WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Réflexions critiques sur le système de prévention des difficultés des entreprises OHADA

( Télécharger le fichier original )
par Eric Aristide MOHO FOPA
Université de Dschang-Cameroun - DEA 2007
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Mémoire de DEA

Thème : REFLEXIONS CRITIQUES SUR LE SYSTEME DE PREVENTION DES DIFFICULTES DES ENTREPRISES OHADA

Mémoire soutenu publiquement en vue de l'obtention du Diplôme d'Etudes Approfondies (DEA)

PAR

MOHO FOPA ERIC ARISTIDE

Maîtrise ès droit des Affaires et de l'entreprise, Faculté des Sciences juridiques et Politiques de l'Université de Dschang-Cameroun

Mail : foperic@yahoo.fr

Sous la direction de

Pascal NGUIHE KANTE

Chargé de cours

DEDICACE

-A mes parents, Monsieur FOPA Jean Robespierre et Madame FOPA, née NJUNE Anne-Marie ;

-A mes frères et soeurs.

Pour leur indéfectible sollicitude et leur dévouement à mon égard.

REMERCIEMENTS

Au moment où ce travail arrive à terme, il m'importe particulièrement d'adresser ma très vive reconnaissance à tous ceux dont le concours a été d'un apport précieux pour sa réalisation. Ainsi :

Ma gratitude va d'abord à l'endroit du Docteur NGUIHE KANTE Pascal, qui n'a ménagé aucun effort pour diriger mes travaux de recherche et dont la disponibilité, l'expérience, les conseils et les critiques toujours bienveillants m'ont été d'un profit inextimable.

Ma gratitude s'adresse ensuite au Professeur ANOUKAHA François, Doyen de la faculté, qui n'a cessé de s'investir personnellement pour le rayonnement de notre formation.

J'exprime également ma reconnaissance à la famille TCHIO de Dschang, pour tout le soutien qu'elle m'a apporté.

Je remercie particulièrement mes amis et camarades de promotion notamment, FANSI Paul Marcellin (Université de Yaoundé 2), KONTCHOP Hilarion, TCHABO SONTANG Hervé, KENFACK K. Fidèle, MAGUEU Joëlle, RAMADANE NDOH, pour les échanges très enrichissantes qui ont marqué le quotidien de nos recherches.

Ma reconnaissance va également à l'endroit de mes amis KAMENI NGANGUE Flore, DEUYAMP DJIEUGA Rodrigue, PETANGOUE MONKAM Adolphe, SEKAM Caroline et NGAGOUE Gaëlle, pour leur soutien constant et bienveillant.

J'exprime également ma reconnaissance à Madame FOPA Micheline, pour ses conseils et son soutien permanent à mon endroit.

Enfin, je pense à toutes les autres personnes qui, de près ou de loin, ont contribué à son aboutissement.

PRINCIPALES ABREVIATIONS

Al : Alinéa

Art : Article

AUDCG : Acte uniforme OHADA, portant organisation du droit commercial général

AUDSCGIE : Acte uniforme OHADA, portant organisation du droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique.

AUPCAP : Acte uniforme OHADA, portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif.

AUS : Acte uniforme OHADA, portant organisation des sûretés.

CA : Cour d'Appel

Cass. Civ : Chambre civile de la Cour de Cassation française.

Cass. Com. : Chambre commerciale de la Cour de Cassation française.

Com : Chambre commerciale de la Cour de Cassation française.

Coll : Collection

E: Economica

éd: Edition

Ib : Au même endroit

Inf. Rap. : Information rapide

JCP: Jurisclasseur périodique

LGDJ : Librairie générale de droit et de jurisprudence

 : Numéro

Obs. : Observations

OHADA : Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires.

Op. Cit. : Opere citatere (cité plus haut)

P. : Page

Préc. : Précité

PUA : Presse universitaire d'Afrique

PUF : Presse universitaire d'Afrique

RCCM : Registre de commerce et de crédit mobilier

Req : Requête

Rev. Soc. : Revue sociale

Rev. Stés : revue des sociétés

SA : Société anonyme

SARL : Société à responsabilité limitée

Sv : Suivant

T : Tome

TGI : Tribunal de Grande Instance

Vol : Volume

SOMMAIRE

INTRODUCTION GENERALE ...................................................................1

TITRE I : UN SYSTEME DE PREVENTION DETECTION PEU SATISFAISANT. ...............................................................................................8

CHAPITRE I: LES INSUFFISANCES DES MECANISMES DE PREVENTION-DETECTION.........................................................................................................9

SECTION I : Les limites de l'alerte declenchee par les commissaires aux comptes...........10

SECTION II : Les resultats mitiges de la detection des difficultes par les associes............18

CHAPITRE II: LES PISTES D'UNE AMELIORATION POSSIBLE DU SYSTEME DE PREVENTION-DETECTION...............................................................24

SECTION I : Le souhait d'une reformulation des conditions de mise en oeuvre des mesures preventives.................................................................................25

SECTION II : L'indispensable multiplication des organes de detection.........................30

TITRE II : LES OBSTACLES AU PLEIN RENDEMENT DE LA PREVENTION-TRAITEMENT OU REGLEMENT PREVENTIF...................................38

CHAPITRE I : L'INCERTITUDE DANS LES CONDITIONS D'OUVERTURE DE LA PROCEDURE............................................................................40

SECTION I : L'imprecision du critere d'ouverture.................................................41

SECTION II : Les pouvoirs exorbitants reconnus au debiteur.....................................46

CHAPITRE II : L'EFFICACITE RESTREINTE DES MESURES ENVISAGEES..........58

SECTION I : Une insecurite juridique grave pour les partenaires de l'entreprise..............59

SECTION II : Les limites susceptibles d'entraver la bonne execution des mesures prises...66

CONCLUSION DU TITRE II.........................................................................69

CONCLUSION GENERALE.........................................................................70

INTRODUCTION GENERALE

Faire la part belle aux entreprises en difficulté de nos jours relève d'une logique implacable en Afrique en général et dans sa zone subsaharienne en particulier. La situation économique des entreprises n'y est point reluisante du fait de la crise économique à laquelle on peut ajouter les récents progrès technologiques et industriels, et le phénomène de la mondialisation qui affectent les entreprises tant du secteur privé que public. Pour cela, plusieurs entreprises ont inéluctablement été vouées à la mort. Cette situation a entraîné et entraîne encore des conséquences économiques et sociales considérables. L'une des difficultés majeures rencontrées par ces entreprises était l'obsolescence de la réglementation laissée par le législateur colonial1(*). La nécessité d'une réforme s'imposait donc avec acuité.

Dans le dessein de se défaire de ce boulet historique, les pays francophones d'Afrique ont décidé d'adopter un instrument juridique commun mieux adapté à leur contexte. Décidant ainsi de rompre avec le passé dans ce qu'il y'a de rétrograde au développement2(*), ils ont institué le Traité relatif à l'harmonisation du droit des affaires en Afrique (Traité OHADA)3(*).

L'objectif de ce traité est de favoriser au plan économique le développement et l'intégration régionale ainsi que la sécurité juridique et judiciaire par l'élaboration d'un même droit des affaires moderne « clair, simple, sécurisant les relations et les opérations économiques »4(*). Pour cela, plusieurs matières ont retenu l'attention du législateur parmi lesquelles les procédures collectives d'apurement du passif dont l'Acte uniforme y relatif est entré en vigueur le 1er janvier 1999.

Cet Acte arrive fort opportunément non seulement pour instaurer une homogénéité législative d'envergure régionale5(*), mais aussi pour faire siennes les nouvelles orientations du droit de la faillite6(*). A cet effet, il vise plusieurs objectifs : la protection des créanciers impayés et leur désintéressement, la sanction et l'élimination des débiteurs qui n'honorent pas leurs engagements et la sauvegarde des entreprises viables même au prix d'une certaine entorse aux droits des créanciers7(*). Cela étant, l'Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives (AUPCAP) veut non seulement guérir l'entreprise des difficultés qui l'affectent8(*), mais aussi et surtout à empêcher la survenance d'une situation irrémédiablement compromise. Il consacre ainsi le volet préventif des procédures collectives, ce qui est louable et capital pour la sauvegarde des entreprises et l'impulsion des économies nationales.

Le terme prévention relève plus du vocabulaire médical et militaire que juridique9(*). Prévenir, c'est d'abord informer d'une chose fâcheuse pour qu'on y remédie. En ce sens, l'information est au centre de la prévention et suppose une grande vigilance des personnes intéressées ; ensuite, prévenir signifie aller au devant d'un besoin pour mieux le satisfaire ou encore, empêcher par des précautions un mal ou un abus. Ainsi, la prévention des difficultés des entreprises est l'ensemble des mesures et des institutions destinées à informer, empêcher ou limiter la survenance de celles-ci en essayant d'en supprimer les causes et les moyens.

A l'article 2 alinéa 1 de l'AUPCAP, le législateur donne une conception large de l'entreprise en y englobant toute personne physique ou morale commerçante, toute personne morale de droit privé non commerçante et toute entreprise publique ayant la forme d'une personne morale de droit privé.

Le droit de la prévention est assez récent et n'a été expressément consacré en France qu'à partir de 196710(*). Son institution est justifiée car la prévention est devenue un impératif à une époque où la protection des entreprises fait partie des enjeux majeurs des procédures collectives. Avec la modernité en effet, une conception à dominance économique est apparue dans les Etats et se donne pour objectif la permanence des entreprises viables compte non tenu des appréciations portées sur les agissements des dirigeants. Face à l'ampleur de l'enjeu, les simples techniques de redressement sont devenues insuffisantes. Il fallait donc redéfinir les règles du jeu. C'est dans cette logique que le législateur OHADA a prévu des mesures qui en amont, sont destinées à éviter des situations irrémédiablement compromises.

Il est cependant difficile de fixer à l'avance des critères de prévention présentant un caractère de généralité couvrant toutes les Entreprises. Très souvent, ceux retenus ont tendance à ne considérer que l'aspect financier et comptable. Toutefois, la prévention est aménagée dans le but de s'attaquer aux racines du mal et l'éradiquer sans en attendre les manifestations. Il s'agit plus précisément de tuer les difficultés dans l'oeuf11(*), c'est-à-dire les étouffer dès leur survenance quand on n'a pas pu l'empêcher.

Les indices annonciateurs des difficultés réelles ou potentielles sont nombreux. Ils peuvent être internes ou externes à l'entreprise considérée. Les difficultés d'origine interne sont plus graves et plus faciles à déceler. Elles peuvent provenir de la forme sociale qui ne correspond pas à la dimension de l'entreprise12(*). Elles peuvent aussi être la conséquence d'une mauvaise gestion résultant par exemple d'une comptabilité inexistante, d'un personnel pléthorique, d'une incohérence de la politique adoptée, des détournements ou des malversations commis par un dirigeant, un comptable ou un employé indélicat ou même d'une confusion des patrimoines13(*). On peut de même mentionner certains facteurs humains comme les mésententes entre associés, les conflits sociaux et surtout les défaillances de la direction, liées par exemple à son caractère statique, à son vieillissement ou à son incapacité à s'adapter à l'évolution de l'environnement des affaires. A cela s'ajoute souvent la gestion paternaliste des entreprises africaines par leurs dirigeants.

Pour les difficultés d'origine externe, il faut prendre en compte tous les problèmes qui naissent de l'environnement économique de l'entreprise. Elles proviennent généralement des effets de la concurrence, de la fluctuation des coûts des produits ou de la monnaie, du poids de certaines charges.

Concrètement, les signes par lesquels les difficultés se manifestent sont divers. Comme signes de crise avérée, on peut noter des reports d'échéances, des refus de certification des comptes par le commissaire aux comptes ou d'approbation par l'assemblée générale, des licenciements collectifs d'un nombre important de travailleurs. On pourra aussi relever la perte d'une part importante du capital ou des fonds propres, la diminution du crédit fournisseurs, le départ volontaire des cadres ou des dirigeants entre autres.

Seulement, les choses sont plus compliquées qu'il ne paraît à première vue car plusieurs obstacles comme le secret des affaires ou de l'hétérogénéité des modes de gestion sont de nature à entraver une meilleure connaissance de la situation économique de l'entreprise. Ainsi, il sera difficile de tirer d'une cession de contrôle, d'une demande de prêt ou d'un report d'échéance, les conséquences d'une difficulté naissante ou déjà survenue. A cela, on doit ajouter le cas de nombreuses entreprises en difficulté qui sont maintenues en vie de manière artificielle par leur société mère, par les banques ou par les pouvoirs publics14(*).

Tout ceci rend le droit de la prévention très subtil. Pour cette raison, le législateur OHADA a consacré plusieurs moyens juridiques et comptables dans le but d'éviter que l'entreprise ne tombe en état de cessation des paiements. Certes toute règle juridique contribue à la prévention des difficultés dans la mesure où elle facilite le bon fonctionnement et le développement des entreprises15(*). Mais en insistant particulièrement sur certaines d'entre elles, le législateur a davantage voulu attirer l'attention sur le poids et l'intérêt de la prévention en l'état actuel du droit des affaires.

Partant des observations de la doctrine d'après lesquelles prévenir signifie mettre en place des possibilités d'alerte ou de règlement amiable des difficultés16(*), nous pouvons, sans prétendre relever toutes les techniques de prévention, dire qu'elles sont regroupées en deux grandes catégories dans le contexte de l'OHADA: d'une part, les mécanismes de prévention-détection et d'autre part un mécanisme de prévention-traitement.

Les premières ont pour but, à tout moment de la vie de l'entreprise, de repérer les faits de nature à porter atteinte à sa bonne gestion. Elles donnent la priorité à l'information. Le législateur a pris conscience du rôle primordial de la transparence dans une saine gestion de l'entreprise. En effet, aucun chef d'entreprise,aucun dirigeant ne saurait gérer efficacement une situation qui se dégrade s'il n'a connaissance de la nature et de l'étendue des difficultés que rencontre son entreprise. En ce sens, le législateur OHADA insiste sur la clarté et la précision des comptes tant en ce qui concerne les personnes physiques que morales17(*) commerçantes. Désormais, toute société d'une certaine importance devra publier des comptes récapitulant dans un document unique sa situation et ses résultats. Mais régulièrement, on assiste en Afrique à de nombreuses défaillances de la comptabilité. Il n'est pas rare dans cette optique de rencontrer une comptabilité mal tenue, pas suffisamment élaborée ou tout simplement inexistante18(*). De même, malgré les grands progrès en la matière, il est établi que les comptes établis par les sociétés commerciales africaines sont moins probants et efficaces que dans les pays occidentaux. Outre la tenue d'une comptabilité, la prévention-détection est constituée entre autres de l'alerte et de l'expertise de gestion.

Les techniques de prévention-détection supposent l'intervention de tous ceux qui oeuvrent de près ou de loin à la gestion de l'entreprise. Elles mettent à leur charge des obligations dont le non respect peut dans certains cas entraîner des sanctions. Le souci du législateur peut être résumé en une phrase : « plus d'information pour une meilleure détection »19(*). Il s'agira donc avant tout d'amener les dirigeants à prendre conscience de la situation actuelle et de l'évolution réelle de l'entreprise.

Les mécanismes de prévention-traitement sont aussi de divers ordres. Ils se manifestent parfois par le remplacement des dirigeants20(*) ou des reports d'échéances21(*). La prévention-traitement peut aussi consister en la prise des mesures de renflouement en dehors de toute intervention du juge. Ces mesures peuvent être internes22(*) ou externes23(*). Dans la même lancée, l'Etat intervient quelques fois pour juguler à temps les difficultés susceptibles d'entraîner la cessation des paiements de certaines entreprises24(*). Cependant, au titre de mécanisme de prévention-traitement des difficultés des entreprises, l'AUPCAP ne prévoit que le règlement préventif. Il a une fonction curative et vise à assainir l'entreprise qui connaît un début de difficultés au moyen d'un concordat préventif. Seul le règlement préventif sera retenu dans le cadre de notre étude dans la mesure où c'est le seul mécanisme de prévention-traitement spécifiquement prévu pour résorber en amont des difficultés. Ici en effet, les difficultés certes déjà réelles n'ont pas encore abouti à une cessation des paiements mais exigent une prompte intervention de plusieurs organes afin d'éviter le pire25(*).

Par ailleurs, les sanctions patrimoniales et pénales susceptibles de frapper les dirigeants sociaux jouent à n'en point douter un rôle hautement préventif. En effet, même si elles ne sont plus extrêmement sévères comme jadis, elles dénotent néanmoins le souci du législateur d'éviter le caractère irrémédiable de certaines difficultés. Elles n'ont plus essentiellement pour but d'éliminer les débiteurs fautifs de la vie sociale, mais constituent surtout des moyens de dissuasion pour les dirigeants animés par des intentions malveillantes26(*).

Aujourd'hui plus que par le passé, la prévention est au coeur des procédures collectives et du droit des sociétés en général. Elle y est d'ailleurs privilégiée. Il a ainsi été jugé que lors d'une action en liquidation des biens, si on se rend compte que le débiteur présente des chances de redressement et propose un concordat conforme à l'article 15 de l'AUPCAP, il y' a lieu de l'homologuer et d'admettre ce dernier en règlement préventif27(*). Cette situation révèle quelque peu la fragilité du droit de la prévention OHADA, car si les erreurs d'appréciation de cette envergure existent, c'est que les règles en la matière peuvent prêter à équivoque.

Bien plus, le quotidien de l'espace juridique OHADA est marqué par des dépôts de bilan multiples de la part des entreprises de tous les secteurs, résultant des difficultés de tous genres. Bien que les chiffres soient difficiles à fournir faute de statistiques fiables, la situation est alarmante pour des pays en quête d'un rayonnement économique. Cette situation suscite des interrogations : le système de prévention des difficultés des entreprises OHADA est-il efficace ? Quels sont des obstacles à son plein rendement ? L'option du législateur africain est-il réellement adapté à son contexte ? À quelle condition l'efficacité peut-elle être rehaussée ?

Globalement, c'est une évidence que le système de prévention des difficultés des entreprises OHADA pris en ses deux volets peut nettement être amélioré afin d'être pleinement efficace. En effet, le système de prévention-détection est loin d'être pleinement satisfaisant (titre 1) tout comme la prévention-traitement connaît de nombreux obstacles à son plein rendement (titre 2).

TITRE I : UN SYSTEME DE PREVENTION- DETECTION PEU SATISFAISANT.

Il n'est jamais trop tôt pour prévoir les difficultés d'une entreprise. En effet, l'efficacité de la prévention résulte à n'en point douter de la rapidité avec laquelle les maux susceptibles de troubler le bien être de la société sont mis à jour et combattus. Les difficultés qui affectent l'entreprise sont toujours de nature à s'amplifier avec le temps. Elles prennent ainsi des proportions importantes et deviennent par conséquent difficiles à résoudre. Ici, l'expression « il vaut mieux prévenir que guérir » revêt tout son sens. Ceci exige un système d'information effectif et omniprésent, car pour mieux prévenir, il faut pouvoir mieux informer28(*). Il est donc plus question d'anticiper sur les difficultés afin de mieux les parer.

Le législateur africain a pris conscience de cette nécessité en protégeant par de nombreuses dispositions de l'Acte uniforme OHADA relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique (AUDSCGIE), l'entreprise contre l'ouverture d'une procédure collective. Dans cette logique, il a élargi la notion d'entreprise en difficultés à toutes les situations couvertes par les procédures d'alerte et d'expertise de gestion29(*). Il ressort ainsi clairement des articles 150 et suivants de l'AUDSCGIE que le commissaire aux comptes, au cas où il en existe et les associés, peuvent déclencher la procédure d'alerte et d'expertise de gestion en cas de nécessité. La doctrine pour sa part affirme qu'une bonne utilisation de ces procédures aboutit généralement à de bons résultats en favorisant l'élaboration des plans de redressement viables30(*).

Mais ces techniques de prévention-détection se révèlent souvent illusoires du fait de nombreuses insuffisances qu'elles présentent (chapitre I), pourtant leur amélioration reste possible (chapitre II).

CHAPITRE I : LES INSUFFISANCES DES MECANISMES DE PREVENTION DETECTION.

Les mécanismes de prévention-détection consistent, en amont de la cessation des paiements, à repérer tout indice de crise susceptible d'enliser le fonctionnement de l'entreprise et de le résoudre le plus tôt possible. Pour ce faire, il existe deux procédures majeures permettant la réalisation de cet objectif : la procédure d'alerte et la procédure d'expertise de gestion.

La procédure d'alerte est celle par laquelle les commissaires aux comptes ou les associés demandent des explications aux dirigeants lorsqu'ils constatent des faits de nature à troubler la continuité de l'exploitation31(*). Le terme alerte est bien choisi car ce n'est pas encore le temps des alarmes ou même des conflits. Il ne s'agit que de prévenir les dirigeants des écueils prévisibles32(*). Ainsi, pour une bonne utilisation de l'alerte, les organes concernés doivent rester en éveil afin de diagnostiquer à temps les difficultés, qu'ils soient internes ou externes. C'est dire que les alertes sont de deux types : l'alerte interne et l'alerte externe.

L'alerte interne est mise en oeuvre par les organes normaux de la société. C'est la raison pour laquelle elle est parfaitement intégrée dans le droit des sociétés commerciales33(*) et non dans celui des procédures collectives34(*). Elle peut être mise en oeuvre par les associés.

L'alerte externe quant à elle suppose l'intervention des personnes externes à l'entreprise. Contrairement à d'autres législations, l'OHADA n'y s'est pas beaucoup investi35(*). L'AUDSCGIE ne l'a organisé qu'en faveur des commissaires aux comptes. Cela peut se comprendre aisément dans la mesure où cette forme d'alerte nécessite toujours l'existence d'un réseau important de professionnels bien organisé que les Etats membres de l'OHADA ne fournissent pas toujours.

L'expertise de gestion quant à elle est l'apanage des seuls associés. En effet, organisée par les articles 159 et 160 de l'AUDSCGIE, elle permet à ceux-ci pris collectivement ou individuellement et représentant au moins le cinquième du capital social, de demander au président de la juridiction compétente du siège social la désignation d'un ou de plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion. Elle est très restrictive quant à son domaine et aux organes qui l'exercent.

En matière de prévention donc, les rôles sont clairement définis. Mais cette clarification ne doit aucunement masquer les limites de la procédure d'alerte déclenchée par les commissaires aux comptes (section 1) ou les résultats mitigés de la détection des difficultés par les associés (section 2).

SECTION I : LES LIMITES DE L'ALERTE DECLENCHEE PAR LES COMMISSAIRES AUX COMPTES.

En plus des fonctions traditionnellement reconnues aux commissaires aux comptes, le législateur OHADA a mis à leur charge une tâche supplémentaire et non des moindres consistant à déclencher l'alerte au sein des sociétés où ils exercent leur mandat. Cet élargissement de leurs fonctions s'est logiquement accompagné d'un renforcement de leur indépendance vis-à-vis tant des autres organes de la société que de la société elle-même36(*). La procédure d'alerte émanant des commissaires aux comptes est organisée de manière différente selon qu'on se trouve dans une société anonyme ou non37(*). Le commissaire aux comptes déclenche l'alerte lorsqu'il relève « tout fait de nature à compromettre la continuité de l'exploitation ». Mais comme on peut le constater, ce critère tel qu'énoncé n'offre pas toutes les précisions souhaitées (paragraphe 1), tout comme cette procédure d'alerte prise globalement recèle de nombreuses imperfections (paragraphe 2).

PARAGRAPHE I : L'IMPRECISION DU CRITERE DE MISE EN OEUVRE.

De nombreuses difficultés découlent de cette imprécision. Mais avant de les mentionner (B), il conviendra d'abord de rechercher le sens même du critère (A).

A- Le sens du critère.

Des dispositions des articles 150 et 153, il ressort que le commissaire aux comptes demande des explications soit au gérant, soit au président du conseil d'administration ou au président directeur général ou à l'administrateur général sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l'exploitation qu'il a relevé lors de l'examen des documents qui lui sont communiqués ou dont il a connaissance à l'occasion de l'exercice de sa mission. Ainsi, que ce soit dans les sociétés anonymes ou dans les sociétés autres qu'anonymes, l'alerte est déclenchée par le commissaire aux comptes lorsqu'il relève «tout fait de nature à compromettre la continuité de l'exploitation ». A cet effet, il est tenu d'attirer l'attention des dirigeants sur le danger encouru. Mais quel est le véritable sens de cette notion ?

Le législateur n'a pas cru devoir détailler davantage ce critère. Il s'en est tenu à une formule très souple susceptible de se dilater à l'excès. Il convient cependant de s'accorder avec la doctrine que ce critère d'origine comptable a une double dimension car présentant à la fois un aspect économique et financier38(*) . On peut ainsi relever comme éléments y découlant, l'accumulation de mauvais résultats, les emprunts exorbitants ou non justifiés, l'inscription inquiétante des privilèges et nantissements, des injonctions de payer à répétition, une trésorerie négative et même des conflits sociaux. Tout ceci implique une analyse des difficultés propres auxquelles l'entreprise fait face ou du contexte particulier dans lequel elle vit.

Le fait considéré ne doit pas obligatoirement compromettre la continuité de l'exploitation mais être simplement de nature à le faire. Mais il faut que le fait soit tout de même suffisamment grave pour affecter la continuité de l'exploitation et que le risque soit en mesure de se réaliser dans un avenir prévisible. Ne sont pas ainsi pris en compte des faits qui, de par leur caractère improbable ou lointain, ne peuvent en l'état actuel de la situation de la société affecter sérieusement son exploitation. Il en sera ainsi par exemple d'une insuffisance des investissements en matière de recherche ou encore d'un niveau technique insuffisant de l'encadrement39(*).

De tout évidence, un indice du critère pris individuellement ne saurait justifier l'alerte. Son déclenchement suppose en réalité l'existence conjointe des deux faisceaux d'indices que sont le « fait » considéré et la capacité pour ce fait de « compromettre le continuité de l'exploitation ». Il n'est cependant pas nécessaire qu'il y ait plusieurs faits comme en France. Un seul fait suffit, à condition d'être en mesure de compromettre l'exploitation.

Le commissaire aux comptes est donc appelé à agir avec tact et finesse car une mauvaise appréciation de la situation peut provoquer des difficultés imparables.

B- Les difficultés d'appréhension du critère.

Si la démarche choisie par le législateur est plus « scientifique et plus rationnelle », il n'en demeure pas moins qu'elle n'est pas très féconde40(*). Certes, cette formule offre au commissaire aux comptes une liberté d'action considérable, mais ce dernier ne doit agir que dans le cadre strict de l'exercice de sa mission. L'essentiel reste qu'il agisse en se conformant à l'esprit du texte41(*). Il doit s'assurer que le fait allégué est réellement de nature à nuire à la continuité de l'exploitation. L'absence de précision du critère lui impose de se référer à sa conscience, à son expérience ou tout simplement à son intuition. Ce qui pourrait l'impliquer accidentellement dans la gestion de la société.

Mais on peut toujours se demander si le commissaire aux comptes a l'obligation de rechercher systématiquement les faits devant donner lieu à l'alerte ou alors s'il doit simplement porter à la connaissance des dirigeants les seuls faits relevés à l'occasion de ses fonctions normales. Il serait mieux de retenir une interprétation large car une interprétation restrictive priverait l'alerte d'une partie de son utilité42(*). Pourtant, le législateur africain semble bien relier l'alerte aux connaissances qu'a le commissaire aux comptes à l'occasion de l'exercice de sa mission43(*). Or, le commissaire aux comptes est un tiers à la gestion de la société44(*). Il lui est formellement interdit de s'immiscer dans la gestion de celle-ci45(*). Le droit d'alerte doit donc être concilié avec le principe de non immixtion des commissaires aux comptes dans la gestion.

En principe, l'exercice du droit d'alerte, s'il élargit la mission du commissaire aux comptes, ne constitue pas une immixtion. C'est pourquoi ce dernier doit s'abstenir de proposer la moindre solution une fois l'alerte déclenchée. A défaut, il s'immiscerait dans la gestion. Toutes ces garanties sont cependant fragilisées par le caractère vague du critère de mise en oeuvre de l'alerte en ce sens qu'il offre un très grand champ d'action au commissaire aux comptes. En effet, il bénéficie d'un pouvoir d'appréciation très large quant à l'opportunité de l'alerte. En plus, certaines missions légales du commissaire aux comptes sont très proches d'une immixtion dans la gestion, notamment la convocation de l'Assemblée Générale en cas de carence des dirigeants. C'est la raison pour laquelle une partie de la doctrine estime que l'exercice de l'alerte implique nécessairement une immixtion du commissaire aux comptes dans la gestion46(*). On assiste en effet à une dérive de ses fonctions de contrôle des comptes vers la surveillance de la gestion. Son devoir d'alerte le conduit inévitablement à faire apprécier la gestion. Bref, l'Acte uniforme précité consacre implicitement un droit de regard et d'appréciation de la gestion par le commissaire aux comptes47(*).

Par ailleurs, la détermination de la date de déclenchement de l'alerte est particulièrement délicate. Si l'alerte est trop tardive, elle risque de ne pas pouvoir redresser une situation définitivement sans issue. En effet, les commissaires aux comptes agiront très souvent quand la situation est déjà profondément dégradée. Ils ne feront alors que constater la cessation des paiements ou annoncer l'imminence de celle-ci48(*). L'alerte, à l'instar de la prévention en général, perdra ainsi de sa fonction première qui est de veiller et ne pas être surpris par les difficultés afin d'avoir le temps de réagir aisément et d'organiser la défense ou la résistance.

Le critère de mise en oeuvre de l'alerte tel que formulé par le législateur exige une prudence dans son utilisation. A défaut, il pourra causer des difficultés nouvelles à l'entreprise qu'il est censé protéger. Ce qui traduit déjà les nombreuses imperfections de ladite procédure.

PARAGRAPHE II : LES IMPERFECTIONS DE L'ALERTE DECLENCHEE PAR LES COMMISSAIRES AUX COMPTES.

Malgré sa très grande importance, la procédure d'alerte présente aussi de nombreux inconvénients. En effet, l'alerte a toujours un caractère perturbateur et est susceptible, si elle n'est pas bien utilisée, de porter atteinte à la crédibilité de l'entreprise (A). En plus, la procédure d'alerte par les commissaires aux comptes telle que conçue par l'OHADA n'a pas été adaptée à toutes les personnes morales susceptibles de faire l'objet d'une procédure collective (B).

A- Les risques d'atteinte à la crédibilité de l'entreprise.

En principe, l'alerte doit rester confidentielle aussi longtemps que possible pour être efficace. Cette exigence est souhaitable pour la sécurité de toutes les personnes qui ont des intérêts vis-à-vis de l'entreprise. L'alerte est toujours perturbatrice pour les dirigeants et même pour la société49(*) . Elle est susceptible de nuire à l'entreprise car « la sonnette d'alarme » une fois tirée peut alimenter maladroitement les rumeurs ou éveiller les concurrents. Elle peut aussi susciter chez les partenaires de la société des doutes sur sa capacité à exécuter ses obligations futures. Ils pourront être alors tentés de revoir leurs relations avec l'entreprise. Ceci peut se manifester concrètement par l'exigence de leur part des garanties exorbitantes ou tout simplement par la volonté de rompre ces relations.

Pour toutes ces raisons, l'alerte est destinée à rester interne à l'entreprise c'est-à-dire à ne pas être divulguée en dehors des personnes directement concernées. A cet égard, les commissaires aux comptes sont astreints au secret professionnel pour les faits, actes et renseignements dont ils ont pu avoir connaissance à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions50(*). Ceci est dû au fait que les commissaires aux comptes sont « des confidents nécessaires » appelés à connaître des données dont la divulgation pourrait nuire à la société. Ils ont le droit de tout savoir mais pas de tout dire. Mais en réalité, les informations relatives à l'alerte peuvent être connues des tiers du fait des indiscrétions ou des maladresses. Ce risque est d'autant plus grand que les commissaires aux comptes, par peur d'engager leur responsabilité pour n'avoir pas déclenché l'alerte, agiront prématurément en cas de simple doute sur la véracité de l'information dont ils ont connaissance. A vrai dire, ils sont protégés dans l'exercice de leur mission d'alerte dans la mesure où leur responsabilité ne peut être engagée pour la divulgation des faits dont ils ont eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions51(*). Ils bénéficient donc d'une sorte d'immunité s'ils déclarent une alerte alors que la situation n'est pas compromise et que leur initiative intempestive cause préjudice à l'entreprise.

Ces observations ne valent cependant que pour certaines entreprises puisque de nombreuses organisations sociétales prévues par l'OHADA brillent par l'absence en leur sein d'un dispositif d'alerte.

B - L'absence d'un dispositif d'alerte par les commissaires aux comptes dans de nombreuses entreprises.

Cette situation peut s'observer notamment dans les personnes morales non commerçantes (1) et dans de nombreuses sociétés commerciales (2).

1- les personnes morales non commerçantes.

Aux articles 2 et 4 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, le législateur OHADA soumet également aux procédures collectives les personnes morales de droit privé non commerçantes. Par conséquent, rien ne s'oppose à l'application à leur égard du droit de la prévention.

Les personnes morales de droit privé non commerçantes sont des groupements qui exercent pour l'essentiel les activités d'animation artisanale, culturelle, sportive, humanitaire et économique sans réelle volonté de spéculation et poursuivent pour la plupart des buts d'intérêt général sans partage de bénéfices entre leurs membres52(*). Elles sont pour l'essentiel constituées par des coopératives, sociétés civiles immobilières, mutuelles, fondations et associations. De l'exercice de leurs activités, peuvent naître des difficultés d'ordre structurel, économique ou financier nécessitant l'ouverture d'une procédure collective53(*). Il serait alors indiqué, pour éviter les inconvénients d'une telle procédure, de prendre des mesures préventives. Malheureusement, ces personnes morales ne sont pas très souvent dotées d'un dispositif d'alerte comme nombre de sociétés commerciales54(*).

Tout part du constat concret selon lequel dans les pays membres de l'OHADA, seuls les commerçants personnes physiques ou morales se soumettent généralement aux obligations comptables conformément aux dispositions de l'Acte uniforme sur le droit commercial général55(*). Les autres personnes morales de droit privé ne se sentent pas très concernés par la tenue d'une comptabilité régulière malgré les dispositions claires de l'article 2 de l'Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises. De même, elles fonctionnent très souvent sans commissaires aux comptes, la désignation de ces derniers y étant purement facultative. Quand bien même ces derniers existent, ils sont simplement désignés parmi les membres de l'association et ne justifient pas des compétences nécessaires pour l'exercice de la profession. C'est le cas précisément des associations tontinières qui pullulent au Cameroun avec désormais un réel impact sur l'économie nationale. Cette situation rend difficile l'application à leur égard des procédures collectives d'apurement du passif.

Les textes étant clairs en la matière, il revient aux promoteurs et dirigeants de telles structures de s'en imprégner véritablement pour une gestion rationnelle et une meilleure adaptation aux techniques préventives des difficultés.

2- L'absence de commissaires aux comptes dans de nombreuses entreprises commerciales.

Toutes les sociétés ne sont pas tenues de nommer en leur sein des commissaires aux comptes. Ceci est vrai pour les personnes morales non commerçantes, mais aussi pour certaines entreprises commerciales. Ainsi, seules les sociétés anonymes doivent obligatoirement désigner des commissaires aux comptes devant assurer le contrôle de leur gestion (article 10 AUDSCGIE)56(*). Pour les autres sociétés, la nomination des commissaires aux comptes est facultative. Ainsi, l'article 376 de l'AUDSCGIE précise que seules les sociétés à responsabilité limitée disposant d'un capital supérieur à dix millions (10 000 000) de Francs CFA ou réalisant un chiffre d'affaire annuel supérieur à deux cents cinquante millions (250 000 000) de francs CFA ou encore possédant un effectif permanent supérieur à cinquante (50) personnes sont obligées de désigner des commissaires aux comptes. En dehors de ces hypothèses, les SARL ne sont pas astreintes à cette formalité, pas plus que les autres sociétés de personnes. Cette situation peut mettre à mal la transparence dans ces sociétés et partant les opérations de dépistage des difficultés. On peut redouter des déguisements de la situation financière et économique réelle dans ces sociétés où les dirigeants peuvent être tenus solidairement et indéfiniment du passif social57(*). La crainte de la faillite pourra ainsi les pousser à retarder à l'extrême la prise des mesures qui auraient été salutaires si elles avaient été prises plus tôt58(*). Cette hypothèse navrante peut déjà traduire le caractère mitigé des résultats de la détection des difficultés par les associés.

SECTION II : LES RESULTATS MITIGES DE LA DETECTION DES DIFFICULTES PAR LES ASSOCIES.

Les associés ne jouent pas un rôle de prou dans la prévention des difficultés des entreprises. Ils sont « les parents pauvres de la prévention des difficultés »59(*). Cette situation est étonnante car l'intérêt des associés à la bonne marche de l'entreprise n'est plus à démontrer. Cependant, ils peuvent tout de même mettre en oeuvre l'alerte et l'expertise de gestion en cas de nécessité. Ces procédures permettent aux associés d'attirer l'attention des dirigeants sur une gestion anormale. Seulement, plusieurs raisons peuvent nous amener à douter de leur efficacité, que ce soit au niveau de l'alerte (paragraphe 1) ou de l'expertise de gestion (paragraphe 2).

PARAGRAPHE I : AU NIVEAU DU DROIT D'ALERTE DES ASSOCIES.

Les associés ont le droit de s'informer de temps à autre sur la gestion de la société. Ils peuvent à cet effet consulter au siège social, dans les limites fixées par la loi, tous les documents et pièces comptables susceptibles de leur fournir des renseignements exacts sur la situation de l'entreprise. Ils ont donc en principe une parfaite connaissance des difficultés qui peuvent affecter l'entreprise60(*). A l'instar des commissaires aux comptes, ils peuvent valablement demander des explications aux dirigeants lorsqu'ils relèvent des faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation. C'est le droit d'alerte des associés prévus à l'article 157 et suivants de l'AUDSCGIE et dont la possibilité de mise en oeuvre a été largement restreinte par le législateur. En effet, il se caractérise par son caractère facultatif (A) et limitatif (B).

A- Le caractère facultatif.

Tout associé ou tout actionnaire peut adresser par écrit des questions au gérant ou au principal dirigeant de la SA, sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l'exploitation. Ces dispositions des articles 157 et 158 de l'AUDSCGIE comportent certes des innovations louables61(*), mais il n'en demeure pas moins que son caractère facultatif constitue l'une de ses principales limites.

En effet, des articles précités, il ressort que les associés ont simplement la faculté et non le devoir de déclencher l'alerte. Cette faculté se traduit clairement par l'utilisation dans ces articles du verbe « pouvoir » et non « devoir ». C'est dire qu'à la différence des commissaires aux comptes, les associés ne sont pas obligatoirement tenus, en cas de constat des indices de difficulté, de mettre en branle la procédure d'alerte. On peut alors penser qu'ils ne se préoccuperont véritablement de l'alerte que lorsqu'ils sentiront leurs intérêts véritablement menacés ou alors dans les sociétés où il n'existe pas de commissaires aux comptes.

La conséquence logique de cette faculté est que les associés ne pourront en aucun cas voir leur responsabilité engagée en cas d'abstention. Tout au plus pourraient-ils, en cas de dégâts, subir personnellement des remords sur le plan moral. Inversement, leur responsabilité ne pourra être engagée pour alerte non fondée. Aussi peut-on craindre des actions menées par simple complaisance ou de manière irresponsable62(*). C'est certainement pour éviter des actions superflues que le législateur a limité les possibilités d'alerte par les associés, ce qui n'est pas de nature à favoriser son efficacité.

B- Le caractère limité.

Les difficultés peuvent apparaître dans l'entreprise à tout moment de sa vie. Tout comme les faits « de nature à compromettre la continuité de l'exploitation » peuvent se manifester toutes les fois qu'un acte inopportun est posé par les dirigeants, ou encore lorsque l'environnement juridique ou économique de la société est négativement influencé. Ils ne sont donc pas a priori appelés à être numériquement limités. Or contrairement aux commissaires aux comptes qui doivent déclencher l'alerte toutes les fois que la situation de l'entreprise est préoccupante, les associés ne peuvent exercer leur pouvoir d'alerte que deux fois par exercice. Au-delà, l'associé n'est plus recevable à poser par écrit des questions aux dirigeants, sauf à l'occasion des assemblées générales. Cette limitation des pouvoirs de contrôle de la société par les associés est assez curieuse quand on sait que dans plusieurs sociétés, il n'existe pas de commissaires aux comptes chargés d'assurer un contrôle suivi des comptes.

Les associés n'ont donc pas « les mains libres » comme les commissaires aux comptes en matière d'alerte. A la différence de ces derniers qui ont le pouvoir d'inviter les dirigeants de la société anonyme à faire délibérer le conseil d'administration ou l'administrateur général à se prononcer sur les faits relevés en cas d'insatisfaction63(*), les associés n'ont nullement cette possibilité. Bien plus, le commissaire aux comptes peut établir un rapport spécial qui est présenté à la prochaine assemblée générale en cas d'inobservation par les dirigeants de leurs obligations face à l'alerte, ou si en dépit des décisions prises, la continuité de l'exploitation reste compromise. Toutes choses que l'associé ne peut décider dans le cadre de l'exercice de son droit d'alerte. Tout au plus, devra-t-il obligatoirement passer par le commissaire aux comptes s'il veut aboutir à de tels résultats. Ceci résulte de ce qu'il est tenu d'adresser une copie de la question et de sa réponse au commissaire s'il en existe64(*). On peut donc penser que les commissaires aux comptes ont un droit de regard sur les résultats de l'alerte obtenus par les associés dans la mesure où ils ne convoqueront le conseil d'administration ou l'assemblée générale qu'après s'être assurés de la réalité de la menace.

En définitive, la procédure d'alerte par les associés est d'une efficacité limitée. Il est à craindre qu'elle ne permette en fin de compte à l'associé que de prendre date, en montrant qu'il a eu connaissance des difficultés qu'a rencontré l'entreprise à un moment donné. L'efficacité de l'alerte est donc finalement très restreinte au même titre que l'expertise de gestion.

PARAGRAPHE II : AU NIVEAU DE L'EXPERTISE DE GESTION.

L'AUDSCGIE a institué une nouvelle mesure d'information d'une importance capitale : l'expertise de gestion (A) encore appelée expertise de minorité65(*). Prévue par les articles 159 et 160 dudit acte, elle constitue à côté de l'alerte une mesure supplémentaire de détection des difficultés des entreprises reconnue aux associés. Elle présente cependant de nombreuses limites rendant difficile sa mise en oeuvre (B).

A- La notion d'expertise de gestion.

L'expertise de gestion d'après l'article 159 AUDSCGIE, consiste pour les associés représentant au moins le cinquième du capital social à demander soit individuellement, soit en se groupant sous quelque forme que ce soit, au président de la juridiction compétente du siège social, la désignation d'un ou de plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion. Au regard de ces dispositions, « l'expertise de gestion est la possibilité offerte aux associés, même minoritaires, qui représentent une fraction raisonnable du capital social de faire ouvrir une enquête sur une ou plusieurs opérations de gestion, enquête destinée à renforcer le droit des associés de contrôler la gestion d'une société »66(*).

Elle traduit un souci de protection plus efficace des minorités dans un monde des sociétés commerciales où la loi par excellence est celle de la majorité. Cela est une réalité dans les sociétés de capitaux et les SARL où les résolutions les plus importantes sont prises à la majorité des associés réunie en assemblée générale67(*). Or, dans ces relations, les conflits ne sont pas exclus et sont de nature à paralyser le fonctionnement de la société et même provoquer sa dissolution68(*). L'expertise de gestion peut donc aider à contourner de telles situations.

L'Acte uniforme s'est inspiré en la matière du droit français69(*). Mais contrairement à ce droit, il institue cette mesure au profit des associés représentant au moins le cinquième du capital social70(*). En plus, l'article 159 de l'Acte uniforme précité ne fait aucune distinction parmi les associés pouvant user de cette mesure. En effet, l'expertise de gestion peut être demandée par tous les associés sans distinction, à condition qu'ils détiennent au moins le cinquième du capital social71(*).

L'expertise de gestion est concrètement décidée par le président de la juridiction compétente du siège social. Celui-ci désigne un expert et détermine l'étendue de sa mission. Le juge dispose en la matière d'un pouvoir d'appréciation, ce qui l'oblige à vérifier le caractère sérieux de la demande. Pour ce faire, il doit s'assurer que l'expertise a une finalité sociale. L'objet de l'expertise de gestion est en effet la « recherche de l'intérêt social »72(*). Mais l'intérêt social peut être en corrélation avec les intérêts propres des demandeurs73(*). Dans tous les cas, l'expertise de gestion sera refusée si elle est sollicitée pour satisfaire les intérêts personnels des minorités74(*).

Par contre, l'expertise sera autorisée lorsqu'il est établi que des associés ne sont pas suffisamment informés sur les opérations de gestion ou encore lorsqu'ils émettent des doutes sur la sincérité et le sérieux des résolutions prises en assemblées75(*).

Le domaine de l'expertise est limité par l'article 159 précité qui précise que la mission de l'expert porte sur « une ou plusieurs opérations de gestion ». L'expertise de gestion ne vise pas un contrôle ou une critique de l'ensemble de la gestion. Pour que la demande soit admise par le juge, elle doit être suffisamment motivée et invoquer avec précision les faits sur lesquels il demande des éclaircissements. L'expertise ne doit pas être un moyen de faire procéder à un audit de la société afin de mettre à jour d'éventuelles irrégularités76(*). Cependant, il est à se demander si la notion « d'opération de gestion » doit donner lieu à une interprétation large ou restrictive. Le législateur OHADA des sociétés commerciales n'a pas apporté de réponse à cette question. En France, cette notion a donné lieu à une interprétation suffisamment large pour ne pas se limiter uniquement aux actes du conseil d'administration ou de son président. Elle doit inclure les décisions de l'assemblée générale77(*).

Le rapport de l'expert est adressé aux associés demandeurs et non au juge. Ce rapport leur permettra de mieux étayer leurs critiques sur une ou plusieurs opérations de gestions. Le plus souvent en effet, les associés qui contestent les opérations de gestions ne disposent pas d'assez d'éléments sur lesquels fonder leurs contestations. Ledit rapport pourra aisément permettre aux associés de « déclencher les hostilités avec les dirigeants sociaux »78(*). Ils peuvent ainsi demander leur révocation ou l'annulation des décisions jugées abusives ou même mettre en jeu leur responsabilité.

A l'évidence, l'expertise de gestion est très utile pour les associés, car elle leur permet de mieux exercer leur pouvoir de contrôle malgré de nombreuses limites qui l'entourent.

B- Les limites de l'expertise de gestion.

Elles sont liées à l'intrusion des tiers dans la société (1) et à l'absence de célérité de la procédure (2).

1- L'intrusion des tiers dans la société.

L'un des inconvénients majeurs de l'expertise de gestion est qu'elle entraîne une intrusion flagrante de la justice dans la société. Le juge dispose en la matière d'une faculté totale d'appréciation79(*). Mais il ne doit en aucun cas se faire juge des opérations de gestion critiquées et de l'évolution financière de la société. Il doit se borner à apprécier s'il y a lieu ou non de faire droit à la demande. Après avoir désigné l'expert, il se charge ensuite de circonscrire l'étendue de sa mission. A l'évidence, eu égard au caractère flexible de la notion d'opération de gestion, le juge sera porté à l'étendre à souhait, et en fonction des circonstances. A l'instar du juge français, nul doute que par ses décisions, il apportera plus de précisions au domaine de l'expertise de gestion80(*)

Pour l'accomplissement de cette mission, l'expert dispose d'un droit d'accès à tous les documents de la société qui peuvent lui être utiles. Le secret des affaires ne lui est donc pas opposé. Par conséquent, bien que l'expert soit lui-même astreint au secret professionnel, les risques d'indiscrétion ne sont pas à négliger.

Dans la même logique, il convient de relever avec la jurisprudence française que l'expertise de gestion « peut nuire au crédit de la société par le doute qu'elle fait planer sur une opération sociale »81(*). La mesure est en effet rapidement connue du public de par l'intervention des autorités judiciaires.

Par ailleurs, la procédure d'expertise de gestion se caractérise souvent par sa lenteur.

2- L'absence de célérité de la procédure.

De l'article 159 précité, il ressort que la demande d'expertise est adressée au président de la juridiction compétente du siège social. Cette prescription est à n'en point douter destinée à permettre à la mesure d'être prise rapidement. Cela peut aisément se comprendre dans la mesure où la gestion déplorée par les associés peut être de nature à se dégrader rapidement. Curieusement cependant, le législateur n'a cru devoir expressément soumettre la demande d'expertise de gestion à la procédure d'urgence. Pour que le juge statut en référé, il revient à l'associé de prouver l'existence de l'urgence. A défaut, le président du tribunal saisi, pourra se déclarer incompétent et renvoyer le demandeur à mieux se pourvoir82(*).

Une institutionnalisation expresse de la procédure de référé en la matière aurait permis d'écarter tout doute dans l'esprit des associés et surtout des juges.

Quand bien même le juge de référé est saisi, les décisions n'interviennent pas assez rapidement. Une analyse de la jurisprudence dans l'espace OHADA révèle que les décisions interviennent souvent une année après l'introduction de la demande. Dans une espèce soumise à la Cour d'appel d'Abidjan, l'exploit avait été formé le 12 janvier 2000 en contestation d'une décision qui en premier ressort rejetait l'expertise de gestion, la décision du juge d'appel n'intervint finalement que le 02 janvier 200183(*). L'arrêt ayant infirmé la décision du premier juge, on est en droit de se demander quel est l'intérêt de la mesure prise un an après la demande.

Dans les autres cas, la décision intervient plus d'un mois après l'introduction de la demande84(*).

L'expertise de gestion est donc en réalité une procédure assez longue alors que toutes les procédures de détection des difficultés doivent être rapides85(*).

En définitive, le caractère restrictif de ces techniques de détection des difficultés des entreprises ne permet de contrer qu'une partie des difficultés que connaît l'entreprise. Le plus souvent, compte tenu de la nature des organes destinés à user de ces mesures, la détection n'est véritablement mise en oeuvre que lorsque les signes des défaillances sont déjà visibles. Pourtant, l'aspect invisible peut être plus profonde. Il est donc nécessaire, pour une plus grande appréhension des signes tant visibles qu'invisibles des difficultés qui pourraient affecter l'entreprise, que le système soit nettement amélioré.

CHAPITRE II : LES PISTES D'UNE AMELIORATION POSSIBLE DU SYSTEME DE PREVENTION-DETECTION.

Il semble évident de nos jours qu'il se crée dans l'espace OHADA plus d'entreprises qu'il n'en meurt par la voie des procédures collectives. Mais la proportion des entreprises sous le coup de ces procédures ou appelées à en subir dans un avenir proche reste importante. Pourtant, le leitmotiv des Etats membres de l'organisation reste le développement et la lutte contre la pauvreté. Toutes choses qui ne seront menées à bien que si nos entreprises sont en bonne santé et en mesure d'offrir de nouvelles opportunités d'emplois. Pour cela, elles doivent être à l'abri de tout fait de nature à affecter négativement leur aisance. Aussi, les juristes doivent mettre sur pied un système de détection des difficultés plus à même d'étendre ses ramifications à tous les niveaux de l'entreprise.

La meilleure façon d'y parvenir consiste à épurer le système actuel de ses nombreuses insuffisances et à le renforcer efficacement. L'enjeu étant de prévenir à temps l'ouverture d'une procédure collective, il conviendra d'abord de reformuler avec précision les conditions de mise en oeuvre des procédures de prévention-détection (section 1). Ensuite, certains signes précurseurs des difficultés peuvent échapper aux organes de contrôle actuellement institués ; il sera aussi judicieux d'envisager une extension de ces organes (section 2).

SECTION I : LE SOUHAIT D'UNE REFORMULATION DES CONDITIONS DE MISE EN OEUVRE DES MESURES PREVENTIVES.

Les critères de déclenchement des mesures de détection des difficultés des entreprises tels que formulés par le législateur OHADA n'ont pas toujours permis à ses utilisateurs de les employer à bon escient. Les uns sont vagues et trop imprécis (cas des alertes), l'autre n'existe simplement pas (cas de l'expertise de gestion). En plus, les pouvoirs des organes chargés de leur mise en oeuvre ne leur permettent pas toujours de prendre à temps toutes les initiatives qui pourraient s'avérer salutaires pour l'entreprise concernée. Le législateur africain gagnerait non seulement à clarifier les critères d'ouverture des procédures de prévention-détection (paragraphe I) mais aussi à renforcer les pouvoirs des organes chargés de la mise en oeuvre de ces procédures (paragraphe II).

PARAGRAPHE I : LA CLARIFICATION DES CRITERES DE MISE EN OEUVRE.

Ces critères méritent une meilleure clarté qu'il s'agisse de l'alerte (A) ou de l'expertise de gestion (B).

A- De l'alerte.

Nous l'avons dit, les articles 150, 153, 157 et 158 disposent en général que l'alerte doit être déclenchée par le commissaire aux comptes ou les associés dès lors qu'ils constatent l'existence des faits de nature à compromettre la continuité de l'exploitation. Cette formule s'inspire du droit français lui-même inspiré par la notion de « going concern » du droit anglo-saxon. Mais la formule retenue n'est pas très juridique et donne une grande marge de manoeuvre aux commissaires aux comptes et aux associés.

« Seule une vision globale permet une prévision réaliste »86(*). C'est certainement cette idée qui a animé le législateur. Son souci a peut être été de concevoir un critère permettant un diagnostic toujours anticipé. Malheureusement, ce critère s'est révélé tellement vague qu'il est de nature à porter des doutes sur une société en réalité saine. Par conséquent, le législateur devra faire preuve de plus de clarté. Il conviendrait de préciser la notion de fait de nature à compromettre la continuité de l'exploitation de manière à ce que l'on établisse clairement, grâce à des critères aussi objectifs que possible le seuil que l'on ne doit pas franchir pour prétendre au déclenchement de l'alerte. Pour cela, l'alerte devra reposer uniquement sur des éléments certains, potentiels ou avérés, mais toujours susceptibles d'affecter l'exploitation avec une probabilité suffisante. Une telle démarche aura le mérite d'aider les commissaires aux comptes et surtout les associés dans leurs fonctions d'alerte et permettra ainsi d'éviter des actions inopportunes. En effet, les suites de l`alerte sont parfois si importantes que son déclenchement gagnerait à être minutieusement encadré. Ainsi, étant donné que les commissaires aux comptes et les associés n'usent en la matière que d'une capacité d'analyse propre87(*), il est souhaitable à notre sens que le critère de mise en oeuvre qui est la seule véritable condition de cette procédure présente toutes les garanties possibles.

La même démarche pourra être envisagée pour ce qui est de l'expertise de gestion.

B - De l'expertise de gestion.

Le législateur n'a posé aucun critère permettant aux associés de demander l'expertise de gestion. Il dispose simplement à l'article 159 de l'AUDSCGIE que « un ou plusieurs associés représentant au moins le cinquième du capital social peuvent, soit individuellement, soit en se groupant, sous quelques formes que ce soit, demander au président de la juridiction compétente du siège social, la désignation d'un ou de plusieurs experts chargés de faire un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion ». Mais le législateur n'a apporté aucune précision sur le caractère desdites opérations de gestion. On peut logiquement penser qu'il s'agit des opérations de gestion jugées inopportunes. Le législateur aurait au moins dû fixer un point d'ancrage sur lequel devront se fonder les associés dans l'exercice de leurs pouvoirs.

En l'absence de critère, les associés se retrouveront libres d'agir au gré de leur désir. Ils pourront le faire de manière purement irresponsable ou dilatoire dans le seul but d'entraver la gestion d'un dirigeant qui leur est antipathique. Cette situation s'avère dangereuse car l'expertise de gestion, à l'instar de l'alerte, peut être préjudiciable à l'entreprise dès l'instant où elle est simplement envisagée. Le risque semble plus élevé ici parce que les associés minoritaires seront tentés de demander l'expertise de gestion toutes les fois qu'ils considéreront qu'une opération de gestion est critiquable. En l'absence d'orientations ou de canalisation légales, ils n'useront que de leur capacité d'analyse propre ou de leur intuition. Les risques d'encombrement des prétoires sont bien réels.

Au demeurant, le législateur aurait pu, comme son homologue français, préciser que l'expertise de gestion sera déclenchée à l'encontre d'une ou de plusieurs opérations de gestion « a priori » contestables88(*).

Une telle précision, bien que restant vague, aura le mérite d'attirer très souvent l'attention des associés, qui dans notre contexte, ne disposent pas toujours suffisamment de connaissances en matière de gestion des entreprises.

Bien plus, elle permettrait une meilleure canalisation des pouvoirs des associés en matière de prévention. Seulement, ces pouvoirs restent bien limités et il est loisible qu'ils soient renforcés.

PARAGRAPHE II : RENFORCEMENT DES POUVOIRS DES ORGANES CHARGES DE LA MISE EN OEUVRE DES MESURES DE PREVENTION DETECTION.

La mise en oeuvre des procédures de prévention-détection incombe prioritairement aux organes de contrôle que sont les commissaires aux comptes et les associés. Leurs pouvoirs d'initiative en la matière restent néanmoins limités. Pourtant, la prévention plus que toute autre matière, mérite une attention particulière. Il vaut toujours mieux tuer le mal à la source. Ainsi, pour une meilleure appréhension des difficultés, il est nécessaire d'opérer un renforcement des pouvoirs préventifs tant des associés (A) que des commissaires aux comptes (B).

A- Le renforcement des pouvoirs des associés.

Les associés ne jouent un rôle dans la détection des difficultés des entreprises que de façon limitée et facultative. Pourtant, leur intérêt à la survie de l'entreprise parait supérieur à d'autres intérêts particuliers car ils sont à la base de la société. Auréolés de cette qualité donc, ils devraient être en mesure d'exercer un contrôle permanent de la gestion de l'unité économique dont ils sont les principaux soutiens. Il est donc difficilement concevable que leur pouvoir d'alerte soit limité à demander des explications aux dirigeants deux fois par exercice seulement. Il est alors souhaitable que l'exercice du pouvoir d'alerte par les associés soit possible toutes les fois qu'ils relèvent des faits de nature à nuire à la bonne marche de l'entreprise. Cette solution qui renforce leur pouvoir de contrôle leur permet de mieux veiller au bien-être économique et financier de l'entreprise. Cela ne semble pas être de nature à poser des difficultés surtout si elles sont accompagnées des mesures énergiques destinées à l'entourer d'une plus grande confidentialité.

Dans le même ordre d'idées, à défaut de multiplier les possibilités d'alerte, on pourra tout simplement consolider la situation existante. Ainsi, on pourra d'abord contraindre les associés à exercer leur pouvoir d'alerte dès lors qu'ils relèvent des faits compromettants. Il est question ici d'annuler le caractère facultatif de leur droit d'alerte. Avec cette mesure, il est certain que si l'omission coupable dans ce cadre est passible de sanction, les associés se sentiront plus concernés par la prévention. A l'évidence, cette solution sera salutaire pour tous, car le bon fonctionnement de l'entreprise entraînera par voie de conséquence la satisfaction de tous les intérêts catégoriels en présence89(*).

Ensuite, il pourra être conféré aux associés les mêmes pouvoirs que ceux reconnus aux commissaires aux comptes en matière d'alerte. Leur rôle ne se limitera donc plus aux questions écrites dont les réponses seront transmises aux commissaires aux comptes. Ils pourront dans cette logique, avoir la possibilité de saisir le président du Conseil d'administration et l'inviter à faire délibérer le conseil d'administration sur les faits en cause. Ils pourront aussi, dans ce cadre, se voir reconnaître le pouvoir de convoquer l'assemblée générale lorsque la dégradation de la situation perdure. Bref, tout le mécanisme d'alerte dévolu aux commissaires aux comptes pourra être étendu aux associés dans le but d'une meilleure appréhension des difficultés de l'entreprise.

Toutefois, il est aussi à noter que les nombreuses inadéquations liées à la mission d'alerte du commissaire aux comptes ne peuvent être réduites que si les pouvoirs de celui-ci sont également élargis.

B- Le renforcement des pouvoirs du commissaire aux comptes.

La fonction nouvelle confiée aux commissaires aux comptes vient élargir son domaine de compétence. Elle s'accompagne d'un infléchissement des fonctions traditionnellement dévolues à ceux-ci. Cette extension devrait en principe être suivie d'une révision non seulement des prérogatives reconnues aux commissaires, mais aussi des obligations à leur charge.

Le commissaire aux comptes bénéficie toujours de certaines prérogatives lui permettant de mener à bien ses missions de contrôle des comptes de la société. Ainsi dispose t-il d'un droit à l'information qui rappelle celui que la loi reconnaît aux actionnaires90(*). Ils doivent aussi disposer d'un pouvoir d'investigation.

Seulement, ces prérogatives semblent n'avoir pas été adaptées à la mission nouvelle d'alerte de l'OHADA. De la lecture des dispositions des articles 150 et 153 de l'AUDSCGIE, il apparaît de manière non équivoque que le commissaire aux comptes n'est pas tenu de rechercher systématiquement les faits donnant lieu à l'alerte. Il doit se limiter aux conséquences tirées des constatations faites dans l'exercice normal de ses fonctions. Tout laisse croire qu'en la matière, il ne dispose d'aucun pouvoir exprès d'investigation lui permettant d'aller au devant des signes annonciateurs de l'alerte. Or, la société contrôlée doit être pour lui une maison transparente. C'est dire que rien ne doit l'empêcher d'accéder aux informations qu'il recherche. Il est même aujourd'hui admis en France qu'il puisse poursuivre ses recherches dans les comptes des personnes physiques ou morales distinctes de la société contrôlée, mais ayant des intérêts liés à celle-ci. C'est le cas par exemple des sociétés qui forment un groupe avec la société contrôlée91(*). Une reconnaissance de cette prérogative à ce niveau conduira certainement à un meilleur rendement.

Mais cela nécessite une révision de l'interdiction faite au commissaire de s'immiscer dans la gestion de l'entreprise. En effet, il est évident que la mise en oeuvre du mécanisme d'alerte par les commissaires aux comptes les oblige à s'immiscer dans la gestion. Ceci est vrai dans la mesure où ils peuvent faire délibérer le conseil d'administration ou convoquer l'assemblée générale des associés. Ces actes sont assurément des actes de gestion. On peut alors justement s'étonner de ce que le législateur n'ait pas révisé le principe de non immixtion des commissaires aux comptes lorsqu'il a consacré la procédure d'alerte.

Pour une meilleure rentabilité, il sera aussi souhaitable d'envisager une multiplication des organes de détection.

SECTION II : L'INDISPENSABLE MULTIPLICATION DES ORGANES DE DETECTION.

En l'état actuel du droit OHADA, les mécanismes de prévention-détection sont purement internes en ce sens qu'ils sont mis en oeuvre par les organes internes à la société, à savoir le commissaire aux comptes et les associés. Pourtant, ils ne sont pas les seuls à disposer des connaissances parfaites de la situation de l'entreprise sur le plan interne. Les salariés peuvent aussi aisément jouer un rôle de détection non négligeable. Une fonction de détection mise à leur charge pourra pallier les manquements des autres organes de contrôle (paragraphe I).

Par ailleurs, dans le système juridique OHADA, il n'existe aucun dispositif qui, hors de la société, permet une vision externe et globale des difficultés. Aussi serait-il loisible de mettre sur pied des moyens de détection précoces des difficultés sur le plan externe. Mais étant donné que la réalisation de cet objectif nécessite des moyens matériels et techniques importants que les Etats membres de l'OHADA ne sont pas toujours en mesure d'offrir, on pourrait limiter l'extension des organes sur le plan externe aux seules autorités judiciaires (paragraphe II).

PARAGRAPHE I : SUR LE PLAN INTERNE : LA RECONNAISSANCE D'UN POUVOIR DE DETECTION AUX SALARIES.

Plusieurs raisons militent en faveur de cette reconnaissance (A). Pour cela, les salariés pourront librement employer des moyens qui seront mis à leur disposition (B).

A- Les raisons.

Les salariés ne sont pas étrangers à la survie de l'entreprise en difficulté. A l'évidence, leur emploi est nettement menacé. Par conséquent, ils ne doivent demeurer extérieurs à la défaillance de l'unité économique qui les emploie92(*). Plus que de simples sujets passifs à qui les mesures de sauvetage s'imposent, ils doivent pouvoir jouer un rôle actif et être aussi souvent à l'origine des mesures de prévention. En effet, comme tous les créanciers, les salariés ont intérêt à ce que l'entreprise en difficulté revienne à de meilleurs rendements, ce qui est une garantie pour le paiement des salaires échus ou à échoir. En plus, l'emploi étant très souvent leur principale source de revenus, sa perte sera pour eux une difficulté supplémentaire.

Par ailleurs, les salariés participant quotidiennement à la vie de l'entreprise, sont souvent les premiers à constater les difficultés de celle-ci. En effet, ils sont constants à des postes qui facilitent l'observation desdites difficultés : c'est le cas des employés au service de la compatibilité et de la caisse. De même, les difficultés financières se manifesteront très rapidement par des difficultés de paiement des salaires (arriérés, paiement avec retard...) ou des mises en chômage technique, voire des licenciements négociés.

Les salariés peuvent donc être en possession d'un certain nombre d'informations qui pourront s'avérer très utiles à la prévention. Ces informations pourraient être systématiquement centralisées au niveau des représentants du personnel. Ces derniers disposant des pouvoirs de détection mis à leur actif, devront alors attirer l'attention des dirigeants.

B- Les moyens de détection des difficultés par les salariés.

D'emblée, il convient de relever que la mise en oeuvre de ces moyens de détection sera confiée aux délégués du personnel. Ils sont en effet les mieux à l'écoute des salariés en ce sens que non seulement ils sont élus par eux, mais aussi ils jouent le rôle d'intermédiaire entre les salariés et l'employeur.

S'agissant à présent des moyens de détection mis à leur disposition, il sera d'abord utile de leur reconnaître un droit d'alerte93(*). Ainsi, les informations connues du délégué du personnel seront portées en discussion devant les dirigeants de l'entreprise. Cette discussion pourra alors être inscrite à l'ordre du jour de la prochaine réunion entre le délégué et le chef d'entreprise. Puis, le procès-verbal de la réunion pourra en cas de besoin94(*) être communiqué au conseil d'administration ou aux associés. La mission d'alerte du délégué du personnel s'arrêterait donc à ce niveau car il n'aura pas le pouvoir de faire délibérer le conseil d'administration ou de convoquer l'assemblée générale des actionnaires. Le résultat obtenu pourra être communiqué au commissaire aux comptes qui en cas de nécessité pourra poursuivre la procédure. En tout état de cause, le délégué du personnel dans le cadre de l'exercice de sa mission d'alerte, devra garder confidentielles toutes les informations dont il a connaissance.

Ensuite, il pourra être accordé au délégué du personnel la possibilité de demander au président de la juridiction compétente la désignation d'un expert de gestion. L'expertise ainsi obtenue lui permettra d'être éclairé au même titre que les associés sur certaines opérations de gestion. Les éclaircissements obtenus devront permettre aux représentants du personnel de mieux fonder leur contestation ou leur droit d'alerte.

C'est donc finalement de la consécration d'un pouvoir de contrôle au profit du personnel qu'il s'agira. Cela se justifie aisément dans la mesure où les salariés font partie intégrante de l'entreprise et sont capables de jouer un rôle effectif de prévention95(*). A l'évidence, la prévention sera renforcée sur le plan interne. Les efforts similaires sur le plan externe pourront aussi rehausser l'éclat de la prévention des difficultés des entreprises dans l'espace OHADA.

PARAGRAPHE II : SUR LE PLAN EXTERNE : RECONNAISSANCE D'UN DROIT DE DETECTION AUX AUTORITES JUDICIAIRES.

Le système de prévention des difficultés des entreprises OHADA n'est pas favorable à l'intervention des organes extérieurs à l'entreprise. Le législateur OHADA semble ainsi faire sienne la tradition du droit français des sociétés qui n'admettait pas un contrôle externe de la gestion96(*). Pourtant, le droit des sociétés est en pleine évolution et il serait temps pour le législateur de prendre conscience de la nécessité d'un accroissement de l'interventionnisme économique afin de favoriser la prévention des difficultés. Pour ce faire, il sera nécessaire de confier à certaines conditions un pouvoir de détection aux autorités judiciaires que sont notamment le président du tribunal compétent (A) et le ministère public (B).

A- L'alerte par le Président du Tribunal compétent.

Le président du tribunal compétent en matière commerciale doit pouvoir jouer un rôle important et essentiel en matière d'alerte. Il pourra à cet effet intervenir lorsque l'entreprise connaît des difficultés de nature à compromettre la continuité de l'exploitation. Il pourra être renseigné de cet état de choses par divers organes de la société. Il s'agira par exemple des dirigeants de l'entreprise eux-mêmes qui portent à sa connaissance des difficultés auxquelles ils sont confrontés. De même, les commissaires aux comptes qui constatent l'échec de l'alerte qu'ils ont engagé pourront également faire part de cette situation au juge compétent pour l'amener à user de son autorité à l'encontre des dirigeants. Il pourra dans la même logique être informé par le greffe de sa juridiction qui met à sa disposition des informations relatives aux difficultés des entreprises dont il a connaissance. Le greffier devra lui signaler des injonctions de payer récurrentes, les inscriptions massives des privilèges du trésor et des sûretés, le non dépôt des comptes annuels etc.

Pour bien mener à bien sa mission, le président pourra lui-même organiser un réseau d'information au sein de sa juridiction en prenant en compte des réalités locales. Mais le législateur devra aussi s'investir dans cette tâche en réunissant autour du président du tribunal l'ensemble des acteurs de la prévention notamment les banques et établissements de crédit, les commissaires aux comptes, les associés et même les créanciers, chacun apportant à son niveau le plus grand nombre d'informations sur les entreprises. Par la suite, les informations recueillies, après avoir été soigneusement recoupées, permettront au Président du Tribunal de faire convoquer les entreprises concernées dans le strict respect de la confidentialité. La convocation des dirigeants aura pour but de rechercher les mesures propres à redresser la situation. L'alerte aura ici pour but une concertation entre le président et les dirigeants afin de parvenir à un sauvetage de l'entreprise. Le président n'aura aucun pouvoir de contrainte, mais seulement un rôle d'information et de mise en garde97(*). Néanmoins, il est évident que le succès d'une telle opération dépendra de son « charisme », de son autorité ou de son influence98(*).

Pour l'essentiel donc, le président n'agira pas en qualité d'organe juridictionnel mais en tant que conseiller capable d'apporter son aide ou son arbitrage aux entreprises en période difficile. Les représentants du ministère public par contre pourront agir avec beaucoup plus d'autorité.

B- La détection des difficultés par le ministère public.

En matière commerciale, l'intervention du ministère public est rare99(*). Pour ce qui est du contrôle des sociétés, le ministère public joue un rôle très important en tant que gardien de l'ordre public économique. Ses actions à caractère pénal sont en fait très efficaces au maintien du bon ordre économique. En matière de procédures collectives, les pouvoirs du ministère public ont connu une profonde évolution avec l'AUPCAP. Désormais, il intervient pour exercer des compétences qui lui sont propres. C'est le cas en matière de redressement judiciaire et de liquidation des biens. Ici, à côté de son pouvoir de supervision des opérations engagées, certaines actions spécifiques lui sont reconnues.100(*)

Mais son rôle en matière de détection est inexistant. Pourtant, il est évident que compte tenu des missions qu'il est appelé à remplir, les représentants du ministère public peuvent être mis au courant des difficultés que connaît les entreprises. Ses représentants sont ainsi régulièrement informés à la suite des plaintes d'actionnaires, des créanciers ou à la suite des faits portés à leur connaissance par les commissaires aux comptes101(*). Ainsi, ils pourront aisément, sur la base de ces informations, attirer l'attention des dirigeants sur l'état des difficultés réelles ou potentielles de leur entreprise.

En décidant de mettre le ministère public à l'écart de la prévention, le législateur OHADA limite de réelles possibilités de performances de cette procédure.. En effet, étant donné que les procédés de contrôle de l'entreprise ont été limités sur le plan interne, le ministère public en tant que garant de l'ordre public et de l'intérêt général pourra bien se voir conférer un pouvoir de détection. Ce ci ne sera qu'une logique dans la mesure où depuis longtemps la sauvegarde des entreprises et le maintien de l'activité et de l'emploi, et l'apurement du passif intéressent les pouvoirs publics en raison de leur impact sur d'autres entreprises et sur l'ensemble de l'économie.

Le pouvoir de détection des autorités judiciaires aura le privilège de pallier les nombreuses incohérences et inadaptations de la prévention -détection organisée par le législateur OHADA. En fait, ce système de prévention favorise les grosses structures économiques au détriment des petites entreprises qui pullulent pourtant en Afrique. Or, ces entreprises ne peuvent ni se doter des commissaires aux comptes, ni fournir de possibilités d'alerte efficaces provenant des associés. Elles se singularisent presque toujours par leur caractère unipersonnel et leurs dirigeants présentent le plus souvent un déficit criard en matière de gestion d'entreprise.102(*)

Tous ces constats rendent la prévention-détection purement illusoire dans ces sociétés, nombre de celles-ci passent une grande partie de leur vie dans les difficultés prévisibles sans qu'aucune mesure ne soit concrètement prise en leur faveur. C'est la raison pour laquelle le secteur informel est le plus instable et le plus incertain en Afrique malgré son importance. Face à ces limites, l'exercice de la prévention par le juge, et surtout par le ministère public pourra favoriser un contrôle salutaire des petites et moyennes entreprises en zone OHADA.

CONCLUSION DU TITRE I.

En définitive, le constat est simple : la prévention-détection reste insatisfaisante et les nombreuses limites qui lui sont inhérentes sont au coeur de cet état de choses. En effet, les mécanismes existants ne sont pas suffisamment adaptés au contexte. De même, la complexité de certains d'entre eux est de nature à rendre incertaine leur application. En plus, les mesures prévues n'interviennent pas toujours assez rapidement pour enrayer les difficultés survenues.

Le caractère restrictif de ces techniques de détection des difficultés des entreprises ne permet de contrer qu'une partie des difficultés qui minent l'entreprise. Le plus souvent, compte tenu de la nature des organes destinés à user de ces mesures, la détection n'est véritablement mise en oeuvre que lorsque les signes des défaillances sont déjà visibles. Pourtant, l'aspect invisible peut être plus profond. Il est donc nécessaire, pour une plus grande appréhension des signes tant visibles qu'invisibles des difficultés qui pourraient affecter l'entreprise, que le système soit nettement amélioré.

Cette amélioration devra s'inscrire dans le sens d'une plus grande clarification des critères de mise en oeuvre des mesures prévues. En plus, l'effort devra être poussé jusqu'à la multiplication des organes de mise en oeuvre desdites mesures ainsi qu'à un renforcement substantiel de leurs pouvoirs. Ceci permettra aux professionnels concernés de rassurer le dirigeant sur la prévention et l'informer en amont dès la survenance des difficultés juridiques, économiques ou financières avérées ou prévisibles. Par un traitement bien en amont des difficultés des entreprises donc, on espèrera limiter la casse. Bien plus, on pourra éviter la survenance de nombreux désagréments qu'implique le règlement préventif qui constitue la prévention- traitement.

TITRE II : LES OBSTACLES AU PLEIN RENDEMENT DE LA PREVENTION-TRAITEMENT OU REGLEMENT PREVENTIF

« La prévention est au coeur des préoccupations législatives »103(*). Ce souci se traduit dans le cadre des procédures collectives OHADA par la mise sur pied d'une procédure préventive appelée règlement préventif. Mais en réalité, contrairement à ce que peut laisser penser sa dénomination, le règlement préventif joue en réalité deux fonctions indissociablement liées : une fonction préventive et une fonction curative. La fonction préventive est imposée par les conditions de la procédure tandis que la fonction curative est liée à sa finalité104(*).

En effet, le règlement préventif est une procédure destinée à éviter la cessation des paiements ou la cessation d'activités au moyen d'un concordat préventif105(*). Il est organisé par les articles 5 à 24 dudit Acte uniforme. Tout en s'inspirant de la procédure de suspension provisoire des poursuites de l'ordonnance française du 23 septembre 1967 et du règlement amiable de la loi toujours française du 1er mars 1984106(*), il les remplace en tentant de les rendre plus efficace107(*).

Le règlement préventif a un domaine d'application très étendu. Il couvre toutes les entreprises quelle que soit leur forme (individuelle, collective, entreprises publiques constituées sous la forme d'une personne morale de droit privé).

Il accorde aussi une place de choix à la liberté contractuelle108(*). A travers lui en effet, vont se négocier des délais et remises de dettes entre les créanciers et le débiteur. De ce fait, le règlement préventif semble également s'inspirer du concordat amiable qu'il est toujours loisible de conclure entre le débiteur et ses créanciers. En contrepartie de ces sacrifices consentis par les créanciers, le débiteur sera tenu de prévoir un plan de redressement fiable de l'entreprise. Les interventions de l'autorité judiciaire sont destinées à sécuriser l'accord passé en le préservant d'un certain nombre de risques tels que la rupture abusive de l'égalité entre les créanciers, la fraude, la poursuite abusive de l'exploitation, etc.109(*). Dans cette logique, l'expert désigné à l'occasion par le président du tribunal favorise les négociations entre le débiteur et ses créanciers.

La procédure de règlement préventif s'ouvre à l'initiative du débiteur et donne lieu à la prise de certaines mesures dans le but d'assurer le sauvetage de l'entreprise. Toutefois, cette procédure est parsemée d'embûches empêchant sa pleine efficacité. En effet, les mesures envisagées ne sont pas exemptes de contestations (chapitre II), à l'image des conditions d'ouverture du règlement préventif dont les contours sont incertains (chapitre I).

CHAPITRE I : L'INCERTITUDE DANS LES CONDITIONS D'OUVERTURE DE LA PROCEDURE.

Le règlement préventif est le « talon d'Achille » de la prévention des difficultés des entreprises dans la réglementation OHADA. Il est susceptible de conférer des avantages non négligeables aux entreprises concernées. Dès lors, afin d'éviter que celles-ci ne soient tentées de l'utiliser à des fins purement dilatoires, sa mise en oeuvre est juridiquement encadrée. Aussi, plusieurs conditions tenant au fond et à la forme sont exigées pour son déclenchement.

Concrètement, le débiteur qui fait face à des difficultés économiques et financières sans que sa situation ne soit irrémédiablement compromise, peut demander l'ouverture d'une procédure de règlement préventif en vertu de l'article 2 al. 1. Il y a urgence avec cependant une possibilité pour les choses d'être encore sauvées. Pour ce faire, le débiteur et lui tout seul est habilité à adresser au président de la juridiction compétente une requête exposant sa situation économique et financière avec les perspectives de redressement de l'entreprise et d'apurement de son passif110(*). La requête doit en outre être accompagnée des documents prévus à l'article 6 de l'AUPCAP et d'une offre de concordat conforme à l'article 7.

De ce qui précède, il apparaît clairement que l'article 2 al 1 pose le critère d'ouverture du règlement préventif mais en de termes imprécis et délicats (section 1). Ce critère est combiné à des conditions de forme qu'on peut à juste titre qualifier de restrictives en ce sens qu'elles imposent une initiative exclusive du débiteur en la matière (section 2).

SECTION I : L'IMPRECISION DU CRITERE D'OUVERTURE.

L'article 2 al. 1 de l'AUPCAP dispose que « le règlement préventif est applicable à toute personne physique ou morale commerçante et à toutes personne morale de droit privé non commerçante, à toute entreprise publique ayant la forme d'une personne morale de droit privé qui, quelle que soit la nature de ses dettes, connaît une situation économique et financière difficile mais non irrémédiablement compromise ». Ainsi, la procédure de règlement préventif ne peut s'appliquer qu'aux entreprises où la situation économique et financière n'est pas désespérément dégradée. Le législateur a certainement voulu anticiper autant que faire se peut sur la menace de cessation des paiements en adoptant un critère souple. Mais ce souci l'a finalement conduit à une absence de définition précise (paragraphe I), ce qui rend cette notion de « pré cessation des paiements » difficile à distinguer de la cessation des paiements à laquelle on l'oppose (paragraphe II).

Après ces constats navrants, il est évident que pour aboutir à une meilleure utilisation et combler amplement les espoirs fondés sur le règlement préventif, il serait prudent de réaménager le critère commandant son ouverture (paragraphe III).

PARAGRAPHE I : UNE ABSENCE DE DEFINITION LEGALE PRECISE.

La condition imposée à l'article 2 al. 1 de l'AUPCAP apparaît bien difficile à définir d'un point de vue théorique et par conséquent fort délicate à mettre en oeuvre111(*).

A priori, pour bénéficier de l'ouverture d'une procédure de règlement préventif, l'entreprise ne doit pas être dans une situation économique et financière sans issue. Le renvoi à des difficultés économiques est important et se situe en droite ligne du règlement amiable français qui, depuis la réforme de 1984, a également pris en compte le critère économique112(*). Cette orientation a été confirmée et renforcée par la nouvelle réforme intervenue en 2005113(*). Le débiteur peut invoquer des difficultés résultant de la conjoncture et du contexte économique ou des difficultés financières dont la résolution dépasse le cadre habituel de gestion.

Selon la lettre du texte OHADA cependant, il semble que le cumul des difficultés de nature économique et financière soit nécessaire, car l'acte uniforme en son article 2 parle de « difficultés économiques et financières ». La question se pose alors de savoir si cette exigence est volontaire et traduit le souci du législateur de limiter le domaine d'application de la procédure du règlement préventif, ou alors s'il s'agit d'une simple maladresse législative. En effet, une lecture stricte du texte sus cité imposerait de refuser l'ouverture du règlement préventif à l'entreprise qui connaîtrait seulement des difficultés économiques. De même, le bénéfice de la procédure ne sera pas accordé si l'entreprise ne connaît que des difficultés financières. Une telle solution serait regrettable dans la mesure où, très souvent, les difficultés économiques vont de pair avec les difficultés financières ou sont susceptibles de les entraîner rapidement dans leur sillage et vice versa. Donc, une interprétation souple du critère est souhaitable et le critère économique doit être interprété de manière large. Aussi, toute difficulté, quelle que soit son origine, devra aisément fonder l'octroi du règlement préventif114(*).

Au demeurant, le recours au règlement préventif suppose une évaluation minutieuse des chances de survie de l'entreprise en relation avec les difficultés qu'elle rencontre. Ces difficultés ne doivent pas être minimes ou provisoires. Elles doivent être sérieuses pour traduire une situation qui aboutirait à terme à l'impossibilité de la continuité de l'activité si des mesures appropriées ne sont pas prises115(*).

Pour son information, le Président du Tribunal saisi dispose des documents fournis par le débiteur lors de sa requête116(*) et d'un état de la situation économique et financière de l'entreprise doublé des perspectives de redressement envisagées par ce dernier117(*). Elle obtient aussi des informations supplémentaires à la suite du rapport de l'expert et de l'audition du débiteur118(*).

Le critère de l'article 2 al. 1 de l'AUPCAP est certes large, mais la clarté n'est pas sa caractéristique principale. La détermination de sa signification précise est délicate. L'on peut alors craindre, au regard des leçons tirées du droit comparé, que les entreprises ne recourent au règlement préventif que pour des motifs purement dilatoires alors même qu'elles ne traversent que des difficultés passagères119(*).

Il est aussi à craindre que le règlement préventif soit très souvent invoqué alors que la situation est déjà profondément compromise par l'effectivité de la cessation des paiements120(*). Ce constat résulte du malaise éprouvé en pratique pour distinguer cette situation de «pré cessation des paiements » de la cessation des paiements elle-même.

PARAGRAPHE II : UNE DISTINCTION MALAISEE PAR RAPPORT A LA CESSATION DES PAIEMENTS.

La frontière entre la prévention et le traitement des difficultés des entreprises est actuellement la cessation des paiements. L'entreprise, pour bénéficier du règlement préventif, ne doit pas se trouver en cessation des paiements. C'est justement cet état de cessation des paiements que le recours à cette procédure est destiné à éviter121(*). Mais, il est à redouter que l'imprécision de son critère de mise en oeuvre ne le rende incapable de jouer pleinement ce rôle, surtout que les limites ne sont pas étanches entre le critère de l'article 2 al. 1 et la cessation des paiements.

L'article 25 de l'AUPCAP donne une définition de la cessation des paiements en précisant que l'entreprise concernée doit être dans « l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible ». Originairement donnée par la chambre commerciale de la Cour de cassation française122(*), cette définition n'est pas facile à cerner car elle évoque deux notions assez délicates à l'entendement : l'actif disponible et le passif exigible. L'importante jurisprudence combinée aux récents débats doctrinaux en la matière en France l'attestent assurément123(*).

Le passif exigible correspond au passif échu, c'est-à-dire le passif qui n'a pas été payé, alors qu'il aurait dû l'être124(*).

L'actif disponible quant à lui renvoie aux sommes dont l'entreprise peut disposer immédiatement soit parce qu'elles sont liquides, soit parce que leur conversion est possible à tout moment. Il s'agit plus précisément de la trésorerie de l'entreprise125(*).

Le débiteur doit cependant être dans l'impossibilité de « faire face » avec l'actif disponible au passif exigible. Ce qui peut se traduire par l'arrêt de service de caisse, l'émission des chèques sans provision ou même l'utilisation des moyens ruineux ou frauduleux par le débiteur pour faire face à ses échéances126(*).

Dans l'ensemble, les éléments constitutifs de la cessation des paiements et de la « situation difficile mais non irrémédiablement compromise » peuvent être les mêmes avec cependant une différence de degré ou d'appréciation. A la vérité, la cessation des paiements n'est pas toujours synonyme de situation irrémédiablement compromise. Dans certains cas de cessation des paiements en effet, l'entreprise peut encore être sauvée. Il appartiendra au juge de décider de l'avenir de la société en analysant son degré de difficultés. Ainsi, si la cessation des paiements est avérée sans que pour autant tout espoir ne soit perdu, le juge prononcera le redressement judiciaire. Dans le cas contraire, c'est la liquidation des biens qui sera prononcée. C'est dire qu'en définitive, une situation irrémédiablement compromise est un état de cessation des paiements profond et irréversible. En somme, on peut penser que la situation difficile non irrémédiablement compromise pourra dans certains cas se traduire par une cessation des paiements partielle. Ainsi, dans une affaire soumise à son jugement, le Tribunal de grande instance de Ouagadougou (Burkina Faso) a refusé de déclarer une société en cessation des paiements malgré le fait qu'elle n'était plus en mesure de payer certains de ses créanciers127(*).

Le législateur français semble avoir pris en compte cette considération en prévoyant dans la loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005, entrée en vigueur le 1er janvier 2006, la possibilité d'ouverture de la procédure de conciliation au profit d'un débiteur en cessation des paiements, mais pas depuis plus de 45 jours. Dès lors, on peut valablement s'accorder avec la doctrine qui estime que la situation financière difficile est une cessation des paiements virtuelle128(*).

La situation difficile non irrémédiablement compromise est donc définie négativement par rapport à la cessation des paiements par le législateur OHADA. Cette orientation ouvre la voie aux risques graves de confusion, d'erreurs et de conflits d'appréciation pouvant aboutir au prononcé de la cessation des paiements alors que l'entreprise peut encore être sauvée. Inversement, on pourra décider du règlement préventif alors que la cessation des paiements est réellement avérée. Cette situation est susceptible d'avoir des conséquences désastreuses quand on sait que tout doute sur les comptes d'une entreprise peut lui être fatal129(*).

Ces imprécisions sont très souvent à l'origine des divergences de vue entre le débiteur et ses créanciers. Le premier, soucieux de son redressement, opte volontiers pour le règlement préventif alors que les créanciers seront plus favorables à la liquidation des biens, mieux à même de leur assurer un désintéressement immédiat. Dans l'affaire société BOULANGERIE 2000 précitée, tous les principaux créanciers déclaraient l'entreprise en cessation des paiements et exigeaient sa liquidation. Le débiteur quant à lui, en demandant le bénéfice du règlement préventif, s'efforçait de démontrer que sa situation bien que difficile était loin de se confondre avec la cessation des paiements. Il revint donc au juge de trancher la question130(*).

A l'évidence, les choses ne sont pas suffisamment claires dans un domaine où le salut exige une précision d'analyse. Malgré l'intervention de l'article 15 de l'AUPCAP qui impose au juge de prononcer « d'office et à tout moment le redressement judiciaire ou la liquidation des biens», il reste encore très possible de voir le règlement préventif conforter les abus de certains débiteurs qui tentent d'échapper au moins momentanément aux procédures collectives les plus graves. Un réaménagement du critère d'ouverture de cette procédure préventive est donc à souhaiter.

PARAGRAPHE III : POUR UN REAMENAGEMENT DU CRITERE D'OUVERTURE.

Pour que le règlement préventif ait un rendement plus satisfaisant, il est nécessaire qu'à sa base, sa mise en oeuvre soit d'une aisance évidente. Ce qui ne veut pas dire que ses possibilités d'utilisation soient multipliées à l'infinie131(*), mais plutôt que le critère d'ouverture soit utilisé à bon escient. Le règlement préventif dont l'admission emporte des effets notoires sur les acteurs économiques en cause a pour seul critère d'ouverture la situation économique et financière non irrémédiablement compromise. Mais seulement, la loi n'énumère pas les éléments caractéristiques de cette situation, laissant ainsi le soin à la juridiction saisie de l'apprécier souverainement sur la base du rapport de l'expert. Cette solution peut donc, dans certains cas, générer des difficultés compte tenu du caractère souple du critère retenu. Une révision du critère est donc souhaitable et doit aller dans le sens d'une meilleure clarification. Ledit critère doit gagner en précision et surtout se démarquer de la notion de cessation des paiements à laquelle on l'oppose.

En effet, la prévention est affectée par la définition de la cessation des paiements qui l'a entachée d'insécurité132(*). Même s'il est vrai que l'esprit du législateur OHADA situe les difficultés économiques et financières à l'aube de la cessation des paiements, il n'en demeure pas moins que le règlement préventif ne sera souvent demandé que lorsque le débiteur se trouve déjà dans l'impossibilité de faire face à une partie non négligeable de son passif exigible133(*).

Au demeurant, un critère beaucoup plus clair et précis devra rationnellement guider le débiteur dans sa démarche ; il pourra dès lors l'employer utilement chaque fois que le besoin se fera sentir, surtout qu'il est le seul habilité à engager la procédure.

SECTION II : LES POUVOIRS EXORBITANTS RECONNUS AU DEBITEUR.

Le législateur a aménagé de façon assez restrictive les conditions de forme du règlement préventif en conférant tous les droits au seul débiteur. Le débiteur et lui seul est habilité à former la requête introductive d'instance (paragraphe I) et à élaborer l'offre de concordat préventif (paragraphe II).

PARAGRAPHE I : L'INTRODUCTION DE LA REQUETE EXCLUSIVEMENT PAR LE DEBITEUR

En règle générale, ni les créanciers, ni le ministère public ne peuvent demander l'ouverture du règlement préventif. Le tribunal compétent ne peut non plus se saisir d'office puisque l'acte uniforme accorde ce pouvoir au seul débiteur. Cette démarche, raisonnable à certains égards (A), présente néanmoins de nombreux inconvénients (B).

A- Les raisons.

Le recours au règlement préventif s'apparente à un acte de gestion134(*). C'est au débiteur qu'il appartient de saisir par requête le président du tribunal compétent (article 5). Cette solution peut paraître louable en ce sens où le débiteur est incontestablement le bien placé pour mieux apprécier la gravité de sa situation. En tant que commerçant personne physique ou représentant légal d'une personne morale, il est celui qui vit au jour le jour la situation réelle de l'entreprise et est par conséquent apte à décider de l'opportunité de la demande. De même, il peut facilement fournir les documents exigés à l'appui de la demande par l'article 6 de l'AUPCAP.

Par ailleurs, l'entreprise étant en mesure d'exécuter ses obligations, on ne peut pas encore lui imposer une procédure collective. Ainsi, dès qu'il le juge nécessaire, le débiteur saisit le président de la juridiction compétente par voie de requête exposant sa situation économique et financière avec les perspectives de redressement.

L'exclusion des créanciers parait fondée car la société est encore en mesure de faire face à ses obligations. Ces derniers n'ont aucun intérêt à accomplir une telle démarche qui tendrait à limiter leurs droits. Il est impensable en effet qu'ils déclenchent une procédure dont l'effet principal est de retarder, voire compromettre leurs chances d'obtenir paiement de leurs créances.

L'exclusion du tribunal et du ministère public peut s'expliquer par des difficultés d'appréciation que ceux-ci peuvent rencontrer sur le terrain. Le déclenchement du règlement préventif suppose une appréciation minutieuse et précise de la situation de l'entreprise qui ne relève nullement de la compétence des organes judiciaires. Leur laisser la possibilité de déclencher le règlement préventif entraînerait par voie de conséquence l'immixtion indésirable des autorités judiciaires dans la gestion de l'entreprise. De surcroît, elle pourrait favoriser des déclenchements très précoces ou inopportuns risquant de provoquer la faillite de l'entreprise.

L'acte uniforme confère la faculté de saisine de la juridiction compétente au débiteur sans aucune autre précision. Toutefois, la notion de débiteur doit être interprétée de manière large135(*).

Quoiqu'il en soit, cette importante prérogative accordée au débiteur ne va pas sans inconvénients.

B- Les manquements.

Le législateur OHADA en laissant l'apanage de la saisine au débiteur provoque un certain nombre de manquements ou de difficultés en la matière.

D'abord, l'acte uniforme ne contient aucune disposition qui oblige le débiteur à recourir au règlement préventif. Seul le critère très vague de l'article 2 al. 1 est retenu. Il apparaît que le débiteur est pratiquement libre d'engager la procédure ou non. La faculté qui lui est reconnue en la matière semble ne souffrir d'aucune exception. Aucun délai n'est imposé en fonction de la survenance des difficultés. Il apprécie d'ailleurs souverainement ces difficultés. Il a certes intérêt à ce que la mesure intervienne rapidement car une intervention rapide et justifiée peut s'avérer salutaire. Mais très souvent aussi, il gardera l'espoir d'une résolution de ses difficultés dans la plus grande discrétion et surtout sans attirer l'attention d'un grand nombre de personnes136(*). Le secret des affaires et l'espérance de voir du jour au lendemain la conjoncture redevenir favorable, pousseront le débiteur à hésiter quant à l'engagement d'une procédure de règlement préventif faisant intervenir le juge.

Le débiteur pourra aussi être beaucoup plus tenté par des négociations privées avec ses principaux créanciers dans le but d'obtenir des remises et des délais de paiement favorables. Pour cela, il optera volontiers pour la solution des accords amiables. Seulement, à l'analyse du droit comparé, ces accords n'ont pas obtenu le succès escompté137(*). Pratiquement, « tous les arrangements conclus par voie extra légale contribueront à isoler la justice des réalités de la vie sociale, lui réservant de préférence les affaires irrémédiablement compromises »138(*). Le risque de voir le recours du débiteur intervenir trop tard resurgit à ce niveau. Certes, l'article 197 al. 5 de l'AUPCAP frappe de faillite personnelle « la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire l'entreprise qu'à la cessation des paiements ». Mais il serait toujours abusif de faire une application systématique de cette sanction pénale du seul fait de l'absence ou du caractère tardif de la saisine du juge. Ces faits ne peuvent à eux seuls caractériser les actes visés à l'article 197, car pour fonder une sanction, un manque de diligence doit par exemple s'accompagner d'une poursuite abusive de l'exploitation139(*).

Ensuite, le déclenchement d'une procédure de règlement préventif ne pourra jamais apparaître comme la conséquence inévitable d'une procédure d'alerte. Il en est de même des questions écrites sur la situation sociale pouvant être posées par les associés. Inversement, l'absence d'alerte ne lui interdit pas de recourir à cette procédure140(*).

Enfin, le débiteur a la possibilité de produire avec la demande les documents comptables exigés à l'appui de sa demande. Ces documents doivent être datés, signés, certifiés conformes et sincères par le requérant (article 6 AUPCAP). Tous les documents exigés sont assurément pertinents, mais leur nombre élevé et la difficulté de les établir rapidement pourraient conduire à user abondamment de l'exception qui consiste en l'indication des motifs de l'absence ou du caractère incomplet de telle ou telle pièce, particulièrement pour les petites et moyennes entreprises141(*). Certains documents exigés supposent une bonne organisation et un suivi comptable permanent et sophistiqué que les petites entreprises ne sont pas toujours en mesure d'offrir. Ce sera très souvent le cas des commerçants personnes physiques et des petites sociétés familiales dont le nombre n'est pas à négliger dans l'aire géographique OHADA.

La requête introductive d'instance en matière de règlement préventif ainsi laissé à la charge du seul débiteur ne pourra recevoir une suite que si elle est accompagnée d'une offre de concordat dont l'élaboration est aussi exclusivement confiée au débiteur.

PARAGRAPHE II : L'ELABORATION DU CONCORDAT PREVENTIF PAR LE DEBITEUR.

De l'article 7 de l'AUPCAP, il ressort clairement que le débiteur doit déposer une offre de concordat à peine d'irrecevabilité de sa demande. Cette prescription traduit déjà l'importance du concordat (A) dont l'élaboration est soumise à certaines conditions, lesquelles conditions recèlent une part d'ambiguïté (B).

A- L'importance du concordat.

Le concordat est un document qui présente un plan de redressement de l'entreprise et de règlement de son passif envisagé par le débiteur. Le concordat préventif doit être clairement distingué du concordat amiable. Cette dernière notion désigne un accord passé entre le débiteur et ses créanciers au terme duquel les créanciers accordent des délais de paiements ou des remises de dettes à leur débiteur afin d'éviter la cessation des paiements ou l'ouverture d'une procédure collective. Ce concordat ne fait pas l'objet d'une homologation judiciaire. Malgré les réticences de la doctrine, il est parfaitement licite142(*). Il est d'un intérêt majeur dans le droit des procédures collectives OHADA en général et dans son volet préventif en particulier. En effet, le législateur africain a tenu à le revaloriser malgré sa disparition en France depuis la loi du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises.

L'importance du concordat réside en ce qu'il est destiné à prévoir soit un règlement intégral des créanciers à plus ou moins longue échéance, soit un remboursement partiel immédiat des créances à défaut de combiner les deux procédés. Son fondement reste et demeure le remboursement des créanciers dans les délais les plus favorables possibles. Pour cela, le débiteur doit parvenir avec eux à des accords individuels ou collectifs, en vue d'obtenir des remises et des délais. Il est parfaitement établi que le concordat est la pierre angulaire de la procédure de règlement préventif car tout au long du déroulement de la procédure, les organes du règlement préventif s'attèleront à l'exécution du concordat proposé par le débiteur et homologué par le juge compétent.

C'est la raison pour laquelle le concordat doit être sérieux et présenter des possibilités réelles d'exécution. A défaut, le débiteur s'expose à des procédures collectives plus graves. Le juge peut en effet prononcer d'office la liquidation judiciaire lorsqu'il constate que l'offre de concordat du débiteur est irréalisable143(*).

La validité du concordat proposé par le débiteur est néanmoins soumise à certaines conditions rigoureuses et parfois entachées d'ambiguïté.

B- L'ambiguïté des conditions d'élaboration du concordat préventif.

L'essentiel des conditions d'élaboration du concordat préventif tient à son contenu (1) et au délai de son dépôt (2). Mais à l'analyse, il ressort que ces conditions sont souvent ambiguës.

1- De par le contenu.

L'offre de concordat préventif doit préciser les mesures et conditions envisagées pour le redressement de l'entreprise. L'acte uniforme en son article 7 est à cet égard d'une « redoutable précision »144(*). Il fournit avec précision des mesures ou conditions de redressement de l'entreprise qui se résument grosso modo en des mesures tendant à la continuation de l'entreprise et son assainissement d'une part et d'autre part, aux modalités et garanties du règlement de son passif145(*). On peut dès lors relever que le débiteur conçoit seul les pistes de redressement qui intéressent aussi grandement les créanciers. Ceci d'autant plus que les modalités de continuation de l'entreprise telles que les délais et remises sont demandés aux créanciers qui ne sont pas tenus de les consentir146(*). Rien ne les y oblige d'ailleurs. Ils ne le feront que de manière délibérée. Malgré les bons offices de l'expert, les créanciers peuvent se montrer réticents à concéder de telles mesures. Déjà, l'offre de concordat fournit par le débiteur aura pour effet immédiat de susciter leur méfiance. Il est à redouter qu'entre le moment où l'offre de concordat est présentée et la date prévue pour son homologation, les créanciers non interdits de poursuite soient plutôt enclins à exiger leur désintéressement par crainte d'une insolvabilité future du débiteur. Ce dernier n'ayant pas encore cessé ses paiements, pourra difficilement échapper aux paiements de ses créanciers les plus diligents.

En plus, de l'article 15 de l'AUPCAP, il ressort que, outre le respect des conditions de validité, le concordat doit respecter l'ordre public et l'intérêt collectif. Il doit également être sérieux. Malheureusement, ces deux dernières conditions manquent de précisions.

Les notions d'intérêt collectif et d'ordre public peuvent se dilater à l'extrême. Dans cette perspective, de nombreux concordats pouvant valablement aboutir à la sauvegarde de l'entreprise seront écartés parce que contraires à l'ordre public et à l'intérêt collectif. La notion d'intérêt mérite d'ailleurs d'être spécifiée, car met en commun une multitude d'intérêts contradictoires. L'intérêt principal des procédures collectives OHADA est le paiement des créanciers147(*), en contradiction avec l'intérêt de l'entreprise. Pourtant l'intérêt de l'entreprise, parce que fédérant tous les intérêts en présence, peut à juste titre être considéré comme l'intérêt collectif. Or, le concordat dépendant du bon vouloir des créanciers, ceux-ci seront portés à préserver premièrement leurs intérêts égoïstes148(*).

Par ailleurs, le concordat ne peut être homologué que s'il est sérieux. C'est au juge qu'il revient d'apprécier le caractère sérieux du concordat. Mais, sur quelles bases le juge apprécie-t-il ce caractère ? Devant le mutisme du législateur, il est évident que le juge disposera des pouvoirs d'appréciation très étendus en la matière. Il devra à cet effet s'inspirer du rapport de l'expert. Toutefois, rien ne l'oblige à se conformer à ce rapport. En somme, l'appréciation du sérieux du concordat résultera de l'intime conviction du juge. Si le concordat n'est pas sérieux, le juge pourra être amené à prononcer la liquidation des biens149(*). Cette situation ne sera pas rare en pratique, car la durée du délai exigé pour le dépôt du concordat n'est pas de nature à faciliter l'établissement d'un concordat sérieux par le débiteur.

2- De par le délai du dépôt.

L'offre de concordat doit être déposée en même temps que les documents accompagnant la requête ou au plus tard dans les trente jours qui suivent le dépôt desdits documents. A défaut, l'offre est irrecevable. La durée de ce délai150(*) parait trop brève pour permettre d'élaborer une offre sérieuse au regard des importantes questions qui doivent y être traitées151(*). Cette limitation de délai tend à réserver la procédure aux entreprises bien structurées. En ce sens, seules les sociétés les plus importantes ayant une comptabilité régulière et suffisamment transparente pourront facilement accomplir cette tâche. A l'inverse, les petites entreprises qui se multiplient dans l'aire OHADA, ne pourront jamais établir une offre de concordat dans le délai exigé. Ainsi, quand bien même le concordat interviendra, il sera très souvent dépourvu de sérieux et de précisions. Or de l'article 15 al. 2 de l'AUPCAP, il ressort que la juridiction n'homologue le concordat que si celui-ci présente des possibilités sérieuses de redressement de l'entreprise, de règlement de son passif et des garanties suffisantes d'exécution. A défaut, la juridiction sera amenée à refuser l'homologation et par conséquent annuler l'ordonnance de suspension des poursuites comme il l'a fait dans l'espèce Boulangerie 2000 précitée. Pire, conformément à l'article 15 précité, la juridiction compétente pourra d'office prononcer la liquidation des biens avec toutes les conséquences de droit152(*).

La doctrine pense qu'il aurait été judicieux d'exiger le dépôt du projet du concordat en même temps que la requête eu égard à l'absence de délai prévu à cet effet. Ainsi, la décision d'ouvrir la procédure ne sera prise qu'après le dépôt du projet de concordat153(*). Mais avec une telle solution, il est à craindre pour le débiteur lucide qui constate à temps ses difficultés. Il est toujours possible que la situation se détériore rapidement si des mesures appropriées ne sont pas prises rapidement. A cela, on peut ajouter le fait que pour nombre de dirigeants des petites et moyennes entreprises, l élaboration d'un concordat ne doit pas être aisée et pourra prendre un temps suffisamment long pour que l'entreprise sombre dans la cessation des paiements.

Dans tous les cas, il doit être conseillé au débiteur d'élaborer une offre de concordat avant d'introduire sa requête si l'état de ses difficultés le permet. La solution la plus plausible semble à notre avis être celle d'un allongement du délai en la matière. Cette solution devra permettre au débiteur de jauger à merveille les possibilités de réalisation des mesures qu'il propose. Cela aura pour effet de rehausser leur efficacité. Un tel résultat pourra aussi être obtenu si les pouvoirs de mise en oeuvre du règlement préventif sont révisés.

PARAGRAPHE III : LA NECESSITE D'UNE REVISION DES POUVOIRS DE MISE EN OEUVRE DU REGLEMENT PREVENTIF.

Le règlement préventif a été conçu comme une mesure purement volontaire. C'est au débiteur qu'il appartient de solliciter son ouverture à son profit. Ce monopole s'accommode bien de la thèse qui voit dans le règlement préventif une technique contractuelle. Mais cette solution est de nature à drainer de nombreuses difficultés. Dès lors, il serait souhaitable de revoir cette situation en octroyant des possibilités de saisine aux autres organes intéressés par la procédure. Il pourra en être ainsi des créanciers (A) et des autorités judiciaires (B) qui peuvent tous à un moment donné avoir connaissance des difficultés que rencontre l'entreprise.

A- Une extension des pouvoirs de mise en oeuvre aux créanciers.

Il sera peut être bénéfique d'accorder un minimum de pouvoir aux créanciers leur permettant d'oeuvrer activement à la mise en oeuvre du règlement préventif. Ceci est d'autant plus nécessaire que les créanciers sont d'une importance capitale dans l'aboutissement de cette procédure.

En effet, une initiative exclusive du débiteur pourra se heurter à une opposition ou une résistance de leur part154(*) et dans ce cas, les chances de survie de l'entreprise n'en seront que largement compromises. Pourtant, accorder une possibilité de saisine aux créanciers aidera à résoudre bien de difficultés.

D'emblée, il convient de relever que les créanciers souffrent toujours durement lors d'une procédure collective. Si aujourd'hui le sort du dirigeant a été dissocié de celui de l'entreprise155(*), le créancier quant à lui perd toujours son argent. C'est pour cette raison que les procédures collectives modernes essaient d'établir un meilleur équilibre entre les intérêts en présence. Le règlement préventif OHADA se situe parfaitement dans cette logique. Comme le souligne l'article 2 al. 1 de l'AUPCAP, le règlement préventif vise « à éviter la cessation des paiements ou la cessation d'activités de l'entreprise et à permettre l'apurement de son passif au moyen d'un concordat préventif ».

Mais le rôle des créanciers à la base n'a pas été envisagé. Or, les créanciers pourraient mieux accepter les atteintes à leurs droits individuels s'ils sont eux même à l'origine de cette procédure, contrairement à l'hypothèse où celle-ci leur est imposée. Dans ce dernier cas, il n'est pas exclu qu'ils la considèrent comme une injustice à leur encontre.

Une participation active des créanciers à l élaboration de l'offre de concordat pourra aussi être envisagée. Elle présenterait l'avantage d'assurer une homologation certaine à cette offre. Le concordat ainsi proposé fournirait clairement les solutions de redressement et sera prêt à recevoir une exécution de la part de tous. Il serait ainsi souhaitable, pour plus de réalisme en la matière, d'offrir aux créanciers les mêmes pouvoirs que ceux qui leur sont confiés en matière d'élaboration du concordat de redressement.

Par ailleurs, les autorités judiciaires pourront aussi se voir accorder plus de pouvoirs renforçant leur rôle en matière de déclenchement du règlement préventif.

B- La reconnaissance d'un rôle prépondérant aux autorités judiciaires.

Les autorités judiciaires visées ici sont le ministère public et le tribunal ou son président.

En règle générale, le ministère public ne peut demander l'ouverture d'une procédure de règlement préventif, pas plus que le tribunal qui ne peut se saisir d'office. Cette exclusion est décevante dans la mesure où l'un comme l'autre peut avoir connaissance des difficultés de l'entreprise. Bien plus, le ministère public en tant que garant de l'intérêt général, pourrait valablement intervenir lorsqu'il a des éléments suffisants lui permettant d'établir avec certitude les difficultés de l'entreprise. Dans cette logique, il pourra tenir ses informations soit des créanciers, soit à partir des informations fournies par les organes de contrôle (associés, commissaires aux comptes).

Pourtant, « permettre au tribunal de se saisir d'office ou au ministère de le saisir suppose...une sécurité juridique accrue »156(*). La solution posée par l'article 29 et permettant à la juridiction compétente de se saisir d'office en cas de cessation des paiements peut parfaitement être transposée dans le cadre du règlement préventif. Aussi, le tribunal compétent pourra se saisir d'office sur la base des informations fournies par le représentant du ministère public, des commissaires aux comptes, les associés ou les membres des personnes morales ou les institutions représentatives du personnel qui lui indiquent les faits de nature à motiver sa décision157(*).

Par ailleurs, à s'en tenir à la lettre de l'acte uniforme, le président du tribunal compétent ne joue pas un rôle prépondérant au niveau de l'ouverture de la procédure. En effet, il semble avoir les mains liées. L'article 8 ne lui accorde aucune liberté d'appréciation en disposant que « dès le dépôt de la proposition de concordat préventif, celle-ci est transmise, sans délai, au président de la juridiction compétente qui rend une décision de suspension des poursuites individuelles ». Ledit texte semble donc exclure toute possibilité pour le président de se prononcer à cette étape sur un éventuel manque de sérieux, fusse-t-il apparent du projet de concordat. La juridiction est donc confinée à un automatisme difficilement justifiable qui risque de générer bien des abus. Enfermée dans un tel automatisme, le juge ne pourra que prononcer la suspension des poursuites individuelles même si la situation irrémédiablement compromise de l'entreprise est parfaitement visible. Les débiteurs indélicats pourront alors profiter de cette impuissance du juge pour échapper au moins momentanément aux poursuites de certains créanciers. Ces risques d'abus sont d'autant plus réels que la décision de suspension des poursuites n'est susceptible d'aucune voie de recours d'après l'article 22158(*). De tout ce qui précède, il est à se demander si le législateur n'a pas volontairement manifesté à l'égard du président de la juridiction compétente une certaine défiance.

Il aurait peut être été plus simple et plus efficace de laisser au tribunal, et non à son président le pouvoir de décider de l'ouverture du règlement préventif. Ainsi, face à une demande trop tardive ou inopportune, il pourra directement prononcer des mesures plus graves et partant plus appropriées, sans avoir à prendre des mesures dérogatoires aux droits des créanciers qui, en fin compte ne serviront à rien159(*).

En définitive, les conditions d'ouverture du règlement préventif sont dominées par le critère de la situation difficile non irrémédiablement compromise très souple à l'appréciation et par le monopole de saisine de la juridiction compétente confié au débiteur. Ces éléments réunis, conditionnent l'intervention du juge qui dispose à la phase d'ouverture des pouvoirs très limités par les textes. Pourtant, l'intervention du juge n'est pas un obstacle à l'épanouissement de la procédure. Le renforcement de ces pouvoirs en la matière n'aura pas, à notre sens, des conséquences désagréables.

Il est aussi regrettable que le législateur n'ait pas prévu des possibilités alternatives de saisine à l'actif des autres organes permettant ainsi de combler des éventuelles attitudes laxistes du débiteur.

Par conséquent, malgré les précautions prises, le règlement préventif risque d'être trop insuffisant pour éviter la cessation des paiements non seulement à cause du caractère restrictif des conditions d'ouverture, ou plus important encore, à cause de l'efficacité restreinte des mesures prises.

CHAPITRE II : L'EFFICACITE RESTREINTE DES MESURES ENVISAGEES.

Le but du règlement préventif est d'éviter, à travers les mesures exceptionnelles, la cessation des paiements de l'entreprise concernée. Ces mesures proposées par le débiteur et consenties par les créanciers sont entérinées par le tribunal compétent à travers une homologation en audience non publique. En effet, dès le dépôt de la proposition de concordat par le débiteur, celle-ci est transmise sans délai au président de la juridiction compétente qui rend une décision de suspension des poursuites et désigne un expert. L'expert est chargé de faire un rapport sur la situation économique et financière de l'entreprise, les perspectives de redressement compte tenu des délais et remises consentis ou susceptibles de l'être par les créanciers et toutes autres mesures contenues dans la proposition du concordat préventif selon l'article 8 AUPCAP. En plus, l'expert assiste le débiteur dans ses négociations avec ses créanciers, relatives aux propositions concordataires lorsque celles-ci ne sont pas encore consenties par les créanciers.

Le seul accord des créanciers ne suffit cependant pas. En vertu de l'article 15 de l'AUPCAP, la juridiction compétente homologue le concordat si les conditions exigées pour sa validité sont réunies. A défaut, le concordat ne sera pas homologué. Dans ce cas, la juridiction annule la décision prévue à l'article 8 et cette annulation remet les parties en l'état où elles se trouvaient antérieurement à la décision d'ouverture160(*). Mais lorsque le concordat est accepté, le dénouement de la procédure consistera en l'exécution des mesures qu'il contient.

Quoiqu'il en soit, l'ouverture du règlement préventif, à l'instar de toute autre procédure collective emporte des effets désagréables à l'égard des partenaires de l'entreprise. Ces derniers se retrouvent inéluctablement dans une situation d'insécurité juridique grave (section I) que le paradoxe de certaines mesures concordataires est loin de faire disparaître (section II).

SECTION I : UNE INSECURITE JURIDIQUE POUR LES PARTENAIRES DE L'ENTREPRISE.

Dès l'ouverture de la procédure collective, les partenaires de l'entreprise sont plus ou moins directement affectés. Leurs droits sont automatiquement restreints, ce qui est paradoxal car l'entreprise a besoin d'eux. Elle doit en effet poursuivre ses activités pour être en mesure de tenir ses engagements. Pour cela, il est nécessaire que les partenaires soient mis en confiance. Ils doivent être rassurés d'une meilleure protection de leurs droits. Mais il est plutôt à noter que la survenance de la procédure de règlement préventif perturbe considérablement les rapports de l'entreprise avec ses partenaires et plus particulièrement ses créanciers (paragraphe 1). Parallèlement, la libre gestion du débiteur est de nature à créer des risques supplémentaires (paragraphe 2).

PARAGRAPHE I : L'EBRANLEMENT DES DROITS DES CREANCIERS.

Les créanciers ont un rôle important à jouer dans le dénouement de la procédure de règlement préventif. En effet, le concordat préventif qui est la plaque tournante de cette procédure, ne pourra être homologué et exécuté que d'après leur bon vouloir. Pourtant, on peut déjà regretter que dans son déroulement, la procédure de règlement préventif, telle que prévue ne laisse pas une place suffisamment importante aux créanciers. Dans cette même lancée, les droits des créanciers subissent d'énormes restrictions qu'il s'agissent des créanciers de salaire (A) ou des autres créanciers (B).

A- Les créanciers de salaire.

Pour que l'entreprise visée par le règlement préventif ait quelques chances de survie, elle doit impérativement réduire ses charges. Très souvent, pour y parvenir, les dirigeants choisissent de prendre des mesures affectant l'emploi. Cette option semble s'expliquer par des facilités découlant de sa mise en oeuvre161(*). Cette solution n'est point contradictoire avec les dispositions du code camerounais du travail du 14 août 1992 duquel il ressort que l'intérêt de l'entreprise signifie sa bonne marche. En cas de difficulté, l'employeur peut prendre des mesures portant atteinte aux droits des salariés dans le but d'assurer le sauvetage de cette dernière.

Ces mesures interviennent alors que le salaire, plus que toute autre créance, nécessite une très grande protection eu égard à son caractère alimentaire. Ce caractère impose que son paiement soit garanti en cas d'ouverture d'une procédure collective, au moins pour des salaires échus162(*). En plus, il ressort des dispositions du droit des sûretés et du droit du travail que les créanciers de salaire bénéficient d'une double protection : le super privilège et le privilège du salaire163(*). Mais la particularité du règlement préventif est telle qu'on ne peut protéger les salaires à l'infini. Payer les salaires à tout prix risque d'aboutir à des injustices164(*). Afin de réduire ce risque, le législateur OHADA des procédures collectives a prévu des possibilités de licenciement dans le cadre du règlement préventif. Aussi, figure au nombre des mesures pouvant être mentionnées dans le concordat, les licenciements pour motif économiques devant intervenir dans des conditions prévues par les dispositions du code de travail.

Assurément, ces licenciements doivent intervenir après des accords négociés, car le règlement préventif a avant tout une nature contractuelle. Mais cette négociation n'est pas libre, elle est imposée par le code du travail165(*). Ainsi, il ne sera pas étonnant de voir plus apparaître à ce niveau des accords d'adhésion que des accords négociés avec une nette domination de l'employeur. L'intérêt de l'entreprise limite la portée de l'obligation légale consistant à rechercher préalablement, et d'accord parties, les mesures alternatives aux licenciements en cas de difficultés166(*). Les mesures alternatives peuvent concerner la rémunération et consisteront alors en la réduction des primes, indemnités et autres avantages ou même la réduction des salaires167(*). Elles peuvent aussi concerner le travail et consisteront par exemple en la réduction des horaires de travail et la mise en chômage technique.

Malgré toutes ces restrictions aux droits des salariés, ils demeurent mieux protégés que les autres créanciers. D'après l'article 15 al. 2 en effet, il ne peut leur être imposé aucun délai ni aucune remise contrairement aux autres créanciers.

B- Les autres créanciers du débiteur.

Les autres créanciers subissent globalement de nombreuses restrictions à leurs droits (1) et font l'objet d'un traitement qui n'est pas toujours égalitaire (2).

1- Les restrictions des droits des créanciers.

Dès le dépôt de l'offre de concordat par le débiteur, le président du tribunal prend une décision de suspension des poursuites. Cette mesure est destinée à conserver un caractère collectif à la procédure et de respecter le principe d'égalité des créanciers. Dans cette logique, toute action en justice, voie d'exécution ou mesure conservatoire émanant des créanciers antérieurs est suspendue ou interdite168(*). Le législateur emploie ici des formules générales permettant de couvrir un plus grand nombre de domaine. Il en sera ainsi des éventuelles demandes des créanciers tendant à l'ouverture d'une procédure de redressement, des exécutions volontaires ou forcées, même celles fondées sur un jugement passé en force de chose jugée. Il s'agira non seulement des actions en justice stricto sensu, mais aussi des saisies et des astreintes. Toute action nouvelle née antérieurement au jugement d'ouverture est également interdite. Mais rien n'interdit à un créancier d'agir en justice pour faire reconnaître le principe de sa créance dès lors qu'il limite sa prétention et ne cherche pas à obtenir une condamnation au paiement d'une somme d'argent169(*).

Le principe de suspension ou d'interdiction des poursuites individuelles est général. Il touche tous les créanciers chirographaires ou privilégiés, même munis de privilèges généraux ou de sûretés réelles spéciales. L'article 9 de l'acte uniforme précité ajoute que sont également visés les créanciers munis d'un privilège mobilier spécial, d'un gage, d'un nantissement ou d'une hypothèque. La liste n'est qu'indicative comme l'atteste l'emploi de l'adverbe notamment.

A l'évidence, les sûretés, quelle que soit leur nature, ne résistent pas au règlement préventif alors même que la situation du débiteur n'est pas encore désespérée. Les créanciers qui en bénéficient ne perdent pas leur garantie, mais ne peuvent les réaliser qu'en cas d'annulation ou de résolution du concordat auquel ils ont consenti ou qui leur a été imposé170(*). Ils verront leurs efforts fournis dans le but d'entourer leurs créances de garanties momentanément anéantis pour les besoins de sauvetage d'une entreprise par hypothèse encore viable. Si le droit de réaliser la sûreté se trouve ainsi suspendu, il en est de même e fortiori de celui de constituer des nouvelles sûretés171(*). En plus, d'après l'article 22 de l'AUPCAP, la décision de suspension des poursuites n'est susceptible d'aucune voie de recours. Cela est regrettable dans la mesure où les créanciers intéressés pourront avoir des contestations plus ou moins fondées à soulever.

La suspension des poursuites est obligatoire comme intervenant de plein droit dans le cadre de l'OHADA, contrairement au règlement amiable français où elle était facultative172(*). Cependant, les créanciers peuvent, pour recevoir paiement de leurs dettes échues, valablement saisir les cautions ou les coobligés du débiteur. Ces derniers ne bénéficient pas des délais et remises accordés au débiteur173(*). Cette disposition s'explique par la nature contractuelle du concordat qui, en tant que tel, ne peut produire des effets qu'à l'égard des contractants. On peut cependant penser que cette disposition ne soit pas de nature à encourager les éventuelles cautions à garantir les obligations du débiteur. En effet, leur obligation étant accessoire à celle du débiteur, les cautions accepteront difficilement le paiement des créanciers alors même que le débiteur n'est pas encore insolvable. C'est certainement pour éviter ces désagréments que la loi de sauvegarde des entreprises en France précitée, permet aux cautions et coobligés de se prévaloir de l'accord homologué174(*). Mais on peut s'interroger sur la situation du débiteur qui s'est constitué caution de sa propre entreprise. Pourra t-il valablement désintéresser ses créanciers quand on sait qu'il pourra toujours voir son sort lié à celui de l'entreprise plus tard ?175(*)

Toutefois, on peut se permettre de penser que le principe de la libre négociation des délais et remises pourra permettre à certains créanciers d'échapper à cette restriction. Ceci est vrai si l'offre de concordat ne comporte pas de délais supérieurs à deux ans. A défaut, il ressort de l'article 15 al. 2, 3° que la juridiction compétente peut rendre ces délais opposables aux créanciers qui n'ont consenti aucun délai ni remise sauf si ces délais mettent en péril l'entreprise de ces derniers176(*).

2- Le traitement inégalitaire des créanciers.

Les créanciers dont le débiteur fait l'objet d'une procédure collective ne sont pas tous traités de la même manière. Déjà, la suspension des poursuites ne concerne que le paiement des créances désignées par le débiteur, c'est-à-dire sans doute les créances pour lesquelles il a demandé la suspension des poursuites dans le cadre de sa requête introductive d'instance. Ainsi, les créanciers qui n'ont pas été visées par le débiteur échappent à l'interdiction. Même s'il est vrai que le débiteur a intérêt à désigner toutes ses créances antérieures, ou du moins les plus importantes pour s'assurer un plus grand bénéfice de la protection judiciaire, il demeure vrai qu'il pourrait être tenté de favoriser certains créanciers en omettant sciemment de les mentionner dans sa requête177(*). Force est donc de constater qu'il peut exister des collusions frauduleuses entre le débiteur et certains créanciers. Ce qui aboutira à des discriminations tolérées effectuées par le débiteur, surtout quand on sait qu'il a la possibilité de choisir librement et sans contrôle les créanciers qui seront soumis à la suspension des poursuites.

La survenance de la procédure de règlement préventif est loin de mettre fin à toute activité du débiteur178(*). Aussi, plusieurs nouveaux engagements vont naître de la continuation d'activités. Toutes ces activités vont faire apparaître de nouveaux créanciers qui auront besoin des garanties suffisantes à la réalisation effective de leurs créances. Il va donc falloir les convaincre en arguant de la crédibilité de l'entreprise. Mais très souvent, les fournisseurs seront les premiers à réagir au moindre signe annonciateur d'une difficulté. C'est pour pallier à leur réticence qu'ils sont traités de façon privilégiée aux créanciers antérieurs. En effet, ils ne connaissent aucune restriction à leurs droits et sont payés par priorité aux créanciers antérieurs. Mais tous les créanciers ont en commun le même débiteur à savoir le représentant légal de l'entreprise. Ce dernier conserve sa liberté de gestion, ce qui ne va pas sans présenter un certain nombre de risques.

PARAGRAPHE II : LA PORTEE DE LA LIBRE GESTION DU DEBITEUR.

Si avant l'homologation du concordat, le débiteur voit ses pouvoirs de gestion limités (A), ceux-ci lui sont entièrement rétablis dès que la décision de règlement préventif est passée en force de chose jugée (B).

A- Avant l'homologation du concordat.

Cette période est caractérisée par des restrictions importantes aux pouvoirs de gestion du débiteur. Il lui est fait interdiction à l'article 11 de l'AUPCAP de payer tout ou partie des créances antérieures179(*) et d'accomplir certains actes de gestion.

En clair, l'article 11 interdit au débiteur sous peine de sanction, « de faire aucun acte de disposition étranger à l'exploitation de l'entreprise, ni consentir aucune sûreté ».

Il lui est également interdit de désintéresser les cautions qui ont acquitté les créances nées antérieurement à la décision de suspension des poursuites individuelles. Cette prescription qui semble se justifier par la nécessité de préserver le crédit de l'entreprise, gage de tous ses créanciers, est tout de même de nature à porter un coup sérieux aux cautions en cause. Celles-ci se voient inévitablement imposer les effets d'une procédure à laquelle elles sont étrangères.

Le débiteur n'est en aucun cas dessaisi, mais sa gestion reste cantonnée aux actes d'administration courante. Les actes de disposition sont interdits, à l'exception de ceux concernant le fonctionnement normal de l'entreprise.

Le contrôle est assuré par l'expert. Ce dernier est chargé de signaler toute violation de ces prescriptions par le débiteur. Ce manquement est sanctionné par l'inopposabilité de plein droit par l'article 11 précité. Mais on s'interroge sur le choix du législateur en faveur de l'inopposabilité et non pas de la nullité. A la différence de la nullité en effet, l'inopposabilité n'anéantit pas rétroactivement l'acte frauduleux. Elle le prive seulement d'effet à l'égard des tiers, c'est-à-dire des autres créanciers180(*). Les actes en cause sont donc valables entre les parties mais sont inopposables à la procédure et de plein droit.

Ces restrictions ne sont cependant pas absolues. Le président du tribunal peut autoriser le débiteur à s'acquitter de tout ou partie d'une créance antérieure ou à accomplir un acte de disposition étranger à l'exploitation de l'entreprise ou enfin à consentir une sûreté181(*).

Ces nombreuses restrictions au principe de l'interdiction des paiements peuvent être sources de contentieux importants. Elles aboutissent à la rupture du principe d'égalité des créanciers et sont contraires à l'esprit de la procédure, qui est avant tout collective.

Les limites posées aux pouvoirs de gestion du débiteur avant l'homologation du concordat sont indispensables afin de permettre à l'expert de mieux accomplir sa mission. En plus, elles maintiennent en l'état la situation du débiteur en vue de l'exécution du concordat homologué. Une fois le concordat homologué, le débiteur recouvre la liberté de gestion de son patrimoine sans restriction aucune.

B- Après l'homologation du concordat.

L'essentiel du déroulement de la procédure de règlement préventif consiste en l'exécution fidèle de l'accord préventif conclu entre le débiteur et ses créanciers et entériné par le tribunal compétent. Pour ce faire, ce dernier devra tenir à ses engagements. C'est la raison pour laquelle le débiteur recouvre entièrement sa liberté quant à l'administration et la gestion de ses biens dès que la décision du règlement préventif est passée en force de chose jugée182(*).

Le débiteur n'est ni dessaisi, ni assisté dans sa gestion. Le législateur lui accorde sa pleine confiance pour la suite de la gestion de l'entreprise. Il retrouve l'intégralité de ses pouvoirs sous réserve cependant du respect des engagements concordataires, auquel veillent les organes mis en place183(*). En effet, l'article 16 AUPCAP permet à la juridiction de désigner des organes chargés de surveiller l'exécution du concordat préventif184(*).

Le jugement d'homologation n'entraîne donc pas des effets notables sur les pouvoirs de gestion du débiteur185(*). Cela peut s'expliquer par le fait que le débiteur n'étant pas encore en cessation des paiements, peut encore faire face à ses obligations. Mais il est à craindre que le débiteur ayant déjà failli une première fois puisse encore connaître des difficultés, surtout si celles-ci sont liées à ses compétences personnelles. Une nouvelle défaillance du débiteur sera inévitablement plus grave car il ne peut bénéficier d'une autre procédure de règlement préventif avant l'expiration d'un délai de cinq ans186(*). Cette possibilité est d'autant plus plausible que la désignation de certains organes chargés d'assurer le contrôle de l'exécution de l'accord préventif relève de la faculté du juge compétent187(*).

En fin de compte, les personnes concernées par le règlement préventif sont sur des charbons ardents et risquent à tout moment de voir leurs difficultés prendre de l'ampleur. Ceci s'explique non seulement par la situation d'insécurité dans laquelle ils se trouvent, mais aussi par les nombreuses limites qui sont de nature à entraver la bonne exécution des mesures envisagées.

SECTION II : LES LIMITES SUSCEPTIBLES D'ENTRAVER LA BONNE EXECUTION DES MESURES PRISES.

Elles tiennent principalement aux organes de contrôle (paragraphe 1) et à la publicité du règlement préventif (paragraphe2).

PARAGRAPHE I : LES LIMITES LIEES AUX ORGANES DE CONTROLE.

Il ne fait l'ombre d'aucun doute que dans de nombreux cas, la bonne exécution du concordat ne sera assurée que si elle est étroitement surveillée. Pour cela, le législateur a prévu des mesures de contrôle. Il prévoit en effet à l'article 16 que le tribunal qui homologue le concordat doit désigner un juge commissaire. Celui-ci est chargé de faciliter l'exécution du plan.

De même, ce tribunal peut désigner un syndic et des contrôleurs chargés de surveiller l'exécution du concordat préventif dans les meilleures conditions. En effet, le syndic et les contrôleurs surveillent ensemble ou séparément les actes du débiteur. Ils doivent régulièrement rendre compte au juge commissaire et surtout signaler les manquements dont le débiteur peut se rendre coupable. Il en sera ainsi des paiements non autorisés ou de la conclusion de certains contrats sans autorisation.

Toutefois, on peut s'étonner de ce que le législateur n'ait pas cru bon devoir rendre la désignation de ces derniers obligatoire, particulièrement le syndic. En effet, la juridiction qui homologue le concordat semble ne pas être impérativement tenue de les désigner. Ceci s'interprète de l'emploi à l'article 16 précité du verbe « pouvoir » et non « devoir ». Cela laisse croire que le tribunal juge librement de l'opportunité de leur nomination. On peut alors craindre que le débiteur qui est libre dans sa gestion ne commette d'autres manquements, compromettant sérieusement les chances de survie de l'entreprise et partant d'apurement de son passif.

Par ailleurs, il est bien étonnant que ce soit à la fin de la procédure que l'on mette sur pied tous ces organes importants, en particulier le juge commissaire188(*). Ceci est d'autant plus curieux que dès le dépôt de l'offre de concordat, les droits des créanciers subissent déjà de graves atteintes. Certes l'expert désigné est, entre autres, chargé de signaler à la juridiction compétente les éventuels manquements du débiteur, mais on peut émettre des doutes quant à sa capacité à assurer tout seul cette mission. Le soutien d'un autre organe des procédures collectives comme le syndic ou le juge commissaire sera certainement très apprécié.

D'autres limites à la bonne exécution des mesures concordataires sont liées au caractère public de la procédure.

PARAGRAPHE II : LES LIMITES LIEES A LA PUBLICITE DU REGLEMENT PREVENTIF.

Des dispositions de l'article 17 de l'AUPCAP, il ressort clairement que la décision du règlement préventif est publiée dans les conditions prévues par les articles 36 et 37. De ces derniers articles, il ressort que la publicité doit être faite d'office par le greffier et sans délai au registre du commerce et du crédit mobilier189(*). Par la suite, la décision doit être insérée au journal officiel dans les 15 jours de son prononcé, toujours d'office par le greffier ou à défaut par le syndic190(*). Toutes les conditions sont donc réunies pour que toute personne le désirant puisse être mise au courant l'existence de la procédure. Pourtant, il est constant qu'en matière de prévention, la discrétion est un gage d'efficacité.

En dehors de cette hypothèse prévue, il est évident que la suspension des poursuites ne pourra en aucun cas rester confidentielle. Dès son prononcé, elle va inéluctablement se propager dans l'environnement immédiat du débiteur et même au-delà. Pourtant, une prévention réussie est avant tout un pari sur la restauration de la confiance à l'égard des créanciers non seulement antérieurs, mais aussi et surtout postérieurs. Assurément l'état dans lequel se trouve l'entreprise, porté à la connaissance de ces derniers sera plutôt de nature à nourrir leur méfiance. Ce risque est d'autant plus grand que les tiers qui traitent avec une entreprise faisant l'objet d'une procédure collective peuvent engager leur responsabilité sur la base de l'article118 de l'AUPCAP.

La publicité est donc comme une épée de Damoclès qui plane sur la prévention toute entière. C'est un gage de transparence qui a malheureusement pour effet d'attirer la susceptibilité des partenaires de l'entreprise. C'est certainement pour cette raison que le législateur français a fait de la confidentialité la caractéristique principale du règlement amiable dans le but de lui réserver les meilleures chances de succès.

CONCLUSION DU TITRE II.

L'étude des insuffisances du système de prévention-traitement OHADA qui se confine au règlement préventif permet de constater qu'aux contours incertains de ses conditions d'ouverture, s'ajoutent un lot de mesures envisagées dont l'efficacité réelle est discutée. Après ce constat, on ne peut que déplorer les nombreuses imprécisions et manquements relatifs aux conditions et effets du règlement préventif. Il en résultera certainement un contentieux toujours regrettable. Ce contentieux sera très souvent inhérent à l'application même des textes. Il est aussi à craindre que certains créanciers ne bénéficient des faveurs injustifiées, ce qui aura pour effet de nourrir l'hostilité des autres quant à l'octroi des délais et remises en faveur du débiteur.

L'idéal serait que le débiteur soit toujours au parfum de sa véritable situation comptable et financière. Cela devra en effet favoriser une prise de conscience rapide des éventuelles difficultés qu'il pourra rencontrer. Or cette hypothèse risque d'être d'une rareté inouïe dans la mesure où elle ne pourra être valablement assurée que par des entreprises parfaitement structurées. D'où la crainte de voir le règlement préventif être finalement la chose des seules grandes entreprises.

Pourtant, il ne fait l'ombre d'aucun doute que le législateur OHADA a voulu faire du règlement préventif « le talon d'Achille » de la prévention. Son organisation dans le cadre des procédures collectives d'apurement du passif est à cet égard très significative. Mais paradoxalement, le débiteur reste seul juge de l'opportunité de son déclenchement et rien ne semble véritablement l'obliger à y recourir. En plus, les éventuelles léthargies du débiteur à y recourir seront plus perçues comme l'espoir de voir du jour au lendemain la conjoncture redevenir favorable ou encore comme la crainte d'une faillite future. Cette dernière crainte peut se justifier eu égard aux nombreuses limites que présente le règlement préventif. Bien plus, ces constats navrants peuvent nous amener à dire que très souvent, le règlement préventif sera l'antichambre de la faillite si rien n'est fait pour renforcer son efficacité pratique

CONCLUSION GENERALE.

Somme toute, on constate qu'il existe peu de textes en matière de prévention des difficultés de l'entreprise OHADA. A cette rareté de textes, s'ajoutent les nombreuses imprécisions qui caractérisent la question. Pourtant, en Afrique, beaucoup d'entreprises commerciales en proie à des difficultés de tout genre « vivotent, végètent et disparaissent sans qu'une procédure collective ait été ouverte »191(*). Dans ce contexte où la situation économique et managériale ne plaident pas toujours en faveur des entreprises, il est évident que c'est par un développement judicieux de la prévention que l'on pourra assurer à temps le sauvetage d'un grand nombre d'entreprises en proie aux difficultés.

La prévention ne peut cependant pas être développée à l'infini. Il faut aussi bien accepter que le pourcentage des entreprises qui peuvent être redressées restera sans doute très faible : la mortalité d'un grand nombre d'entreprises est inévitable, et il faut l'admettre pour mieux étudier l'impact réel de la prévention192(*). A la vérité, toute réforme ou réaménagement du système de prévention des difficultés des entreprises OHADA ne saurait changer le caractère inexorable de la mortalité des entreprises résultant de la conjoncture, de l'incompétence ou de l'ignorance des dirigeants, de l'inadaptation au marché et à la concurrence, de l'insuffisance des capitaux propres. Pas plus que le développement de la prévention ne sera en mesure de changer la mentalité des dirigeants africains qui optent souvent volontiers pour une gestion paternaliste ou familiale de la société au détriment de la compétence. Mais le renforcement de la prévention pourra avoir pour effet d'inciter les dirigeants à y recourir de plus en plus.

En définitive donc, le succès de la matière ne dépend pas seulement d'une meilleure réglementation, mais aussi et surtout de l'adhésion et du franc jeu des dirigeants africains qui sont en tout état de cause, les moteurs de la prévention.

BIBLIOGRAPHIE

I- OUVRAGES GENERAUX ET SPECIFIQUES

· ANOUKAHA (F), Le droit des sûretés dans l'acte uniforme OHADA, PUF, 1998.

· ANOUKAHA (F), CISSE NIANG (A), MESSANVI (F), ISSA-SAYEGH (J) , YANTCHOBA NDIAYE (I) et SAMB (M), OHADA, Sûretés, Bruylant, Bruxelles, 2002.

· ANOUKAHA (F), CISSE (A), DIOUF (N), NGUEBOU TOUKAM (J), POGOUE (PG) et SAMB (M), OHADA, Sociétés commerciales et GIE, Bruyant Bruxelles, 2002.

· ASSI-ESSO (A.M) et NDIAW DIOUF, OHADA, Recouvrement des créances, Bruylant, Bruxelles, 2002.

· CHARTIER (Y), Droit des affaires, T2, Les sociétés commerciales, PUF, 1992.

· DIDIER (P), Droit commercial, T5, L'entreprise en difficulté, Thémis, PUF, 1995.

· GOMEZ (J R), OHADA, entreprises en difficulté, lecture de l'acte uniforme OHADA portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif à la lumière du droit français, Bajag Meri, 2003.

· GUYON (Y), Droit des affaires, Entreprises en difficultés, T.2, 6e éd., 1997, Economica.

· HOUIN (R), Les aspects économiques de la faillite et du règlement judiciaire, rapport de l'inspection générale des finances, T. 20, Sirey, 1970.

· ISSA-SAYEGH (J) et LOHOUES-OBLE (J), OHADA, Harmonisation du droit des affaires, Bruylant, Bruxelles, 2002.

· JEANTIN (M), Droit commercial, instrument de paiement et de crédit, entreprises en difficultés, 4e éd. Précis Dalloz, 1995.

· LEMEUNIER (F), Association-constitution-gestion, 7e éd., Delmas, 1998.

· MARTOR (B), PILKINGTON (N), SELLERS (D) et THOUVENOT (S), Le droit uniforme africain des affaires issu de l'OHADA, Litec, Juillet 2004.

· MERLE (PH), Droit commercial, sociétés commerciales, 7e éd., Dalloz, 2000.

· NGUEBOU TOUKAM (J), Le droit commercial général dans l'Acte uniforme OHADA, PUA, 1998.

· PEROCHON (F), Entreprises en difficultés, Instruments de crédit et de paiement, LGDJ, 1992.

· POUGOUE (PG) et KALIEU (Y), L'organisation des procédures collectives d'apurement du passif OHADA, PUA, 1999.

· POUGOUE (PG), ANOUKAHA (F), et NGUEBOU (J), Le droit des sociétés commerciales et du GIE OHADA, coll. Droit uniforme, PUA, 1999.

· SAINT-HALARY-HOUIN (C), Droit des entreprises en difficulté, 2e édition, Montchrestien, 1996.

· SAWADOGO (FM), Actes uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, commentaires, Edicef, éd. FFA, 2000.

· SAWADOGO (FM), OHADA, Droit des entreprises en difficulté, Bruylant, Bruxelles, 2002.

· TERRE (F)., SIMLER (PH) et LEQUETTE (Y), Droit civil, les obligations, Dalloz, 7e éd., 1999.

II- THESES ET MEMOIRES

- NGUIHE KANTE (P), Les techniques de sauvetage des entreprises en difficulté en droit camerounais, thèse de doctorat, Yaoundé, 1999.

- NJOYA NKAMGA (B), Les interventions des tiers dans la gestion des sociétés commerciales, mémoire, DEA, Université de Dschang, 2000.

- TCHEUMALIEU FANSI (MR), L'application des procédures collectives aux personnes morales de droit privé non commerçantes, mémoire, DEA, Université de Dschang, 2001.

- TCHINDE (M), La place des organes judiciaires dans l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, mémoire de maîtrise, Université de Dschang, 1999.

II- ARTICLES, ETUDES ET NOTES DE DOCTRINE

· BITSAMANA H. A., « Dictionnaire de droit OHADA », Ohadata D-05-33, http:// www.ohada.com

· KANTE (A), « Réflexions sur le principe de l'égalité entre les créanciers dans le droit des procédures collectives d'apurement du passif (O.H.A.D.A) », Ohadata D-06-47, http:// www.ohada.com

· NGUIHE KANTE (P), « Le domaine d'application du nouveau droit des sociétés commerciales de l'OHADA », Annales de la FSJP de l'Université de Dschang, T6, 2002, pp. 77-95.

· NGUIHE KANTE (P), « Réflexions sur la notion d'entreprise en difficulté dans l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif » in les annales de la faculté des sciences juridiques et politique de l'Université de Dschang, T5, PUA, 2001, pp. 87-103.

· PAILLUSSEAU (J), « Le droit OHADA, un droit très important », in La semaine juridique, Entreprises et affaires N°44 du 28 octobre 2004, pp. 1-5.

· PETIET (B), « La prévention, plus d'information pour une meilleure détection », Colloque Droit et commerce à Deauville tenu les 3 et 4 avril 2004 in  Les entreprises en difficulté : Nouvel Essai, moins de liquidation pour plus de prévention, mythe ou réalité ? , Hors série, 48e année, 2004, pp. 49-54.

· POUGOUE (PG)., « Le petit séisme du 14 août 1994 », RJA, 1994, pp. 8-31.

· ROUSSEL-GALLE, « OHADA et difficultés des entreprises, Etude critique des conditions et effets de l'ouverture de la procédure de règlement préventif », 1ere partie, in Revue jurisprudentielle commerciale, 2001, pp. 9-19 ; et 2eme partie, pp. 62-69.

· SAWADOGO (FM), « Traité et actes uniformes annotés et commentés », Juriscope, 1999, pp 859-1035.

· TEBOUL (G), « La cessation des paiements, une définition ne varietur », Colloque Droit et commerce à Deauville tenu les 3 et 4 avril 2004 in  Les entreprises en difficulté : Nouvel Essai, moins de liquidation pour plus de prévention, mythe ou réalité ? , Hors série, 48e année, 2004, pp. 14-42.

· TIGER (PH), « Les procédures collectives après cessation des paiement sen droit harmonisé de l'OHADA », in les petites affiches N° 205 du 13 octobre 2004, pp. 35-51.

III - LEGISLATION

- Acte uniforme OHADA, portant organisation du droit commercial général ;

- Acte uniforme OHADA relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique ;

- Acte uniforme OHADA, portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif ;

- Acte uniforme OHADA, portant organisation des sûretés ;

- Loi française N° 84-148 du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable ;

- Loi française du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation des entreprises ;

- Loi française N° 2005-845 du 26 juillet 2005 relative à la sauvegarde des entreprises.

TABLE DES MATIERES.

DEDICACE.....................................................................................................i

REMERCIEMENTS........................................................................................ii

PRINCIPALES ABREVIATIONS.......................................................................iii

SOMMAIRE....................................................................................................iv

INTRODUCTION GENERALE 1

TITRE I : UN SYSTEME DE PREVENTION- DETECTION PEU SATISFAISANT. 8

CHAPITRE I : LES INSUFFISANCES DES MECANISMES DE PREVENTION DETECTION. 9

SECTION I : LES LIMITES DE L'ALERTE DECLENCHEE PAR LES COMMISSAIRES AUX COMPTES. 10

PARAGRAPHE I : L'IMPRECISION DU CRITERE DE MISE EN OEUVRE. 11

A- Le sens du critère. 11

B- Les difficultés d'appréhension du critère. 12

PARAGRAPHE II : LES IMPERFECTIONS DE L'ALERTE DECLENCHEE PAR LES COMMISSAIRES AUX COMPTES. 14

A- Les risques d'atteinte à la crédibilité de l'entreprise. 14

B - L'absence d'un dispositif d'alerte par les commissaires aux comptes dans de nombreuses entreprises. 15

1- les personnes morales non commerçantes. 15

2-L'absence de commissaires aux comptes dans de nombreuses entreprises commerciales. 16

SECTION II : LES RESULTATS MITIGES DE LA DETECTION DES DIFFICULTES PAR LES ASSOCIES. 17

PARAGRAPHE I : AU NIVEAU DU DROIT D'ALERTE DES ASSOCIES. 17

A- Le caractère facultatif. 18

B- Le caractère limité. 19

PARAGRAPHE II : AU NIVEAU DE L'EXPERTISE DE GESTION. 20

A- La notion d'expertise de gestion. 20

B- Les limites de l'expertise de gestion. 22

1- L'intrusion des tiers dans la société. 22

2- L'absence de célérité de la procédure. 23

CHAPITRE II : LES PISTES D'UNE AMELIORATION POSSIBLE DU SYSTEME DE PREVENTION-DETECTION. 25

SECTION I : LE SOUHAIT D'UNE REFORMULATION DES CONDITIONS DE MISE EN OEUVRE DES MESURES PREVENTIVES. 25

PARAGRAPHE I : LA CLARIFICATION DES CRITERES DE MISE EN OEUVRE. 26

A- De l'alerte. 26

B- De l'expertise de gestion. 27

PARAGRAPHE II : RENFORCEMENT DES POUVOIRS DES ORGANES CHARGES DE LA MISE EN OEUVRE DES MESURES DE PREVENTION DETECTION. 28

A- Le renforcement des pouvoirs des associés. 28

B- Le renforcement des pouvoirs du commissaire aux comptes. 29

SECTION II : L'INDISPENSABLE MULTIPLICATION DES ORGANES DE DETECTION. 30

PARAGRAPHE I : SUR LE PLAN INTERNE : LA RECONNAISSANCE D'UN POUVOIR DE DETECTION AUX SALARIES. 31

A- Les raisons. 31

B- Les moyens de détection des difficultés par les salariés. 32

PARAGRAPHE II : SUR LE PLAN EXTERNE : RECONNAISSANCE D'UN DROIT DE DETECTION AUX AUTORITES JUDICIAIRES. 33

A- L'alerte par le président du tribunal compétent. 33

B- La détection des difficultés par le ministère public. 34

TITRE II : UNE EFFICACITE RELATIVE DE LA PREVENTION- TRAITEMENT OU REGLEMENT PREVENTIF. 38

CHAPITRE I : L'INCERTITUDE DANS LES CONDITIONS D'OUVERTURE DE LA PROCEDURE. 40

SECTION I : L'IMPRECISION DU CRITERE D'OUVERTURE. 41

PARAGRAPHE I : UNE ABSENCE DE DEFINITION LEGALE PRECISE. 41

PARAGRAPHE II : UNE DISTINCTION MALAISEE PAR RAPPORT A LA CESSATION DES PAIEMENTS. 43

SECTION II : LES POUVOIRS EXORBITANTS RECONNUS AU DEBITEUR. 46

PARAGRAPHE I : L'INTRODUCTION DE LA REQUETE EXCLUSIVEMENT PAR LE DEBITEUR 47

A- Les raisons. 47

B- Les manquements. 48

PARAGRAPHE II : L'ELABORATION DU CONCORDAT PREVENTIF PAR LE DEBITEUR. 50

A- L'importance du concordat. 50

B- L'ambiguïté des conditions d'élaboration du concordat préventif. 51

1- De par le contenu. 51

2- De par le délai du dépôt. 53

PARAGRAPHE III : LA NECESSITE D'UNE REVISION DES POUVOIRS DE MISE EN OEUVRE DU REGLEMENT PREVENTIF. 54

A- Une extension des pouvoirs de mise en oeuvre aux créanciers. 54

B- La reconnaissance d'un rôle prépondérant aux autorités judiciaires. 55

CHAPITRE II : L'EFFICACITE RESTREINTE DES MESURES ENVISAGEES. 58

SECTION I : UNE INSECURITE JURIDIQUE GRAVE POUR LES PARTENAIRES DE L'ENTREPRISE. 59

PARAGRAPHE I : L'EBRANLEMENT DES DROITS DES CREANCIERS. 59

A- Les créanciers de salaire. 59

B- Les autres créanciers du débiteur. 61

1- Les restrictions des droits des créanciers. 61

2- Le traitement inégalitaire des créanciers. 63

PARAGRAPHE II : LA PORTEE DE LA LIBRE GESTION DU DEBITEUR. 64

A- Avant l'homologation du concordat. 64

B- Après l'homologation du concordat. 65

SECTION II : LES LIMITES SUSCEPTIBLES D'ENTRAVER LA BONNE EXECUTION DES MESURES PRISES. 66

PARAGRAPHE I : LES LIMITES LIEES AUX ORGANES DE GESTION. 66

PARAGRAPHE II : LES LIMITES LIEES A LA PUBLICITE DU REGLEMENT PREVENTIF. 67

CONCLUSION DU TITRE II......................................................................................................69

CONCLUSION GENERALE......................................................................................................70

ANNEXES....................................................................................................71

BIBLIOGRAPHIE..........................................................................................79

TABLE DES MATIERES..................................................................................83

* 1 Il faut bien le dire, tous les pays francophones d'Afrique, à l'exception du Mali et du Sénégal, étaient plus ou moins restés fidèles aux dispositions du Code de Commerce légué par le colonisateur français.

* 2 De même que sur le constat « d'insécurité juridique et judiciaire » dans laquelle évoluaient les acteurs du monde des affaires.

* 3 Ce traité a été signé le 17 octobre 1993 à Port Louis en Iles Maurice, par 16 pays d'Afrique francophone.

* 4 Voir PAILLUSSEAU (J), « Le droit de l'OHADA, un droit très important et original » in la semaine juridique, entreprises et affaires, N°5, 28 octobre 2004. p. 1.

* 5 Voir TIGER (Ph), « Les procédures collectives après cessation des paiements en droit harmonisé OHADA » in Petites affiches N° 205 du 13 octobre 2004, p.36.

* 6 Voir POUGOUE (PG) et KALIEU (Y), L'organisation des procédures collectives d'apurement du passif OHADA, PUA, 1999, p. 4.

* 7 Cf. SAWADOGO (FM), OHADA, Droit des entreprises en difficulté, Bruyant, Bruxelles, 2002, p.4; ROUSSEL-GALLE, « OHADA et difficultés des entreprises, Etude critique des conditions et effets de l'ouverture de la procédure de règlement préventif », première partie, in Revue jurisprudentielle commerciale, 2001, P.10.

* 8 Lorsque cela est encore possible.

* 9 Voir GUYON (Y), Droit des affaires, T.2, Entreprises en difficultés, 6e éd., 1997, Economica, p. 37.

* 10 Ordonnance du 23 septembre 1967 qui institue une procédure sélective dite de suspension des poursuites, réservée aux entreprises dont la survie est compatible avec l'intérêt des créanciers.

* 11 Voir PEROCHON (F) , Entreprises en difficultés, Instruments de crédit et de paiement, LGDJ, 1992, p. 12.

* 12 En ce sens, les SARL correspondent plus aux petites et moyennes entreprises alors que les SA siéent mieux aux affaires plus importantes.

* 13 La confusion des patrimoines est une réalité palpable en Afrique où très souvent, le patrimoine personnel des dirigeants n'est pas dissocié de celui de l'entreprise. Les conséquences de cette confusion sont déplorables. En effet, parvenu à une telle situation, non seulement l'appréciation de la gestion n'est plus facile, mais aussi, la survenance de certaines difficultés touchant personnellement le dirigeant se répercute inévitablement sur l'entreprise. Cf SAWADOGO (FM) Op. Cit., P. 28.

* 14 Très souvent, cet état de choses abouti à une situation désespérée et les entreprises ayant bénéficié de ces mesures dilatoires finissent par déposer le bilan. C'est le cas de plusieurs entreprises publiques et parapubliques du Cameroun comme la BATA, la SOTUC...Voir NGUIHE KANTE (P), Les techniques de sauvetage des entreprises en difficulté en droit camerounais, thèse de doctorat, Yaoundé, 1999, p.10.

* 15 Voir GUYON (Y) Ib.

* 16 CHAPUT (Y), Droit de la prévention et du règlement amiable des difficultés des entreprises, PUF, 1986, N°2.

* 17 Son souci en la matière est grand qu'il a adopté un acte uniforme portant organisation et harmonisation de la comptabilité des entreprises. Cet acte comprend deux volets, l'un portant sur les comptes personnels et l'autre sur les comptes consolidés et combinés des entreprises, entrés respectivement en vigueur le 1er janvier 2001 et le 1er janvier 2002.

* 18 Cette situation regrettable ne permet de maîtriser ni les échéances, ni les prix et les coûts de revient des activités effectuées. Cf SAWADOGO (FM) Op. Cit., P27.

* 19 Cf. PETIET (B), « La prévention, plus d'information pour une meilleure détection » in Entreprises en difficulté : Nouvel Essai, moins de liquidation pour plus de prévention, mythe ou réalité ?, Colloque Droit et commerce à Deauville tenu les 3 et 4 avril 2004, Hors série, 48e année, 2004, p. 49.

* 20 Les dirigeants indélicats ou incompétents pouvant être à l'origine des difficultés de l'entreprise, leur remplacement aura pour but de permettre à celle-ci de retrouver son équilibre. Ce remplacement se traduira dans les société par un vote au sein de l'organe compétent qui peut être soit l'assemblée des associés ou des actionnaires, soit le conseil d'administration. Dans les entreprises individuelles, il peut prendre la forme d'une cession d'entreprise ou du fonds de commerce ou même la mise de ce fonds en location-gérance.

* 21 Ces reports peuvent être amiables ou judiciaires. Les reports d'échéances amiables ne seront véritablement bénéfiques que s'ils concernent les créanciers les plus importants.

Par ailleurs, le juge peut accorder des délais de paiements au débiteur sur la base de l'article 39 de l'Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et les voies d'exécution.

* 22 Ainsi, les associés des sociétés de personnes pourraient contribuer par des avances sans intérêts ou des apports non rémunérés. Dans les sociétés de capitaux, les mesures de renflouement prendront surtout la forme d'avances ou de prêts remboursables ou encore des souscriptions à une augmentation de capitaux.

* 23 Les solutions externes se manifesteront généralement par des prêts ou des crédits bancaires. Elles pourront aussi consister en certaines mesures extra bancaires comme des prêts obligataires ou des augmentations des capitaux.

* 24 L'impact socioéconomique de la disparition des entreprises d'une certaine taille est d'une telle ampleur aujourd'hui que l'Etat ne saurait rester indifférent à leur égard. Bien qu'originellement cantonnée aux entreprises du secteur public, cette intervention s'observe de plus en plus dans le secteur privé de nos jours. Pour le cas particulier du Burkina Faso, le Professeur SAWADOGO cite le cas de la COFA, la SONACAB, la BRAKINA, la BATA...Cf, ouvrage préc., p. 54.

* 25 Contrairement aux mesures de renflouement, au remplacement des dirigeants ou même à l'intervention de l'Etat qui peuvent aussi intervenir après cessation des paiements.

* 26 Lorsqu'on prévoit des sanctions en effet, ce n'est pas parce que l'on veut avoir le plaisir de les voir appliquer. C'est au contraire pour empêcher la commission des faits incriminés. Cf. SAWADOGO (FM), ouvrage préc., p.3.

* 27 Voir Tribunal régional hors classe de Dakar, Jgt commercial N° 6 du 9 janvier 2004, affaires Iprès contre Eurafricaines d'industries, Ohadata J-04-259, http://www.ohada.com

* 28 Voir PETIET (B), Ib.

* 29Voir en ce sens NGUIHE KANTE (P), « Réflexions sur la notion d'entreprise en difficulté dans l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif » in Les annales de la faculté des sciences juridiques et politique de l'Université de Dschang, T5, PUA, 2001, p. 100.

On ne peut nier que le recours à ces mesures préventives traduit déjà un état de dysfonctionnement de l'entreprise. Toutefois, ce dysfonctionnement est en principe encore naissant. L'idéal serait d'user de ces mesures à bon escient et surtout en temps opportun pour éviter le pire.

* 30 Voir en ce sens POUGOUE (PG), ANOUKAHA (F), et (J), Le droit des sociétés commerciales et du GIE OHADA, coll. Droit uniforme, PUA, 1999, p.82.

* 31 Par cette procédure, le législateur OHADA s'est arrimé aux réformes récentes du droit des sociétés dont la volonté est d'améliorer l'information fournie sur le fonctionnement des sociétés. La procédure d'alerte est d'ailleurs une innovation pour la plupart des pays membres de l'OHADA, dont les droits ignoraient le mécanisme. Voir en ce sens SAWADOGO (FM) ouvrage préc., p.36.

Voir aussi JEANTIN (M), Droit commercial, instrument de paiement et de crédit, entreprises en difficultés, 4e éd. Précis Dalloz, 1995, p.274.

* 32 Cf. CHAPUT (Y), Droit de la prévention et du règlement amiable des difficultés des entreprises, PUF, 1986, N° 40.

* 33 Cf. Art. 150 à 158 de l'AUDSCGIE.

* 34 SAWADOGO (FM), Traité et actes uniformes annotés et commentés, Juriscope, 1999, p.870.

* 35 La législation française notamment développe largement la procédure d'alerte externe et la met à l'actif du président du tribunal de commerce, des groupements de préventions agrées, du commissaire aux comptes notamment.

* 36 Cf Art. 697 à 700 AUDSCGIE qui prévoient les incompatibilités aux fonctions des commissaires aux comptes.

* 37 Dans tous les cas, l'alerte est déclenchée par une demande adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au dirigeant social concerné. Ce dernier est tenu de répondre par le même procédé et dans sa réponse, il doit donner une analyse de la situation et le cas échéant les mesures envisagées. Ensuite, dans les sociétés anonymes, la procédure peut connaître une autre phase si le commissaire aux comptes constate que l'exploitation demeure compromise. Il peut ainsi aller jusqu'à convoquer de toute urgence une Assemblée Générale des associés. Cf Art. 153 à 156 de l'AUDSCGIE.

* 38 Voir en ce sens, JEANTIN (M), préc., pp 277 et 278 ; NGUIHE KANTE (P), article préc., p.96.

* 39 Voir MESTRE et FLORES, Lamy, Sociétés, 1994, cités par JEANTIN (M). préc., p. 278.

* 40Cf NGUIHE KANTE (P), article préc., p.97.

* 41 Articles 150 et 153 de l'AUDSCGIE.

* 42 GUYON (Y), Droit des affaires T2 préc., p. 56.

* 43 Cf Art. 150 et 153 préc.

* 44 Voir NJOYA NKAMGA (B), Les interventions des tiers dans la gestion des sociétés commerciales, mémoire, DEA, Dschang, FSJP, 2000.

* 45 Voir article 712 AUDSCGIE. Bien plus, il peut engager sa responsabilité tant à l'égard de la société que des tiers des conséquences dommageables ou des fautes qu'il pourrait commettre dans l'exercice de ses fonctions selon l'article 725 AUDSCGIE.

* 46 BLANC (G), La situation des commissaires aux comptes après la loi du 1er mars 1984, JCP, 1984, éd. E., cité par JEANTIN (M), p. 279.

* 47 ANOUKAHA (F), CISSE (A), DIOUF (N), NGUEBOU TOUKAM (J), POGOUE (PG) et SAMB (M), OHADA, Sociétés commerciales et GIE, Bruyant Bruxelles, 2002, p. 171.

* 48 GUYON (Y), Droit des affaires, T2 préc. p. 53.

* 49 Voir NGUIHE KANTE (P), article préc. p.97.

* 50 Article 717 AUDSCGIE

* 51 Cf Art. 725 al. 2 de l'AUDSCGIE.

* 52 Cf TCHEUMALIEU FANSI (MR), L'application des procédures collectives aux personnes morales de droit privé non commerçantes, mémoire, DEA, 2001, p. 9.

* 53 Bien que n'étant pas commerçantes, certaines d'entre elles peuvent régulièrement se livrer à des activités lucratives. Il s'agit de la « paracommercialité ». voir en ce sens GUYON (Y), « Le monde associatif », Rapport de synthèse présenté au 92e congrès des notaires de France, Rap Defrenois, 1996, note 17, cité par TCHEUMALIEU FANSI Op. Cit., p. 14.

* 54 Cette absence peut s'expliquer par le fait ces groupements poursuivent le plus souvent des buts d'intérêt général et de réalisation des oeuvres gratuites (cas des associations et des fondations).

* 55 Cf Art. 13 et suivants de l'AUDCG.

* 56 A raison d'un commissaire titulaire et d'un suppléant si la société ne fait pas publiquement appel à l'épargne et deux commissaires titulaires et deux suppléants si la société fait publiquement appel à l'épargne.

* 57 S'ils sont en même temps associés.

* 58 Contrairement au commissaire aux comptes qui doit agir rapidement sous peine d'engager sa responsabilité, les associés sont totalement libre de dénoncer les difficultés ou pas. Or l'espérance d'un retour à meilleure fortune ou alors de voir la conjoncture redevenir favorable incitera les dirigeants à retarder autant que faire ce peut la mise en oeuvre de l'alerte.

* 59 GUYON (Y), Droit des affaires T2 préc., p.61.

* 60 Dans de nombreuses sociétés de capitaux néanmoins, les associés sont souvent très loin de la réalité de l'entreprise. Ils ne sont généralement en contact avec elles que par le biais des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Bien plus, ils ne participent aux assemblées que par mandataires interposés. Il en est ainsi notamment des sociétés de grande importance.

* 61 Ces articles n'exigent aucune condition liée à un pourcentage de capital à détenir par l'associé, contrairement à la France où l'actionnaire ou le groupe d'actionnaires doit détenir au moins le dixième du capital social.

* 62 Contrairement aux commissaires aux comptes qui doivent au préalable s'assurer de la réalité des faits en question. Ces faits sont connus par lui à l'occasion de l'exercice de contrôle des comptes ou de l'examen des documents qui lui sont communiqués. Voir en ce sens NGUIHE KANTE (P), article préc., p. 98.

* 63 Article 155 AUDSCGIE

* 64 Cf Art. 157 et 158 AUDSCGIE.

* 65 Cf POUGOUE (PG), ANOUKAHA (F) et NGUEBOU (J) Op. Cit., p. 86 ; CHARTIER (Y), Droit des affaires, T2, Les sociétés commerciales, PUF, 1992, p. 334.

* 66 Cf CA de Cotonou, Arrêt N° 256/2000 du 17/8/2000, Affaire Société continentale des pétroles et d'investissements C/ Etat béninois, http://www.juriscope.net

* 67 C'est ce qui ressort des articles 349 pour les SARL et 550 pour les SA.

* 68 Cf TGI de Douala, Jgt N° 587 du 05-9-1991, affaire établissement AUBERY, citée par POUGOUE (PG), ANOUKAHA (F) et NGUEBOU (J) Ib.

* 69 Notamment de l'article 226 de la loi de 1966 modifiée par la loi 84/148 du 1er mars 1984 sur le règlement amiable.

* 70 En France, l'expertise de gestion est demandée à l'initiative d'actionnaires détenant au moins 10% des actions.

* 71 En droit français, l'expertise de gestion est limitée aux associés des SARL et SA, voir GUYON (Y), droit des affaires T1, préc. P.62.

* 72 Voir Paris, 22 juin 1978, Rev, soc.1979, 333, notes CHARTIER, cité par CHARTIER (Y), ouvrage préc. p. 335.

* 73 Cf MERLE (Ph), Droit commercial, sociétés commerciales, 3e éd., Précis Dalloz, 1992, p. 440.

* 74 Voir Cass. Com., 22 mars 1988, Rev., soc. 1988, p. 227, cité par CHARTIER Ib.

* 75 Voir Tribunal régional de Niamey, ordonnance de référé N° 245 du 22 Octobre 2002, affaire Abass HAMMOUD c/ Jacques Claude LACOUR et Dame Evelyne Dorothée FLAMBARD, Ohadata J- 04- 80, http:// www. Ohada.com

* 76 Voir en ce sens POUGOUE (PG), ANOUKAHA (F) et NGUEBOU (J) Ib.

* 77 Voir CHARTIER Op. Cit., p. 337.

* 78 Voir en ce sens POUGOUE (PG), ANOUKAHA (F) et NGUEBOU (J) Ib

* 79 Voir POUGOUE (PG), ANOUKAHA (F) et NGUEBOU (J) Op. Cit., p.86 et 87.

* 80 En France, certaines décisions du juge ont été taxées d'audacieuses par la doctrine. Ce fut notamment le cas quand la Cour de Cassation a admis que la mission de l'expert s'étende le cas à plusieurs sociétés d'un même groupe. Voir Cass. Com., 10 mai 1988, Bull. Civ., IV, N° 160, p. 111, cité par CHARTIER (Y), Op. Cit., p. 337.

* 81 Paris, 12 janvier 1977, JCP, 1978, II, 1823, notes Chartier, cité par CHARTIER (Y) Ib.

* 82 Voir tribunal régional hors classe de Dakar, ordonnance de référé N° 901, du 9 août 1999, affaire Hassane Yacine c/ société nattes industries, Hibrahima Yazback et autres, Ohadata J-02-198, http://www.ohada.com

* 83 Voir CA d'Abidjan, cinquième chambre civile, arrêt N° 10 du 02 janvier 2001, affaire polyclinique Avicennes c/ bassit Assad, ohadata j-02-113, http://www.ohada.com

* 84 Voir tribunal régional de Niamey préc. où la décision a été rendue le 22 octobre 2002 en faveur d'une demande introduite le 09 septembre 2002 ; CA d'Abidjan, arrêt N° 376 du 02 mars 2004, affaire Matalock Procces-ci SARL c/ Tourreguitart Clussela, ohadata j-04-489, http://www.ohada.com

* 85 Voir GUYON (Y) Droit des affaires T2 préc., p. 62.

* 86 GUYON (Y). Droit des affaires T2 préc., p. 53.

* 87 Contrairement à l'expertise de gestion où le juge intervient pour apprécier l'opportunité de la messure

* 88 Loi de 1966, article 64 al. 2 et 226 ; Voir GUYON (Y)., Droit des affaires, T1, Droit commercial général et sociétés, 8e éd. E.,1994.

* 89 L'intérêt de l'entreprise englobe en effet tous les autres intérêts que ce soit ceux des créanciers, des salariés, des dirigeants, etc.

* 90 Les commissaires aux comptes doivent en effet être convoqués à toutes les assemblées générales d'associés et reçoivent à l'occasion les mêmes informations que ces derniers. En plus, ils doivent également être convoqués aux réunions du conseil d'administration s'il en existe.

* 91 En effet, les procédés modernes de gestion multiplient les relations entre sociétés d'un même groupe. Cf GUYON (Y), Droit des affaires, T1 préc., p.381 et Sv.

* 92 Voir SAINT-HALARY-HOUIN (C), Droit des entreprises en difficulté, 2e édition, Montchrestien, 1996, p. 87.

* 93 A l'instar de la législation française ou l'article L.432-5 du code de travail accorde un droit d'alerte aux délégués du personnel.

* 94 Notamment en cas d'échec de la discussion ou en cas de persistance des difficultés.

* 95 Voir SAINT-ALARY-HOUIN (C), Op. Cit., p.87.

* 96 Voir SAINT-ALARY-HOUIN (C), Op. Cit., p. 97.

* 97 C'est le cas actuellement en France. Voir GUYON (Y), Droit des affaires T2 préc., p. 64.

* 98 Voir SAINT-HALARY-HOUIN (C). Op. Cit., p.101.

* 99 Au Cameroun, la présence d'un représentant du ministère public lors des audiences commerciales est purement facultative. En France, l'intervention du ministère public devant le tribunal de commerce est récente. Elle remonte à la loi du 10 juillet 1970.

* 100 Plusieurs cas de saisine d'office par le tribunal ne seront possibles que sur la base des informations fournies par le ministère public. Cf Art. 29 AUPCAP. De même, il est appelé à initier certaines voies de recours en cas de besoin ; Cf Art. 222 de l'AUPCAP.

* 101 Cf Art. 716 AUDSCGIE.

* 102 Ils n'ont en général aucune connaissance des textes organisant le fonctionnement et le contrôle des sociétés.

* 103 ROUSSEL-GALLE (Ph), Op. Cit., p.9.

* 104 Voir NGUIHE KANTE (P)., thèse préc., p. 118 et Sv.

En effet, de par les conditions, la procédure de règlement préventif dont l'introduction est laissée au débiteur est destinée à éviter la cessation des paiements ou la cessation d'activités de l'entreprise à travers la prise d'un certain nombre de mesures qui sont réellement curatives. Il en est ainsi de l'octroi des remises et des délais par les créanciers, des licenciements pour motif économiques, cessions partielles d'actifs, location gérance...

* 105 Cf article 2 de l'AUPCAP.

* 106 Le règlement amiable a été récemment remplacé en France par la procédure de conciliation par la nouvelle loi des procédures collectives à savoir la loi N° 2005-845 du 26 juillet 2005 portant sauvegarde des entreprises, entrée en vigueur le 1er janvier 2006.

* 107 Voir SAWADOGO (F M), ouvrage préc., p.56 ; ROUSSEL-GALLE préc., P.10.

Tout comme le concordat amiable français, il repose sur une base contractuelle et comme la suspension des poursuites, il exige l'intervention du juge et l'élaboration d'un plan de redressement.

* 108 Voir CA d'Abidjan, Arrêt N°1129 du 8 Novembre 2002, Mr Jean MAZUET C/ GOMP- CI, Ohadata J-03-291, http://www.ohada.com dans lequel le juge rappelle cette nature contractuelle même après homologation du concordat.

* 109 Voir en ce sens, GOMEZ (J R), OHADA, entreprises en difficulté, lecture de l'acte uniforme OHADA portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif à la lumière du droit français, Bajag Meri, 2003, p. 31.

* 110 Cf Art. 5 AUPCAP

* 111 Voir NGUIHE KANTE (P), Thèse préc., Ib.

* 112 L'article 35 de la loi française N° 84-148 du 1er mars 1984 disposait que l'ouverture du règlement amiable a lieu à la suite des difficultés «juridiques, économiques ou financières ».

* 113 En effet, la loi N°2005-845 du 26 juillet 2005 dite loi de sauvegarde des entreprises en son article 5 prévoit que la procédure de conciliation est ouverte au profit des «  personnes exerçant une activité commerciale ou artisanale qui éprouvent une difficulté juridique, économique ou financière, avérée ou prévisible, et ne se trouvent pas en cessation des paiements depuis plus de quarante-cinq jours ».

* 114 Voir en ce sens ROUSSEL-GALLE (Ph). Op. Cit., p. 14.

* 115 En ce sens, voir TIGER (Ph), le droit des affaires en Afrique, OHADA, PUF, coll. Que sait-je, 1999, p. 110, cité par ROUSSEL-GALLE Ib ; A propos du règlement amiable français, voir GUYON Y. Droit des affaires T2., p.92 ;

* 116 Cf Art. 6 AUPCAP

* 117 Cf Art. 7 AUPCAP

* 118 Cf Art. 12, 13 et 14 AUPCAP.

* 119 Voir SAWADOGO (FM) ouvrage préc., p. 60

* 120 Voir SAWADOGO (FM). Ib.

* 121 Cf Art. 2 AUPCAP.

* 122Voir Cass. Com, 14 février 1978, info, note Honorat, cité par GUYON préc. P. 130.

* 123 Voir ROUSSEL-GALLE (Ph), Op. Cit., p. 15 ; TEBOUL (G)., « la cessation des paiements : une décision ne varietur ? » in Jurisprudence commerciale, Entreprises en difficultés : nouvel essai préc. P18 et Sv.

* 124 Voir POUGOUE (PG) et KALIEU (Y). Op. Cit., p. 20 ; GUYON (Y), Droit des affaires T2 préc., p. 131 et 132.

* 125 Voir POUGOUE (PG) et KALIEU (Y), Op. Cit., p. 21.

* 126 Il s'agit par exemple des emprunts onéreux, des ventes à perte. La cessation des paiements peut même être constatée alors même qu'une seule dette échue est impayée, voir Cass. Com. 7décembre 1983 d. 1984, inf. Rap., 260, obs. A. Honorat ; Cass. Com., 8 mars 1994 Dr. Stés, mai 1994, N° 90, obs. CHAPUT (Y), cités par JEANTIN (M), préc. P. 366.

* 127 Voir TGI de Ouagadougou (BF), Jgt N° 286 du 03 novembre 2004, requête de la société BOULANGERIE 2000 aux fins de règlement préventif, Ohadata J-05-233, http://www.ohada.com

* 128 Cf DERRIDA (F), « Les dangers de la faillite pour la pratique notariale » cité par NGUIHE KANTE, thèse préc. P.122.

* 129 Certaines grandes affaires de ces dernières années ayant défrayé la chronique sur la scène internationale nous fournissent des illustrations patentes notamment les affaires VIVENDI, PARMALAT, ADECCO, WORLDCOM. Voir en ce sens TEBOUL (G) Op. Cit., p. 17.

* 130 En l'espèce, malgré le rejet du concordat, le TGI refusa de déclarer le débiteur en cessation des paiements au détriment de ses créanciers. Voir dans le même sens l'affaire PRES c/ EURAFRICAINES D'INDUSTRIES précitée.

* 131 Auquel cas de nombreuses demandes non fondées risquent d'encombrer les prétoires et auront pour conséquence de jeter un peu plus de discrédit sur la procédure de règlement préventif

* 132 Cf TEBOUL (G). Op. Cit., p.34.

* 133 Voir Affaire société BOULANGERIE 2000 préc.

* 134 Les actes de gestion englobent les actes d'administration et de disposition dès lors qu'ils contribuent à la réalisation de l'objet social ; voir MERLE (Ph), Droit commercial, sociétés commerciale, 7e éd., Dalloz, 2000.

* 135 Il semble évident que le législateur vise les commerçants personnes physiques, les dirigeants de droit des personnes morales et leurs représentants. Les doutes peuvent toutefois exister pour les dirigeants de fait. Mais en analysant les articles 194, 196 et 197 AUPCAP, on remarque que ces derniers, qu'ils soient « rémunérés ou non, apparents ou occultes », encourent la faillite personnelle. Par conséquent, on peut déduire qu'ils doivent nécessairement se voir reconnaître le droit de demander l'ouverture d'une procédure de règlement préventif.

Voir en ce sens ROUSSEL-GALLE (Ph), Op. Cit., p. 17.

* 136 Ainsi, sans recourir au juge, le débiteur cherchera à négocier des délais et remises avec ses principaux créanciers.

* 137 Ces accords amiables s'étaient très vite heurtés en France à des difficultés importantes d'application et à l'hostilité de la doctrine. Ils laissaient craindre la pratique des traitements privilégiés à l'égard de certains créanciers, notamment des paiements préférentiels ou des garanties nouvelles pour des dettes antérieurement contractées. C'est pour ces raisons que l'idée du concordat amiable a été quelque peu abandonnée ; voir JEANTIN M. op. Cit., p. 271 et s.

* 138 Voir HOUIN (R), Les aspects économiques de la faillite et du règlement judiciaire, rapport de l'inspection générale des finances, T. 20, Sirey, 1970. p.

* 139 Voir ROUSSEL-GALLE (Ph), Op. Cit., p. 17.

* 140 En ce sens, ISSAH-SAYEGH (J), Présentation du projet d'acte uniforme de l'OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution, du droit des sûretés et des procédure collectives d'apurement du passif, Rev. Personnes, p.204.

* 141 Voir SAWADOGO (FM). Ouvrage préc., p. 61 et Sv.

* 142 Cf SAWADOGO (FM), ouvrage préc., P. 45 et Sv.

* 143 Voir TGI de Ouagadougou (Burkina Faso), Jgt N°20 du 29 janvier 2003, requête de la société IFEX aux fins d'être admise au bénéfice du règlement préventif, ohadata j-04-44, http://www.ohada.com

* 144 Ce texte peut parfaitement être comparé à l'article 27 de l'AU relatif au contenu de l'offre de concordat dans le cadre du redressement judiciaire. Ces deux textes sont presque identiques.

* 145 Voir SAWADOGO (FM), ouvrage préc., p. 63 ; pour plus de détails, Cf art. 7 AUPCAP.

* 146 Voir affaire société BOULANGERIE 2000 préc. En l'espèce, tous les créanciers ayant rejeté l'offre de concordat préventif, le tribunal fut obligé d'annuler l'ordonnance de suspension des poursuites antérieurement prise.

* 147 Cf SAWADOGO (FM), ouvrage préc., p.5.

* 148 Voir affaire BOULANGERIE 2000 préc.

* 149 Voir affaire IFEX préc.

* 150 Notamment lorsque l'offre de concordat n'est pas déposée en même temps que les documents prévus à l'article.

* 151 Voir SAWADOGO (FM), Traités et Actes uniformes annotés et commentés préc., p. 885.

* 152 Voir affaire société IFEX préc.

* 153 Voir ROUSSEL-GALLE (Ph), Op. Cit., p.19.

* 154 Voir affaire société BOULANGERIE 2000 préc.

* 155 Autrefois, le failli pouvait même subir une condamnation à mort : voir ordonnance de 1673 en France. En outre, il pouvait faire l'objet d'une incarcération ou d'une garde à vue. Voir en ce sens, POUGOUE (PG) et KALIEU (Y), Op. Cit., p. 4.

* 156 Voir ROUSSEL-GALLE (Ph) , Op. Cit., p. 16.

* 157 Voir article 29 AUPCAP.

* 158 Cette disposition semble avoir été instituée en faveur de l'entreprise et plus précisément de son sauvetage ; voir en ce sens SAWADOGO (FM), Traité et actes uniformes commentés et annotés préc., p. 894.

* 159 Voir en ce sens ROUSSEL-GALLE (Ph), Op. Cit., p. 63

* 160 Voir article 15 al. 3.

* 161 Voir NGUIHE KANTE (P),, thèse préc., p. 28.

* 162 Voir POUGOUE (PG), et KALIEU (Y), Op. Cit., p. 60.

* 163 Le super privilège porte sur la fraction insaisissable du salaire et a bénéficié dans le cadre des procédures collectives OHADA d'une attention particulière, car l'article 96 de l'AU sur les sûretés prévoit qu'il doit être payé rapidement. Le privilège des salaires quant à lui garanti aux termes de l'article 107-3 de l'AU sur les sûretés, un an de salaire ayant précédé le jugement d'ouverture de la procédure.

* 164 Voir POUGOUE (PG), et KALIEU (Y), Op. Cit., Ib.

* 165 Voir les articles 40 et 42 du code camerounais du travail du 14 août 1992.

* 166 Voir POUGOUE (PG)., « Le petit séisme du 14 août 1994 », RJA, 1994, p. 12 et s.

* 167 Mais dans tous les cas, le SMIG ne doit faire l'objet d'aucune réduction. Voir en ce sens la lettre circulaire N° 02/MTPS/ST/JRD du 14 mars1995 sur le champ d'application et l'incidence du SMIG sur la fixation des salaires catégoriels, Juridis périodique, N° 25, p.29 et s.

* 168 Voir article 9AUPCAP.

* 169 Voir CA d'Abidjan, Chambre Civile et Commerciale, arrêt N°633 du 11 juin 2004, Société DAFNE et un autre c/ SGBCI CI, Ohadata j-05-261, http://www.ohada.com

Il en est de même des actions telles les actions en nullité, résolution ou rescision d'un contrat pourront être poursuivies.

* 170 Voir article 18 de l'AUPCAP.

* 171 Cf ANOUKAHA (F), Le droit des sûretés dans l'acte uniforme OHADA, PUF, 1998, p. 71.

* 172 Elle n'était décidée qu'en cas de nécessité notamment lorsque le conciliateur se heurte à l'intransigeance de certains créanciers qui veulent saisir les actifs de l'entreprise. Voir GUYON (Y), Droit des affaires T2 préc., p. 95.

* 173 Voir article 18 al. 3 AUPCAP.

* 174 Dans la procédure de conciliation, le conciliateur a pour mission de favoriser la conclusion entre le débiteur et ses principaux créanciers d'un accord amiable. La procédure est en principe confidentielle. Toutefois, le débiteur peut demander l'homologation de l'accord intervenu. C'est de cet accord que les cautions et coobligés peuvent se prévaloir.

* 175 Voir les articles 183 à 188 AUPCAP.

* 176 En effet, la recherche d'une entreprise ne doit pas conduire à mettre une autre en péril.

* 177 Voir SAWADOGO (FM), Actes uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, commentaires, Edicef, ed. FFA, 2000, p. 34.

* 178 Celle-ci est maintenue dans le but de permettre à l'entreprise d'avoir des fonds nécessaires pour tenir ses engagements vis-à-vis de ses créanciers et aussi améliorer sa condition économique et financière nécessaire à son redressement.

* 179 Il ne s'agit cependant que des créances visées par la décision de suspension des poursuites à savoir celles désignées par le débiteur. Les autres créanciers peuvent valablement être payés par le débiteur.

* 180 Voir TERRE (F)., SIMLER (Ph) et LAQUETTE (Y), Droit civil, les obligations, Dalloz, 7e éd., 1999, N° 76.

* 181 Voir article 11 AUPCAP

Mais, il est évident que de telles décisions doivent être limitées car elles sont non seulement contraire au principe d'égalité des créanciers, mais pire, elle contribuer à diminuer l'actif de l'entreprise, gage des créanciers.

* 182 Voir l'article 18 al. 5.

* 183 Voir SAWADOGO (FM), Ouvrage préc., p. 72.

* 184 Ce sont le syndic, les contrôleurs et le juge commissaire.

* 185 Voir POUGOUE (PG) et KALIEU (Y), Op. Cit., p 70.

* 186 Voir article 5 al. 3 AUPCAP

* 187 L'article 16 AUPCAP ne rend obligatoire que la désignation du juge commissaire ; pour le syndic et les contrôleurs, leur désignation est purement facultative.

* 188 Voir SAWADOGO (FM), Traités et actes uniformes annotés et commentés, Op. Cit., notes sous article 16 AUPCAP, p. 891.

* 189 Cf Art. 36 AUPCAP.

* 190 Cf Aart. 37 AUPCAP.

* 191 Cf SAWADOGO (FM), Ouvrage préc., p. 5.

* 192 Cf TEBOUL (G), Op. Cit., p. 33.






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille