYCLE ELECTORAL ET DES CHOIX PUBLICS AU CAMEROUN

    La confirmation de l'influence électorale sur les données économiques constatées dans les pays industrialisés reste timide dans les pays en développement du fait de la rareté des études y relatives. Toutefois, l'observation de la vie économique dans ces derniers pays laisse entrevoir cette interaction entre la politique et l'économie. L'Afrique Sub-Saharienne en général et le Cameroun en particulier ne dérogent pas à cet état des faits. Aussi, nous semble t-il propice avant d'évoquer la nature des choix publics au Cameroun de s'arrêter tout d'abord sur le cycle électoral.

    I .1- DU CYCLE ELECTORAL AU CAMEROUN

    Depuis son accession à l'indépendance, le 1er janvier 1960, le Cameroun a connu plusieurs élections et consultations. Entre 1960 et 2002, l'on a assisté à bon nombre d'échéances :

    · 9 élections présidentielles ;

    · 10 élections législatives ;

    · 5 élections municipales.

    Avant la révision de la constitution de 1972 par L'Assemblée Nationale dans le cadre du vote de la loi N° 96-06, du 18 Janvier 1996, le cycle électoral camerounais obéissait à une périodicité de 5 ans pour toutes les élections (présidentielles, Législatives ou Municipales). La nouvelle constitution prévoit un renouvellement des mandats des élus pour une durée de 5 ans pour les législatives et les Municipales. Le président de la république quant à lui est élu pour un mandat de 7 ans renouvelable une fois.

    On relève dans l'histoire des élections au Cameroun deux référendums. En octobre 1961 et en Mai 1972. Le référendum d'octobre 1961 interpellait les populations du Nord Cameroun et des provinces anglophones sur leur désir d'être rattachées au Cameroun francophone ou au Nigeria voisin. Cette consultation a conduit à un rattachement des parties du Nord Cameroun au Nigeria et de l'adhésion des deux provinces anglophones au Cameroun, aboutissant à la République Fédérale du Cameroun composée d'une part de la partie Anglophone et d'autre part de la partie Francophone. En mai 1972, dans un souci de pacification et réunification, l'ensemble des camerounais sont consultés dans le cadre d'un référendum, à éprouver leur désir de voir les deux Etats fédérés désormais réunis en un seul ou non. A la suite de ce référendum le oui l'emporte et la république fédérale du Cameroun devient le 20 Mai 1972, la République Unie du Cameroun.

    Le processus d'unification totale du pays connaît son terme avec quelques années plus tard (le 04 février (1984), avec un décret présidentiel instituant la République du Cameroun. Hormis ces deux consultations référendaires, le Cameroun a connu au total 24 autres élections entre 1960 et 2002. Toutefois, 18 d'entre celles-ci ont été organisées dans un contexte de parti unique, dominé successivement par l'Union Camerounaise (U.C.) 1960-1965, l'Union Nationale Camerounaise (U.N.C) 1965-1985 et le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (R.D.P.C) 1985-1990. Le 04 juillet 1990, le Président Paul BIYA au pouvoir met fin au monopartisme et épouse le vent démocratique qui frappe déjà plusieurs autres pays du continent et dont l'une des manifestations principales est le pluralisme politique. A cet effet une commission de révision de la législation sur les libertés publiques est créée par décret présidentiel le 21 Juillet 1990. Au mois de Décembre de la même année, l'Assemblée Nationale vote une série de lois parmi lesquelles une portant sur la liberté d'association et la création des partis politiques.

    Dès lors, plusieurs Associations à caractère politique de personnes sortent de la clandestinité pour devenir de véritables formations politiques légales. Parmi celles-ci le Social Democratic Front (SDF), l'Union Nationale pour la Démocratie et le Progrès (UNDP), l'Union des Populations du Cameroun (UPC) font office de pionniers. Les premières élections qui ont marqué l'ouverture démocratique du pays se sont tenues en Mars 1992 pour les législatives suivi un peu plus tard en Octobre de la même année par les présidentielles. A cette époque, déjà on assiste à des changements majeurs. L'Assemblée Nationale devient pluraliste et le parti au pouvoir (RDPC) ne doit sa majorité à l'hémicycle qu'à une alliance avec le Mouvement pour la Défense de la République (MDR). L'élection présidentielle quant à elle aboutit à des résultats serrés. Paul BIYA l'emporte avec 39,9% des voix au détriment de l'opposant John FRU NDI candidat du SDF qui récolte 35,9% des votes exprimés.

    Par ailleurs, le cycle électoral Camerounais a subit au cours de son histoire quelques perturbations. A cet effet, l'on peut noter le 06 Novembre 1982 une alternance sans élection à la tête de l'Etat Camerounais. Le Président AHMADOU AHIDJO démissionne et cède le pouvoir à Paul BIYA son premier ministre de l'époque et actuel Président de la République du Cameroun. En plus de ce changement majeur, l'on peut noter depuis 1973 que 5 élections ont été anticipées c'est-à-dire organisées avant l'échéance normale des mandats ; parmi lesquels :

    · 3 élections présidentielles (Janvier 1984, Avril 1988 et Octobre 1992)

    · 2 élections législatives (Mai 1973 et Mars 1992)

    Les différentes consultations tenues au Cameroun peuvent être résumées dans le tableau ci-après

    Tableau 1: Dates des différents types d'élections au Cameroun : (1960-2002)

    NOMBRES

    Elections présidentielles

    Elections législatives

     

    Mois

    Années

    Mois

    Années

    1

    Mai

    1960

    Avril

    1960

    2

    Mars

    1965

    Juin

    1965

    3

    Mars

    1970

    Juin

    1970

    4

    Avril

    1975

    Mai

    1973

    5

    Avril

    1980

    Mai

    1978

    6

    Janvier

    1984

    Mai

    1983

    7

    Avril

    1988

    Avril

    1988

    8

    Octobre

    1992

    Mars

    1992

    9

    Octobre

    1997

    Mai

    1997

    10

     
     

    Juin

    2002

     

    Referendums

    Elections municipales

    1

    Octobre

    1961

    Octobre

    1972

    2

    Mai

    1972

    Octobre

    1977

    3

     
     

    Octobre

    1987

    4

     
     

    Janvier

    1996

    5

     
     

    Juin

    2002

    Sources : Jeune Afrique Economique et Documentation du CEAN, IEP de l'université de Bordeaux.

    Il faut noter à ce niveau du cycle électoral que si toutes les élections se font au suffrage universel direct seule deux sont susceptibles d'avoir un impact significatif quant à la mise en oeuvre de la politique budgétaire. Les élections législatives permettent de désigner les 180 députés qui sièges à l'Assemblée Nationale et dont l'une des prérogatives est de voter le projet de loi des finances proposé par l'exécutif. Les députés apparaissent donc comme les garants du budget de l'Etat tant pour son élaboration que pour son contrôle. L'élection présidentielle quant à elle permet de désigner celui qui dirigera le pays pendant une période de sept ans. Or le président de la république nomme les membres du gouvernement sur proposition du premier ministre, chef du gouvernement qu'il a pris le soin de nommer auparavant. Dès lors, il apparaît évident que c'est le président de la république qui donne les grandes orientations tant politiques qu'économiques, que le premier ministre a la charge d'en conduire l'exécution.

    Les élections présidentielles et législatives apparaissent alors comme de véritables lieux d'enjeux politiques qui intègrent les choix de Politique Economique à mettre en oeuvre dès l'accession au pouvoir. Ces choix de Politique Economique se traduisent également dans la gestion publique dont il est important d'en relever la nature.

    I.2 : LA NATURE DES CHOIX PUBLICS AU CAMEROUN

    L'exploration des contributions relatives aux cycles politico-économiques dans les pays africains dont le Cameroun, nous permet de relever des similarités tant au niveau du cadre institutionnel que de l'irrationalité des électeurs face aux choix opportunistes réguliers des gouvernants

    I. 2.1: DES CHOIX OPPORTUNISTES ET REGULIERS

    La théorie des cycles politico-économiques prend appui sur l'idée que les détenteurs du pouvoir politique et plus précisément les gouvernants conscients que la conjoncture économique n'est pas sans effet sur le choix des électeurs, ou plus probablement guidés par leur sens pragmatique essaient de stimuler artificiellement l'activité économique au cours des périodes précédant les élections afin de favoriser leurs partis ou les candidats qu'ils présentent. Ces hommes politiques de façon périodique agissent soit en mettant sur pied des politiques économiques conformes avant les élections (cycles opportunistes), soit ils appliquent des politiques économiques conformes à l'idéologie de leur parti ou mouvance (cycles partisans) afin d'augmenter leurs chances de réélection.

    L'observation spontanée des pays en développement en général et Africains au Sud du Sahara en particulier confirme bien que leurs gouvernants essaient de relancer l'activité économique peu avant les élections. Et qu'ils n'hésitent pas à reporter ces dernières lorsque la situation économique ne leur est pas favorable (Report des élections municipales de Janvier 2001 en Juin 2002 au Cameroun), ou même à les retarder par rapport à l'échéancier électoral (retard de l'organisation des élections législatives de 2001 au Gabon (Engueleguele Maurice ; 2002). La gamme des dispositions que les gouvernants Camerounais prennent apparaît alors extrêmement large : Paiement des arriérés de salaires des fonctionnaires, règlement sans encombre des pensions retraite, accélération du remboursement par l'Etat de sa dette intérieure, gel de privatisations source de licenciements massifs, regain des recrutements de jeunes diplômés dans la fonction publique...

    Les relations essentielles entre les décisions des gouvernants et les événements à la fois économiques et politiques ont fait l'objet de quelques études dans les pays Africains.

    C'est ainsi que Morisson, Lafay, et Dessus (1993) en se penchant sur un échantillon de 23 pays africains (Afrique du Nord et Afrique Sub-Saharienne) et parmi lesquels le Cameroun, relèvent le caractère opportuniste des mesures prises par les gouvernants. Ils établissent que dans ces pays, les décideurs politiques mettent sur pied des politiques économiques populaires (libéralisation) à la veille des élections (la hausse des salaires de la fonction publique, la hausse des prix des cultures de rente aux planteurs, la construction des routes....). Les mois suivants les échéances électorales sont la période par excellence de la mise sur pied de ces gouvernants une fois élus des politiques impopulaires (répression) car très rudes ( les coupures dans les subventions en produits alimentaires, les augmentations d'impôts sur les biens de consommation, les privatisations d'entreprises publiques ou parapubliques, de forte réductions des taux de protections douanières qui frappent les revenues ou menacent les emplois des groupes biens organisés...). Toutes ces variations des comportements des gouvernants rejoint l'idée de l'existence des cycles politico-économiques marqués par une phase d'expansion avant les élections suivie après d'un inévitable refroidissement de l'activité voire d'une récession (Mac Rae; 1977). Abondant dans le même sens, Sipa (2001), décrit la période préélectorale comme « le moment où la marmite est pleine, ces différentes mesures peuvent être analysées comme une injection directe de la monnaie dans le circuit économique national. Et cette injection a pendant quelques temps des effets bénéfiques induits (directs ou indirects) sur la production et la croissance du pays (emplois, revenu, réinvestissement...) ».

    La situation au Cameroun ne diffère pas tellement de celle des autres pays africains au sud du Sahara. Aussi observe-t-on généralement des comportements des gouvernants à la veille des élections qui tendent à prendre des mesures incitatives et favorables aux yeux de l'opinion dans un but de se maintenir au pouvoir. Fouda (1997) dans une tentative d'analyse des interactions entre la politique et l'économie au Cameroun sur la période 1960-1992 à la lumière du cycle politico monétaire, aboutit à des résultats intéressants. En effet, il trouve que pour les différentes élections (présidentielles et législatives) on observe une hausse des disponibilités monétaires six à huit mois en moyenne avant chaque élection. Et de manière plus précise, il apparaît que ce mouvement de hausse s'amorce huit mois avant l'élection et culmine cinq à six mois avant celle-ci. L'on assiste ensuite à un déclin progressif des mêmes disponibilités monétaires au fur et à mesure que l'on s'éloigne des élections. Ceci est relatif à l'hypothèse que toute action des pouvoirs publics à des fins électoralistes, que ce soit à travers la manipulation des instruments de politique monétaire, l'augmentation des salaires nominaux, des prix des produits agricoles d'exportation, et/ ou des injections des revenus pétroliers dans l'économie, se répercutent sur les disponibilités monétaires. Par ailleurs, dans le cadre d'une étude menée sur 23 pays africains (dont le Cameroun) sur la période 1980-1990 par Morrisson, Lafay et Dessus (1993), il apparaît que les hommes politiques adoptent des comportements opportunistes à l'approche de chaque élection (présidentielle, municipale ou législative) dans le but non seulement de leur propre réélection, mais également dans celui de satisfaire les principaux bailleurs de fonds notamment le FMI et la Banque Mondiale.

    L'on peut remarquer que, pour atteindre leur objectifs de manipulation de la politique budgétaire en fonction de l'agenda électoral les gouvernant Africains en général et Camerounais en particulier doivent intégrer le caractère irrationnel de l'électeur Africains.

    I.2.2 : L'IRRATIONALITE DES ELECTEURS ET UN CADRE INSTITUTIONEL PARTICULIER

    Si l'on peut observer que les mesures prises avant les élections par les tenants du pouvoir au Cameroun laissent entrevoir une soumission à certains facteurs externes (influence des bailleurs de fonds, coûts des matières premières...), l'on peut également remarquer que même lorsque ces choix sont effectués par des gouvernants eux-mêmes. Les citoyens usent des profits immédiats qu'ils en tirent pour résoudre les problèmes précédemment accumulés pendant de long mois voire plusieurs années (remboursement des dettes aux créanciers invariablement suivie par de nouveaux emprunts, réalisation des soins médicaux longtemps différés...) et non pour réinvestir. Ce qui les ramènent rapidement à la situation de précarité initiale et rend illusoire la perspective de stimulation artificielle même temporaire des économies nationales que visent ces choix de politique économique. Un tel état des choses révèle l'irrationalité des électeurs africains en général et camerounais en particulier. Toutefois, comme le pense si bien Engueleguele (2002) « l'inopérabilité des théories macro-économiques pour formaliser la rationalité des électeurs africains ne doit pas conduire à conclure qu'il n'est pas utilitariste ou peu sensible à la conjoncture économique. Elle confirme au contraire que cette rationalité ne saurait être construite de façon arbitraire par transposition décontextualisée de paradigme élaboré ailleurs ou étroit, mais que sa conceptualisation doit plutôt résulter de l'observation empirique des pratiques de cet électeur ». Morisson, Lafay et Dessus (1993) pensent d'ailleurs à cet effet que pour un accroissement même temporaire du revenu, les électeurs le considèrent comme un motif de contentement. Et donc ces mesures ne permettent pas à ceux qui les initient d'atteindre leurs objectifs car entraînant des effets pervers.

    Par ailleurs, à l'inopérabilité éventuelle des théories macroéconomiques pour formaliser la rationalité des électeurs Africains, l'on peut ajouter que « les gouvernements des pays en développement exercent le pouvoir dans un cadre institutionnel différent de celui des pays développés et sont soumis à de multiples contraintes propres à ces pays » (Morisson, Lafay, Dessus, 1993). Ainsi, les multiples régimes autocratiques ou quasi autocratiques qui ont jonché les pays africains pendant de nombreuses années ne permettaient pas la tenue d'élections libres et équitables comme cela est le cas dans les pays industrialisés.

    Il apparaîtrait trompeur de penser que l'étude d'un cycle politico-économique au Cameroun ne peut bien se faire qu'à partir du moment où le pays s'est ouvert au courant démocratique des années 1990 ; période à partir de laquelle les enjeux électoraux devenaient de plus en plus nombreux et diversifiés du fait de l'existence d'une opposition et de l'agrandissement du paysage politique avec la présence de nombreux partis politiques. En effet, « ...même dans un régime de parti unique ou même autocratique, les gouvernants ont sinon un souci de réélection, du moins un souci de popularité. Il est possible qu'un tel souci a pu animé les gouvernants successifs du Cameroun pendant la période antérieure à l'ouverture démocratique » Fouda (1997).

    En somme, l'observation des comportements des gouvernants au sein des pays en développement en général et au Cameroun en particulier, laisse entrevoir une réelle volonté de manipulation des données économiques aux fins électoralistes ; que ce soit dans un souci d'être réélu ou celui de « soigner leur image de marque à la fois auprès des partenaires occidentaux du pays, des organisations financières internationales (FMI, Banque Mondiale) et des organismes internationaux des droits de l'homme » (Fouda 1997). Cependant ces choix ce font dans un cadre institutionnel particulier aux pays dans la mesure où sur près de 45 ans d'indépendance le processus de démocratisation ne court que depuis 15 ans et n'épouse pas encore en totalité toutes les attentes en matière de démocratie. De plus le caractère aléatoire qui entoure la nature de l'électeur africain qui est difficile à fidéliser plonge les gouvernants dans une incertitude quant aux gains à tirer des mesures budgétaires qu'ils mettent en place à la veille des élections. Ce qui rend encore plus intéressant l'étude du comportement du budget au Cameroun à l'aune des élections dont l'une des étapes passe par l'analyse statistique des données budgétaires par rapport à l'agenda électoral

    II : ANALYSE STATISTIQUE DES DONNEES BUDGETAIRES PAR RAPPORT A L'AGENDA ELECTORAL

    Dans la poursuite perpétuelle de notre souci de mettre en exergue l'action du calendrier électoral sur le budget de l'Etat au Cameroun, nous allons procéder ici à une analyse statistique des variables budgétaires.

    II.1 : LES DEPENSES BUDGETAIRES

    Les dépenses analysées à ce niveau concernent les dépenses de fonctionnement et d'investissement allouées à chaque département ministériel à la fois pour son fonctionnement et pour ses interventions. Nous avons alors sélectionné les départements ministériels dont les interventions sont susceptibles d'influencer l'électorat.

    a-les dépenses militaires

    Sont réunis dans ce type de dépenses la totalité des dépenses budgétaires relatives aux forces armées et polices.

    Le graphique 7 ci-dessous présente les variations de ces dépenses :

    Graphique 7 : Variations des dépenses militaires par rapport à l'agenda électoral

    Source : Construit par l'auteur à partir des données de la DSCN

    La lecture de ce graphique ne donne pas une indication assez claire d'un cycle politico-budgétaire. En effet, les dépenses militaires n'augmentent toujours pas à la veille des élections. De plus, elle semble plutôt augmenter les exercices suivant l'année de l'élection. L'on peut même noter que les accroissements les plus prononcés ont lieu en milieu de mandat (ou l'on observe des taux de croissance de l'ordre de 12% en 89/90 et de près de 20% en 97/98). Ce qui laisse penser qu'à l'approche des élections, les gouvernants n'augmentent pas toujours les dépenses militaires dans le but de satisfaire l'électorat. En effet, les exercices où les variations sont positives et les plus élevées ne sont pas des exercices d'élection. A titre d'exemple l'exercice 78/79 près de 30% d'augmentation, pour l'exercice 82/83 on observe un taux de croissance de près de 25%.

    b-les dépenses d'éducation

    Il s'agit ici de toutes les dépenses relatives aux divers types d'enseignement généraux (primaire, secondaire, et supérieur). Les variations de ces dépenses sont résumées au sein du graphique ci-dessous

    Graphique 8 : Variations des dépenses d'éducation par rapport à l'agenda électoral

    Source : Construit par l'auteur à partir des données de la DSCN

    L'observation du graphique 8 laisse apparaître de fortes variations des dépenses d'éducation lors des exercices correspondant avec la période électorale. Ces dépenses ont tendances à augmenter en période électorale et diminuer en milieu de mandat électoral.

    L'on peut noter par exemple un fort accroissement de plus de 60% de ces dépenses lors de l'exercice 72/73 (élection législative de mai) et une forte diminution de près de 20% l'année d'après. Egalement, on observe un fort accroissement de plus de 40% lors de l'exercice 79/80 date de l'élection présidentielle. Tandis que pendant pour l'élection législative de mai 97 l'accroissement des dépenses d'éducation à une amplitude de près de 60%.

    Même si cela n'apparaît pas très clairement l'on peut déjà observer à ce niveau une influence de l'agenda électoral sur les dépenses d'éducation.

    Dépenses d'agriculture

    Il s'agit ici des diverses dépenses de l'Etat relatives au monde rural, qu'il s'agisse de la régularisation des marchés agricole, de l'aménagement foncier, de l'amélioration de l'habitat en milieu rural, des diverses aides financières accordées aux exploitants.

    Graphique 9 : Variations des dépenses agricoles par rapport à l'agenda électoral

    Source : Construit par l'auteur à partir des données de la DSCN

    L'influence de l'agenda électoral n'apparaît pas très clairement ici. En effet, l'on a une alternance dans le comportement de ces dépenses c'est-à-dire elles ne peuvent être aussi bien élevées en année électorale, et basses en milieu de mandat que basses en année électorale et élevées en milieu de mandat. A titre d'exemple, ces dépenses varient vers la baisse entre l'exercice 80/81 de près de 12% et l'exercice 96/97 de plus de 60% (date d'élection législative et présidentielle).

    Ici aussi la présence d'un cycle politico-budgétaire n'est pas très évidente.

    d-Les dépenses de santé et affaires sociales

    Figurent ici des dépenses d'actions sociales de l'Etat ; en matière de santé publique et d'assistance sociale. (Condition féminine, enfant de la rue,...).

    Graphique 10 : Variations des dépenses de santé et affaires sociales par rapport à l'agenda électoral

    . Source : Construit par l'auteur à partir des données de la DSCN.

    Les variations de ce type de dépense traduisent assez clairement une volonté des gouvernants à accroître ces dépenses lors des échéances électorales. En effet, la quasi majorité des exercices budgétaires coïncidant avec les échéances électorales connaissent une variation positive de ce type de dépegse. Hormis l'exercice 87/88, au cours de tous les autres exercices  électoraux » ont vu un accroissement des dépenses en matière de santé publique et en asistance sociale. A titre d'exemple pour les exercices 74/75, 79/80, 96/97 on a des augmentations de l'ordre de 13%, 38%, 25% respectivement. Par contre, les exercices hors mandat électoral constituent des périodes de diminution des deux types de dépeÍses (diminution de moins de 10% en 76/77).

    Tout ceci laisse présager un impact des élections sur les dépenses de santé publique et d'assistance sociale.

    e-Dépenses de travail et prévoyance sociale

    Ce type de dépense enregistre l'ensemble des actions en faveur de l'emploi, de formation professionnelle, et des concours financiers apportés aux divers régimes de prévoyance sociale.

    Graphique 11 : Variations des dépenses de travail et de prévoyance sociale par rapport à l'agenda électoral

    Source : Construit par l'auteur à partir des données de la DSCN

    Les variations que nous observons sur le graphique ci-dessus laisse apparaître un accroissement assez significatif de ce type de dépense au fur et à mesure que l'on s'approche de l'année de l'élection. En effet, lors de la plupart des exercices précédents ou coïncident avec une élection, on observe une augmentation de ces dépenses au détriment des autres exercices budgétaires se situant après ou en milieu de mandat.

    A titre d'exemple, les exercices 84/85, 91/92, 92/93, 96/97 et 97/98 connaissent une variation positive des dépenses, lors que les exercices tels que 78/79, 90/91, et 95/96 (une baisse de près de 10%) connaissent des variations négatives puisque ce sont des exercices hors mandats électoraux.

    En somme, une analyse graphique donne un résultat contraste des variations des dépenses allouées aux départements ministériels (stratégiques) c'est-à-dire dont la manipulation peut influencer l'électorat. Ainsi, si les dépenses militaires et agricoles ne semblent pas obéir à un cycle politico-budgétaire, les dépenses allouées au secteur de l'éducation, au travail et à la prévoyance sociale, santé et affaires sociales nourrissent quant à elles l'idée d'une variation en fonction de l'agenda électorale.

    Cependant, une analyse du budget du point de vue uniquement des dépenses ministérielles n'occulte pas la nécessité d'un exercice similaire pour l'autre composante du budget que sont les recettes.

    II.2 LES RECETTES FISCALES

    Il faut noter ici que nous nous intéressons uniquement aux recettes liées aux impôts et autres taxes, car non seulement ce type de recettes constitue la plus grande part (90%), mais en plus elles sont prélevées sur les contribuables. Et ce sont ces derniers qui constituent l'électorat pour lequel se battent les politiciens. Ainsi une diminution ou une augmentation des impôts s'accompagne le plus souvent d'une réaction positive ou négative des électeurs.

    Graphique 12 : Variations des recettes fiscales par rapport à l'agenda électoral

    Source : Construit par l'auteur à partir des données de la DSCN

    L'analyse graphique des variations des recettes fiscales à partir du graphique ci-dessus traduit assez clairement une influence des élections sur les recettes fiscales. En effet, les exercices reliés à une élection connaissent une baisse des recettes fiscales à titre d'exemple entre l'exercice 88/89 et l'exercice 92/93, on observe une diminution de Près de 50% de même entre l'exercice 95/96 et l'exercice 96/97, on a une diminution de près de 10% par contre, l'exercice 84/85 connaît un pic d'augmentation de plus de 60% car on se trouve ici juste après une échéance électorale.

    Toutefois, si l'on peut relever qu'une augmentation des recettes fiscales peut être liée à une croissance économique assez soutenue et qu'un ralentissement ou une récession de cette dernière peut être à l'origine d'une diminution des recettes fiscales, l'augmentation des recettes fiscales lors des exercices hors mandat électoral et une diminution de ces mêmes recettes lors des exercices à échéances électorales, suscite une possible influence de l'agenda électoral.

    En définitive, l'évolution comparée du budget de l'Etat au Cameroun par rapport à l'agenda électoral au Cameroun laisse penser à une possible relation de causalité entre ces deux notions. Les comportements qu'adoptent les dirigeants camerounais vis à vis des variables économiques en général et du budget en particulier sont similaires à ceux des dirigeants des autres pays africains. En effet, ces comportements traduisent des choix opportunistes qui apparaissent de façon régulière à l'approche des échéances électorales. Toutefois l'on peut noter que ces choix sont souvent soumis à des contraintes tant internes qu'externes, ne donnant pas à ces gouvernants la possibilité de manipuler aisément les variables budgétaires. Néanmoins, une analyse graphique des variations des dépenses et des recettes budgétaires au Cameroun pousse à penser à une influence du calendrier électoral sur le budget. Par ailleurs, le caractère insuffisant de cette analyse qui prédit mais pas de façon tout à fait claire la présence d'un cycle politico-budgétaire nous pousse à approfondir notre analyse. Ainsi, pensons-nous qu'une analyse économétrique à travers un modèle bien élaboré nous permettra d'adopter une position plus édifiante sur l'existence d'un cycle politico-budgétaire au Cameroun.

    Ainsi nous nous sommes attelés tout au long de la première partie de notre travail à mettre en exergue le comportement de la politique budgétaire mise sur pied au Cameroun durant la période de 1970-2002. Il en ressort que comme dans tous les autres pays la politique budgétaire reste un instrument largement utilisé lors de cette période. Toutefois, nous avons pu relever des rigidités qui entourent cet instrument et qui sont relatives à des facteurs aussi bien économiques que politiques. Et à ce dernier titre, l'environnement politique exprimé à travers le calendrier électoral semble influencer les prévisions économiques en général et le budget en particulier au Cameroun. En effet, si l'évolution du budget au Cameroun subit inéluctablement l'influence de la conjoncture économique au Cameroun, ses principales variables (dépenses et recettes) sont également sous l'emprise de l'incertitude électorale. Ce qui a laissé entrevoir la possibilité de l'existence d'un cycle cycle politico-budgétaire.

    Cependant, une analyse des comportements des dirigeants Camerounais vis à vis du budget à l'aune des échéances électorales nous permettra, dans la seconde partie d'adopter au vu des résultats que nous obtiendrons une position plus édifiante là-dessus.

    DEUXIEME PARTIE :

    ANALYSE DU CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN

    Après un aperçu d'un début de justification de l'existence d'une relation entre le calendrier électoral et la politique budgétaire au Cameroun, il nous semble propice dans la conduite de notre travail de procéder à l'analyse effective du cycle politico-budgétaire au Cameroun.

    Aussi la présente partie comporte t-elle deux chapitres : le premier chapitre c'est-à-dire le chapitre 3 est intitulé « Les déterminants du cycle politico-budgétaire au Cameroun », révèle à travers l'estimation d'un modèle économétrique des variables susceptibles de présager une éventuelle manipulation opportuniste et électoraliste du budget par les pouvoirs publics Camerounais. Le deuxième chapitre c'est-à-dire le chapitre 4 est quant à lui intitulé « Cycle politico-budgétaire et constitutionnalisation économique» et se base des conclusions du chapitre précédant pour évoquer la pertinence de l'adoption de règles fixes en matière budgétaire en particulilier et économique en général dans l'optique de `lier les mains aux dirigeants Camerounais'.

    CHAPITRE III :

    LES DETERMINANTS DU CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN

    La problématique de notre travail consiste à mieux appréhender la causalité fondamentale qui existe entre le calendrier et le budget. Une partie de cette justification nous a permis d'évoquer une possible influence de l'agenda électoral sur les variables budgétaires. Cependant, les résultats obtenus de l'analyse graphique s'avèrent contrastés et ne permettent pas de prendre une position assez précise. C'est pourquoi le présent chapitre se permet d'apporter un affinement de l'analyse précédemment faite, par le biais d'une analyse économétrique. Celle-ci est basée sur un modèle dûment choisi (section 1) et dont l'analyse des résultats contribueront à infirmer ou confirmer les conclusions déjà obtenues dans le chapitre 3.

    I: LE CHOIX DU MODELE

    Le but poursuivi dans cette section est de construire un modèle économétrique permettant de tester l'existence d'une relation de causalité entre les échéances électorales et le budget au Cameroun, débouchant sur l'éventualité d'un cycle politico budgétaire. Aussi nous semble t-il propice avant d'expliciter le modèle en justifiant les modifications qui lui sont apportées pour une applicabilité au contexte camerounais, de s'arrêter dans un premier temps à la présentation et la justification des variables utilisées dans le modèle.

    I. 1 : Choix et définition des variables

    L'étude de l'influence de l'agenda électoral sur les prévisions budgétaires au Cameroun nécessite la prise en compte de bon nombre de variables.

    I 1.1 : La variable dépendante : une variable budgétaire

    La variable à expliquer dans notre modèle est une variable budgétaire. Dans le cas d'espèce, nous utilisons les dépenses et les recettes dans la mesure où elles constituent les principales variables que les gouvernants ont l'habitude de manipuler aux fins électoralistes. Ce choix se justifie également par l'intérêt que les dépenses ont le plus souvent suscité auprès de nombreux auteurs. Ainsi, Tufte (1978) porte ses études sur les dépenses de sécurité sociales aux Etats-Unis. Spafford. (1981) et Foot (1971) montrent que les dépenses de constructions routières augmentent à l'approche des élections au Canada. Blais (1978) relève l'impact du secteur agricole sur les élections au Canada. L'établissement explicite de l'influence du calendrier électoral sur le budget au Cameroun nécessite une focalisation autant sur les dépenses que sur les recettes budgétaires. De plus, il apparaît nécessaire de procéder également comme au niveau de l'analyse graphique à une estimation des dépenses des principaux départements ministériels d'une part et d'autre part d'appréhender le comportement des principales recettes à travers une estimation des recettes fiscales. Les variables dépendantes se déclinent donc en :

    A-Les dépenses
    a- Les dépenses agricoles

    Cette variable enregistre l'ensemble des dépenses réservées au ministère de l'agriculture dans le budget au cours de la période 74/75 à 2001/2002.

    b- Les dépenses militaires

    Dans cette variable l'on retrouve l'ensemble des dépenses affectées aux forces armées à savoir : L'armée de l'air, l'armée de terre et la marine. A cela on ajoute aussi la police.

    c- Les dépenses d'éducation

    Cette variable regroupe l'ensemble des dépenses réservées au ministère de l'éducation national plus l'enseignement supérieur.

    d-Les dépenses de santé publique et Affaires sociales

    On y retrouve l'ensemble des dépenses affectées au ministère de la santé publique, ainsi que des affaires sociales.

    e-Les dépenses de travail et de prévoyance sociale

    Cette variable renferme les dépenses réservées au ministère du Travail et de la Prévoyance Sociale.

    B- Les recettes

    Il s'agit ici de l'ensemble des recettes fiscales prévues dans le budget au cours de la période 1970-2002. Nous retiendrons uniquement les recettes fiscales car non seulement elles constituent la plus grande part des recettes budgétaires mais aussi parce que le comportement de l'impôt constitue un bon indicateur

    A toutes ces variables dépendantes nous associerons à chaque fois un bon nombre de variables explicatives.

    I 1.2 : Les variables explicatives
    a- La date des élections

    Cette variable regroupe l'ensemble des élections présidentielles et législatives qui ont eu lieu au Cameroun de 1970 à 2002. La rétention dans notre étude des élections présidentielles et législatives aux dépens des autres élections qui ont lieu au Cameroun est due au fait que d'une part l'élaboration du budget se fait par le chef du Gouvernement en l'occurrence le Premier Ministre, sous la haute autorité du Président de la République, et d'autre part, la mise en application du budget par le gouvernement n'est possible qu'après une adoption du projet par l'Auguste chambre sous forme de loi de finances. Ainsi les élections présidentielles et législatives ressortent les acteurs principaux du budget de l'Etat camerounais : Le Président de la République instigateur de la politique gouvernementale, et les députés garants du budget.

    Nous procèderons alors comme GOLDEN et POTERBA (1980) et ALESINA (1988) qui séparent dans des groupes distincts les années correspondantes à des phases spécifiques du cycle électoral. Dans le cas d'espèce nous aurons :

    § Elec : qui correspond à l'année de l'élection

    § Elec1 : qui correspond à l'année précédant l'année de l'élection

    § Elec2 : qui correspond à 2 ans avant l'année de l'élection

    § Elec3 : qui correspond à l'année suivant l'année de l'élection

    § Elec4 : qui correspond à 2 ans après l'année de l'élection.

    b-La variable dépendante retardée

    La variable dépendante que l'on retarde ici n'est autre que la variable budgétaire que nous avons choisie plus haut et qui représente suivant les hypothèses soit les dépenses des départements ministériels, soit les recettes fiscales. Dans le cas d'espèce le nombre de retards est de un.

    c-Le trend

    C'est une variable qui prend la valeur 1 l'execice70/70, 2 l'exercice 71/72, 3 l'exercice74/73 ..........et 32 l'exercice2001/2002

    I.2 : Le modèle économétrique

    Le modèle économétrique sur lequel porte notre étude dans l'optique de déceler la présence d'un cycle politico budgétaire au Cameroun s'inspire du modèle linéaire autorégressif élaboré par Blais et Nadeau (1992). En effet, dans l'optique de mettre en évidence l'influence de la politique sur les décisions publiques locales au Canada, ils procèdent à une analyse empirique du comportement du budget de 10 provinces canadienne à la lumière des élections entre 1951 et 1984. De plus cette étude se propose de tester l'existence des cycles dans la gestion des provinces canadienne.

    L'étude empirique que nous menons en s'inspirant de ce modèle intègre quelques spécificités liées à l'environnement camerounais.

    D'abord, nous travaillons sur des variables budgétaires nationales qui représentent non pas les dépenses des communes mais plutôt des dépenses prévues au plan national. Aussi, nous reprenons ensemble les dépenses qui figurent sur les lois de finances allant de l'année 1970 à l'année 2002. Ce qui représente un nombre N=32 observations.

    Ensuite le modèle ne tient pas compte de l'idéologie politique (gauche ou droite) telle que définie au Canada, mais intègre d'autres variables qui semblent pertinente pour le cas camerounais.

    Tout ceci nous conduit à élaborer et à tester le modèle dont la forme générale est la suivante :

    =++++++++

    § - : représente la variable budgétaire en l'occurrence soit les dépenses des départements ministériels, soit les recettes fiscales suivant l'équation à estimer.

    §  : dépenses ou recettes engagées par les gouvernants pendant la période t-1

    §  : variable dummy qui prend la valeur 1 année de l'élection, o sinon. Un signe positif et significatif de cette variable accrédite la thèse d'un cycle opportuniste.

    §  : variable dummy qui prend 1 année précèdent l'élection o sinon.

    §  : variable dummy qui prend 1 deux ans avant les élections, o sinon.

    §  : Variable dummy qui prend 1 l'année suivant l'élection, o sinon

    § variable dummy qui prend 1 deux ans après l'élection, o sinon

    § trend : Variable égale à 1 en 70/71, 2en 71/72 ........32 en 2001/2002

    §  : terme d'erreur

    § t : année budgétaire.

    Le choix du modèle que nous avons précisé dans cette section nous permet d'inscrire la validité de nos hypothèses de recherche dans une logique quantitative déductive. Ce dernier conduit à l'expérimentation d'un modèle économétrique dont les tests des hypothèses de recherche évoquées pourront nous édifier davantage et nous permettre de porter un jugement définitif et d'apporter ainsi une réponse à notre question de recherche. Ceci nécessite donc de se tourner vers les estimations et l'analyse des résultats de ces estimations.

    II : ESTIMATION DES RELATIONS ET ANALYSE DES RESULTATS

    Le fil directeur de notre étude ressort de la proposition principale qui se définit en termes que : les dirigeants politiques camerounais manipulent les variables budgétaires dans le but de se voir réélire. Il appert que leurs comportements donnent lieu à un cycle politico-budgétaire au Cameroun. Les hypothèses sous-jacentes et qui seront soumises à des tests sont donc :

    H1 : Les dépenses ayant un impact direct sur les électeurs augmentent l'année précédant l'élection et diminuent l'année d'après.

    H2 : Les recettes fiscales diminuent l'année précédant l'année de l'élection et augmentent l'année suivant l'année de l'élection

    L'étude descriptive opérée à travers l'analyse graphique au sein du chapitre 3 s'est avéré insuffisante pour affirmer ou infirmer de telles hypothèses. C'est pourquoi nous avons recours dans ce chapitre à la méthode économétrique pour tester nos hypothèses. Ceci se fera à travers les estimations des MCO sur des modèles de régressions multiples qui tiennent compte d'un certain nombre de variables jugées pertinentes par la littérature économique en la matière.

    Aussi, après l'élaboration des tests de diagnostics garantissant la validité des hypothèses fondamentales des MCO, nous procèderons à l'estimation des équations et à l'interprétation des résultats.

    II.1 : TESTS DE DIAGNOSTIC

    L'utilisation des séries temporelles dans nos estimations requiert les tests de diagnostic suivants pour garantir la validité des hypothèses fondamentales des MCO et surtout rendre possibles les tests de significativité des différents coefficients du Modèle. En fait, il s'agit de s'interroger en amont sur la validité de l'usage que l'on fait des outils économétriques mis à notre disposition, en gardant à l'esprit les hypothèses statistiques qui ont présidé à leur élaboration et dont la violation ne serait- ce que partielle viendrait à fragiliser la validité des valeurs numériques obtenues. C'est dans cette optique que nous envisageons de procéder aux tests de diagnostic concernant la stationnarité des variables et l'auto corrélation des résidus, en supposant que toutes les autres hypothèses sont vérifiées.

    II-1.1 : L'auto corrélation des erreurs et normalité des erreurs
    Les diagnostics relatifs aux résidus des modèles de régression par les MCO sont centraux dans la mesure où, la normalité et l'autocrrélation des erreurs résultent de nombreux tests et outils statistiques très souvent utilisés.
    A. NORMALITE DES ERREURS
    Le problème de normalité des erreurs se pose lorsqu'on souhaite tester la performance du modèle ou de construire l'intervalle de confiance pour effectuer les tests de STUDENT des paramètres .il convient de vérifier la normalité des erreurs. Le cadre le plus formel et adéquat est le test de JARQUE et BERA (1984), fondé sur la notion de Skewness (asymétrie) et Kurtosis (aplatissement).
    L'examen des résultats du test de Jarque -Bera des figures présentées à l'annexe confirment l'hypothèse H0 de la normalité des erreurs
    B. AUTOCORRELATION DES ERREURS

    Nous sommes en présence d'autocorrélation des erreurs lorsque les erreurs sont liées par un processus de reproduction. Etant donné que nos variables sont des séries temporelles, domaine de prédilection des problèmes d'autocorrélation, nous recourons d'habitude au test de Durbin et Watson pour vérifier la présence ou l'absence d'auto corrélation. Mais dans le cas présent la présence d'une variable retardée necessite l'utilisation de la statistique h de durbin et watson. L'observation des variables DW montre que nous sommes dans les zones de rejet de l'autocorrélation des erreurs.

    II.1.2 : La stationnarité des variables

    Avant le traitement d'une série chronologique, il convient d'en étudier les caractéristiques stochastiques. Si ces caractéristiques c'est-à-dire son espérance et sa variance se trouvent modifiées dans le temps, la série chronologique est considérée comme non stationnaire. Dans le cas d'un processus stochastique invariant, la série temporelle est alors stationnaire. L'une des conditions requises pour l'estimation par les MCO des modèles utilisant les séries temporelles est que chacune des variables du Modèle soit stationnaire. Autrement dit un processus est dit stationnaire si la loi qui régit la valeur de chacune de ces variables aléatoires dont il est la succession est indépendante de la date t (E.Quinet, 1969)1(*). Les processus stationnaires peuvent être classés en deux groupes : les processus strictement stationnaires et les processus faiblement stationnaires. Nous nous limiterons à la notion moins rigide, celle de la stationnarité au sens faible.

    Soit (Xt, t T) un processus réel du second ordre (E(X2) < + , t T). Le processus est dit faiblement stationnaire si : l'espérance mathématique, la variance et la covariance de la série sont stationnaires. Ainsi une série chronologique est dite stationnaire lorsque sa moyenne est nulle, sa variance constante et finie, et sa covariance entre deux périodes ne dépendant que de la durée qui sépare ces deux périodes. Dans ce cas, elle est dite intégrée d'ordre zéro (I(0)).

    Nous utiliserons le test de Dickey et Fuller augmenté (Augmented Dickey-Fuller (ADF)) pour la détermination de l'ordre d'intégration des séries. Ce test consiste à régresser la première différence d'une série sur la série retardée d'une période et des différences retardées. Cette régression est faite avec une tendance et une constance. Considérons l'équation suivante :

    Yt = b1Yt-1+ b2Yt-1 + b3Yt-2 + b4t + b5

    La variable Yt sera dite stationnaire si b1 n'est pas significativement différent de zéro. Pour réaliser le test il faut deux hypothèses. Ainsi, ces hypothèses sont les suivantes :

    H: Yt est I(1)

    contre H: Yt est I(0)

    De manière alternative, on peut aussi tester les hypothèses :

    H: b10

    Et H: b1=0

    La prise de décision est faite en comparant la statistique du test d'ADF à des valeurs critiques de la table de Dickey et Fuller. Cette statistique est négative et doit être en valeur absolue supérieure à la valeur critique de la table de Dickey et Fuller pour que l'hypothèse H0 soit rejetée. Si ces conditions sont vérifiées, la série est dite intégrée en niveau ou stationnaire. Autrement, l'hypothèse H0 est acceptée et la série est dite non stationnaire.

    Les résultats sont récapitulés dans le tableau ci-dessus et montre que les variables sont stationnaires en niveau ou I(o)

    Tableau 2 : Résultats des tests de stationnarité

    Variables

    ADF (en niveau et sans tendance

    Valeur critique de MacKinnon

    Ordre d'intégration

    Depa

    -2,863388***

    -2,6242

    I (0)

    Depm

    -3,050387*

    -3,6576

    I (0)

    Dep.s

    -2,9981**

    -2,9591

    I (0)

    Depe

    -6,08021*

    -4,3226

    I (0)

    Deptps

    -2,87962**

    -2,6181

    I(0)

    Impots

    -2,807001**

    -2,6191

    I(0)

    Source : Réalisé par l'auteur à partir du test de racine unitaire des variables

    § * : indique une significativité à 1%

    § ** : indique une significativité à 5%

    § *** : indique une significativité à 10%

    II. 2 : ESTIMATION DES RELATIONS

    Nous procèderons ici tour à tour à l'estimation des différents types de dépenses que nous avons retenues et les recettes fiscales. Il est à noter ici que nous reportons au sein des tableaux récapitulatifs des résultats des estimations, l'ensemble des résultats étant confiné au sein des tableaux présentés en annexe.

    II.2.1 : ESTIMATIONS DES DEPENSES

    A- Tableau récapitulatif :

    Tableau 3 : Estimation des dépenses budgétaires

    Variables indépendantes

    Dépenses Militaires

    Dépenses de santé et affaires sociales

    Dépenses d'agriculture

    Dépenses d'éducation

    Dépenses de travail et prévoyance sociale

    C

    BUD (t-1)

    Elec3

    Elec1
    Elec

    Elec2

    Elec4

    Trend

    -0.2 (0,053)

    -0.16 (0,0001)*

    0.12 (0,32)

    0.18 (0,11)

    0.17 (0,11)

    0.06 (0,46)

    0.14 (0,063)

    0.003 (0,06)

    0.3 (0,7402)

    0.06 (0002)*

    -0.2 (0,64)

    0.25 (0,08)

    0.26 (0,01)*

    -0.2 (0,05*

    -0.18 (0,30)

    -0.004 (0,57)

    -0.37 (0,08)

    0.02 (,006)

    0.29 (0,24)

    0.2 (0,52)

    0.2 (0,007)*

    -0.2 (0,82)

    -0.02 (0,40)

    -0.05 (0,88)

    -0.1 (0,6)

    -0.11 (0,005)

    0.15 (0,18)

    0.13 (0,01)*

    0.12 (0,04)*

    -0.06 (0,07)

    -0.08 (0,15)

    -0.01 (0,26)

    -0.25 (0,12)

    -0.23 (0,07)

    0.27 (0,61)

    0.31 (0,05)*

    0.31 (0,01)*

    -0.16 (0,06)

    -0.09 (0,33)

    -0.03 (0,56)

    N

    R² ajusté

    F

    DW

    32

    0,56

    0,38

    2.74

    2,45

    32

    0,63

    0,49

    2.61

    2.09

    32

    0,59

    0,39

    2,94

    2,30

    32

    0,52

    0,37

    3,25

    1.74

    32

    0,72

    0,70

    3.52

    2.48

    Source : Construit par l'auteur à partir des résultats présentés en annexes

    * Significative à 5%

    B- Interprétation des résultats
    a- Les dépenses militaires

    La deuxième colonne du tableau ci-dessus présente des résultats d'une estimation réalisée pour expliquer les dépenses allouées aux départements de la défense et la sécurité nationale. L'on remarque un degré assez élevé de la variance expliquée (0.68), témoignant d'un modèle stable. Elec est certes positive mais n'est pas significativement différente de zéro. Autrement dit, il est impossible de conclure à la présence d'un cycle opportuniste à la lumière de cette seule variable. Ce résultat indique qu'il est nécessaire de prendre en compte simultanément plusieurs variables dummy (Elec1 eElec2, Elec3, Elec4). Ce modèle ne permet pas d'établir distinctement la présence d'un cycle électoral des dépenses militaires. En effet, les coefficients des dépenses militaires en t-1 et en t+1 sont certes positifs, mais seul le coefficient en t-1 est significativement égal à zéro.

    La présence d'un cycle électoral des dépenses militaires n'est pas distinctement établit.

    b-Les dépenses de santé et affaires sociales

    La troisième colonne de notre tableau présente les résultats d'une estimation des dépenses de santé et affaires sociales au Cameroun. L'on remarque un degré assez élevé de la variance expliquée (0.63). Nous observons que la variable Elec est significativement différente de zéro et positive. Ceci signifie que par rapport à toutes les autres années de mandat, à l'année de l'élection, les dépenses de santé et affaires sociales sont significativement supérieures.

    La présence d'un cycle opportuniste semble acquise en ce qui concerne ce type de dépenses. Pour autant le coefficient de l'année de l'élection est inférieur à celui de l'année précédente.

    c- Les dépenses agricoles.

    La quatrième colonne de notre tableau présente les résultats d'une estimation réalisée pour expliquer les dépenses d'agriculture au Cameroun. Nous remarquons un degré moyennement élevé de la variable à expliquée (0.59). La variable Elec n'est pas significativement différente de zéro, bien que positive. Autrement dit, il est impossible de conclure à la présence d'un cycle opportuniste à la lumière de cette seule variable. Toutefois, la prise en compte simultanément de plusieurs variables exogènes pour caractériser le cycle électoral ne donne pas des résultats meilleurs, dans la mesure où aucun des coefficients de cette variable n'est pas significativement différent de zéro.

    La présence d'un cycle électoral des dépenses d'agriculture n'est pas établit.

    d- Les dépenses d'Education

    Les résultats de l'estimation réalisée pour expliquer les dépenses d'éducation au Cameroun sont présentés par la 5e colonne de notre tableau, l'on remarque un degré assez faible de la variance expliquée (R² = 0,52)

    On observe que les variables Elec1 et Elec sont positifs et significativement différents de 0. Ce qui signifie que par rapport à toutes les autres années de mandat, l'année précédent l'année de l'élection et l'année de l'élection, les dépenses d'éducation sont significativement supérieures.

    On peut également remarquer que le coefficient pour l'année d'élection est moins élevé que celui de l'année précédente. Ceci laisse entrevoir la construction d'un cycle opportuniste pour les dépenses d'éducation.

    e- les dépenses de Travail et prévoyance sociale

    La colonne 6 de notre tableau présente les estimations pour expliquer les dépenses de travail et prévoyance sociale au Cameroun. Nous observons également à ce niveau un degré assez élevé de la variable à expliquer. On observe que les variables Elec et Elec1 sont positives et significativement différents de 0. Ceci signifie que par rapport à toutes les autres années de mandat, l'année précédente de l'année de l'Election et l'année de L'élection les dépenses de travail et prévoyance sociale sont significativement supérieure. On peut également remarquer que, le coefficient pour l'année précédente.

    En effet, le niveau de ces dépenses atteint un seuil d'un maximum en t avant de diminuer

    Ceci laisse entrevoir la présence d'un cycle opportuniste pour les dépenses de travail et de prévoyance sociale au Cameroun.

    II. 2. 2- ESTIMATION DES RECETTES FISCALES
    A-Tableau récapitulatif

    Tableau 4 : estimation des recettes fiscales

    Variables dépendantes

    Variables explicatives

    Impôts

    C

    0.2 (0,1439)

    Bud (t-1)

    0.03 (0,05)

    Elec3

    0.11 (0,33)

    Elec1

    -0.09 (0,06)*

    Elec

    -0.05 (0,08)*

    Elec2

    0.20 (0,08)

    Elec4

    0.19 (0,11)

    Trend

    0.004 (0,28)

    N

    32

    0,62

    R² ajusté

    0,54

    F

    2,54

    DW

    1,92

    Source : Construit par l'auteur à partir des résultats présentés en annexes

    Significativité à 10%

    B- Interprétation des résultats

    Le tableau ci-dessus indique une estimation pour expliquer les recettes fiscales au Cameroun.

    Nous observons un degré assez élevé de la variance expliquée (R² = 0,62). On observe que les variables Elec1 et Elec2 sont significativement différents de 0. Seulement seul Elec et Elec1 sont négatives. Ce qui signifie que par rapport à toutes les autres années de mandat, l'année de l'élection et l'année précédente de l'élection est significativement supérieure par rapport aux autres années de mandat.

    Cependant, l'on remarque que le coefficient pour l'année précédente l'élection est moins élevé que celui de l'année de l'élection.

    Ce qui laisse présager la présence d'un cycle opportuniste pour les recettes fiscales au Cameroun.

    À la vue de ces estimations ci-dessus, il ressort plusieurs observations.

    Pour les principales dépenses budgétaires au Cameroun, l'on peut établir la présence du cycle opportuniste pour les dépenses d'éducation, les dépenses de travail et de prévoyance sociale, et les dépenses de santé et affaires sociales.

    Ce qui vient d'une part corroborer les résultats déjà obtenus pour ce type de dépenses au niveau de l'analyse graphique et permettre de valider la première hypothèse.

    Par contre, cette hypothèse n'est pas vérifiée pour les dépenses d'agriculture et la présence d'un cycle opportuniste des dépenses militaires n'apparaît pas très clairement. Ce qui à ce niveau aussi a été révélé par l'analyse graphique faite plus haut.

    Pour les recettes fiscales, l'on peut établir la présence d'un cycle opportuniste corroborant ainsi l'idée déjà émise par l'analyse graphique. Ainsi l'hypothèse d'une diminution des recettes fiscales l'année précédente l'année de l'élection et d'une augmentation l'année suivant l'année de l'élection se trouve validée

    L'analyse économétrique du cycle politico-budgétaire effectué dans ce chapitre nous permet de montrer que les décisions publiques au Cameroun sont influencées par l'agenda politique. Plus précisément, il apparaît que certaines de ces dépenses et recettes du budget de l'Etat camerounais connaissent des fluctuations liées aux échéances électorales. Ainsi les dépenses d'éducation, de santé, et affaires sociales, de travail et de prévoyance sociale, augmentent de manière importante lors de l'exercice budgétaire qui abrite l'élection et lors de ce dernier exercice par rapport aux autres exercices budgétaires des mandats présidentiels et législatifs. Ceci s'explique sans doute par le fait qu'une augmentation des dépenses d'éducation a un impact direct sur la population (électorat). En effet, l'on assiste à un accroissement de l'investissement dans les infrastructures scolaires à l'amélioration des conditions des instituteurs, professeurs, et enseignants.

    Dans le même ordre d'idée, les infrastructures sanitaires des recrutements du personnel sanitaire ainsi que de nouvelles politiques de lutte contre certaines pandémies s'accroissent à l'approche des élections. De plus, des mesures d'incitations du niveau d'emploi et du traitement social des travailleurs et des retraités augmentent en période électorale.

    D'un autre côté, l'analyse nous a permis de relever que les recettes fiscales diminuent considérablement un exercice après l'élection. Ce qui se traduit par une diminution de la pression fiscale lors des élections et d'une reprise plus forte de celles-ci après l'élection.

    Toutes ces mesures tant du côté des recettes que des dépenses ont pour seul objectif de rendre les gouvernants en place populaire et de conduire leurs partis ou les candidats qui les représentent vainqueurs aux élections ; rejoignant de ce fait l'idée de ENGUELEGUELE (2002) selon laquelle l'on observe généralement au Cameroun des comportements des gouvernants à la veille des élections qui tendent à prendre des mesures incitatives et favorables aux yeux de l'opinion dans un but de se maintenir au pouvoir.

    Ainsi l'existence d'un cycle politico-budgétaire opportuniste semble confirmer comme nous l'avions déjà présumé avec l'analyse graphique. De même, comme nous l'avions déjà présagé au cours de l'analyse graphique, la difficulté à établir un cycle électoral des dépenses militaires et des dépenses agricoles a persisté même au niveau de l'analyse économétrique.

    Ceci peut avoir plusieurs explications. En effet, le Cameroun étant un pays relativement stable sur le plan social et politique par rapport aux autres pays africains, une augmentation des dépenses militaires ne fournirait peut-être pas un signal positif à l'électorat puisque celui-ci se sent relativement en sécurité, les politiciens au pouvoir ne trouveraient donc pas avantage à augmenter ces dépenses, car n'ayant aucun impact favorable pour eux sur l'opinion. Tout au plus, les recrutements au sein de l'armée répondraient plus à un souci de rajeunissement, de professionnalisation et de régénération de l'armée. De même que pour les dépenses militaires, les dépenses agricoles ne se prêtent pas un cycle électoral. En effet leur montant n'est pas modifié à l'approche des élections plus qu'à d'autres années du mandat. Les explications plausibles peuvent être trouvées dans le fait que ces dépenses obéissent plutôt aux caprices de la conjoncture, le Cameroun fournissant principalement des produits de base issus d'une agriculture très peu mécanisée. Or de tels produits sont soumis régulièrement à une instabilité des termes de l'échange sur le marché mondial.

    Un tel comportement des pouvoirs publics Camerounais qui se traduit par une modification opportuniste de certaines variables budgétaires nécessite que l'on se penche sur l'instauration ou non des règles intangibles pour `lier les mains aux gouvernants Camerounais.

    CHAPITRE IV :

    CONSTITUTIONNALISME ECONOMIQUE ET CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN

    L'idée de plus en plus répandue d'un encadrement des décisions publiques en matière de politique économique en général et de politique budgétaire en particulier découle d'un constat établi depuis longtemps dans la littérature économique : la volonté délibérée des gouvernants de manipuler les grandeurs économiques notamment budgétaires en fonction de leur aspirations. Une telle attitude tranche avec celle qui devrait être normalement adoptée, c'est-à-dire prendre des décisions qui épousent les intérêts communs des agents économiques. Dès lors, la définition des normes économiques inflexibles et obligatoires à tous les gouvernants s'inscrit dans une logique de restriction de ces manipulations délibérées auxquelles se livrent les dirigeants politiques. Le constitutionnalisme économique épouse donc cette argumentation dans la mesure où il « représente un ensemble de principes de gouvernement : des restrictions effectives aux pouvoirs des gouvernants, la garantie des droits fondamentaux de la personne, l'absence de toute forme d'arbitraire » (Friedrich, 1968 ; Nwabueze, 1973). De plus comme le souligne ces auteurs, le constitutionnalisme dans son application pénètre la conscience collective des gouvernants et des gouvernés. Ceci suppose une approche démocratique, une conscience limitée du pouvoir et un sens des responsabilités de la part des gouvernants.

    De telles prescriptions trouvent également résonance au Cameroun dans la mesure où comme nous l'avons évoqué plus haut, les variables budgétaires font l'objet d'une modification en fonction de l'agenda électoral. Aussi, après avoir dans une première section, élucidé le constitutionnalisme d'un point de vu général, nous consacrons la deuxième section au cas particulier du Cameroun.

    I. CONSTITUTIONNALISME ECONOMIQUE : UNE VISION GLOBALE

    L'observation de l'évolution de la vie économique dans le monde et notamment dans les pays occidentaux consacre l'idée d'une volonté de plus en plus récurrente de l'encadrement des décisions économiques. Si au plan national, les agents économiques désirent une constance dans les décisions des gouvernants, la tendance des pays à se regrouper dans des ensembles économiques et/ou politiques accroît cette volonté de normalisation des décisions en matière de politique économique. Toutefois si le constitutionnalisme économique est souhaité et parait justifié, l'on peut néanmoins relever qu'il ne constitue pas une solution à tous les cas.

    I.1 JUSTIFICATION DES REGLES FIXES

    L'encadrement des décisions des gouvernants en matière économique à travers des règles fixes peut trouver une justification aussi bien du fait de l'infraction et l'insuffisance des règles existantes, mais également de l'incohérence temporelle et de l'inefficacité des décisions publiques.

    I.1.1 INCOHERENCE TEMPORELLE ET INEFFICACITE DES DECISIONS PUBLIQUES

    L'inefficacité reconnue à la politique budgétaire par certains auteurs économistes repose sur bons nombres de facteurs parmi lesquels l'incohérence temporelle occupe une place de choix. Selon Kydland et Prescott (1977), la notion d'incohérence temporelle développe l'idée selon laquelle même en absence d'incertitude, les dépenses qu'un agent prend en t sont parfois en contradiction avec celles qu'il avait prévu de prendre auparavant. Ce principe ne repose pas sur une hypothèse d'irrationalité des comportements et/ou des anticipations. Les décisions sont optimales au moment où elles sont prévues ou mises en oeuvre. Les dirigeants politiques n'appliquent pas toujours les décisions qu'ils annoncent. Cette inconstance dans les décisions des dirigeants politiques au cours du temps suscite beaucoup de préoccupations auprès de l'opinion publique. Un tel comportement n'engendre pas un climat économique favorable d'après Kydland et Prescott(1977).

    La justification de la prescription de règles aux gouvernants pour les obliger à respecter impérativement leurs décisions, trouve également une place favorable à ce niveau. En effet, en plus de l'insuffisance et de nombreuses violations dont elles font l'objet par les gouvernants, on peut aussi relever l'inefficacité même des décisions que prennent ces derniers en terme de politique de régulation conjoncturelle. L'incohérence temporelle des mesures publiques occupe donc une place prépondérante pour justifier l'adoption des règles fixes et explicites. Celles-ci seraient en mesure d'assurer la crédibilité et la transparence des décisions gouvernementales, et de créer des conditions favorables à la stabilité de l'économie.

    Le mérite d'une telle vision revient à Kydland et Prescott. Leurs travaux sur l'incohérence temporelle des décisions publiques « n'ont pas seulement transformé la recherche économique, mais ont également profondément influencé les politiques en matière de politique économique en générale, plus particulièrement en matière de politique monétaire (...) dans de nombreux pays les dix dernières années », d'après l'académie royale des sciences de Suède.

    En réponse à l'incohérence temporelle des décisions de politique économique, les mêmes auteurs prescrivent que les pouvoirs publics doivent engager leur crédibilité en fixant des règles de conduite qu'ils respecteront inéluctablement. Aussi doivent-ils renoncer à leur pouvoir discrétionnaire au profit des règles codifiées par des lois ou des traités. Ces prescriptions semblent être progressivement suivies ou appliquées. C'est ainsi que par exemple, le principe de l'indépendance des banques centrales apparaît de plus en plus comme une solution idoine à l'incohérence temporelle, en matière de politique monétaire. Ceci est une réaction à la tentation qui peut être grande, pour tout gouvernement (dont dépend la politique monétaire) d'opter par exemple à la veille d'élection pour une inflation surprise dans l'optique de réduire le chômage. Pour lever l'équivoque sur un tel comportement, l'exercice de la politique monétaire est confié à des institutions indépendantes du gouvernement en l'occurrence les banques centrales des pays. Ces nouvelles autorités monétaires assignent alors librement l'objectif de stabilité des prix. Un tel mouvement tend à se généraliser de nos jours dans le monde.

    Les gouvernants ou les décideurs publics ayant une propension à ne pas respecter leurs engagements, un transfert de la définition et de la conduite de la politique monétaire à une institution indépendante revêt d'après ces auteurs un avantage : la Banque Centrale annonce des objectifs fixes et immuables. Ce qui permet l'ancrage des prévisions des agents, ceux-ci sachant que cet objectif ne peut être révisé de façon surprise. Si dans le domaine monétaire l'incohérence temporelle des mesures gouvernementales peut justifier une adoption de normes intangibles et explicites, le domaine budgétaire n'est pas en reste.

    En effet, des politiques budgétaires de régulation conjoncturelle peuvent s'avérer totalement inefficaces. Si par exemple, les entreprises et les ménages utilisent au mieux l'information pour former leurs anticipations, le système économique atteint spontanément un état de plein emploi des ressources. Dès lors, toute décision budgétaire s'avère inapte à agir sur l'emploi et à créer un surcroît de bien-être social

    L'incohérence temporelle remet ainsi en cause l'efficacité des décisions publiques en matière budgétaire. D'où la nécessité d'adoption des règles intangibles. L'institutionnalisation de telles prescriptions permettrait alors d'ancrer les prévisions des agents économiques. Ainsi, en matière de finances publiques, la règle de maîtrise de déficit budgétaire impose la restriction des dépenses d'investissement, la vente d'actifs publics, et la réduction de la part relative de la dette publique.

    I.1.2 INFRACTION ET INSUFFISANCE DES REGLES

    Les expériences existantes de cycles politico-économiques en général et budgétaires en particulier dans les pays occidentaux révèlent une infraction récurrente des règles économiques prescrites. Dès lors, un encadrement des décisions des gouvernants à travers des règles semble de plus en plus prônée. Pour Niskanen (1992) les nombreuses infractions commises par le gouvernement fédéral sur la loi fiscale américaine (accroissement considérable des dépenses et de l'endettement fédéral) nécessite un nouvel ensemble de règles pour une constitution fiscale plus explicite et plus contraignante que le simple vote dans la législation courante.

    En effet, lors des 140 premières années de l'histoire américaine, le budget était contraint par deux règles fiscales contenues dans la constitution. L'une était relative à des limites formelles sur les dépenses des dirigeants. L'autre stipulait que le gouvernement devrait emprunter seulement pendant les récessions. Ce qui fait qu' à la fin des années 1920, les dépenses fédérales ne représentaient que 2,6% du PIB, et la plupart étaient relatives aux dépenses militaires. Par ailleurs la dette fédérale représentait 16% du PIB. Mais l'on a assisté ensuite à une violation récurrente de ces règles. Les dépenses fédérales dépassent donéravant 20% du PIB et ne concernent plus uniquement les dépenses militaires, mais font également part belle à d'autres dépenses telles que le paiement de transferts, etc entraînant un plus grand déficit et une augmentation de la dette fédérale. La conséquence immédiate est qu'au fil du temps, la violation des règles budgétaires originelles a conduit à la transformation de ces dernières. Dès lors, « le congrès et le président peuvent autoriser n'importe quel type de quantité de dépense et de taxes, soumises seulement aux règles de vote par la législation courante » (Niskanen ; 1992).

    Plus récemment aux USA, les objectifs de déficit fixés dans la loi de 1985 sur l'équilibre et le contrôle d'urgence du déficit (loi Gramm-Rudman) ont été largement dépassés. Dans ce contexte, la loi de mise en oeuvre du budget de 1990 (Budget Enforcement Act) à instituer des plafonds pour les dépenses discrétionnaires (couvrant la quasi-totalité des dépenses de défense, les salaires et les autres dépenses de fonctionnement gouvernementales, ainsi que beaucoup de programmes de subventions)

    Ceci vient confirmer non seulement la volonté des gouvernants à manipuler à leur guise les variables budgétaires mais, remet surtout en cause la qualité coercitive de la nouvelle loi basée sur la majorité au Congrès. Car en effet, cette nouvelle disposition ne fait suffisamment pas pression sur les décisions qui affectent les dépenses fiscales, les taxes et les emprunts aux USA. La nécessité de nouvelles règles fixes et plus contraignantes semble donc s'imposer pour faire face au laxisme des dirigeants.

    Le constitutionnalisme économique trouve également une place favorable dans le cadre de l'Union Européenne. En effet, au début des années 1990 les dettes publiques et les soldes budgétaires accusaient des variations considérables d'un Etat membre à l'autre et il en était de même des taux d'intérêt. Le traité de Maastricht et le Pacte de stabilité et de croissance institué en 1997 établissent les conditions nécessaires à la préservation de la discipline budgétaire dans le cadre de la monnaie unique. Ce traité fixe le seuil du déficit pour l'entrée en Union monétaire à 3% du PIB, ce qui permet une convergence à long terme de la dette aux alentours de 60% du PIB. Le pacte qui a introduit de possibles pénalités financières pour le non respect du plafond de déficit, exige aussi que les positions budgétaires soient « proches de l'équilibre » ou excédentaires à moyen terme, ce qui conduirait asymptotiquement à une dette nulle. En outre, des effets externes ou des débordements comme le creusement du déficit budgétaire de l'un des membres de l'Union Monétaire entraîne une augmentation du taux d'intérêt réel de long terme que tous les gouvernements doivent acquitter sur leur dette publique ainsi qu'une dépréciation de l'Euro.

    L'analyse classique des externalités nous enseigne qu'il est possible grâce à la mise en place d'institutions favorisant la coopération d'une part, empêchant ou rendant coûteuse des stratégies opportunistes d'autres part, d'atteindre des équilibres plus favorables au sens de Pareto. Ainsi face aux effets de débordement négatifs des règles telles que des règles budgétaires adoptées dans l'Union Monétaire Européenne pénalisent donc les pays incriminés. Toujours dans le cas de l'UME, l'accent mis sur les risques que présenteraient les stratégies individuelles nuisibles c'est à dire celles qui engendre les effets de débordement négatifs a conduit à mettre en place presque exclusivement des institutions visant à empêcher les membres de nuire.

    Ainsi donc, le constitutionnalisme a facilité l'intégration régionale en Europe occidentale en consacrant dans chaque pays la notion d'un Etat limité dont la volonté pourrait être assujettie à une autorité supranationale dans les domaines spécifiques d'intervention. Au total, une normalisation des décisions économiques semble justifiées autant pour un pays (USA) que dans le cadre d'une communauté économique voire monétaire comme l'Union Européenne, pour faire face aux violations récurrentes des règles économiques par les décideurs publiques.

    I.2 CONSTITUTIONNALISME ECONOMIQUE : UNE APPROCHE DISCUTEE

    L'infraction récurrente des règles économiques, conséquence de l'incohérence temporelle des décisions des gouvernants, d'une part et, d'autre part, de l'insuffisance des moyens de pression sur les décideurs publics, a éveillé la volonté de certains auteurs à préconiser aux pouvoirs publics des règles. Celles-ci se traduisent notamment par une maîtrise de l'inflation et du déficit public. Cependant, des voix s'élèvent de plus en plus pour remettre en cause la pertinence des normes fixes. Cette remise en cause peut se traduire par l'inefficacité de ces prescriptions, ou même par leur caractère non démocratique.

    Dans les pays occidentaux, et les pays Africains de la Zone Franc, l'on assiste à une politique économique pratiquée avec inflexibilité et qui est régie par des normes fixes qui traduisent la recherche de la crédibilité. C'est ainsi que, les deux principaux instruments de politique économique sont confinés dans une logique d'atteinte des objectifs intermédiaires (la maîtrise du déficit et le contrôle de l'inflation). La politique monétaire et la politique budgétaire sont élaborées dans les buts principaux de maîtrise de ces objectifs.

    Pourtant, même au niveau interne, des auteurs comme Taouill (2005) dans son analyse sur l'économie marocaine aux prises avec des règles fixes, montre que ces objectifs intermédiaires sont atteints au détriment de l'objectif final qui est la croissance. Même dans un cadre communautaire à l'instar de l'Union Européenne des auteurs comme Le Cacheux (2005) relève des externalités négatives qui traduisent les coûts supportés par l'application des règles fixes. Pour lui, « le respect du pacte de stabilité fait supporter aux gouvernements des Etats membres des coûts individuels de divers types -coûts politiques et de réputation, coûts en terme de contraintes pesant sur les objectifs spécifiques de chaque gouvernement, coût résultant de la moindre souplesse de la politique budgétaire, stabilisateur automatique inclus,... qui expliquent qu'en dépit des risques de sanction, pécuniaires ou de réputation notamment, certains choisissent d'enfreindre la règle ».

    L'exigence d'un solde budgétaire de base supérieur ou égale à 0 ou du moins d'un déficit budgétaire ne pouvant excéder 3% du PIB, est une règle destinée à assurer la maîtrise des finances publiques. Une telle rigueur de la politique budgétaire impose la restriction des dépenses d'investissements, la vente d'actifs publics, et la diminution relative de la dette publique. Ce faisant, « elle sacrifie la qualité des finances au profit d'une approche comptable centrée sur la gestion du solde budgétaire » (Taouil, 2005).

    En cantonnant la politique budgétaire à cette gestion, les pouvoirs publics Européens (dans le souci du respect de la règle communautaire) se privent de leur fonction de régulation. En s'en tenant à cette discipline budgétaire quelque soient les chocs qui affectent l'économie, ils s'abstiennent d'utiliser le budget à des fins conjoncturelles en vue de réduire l'ampleur des fluctuations du niveau de l'activité. Ainsi dans le cadre d'une croissance faible, le strict respect de la discipline budgétaire impose des mesures de contraction de la demande globale qui accentue la logique récessive.

    La règle budgétaire peut également apparaître contre productive. La facilité en matière de finances publiques permet d'adapter la décision aux évolutions conjoncturelles. Dans un contexte de sous-emploi ou de chômage dans l'Union Européenne, une politique expansive est à même de participer à la résorption du déficit de la demande sans générer nécessairement une hausse des prix. La réduction de la part relative de l'endettement extérieur et l'existence de liquidités oisives augmentent la marge de manoeuvre quant à la gestion des finances publiques. La pratique d'un déficit de régulation, financé par l'emprunt interne est de nature à avoir une efficacité à la fois macroéconomique et microéconomique. Ce déficit est en mesure de rehausser significativement le niveau d'activité, de soutenir la demande auprès du secteur privé, d'améliorer les perspectives de profit des entreprises, et d'engendrer les ressources nécessaires à son autofinancement.

    De plus,l' expérience démontre que les catégories de règles susceptibles de s'avérer utiles dans une phase donnée de réduction du déficit peuvent ne plus suffire à un stade ultérieur. Les évolutions récentes ont mis en lumière un certain nombre d'inconvénients et de carences dans la mise en oeuvre. Aux USA, le cadre a été de plus en plus contourné et les règles sont arrivées à expiration sans être prorogées. Dans la zone Euro, le cadre est actuellement remis en question et le problème de la conception et de l'application optimale des règles occupe le devant de la scène. Les USA, engrangeant des excédents, la contrainte des plafonds de dépenses a été levée par une série d'ouverture de crédits d'urgence en 1999 et 2000, puis par une révision à la hausse des plafonds pour 2001 et 2002. Dans plusieurs pays Européens, le plafonnement du déficit n'a pas empêché la rechute décrite plus haut et la prescription d'un budget « proche de l'équilibre ou excédentaire » n'a pas été plus efficace.

    Au total, les effets de règles et budgétaires intangibles peuvent engendrer un biais restrictif qui se manifeste dans une croissance atone, accompagnée d'un chômage de masse dans un contexte de stabilité inefficace. Dans ce contexte donc, on ne peut que s'interroger sur la pertinence de l'adoption des règles fixes dont le coût en terme de croissance et d'emploi soit élevées.

    A la suite de l'inefficacité plausible des règles fixes pour le Cameroun, nous pouvons également relever que ces normes n'obéissent à aucun processus démocratique. En effet, ces prescriptions sont l'oeuvre de certains économistes qui conseillent un strict encadrement des décisions publiques. De telles directives font que les décisions qui engagent l'organisation institutionnelle, les objectifs et les instruments de la politique économique sont soustraits aux délibérations publiques. L'immunité dont jouissent par exemple les règles d'un plancher de déficit à 3% dans l'Union Economique et Monétaire est exemplaire de ce déficit démocratique. Ce qui fait dire à Taouill (2005) que : "La soumission de la politique à des règles à priori implique un déni de la démocratie 

    Il n'est cependant pas toujours aisé d'établir une similitude entre la volonté des bureaucrates et celle du peuple sur certaines questions sociales. Le rejet de la constitution Européenne est un exemple patent du fossé qui peut séparer les aspirations du peuple des conclusions parfois trop concessionnelles et techniques de la bureaucratie. De plus, même si le gouvernement est un produit des élections (c'est à dire de la volonté du peuple), la théorie sur les cycles politico-économiques et surtout l'incohérence temporelle des décisions prises par les décideurs publics montrent une inadéquation entre les promesses et les réalisations.

    Les idées économiques n'agissent pas uniquement sur les ressources et les revenus des citoyens, mais aussi sur leurs droits de liberté. Pourtant comme le souligne Sen cité par Taouill (2005) « on ne peut trancher les dilemmes sociaux qu'à travers des processus de choix publics fondés sur la participation, le dialogue, les débats ouverts... Le pilotage unilatéral y compris s'il est le fait du meilleur des experts, ne saurait en soit constituer une solution » L'économie est alors trop importante pour être laissée aux seuls experts.

    C'est ainsi que se penchant sur l'indépendance des banques centrales comme préalable de la crédibilité de la politique monétaire, Hetzel (1990) pense que « la politique monétaire émerge comme partie du processus général des décisions démocratiques plutôt que des paradigmes économiques des économistes ».Toujours sur cette autonomie des banques centrales, Aubin (1999) établit que «  la politique monétaire d'un pays doit demeurer compatible avec un équilibre du système social, dans ces dimensions à la fois économiques et politiques. L'indépendance de la banque centrale qui reste toujours conditionnelle à un état de la législation n'est peut-être pas tant alors la cause d'une plus grande stabilité des prix que le signe d'une détermination de la société à renoncer aux facilités de politiques monétaires plus laxistes ».

    En somme donc, la recherche de la crédibilité qui sous-tend l'adoption de règles peut ne pas être établie dans la mesure où le cantonnement de la politique budgétaire peut s'avérer inefficace car où la maîtrise du déficit budgétaire et le contrôle de l'inflation peuvent être atteins au détriment de la croissance et de l'emploi. En outre, une norme immuable du déficit budgétaire ne pouvant excéder 3% par exemple, dictée sans consultation préalable des populations sous quelque forme que ce soit, couve en elle un déficit démocratique.

    L'observation dans un cadre global de l'impérativité d'un constitutionnalisme économique tend à montrer que celui-ci est justifié. Toutefois, certains économistes estiment que la définition de normes économiques devraient épouser les particularités des pays ou groupements de pays pour être efficace et notamment, la nécessité d'un soutient du développement économique qui passe par une stimulation de la croissance à la croissance et à l'emploi pour les pays comme le Cameroun.

    II- DECISIONS PUBLIQUES AU CAMEROUN : LA NECESSITE D'UNE NORMALISATION

    L'existe au Cameroun d'un cycle politico-budgétaire pour certaines dépenses rejoint dans une certaine mesure ce qui se passe généralement dans les pays occidentaux, c'est à dire que les dirigeants politiques prennent des décisions au gré de leur volonté. En effet, pendant l'année de l'élection, des hommes politiques lorsqu'ils veulent agir dans le sens de leur intérêt manipulent des variables budgétaires telles que les dépenses totales, les paiements de la sécurité sociale, les dépenses du secteur agricole, les transferts (Blais et Nadeau ; 1992). Au Cameroun, nous avons pu établir que ce sont les dépenses et recettes qui ont une importance capitale aux yeux des électeurs qui sont manipulés.

    Ce type de comportement suscite le désir de leur appliquer des règles intangibles en matière de politique économique en général et, budgétaire en particulier. Ceci à cause de la violation récurrente et l'insuffisance des normes déjà existantes d'une part et, d'autre part, à cause de l'inefficacité même des décisions publiques au cameroun. Toutefois, si ces règles doivent être coersitives, elles doivent intégrées les particularités Camerounaises et donc être adaptées à l'objectif de développement économique du pays.

    I.1- VIOLATION RECURRENTE ET INSUFFISANCE DES REGLES EXISTANTES AU CAMEROUN

    La variation de certaines dépenses et recettes budgétaires au Cameroun nous conduit à établir un cycle politico-bugétaire. Il apparaît que :

    - Pour les dépenses d'éducation, on observe de fortes variations des dépenses d'éducation lors des exercices correspondant avec la période électorale. Ces dépenses ont tendance à augmenter en période électorale et diminuer en milieu de mandat électoral. L'on peut noter par exemple un fort accroissement de plus de 60% de ces dépenses lors de l'exercice 72/73 (élection législative de mai) et une forte diminution de près de 20% l'année d'après.

    - Pour les dépenses de santé et affaires sociales, la quasi majorité des exercices budgétaires coïncidant avec les échéances électorales connaissent une variation positive de ce type de dépense. . A titre d'exemple pour les exercices 74/75, 79/80, 96/97 on a des augmentations de l'ordre de 13%, 38%, 25% respectivement. Par contre, les exercices hors mandat électoral constituent des périodes de diminution des deux types de dépenses (diminution de moins de 10% en 76/77).

    - Pour les dépenses de travail et de prévoyance sociale, lors de la plupart des exercices précédant ou coïncidant avec une élection, on observe une augmentation de ces dépenses au détriment des autres exercices budgétaires se situant après ou en milieu de mandat. A titre d'exemple, les exercices 84/85, 91/92, 92/93, 96/97 et 97/98 connaissent une variation positive des dépenses, alors que les exercices tels que 78/79, 90/91, et 95/96 (une baisse de près de 10%) connaissent des variations négatives puisque ce sont des exercices hors mandats électoraux

    - Pour ce qui est des recettes fiscales, entre l'exercice 88/89 et l'exercice 92/93, on observe une diminution de Près de 50%. De même entre l'exercice 95/96 et l'exercice 96/97, on a une diminution de près de 10% par contre, l'exercice 84/85 connaît un pic d'augmentation de plus de 60% car on se trouve ici juste après une échéance électorale.

    Ce qui donne lieu à un non respect des engagements que prennent les politiciens auprès des électeurs à la veille des élections. De plus, une augmentation des dépenses publiques ou une diminution des recettes budgétaires à l'approche des élections sans fondement économique, fait supporter de divers coûts. Parmi ceux-ci, l'on peut relever un possible accroissement du déficit budgétaire financer à court terme par un endettement supplémentaire de l'Etat dû à un non respect de paiement de la dette en cours ou encore à un relèvement des taxes et des impôts après les élections.

    L'accroissement du déficit public et celui de la dette publique qu'a connu le Cameroun au plus fort de la crise économique, c'est à dire la période 1986 jusqu'à 1994, ne se justifie pas seulement par la baisse des cours des principales matières premières et la dépréciation du dollar. En effet, des rigidités sociales et politiques dont certaines persistent encore actuellement à un moindre degré, peuvent expliquer les difficultés rencontrées par un gouvernement politiquement contesté pour mettre en oeuvre l'ensemble des reformes préconisées, notamment celles ayant un coût social élevé.

    Par exemple, les prix officiels aux producteurs de cacao, n'ont pu être diminués que lors de la campagne 1989/90, soit deux ans après la chute des cours. La masse salariale de la fonction publique n'a été réduite qu'en 1993(de 4 à 20% en Janvier et de 50% en Novembre), lorsqu'il s'est avéré que le budget de l'Etat ne pourrait plus régler les échéances de la dette aux bailleurs de fonds multilatéraux. De même, en ce qui concerne l'emploi, on a continué d'augmenter les effectifs de l'administration publique entre 1985/86 et 1991/92(exercices précédant les élections) en recrutant de jeunes diplômés (ce qui avec 10% d'effectif supplémentaire en faisait le seul secteur en croissance) et on a préféré réduire le traitement des fonctionnaires plus tôt que les effectifs.

    Une telle absence de discipline dans la gestion publique a occasionné la suspension du Cameroun des PAS des institutions de Bretton Woods en 1992 d'une part, et d'autre part les Etats-Unis et l'Allemagne ont interrompu leur aide. Si les accords que le Cameroun passe avec les bailleurs de fonds internationaux comportent des sanctions en cas de leur non respect, ceci n'est pas le cas sur le plan interne. En effet, comme dans bon nombre de pays au monde, il n'existe pas au Cameroun de règles fixes suffisamment explicites et contraignantes pour les gouvernements

    L'insuffisance de la règle budgétaire, plus connue sous le nom de loi de finances réside entre autre dans la manière dont elle est votée ou adoptée au niveau de l'Assemblé nationale. Car, bien qu'elle soit soumise au vote des députés, contrairement aux USA ou l'on a besoin de deux tiers des membres du Congrès pour adopter les textes, au Cameroun l'alinéa 1 de l'article 19 de la constitution établit que «  L'Assemblée Nationale adopte des lois à la majorité simple des députés ». Ceci donne libre cours à l'adoption du budget conforme aux désirs des gouvernements en place, pour peu que la majorité simple des députés de l'Assemblée Nationale soit constituée en totalité par des membres du parti politique au pouvoir. Même si l'unanimité de l'hémicycle était requise pour l'adoption des lois, certes la marge de manoeuvre serait plus réduite mais l'on peut toujours imaginer une situation ou, l'Assemblée Nationale soit constitué en totalité des députés d'un même parti. A cet effet, la règle de la majorité ne limite pas suffisamment l'action gouvernementale sur les questions budgétaires.

    En plus de la violation récurrente et de l'insuffisance des normes économiques actuelles au Cameroun, l'on peut également remettre en cause l'efficacité même des décisions des gouvernements au Cameroun. La manipulation de certaines données budgétaires peu constituer une décision inefficace, car si pour former leur anticipation, les entreprises et les ménages utilisent au mieux l'information, le système économique Camerounais peut atteindre spontanément un état de plein emploi des ressources. Ce qui rendrait donc par exemple improductive la politique d'augmentation des dépenses d'éducation, de santé, d'emploi et de prévoyance sociale, ou encore une diminution des recettes fiscales à l'approche des échanges électorales au Cameroun. Ceci découlant du fait que les agents privés au Cameroun peuvent effectuer des prévisions bien informées des évènements futurs en s'appuyant sur une connaissance pertinente des rouages des l'économie Camerounaise. Dès lors que l'on considère qu'ils peuvent anticiper le comportement du gouvernement, les actions publiques ne sont pas temporellement cohérentes. Ils peuvent ainsi envisager que le décideur public est porté à enfreindre ses engagements et réviser en conséquence leurs décisions. D'où la nécessité d'adoption des règles fixes telle que la règle de maîtrise du déficit budgétaire pour faire face aux violations et à l'inefficacité des règles existantes.

    II.2 DES REGLES PLUS CONTRAIGNANTES ET PLUS ADAPTEES AU CONTEXTE CAMEROUNAIS

    La violation permanente des règles économiques au Cameroun, conséquence du non respect des engagements pris par les pouvoirs publics auprès de l'électeur donne lieu à un environnement économique plus ou moins incertain. Dans un tel contexte, le constitutionnalisme économique semble trouvé sa place pour répondre à l'insuffisance des règles existantes, l'on pourrait mettre en place des règles plus contraignantes et mieux adaptées au cas Camerounais qui ne sont pas un frein aux objectifs de développement.

    L'action gouvernementale sur la monnaie a commencé à être limitée depuis par la création en 1972 de la Banque des Etats de l'Afrique Centrale (BEAC). L'article 1er des statuts de la BEAC établit que la Banque Centrale définit et conduit la politique monétaire de tous les Etats membres avec pour objectif la stabilité de leur monnaie commune, le FCFA. L'indépendance reconnue à la BEAC, ainsi que l'évolution de sa réglementation au cours du temps limite sans cesse l'influence des gouvernements. La programmation monétaire par exemple, en cours au Cameroun depuis 1992 constitue une nouvelle avancée dans ce sens. Désormais l'augmentation de la masse monétaire est conditionnée par la création de richesses dans chaque Etat membre, dont le Cameroun. Dans ce contexte, il est difficile voire impossible aux dirigeants politiques camerounais d'agir volontairement sur la masse monétaire aux fins électoralistes.

    Comme autre règles, l'on pourrait par exemple définir dans la constitution une loi qui fixerait les modalités d'augmentation et de réduction des dépenses budgétaires, qui soit immuable et non adaptable aux volontés des gouvernants, mais plutôt à des situations précisées à l'avance dans la constitution.

    Les règles communautaires connues sous le nom de critères de surveillance multilatérale au sein de la CEMAC, peuvent par exemple être érigées en lois imposables à tout gouvernement au Cameroun. Ces lois seraient en plus encadrées par des sanctions en cas de leur violation par le gouvernement. En outre, la modification éventuelle d'un de ces critères ferait désormais l'objet d'un amendement préalable de la constitution.

    Ainsi, les critères suivants pourraient être requis comme constitutionnelles et leur violation passible de sanctions pour les auteurs :

    - Le solde budgétaire de base rapporté au PIB nominal supérieur ou égal à 0

    - L'inflation maintenue à moins 3% par an

    - La non accumulation d'arriérés de paiement extérieure sur la gestion de la période courante

    -L'encours de la dette intérieure et extérieure rapporté au PIB minimal n'excède pas 70%.

    Auxquels l'on ajouteraient « les critères du second rang » du pacte de convergence, de stabilité de croissance entre les Etats membres de UEMOA suivants :

    - La masse salariale n'excède pas 35% des recettes fiscales

    - Les investissements publics financés sur ressources internes doivent être supérieurs ou égaux à 20% des recettes fiscales

    - Le déficit extérieur courant hors dons/PIB nominal n'excède pas 5%

    - Les recettes fiscales son supérieures à 17% du PIB nominal.

    La règle du déficit budgétaire contenu dans les critères de convergence impose la restriction des dépenses d'investissement, la vente d'actifs publics et la réduction de la part relative de la dette publique. Une telle discipline budgétaire peut certes priver le décideur public camerounais de sa fonction de régulation, mais elle peut permettre par contre de limiter le laxisme dans la gestion publique et surtout des manipulations opportunistes du budget , bien que  la pilule soit amère à avaler pour les autorités camerounaises .

    L'exemple des réformes économiques que le Cameroun a conclus avec les bailleurs de fonds et notamment les institutions de Bretton Woods depuis bientôt 20 ans, montre toute la difficulté qu'éprouvent les gouvernements successifs à tenir leur engagement. D'ailleurs la coïncidence entre certaines années d'élection au Cameroun (1992 à 2004, par exemple) et la mise « off-track » du pays des programmes du FMI et la Banque Mondiale  les mêmes années , restent très révélatrice. Cependant, l'avantage de ces accords est qu' à tout moment le pays peut-être sanctionné par une exclusion de ces programmes. Et par ricochet, se voir priver du financement des autres bailleurs de fonds bilatéraux (France, Allemagne, Union Européenne...) pour qui, le respect des accords du FMI est la condition sine qua non d'un éventuel appui. Ce qui met constamment le pays sous pression et contraint l'action gouvernementale.

    L'on pourra alors imaginer que de telles pressions soient requises au niveau des lois constitutionnelles du pays. Ce qui obligerait les gouvernements à respecter leur engagement. De la sorte, leurs décisions ne seraient plus temporellement incohérentes et ne constitueraient plus une entrave aux prévisions des agents économiques. L'on s'avancerait alors vers un environnement économique stable dicté par des prévisions des agents bien informés. Cependant, si ces normes doivent lier les mains aux dirigeants Camerounais, elles ne doivent pas pour autant d'une part freiner le développement économique du pays, et d'autre part ne doivent pas être dénués de toute saveur démocratique. C'est ainsi que la politique budgétaire ne doit pas seulement se confiner à atteindre les objectifs intermédiaires comme la maîtrise du déficit, mais doit également atteindre l'objectif final qui est la croissance. Même dans le cadre du respect des critères de surveillance multilatéral de la CEMAC les règles fixes doivent d'abord être ériger pour satisfaire l'objectif premier du pays à savoir le développement économique et non l'entraver.

    A titre d'illustration La définition d'une cible d'inflation à 3% par la BEAC pour l'ensemble des pays membres de la zone CEMAC traduit l'engagement en faveur de la stabilité des prix définie comme l'objectif prioritaire de la Banque Centrale. Une telle règle peut s'avérer inefficiente.

    Le niveau élevé des taux d'intérêt réels imposés par l'objectif de la stabilité des prix produit un double impact négatif sur l'investissement privé d'une part; il décourage de part son impact sur le coût du crédit, les projets de développement des capacités de production. D'autre part, il leste les charges financières des entreprises en mettant certaines dans l'incapacité d'honorer leur dette. Conséquence, de nombreuses petites et moyennes entreprises au Cameroun éprouvent des difficultés financières récurrentes qui donnent lieu soit à une évasion fiscale de celles-ci soit à leur disparition pure et simple. Dans ces conditions, les banques sont amenées à constituer des provisions sur créances douteuses et à rationner le crédit en imposant des taux d'intérêt exorbitants. D'où une situation de surliquidité des banques actuellement d'une part, et d'un déplacement de l'activité bancaire vers des opérations de banque moins traditionnelles : assurance, transfert d'argent ..., d'autre part.

    Par ailleurs, « loin d'être vertueuse, une inflation trop basse est un obstacle à l'ajustement » Taouill (2005). De ce fait, les entreprises, soumises à la concurrence par les prix sont amenées faute de pouvoir ajuster les coûts de production, à réduire l'emploi. La crédibilité poursuivie par l'engagement en faveur de la stabilité des prix peut donc s'avérer inefficace, et les retombées escomptées en termes de surcroît d'investissement et de croissance, amoindries. Ceci du fait d'une demande d'investissement insuffisante entraînant une diminution de la formation brute du capital fixe ; d'autant plus que celle-ci dépend surtout de l'investissement étranger dopé par des privatisations en cours au Cameroun.

    Un tel état de choses peut également avoir des conséquences sur l'investissement privé national. Celui-ci ne serait pas entravé par le brouillard des signaux du marché par l'inflation, mais par la gestion restrictive de la demande globale. Le ciblage de la stabilité des prix, quelque soit la conjoncture, peut créer des rigidités qui entraînent un sacrifice en terme de production. Dans une situation de sous utilisation des ressources financières telles qu' au Cameroun, les autorités monétaires peuvent user de leur pouvoir discrétionnaire en stimulant l'offre de crédit. Une inflation modérée a l'avantage d'alléger les frais financiers à travers la réduction des taux d'intérêt réels et d'accroître la production et la demande de travail. Une règle de ciblage souple de l'inflation peu apparaître mieux adéquate à la résorption des chocs de surliquidité bancaire en cours, et un soutien aux prêts bancaires à l'équipement. Ces discrétions apparaissent d'autant mieux appropriées qu'il n'y a pas au regard de la faiblesse de la demande globale actuelle, de tensions sur le prix qui justifient un objectif strict en matière monétaire. Il apparaît alors que bien que les pouvoirs publics Camerounais soient dépossédés de la définition et de la conduite de la politique monétaire, l'adoption des règles fixées en matière monétaire par la BEAC ne constitue pas une garantie quant à la santé de l'économie.

    De telles réserves prouvent bien que la définition des normes intangibles en matière économique au Cameroun doit tenir compte des particularités du pays et surtout de l'objectif primordial qui est le développement économique, qui nécessite une croissance soutenue et une stimulation de l'emploi.

    Notre volonté dans ce chapitre était d'évoquer la nécessité d'un constitutionalisme économique au regard du cycle politico-budgétaire que nous avons pu établir dans les chapitres précédant. Dans un premier temps, l'idée d'une constitution économique aboutit à une application de plus en plus accrue de celui-ci et qui semble être justifié dans bon nombre de pays dans le monde, notamment aux USA et dans l'UE. Cependant, certains auteurs économistes estiment que l'encadrement des décisions publiques n'est pas toujours efficace et porte en lui un déni de démocratie. Au Cameroun, la nécessité de la normalisation économique trouve son explication dans le contexte de notre travail au niveau de la manipulation des variables budgétaires aux fins électoralistes par les dirigeants politiques camerounais. Cependant, il nous parait utile de rappeler que si les règles intangibles sont indispensables au fonctionnement, de l'économie Camerounaise tant sur le plan national que dans le cadre de la CEMAC, ces règles doivent toutefois tenir compte des objectifs de développement économique auxquels aspire le pays.

    Au terme de cette deuxième partie de notre travail, nous avons pu mettre en relief le cycle politico-budgétaire au Cameroun de façon effective. L'analyse de ce dernier nous a conduit à travers un modèle économétrique sur le cas Camerounais (chapitre3), de ressortir les variables budgétaires qui sont manipulées aux fins électoralistes et constituent dans ce sens les déterminants du cycle politico-budgétaire au Cameroun. Cette analyse s'est poursuivie dans la nécessité d'édictions de règles inflexibles en matière économique en général et en matière budgétaire en particulier au Cameroun. Ce qui a été fait dans le chapitre 4 intitulé constitutionnalisme économique et cycle politico-budgétaire au Cameroun.

    CONCLUSION GENERALE

    Parvenu au terme de notre recherche, il convient, d'en rappeler les principales articulations. De prime abord, nous nous sommes employés à présenter la politique budgétaire et le cycle électoral au Cameroun comme deux notions. A l'avenant, les comportements de la politique budgétaire au Cameroun au cours de la période 1970-2002 nous ont fourni des perspectives de lecture des décisions budgétaires sous la contrainte de l'indécision électorale au Cameroun. Puis il nous a paru utile pour les soins de la recherche de procéder à une analyse graphique de certaines variables budgétaires comme cadre méthodologique devant offrir à notre travail sa justification scientifique. Enfin, l'analyse d'un modèle économétrique a permis de valider nos hypothèses et de faire émerger un certain nombre de conclusions. En réponse à ces conclusions, nous avons évoqué la pertinence d'un encadrement des décisions publiques au Cameroun par des règles.

    Ainsi, peut-on établir une relation périodique entre les élections et le budget au Cameroun ? Autrement dit, peut-on parler de l'existence d'un cycle politico-budgetaire au Cameroun ? Telle était notre préoccupation dans ce travail qui repose sur un essai d'analyse de la gestion publique au Cameroun.

    L'objectif de notre recherche a tout simplement consisté à révéler l'action du cycle électoral sur les variables budgétaires au Cameroun.

    Afin d'atteindre cet objectif, nous avons émis deux hypothèses :

    § H1 : les dépenses budgétaires qui ont un impact direct sur les électeurs augmentent l'exercice budgétaire correspondant à l'année de l'élection et diminuent l'exercice d'après.

    § H2 : Les recettes fiscales diminuent l'exercice budgétaire de l'année de l'élection et l'exercice précédent, et augmente l'exercice suivant

    A l'issue de l'analyse d'un certain nombre de variables, exprimant les données collectées par le biais de la consultation des documents portant des données statistiques (annexes) sur les dépenses et recettes budgétaires, et les échéances électorales au Cameroun sur la période 1970-2002, les résultats ont été observés suivant une estimation par la méthode des moindres carrés ordinaires. L'estimation a porté sur 6 relations ou équations :

    § Une estimation des dépenses militaires ;

    § Une estimation des dépenses d'agriculture ;

    § Une estimation des dépenses d'éducation ;

    § Une estimation des dépenses de santé et affaires sociales ;

    § Une estimation des dépenses de travail et de prévoyance sociale ;

    § Une estimation des recettes fiscales

    Il découle de ces 6 estimations l'existence d'un cycle opportuniste pour les dépenses d'éducation, de santé et affaires sociales, ainsi que de travail et de prévoyance sociale. La validité d'un tel cycle pour les dépenses agricoles et militaires s'est avérée peu évidente du fait de la non significativité des coefficients des variables explicatives pour ces dépenses, bien que ces coefficients soient tous positifs.

    Au vu de nos résultats nous pouvons dire que les dirigeants politiques manipulent les variables budgétaires en fonction des échéances électorales. Aussi, l'on observe un accroissement des dépenses de santé, d'éducation, de travail et de prévoyance sociale une année, voire deux années avant les élections, accroissement qui atteint son pic l'année de l'élection pour diminuer progressivement l'année suivant l'élection ; une diminution des recettes fiscales une année avant les élections et une augmentation l'année après les élections. De ce fait, le niveau de ces dépenses budgétaires est significativement supérieur l'année de l'élection et l'année avant l'élection par rapport aux autres années des mandats législatifs et présidentiels, et le niveau des recettes budgétaires significativement inférieur pendant ces mêmes années. Ceci corrobore l'idée des partisans des cycles opportunistes pour qui les hommes politiques prennent des décisions économiques qui épousent les aspirations des électeurs pendant les échéances électorales ; rejoignant de ce fait les conclusions de l'étude menée sur 23 pays Africains (dont le Cameroun) sur la période 1980-1990 par Morrisson, Lafay et Dessus (1993). Selon eux, «les hommes politiques adoptent des comportements opportunistes à l'approche de chaque élection (présidentielle, municipale ou législative) ». 

    Par ailleurs, les résultats issus de l'estimation des dépenses d'emploi et de prévoyance sociale font ressortir un cycle opportuniste plus robuste. Un accroissement très fort des dépenses de travail et de prévoyance sociale est observée l'année des élections pour une chute importante des mêmes dépenses l'année suivant les élections. Cependant, il est à noter que l'environnement Camerounais ne prête pas à une possibilité de cycle partisan dans la mesure où l'on ne relève pas d'une part, une véritable scission idéologique entre parti au pouvoir et opposition et d'autre part, une véritable alternance politique.

    De tels résultats nous ont poussé à évoquer une éventuelle normalisation de l'action publique au Cameroun qui puisse empêcher les politiciens d'agir à leur guise sur les variables budgétaires. Il en découle que la constitutionnalisation économique est certes susceptible de mettre fin à une gestion opportuniste des finances publiques au Cameroun, rejoignant ainsi la prescription des normes flexibles pour l'économie. Prônée par les lauréats 2004 du prix Nobel d'économie Kydland et Prescott. Pour ces auteurs, les pouvoirs publics doivent leurs pouvoirs discrétionnaires au profit de règles codifiées par des lois et des traités. Pour remédier donc à l'incohérence temporelle des décisions de politique économique au Cameroun, le gouvernement doit engager sa crédibilité en fixant des règles de conduite qu'il doit impérativement respecter.

    Des contraintes institutionnelles permettraient alors d'ancrer les anticipations des agents économiques. La définition de la politique économique en fonction des règles à l'instar d'une cible d'inflation à 3% et de la limitation du déficit public à 3%, est sensée faciliter les anticipations en créant un environnement stable. Cependant, ces prescriptions ne semblent pas constituer une solution pour certains auteurs, car d'une part, elles peuvent être inefficientes et d'autre part constituer une dictature ` de l'expertise sur la démocratie'. S'agissant de l'inefficience, Taouill (2005) en se basant sur l'économie Marocaine établit que l'application des règles intangibles est largement inefficiente, la maîtrise du déficit et le contrôle de l'inflation sont atteint au détriment de la croissance dans ce pays. Sur le plan démocratique, les critères de surveillances multilatérales établies dans la zone CEMAC, confèrent aux règles d'inflation à 3% et de solde primaire positif ou nul une immunité qui comporte un déficit de démocratie. Car ces règles sont exemptes de tout débat démocratique au sein des pays membres de la CEMAC. Au total donc, l'existence établit des cycles politico-budgétaires au Cameroun ouvre une fenêtre sur la qualité des règles économiques applicables aux pouvoirs publics Camerounais.

    Le présent travail de recherche ne saurait prétendre avoir épuisé son sujet. Comme toute entreprise d'Humain, il recèle un certain nombre d'insuffisances qui contribuent à le rendre perfectible et à donner carrière à d'autres travaux. Parmi ces insuffisances nous relevons le déficit de statistiques sur la période 1960-1970, l'absence d'une fonction de popularité pour bien juger les résultats des élections, la non coïncidence entre l'exercice budgétaire et l'année civile. Par ailleurs, la timidité des recherches sur les cycles politico-économiques dans les pays africains et donc la quasi absence d'éléments comparatifs dans notre contexte font largement dépendre notre mémoire d'une littérature encore fortement extravertie.

    En définitive, nous souhaiterions que ce premier travail de recherche qui constitue un essai d'analyse de la gestion publique au Cameroun suscite beaucoup d'engouement, d'envie et d'intérêt de notre part pour approfondir les recherches dans ce domaine. /.

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    TABLE DES MATIERES

    DEDICACES.................................................................................................................I

    REMERCIEMENTS........................................................................................................II

    SOMMAIRE ............................................................................................................ ..III

    RESUME.................................................................................................................. IV

    ABSTRACT..................................................................................................................V

    LISTES DES SIGLES ET DES ABREVIATIONS...................................................................VI

    LISTE DES GRAPHIQUES ............................................................................... ............ VII

    LISTE DES TABLEAUX............................................................................................. VIII

    INTRODUCTION GENERALE ...........................................................................................1

    PREMIERE PARTIE : 11

    POLITIQUE BUDGETAIRE ET CYCLE ELECTORAL: DEUX NOTIONS INDISSOCIABLES 11

    CHAPITRE I : 13

    LA POLITIQUE BUDGETAIRE : FONDEMENT DU CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN 13

    I : LA MISE EN OEUVRE DE LA POLITIQUE BUDGETAIRE AU CAMEROUN 13

    I.1 LA POLITIQUE BUDGETAIRE UN INSTRUMENT SOUMIS A PLUSIEURS CONTRAINTES 13

    I.1.1 INSTRUMENT DE POLITIQUE ECONOMIQUE OU SOUS CATEGORIE DE POLITIQUE ECONOMIQUE 14

    I.1.2 UN INSTRUMENT SOUMIS À PLUSIEURS ENTRAVES 14

    A-LES LIMITES DE LA POLITIQUE BUDGETAIRE 15

    1-Les anticipations des agents économiques 15

    2-L'incohérence temporelle des décisions publiques 15

    3-Le pouvoir des parlements démocratiques 16

    4-Les délais 16

    5-Le principe de cohérence de Timbergen 16

    B-LES CONTRAINTES DE LA POLITIQUE BUDGETAIRE 16

    1. Les contraintes internes 17

    2- Les contraintes d'ordre externes 17

    I.2 - LA POLITIQUE BUDGETAIRE AU CAMEROUN 17

    I.2.1- COMPOSANTES ET PRINCIPES BUDGETAIRES AU CAMEROUN 18

    A- LES COMPOSANTES DU BUDGET DE L'ETAT 18

    a- Les recettes publiques 18

    b- Les dépenses publiques 19

    B-LES PRINCIPES BUDGETAIRES 20

    a- Le budget est un acte de prévision à caractère financier 20

    b- Le budget est un acte d'autorisation à caractère politique 20

    c- Le budget est un acte périodique 20

    d- Le budget est une loi 21

    e-Le principe de l'unité et de l'universalité 21

    f-Le principe d'équilibre 21

    I.2.2- DES CHOIX PUBLICS FORTEMENT INFLUENCES 21

    A-L'EFFET DE LA CONJONCTURE 21

    1-1970-1985 : U ne politique expansionniste 22

    2-De 1985 à la mi- 1994 : Une politique de rigueur 22

    3-Depuis la mi-1994 : Une politique de relance 23

    B--LES AUTRES FACTEURS 24

    1-L'effet d'éviction du service de la dette extérieure 24

    2-Des bailleurs de fonds plus présents 25

    a-La prépondérance des institutions de Bretton Woods 25

    b. Des bailleurs de fonds bilatéraux solidaires des prescriptions du FMI et de la Banque mondiale. 26

    3. L'interdépendance des économies nationales dans le cadre de la 26

    Zone CEMAC 26

    II : EVOLUTION DU BUDGET DE L'ETAT AU CAMEROUN 27

    II.1-EVOLUTION DES DEPENSES PUBLIQUES 27

    II.1.1-EVOLUTION EN NIVEAU DES DEPENSES PUBLIQUES 27

    a- Dépenses Totales 28

    b- Dépenses de fonctionnement 28

    c- Dépenses d'Investissements 28

    II.1.2- EVOLUTION EN TAUX DE CROISSANCE DES DEPENSES PUBLIQUES 29

    a- Les Dépenses Totales 29

    b- Les Dépenses de fonctionnement 30

    c- Les Dépenses d'Investissement 31

    II.2- EVOLUTION DES RECETTES PUBLIQUES 33

    II.2.1- EVOLUTION EN NIVEAU DES RECETTES BUGETAIRES 33

    II.2.2- EVOLUTION EN TAUX DE CROISSANCE DES RECETTES BUDGETAIRES 34

    CHAPITRE II : 37

    LA MISE EN EVIDENCE DU CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN 37

    I : DU CYCLE ELECTORAL ET DES CHOIX PUBLICS AU CAMEROUN 38

    I .1- DU CYCLE ELECTORAL AU CAMEROUN 38

    I.2 : LA NATURE DES CHOIX PUBLICS AU CAMEROUN 41

    I. 2.1: DES CHOIX OPPORTUNISTES ET REGULIERS 41

    I.2.2 : L'IRRATIONALITE DES ELECTEURS ET UN CADRE INSTITUTIONEL PARTICULIER 43

    II : ANALYSE STATISTIQUE DES DONNEES BUDGETAIRES PAR RAPPORT A L'AGENDA ELECTORAL 45

    II.1 : LES DEPENSES BUDGETAIRES 45

    a-les dépenses militaires 45

    b-les dépenses d'éducation 46

    Dépenses d'agriculture 47

    d-Les dépenses de santé et affaires sociales 48

    e-Dépenses de travail et prévoyance sociale 49

    II.2 LES RECETTES FISCALES 51

    DEUXIEME PARTIE : 53

    ANALYSE DU CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN 53

    CHAPITRE III : 55

    LES DETERMINANTS DU CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN 55

    I: LE CHOIX DU MODELE 55

    I. 1 : Choix et définition des variables 55

    I 1.1 : La variable dépendante : une variable budgétaire 56

    A-Les dépenses 56

    a- Les dépenses agricoles 56

    b- Les dépenses militaires 56

    c- Les dépenses d'éducation 56

    d-Les dépenses de santé publique et Affaires sociales 56

    e-Les dépenses de travail et de prévoyance sociale 57

    B- Les recettes 57

    I 1.2 : Les variables explicatives 57

    a- La date des élections 57

    b-La variable dépendante retardée 58

    c-Le trend 58

    I.2 : Le modèle économétrique 58

    II : ESTIMATION DES RELATIONS ET ANALYSE DES RESULTATS 59

    II.1 : TESTS DE DIAGNOSTIC 60

    II-1.1 : L'auto corrélation des erreurs et normalité des erreurs 60

    Les diagnostics relatifs aux résidus des modèles de régression par les MCO sont centraux dans la mesure où, la normalité et l'autocrrélation des erreurs résultent de nombreux tests et outils statistiques très souvent utilisés. 60

    A. NORMALITE DES ERREURS 61

    Le problème de normalité des erreurs se pose lorsqu'on souhaite tester la performance du modèle ou de construire l'intervalle de confiance pour effectuer les tests de STUDENT des paramètres .il convient de vérifier la normalité des erreurs. Le cadre le plus formel et adéquat est le test de JARQUE et BERA (1984), fondé sur la notion de Skewness (asymétrie) et Kurtosis (aplatissement). 61

    L'examen des résultats du test de Jarque -Bera des figures présentées à l'annexe confirment l'hypothèse H0 de la normalité des erreurs 61

    B. AUTOCORRELATION DES ERREURS 61

    II.1.2 : La stationnarité des variables 61

    II. 2 : ESTIMATION DES RELATIONS 63

    II.2.1 : ESTIMATIONS DES DEPENSES 64

    B- Interprétation des résultats 64

    a- Les dépenses militaires 64

    b-Les dépenses de santé et affaires sociales 65

    c- Les dépenses agricoles. 65

    d- Les dépenses d'Education 65

    e- les dépenses de Travail et prévoyance sociale 66

    II. 2. 2- ESTIMATION DES RECETTES FISCALES 66

    A-Tableau récapitulatif 66

    B- Interprétation des résultats 67

    CHAPITRE IV : 70

    CONSTITUTIONNALISME ECONOMIQUE ET CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN 70

    I. CONSTITUTIONNALISME ECONOMIQUE : UNE VISION GLOBALE 70

    I.1 JUSTIFICATION DES REGLES FIXES 71

    I.1.1 INCOHERENCE TEMPORELLE ET INEFFICACITE DES DECISIONS PUBLIQUES 71

    I.1.2 INFRACTION ET INSUFFISANCE DES REGLES 73

    I.2 CONSTITUTIONNALISME ECONOMIQUE : UNE APPROCHE DISCUTEE 75

    II- DECISIONS PUBLIQUES AU CAMEROUN : LA NECESSITE D'UNE NORMALISATION 78

    I.1- VIOLATION RECURRENTE ET INSUFFISANCE DES REGLES EXISTANTES AU CAMEROUN 78

    II.2 DES REGLES PLUS CONTRAIGNANTES ET PLUS ADAPTEES AU CONTEXTE CAMEROUNAIS 81

    CONCLUSION GENERALE 86

    REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 90

    Tableau 1: Dates des différents types d'élections au Cameroun : (1960-2002) 40

    Tableau 2 : Résultats des tests de stationnarité 63

    Tableau 3 : Estimation des dépenses budgétaires 64

    Tableau 4 : estimation des recettes fiscales 67

    Graphique 1 : Evolution en niveau des dépenses Totales, d'investissement et de fonctionnement 28

    Graphique 2 : Evolution en taux de croissance des dépenses totales 29

    Graphique 3 : Evolution en taux de croissance des dépenses de fonctionnement 30

    Graphique 4: Evolution en taux de croissance des dépenses d'investissement 31

    Graphique 5 : Evolution en niveau des taux des recettes publiques 34

    Graphique 6 : Evolution en taux de croissance des recettes budgétaires 34

    Graphique 7 : Variations des dépenses militaires par rapport à l'agenda électoral 46

    Graphique 8 : Variations des dépenses d'éducation par rapport à l'agenda électoral 47

    Graphique 9 : Variations des dépenses agricoles par rapport à l'agenda électoral 48

    Graphique 10 : Variations des dépenses de santé et affaires sociales par rapport à l'agenda électoral 49

    Graphique 11 : Variations des dépenses de travail et de prévoyance sociale par rapport à l'agenda électoral 50

    Graphique 12 : Variations des recettes fiscales par rapport à l'agenda électoral 51

    PREMIERE PARTIE : 11

    POLITIQUE BUDGETAIRE ET CYCLE ELECTORAL: DEUX NOTIONS INDISSOCIABLES 11

    CHAPITRE I : 13

    LA POLITIQUE BUDGETAIRE : FONDEMENT DU CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN 13

    I : LA MISE EN OEUVRE DE LA POLITIQUE BUDGETAIRE AU CAMEROUN 13

    II : EVOLUTION DU BUDGET DE L'ETAT AU CAMEROUN 27

    CHAPITRE II : 37

    LA MISE EN EVIDENCE DU CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN 37

    I : DU CYCLE ELECTORAL ET DES CHOIX PUBLICS AU CAMEROUN 38

    II : ANALYSE STATISTIQUE DES DONNEES BUDGETAIRES PAR RAPPORT A L'AGENDA ELECTORAL 45

    DEUXIEME PARTIE : 53

    ANALYSE DU CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN 53

    CHAPITRE III : 55

    LES DETERMINANTS DU CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN 55

    I: LE CHOIX DU MODELE 55

    II : ESTIMATION DES RELATIONS ET ANALYSE DES RESULTATS 59

    CHAPITRE IV : 70

    CONSTITUTIONNALISME ECONOMIQUE ET CYCLE POLITICO-BUDGETAIRE AU CAMEROUN 70

    I. CONSTITUTIONNALISME ECONOMIQUE : UNE VISION GLOBALE 70

    II- DECISIONS PUBLIQUES AU CAMEROUN : LA NECESSITE D'UNE NORMALISATION 78

    CONCLUSION GENERALE 86

    REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 90

    * 1 Cité par Taladidia Thiombiano dans « économétrie des modèles dynamiques »






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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote