UNIVERSITE DAKAR - BOURGUIBA
UFR DE GENIE JURIDIQUE « IJBA »
Ingénierie Juridique-Banque-Assurance
L'OBLIGATION DE CONSEIL DU BANQUIER DANS LES RELATIONS ENTRE LA
BANQUE ET SON CLIENT
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Mr Moussa Bâ
Mémoire de maîtrise de droit des affaires
Sous la direction de Mr IDRISSA Diallo 2007-2008
SOMMAIRE
Introduction
Partie É : Les contours de l'obligation de
conseil du banquier
Chapitre É : Les fondements de l'obligation
de conseil du banquier
Section É : L'obligation contractuelle de
conseil du banquier
Section ÉÉ : L'hypothèse
d'une obligation de conseil professionnel du banquier
Chapitre ÉÉ : L'étendue de
l'obligation de conseil du banquier
Section É : L'étendue de
l'obligation de conseil du banquier quant aux contractants
Section ÉÉ : L'étendue de
l'obligation de conseil du banquier quant au domaine
d'application
Partie ÉÉ : La mise en oeuvre de
l'obligation de conseil du banquier
Chapitre É : L'exécution de
l'obligation de conseil du banquier
Section É : La détermination de
l'obligation de conseil du banquier
Section ÉÉ : Les limites droit de
conseil du banquier
Chapitre ÉÉ : Les sanctions
envisagées à l'absence de l'obligation de conseil du
banquier
Section É : La faute du banquier
Section ÉÉ : Le préjudice et
le lien de causalité
Conclusions et recommandations
Bibliographie
Plan détaillé
Principales abréviations
INTRODUCTION
Généralement il est admis que l'argent, s'il
ne fait pas le bonheur, il y contribue. Mais très souvent, dans
l'imagerie populaire, il est admis que c'est un véhicule de
liberté.
Ces dictons, s'ils sont stéréotypés,
recouvrent une part de vérité. L'argent est un bien
précieux et pour le moins nécessaire dans notre
société puisqu'il permet non seulement de faciliter les
échanges mais surtout de satisfaire une grande partie des besoins. Or
cet argent, nous le plaçons dans les banques autrement dit nous le
confions au banquier qui se voit investit d'une mission importante
c'est-à-dire d'une obligation trop lourde.
Cependant, la préciosité de son outil de
travail amène- t- il le banquier à prendre en charge les
intérêts de ces clients ?
En d'autres termes, cela entraîne- t- il à la
charge du banquier une obligation de conseil ? L'obligation de conseil
d'une manière générale oblige une personne à
prendre en charge les intérêts d'une autre et à l'orienter
vers un comportement conforme ou identique à ses
intérêts.
Le banquier est tenu d'une telle obligation lorsque le contrat ne
le prévoit.
Mais peut-on imposer une telle obligation lorsque le contrat ne
le prévoit pas ? Il nous faut alors revenir sur les
différents faits qui ont marqué, selon nous la genèse de
cette obligation avant de voir comment la jurisprudence a reconnu une telle
obligation de conseil du banquier.
Depuis plusieurs années les activités
financières et bancaires se sont grandement développées.
Désormais presque tous les individus disposent des comptes bancaires.
De plus, les investisseurs financiers sont devenus de plus en
plus fréquent : pour financer un bien mobilier, immobilier
etc....
De telles opérations sont nombreuses et techniques. La
démocratisation de l'activité bancaire et financière et,
parallèlement, le caractère complexe de cette activité,
ont fait que les clients de la banque ont découplés leurs
attentes. Ils ne peuvent plus se contenter des missions classiques de la
banque. Le banquier ne se contente plus de recevoir des fonds du public,
d'octroyer des crédits et de fournir des moyens de paiement. En partant
de l'évolution de leurs activités et des attentes de la
clientèle, le banquier a multiplié ses activités de
conseil.
Le développement de ces opérations a même
pris tant d'ampleur que des études ont été vouées
à ce seul sujet. C'est ainsi qu une loi du 24 janvier 1984 en France a
pris acte de cette diversification en reconnaissant, parmi les
opérations annexes que le banquier peut accomplir à titre
habituel, les activités de conseil en matière d'investissement et
de gestion du patrimoine. Il y a alors dorénavant des contrats qui ont
pour objet le conseil du banquier plus communément appelés
contrat de conseil. Il ne faut cependant pas confondre ces contrats de conseil
conclus par le banquier et son client avec l'obligation de conseil du banquier.
L'obligation de conseil du banquier est une obligation accessoire à
l'obligation principale du contrat. L'obligation de conseil vient se greffer
sur l'obligation principale mais ne doit pas être confondue avec elle.
Prenons l'exemple de la convention de compte de dépôt de titres.
Le banquier s'engage à garder les titres. Il ne s'engage pas à
conseiller le client sur ces investissements. Pourtant il devra en principe
conseiller au client de ne pas investir sur le marché à terme,
dans la mesure ou il existe des risques liés à ces
opérations.
On voit bien que l'obligation de conseil n'est que l'obligation
accessoire du contrat.
Précisons dés maintenant que nous
n'étudierons dans le cadre de l'obligation de conseil du banquier, que
l'obligation de conseil accessoire et non pas l'obligation de conseil objet du
contrat passé entre le banquier et son client. En effet les deux
obligations se distinguent non seulement dans leur nature (accessoire et
principale) mais aussi dans leur finalité.
L'obligation de conseil du banquier accessoire est l'oeuvre de la
jurisprudence pour rétablir l'équilibre entre le banquier et son
client alors même que l'obligation contractuelle de conseil est une
prestation de service vendue par le banquier à son client. Il n y a donc
que très peu de rapports entre les deux et une analyse ou étude
d'ensemble serait un non sens.
Si les deux obligations de conseil ne se confondent pas, il y a
cependant, indéniablement des liens entre les deux. En effet, en
multipliant ses activités de conseil, c'est la figure même de la
profession bancaire qui a été changée. De
« récepteur des fonds du public », le banquier est
devenu un interlocuteur privilégié de ces clients, intervenant
sur de multiples sujets, guidant leurs intérêts, etc. Dés
lors il deviendra difficile de cloisonner les missions : le client dans
toutes ses opérations bancaires, veut obtenir les conseils de son
banquier, en qui il a toute confiance, que le contrat le liant à
celui-ci ait pour objet un conseil ou non.
Il existe donc de manière intrinsèque dans la
profession de banquier, une mission de conseil.
Mais de la mission à l'obligation de conseil il y a un pas
qu'on ne peut pas franchir.
En effet même si le terrain a été bien
préparé pour une reconnaissance de l'obligation de conseil du
banquier et en même temps du fait que certaines lois soient silencieuses
sur le point de savoir si le banquier était tenu ou non d'une obligation
de conseil, une telle consécration était possible juridiquement.
Ainsi, par un mouvement continu qu'il est inutile de retranscrire, la Cour de
cassation est venue pour remédier au déséquilibre
contractuel, imposer une obligation de conseil aux parties au contrat.
Chaque fois qu'un déséquilibre existe entre deux
contractants, la partie la plus forte économiquement et techniquement
est débitrice envers la plus faible d'une obligation d'information ou de
conseil.
Tout cela a favorisé l'avènement d'une obligation
de conseil à la charge du banquier. Cependant la Cour de cassation n'a
reconnu explicitement l'existence d'une obligation de conseil que très
rarement. On peut citer à cet égard, l'arrêt du 27 Juin
1995 rendus par la première chambre civile. Dans cette affaire, la Cour
décide que « la présentation d'une offre
préalable ne dispense pas l'établissement de crédit de son
obligation de conseil à l'égard de l'emprunteur ». De
même, un autre arrêt en date du 5 Novembre 1991², la Cour de
cassation (chambre commerciale) casse l'arrêt d'une cour d'appel pour
avoir décider qu'un compte de dépôt de titres
« n'impose aucune obligation de conseil à la charge du
banquier ». Le principe de cet arrêt a été repris
plusieurs fois.
Devant une jurisprudence si pauvre, plusieurs auteurs4
rejettent l'existence même de l'obligation de conseil à la charge
du banquier. Mais, ce serait faire là une erreur.
En effet, plusieurs arguments en la faveur d'une telle
reconnaissance apparaissent comme inébranlables. D'abord, la Cour de
cassation a plusieurs fois reconnu l'existence de cette obligation de conseil
comme nous l'avons déjà vu. De plus, on trouve aussi pas mal
d'arrêts qui reconnaissent de manière implicite une obligation de
conseil à la charge du banquier mais qui ne sanctionne pas directement
sur ce fondement où rejette la demande.
Il en est par exemple l'arrêt du 8 Juin 19945
qui vient sanctionner le fait pour la banque d'avoir contracté un
prêt trop coûteux à son client et ne pas l'avoir
déconseillé finalement de ne pas contracter.
Cet arrêt est d'autant significatif que la banque fasse
valoir qu'il n'existait pas d'obligation de conseil à la charge de
l'établissement de crédit. Alors si la reconnaissance de
l'obligation de conseil est implicite, elle n'empêche pas l'étude
de l'obligation de conseil du banquier.
De plus, si la loi bancaire n'aborde pas le problème
de l'obligation de conseil, l'usage vient appuyer une telle reconnaissance.
..................................
1Cass .civ.1ere, 27 juin 1995, Bull.
civ. , I , no J.C.P. ed. E.,II, 625 note Legeais; R.T.D . civ., 1996
p. 385
2 Cass.com, 5 nov 1991, RJDA 1/92, no
68 ; Quot. Jur. 21 janv. 1992, p.6; RTD com. 1992-436, no 22;
Bull. Joly, 1993.-292
3Cass.com.,2nov.1994,R.J.D.A.1/95,no31;voir
aussi. :Cass.com.10 dec 1996.D.Affaire1997,1997,p.108 ;Qot
jur.,no15,20 fevr 1997,p.3,note J.P.D ,cahoter question du
patrimoine,sept -dec 1997,p.20,des Lucas (F.-X);Bull. Joly Bourse
1997.p.205,note De Vauplane (H.)
4Voir par exple: RIVES-LANGES (J.-L) et
CONTAMINE-RAYNAUD (M.) Droit bancaire, Dalloz, 6eme ed ;Gaurio (A.), Le
prêteur est-il tenu réellement d'une obligation de conseil envers
le particulier emprunteur
5Cass.civ 1ere, 8 juin 1994, Bull.civ.,
I,no 206 J.C.P.ed-E.,1995,II,652,note legeais (D.); RD bancaire et
bourse,1994,no 44,p.173 des crédit (F.) et Gérard
(Y.)
Ainsi, le banquier, comme tout professionnel est tenu de se
soumettre aux règles de bonne conduite, à s'enquérir de la
situation financière de ses clients, de l'expérience de ses
clients en matière d'investissement mais surtout de l'objectif de ses
clients en ce qui concerne les services demandés et à leurs
communiquer les informations utiles. Le banquier se voit alors investit d'une
obligation de conseil.
Enfin, il nous semble que les arguments des opposants de
l'obligation de conseil ne sont pas décisifs. On a ainsi pu
écrire qu'il s'agissait en fait d'une obligation de mise en garde.
Selon nous c'est avoir alors une vision trop restrictive de
l'obligation de mise en garde. La mise en garde, en effet n'est qu'un conseil
négatif.
Il ne saurait faire de doute en effet que lorsqu'on met en garde
une personne contre une certaine attitude, on lui conseille la plus grande
prudence.
Un autre argument repose sur le fait que l'obligation de conseil
est contraire au devoir de non-ingérence. Il n'est pas non plus
convaincant. En effet, si l'obligation de conseil peut marquer un recul du
devoir de non-ingérence, il n'est pas pour autant incompatible avec
celui-ci. En effet, le conseil ne fait que suggérer une décision
au client et non pas remplacer la décision du client.
Malgré tout, les débats relatifs à
l'existence et à la reconnaissance de l'obligation de conseil doivent
susciter en nous une interrogation. Si la reconnaissance de l'obligation de
conseil est incontestable, les silences de la Cour de cassation, le faible
nombre d'arrêts de cassation jettent le trouble dans les esprits. Ainsi,
on est amené à se poser la question de la réalité
de l'obligation de conseil. En effet si sa reconnaissance formelle ne laisse
aucun doute, quelle est son envergure, la place qui lui est
réservée dans la responsabilité du banquier ? Cette
question est intéressante dans la mesure où elle nous permettra
de dégager le rôle assigné par la jurisprudence à
l'obligation de conseil du banquier. Est-il une arme entre le banquier et son
client ou n'est-il qu'un correctif, ne sanctionnant que les négligences
du banquier ?
Elle permettra aussi de clarifier et de synthétiser une
jurisprudence dispersée et ainsi de fixer les conditions dans lesquelles
l'obligation de conseil est due et peut être sanctionnée.
Cela pourra constituer une réponse aux demandeurs qui
recherchent, de plus en plus nombreux, la responsabilité du banquier sur
ce fondement.
C'est donc un panorama de l'obligation de conseil que nous
nous proposons de dresser.
Pour cela, il faut prendre les mesures de l'obligation de conseil
c'est-à-dire en délimiter les contours (Partie ²).
Cependant même si l'étendue l'obligation de conseil est grande,
son efficacité passera par sa mise en oeuvre (Partie
ÉÉ).
En effet, si l'objet du conseil est restreint ou les conditions
de responsabilité appréciées trop
sévèrement, la réalité de l'obligation de conseil
sera mise en cause.
Partie É : Les contours de l'obligation de
conseil du banquier
Il s'agira dans cette première partie de parler des
mesures de l'obligation de conseil du banquier. Cela va être une tache
difficile à réaliser pour des raisons diverses. L'obligation de
conseil est insaisissable car c'est une obligation prétorienne.
De ce fait c'est à la volonté des espèces
que l'obligation de conseil est apparue. C'est donc une sorte de panorama
très impressionniste, il faut alors s'en éloigner pour le
distinguer et en comprendre la portée. Il faut examiner les
décisions de la jurisprudence sans se laisser égarer par l'une
d'elle et ne pas confondre décision d'espèce et courant
jurisprudentiel.
D'autre part s'il ne fait aucun doute que l'obligation existe,
les décisions de la Cour de cassation sont très peu rares et
souvent implicite. Se pose alors le problème d'interprétation.
Comment parvient-on à délimiter les contours de l'obligation de
conseil ? Le parallélisme avec le tableau permet de le savoir.
En effet puisque de par les contours on pourra mesurer la
surface d'un terrain, il en va de même ici. Si on trouve le fondement de
l'obligation de conseil (Chapitre ²), cela nous permettra de mesurer
l'étendue de l'obligation de conseil du banquier (Chapitre
²²).
Chapitre ² : Le fondement de l'obligation de
conseil du banquier
L'importance dans la recherche du fondement de l'obligation
de conseil peut s'apprécier à deux niveaux.
Tout d'abord, c'est de ce fondement que va dépendre la
sanction. Si l'obligation de conseil du banquier peut être
considéré comme un devoir contractuel c'est alors la
responsabilité délictuelle du banquier qui sera mise en jeu. A
l'inverse, ça sera la responsabilité contractuelle du banquier
qui sera mise en jeu. En effet même si c'est là l'aspect le plus
intéressant, chercher le fondement de l'obligation de conseil, c'est
déterminer, par contrecoup, qui est le créancier de l'obligation
de conseil. Ainsi si l'on conçoit l'obligation de conseil comme une
obligation contractuelle, alors dans ce cas seul le cocontractant sera
créancier de l'obligation de conseil. Dans le cas contraire, si
l'obligation de conseil est légale, alors tous les sujets de droit
pourront se prévaloir à l'encontre du banquier de l'obligation de
conseil.
Il serait nécessaire pour cela de rattacher l'obligation
de conseil à l'exercice de sa profession. C'est alors dans l'article 118
du Code des obligations civiles et commerciales que se trouvera le fondement de
l'obligation de conseil du banquier.
On voit ainsi que la réponse à la question du
fondement de l'obligation de conseil du banquier peut être examiné
en deux parties. L'obligation de conseil peut être une obligation
contractuelle (Section ²).On peut aussi l'examiner sous l'angle d'une
obligation professionnelle (Section ²²).
Section É : L'obligation contractuelle de
conseil du banquier
La répétition étant
pédagogique, il faut encore dire que l'obligation de conseil est apparue
au gré des espèces. C'est d'abord l'étude ou l'examen de
la jurisprudence qui montre le rattachement de l'obligation de conseil au
contrat (§1). Mais comment ce rattachement est-il possible alors
même que les parties n'ont pas voulu cette obligation ? Il faudra
alors dans ce cas examiner la justification de ce rattachement (§2).
§1 : Le rattachement de l'obligation de conseil au
contrat
Pour les juges, l'obligation de conseil est une obligation
contractuelle autrement dit une obligation qui prend naissance dans le contrat
conclu entre le banquier et son client. Ainsi un certains nombre de
décisions vont dans ce sens. Il en est ainsi à titre d'exemple
l'arrêt du 5 Novembre 1991, dit arrêt « Buon »,
rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation6. Il
s'agissait dans cette affaire, un contrat de dépôt conclu entre la
banque Populaire Bretagne Atlantique et Mr Jacques Buon. En effet Mr jacques
Buon pratiquait par le biais de la banque des opérations
boursières et spéculait de manière constant sur le cours
de l'or. Ces opérations spéculatives n'ont pas donné les
résultats escomptés autrement dit elles se sont soldée par
des pertes. De ce fait la banque a alors réclamé Buon le
règlement du solde débiteur de son compte de dépôt
de titres. A cet effet le tribunal de grande instance et la Cour d'appel ont
accueilli la demande de la banque et ont refusé d'engager la
responsabilité de la banque pour avoir manqué à son
obligation de conseil.
Néanmoins, la Cour de cassation casse l'arrêt de la
Cour d'appel et au visa de l'article 7 du code des obligations civiles et
commerciales, décident que « quelles que soient les
relations contractuelles entre un client et sa banque, celle-ci a l'obligation
de l'informer des risques encourus dans les opérations
spéculatives sur le marché à terme ». Ainsi donc
on voit bien que l'obligation de conseil est rattachée au contrat de
dépôt de titre.
En d'autre terme la Cour de cassation précise encore
que cette obligation existe quelles que soient les relations contractuelles
entre le client et sa banque, c'est dire ainsi que même si le contrat ne
le prévoit pas de manière spéciale, le banquier est tenu
d'une obligation de conseil envers son client. Cette solution se retrouve dans
diverses hypothèses. Il en est à titre d'exemple en
matière d'octroi de crédit. En effet l'exemple le plus
significatif est l'arrêt du 27 Juin 19957 rendus par la
première chambre civile de la Cour de cassation. Cette dernière,
dans cette affaire, décide que le banquier est tenu, outre les
obligations qui pèsent sur lui, d'une obligation de conseil envers
..................................
6 Cass.com, 5 nov.1991, RJDA 1/92, no 68; Quot. jur.21
janv.1992, p.6; RTD com.1992.436, no22; Bull. Joly, 1993.292.
7 Cass.civ.1ere, 27 juin 1995, Bull.civ. I,
no 287; J.C.P. éd.E. II ? 652, note Legeais (D.); R.T.D.civ.,
1996, p.385
l'emprunteur, son cocontractant. Par là aussi c'est le
contrat qui permet de découvrir une obligation de conseil à la
charge du banquier. Même si la Cour de cassation ne se
réfère pas aux règles régissant le contrat, on ne
saurait dire ici que c'est une obligation de conseil qui est en cause. En effet
la Cour de cassation se réfère le plus souvent à
l'obligation des prêteurs envers l'emprunteur, autrement dit à
l'obligation du contractant envers le cocontractant. Le problème
était de savoir si le prêteur devait avertir l'emprunteur sur les
risques qu'il courait en souscrivant le contrat de prêt. Cet arrêt
qui, pour la 1ère fois reconnaît l'obligation de
conseil du prêteur envers l'emprunteur lors de l'octroi de crédit
a été plusieurs fois réaffirmé dans son principe
depuis lors.
C'est ainsi que dans un autre arrêt du 23 Juin
19988, la Cour de cassation confirme l'arrêt de la Cour
d'appel qui avait condamné un crédit bailleur sur le fondement de
l'article 63 alinéa 2 du Code des obligations civiles et commerciales
pour n'avoir pas déconseillé aux cautions débitrices de ne
pas prendre un tel engagement.
Ainsi si l'on constate que le rattachement au contrat de
l'obligation de conseil ne renferme aucun doute, il est néanmoins
important de se demander la question de savoir comment la Cour de cassation
peut alors même que le contrat ne prévoit pas d'obligation de
conseil à la charge du banquier, l'imposer malgré les termes du
contrat.
§2 : La justification du rattachement du devoir de
conseil au contrat
Ca sera une question classique que nous nous essayerons de
nous poser ici. En effet, comme toutes les obligations d'information et de
conseil que le juge à dégagées depuis très
longtemps, la première fois à propos d'un vendeur de bicyclettes.
L'interrogation s'articule dans les termes suivants : Quelle est le
fondement de cette obligation de conseil contractuelle, accessoire à
l'obligation principale du contrat ? Diverses réponses ont
été apportées par la doctrine. Du point de vue du courant
de l'autonomie de la volonté, ces obligations de conseil qui ont
été découvertes par la jurisprudence sont l'expression
implicite des cocontractants : les parties ont voulu l'obligation
principale, certes, mais cela ne les empêchent pas de vouloir en
même temps les obligations accessoires de conseil et d'information.
Dés lors que les obligations contractuelles ne trouvent leur source que
dans la volonté des parties il ne peut en être autrement.
C'est alors par une interprétation du contrat que le juge
les met en lumière. Cette théorie demeure critiquable dans la
mesure où des textes l'ont démenti. D'abord on estime que
« les conventions s'exécutent de bonne foi ».
Ensuite l'article 103 al 1 COCC dispose que « En l'absence de
volonté exprimée, le
..................................
8 Cass.com, 23 juin 1998, Bull.civ., IV,
no208 ; J.C.P.éd.E., 1998, p. 1831, note Legeais (D.)
contrat obligent à toutes les suites que la loi, les
usages, la bonne foi ou l'équité donnent à l'obligation
d'après sa nature ».
D'après ce qui suit on se rend compte alors que les
conventions obligent à ce que les parties ont consentis mais aussi
à ce qu'imposent la bonne foi, l'équité et la loi.
En effet les théoriciens de l'autonomie de la
volonté pensent que la bonne foi et l'équité ne doivent se
comprendre qu'à la lumière de la volonté des parties. Mais
cette position semble être un chemin de plusieurs obstacles tant sur le
plan de la théorie que sur le plan de la pratique jurisprudentielle.
Dés lors donc, concevoir que les parties ont
véritablement voulus l'obligation de conseil apparaît de
façon délicate. En effet partons de ce constat tiré du
livre « Traité du droit civil : Les conditions de la
responsabilité » sous la direction Ghestin, ces
volontés sont soient inexistants soient non concordantes. Le banquier
veut réaliser le plus de bénéfice possibles. De ce fait il
doit vendre des services, comment envisager alors qu'il veuille conseiller le
titulaire d'un compte à ne pas utiliser des services qui pourront
être préjudiciables pour le client ?
De même une autre remarque visant à rejeter la
position des théoriciens de l'autonomie de volonté est valable.
La remarque sera fondée sur la pratique jurisprudentielle. En effet
partons de cet arrêt rendu par la Cour de Cassation, certaines
idées vont marquer nos esprits.
Ainsi dans l'arrêt Buon, la Cour de Cassation vient
reconnaître une obligation de conseil à la charge des banquiers
« quelques soient les relations contractuelles » entre le
client et sa banque. L'obligation de conseil est donc reconnue en
l'espèce et cette reconnaissance est indifférente à la
relation contractuelle qui existe entre le client et sa banque.
Des lors on peut ne plus soutenir l'idée que l'obligation
de conseil trouve sa source dans la volonté des parties.
Cela est confirmé par plusieurs arrêts rendus par la
Cour de Cassation.
Le contractant est donc créancier de l'obligation de
conseil mais est-il le seul créancier de cette obligation de
conseil ? Pour prétendre à une réponse affirmative,
il faut reconnaître à la charge du banquier une obligation de
conseil liée à l'exercice de sa profession.
Section ÉÉ : L'hypothèse
d'une obligation de conseil professionnel du banquier
Même si l'on constate que le créancier de
l'obligation de conseil est le client autrement dit le cocontractant, il est
question de se demander s'il est le seul.
Dans cette hypothèse il faudrait envisager une
réponse négative dans la mesure où il y a plusieurs
exemples où le conseil du banquier est une nécessité et
son absence préjudiciable, hors même de tout cercle contractuelle.
A titre d'exemple, si une banque est tenue d'un mandat de
rapprochement d'entreprise en vue d'une fusion d'acquisition. Elle est tenue
d'une obligation de conseil contractuel envers la société
cliente. Ne serait-elle pas redevable à dispenser sans compter des
conseils à la société qu'il a proposé au
rapprochement et ce même si celle-ci n'est pas cliente ? En d'autre
terme, partons de l'exemple où le détenteur d'une carte bancaire
perd celle-ci, loin de chez lui, il ne pourra pas demander de conseil au
banquier dont il est contractant sur la façon dont il doit se comporter
dans ce cas. Cependant si toute fois il entre dans une autre banque, celle-ci
ne lui doit elle pas des conseils ? D'autres exemples peuvent être
retenus.
Un client d'une banque veut obtenir pour soi un bien immobilier
mais les taux du crédit immobilier sont fort élevés pour
le moment. La banque ne doit- elle pas lui conseiller d'attendre ? En
d'autre terme si un autre client de cette même banque veut
acquérir un bien meuble, une automobile par exemple. Il va se rapprocher
de son banquier pour solliciter une ouverture de crédit. Le banquier ne
va-t-il lui proposer d'autres solutions pour financer ce bien ? Dans ce
cas certains pourront retenir cet exemple comme étant faux, toujours
dans cet exemple on peut rattacher l'obligation de conseil du banquier au
contrat, l'absence de conseil du banquier serait analysée comme
étant de nature précontractuelle. A l'inverse, si dans cet
exemple on retient que le banquier a seulement proposé à son
client la conclusion d'un crédit bail, alors dans ce cas l'absence de
conseil du banquier ne pourra être retenue ni sanctionnée sur le
terrain de la responsabilité contractuelle ni sur le terrain des vices
du consentement.
La faute du banquier ne pourra être
sanctionnée, à moins que l'on retient que le banquier est tenu
d'une obligation de conseil professionnel c'est à dire retenir sa
responsabilité sur le terrain de l'article 118 du Code des obligations
civiles et commerciales.
C'est donc seul l'exercice de la profession du banquier qui va
créer l'obligation de conseil. Le banquier qui sera tenu d'une
obligation de conseil en vertu de sa profession et non en vertu d'un contrat.
Cette hypothèse est-elle concevable ? On dirait
oui. Cependant, même si la solution peut être envisagée
(§I), il semble que la jurisprudence rejette cette hypothèse,
considérant ainsi le cocontractant comme le seul créancier du
conseil (§II).
§1 : Une hypothèse envisageable
Face à une telle entreprise, il n'y a pas en
principe de difficultés majeures. Pour le cas d'un notaire, la Cour de
Cassation a retenu que celui-ci était tenu d'une obligation
générale de conseil dans la mesure où elle se fonde sur
l'article 118 du Code des obligations civiles et commerciales.
Cette solution ne devrait-elle pas être retenue lorsqu'il
s'agit du banquier ? La question mérite d'être
étudiée pour des raisons diverses.
En effet si le notaire est un officier public dont sa
profession est strictement réglementée, il y a lieu aussi de
constater que le banquier est lui aussi soumis à un statut légal,
que l'accès à la profession bancaire est de manière
stricte contrôlée par l'autorité publique et que les
établissements de crédit détiennent un monopole en ce qui
concerne les activités bancaires.
Donc d'une manière générale cette
solution retenue pour ce qui concerne l'obligation de conseil du notaire ne
sera-t-elle pas transposable à l'obligation de conseil du
banquier ? Pour tenter de répondre à une telle
interrogation, il faut se poser des questions. Par conséquent il faut
pour que l'obligation de conseil soit rattachée à l'exercice de
la profession bancaire que l'activité de conseil apparaît de
façon nécessaire dans l'exercice de la profession du banquier.
Une telle approche soulève la question de savoir quelles
sont les caractéristiques de l'activité bancaire ? La banque
de manière générale l'établissement de
crédit est uni avec son client par un rapport de type particulier
contrairement à la relation qui unie l'acquéreur au vendeur.
En principe entre le banquier et son client, c'est une
relation continue d'un manière où le banquier tiendra par exemple
le compte de dépôt, le compte joint,celui dit collectif, de
même accorder des crédits aux clients pour l'achat de biens
meubles ou immobiliers, faire des investissements,etc.... En plus c'est la
confiance qui règne dans la relation entre la banque et son client. A
titre de preuve par exemple on s'aperçoit que la convention de compte
est un contrat conclu à titre personnel alors que cette convention est
à la base des relations entre la banque et son client.
En d'autre terme partons par un examen simple de la
façon dont se déroulent les échanges entre le banquier et
son client. Le client qui sollicite son banquier le fait
généralement parce qu'il a un projet déterminé
(acheter une voiture, construire une maison, fructifier ses activités,
etc....) Par là donc il n'a pas donc quant au contrat bancaire une
idée précise qui lui permettra de réaliser ses projets. Il
revient donc au banquier d'analyser les besoins de son client puis de lui
indiquer la voie à suivre. C'est la fonction même du banquier.
Alors il apparaît avec certitude quant on décrit de la
façon suivante que la relation entre la banque et son client implique un
conseil d'où l'obligation de conseil du banquier à l'égard
de son client.
D'ailleurs même la pratique bancaire révèle
aussi que les banques interrogent leurs clients sur leurs habitudes, projets,
avenir, etc....dans le but de mieux les connaître mais aussi
d'évaluer leurs besoins et surtout mieux les conseiller. C'est donc dans
l'essence même de sa profession que le banquier est appelé
à conseiller d'où le rattachement de l'obligation de conseil
à la profession bancaire.
De même si l'on prend acte de certaines
constatations, on s'aperçoit que l'établissement de
crédit, la banque en tant que professionnelle, doit exercer une
activité de conseil non seulement dans un but lucratif mais aussi dans
le but d'être utile à la société. Dès lors le
fait de ne pas concevoir qu'elle soit investie d'une obligation de conseil
relève de l'utopie. Par conséquent, estimant que le banquier
n'est pas tenu à une obligation de conseil liée à
l'exercice de sa fonction, cela reviendra à dire que la banque sera la
seule détentrice de ce savoir et qu'elle n'aura en aucun cas à le
transmettre, que lorsqu'il s'agit des cas où un contrat le
prévoira à moins que le conseil soit
rémunéré. De ce fait le client ou le consommateur ne
pourra requérir les renseignements utiles ni les outils de ce savoir
nulle part ailleurs. En vérité, la banque n'exerce pas une
activité purement lucrative mais est investie par la loi d'une
véritable mission d'intérêt social et qui dit social dit
dialogue, ce qui induit d'une part que la banque doive transmettre ses
connaissances du milieu mais aussi qu'il doive le faire au
bénéfice de l'ensemble de la société, de ses
clients. Dès lors l'existence d'une obligation de conseil liée
à la profession bancaire semble évidente.
Cependant si cette position est retenue l'obligation de conseil
du banquier se limiterait aux activités sujettes telles que le
crédit, les moyens de paiements, réception des fonds du public
etc....
Dès lors, en ce qui concerne les opérations
annexes, la banque ne serait tenue qu'envers son cocontractant à une
obligation de conseil. Quelles sont alors les réponses de la
jurisprudence sur cette hypothèse ?
§2 : Une hypothèse rejetée par la
jurisprudence
Des arrêts peuvent laisser penser que la Cour de
Cassation n'exclut pas de rattacher l'obligation de conseil à l'exercice
de la profession.
En espèce un arrêt en date du 27 janvier
20019 sera particulièrement remarquable. Concernant cette
affaire, le client d'une banque avait ouvert sur les conseils de la caisse
d'épargne deux plans épargnes et un plan action pour y placer une
somme de 100000 ff.
Le client a mis en cause la responsabilité de la caisse,
lui reprochant un manquement à son obligation de conseil du seul fait
que le rendement de ces placements était insuffisant.
La chambre commerciale rejette la demande du client. En effet le
rejet se justifie selon elle du seul fait que la caisse avait justement
exécuté son
..................................
9 Cass.civ- 1ere, 22 fevr. 1984, jur.
p.386, note Groutel (H.) et Berr (CI.-J).
obligation de conseil. Dès lors il y a de façon
latente ou cachée la reconnaissance de l'obligation de conseil
allégué par le client.
Dans cette affaire alors, l'obligation de conseil portait sur la
nature des comptes à ouvrir et non pas sur les comptes qui ont
été déjà ouverts. On est en fait bien de l'exemple
où il y a renonciation pure et simple au contrat. Si en l'espèce
le client avait renoncé au contrat, l'obligation de conseil telle
qu'elle est entendue ici aurait tout de même existé.
Dès lors, cette obligation n'était pas
contractuelle. Ce qui était reproché en l'espèce, c'est
d'avoir failli à une mission de conseil qui n'était pas
contractuelle mais professionnelle. L'obligation de conseil en l'espèce
n'était pas due au contractant mais au client, c'est-à-dire
à celui qui a confiance à son banquier, qui attend de lui tout
l'aide nécessaire pour protéger aux mieux ses
intérêts.
De même, la jurisprudence de plus en plus favorable
aux cautions peut être rattachée à l'obligation de conseil.
Pour l'auteur de « l'obligation de conseil de
l'établissement de crédit à l'égard de l'emprunteur
et de sa caution » Mr Legeais, cela ne fait aucun doute
même si cette reconnaissance est implicite. Ainsi on relèvera avec
lui un arrêt de la Cour d'Appel de Paris en date du 30 mai
199710 qui est venus sanctionner le silence du banquier sur la
situation lourdement endetté du débiteur sur le fondement de
l'obligation de conseil de ce dernier. Dans un même ordre
d'idée ; la banque est fautive lorsqu'elle sollicite un
cautionnement disproportionné aux ressources du débiteur. En
effet pour toujours l'auteur Legeais, le principe de proportionnalité
est lui-même la conséquence de l'obligation de conseil. Cette
idée même si elle est partagée par d'autres
auteurs11, elle peut être parfaitement justifiable si toute
fois on fait un parallélisme avec l'obligation de conseil à
l'égard de l'emprunteur. D'après l'arrêt du 27 juin 1995,
le banquier manque à son obligation de conseil « en
particulier lorsqu'il apparaît à ce professionnel que les charges
du prêt sont excessives par rapport à la modicité des
ressources du consommateur », c'est dire à partir de là
que le banquier manifeste une méconnaissance du principe de la
proportionnalité. Alors le principe de proportionnalité est donc
un corollaire ou la conséquence immédiate de l'obligation de
conseil. De ce fait il n'y a pas de doute que le banquier est tenu envers les
cautions d'une obligation de conseil. Pourtant vu l'article 3 de l'Acte
Uniforme portant Organisation des
Sûretés : « le cautionnement est un contrat
par lequel la caution s'engage, envers le créancier qui accepte,
à exécuter l'obligation du débiteur si celui-ci n'y
satisfait pas lui-même », le cautionnement n'engage alors que
la caution. De ce fait, il va sembler critique
..................................
10 Paris, 30 mai 1997, Juris-data no 021367
in Legeais (D.), L'obligation de conseil de l'établissement de
crédit à l'égard l'emprunteur et de sa caution,
Mélanges AEDBF, 1999, p.257
11 Piedelièvre (S.), Le cautionnement excessif,
Rép. Defresnois, 1998, art. 36836, p. 849 et spécialement
no 14.
de rattacher cette obligation de conseil au contrat qui lie la
caution au créancier. Au contraire cette jurisprudence semble faciliter
l'acceptation d'une obligation de conseil inhérente à l'exercice
de la profession de banque.
Enfin, par un arrêt en date du 7 avril
199212, la Cour de Cassation a condamné une banque pour
manquement à son obligation de conseil, alors même que celle-ci
n'avait joué qu'un rôle d'intermédiaire dans
l'opération et qu'elle n'était pas liée par aucun contrat
à la société créancière de conseil. On
constate que dans cette affaire, la banque est tenue d'une obligation de
conseil envers non pas un contractant ni même un client, mais un
tiers.
L'espèce était très particulière,
elle a été démentie par d'autres décisions.
C'est ainsi que dans un arrêt en date du 4 octobre
199413, on constate que le demandeur n'avait pas sollicité
les conseils de l'établissement de crédit pour rejeter
l'existence d'une obligation de conseil. En d'autre terme un arrêt en
date du 18 mai 199914 vient retenir que le banquier n'était
intervenu que comme intermédiaire et non pas comme conseil en la
matière. Dès lors il n'était pas tenu de conseiller le
demandeur sur l'opération envisagée. Enfin, un autre arrêt
daté du 3 mai 200015 retient que la banque n'avait pas
été « mandater aux fins d'expertiser le montage
financier » et qu'elle n'avait pas alors à conseiller en la
matière.
De nombreuses affaires ont pu nous montrer que le
cocontractant n'est pas le seul créancier de l'obligation de conseil.
Mais elles sont contredites par d'autres décisions. En
réalité, ces arguments semblent malgré tout pas
décisifs et par conséquent sont bien maigres. A titre d'exemple
on peut souligner les arrêts rendus par la chambre commerciale, qui
reconnaissent eux aussi une obligation de conseil à la charge du
banquier visant l'article 7 du Code des obligations civiles et commerciales.
En effet il apparaît difficile de dire, à
partir des seules décisions que nous avons cités, que la Cour de
cassation reconnaît tout sujet de droit, ou même le
client « hors client », créancier d'une
obligation de conseil. De même il nous est impossible de dire qu'il
existe un courant jurisprudentiel en faveur d'une telle analyse.
Mais en tout état de cause le rattachement de l'obligation
de conseil au contrat va nous permettre certes de fixer l'étendue de
l'obligation de conseil.
..................................
12 Cass.com., 7 avr. 1992, pourvoi no
90-14955.
13 Cass.com, 4 oct. 1994, pourvoi no
91-14143.
14 Cass.com., 18 mai 1999, pourvoi no
96-14742.
15 Cass.com., 3 mai 2000, pourvoi no
97-11209.
Chapitre ÉÉ : L'étendue de
l'obligation de conseil du banquier
L'obligation de conseil considérée comme
contractuelle, cela signifie que seul le cocontractant peut se prévaloir
de l'obligation de conseil. Mais tout le problème serait de savoir si
tous les contractants pourraient se prévaloir de l'obligation de
conseil. Cet avantage ou ce privilège n'est-il pas réservé
au seul contractant qui souffre d'un déséquilibre par rapport au
banquier ? Cette situation pose alors la question de l'étendue de
l'obligation de conseil du banquier quant aux contractants (Section ²).
D'autre part on peut s'interroger sur les contrats auxquels est attachée
l'obligation de conseil. Ca sera alors la question de l'étendue de
l'obligation de conseil quant domaine d'application (Section ²²)
Section É : L'étendue de
l'obligation de conseil du banquier quant aux contractants
Nous pouvons donc dire que c'est la justice naturelle ou
l'équité qui justifie l'existence d'une obligation de conseil
à la charge du banquier envers son client. Cette dernière
c'est-à-dire l'obligation de conseil trouve sa raison d'être dans
le constat d'un déséquilibre entre le banquier et son client, son
cocontractant. Ce déséquilibre est considéré comme
technique dans la mesure où le banquier est un professionnel qui
maîtrise la connaissance des opérations bancaires alors que le
client non professionnel ne maîtrise, ni comprend l'activité
bancaire. Ainsi donc pour rétablir une égalité de fait
entre le banquier et son client, la Cour de Cassation fait appel à
l'obligation de conseil.
La banque alors par le biais du conseil sera amenée
à partager son savoir et son expérience avec le client. A ce
stade, par une considération du déséquilibre entre le
banquier et son client, on dira que le créancier de l'obligation de
conseil est un profane
§1 : Le créancier de l'obligation de
conseil : Le profane
Le profane est créancier de l'obligation de conseil.
A cet effet posons la question de savoir quelle est la définition du mot
profane ?
De par son origine le mot profane signifie celui qui est
étranger à la religion.
Aujourd'hui, les dictionnaires nous indiquent que le profane est
« la personne étrangère à une association
à un groupement etc...., personne qui ignore les usages, les
règles d'une activité ».16 Cependant
l'idée commune à toutes ces définitions est le
caractère étranger du profane, son ignorance. Il conviendra alors
de faire une remarque qui va nous permettre d'éclaircir notre analyse
plus tard. Certes le profane est un ignorant mais cette ignorance est surtout
due à son extériorité, son étrangeté par
rapport au groupe ou à l'activité considérée.
Mais de par un constat fait entre le
déséquilibre des connaissances entre le banquier et son client et
la définition linguistique du profane, quelle peut être la
définition juridique cette fois ci du profane ? En ce sens le
client est- il profane du moment où il y a un déséquilibre
des connaissances entre lui et le banquier ou bien nécessite-t-il que ce
déséquilibre soit d'une certaine grandeur ?
Même si la notion de profane n'est pas propre à
l'activité bancaire, il faut reconnaître que cette notion est
d'autant utilisée par la jurisprudence pour désigner le
cocontractant qui souffre d'un déséquilibre envers l'autre
cocontractant autrement dit le professionnel banquier.
..................................
16 Le petit Larousse illustré éd. 2001,
p.827.
En effet si l'on met l'accent sur le fait que le banquier est
celui qui a le plus parfaite maîtrise de son activité. Dès
lors, tout cocontractant non banquier sera dans une situation de
déséquilibre et pourra être qualifié de profane
quelque soit sa profession.
Le client est alors profane du point de vue juridique du moment
où il y a déséquilibre des connaissances. Il faut
cependant affecter le déséquilibre de connaissance d'un certain
degré. Mais cela ne doit pas se faire à ce que le
déséquilibre soit trop élevé, sinon seul le parfait
ignorant ou l'analphabète pourrait être qualifié de
profane.
En d'autres termes même si devant des
difficultés, jurisprudences et doctrine se sont attelées à
la tache. La jurisprudence ne donne pas la définition unitaire du
profane. Elle se contente de déterminer si le cocontractant est profane
ou non. Mais au travers des espèces, un certain comportement et donc une
définition peut être dégagée. Elle la
été par la doctrine, selon elle, le profane est celui qui est
« inexpérimenté face à un cocontractant agissant
dans sa sphère d'activité habituelle »17,
celui qui ne sait pas face à celui qui sait autrement dit l'ignorant
face au sachant, le non sachant face au connaisseur.
Le profane est ainsi donc celui qui participe à des titres
divers qu'il ignore. C'est un ignorant donc comme dans la définition
usuelle.
Cette ignorance est aussi appréciée du point
de vue de la technique bancaire. C'est la technique que le profane ignore, la
technique afférente à l'activité bancaire. Ce n'est pas
alors l'ignorant au sens propre mais l'ignorance face à la technique
bancaire.
§2 : Le débiteur du droit de conseil :
Le banquier
Le banquier est le seul débiteur de l'obligation de
conseil.
A cet effet l'établissement de crédit, la banque
est débitrice de l'obligation de conseil en tant que contractant mais
aussi en tant que professionnel.
Depuis un certain temps, l'établissement de crédit
en l'occurrence la banque est obligatoirement une personne morale. En ce sens
le contrat bancaire est passé entre la banque et le client. Mais, en
réalité le contrat sera passé entre le client et le
préposé de la banque. Celui- ci doit être habilité
à passer des contrats pour le compte de l'établissement de
crédit, la banque. Mais, on se demandera comment le client peut-il
savoir que tel préposé est habilité et que tel autre ne
l'est pas ? Un certain danger va se manifester alors pour le client.
De même certains affirment que la théorie de
l'apparence peut s'appliquer. Selon cette dernière, lorsqu'une personne
avait toutes les apparences du titulaire de certains droits, la
sécurité juridique impose qu'on protège les tiers qui ont
traité avec elle. De ce fait, le contrat passé avec le mandataire
apparent
..................................
17 Perron (X.), L'obligation de conseil, thèse
Rennes, 1992, no 33.
produira ses effets à deux conditions. Il faut au
préalable que le client soit de bonne foi. D'autre part, l'apparence
doit être suffisante, autrement dit le client doit pouvoir
légitimement croire que le préposé avait le pouvoir de
contracter au non et pour le compte de la banque. Si l'apparence est
constatée, le contrat reste valable.
Le pseudo mandant est lié par cet engagement comme s'il
avait réellement contracté avec le client. Le client contractant
pourra alors se prévaloir du manquement de l'obligation de conseil
contre le pseudo mandant. C'est donc le préposé de la banque qui
exécutera dans pratique, l'obligation de conseil. De par là on
peut faire une remarque à ce propos. L'obligation de conseil deviendra
alors institutionnelle et devra participer réellement à la
mission du banquier et à sa profession. Toute fois cela ne nous interdit
pas d'étudier la qualité du débiteur de l'obligation de
conseil dans la mesure ou ce dernier est considéré comme un
professionnel.
La répétition étant
pédagogique, on dira que l'obligation de conseil trouve sa raison
d'être dans le constat d'un déséquilibre entre banquier et
son client, son cocontractant. Ce déséquilibre met alors en
concurrence un profane à un professionnel c'est-à-dire le
banquier face à son client.
Alors de par une définition classique, une personne morale
qui exerce à titre de profession habituelle des opérations de
banque est un établissement de crédit. Le banquier est donc un
professionnel des opérations de banque. Il est alors tenu à une
obligation de conseil en tant que banquier tout court mais également en
tant qu'intermédiaire. D'abord, en matière d'opérations
boursières, la banque en tant qu'intermédiaire boursier est
tenue d'une obligation de conseil depuis l'arrêt Buon en date du 5
novembre 199118. L'intermédiaire en bourse est celui qui
prend place dans le cheminement de l'ordre de bourse.
En effet le banquier est un professionnel tenu de conseiller ses
clients du moment où il pourrait être considéré
comme un professionnel des affaires. De ce fait il a l'obligation de conseiller
ses clients sur les principales difficultés de ces activités en
général. Cette remarque du banquier professionnel est très
juste pour diverses raisons.
D'abord, le professionnel des affaires est présumé
connaisseur en matière bancaire. Dès lors il est logique que le
banquier soit présumé professionnel des affaires.
Affichant alors une compétence générale, le
banquier est donc censé pouvoir conseiller son client en
procédant à des investigations mais aussi à des sondages
pour savoir quels sont les objectifs de ses clients pour les proposer les
solutions les mieux adaptées
En conclusion, nous pouvons dire que le banquier
professionnel des affaires est tenu à ce titre de conseiller le client.
Le considérer comme un
..................................
18 Cass.com. 5 nov 1991, op.cit.
professionnel des affaires, c'est augmenter l'étendue de
l'obligation de conseil puisque le banquier ne pourra pas prétexter de
son ignorance.
Si l'étendue de l'obligation de conseil varie en fonction
des connaissances qu'on attribue au banquier et de façon plus
générale, l'obligation de conseil n'acquière une
importance véritable que s'il ne s'est pas limité à
quelques prestations de services. De là donc l'importance du domaine
d'application de l'obligation de conseil.
Section ÉÉ : L'étendue de
l'obligation de conseil du banquier quant au domaine
d'application
Comme nous l'avions dit précédemment,
l'obligation de conseil est une création prétorienne. De ce fait
l'interrogation sur son domaine d'application va se poser avec une grande
perspicacité et par la même occasion, les tribunaux et même
la Cour de cassation, ne peuvent en tracer les contours qu'au gré des
espèces.
L'interrogation sur son domaine d'application va dès
lors provoquer quelques difficultés. Elle soulève d'autant plus
de difficultés que la Cour de cassation sanctionne rarement le banquier
sur le terrain de l'obligation de conseil. Cela n'est-elle pas une
manière de restreindre le domaine d'application de l'obligation de
conseil ? Mais si certains auteurs le croient, cette croyance est
renforcée du seul fait que l'obligation de conseil a des terrains
d'élection : l'octroi de crédit, les instruments de paiement
etc....Cela va tendre à faire croire que ce sont les seuls contrats
bancaires où l'on puisse trouver une obligation de conseil et pourtant,
il ne nous semble pas que ce soit le cas
De par là donc il sera important de
déterminer le domaine d'application de l'obligation de conseil
(§I). Une fois cette étude faite, il sera intéressant
d'examiner les applications (§II).
§1 : La détermination du domaine
d'application de l'obligation de conseil
Partons du critère où il pourrait exister
d'un risque dans le contrat bancaire et par la même occasion
considérons encore que l'obligation de conseil résulte d'un
déséquilibre entre le banquier et son client. Dans ce cas le
banquier doit conseiller son client profane pour éviter que le risque
inhérent à l'opération bancaire ne se réalise
à son préjudice. Dès lors on pourrait limiter l'obligation
de conseil aux seules opérations bancaires renfermant un risque. Ainsi,
certaines opérations ne sont risquées que dans la mesure
où elles sont le fait de l'homme et par conséquent le risque
n'existe pas. Dés lors seuls les opérations les plus
risquées feraient l'objet d'une obligation de conseil, les autres
non.
Cependant cette solution parait injuste. En effet comment
apprécier les opérations risquées de celles qui ne le sont
pas ? L'appréciation est différente selon les clients. Une
opération risquée pour l'un pourrait ne pas l'être
forcement pour l'autre.
Il nous faudra alors dans ce cas chercher la clé de
la détermination du domaine d'application de l'obligation de conseil
à travers son fondement.
L'obligation de conseil est de nature contractuelle, elle
est donc attachée à une prestation de service. C'est l'article
103 du Code des obligations civiles et commerciales qui justifie l'obligation
de conseil. Il dispose : « En l'absence de volonté
exprimé, le contrat oblige à toutes les suites que la loi, les
usages, la bonne foi ou l'équité donnent à l'obligation
d'après sa nature ». Cette règle vise alors toutes les
conventions et ne distinguent pas suivant les contrats. Dès lors, il
parait bien que tous les contrats bancaires, sans distinction, sont
susceptibles de produire une obligation de conseil.
Par exemple, la Cour fait supporter aux banquiers dans l'octroi
de crédit, une obligation de conseil. C'est la même chose en ce
qui concerne les opérations annexes.
De même la Cour de cassation dans un arrêt en
date du 5 février 199119 vient reconnaître de
manière expresse que l'obligation de conseil existe alors même que
l'opération en cause n'est ni anormale ni exceptionnelle. Ainsi elle
admet implicitement que l'obligation de conseil a une portée
générale. Se soulève alors une difficulté en ce qui
concerne les contrats de conseils conclus entre le banquier et son client. A
titre d'exemple les contrats de conseil en gestion du patrimoine. Si le contrat
a pour but d'imposer le banquier une obligation de conseil, alors ce serait
inconcevable qu'une obligation de conseil accessoire puisse exister. En effet
l'obligation de conseil principale va résulter de la volonté des
cocontractants alors même que l'obligation de conseil accessoire
résulte de l'équité comme nous l'indique l'article 103 du
Code des obligations civiles et commerciales.
Dès lors pour conclure on dira que le domaine
d'application de l'obligation de conseil est aussi vaste que l'activité
bancaire elle-même. Dans la mesure où les banques ont tendance
à diversifier leurs activités, il ne faut pas s'en
étonner. De ce fait, imposer un cadre à l'obligation de conseil,
ce serait une sorte de renonciation à la protection des nouvelles
opérations proposées, ce qui n'est pas dans la logique même
de l'obligation de conseil.
Maintenant que le principe de solution qui gouverne le
domaine d'application de l'obligation de conseil est étudié, il
nous faut par la même occasion étudier la mise en oeuvre de ce
principe autrement dit étudier les applications de l'obligation de
conseil.
§2 : Les application du droit de conseil
Les banques peuvent effectuer toutes les opérations
de banque à s'avoir des dépôts, accorder des crédits
aux particuliers et aux entreprises. Mettre en place des moyens de paiement
(guichets, chèques, carte électronique...). Faire des
opérations de change (échanger des monnaies de zones
monétaires différentes). Faire des placements bancaires (de
banque à banque ou sur les marchés monétaires et
financiers). Conseiller ses clients en matière de placements et de
gestion de leur entreprise. Parmi les opérations de banque on
trouve ainsi, un terrain d'élection de l'obligation de
conseil : l'octroi de crédit
..................................
19 Cass.com., 5 fevr 1991, pourvoi no
89-15857.
par exemple. A cet effet un arrêt en date du 8 juin
199420, est venu pour la
première fois, suggérer l'idée selon
laquelle le banquier devait prévenir son client si le crédit est
trop coûteux compte tenu de ses moyens, en résumé si le
client va à sa perte en s'engageant dans le crédit. Cependant
dans cette affaire, la faute du banquier ne résulte pas d'un manquement
à l'obligation de conseil mais de sa légèreté
blâmable. Cet arrêt est pourtant précurseur de la position
future de la Cour de cassation dans la mesure où la
légèreté blâmable qui est sanctionnée n'est
rien d'autre que l'obligation de conseil.
Ensuite dans un autre arrêt en date du 27 juin
199521, la Cour de cassation vient reconnaître une obligation
de conseil dans l'octroi de crédit. Depuis, cette position de principe
n'a cessé d'être réaffirmé, par exemple c'est le cas
de l'arrêt du 4 juillet199522. Certes, les reconnaissances
sont rares. Cependant, elles n'ont trait qu'à l'appréciation de
la qualité de profane du créancier de l'obligation de conseil et
non pas à la remise en cause de l'obligation de conseil.
L'obligation de conseil en matière d'octroi de
crédit n'est donc pas un mirage mais est voué à une belle
existence. Le banquier est donc tenu de conseiller son client profane en
matière d'octroi de crédit et ce quelle que soit
l'opération de crédit envisagée. Ainsi ce n'est pas le
crédit de consommation à lui seul qui est visé mais aussi
toutes les opérations de crédit puisque l'obligation de conseil
est générale. Ainsi par exemple, il existe des décisions
qui reconnaissent une obligation de conseil en matière de
découvert de compte courant23.
L'octroi de crédit comme nous l'avions vu est une
opération de banque parmi les autres. L'obligation de conseil conserve
également sa place dans ces dernières.
Exemple, l'obligation de conseil de la banque existe dans
les opérations relatives aux moyens de paiement. C'est le cas en
matière de chèque. La Cour de cassation a reconnu une obligation
de conseil du banquier dans un arrêt du 7 mars 199524. Dans
cette affaire, une cliente avait déposé des chèques en vue
de leur encaissement sur un établissement X. L'établissement
tiré les a retournés car il manquait des indications
imposées par la loi du pays où se trouve l'établissement
X. La cliente invoque l'obligation de conseil de la banque pour engager sa
responsabilité. La Cour de cassation rejette alors la demande de la
cliente aux motifs qu'elle n'avait pas invoquée cette prétention
devant la Cour d'appel et en déduit que la Cour d'appel n'avait pas
à
..................................
20 Cass.civ.1ere, 8 juin 1994, Bull. civ., I, no
206; J.C.P, éd. E.1995, II, 652, note Legeais (D.); RD bancaire et
bourse, 1994, no 44, p.173, obs-crédot (F.) et Gérard
(Y.)
21Cass.civ. 1ere 27 juin 1995, Bull.civ.
no 287 ; J.C.P, éd .E, II, 652, note Legeais (D);
R.T.D.Civ., 1996, p.385.
22 Cass.civ 1ere 4 juillet 1995, Revue
Droit bancaire et de la bourse, 1996, p.52.
23 Cass.com, 19 oct.1999, Revue Droit bancaire et
financier 2000, no102, p. 163.
24 Cass.com., 7 mars 1995, pourvoi no
93-12120.
rechercher si la banque de la cliente n'avait pas omis d'inviter
sa cliente à compléter les effets. Elle admet donc que la
responsabilité de la banque aurait pu être admise sur ce point et
donc reconnaît l'existence d'une obligation de conseil en
l'espèce.
On trouve également des décisions en
matière de carte de paiement.
Ainsi par exemple, en matière de carte de paiement, la
Cour d'appel de Paris a retenu la responsabilité d'une banque pour
manquement à son obligation de conseil dans un jugement en date 12
octobre 199425. Dans cette affaire, un commerçant avait
commis des erreurs en manipulant son terminal de carte bleu.
L'établissement de crédit émetteur est condamné
pour n'avoir pas conseillé le fournisseur sur l'utilisation correcte du
matériel.
Les décisions ne manquent pas. Elles peuvent aussi
concerner les opérations connexes et des opérations non
bancaires. Parmi ces opérations, on trouve la tenue de compte titre.
Le banquier est tenu dans ce domaine depuis l'arrêt Buon en
date du 5 novembre 1991, d'une obligation de conseil envers son client. Cette
obligation de conseil existe quelque soit la relation contractuelle entre le
client et la banque.
Donc on constate qu'il sera difficile de dresser une liste
exhaustive de ses applications compte tenu du domaine large de l'obligation de
conseil.
Dès lors c'est avec intérêt que nous devons
conclure. En effet étudier l'obligation de conseil ne peut être
une mesure utile que si sa mise en oeuvre est en adéquation. C'est ce
que nous allons examiner dans la seconde partie.
..................................
25 T. com. Paris, 12 octobre 1994, Juris-data
no 049235.
Partie ÉÉ : La mise en oeuvre de
l'obligation de conseil du banquier
Nous avons déjà compris que le banquier et
son client sont donc dans une situation où un contrat a
été formé ou est envisagé. Alors le client est un
profane et le banquier un connaisseur, il est de ce fait tenu d'une obligation
de conseil. Le banquier doit prendre ainsi l'initiative de conseiller son
client et non pas attendre son client demande son conseil et ce pour plusieurs
raisons. D'une part cela tiens à la nature même de l'obligation de
conseil qui est le but de notre étude. C'est une obligation accessoire
au contrat qui a été conclu entre les deux parties. Leurs
volontés, comme nous l'avions déjà vu, n'ont pas
porté sur le conseil mais sur la prestation de service. Dès lors,
on en conclut que l'obligation de conseil est d'ordre public. Elle s'impose
donc au banquier, partie la plus forte du contrat qui se trouve être le
débiteur du conseil. D'autre part, le créancier de l'obligation
de conseil est un profane. C'est parce qu'il est ignorant que le banquier doit
le conseiller. De par son incompréhension, son ignorance, on voit
particulièrement mal comment on pourrait exiger de lui qu'il demande le
conseil. Ainsi on a déduit que celui qui sollicite le conseil pressent
au moins les dangers qui le menacent. En conséquence, le plus faible,
celui qui ne comprend même pas que le contrat présente des
difficultés, ne pourrait plus bénéficier de l'obligation
de conseil. On arriverait dans ce cas à une situation extrêmement
paradoxale.
C'est donc le banquier qui doit prendre l'initiative de
mettre en oeuvre l'obligation de conseil. Ça sera alors le moment de
l'exécution de l'obligation de conseil (chapitre I). S'il prend cette
initiative et garde le silence, il manquera à son obligation de conseil
et commettra une faute. C'est alors le moment de la sanction de l'obligation de
conseil (chapitre II).
Chapitre É : L'exécution de
l'obligation de conseil du banquier
L a formulation du conseil peut indifféremment
être effectuée sous la forme orale ou écrite, étant
précisé que la forme écrite gagne cependant du terrain sur
le plan probatoire. Notons toutefois que la pratique bancaire est orale :
le conseil sera donc plus sûrement oral. Cependant, comme nous l'avons
dit, les problèmes liés à la preuve que nous verrons plus
tard, feront préférer la forme écrite.
Le droit contemporain des obligations est marqué par
une profonde évolution jurisprudentielle tendant à accorder
à l'obligation de conseil un rôle considérable. Mais notons
toute fois que l'appréciation du conseil pose quant à elle,
l'incontournable question de l'objet de l'obligation de conseil. Même si
la question parait simple, on a toujours loisir de répondre que l'objet
de l'obligation de conseil, c'est le conseil. Mais a-t-on alors vraiment
répondu à la question ? Le conseil est une notion complexe
dans la mesure où il n'existe pas, à notre connaissance du moins
de définition du conseil en jurisprudence. La Cour de cassation ne nous
donne que des fragments, des indices. Il est revenu à la doctrine de le
définir. Cependant du fait du nombre d'application qui sont faite de
l'obligation de conseil, il apparaît difficile de conclure une
interprétation générale. Malgré tout, la doctrine
s'y est essayée.
Il nous faut donc définir l'objet de l'obligation de
conseil, c'est-à-dire le conseil. Puis nous tracerons les limites du
conseil du banquier.
Section É : La détermination de
l'obligation de conseil du banquier
Pour tenter de définir le conseil du banquier, il
faut s'interroger notamment sur deux questions.
D'abord, dans le conseil du banquier, il y a le terme conseil.
Alors qu'est ce qu'un conseil. A première vue la question se
révèle facile. Le Larousse nous propose une définition
simple. Le conseil c'est alors « une opinion exprimée pour
engager à faire ou à ne pas faire ». Par contre si
cette définition est claire, elle aura oublié de prendre en
compte les formes de l'expression humaine ainsi que la diversité des
situations. De ce fait on pourrait s'interroger sur les recommandations et les
avertissements, s'ils sont ou non des conseils. Il convient donc d'analyser la
notion de conseil (§I). C'est après que nous allons nous pencher
sur le contenu du conseil du banquier (§II).
§1 : La notion de conseil
Le conseil se justifie de trois manières. L'un est
d'ordre conceptuel : le conseil des établissements de crédit
se distingue de l'information tant par son contenu que par ses modalités
d'exécution. Il ne peut être rempli par la simple exécution
de l'information. En effet cette dernière ne suffit pas à
optimiser le choix du client. Cependant le conseil des banques se distingue peu
de la mise en garde. Celle-ci serait l'une des composantes du conseil. Elle
constitue la forme juridique du conseil.
Au plan contractuel le conseil du banquier serait la
révélation d'une volonté jurisprudentielle de créer
une sorte d'ordre public de protection en faveur de la partie faible au contrat
c'est-à-dire le client. C'est une règle établie et qui se
généralise en droit commun des contrats. En effet, la
complexité et la multiplication des opérations bancaires
réduisent l'efficacité de l'information à protéger
le consentement de la banque. La simple fourniture d'une information ne suffit
pas à protéger le consentement du client profane,
inexpérimenté car celle-ci est difficilement utilisable pour lui.
Il ne peut voir les implications ni même en comprendre la portée.
La lucidité du consentement de l'établissement de crédit
demande donc en plus une interprétation de l'information et cela passe
par le conseil.
Au plan extra extracontractuel, le conseil répond
à une nécessité économique et professionnelle. Il
est aussi un instrument de sécurisation du secteur bancaire et de la
fidélisation de la clientèle. Il trouve de plus un
élément de justification dans la compétence du banquier en
tant que professionnel de banque et la confiance qu'elle engendre chez le
créancier du conseil, le client. Celui-ci jouit en effet d'un statut
légal strictement réglementé et d'un monopole
d'exercice.
Outre la confiance qu'inspire le statut du banquier,
celui-ci est tenu aux devoirs professionnels relatifs à l'exercice de sa
profession et qui exige dans une certaine mesure, pour être
respectés, de prodiguer conseil. Ainsi, le conseil se voit-il comme le
complément des devoirs de transparence et de la diligence qui s'imposent
aux banquiers et l'une des composantes du devoir de prudence.
En effet le contrat entre la banque et le client engendre une
obligation de conseil à la charge du banquier. D'une création
jurisprudentielle le conseil se déclenche dès l'entré en
relation avec le client et perdure tout au long de l'exécution du
contrat. Dans la phase précontractuelle, elle peut porter aussi bien sur
un conseil positif que sur une mise en garde contre les risques
inhérents aux opérations bancaires envisagées ou
déjà effectuées. En revanche une fois le contrat conclu le
conseil se limite à une simple mise en garde. Lourd dans son contenu, ce
conseil n'est toutefois pas absolu. La jurisprudence a en effet bien
veillé à ce que le conseil ne dépasse pas l'objet du
contrat liant le banquier à son client. Elle l'a en plus limité
aux opérations réalisées sur le secteur bancaire.
Outre les types de contrat de service conclus entre le banquier
et son client, l'étendu du conseil du banquier varie en fonction de la
qualité des cocontractants, sujet de l'obligation. Le client constitue
la colonne vertébrale de l'obligation de conseil en sa qualité de
bénéficiaire de la protection assurée par cette
obligation. Fondé sur la disparité entre la banque et son client,
le conseil n'est cependant du à ce dernier que lorsqu'il est profane,
autrement dit ignorant des techniques bancaires auxquelles il participe.
Cependant l'exécution du conseil soumet les parties
contractantes à un ensemble d'exigences. Le banquier est tenu d'utiliser
des moyens adéquats pour parvenir à remplir correctement son
obligation. Pour que le conseil prodigué produise les effets
escomptés, le banquier doit d'abord s'enquérir de la situation et
de l'expérience financière du client ainsi que des objectifs de
son placement et des risques admis par lui. Le client pour sa part doit
collaborer activement avec le banquier. Une fois le conseil
élaboré, le banquier est alors tenu de le transmettre au
client.
§2 : Le contenu du conseil du banquier
Quant aux éléments constitutifs de
l'obligation de conseil du banquier, ils se définissent autour d'un
élément matériel et d'un élément moral.
L'élément matériel de l'obligation de conseil du banquier
est essentiellement un fait pertinent. C'est-à-dire un fait qui se
rapporte à l'objet des services demandés, utile pour le client.
La divulgation de conseil doit de plus être licite, de sorte que
l'exécution de l'obligation de conseil ne porte pas atteinte aux
principes supérieurs tels que le respect du secret professionnel et de
la confidentialité bancaire. Si le conseil remplit les deux conditions,
il doit être prodigué nonobstant l'absence d'une
rémunération spécifique. Quant à
l'élément moral, il consiste, d'une part, en la connaissance par
le banquier de l'importance du conseil pour le client et du contenu du conseil
lui-même. L'ignorance de contenu du conseil est sanctionnée par
une double présomption de connaissance et de compétence pesant
sur le banquier. L'ignorance est donc réputée illégitime
et assimilée à la connaissance. L'élément moral
consiste d'autre part en l'ignorance de l'investisseur du contenu du conseil.
Seul le client profane est créancier d'une obligation de conseil
vis-à-vis du banquier. Sa qualité de profane s'apprécie in
correcto à la lumière de sa profession et de son
expérience en la matière. Lorsque les deux éléments
constitutifs de l'obligation de conseil son réunis, la réticence
est fautive et des sanctions très variées sont encourues.
L'obligation de conseil comprend ainsi deux obligations.
D'une part, une obligation de résultat : transmettre le conseil au
client. D'autre part, une obligation de moyen : le conseil transmis doit
être pertinent de sorte que le client le reçoive et le comprenne.
L'obligation de conseil ne comprend en revanche pas l'obligation que le client
suive le conseil qu'il a reçu et compris.
Cependant l'obligation de conseil apparaît être de
résultat quant à la fourniture matérielle du conseil, il
appartient au débiteur du conseil, le banquier de prouver qu'il l'a
dispensé. Toutefois, l'obligation de conseil ne serait qu'une obligation
de moyens s'agissant de sa portée.
Par une allusion faite au notaire, on pourrait dire que ce
qui est exigé à ce dernier, c'est qu'il fournisse à son
client des informations sur les meilleurs moyens de satisfaire les besoins qui
sont les siens et qu'il l'éclaire sur les conséquences et la
portée de l'opération à réaliser. Mais ces
éléments d'informations demeurent des conseils : c'est au
client, le seul qu'il incombe de décider.
La Cour, dans un arrêt du 27 Octobre 1995, a d'ailleurs
rapporté que « si un notaire est en principe garant de
l'efficacité, notamment juridique, de ses actes, il est cependant tenu
d'une obligation de moyen »26.
Cette réserve s'applique aussi à l'obligation
de conseil du banquier. L'obligation de conseil consiste en une obligation de
moyens en ce qui concerne sa pertinence et son étendue. Il ne peut
s'agir d'une obligation de diligence et de prudence, d'une part parce que tout
conseil est aléatoire, d'autre part parce que l'état de droit ou
la situation du client peuvent évoluer. Or, l'alea est le critère
en référence duquel on reconnaît une obligation de
moyens.
..................................
26 CA Rennes 27 Octobre 1995, JCP 1996iv, 1906
Section ÉÉ : Les limites du droit de
conseil du banquier
Dans son expression la plus simple, le conseil est une mise
en garde. Il peut être aussi positif. C'est le fait donc d'indiquer
à une personne la voie à suivre. Alors le conseil peut-il aller
jusqu'au refus de contracter ? Devant les risques engendrés par
l'opération, le banquier doit-il refuser de contracter ou d'obéir
aux ordres du client ?
Le refus de consentir ou d'exécuter l'opération
est-il la phase ultime de l'obligation de conseil ? A notre avis nous ne
le croyons pas. Au contraire il nous semble que le refus de contracter marque
la limite de l'obligation de conseil. D'autre part, comme nous l'avons
déjà remarqué, le conseil contient nécessairement
une information. Dès lors, on pense automatiquement au secret bancaire
lorsqu'on parle d'information délivrée par le banquier. Le
conseil connaît donc deux obstacles ou limites. Une limite tirée
du refus du banquier de contracter et une autre, tirée de l'information
délivrée par le banquier.
§1 : Le refus de contracter ou d'exécuter les
ordres du client
Il est à noter que le problème relatif au
refus de contracter a le plus souvent existé en ce qui concerne l'octroi
de crédit. Il nous semble cependant qu'il peut être important de
l'étudier sous l'angle d'une obligation de conseil
générale pour des raisons diverses. D'abord nous n'avons eu le
constat d'aucune différence au contenu du conseil en matière
d'octroi de crédit, il peut néanmoins se révéler
dans les autres domaines également. De ce point de vue, leur
étude pourra aider à apporter de la lumière à cette
difficulté.
Diverse auteurs font assimiler, particulièrement en
matière d'octroi de crédit, l'obligation de conseil et le refus
de contracter. Pour les uns, il n y aurait pas d'obligation de conseil en
matière d'octroi de crédit mais seulement une obligation de ne
pas consentir un emprunt risqué pour le client. Parmi ces auteurs on
pourrait en citer Gourio27 et Legeais28.
Par une consécration de l'obligation de conseil
à la charge du banquier, la Cour de cassation a ouvert une porte de
réflexion. En revanche on part de la règle selon laquelle, le
banquier est tenu de conseiller le client sur l'opportunité du
crédit lorsque ce dernier est disproportionné, trop important par
rapport aux ressources du débiteur. A partir de là, il n y aura
pas de difficulté pour affirmer que le banquier est alors tenu de
refuser le crédit
..................................
27 Gourio (A.), Le prêteur est-il
réellement tenu d'une obligation de conseil envers le particulier
emprunteur ?
28 Legeais (D.), L'obligation de conseil de
l'établissement de crédit à l'égard de l'emprunteur
et de sa caution, Mélanges AEDBF, 1999 p. 257.
sollicité. En effet, selon ces auteurs, de nombreux
arguments militent en faveur d'une telle analyse. D'abord, on comprend mal voir
inconcevable pourquoi le banquier malgré le risque manifeste du fait que
le crédit ne soit pas remboursé, consentir le crédit.
Cet argument ne peut perdurer. D'autre part, selon Legeais,
l'obligation de conseil perdrait de son efficacité s'il n'était
que conseil et s'il n'imposait pas du même coup au banquier de refuser
l'emprunt. En outre, selon Gourio, cela ne correspond pas à la
réalité du processus de formation du prêt. En effet selon
lui, l'emprunteur « potentiel » va voir son banquier
non pas pour solliciter un conseil mais une décision : celle
d'accorder le crédit ou de ne pas l'accorder. Il ajoute enfin que la
véritable faute que sanctionne la Cour de cassation, c'est l'octroi
excessif de crédit, que le banquier est tenu de refuser le
prêt.
Le raisonnement en fait ici, c'est que le banquier se verra
sanctionner du moment où il octroie un crédit excessif.
Il ne nous semble pas aussi que cette solution puisse
perdurer pendant très longtemps et ce pour plusieurs raisons.
L'obligation de conseil est mise à la charge de la banque dans
l'intérêt de l'emprunteur, le client. C'est par une protection de
l'emprunteur contre le banquier que la Cour de cassation a mis à la
charge du banquier une obligation de conseil. Dès lors, du moment
où le banquier a donné son conseil au client, il est
déchargé de toute responsabilité. Le client sachant alors
les risques qu'il encourt, le banquier est déchargé de sa
responsabilité. S'il n y a pas de jurisprudence où un client,
malgré les mises en garde du banquier s'est malgré tout
engagé dans l'emprunt, il existe cependant de nombreuses jurisprudences
où l'emprunteur connaissait les risques inhérents à
l'opération. Dans ces espèces, la Cour de cassation ne sanctionne
pas le banquier parce que l'emprunteur, le client connaissait le risque
inhérent sans rechercher par ailleurs si l'opération de
crédit était ou non excessif. Dès lors, ce n'est pas un
refus de contracter que la Cour de cassation impose au banquier.
Le conseil, s'il est une incitation ne doit rester qu'une
incitation. Le refus de contracter est donc la première limite
posée au conseil du banquier. Il existe une autre limite, il s'agit du
secret professionnel ou bancaire.
§2 : Le refus d'établir le secret
bancaire
Planiol définit le secret professionnel
comme « l'obligation du secret imposé à un grand
nombre de personne pour les choses qu'elles ont connues dans l'exercice de leur
profession ou fonction »29.
Si le banquier est tenu du secret professionnel, il se trouve
parfois dans une situation embarrassante : est-il obligé de faire
une entorse à son devoir de
..................................
29 Planiol, traité élémentaire de
droit civil, tome 2, no 828
discrétion afin de respecter son obligation de
conseil ?
En effet le banquier qui remplit une mission de conseil
devra nécessairement délivrer une information. En d'autre terme,
celui qui conseille de faire ou de ne pas faire doit expliquer les raisons de
son choix et par la même fournir des informations à son client. Le
conseil inclut donc forcément une information. Or, le banquier, dans
l'exercice de sa profession n'a pas une entière liberté de
parole. Il est au contraire tenu à un devoir de discrétion
autrement dit secret professionnel ou bancaire. De même le banquier est
détenteur d'informations confidentielles sur ces clients voire sur des
tiers.
C'est pourquoi, plus qu'à un simple devoir de
discrétion, des auteurs notent que « tout un courant
doctrinal 30 certains décisions de justice 31, la
pratique bancaire » considéraient que le banquier était
assujetti à un véritable secret professionnel.
Notons que les informations confidentielles sont les informations
précises souvent chiffrées. Sont également des
informations confidentielles, celles qui révèlent du secret des
affaires et celles relatives à l'organisation d'une entreprise, ses
projets d'exécution, d'investissement...
Les informations non confidentielles sont celles d'ordre
général ou public. Ainsi par exemple en est-il d'information sur
la solvabilité d'un client, sur l'existence de chèque
impayé, de protêts, etc....Le banquier, à l'occasion du
conseil, peut délivrer les informations non confidentielles
c'est-à-dire celles qui sont d'ordre général mais doit
passer en silence les informations confidentielles à l'exemple des faits
non publics que le client ou un tiers les a confié.
Donc seules les informations reçues par le banquier en
cette qualité seront garanties par le secret bancaire.
Apparemment, les exceptions au secret professionnel sont
peu nombreuse, cette obligation renforçant la foi du public dans le
système bancaire. Cela sème le doute sur la possibilité
d'un conseil à la charge de ces professionnels, en particulier dans le
domaine des garanties, car l'essentiel de l'obligation de conseil consiste
à transmettre au client des informations qui sont susceptibles
d'être couvertes par le conseil.
Lorsque le banquier formule son conseil, il exécute
son obligation de conseil. Le client est alors libre d'en tenir compte ou non.
S'il est désintéressé, il ne pourra y avoir sanction
à l'encontre du banquier. Alors ça sera le moment ou l'on parlera
de la question de la sanction de l'obligation de conseil.
..................................
30 Ch. Gavalda et J. Stoufflet, Droit bancaire,
précis Dalloz, 5e édition, no 174.
31 CA Pais, 6 Février 1975, 318.
Chapitre ÉÉ : Les sanctions
envisagées à l'absence de l'obligation de conseil du
banquier
La sanction du défaut de conseil est à
rechercher ailleurs.
C'est sur le terrain de la responsabilité contractuelle
qu'il nous faut rebondir. La responsabilité contractuelle est en effet
l'instrument entre les mains du juge pour condamner le banquier. Nous nous
contenterons donc d'étudier, au titre de la sanction de l'obligation de
conseil, le régime de la responsabilité contractuelle. D'une
manière classique, nous l'analyserons en deux temps. Nous verrons
d'abord les conditions de la responsabilité, puis la mise en oeuvre de
la responsabilité contractuelle.
Hormis l'hypothèse dans laquelle le banquier s'est
engagé contractuellement à atteindre un niveau de performance
précis dans le cadre par exemple d'une gestion de portefeuille, il ne
supporte qu'une obligation de moyens, c'est-à-dire l'obligation de se
comporter comme un professionnel normalement digne de la place. Dès lors
c'est au client mécontent ou déçu par les résultats
de la gestion qu'il appartiendra de rapporter la preuve d'une faute,
c'est-à-dire d'une violation d'une obligation.
La responsabilité du banquier sera contractuelle s'il ne
respecte pas une obligation d'origine contractuelle.
D'une manière générale, la
responsabilité civile désigne l'obligation de réparer le
dommage causé à autrui. La responsabilité civile
contractuelle est la variété de responsabilité civile qui
s'applique lorsque le dommage en question a été a
été causée par l'inexécution ou la mauvaise
exécution d'une obligation contractuelle.
La responsabilité du banquier peut être aussi
délictuelle si l'on est en présence d'une violation
imposée par la loi, un décret ou une réglementation
financière ou bancaire.
Le client victime de la violation d'une obligation doit
démontrer l'existence d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de
causalité entre ces deux éléments conformément au
droit commun de la responsabilité.
Nous étudierons d'abord la faute du banquier puis
nous verrons le préjudice subit par le créancier et le lien de
causalité.
Section É : La faute du banquier
C'est comme une inexécution ou une mauvaise
exécution de l'obligation de conseil qu'on va définir la faute
contractuelle du banquier. Sur quoi porte cette inexécution ou cette
mauvaise exécution ?
Disons tout de même que l'inexécution de
l'obligation de conseil ne sera fautive en cas fortuit ou de force majeur. Le
cas fortuit ou la force majeure, dans ce cas, est soumise au droit commun des
contrats. Elle doit être extérieur et imprévisible mais
surtout irrésistible.
De ce fait subsiste alors la question de savoir qu'elle est
la faute du banquier. C'est la question que nous allons traiter ici (§1).
Mais une fois la définition de la faute du banquier traitée, il
nous faut s'interroger sur la question de la preuve de cette faute qui recouvre
un intérêt pratique particulier (§2)
§1 : La définition de la faute du
banquier
Plusieurs réponses peuvent être apporté
au regard de la jurisprudence en la matière.
Si le banquier était tenu d'une obligation de
résultat, la faute sera établie dès lors que le
résultat n'aura pas été atteint.
Par contre si le banquier n'était pas tenu d'une
obligation de résultat mais d'une simple obligation de moyens, il faudra
donc démonter sa violation.
Cette preuve peut être rapportée par tout moyen.
Il peut s'agir :
? d'un manquement à l'obligation d'informer sur les
risques encourus par les opérations initiées par le
client32.
? d'un manquement à l'obligation d'informer sur
l'obligation de constituer une couverture33.
? d'un manquement à l'obligation de
loyauté34.
De même, il y aura faute du banquier lorsque celui-ci
ne donne aucun conseil et garde le silence. C'est l'hypothèse la plus
courante.
A titre d'exemple on peut citer l'arrêt du 27 juin
199535. Dans cette affaire, la première chambre civile
souligne la faute de la banque pour n'avoir pas mis en garde le client
emprunteur sur les risques de l'emprunt et finalement pour avoir gardé
le silence.
..................................
32 Cass. com. 5 novembre1991 BANQUE POPULAIRE DE LOIRE
ATLANTIQUE.
33 Paris 1ere chambre A. 24 septembre 1991
GIORDANO/FINACOR.
34 Cass. com. 27 mai 1997, SA PREGEST/AGENCE
JUDICIAIRE DU TRESOR.
35 Cass. civ 1ere, 27 juin 1995, Bull civ.,
I, no 287; JCP.ed.E., II, 652 note Legeais (D) ; RTD.civ.,. 1996, p
385.
En d'autre terme, la faute du banquier peut subsister lorsque le
banquier a donné un conseil. En effet la responsabilité du
banquier sera admise en premier lieu lorsque le conseil est incomplet. Ainsi,
dans un arrêt daté du 23 février 199336, le
banquier est condamné pour ne pas avoir averti son client des risques
inhérents aux opérations. Le conseil avait un objet très
précis. Le conseil lorsqu'il est incomplet, permet donc de
caractériser une faute du banquier. En second lieu, le banquier sera
fautif lorsque le conseil qu'il donne est inexact, que la solution
proposée par le banquier fait courir trop de risque. A titre d'exemple,
l'arrêt du 12 novembre 199837 sera à cet
égard significatif. Dans cette affaire, la Cour d'appel entre en
condamnation alors que la banque avait bien conseillé son client. Elle
lui avait indiqué de conclure des contrats de change à terme.
Mais cette solution était trop risquée et il existait d'autres
solutions moins risquées. Le conseil inexact est donc une faute de la
banque.
L'absence de conseil, le conseil incomplet ou inexact
entraîne la mise en jeu de la responsabilité de la banque. En
résumé on peut dire que le banquier commet une faute chaque fois
que son comportement n'a pas donné au client l'opportunité
d'éviter les risques liés à l'opération
envisagée.
§2 : La preuve de la faute du banquier
En effet il appartient au client de rapporter la preuve de
l'existence d'une obligation de conseil à la charge du banquier, mais
c'est au banquier débiteur du conseil de rapporter la preuve de
l'exécution de cette obligation. Mais aussi importante que ce soit
l'évolution de la jurisprudence ne saurait au nom de la justice
contractuelle, placer le professionnel banquier dans une situation
d'infériorité par rapport au client. C'est pourquoi le banquier
conserve la faculté de rapporter par tous les moyens, la preuve de
l'exécution de son obligation de conseil. Une fois la preuve de la
transmission du conseil rapportée, le créancier de l'obligation
de conseil, le client peut démontrer alors la faute du banquier dans la
détermination du conseil.
Depuis quelques années, la Cour de cassation a
cerné de toute part les débiteurs de l'obligation de conseil que
ce soit dans le domaine bancaire et
autres. Ainsi concernant la profession médicale dans un
arrêt en date du 25 février 199738, la Cour de
cassation a affirmé que : « celui qui est
légalement ou contractuellement tenu d'une obligation d'information doit
rapporter la preuve de l'exécution de cette obligation » Dans
un autre arrêt rendu le 29
..................................
36 Cass. com., 23 fevr. 1993, Bull.civ,IV,no
68 ;D 1993, Jur, p.424, note Najjar (I.); RJDA. 8-9/93 NO 708.
Rtd-com.1993p.557
37 Montpellier, 12 nov 1998, JCP. ed. E., 2000
panorama rapide, p. 391 : Banque et droit 1999, p28, note De Vauplane
38 Cass. civ. 1ere, 25 fevr. 1997, JCP. ed . G-1997,
I; no 4025, no 07, obs. viney (G) ; Petites
affiches, 16 juillet 1997, p.17
avril 199739 concernant un avocat, la Cour de
cassation a appliquée le principe en précisant à cette
occasion que c'est le débiteur d'une obligation de conseil
qui supporte la charge de la preuve. Un renversement de la charge
de la preuve est à opérer dans cette jurisprudence par rapport
à l'article 9 alinéas 1 du Code des obligations civiles et
commerciales qui prévoit que : « celui qui
réclame l'exécution d'une obligation doit en prouver
l'existence ». Cela s'explique que le demandeur c'est-à-dire
le client dans notre étude devrait alors prouver un fait négatif,
ce qui n'est pas facile. En d'autre terme, le créancier de l'obligation
de conseil, spécialement quand il est professionnel comme le banquier,
est plus à même de prouver qu'il a correctement
exécuté son obligation. Etant donné la
généralité des termes employés à tous les
créanciers de l'obligation de conseil et donc au banquier, cette
jurisprudence semble applicable. Par cette occasion, un arrêt en date du
9 décembre 199740 est venu reconnaître que le
banquier devrait prouver l'exécution de son obligation de conseil en
matière de souscription d'un contrat d'assurance.
Au terme de ces conclusions, on peut affirmer que la faute
du banquier sera caractérisée chaque fois que le banquier n'a pas
adopté une attitude ou n'a pas fait éviter au client les risques
d'une opération. C'est au banquier d'apporter la preuve de
l'exécution de son obligation et donc de son absence de faute. Une fois
la faute du banquier établi, il reste au demandeur pour engager la
responsabilité du banquier, de prouver l'existence d'un préjudice
et d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice.
..................................
39 Cass. civ 1ere, 29 avr. 1997, Bull.
civ., I, no 132.
40 Cass. civ. 1ere, 9 dec. 1997, Bull.
civ., I, no 356.
Section ÉÉ : Le préjudice et
le lien de causalité
Ce sont deux autres conditions classiques de la
responsabilité contractuelle. Ainsi nous analyserons dans un premier
temps le préjudice (§1) puis nous traitons le lien de
causalité dans un second temps.
§1 : Le préjudice
Il ne peut avoir responsabilité civile sans dommage.
C'est une condition sine qua non. Ainsi une faute non dommageable pour autrui
aussi grave soit-elle ne peut être civilement sanctionnée. Donc si
la victime doit toujours rapporter la preuve d'un dommage, il faut savoir que
tout dommage n'est pas réparable.
Ainsi le dommage peut être corporel, matériel
ou moral en droit commun de la responsabilité contractuelle. Pour ce qui
concerne le dommage corporel il n'aura pas en la matière. Par contre la
victime peut dans une certaine mesure demander la réparation d'un
dommage matériel ou moral.
Le dommage matériel est celui dont la
réparation est le plus souvent demandée. Le préjudice
matériel, encore appelé dommage économique s'analyse en
une lésion d'intérêts patrimoniaux appréciable
directement en argent. Il peut s'agir d'une perte subie ou d'un gain
manqué.
La perte subie ou « damnum emergens »
correspond à l'appauvrissement de la victime, dépenses utiles
effectuées par la victime par exemple.
Le gain manqué ou « lacrum cessans »
correspond à l'hypothèse dans laquelle la victime a
été privée d'un enrichissement qu'elle pouvait
raisonnablement espérer. Exemple : une bonne affaire manquée
par le client suite à un défaut de conseil de son banquier.
Le dommage moral est tous les dommages qui ne portent pas
atteinte au patrimoine, qui n'ont pas d'incidences économiques directes
et ne sont pas donc susceptibles d'évaluation pécuniaire. Ce
genre de dommage sera pourtant généralement réparé
par l'allocution d'une somme d'argent.
Pour être réparé le préjudice doit
présenter plusieurs caractères, il doit être certain et
prévisible. Le caractère prévisible du dommage ne pose pas
en la matière beaucoup de difficultés. Il suffit que le banquier
ait en conscience lors de la conclusion du contrat, des conséquences de
sa défaillance. En revanche, le caractère certain du dommage pose
en la matière plus de problèmes. En effet pour être
réparable, un dommage doit être actuel et certain. Il peut frapper
la victime directe ou bien par répercussion d'un premier dommage subit
par une victime directe, c'est le problème du dommage par ricochet.
Un dommage certain c'est un dommage qui n'est pas
hypothétique qui n'est pas éventuel, c'est celui qui est
tellement vraisemblable que le droit le prend en considération. Seul le
préjudice réel peut donner lieu à réparation, qu'il
soit présent ou futur. Si le dommage moral résultant du
défaut de conseil présente à l'évidence ce
caractère certain, il en va différemment pour le préjudice
matériel. En effet, lorsque le banquier n'a pas ou mal conseillé
son client, le dommage peut-il exactement être mesuré à
l'aune des pertes subies par celui-ci ? Du moment où le banquier
conseille le client, il ne fait que l'inciter. Rien ne dit que le client suit
le conseil, de même rien ne dit qu'aucun aléa ne serait venu
compromettre le succès de l'opération. Dès lors, le
préjudice subi par le client n'est pas de façon certaine
étendue à toutes les pertes ou manques à gagner. En ne
recevant pas le conseil auquel il avait droit, le cocontractant a seulement
perdu l'opportunité d'éviter les pertes et de ne pas voir le
risque se réaliser. De ce fait, le préjudice du client ne peut se
mesurer qu'à la perte de chance éprouvée. C'est l'avis
majoritaire de la jurisprudence.
Le préjudice réparable se résume alors
à une perte de chance subie par le client du fait de la
défaillance de la banque. D'ailleurs on trouve de nombreuses
décisions de différentes Cour d'appel qui considèrent que
le préjudice subis par le client est égal aux pertes qu'il a
éprouvé41. Elles décident que le client, s'il
avait reçu le conseil n'aurait pas subi ces pertes. Mais il semblerait
de ce point de vue que ce raisonnement pose des problèmes. Parce que nul
ne saurait prédire ce qui serait arrivé s'il avait
été conseillé. D'ailleurs la Cour de cassation a
corrigé cette jurisprudence dans l'arrêt du 10 décembre
199642. Il estime que le manque de conseil ne peut causer qu'une
perte de chance. Encore faut-il que cette perte de chance soit effectivement
due à la défaillance du banquier pour que le cocontractant
obtienne réparation. C'est la question du lien de causalité.
§2 : Le lien de causalité
L'appréciation du lien de causalité est
délicate.
La victime doit démontrer qu'il existe un lien de
causalité exclusif entre la faute et le préjudice subi.
Les difficultés relatives au lien de causalité
amènent le juge à se contenter d'une probabilité, faute de
preuve absolue. C'est le même cas en matière bancaire. A cet
égard, dans un arrêt en date du 29 avril 199943, la
Cour d'appel déclare que dans cette affaire, deux prêts avaient
été consentis a une société. Alors cette
dernière ne pouvant les rembourser, invoque le manquement de la banque
à son obligation de conseil dans l'octroi de crédit. La Cour
alors par un constat fait de la faute de la banque
décide : « que cette dernière a donc fait
preuve de légèreté dans l'octroi de crédit, ce qui
provoque sa condamnation à l'allocution de dommage et
intérêts ».
..................................
41 Voir par exemple : Versailles, 17 sept 1998,
juris data no 049717 ou Amiens, 21 mai 1996, juris data no
049433.
42 Cass.com. 10 dec. 1996, op.cit.
43 Dijon, 29 avr. 1999, _in Martin (D.-R), De la
causalité dans la responsabilité du préteur, Banque et
droit 1999, no 68, p.3.
Par un aperçu fait du livre « De la
causalité dans la responsabilité civile du
prêteur » de Martin44, nous serons amenés
à concevoir que l'analyse du lien de causalité est ici
artificielle. La Cour n'a fait que constater la faute de la banque et en
déduit une condamnation de la banque sans autre recherche.
Le lien de causalité, une fois prouvé par le
demandeur, permet de déterminer quel sera le préjudice
réparable. Ainsi donc cela suppose que seul le préjudice direct
pourra être réparé. Mais cela n'écarte pas
l'idée de savoir que le préjudice par ricochet peut être
réparé du moment où il présente un lien
nécessaire avec la faute commise. On peut citer à cet
égard deux arrêts de la Cour de cassation. D'une part, dans
l'arrêt du 2 juillet 199745, la Cour de cassation
décide que la faute de la banque dans l'octroi de crédit a
causé le défaut de paiement par l'emprunteur des charges
afférentes au bien immobilier acquis grâce à l'emprunt.
D'autre part, on peut reprendre l'arrêt de la Cour d'appel du 29 avril
199946. Une caution se plaignant du préjudice subi par
ricochet du fait de la faute de la banque dans l'octroi de crédit. La
Cour constate alors la faute de la banque. Puisque les cautions étaient
informées, elle décide que le préjudice causé
était égal à la moitié du prêt et condamne la
banque à payer des dommages et intérêts égaux
à cette part.
Cependant, la faute peut contribuer au préjudice
sans être toujours la cause exclusive. C'est la raison pour laquelle les
tribunaux prononcent parfois un partage de responsabilité.
Fréquemment, le professionnel invoque pour se
défendre, soit des circonstances conjoncturelles, soit la
passivité du client à réception des avis
opérés.
Un arrêt de la Cour de cassation est venu rappeler
que : « le client d'une société de bourse ne
commettais pas la faute en ne réagissant pas aux avis
d'opéré portant sur des montants anormaux dès lors
qu'ayant donné un mandat de gestion à la société,
il n'est pas tenu d'assurer la surveillance de l'évolution de son
compte, sauf s'il reçoit des mises en garde »47.
Plus récemment encore, la Cour de cassation a cassé un
arrêt d'appel qui avait retenu un partage de responsabilité entre
le banquier et le titulaire du compte au motif qu'il recevait
régulièrement des relevés faisant ressortir la nature des
opérations réalisées et aurait pu mettre un terme à
celles-ci en clôturant le compte48.
..................................
44 Martin (D.-R), De la causalité dans la
responsabilité civile du préteur, Banque et droit 1999, no 68,
p.3.
45 Cass.com. 2eme, 2 juillet 1997, Bull.
civ., II, no 212; Petites affiches 1997, no 120, p.9 note
Martin (D.-R)
46 Dijon, 29 avr. 1999, _in Martin (D.-R), De la
causalité dans la responsabilité du préteur, Banque et
droit 1999, no 68, p.3.
47 Cass.com 1ere fevrier1994
48 Cass.com 13 mai 1997
Les cas de figures concernant la responsabilité du
banquier sont extrêmement variés. Il est néanmoins certain
que l'évolution de la jurisprudence tend vers une plus grande
sévérité à son égard.
Conclusion
Tout d'abord dans notre introduction, c'était un
panorama de l'obligation de conseil que nous avions promis de dresser. Alors
puisque toute promesse constitue une dette selon l'adage, donc il est temps que
notre promesse soit exécutée.
L'obligation de conseil n'est pas un instrument
privilégié de la mise en jeu de la responsabilité
bancaire. Nous devons admettre ici que c'est un constat d'échec. En
effet, l'obligation de conseil parait alors vaste en ce qu'elle est
attachée à tous les contrats bancaires. Cependant
l'appréciation stricte de la qualité de profane, l'objet du
conseil restreint aux risques encourus par le client et le rattachement de
l'obligation de conseil au simple devoir de vigilance du banquier en font un
instrument sous contrôle, dépendant des autres obligations du
banquier.
Ainsi nous pouvons affirmer que la consécration puis
le développement de l'obligation de conseil du banquier constitue l'une
des évolutions majeures du droit de la responsabilité bancaire
comme le pense des auteurs49. En effet, et bien que la prudence
s'impose en la matière tant la jurisprudence manque encore de
clarté, on peut dire que le banquier dispensateur de crédit est
tenu, à l'égard de ses clients profanes, à une obligation
de conseil sur les dangers potentielles des opérations
envisagées. Cette obligation parait, en outre, quelque peu
renforcée si le banquier est détenteur de comptes ouverts au nom
de l'emprunteur, puisqu'il devra, dans ce cas, informer globalement ce dernier
sur les avantages et les inconvénients des diverses solutions qui
s'offrent à lui à la place du crédit, sans pour autant
s'intégrer dans ces affaires. Cette obligation risque, par ailleurs,
d'être fréquemment couplé, en pratique à une
obligation de vigilance, imposant plus particulièrement le banquier
professionnel de ne pas proposer de crédit disproportionné au
regard des facultés contributives de son client.
Cependant il est inutile de penser que l'obligation de
conseil tend à disparaître, elle apparaît encore
fréquemment à la charge du banquier.
Toutefois, l'analyse des arrêts rendus permet de constater
cette réalité.
Dès lors, un réaménagement de l'obligation
de conseil, consacré par le
..................................
49. D. LEGEAIS, l'obligation de conseil de
l'établissement de crédit à l'égard de l'emprunteur
et de sa caution, in Mélanges AEDBF-France, Banque éditeur 1999.
p.257.
législateur, n'est pas à exclure à
l'encontre du banquier dispensateur de crédit. Ce
réaménagement pourrait être réalisé par la
transposition en droit interne de
nouvelles directives permettant une meilleure prise en charge des
clients. Des directives exigeant à la charge du banquier une obligation
générale de conseil visant à n'offrir à son client
que le ou les types et montants de crédit qu'il serait en mesure de
rembourser, en tenant compte, entre autre, de sa situation
financière.
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages généraux
· CONTAMINE-RAYNAUD (M.), Droit bancaire,
6éme éd., Paris : Dalloz, 1995
· GAVALDA (C.) et STOUFFLET (J.), Droit bancaire,
4éme éd., Paris : Litec, 1999
· VINEY (G.), JOURDAIN (P.) : Traité du droit
civil : les conditions de la responsabilité, sous la direction de
GHESTIN (J.), 2éme éd, Paris : LGDJ 1998
Ouvrages spécialisés et
thèses
· DE VAUPLANE (H.) et BORNET (J.-P.), Droit des
marchés financiers, Paris : Litec1998
· FABRE-MAGNAN (M.), De l'obligation d'information dans les
contrats : essai d'une théorie, LGDJ. 1992, préface
Ghestin (J).
· PERRON (X.), l'obligation de conseil thèse
Rennes
Chroniques
· Gourio (A.), le prêteur est-il réellement
tenu d'une obligation de conseil envers le particulier emprunteur ?
· GROUTEL (H.), Le devoir de conseil, RD banque et bourse,
janv/fev 1999, no spécial
· LEGEAIS (D.), L'obligation de conseil de
l'établissement de crédit à l'égard de l'emprunteur
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· MARTIN (D.-R) De la causalité dans la
responsabilité civile du prêteur, Banque et droit 1999
· PIEDELIEVRE (S.), Le cautionnement excessif, Defrenois,
1995
Autres documents
· Encyclopédie juridique de l'Afrique : Droit
des contrats et de la responsabilité, tome 9, sous ma direction de ABDEL
KADER BOYE
Sites consultés
· wikipedia.org
· Google.fr : Théorie de la connaissance
acquise
Outil de travail
· CORNU (G), Vocabulaire juridique,
8ème édition, PUF, Paris, 2007
· CAPITANT (H), TERRE (F) et LEQUETTE (Y), Les grands
arrêts de la jurisprudence civile, Tome 2 Obligations
· Code Civil Français
· Code des obligations Civiles et Commerciales
PLAN DETAILLE
Sommaire
.................................................................p.2
Introduction
.................................................. p.4
Partie É : Les contours de l'obligation de
conseil du banquier ............p.8
Chapitre É : Les fondements de l'obligation
de conseil du banquier..... p.9
Section É : L'obligation contractuelle de
conseil du banquier ............p.10
§ 1 : Rattachement ou rapprochement de l'obligation de
conseil au
contrat..........................................................................................p.10
§ 2 : La justification du rattachement de l'obligation
de conseil au
contrat..........................................................................................p.11
Section ÉÉ : L'hypothèse d'une
obligation de conseil professionnel du banquier
............................................................................p.13
§ 1 : Une hypothèse envisageable
....................................................p.14
§ 2 : Une hypothèse rejetée par la
jurisprudence ..............................p.15
Chapitre ÉÉ : L'étendue de
l'obligation de conseil du banquier .........p.18
Section É : L'étendue de l'obligation de
conseil du banquier quant aux contractants
........................................................................p.19
§ 1 : Le créancier de l'obligation de
conseil : le profane ....................p.19
§ 2 : Le débiteur de l'obligation de
conseil : Le banquier ..................p.20
Section ÉÉ : L'étendue de l'obligation de
conseil du banquier quant au domaine d'application
...........................................................p.23
§ 1 : La détermination du domaine d'application
de l'obligation de
conseil...............................................................................................p.23
§ 2 : Les applications du droit de
conseil............................................ .p.24
Partie ÉÉ : La mise en oeuvre de
l'obligation de conseil du banquier ...p.27
Chapitre É : L'exécution de
l'obligation de conseil du banquier .......p.28
Section É : La détermination de
l'obligation de conseil du banquier ...p.29
§ 1 : La notion de conseil
................................................................p.29
§ 2 : Le contenu du conseil du banquier
..........................................p.30
Section ÉÉ : Les limites droit de
conseil du banquier .......................p.32
§ 1 : Le refus de contracter ou d'exécuter les
ordres du client............p.32
§ 2 : Le refus d'établir le secret bancaire
.............................................p.33
Chapitre ÉÉ : Les sanctions
envisagées à l'absence de l'obligation de conseil du banquier
...............................................................p.35
Section É : La faute du banquier
...............................................p.36
§ 1 : La définition de la faute du banquier
.......................................p.36
§ 2 : La preuve de la faute du banquier
............................................p.37
Section ÉÉ : Le préjudice et
le lien de causalité ..............................p.39
§ 1 : Le préjudice
...........................................................................p.39
§ 2 : Le lien de causalité
.................................................................p.40
Conclusions et recommandations
............................................p.43
Bibliographie
......................................................................p.45
Plan détaillé
........................................................................p.47
Principales abréviations
...........................................................p.49
Principales abréviations
Art article
BRDA Bulletin rapide de droit des affaires
Bull civ. Bulletin des arrêts de la Cour de
cassation, chambres civiles
Bull joly. Bulletin mensuel Joly
CA arrêt d'une Cour d'appel
Civ. Arrêt d'une chambre civile de la
Cour de cassation
Com. Arrêt de la chambre commerciale de
la Cour de cassation
D Recueil Dalloz
Defrenois Répertoire générale du
notaire Defrenois
JCP Jurisclasseur périodique (semaine
juridique) édition générale
JO Journal officiel de la République
Française
LPA Petites affiches
Op.cit opere citato (ouvrage cité)
p. Page
RJC Revue de jurisprudence commerciale
RJDA Revue de jurisprudence de droit des
affaires
RTD.civ Revue trimestrielle de droit civil
RTD.com Revue trimestrielle de droit commercial
|