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La malnutrition proteino-energetique et ses facteurs de risque chez les enfants de moins de 5 ans dans le district sanitaire de Tougan

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par Ouépaké AOUEHOUGON
Ecole Nationale de Santé Publique (Burkina-Faso) - Diplôme d'attaché de santé en épidémiologie 2007
  

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V. DISCUSSION

Notre discussion a concerné les points suivants:

- la validité de notre étude,

- l'atteinte de nos objectifs,

- les résultats de l'étude sur la prévalence de la M PE,

- les résultats concernant les facteurs liés aux enfants et à leurs parents,

- le lien entre la M PE et les pathologies (infections et diarrhées),

- les résultats de l'étude sur la lutte que mènent les agents de santé contre la M PE.

5.1. DE LA VALIDITÉ DE L'ÉTUDE

Les précautions ont été prises pour garantir la validité de nos outils.Quant aux balances utilisées pour la mesure des poids des enfants, elles ont été choisies parmi les meilleures dont disposait le personnel de santé du D S de Tougan. Dans le souci d'éviter des biais de mesure, ces balances ont été vérifiées par un test sur sept enfants de 0 à 59 mois en séjour au CREN de Tougan et les enquêteurs ont été formés et supervisés par nous-mêmes. Les procédures de mesure du poids, de la taille et d'estimation de l'âge en cas d'absence de carnet SM I ou d'extrait de naissance ont également été fournies aux enquêteurs.

En ce qui concerne la sélection des enfants pour l'étude, nous avons procédé par un échantillonnage aléatoire à plusieurs degrés en tenant compte de l'effet grappe par l'utilisation du facteurde correction recommandé. Les villages ont été tirés au sort en présence du MCD, du responsable CISSE et du préparateur d'état en pharmacie du DS de Tougan.

Quant à l'exécution de l'étude, nous avons obtenu un niveau acceptable. En effet, les 330 enfants prévus ont été atteints par l'enquête et toutes les mères ou personnes s'occupant de ces enfants ont accepté s'entretenir avec nous. C'est l'échantillon des agents de santé prévu qui n'a pas pu être atteint

compte tenu du fait que l'un des CSPS ne disposait que d'un seul agent. Mais à ce niveau aussi, nous avons pu enquêter 49 agents sur s 50 prévus.

Toutefois, compte tenu du fait que l'investigation a été réalisée en période de soudure, les prévalences trouvées pourraient être un peu plus élevées que pendant les autres périodes de l'année. Aussi, la précision de notre étude est relativement faib et pourrait contribuer à des conclusions différentes d'autres études avec une précision élevée. De plus, notre étude étant de type transversal, nous ne prétendons pas mettre en évidence des relations de causalité. Néanmoins, nous estimons que ces insuffisances n'entachent pas sérieusement la validité de notre étude.

De ce qui précède, nous pouvons die que les résultats de notre étude reflètent la réalité dans le domaine de la malnutrition des enfants au sein des populations du DS de Tougan. Nous pensons que cette étude est reproductible dans les autres DS du Burkina-Faso.

5.2. DE L'ATTEINTE DE NOS OBJECTIFS

L'étude a permis d'obteni la prévalence de la M PE et de ses différentes formes dans les différentes tranches d'âge des enfants de moins de cinq ans dans le DS de Tougan. Ainsi, nous pouvons die que notre premier objectif spécifique qui consistait à déterminer la prévalence de la M PE chez les enfants de moins de cinq ans dans le D S de Tougan a été atteint.

Notre deuxième objectif spécifique qui était d'identifier les facteurs liés aux populations et associés à la M P E dans le D S de Tougan a aussi été atteint. En effet, nous avons pu mettre en évidence, par l'analyse statistique, que certaines caractéristiques des enfants et de leurs parents étaientassociées à la M PE dans le DS de Tougan. Ce sont, entre autres, le nombre d'enfants de moins de cinq ans par ménage, le poids de naissance des enfants, la taille du ménage, le niveau d'instruction de la mère, le niveau socio-économique du ménage. Ceci confirme du même coup notre première hypothèse qui stipulait

que la M PE était associe à des facteurs démographiques, socio- économiques et culturels au sein des populations dans le DS de Tougan.

Par ailleurs, l'analyse des données récoltées nous a permis de mettre évidence l'association entre la M PE et les infections ainsi que la diarrhée. Notre hypothèse sur l'association de la M P E et des pathologies, notamment l'infection et la diarrhée,se trouve ainsi confirmée.

Enfin, nous avons pu apprécier la planification de la lutte contre la M PE ainsi que l'activité de C N S effectuée par les agents de santé du D S de Tougan . Des insuffisances ont été mises en évidence. Cela confirme notre troisième hypothèse qui supposait que les activités de lutte que mènent les agents de santé contre la M PE comportaient des insuffisances qui limitaient leur efficacité à rédute la fréquence de cette maladie.

Ainsi nous pouvons dte que tous nos objectifs ont été atteints et nos hypothèses confirmées par l'enquête. Notre cadre conceptuel a donc été validé par les résultats que nous avons obtenus.

5.3. DES RÉSULTATS SUR L'ÉTAT NUTRITIONNEL DES ENFANTS DE MOINS DE CINQ ANS DANS LE DS DE TOUGAN

Notre étude a montré que la M PE est fréquente chez les enfants de moins de cinq ans dans le DS de Tougan. Nous avons trouvé chez ces enfants une prévalence de 37.9% [32.7 ;43.4] de MPEglobale.

Chez les enfants de 6 à 59 mois, la M PE estégalementtrès fréquente : en effet, 45.0% [39.0 ; 51,0] d'entre eux souffrent d'une forme ou d'une autre de MPE.

Notre étude a aussi permis de déterminer la prévalence des différentes formes de M PE que sont l'émaciation, le retard de croissance et l'insuffisance pondérale. Chez les enfants de moins de cinq ans, les prévalences de ces formes sont respectivementde 10.3% [7.3 ; 14.2], 23.9% [19.5 ; 29.0] et

24.8% [20.4 ;29.9]. Chez ceux de 6 à 59 mois ces prévalences sontde 12.2%

[8.6 ;16.7], 28.4% [23.2 ;34.2] et 29.5% [24.2 ;35.2].

L'annuaire statistique 2005 de la DEP du ministère de la santé [15] a rapporté une proportion de 42.2% de m alnutris parmi les enfants de moins de cinq ans qui ont été suivis durant l'année 2005 dans le DS de Tougan. Ce résultat concorde avec les nôtres.

L'INSD et ORC Macro, à travers L'EDSBF-III (2003) [12], ont également trouvé une prévalence du même ordre pour la malnutrition chronique chez les enfants de 6 à 59 mois dans la Boucle du M ouhoun (34%).

Lors de leur étude Les grands hydro aménagements au Burkina-Faso contribuent-ils à l'amélioration de la situation nutritionnelle des enfants? (1994), G ERARD P. et ses collaborateurs [13] ont aussi trouvé des prévalences du même niveau chez les enfants de moins de cinq ans : 13.7% pour l'émaciation et 26.2% pour le retard de croissance. La fréquence de la M P E n'a donc pas changé depuis plus d'une décennie malgré les différents efforts consentis.

La prévalence de la M PE globale trouvée par notre étude concorde avec les données de l'annuaire statistique 2005 de la DEP [15]. Nos résultats sur les prévalences des différentes formes de M PE concordent aussi avec les données de la littérature scientifique que nous avons consultée.

Par rapport aux standards de l'O M S , la prévalence de 10.3% de l'émaciation chez s enfants de moins de 5 ans de Tougan vaut plus de 4 fois celle de la population de référence de l'O M S qui est de 2.3% . Les fréquences du retard de croissance et de l'insuffisance pondéra chez les enfants de 0 à 59 mois de Tougan valent toutes plus de 10 fois celles de la population de référence.

Par rapport aux seuils de gravité de l'OM S, la prévalence de la malnutrition aiguë chez les enfants de 6 à 59 mois est légèrement au-dessus du seuil de 10%, mais la différence n'est pas significative. Par contre, chez les enfants de 6 à 23 mois la prévalence de cette forme de M PE qui estde 18.8% ,dépasse

largement ce seuil. En ce qui concerne la prévalence de l'insuffisance pondérai, elle està la limite du seuil de 30% dans la tranche d'âge de 6 à 59 mois. Quant à la fréquence de la malnutrition chronique, elle estégalement à la limite du seuil de 20% chez les enfants de 0 à 59 mois, mais elle afranchi ce seuil chez les enfants de 6 à 59 mois.

On peut donc dire qu'il n'y a pas d'urgence nutritionnelle chez les enfants de moins de 5 ans du D S de Tougan; par contre, il est évident que l'état nutritionnel de ces enfants n'est pas du tout satisfaisant. Il pourrait même basculer dans une situation d'urgence si la sécurité alimentaire et la surveillance nutritionnelle se détériorent ou ne sont pas renforcées.

Cette situation pourrait s'expliquer par l'état de pauvreté généralisée des populations et par l'insécurité alimentaire dans l'ensemble de notre pays. De plus, notre étude a permis de mettre en évidence d'autres facteurs de risque liés aux populations et dont la plupart pourrait être évitée.

5.4. DES RÉSULTATS CONCERNANT LES FACTEURS LIÉS AUX ENFANTS ET À LEURS PARENTS

5.4.1. Les caractéristiques des enfants et la MPE 5.4.1.1. MPE et sexe de l'enfant

Notre étude a montré que 39.3% des garçons sont atteints de M PE contre 36.2% des filles. La différence observée n'est pas statistiquement significative (p = 0.57). Il n'y a donc pas de lien statistique entre le sexe et la MPE.

Ce résultat est conforme aux résultats de l'EDSBF-III (2003) [12] qui a rapporté des proportions de 38.2% pour l'insuffisance pondérai chez les garçons et de 37.1% chez is filles. En ce qui concerne la malnutrition chronique, les proportions étaient de 40.3% pour les garçons et 37.1% pour les filles.

Par contre, notre résultat est différent de celui obtenu par l'INSD [11] lors de leur intitulée Etude spécifique sur Pauvreté et santé au Burkina - Faso, (2002). Cette étude a pu mettre en évidence une association statistiquement significative entre le sexe masculin et la malnutrition par la méthode de la régression logistique.

Les garçons seraient plus sensibles à la malnutrition que les filles. La différence de nos résultats avec ceux de l'INSD pourrait s'expliquer par le fait que l'INSD a utilisé une technique d'analyse plus avancée que la nôtre. Les mesures anthropométriques diffèrent peu entre filles et garçons de moins de cinq ans. De ce fait,l'analyse simple univariée que nous avons utilisée n'a probablement pas pu mettre en évidence cette relation même si elle existe dans nos données.

5.4.1.2. Statut vaccinal et MPE

Notre étude indique que le statut vaccinal n'est pas significativement associé à la MPE (p = 0.75).

Ce résultat est conforme à celui trouvé par AG BO ZO G N IG B E D. et collaborateurs lors de leur étude Facteurs associés à la malnutrition des enfants de 0 - 59 mois dans le village de Lagbo (Aklankpa) en 2006 au Bénin [31]. Ils avaient trouvé aussi que l'association entre le statut vaccinal et la malnutrition n'était pas statistiquement significative (khi deux = 0 .05, p = 0. 83).

Ce résultat, surprenant, peut s'expliquer par la couverture vaccinale assez élevée (autour de 80%) observée dans le DS de Tougan ces dernières années. Cette bonne couverture a permis de réduire la circulation des maladies cibles du PEV, rendant actuellement leur part assez négligeable dans la survenue de la M PE.

5.4.1.3. Le lien entre les variables âge, rang de naissance, le poids de naissance et la MPE

Notre étude a montré que la malnutrition esttrès rare avant 6 mois. C'est à partir de 6 mois que les problèmes nutritionnels commencent. Nos résultats indiquent que c'est la tranche d'âge de 6 à 59 mois qui estassociée à la M PE (p < 3.10-6).

Les résultats de l'EDSBF-III [12] sontsemblables. En témoigne la description suivante du lien entre l'âge et la M PE : « Selon l'âge, on observe des variations importantes de la prévalence de la malnutrition chronique, qu'elle soit modérée ou sévère. La proportion d'enfants accusant un retard de croissance augmente très régulièrement et très rapidement avec l'âge :de 7 % à moins de 6 mois, la prévalence de la malnutrition chronique double pour atteindre plus de 40 % à partir d 'un an».

Dans un rapport d'une enquête nutritionnelle réalisée en République Démocratique du Congo en Décembre 2005, Action Contre la Faim (ACF)[32] a fait le même constat en ces termes : « En ce qui concerne les enfants de moins de six mois, la malnutrition globale est marginale et la malnutrition sévère est absente ».

Avant 6 mois, les enfants disposent, grâce au lait maternel, de tous les éléments nutritifs nécessaires à leur bon développement. Mais à partir de cet âge, le lait devient insuffisant, l'alimentation de sevrage est souvent peu variée et la ration des enfants perd en qualité mais aussi en quantité par rapport à leur âge et à leur poids. C'est cela qui explique que la M PE soit très rare avant 6 mois et très fréquente juste après.

Par rapport au rang de naissance, notre étude a permis de constater que les deux premiers rangs de naissance ainsi que les rangs supérieurs ou égaux à 6 présentent un lien statistique avec la M PE (p = 0.02).

L'EDSBF-III[12] a obtenu des résultats en partie similaires. Les auteurs ont déclaré que : «Du point de vue du rang de naissance, on constate également

une augmentation légère de la malnutrition chronique avec le rang de l'enfant : 37 % pour les enfants de rang 1, 38 % pour les enfants de rangs 2-5 et 41 % pour les rangs 6 ou plus».

Ce résultat peut s'expliquer par les difficultés qu'éprouventgénéralement les nouvelles mères à prodiguer des soins adéquats à leurenfant surtout lors du sevrage. Le sevrage est souvent mal conduit, d 'où la détérioration de l'état nutritionnel des enfants pendant cette période. Par rapport au lien avec les rangs de 6 et plus, nous pensons qu'il est surtout dû aux faibles poids de naissance fréquents chez les grandes multipares ainsi qu'au nombre souvent élevé d'enfants en bas âge dans les foyers des grandes multipares jeunes.

Quant au poids de naissance, notre étude indique qu'il présente un lien significatif avec la M PE (p = 0.002), la modalité en cause étant le faible poids de naissance. Ce résultat peuts'expliquer par le fait que le faible poids de naissance résulte le plus souvent d'une malnutrition maternelle, ce qui laisse sous entendre que les conditions dans lesquelles l'enfant vivra désormais sont précaires du point de vue de la sécurité alimentaire mais aussi des pratiques d'alimentation et d'hygiène du milieu. Il n'est donc pas étonnant qu'un enfant déjà m alnutri avant la naissance et vivant dans ces conditions voie sa malnutrition persister ou s'aggraver.

Nous constatons que certains enfants présentent des caractéristiques susceptibles de les rendre plus vulnérables à la MPE. Ces particularités sont, entre autres, l'âge compris entre 6 et 59 mois, le faible poids de naissance et un rang de naissance supérieur ou égale à 6. En réalité, c'est souvent la conjugaison de plusieurs de ces traits et de certaines des caractéristiques socio-économiques, culturelles et démographiques de leurs parents qui sont associes la M PE.

5.4.2. Les facteurs liés aux parents et influençant la MPE 5.4.2.1. Le lien entre la MPE et les caractéristiques démographiques

Parmi les variables démographiques, la taille du ménage, la parité de la mère, l'intervalle inter génésique et le nombre d'enfants en bas âge dans le ménage ont fait l'objet de notre étude.

Nos résultats montrent que parmi les enfants dont la parité de la mère est inférieure ou égale à 6, la proportion des m alnutris est de 36.3% . Chez les enfants dont la parité de la mère est supérieure à 6, cette proportion est de 44.3% . Cette différence observée n'est pas significative (p = 0.22) : la parité de la mère n'a pas de lien significatif avec la M PE.

En 1982, OUEDRAOGO V.M .[19] a trouvé que 50% des mères des cas de M PE étaient de grandes multipares. Ceci implique que 50% des mères des cas n'étaient pas de grandes multipares. Donc ce résultatsuggère aussi qu'il n'y a pas de lien entre la multiparité de la mère et la M PE.

Cette absence de lien entre la M PE et la multiparité paraît compréhensible car le nombre d'enfants par femme ne peutpas avoir d'emblée une incidence sur la malnutrition si les naissances sont suffisamment espacées, le niveau socio- économique élevé et les règles d'hygiène respectées.

En revanche, le nombre d'enfants de moins de 5 ans et la taille du ménage présentent des associations statistiquement significatives avec la malnutrition. Pour le nombre d'enfants de moins de 5 ans, c'est la modalité "3 et plus"qui est liée à la M PE (p = 0.003). Quant à la taille du ménage, la modalité en question est"9 et plus" (p = 0.03).

Dans leur étude Evaluation de l'état nutritionnel des enfants de 0 -5 ans dans une aie de santé rurale au Nord-Est de la République Démocratique du Congo, réalisée en Mai 1999, KIRE R E M ATH E M ., K IVAS IG H A K . D . et R IG O J. [17] ont mis en évidence le lien entre la M PE et la taille du ménage. Ïs ont

rapporté qu'une taille supérieure ou égale à 6 estassociée à la malnutrition chronique (RP = 2,36[1,26 ;4,41].

Par rapport au nombre d'enfants en bas âge dans le ménage, PIECHULECK H .et M ENDOZA A. J.[33] ont trouvé aussi des résultats similaires dans une étude intitulée Les enfants de poids insuffisant à la naissance : les exigences d'un programme de surveillance nutritionnelle qu'ils ont menée en 1992 - 1993 au Cameroun. Ils ont rapporté ceci :« dans les familles comprenant 3 enfants ou plus de moins de cinq ans, la proportion des petits poids est de 15% alors qu'elles n'est que de 7% dans les familles ne comprenant pas plus de 2 enfants de moins de cinq ans ».

Nos résultats concordent avec ces données et montrent que ces variables sont associées à la M PE.

Le lien entre la MPE et le nombre d'enfants de moins de 5 ans pourrait s'expliquer par le fait qu'un grand nombre d'enfants en bas âge exige beaucoup d'attention et de ressources pour l'alimentation et les soins de santé. De plus, en dehors de jumeaux ou des enfants d'un tiers, il est pratiquementimpossible à une mère d'avoir 3 enfants ou plus de moins de 5 ans en respectant un intervalle inter génésique adéquat, or un petit intervalle inter génésique est lié à la malnutrition.

Le lien entre l'intervalle inter génésique et la MPE

Notre étude montre que parmi les enfants qui ontmoins de 36 mois de plus que leur petit frère direct, la proportion des m alnutris estde 51.3% alors que cette proportion tombe à 27.6% quand la différence estsupérieure ou égale à 36 mois. L'analyse statistique nous a permis de mettre en évidence l'association entre l'intervalle inter génésique et la M PE (p = 0.03).

L'EDSBF-III (2003) [12] a aussi suspecté un lien entre l'intervalle de naissance et la M PE : « Parmi les enfants dont l'intervalle de naissance était inférieur à 24 mois la proportion des cas de malnutrition chronique était de

51.3%. Quand l'intervalle était entre 24 et 47 mois, cette proportion était de 39.9% puis tombait à 29.5% parmi ceux dont l'intervalle était de 48 mois ou plus». L'étude étant purement descriptive, les auteurs ont conclu que : «L'intervalle inter génésique semble également avoir une influence sur la prévalence de la malnutrition ».

PIECH U LEC K H . et M EN DO ZA A. J. [33] ont également trouvé des résultats similaires dans l'étude : Les enfants de poids insuffisant à la naissance: les exiences d'un programme de surveillance nutritionnelle qu'ils ont menée en 1992 - 1993 au Cameroun. Ïs ont déclaré que : « 19.7% des nouveaux-nés de mères de moins de 20 ans ont un poids insuffisant ; ce taux augmente à 57% quand les femmes ont déjà accouché dans les 2 années précédentes. Ces résultats soulignent l'importance de la planification familiale ».

Ce lien peut s'expliquer par le fait qu'un intervalle assez large permet à l'enfant de profiter plus longtemps du lait de sa mère mais aussi de ses soins et des ressources disponibles dans le ménage. Quand l'intervalle se rétrécit, l'attention est détournée vers le plus petit et les maires ressources partagées entre un plus grand nombre de personnes. C'est en ces moments que la personne la plus vulnérable, l'enfant entre 6 et 23 mois, peut être facilement atteint de malnutrition.

5.4.2.2. Le lien entre les caractéristiques socioéconomiques et culturelles et la MPE

Notre étude a montré que le niveau analphabète de la mère estassocié à la M PE (p = 0.03) de même que le faible niveau socio-économique (p = 0.01) et l'irrégularité du suivi de la CNS (p = 0.02).

Dans leur étude Evaluation de l'état nutritionnel des enfants de 0 -5 ans dans une aire de santé rurale au Nord Est de la République Démocratique du Congo, KIRERE MATH E M ., KIVASIGHA K. D. et RIGO J. (1999) [17] ont abouti aux mêmes conclusions. Ils ont rapporté que le niveau analphabète de la mère (RP : 2,56 [I.C. 1,41 ; 4,65]) ainsi qu'un niveau socio-économique

médiocre de la famille de l'enfant (R P :3,94 [I.C . 2 ,33-6,66]) étaient associés à la malnutrition chronique.

Dans l'Étude spécifique sur pauvreté et santé au Burkina-Faso de 2002, l'INSD [11] a trouvé aussi que le niveau de vie et le niveau d'instruction de la mère présentaient des associations statistiques avec l'insuffisance pondérai après une régression logistique.

Cela signifie que les enfants d'une mère instruite ayant un niveau socio- économique moyen ou élevé auront moins de risques de développer une M PE par rapport à ceux d'une mère analphabète et de faible niveau socio- économique.

L'instruction permet aux mères d'acquérir de meilleures connaissances sur la malnutrition, les différents types d'aliments ainsi que les règles d'hygiène. Il est aussi plus facile à des mères instruites d'initier et de mieux gérer des activités génératrices de revenues, toutes choses qui concourent à la lutte contre la MPE. A l'opposé, les femmes non alphabétisées ont souvent tendance à attribuer la malnutrition à l'action des génies et des dieux ce qui éclipse iur propre responsabilité devant la malnutrition de leurs enfants. Elles sont aussi les plus nombreuses à vivre dans des conditions socio- économiques difficiles. C'est donc cet ensemble de facteurs qui entrent en jeu pour expliquer cette association entre l'analphabétisme de la mère, le faible niveau socio-économique et la M PE.

En ce qui concerne le lien entre la M PE et le suivi de la CNS, il a aussi été mis en évidence en 2006 au Bénin par SINNAEVE O ., TESTA J., ABLEFONLIN E. et AYIV I B .[18] lors de leur étude Aspects épidémiologiques de la malnutrition infanto juvénile à Cotonou. Ils ont rapporté que : « la malnutrition était liée à la régularité du suivi médical des enfants ».

Par contre, dans le cas de l'alimentation de complément lors du sevrage et des interdits alimentaires, notre étude indique qu'ils ne présentent pas de liens

significatifs avec la MPE (p = 0.50 pour l'alimentation et p = 0.56 pour les interdits alimentaires).

Dans leur étude Evaluation de l'état nutritionnel des enfants de 0 -5 ans dans une aire de santé rurale au Nord Est de la République Démocratique du Congo., KIRERE MATH E M ., KIVASIGHA K. D. et RIGO J. (1999) [17] ont trouvé un lien entre une alimentation de sevrage non variée et la malnutrition (RP = 3.12 [1.47 ;14.30].

Ce résultat est contraire au nôtre. Cela pourrait s'expliquer par le fait que notre méthode d'appréciation de la qualité de l'alimentation comportait des insuffisances. En effet, nous avons considéré uniquement la qualité des repas des dernières 24 heures, pourtant rien ne nous permettait d'affirmer que la qualité des repas donnés aux enfants était habituellement la même. Ce résultat montre aussi toute la difficulté d'apprécier correctement l'alimentation des populations surtout lors d'une enquête transversale à passage unique comme la nôtre.

L'analyse des liens entre la malnutrition et les variables démographiques, socio-économiques et culturelles nous a permis de dégager celles qui sont significativement associées à cette affection. Ce sont:

le niveau socio-économique du ménage,

le niveau d'instruction de la mère,

le nombre d'enfants de moins de 5 ans dans le ménage,

la taille du ménage.

5.5. DES RÉSULTATS CONCERNANT LE LIEN ENTRE LA MPE ET LES PATHOLOGIES (INFECTIONS ET DIARRHEES)

Selon les résultats de notre étude, la M PE et la diarrhée sont statistiquement associes (p < 3 .10-6). L'association entre la M P E et les infections est aussi significative (p = 0.01).

L'étude de O U ED RAO GO V. M . [19] en 1982 au centre hospitalier national Yalgado de Ouagadougou a révélé que 100% des m alnutris avaient présenté une infection à l'entrée ou au cours de leur hospitalisation.

Par ailleurs, l'Etude spécifique sur pauvreté et santé au Burkina-Faso que l'INSD a réalisée en 2002 [11] a également mis en évidence la relation entre la M PE et la diarrhée par la méthode de la régression logistique.

Dans leur étude intitulée État nutritionnel et environnement pathogène d'enfants d'une population forestière du sud Cameroun réalisée en 1998, BERNARD O., PAG EZY H . et BLEY D. [34] ont rapporté ceci : « Le retard statu ral suit globalement la même évolution que la prévalence de la splénomégalie. Ces résultats confortent donc l'hypothèse de l'importance du facteur infectieux dans l'installation et la pérennisation de la malnutrition chronique ».

Ces résultats et les nôtres sont concordants et confirment la réalité du cercle vicieux dénommé complexe malnutrition-infection que nous avons évoqué plus haut. Les infections entraînentsouvent l'anorexie, l'augmentation des besoins nutritionnels et d'autres désordres nutritionnels qui expliquent ce lien. Parlant de ces désordres provoqués par is infections sur i plan nutritionnel, le Prof. MICKAEL C. L. (1996) [5], dans son livre La nutrition dans les pays en développement, a expliqué que : «Le plus important est sans doute la destruction accélérée des protéines tissulaires et la mobilisation des acides aminés, du muscle en particulier. L'azote est excrété dans les urines et entraîne une fonte musculaire flagrante ». De son côté, la malnutrition affaiblit l'organisme et plus particulièrement son système immunitaire, le rendant singulièrementvulnérable aux infections et autres diarrhées. C'est donc cette synergie qui explique l'association entre la M PE et les pathologies.

Dans le DS de Tougan, la malnutrition des enfants n'est pas seulement due
aux pathologies et aux facteurs liés aux enfants et à leurs parents. Il existe
aussi d'autres facteurs influençant la M PE et qui relèvent des agents de santé.

5.6. DES RÉSULTATS DE L'ETUDE SUR LA LUTTE QUE MÈNENT LES AGENTS DE SANTÉ CONTRE LA MPE

5.6.1. La planification de la lutte contre la MPE

Notre étude a montré que la planification de la lutte contre la M PE au niveau des CSPS du DS de Tougan comportait des acquis mais également des insuffisances :seulement 37.5% des plans d'actions sontsatisfaisants en ce qui concerne la planification de la lutte conte la M PE.

Comme acquis nous avons constaté que dans presque tous les CSPS, la planification des activités de lutte contre la M PE estfaite, la communauté est impliquée dans le processus de planification. Le problème de la M PE est perçu comme l'un des problèmes prioritaires d'où la formulation d'objectifs spécifiques concernant cette maladie et enfin les carnets CPN et les fiches infantiles sontdisponibles et gratuits.

Au titre des insuffisances, nous avons remarqué que plus de la moitié des plans n'ont pas prévu de démonstration culinaires ni de visites à domicile ÇVAD). Or, il est indéniable que les pratiques en matière d'alimentation des nourrissons sont souvent inadéquates dans nos communautés. A notre avis, il est indispensable de mettre en oeuvre toutes les démarches qui permettent de récupérer les cas de malnutrition une fois qu'ils sont dépistés. Or certaines des plus importantes démarches comme les VAD et les démonstrations culinaires sontsouvent négligées lors de la planification de la lutte contre la M PE au niveau des CSPS de Tougan.

De plus, les trois quarts des CSPS ne disposent pas de guide de démonstrations culinaires avec des denrées locales et aucun plan de ces CSPS n'a prévu l'acquisition de ce document. Pourtantla prise en charge des m alnutris modérés se fait au niveau des CSPS et l'utilisation adéquate des denrées localement disponibles pour la récupération de ces m alnutris modérés Çà l'aide de ce document) est l'option à privilégier dans la lutte contre la M PE puisqu'elle est peu coûteuse et pérenne.

Aussi, le quart des CSPS où il existe des villages à 5 Km ou plus n'a pas prévu de CNS en stratégie avancée. Pourtant l'importance de la stratégie avancée n'est plus à démontrer en ce qui concerne les activités préventives. Ceci explique, en partie, le fait que près de 70% des enfants de moins de 6 mois et 91% des enfants de 6 à 59 mois ne bénéficient pas d'un suivi nutritionnel régulierdans le D S de Tougan. Parallèlement, près de 80% de ces enfants sont complètement vaccinés ou à jour de leurs vaccinations. Cela laisse entrevoir que la CN S ne bénéficie pas de l'attention dont requiert son importance dans la planification des activités de protection des enfants.

Ce résultat se rapproche de celui trouvé par N IKIEM A P. [21] lors de son étude sur l'utilisation des fiches de prise en charge nutritionnelle des enfants par personnel des services de CNS de la ville de Ouagadougou en Octobre 2003. Il a rapporté qu'à partir de la troisième année, les mères n'amenaient plus leurs enfants en consultation et le personnel de santé ne trouvait plus d'intérêt à la CNS.

Cette situation estune lacune dans la surveillance nutritionnelle des enfants car ceux-ci demeurent très vulnérables à la M PE jusqu'à 5 ans.

5.6.2. La CNS réalisée par les agents de santé

L'observation des CNS nous a permis de constater que presque tous les agents du DS de Tougan maîtrisent la technique de la pesée des nourrissons. En revanchent, seuls 6 agents sur 49, soit 12.2% , ont réussi à conduire la C N S de façon satisfaisante.

Nous avons constaté que l'anémie est rarement recherchée et que les oedèmes ne le sontpresque pas. L'anémie est pourtant très fréquente à en croire les résultats de l'EDSBF-III (2003)[12] qui estime qu'au Burkina - Faso, près de 9 enfants sur 10 de 6 à 59 mois sontanémiés. Quant aux oedèmes d'origine nutritionnelle, ils constituent un sine de gravité de la M PE. Il est donc indispensab de vérifier l'existence de ces signes en CNS d'autantplus

que cela ne requiert, en CSPS, que quelques secondes. Pourtant cette recherche n'est pas systématique dans le district sanitaire de Tougan.

De plus, l'indice nutritionnel n'est déterminé que lors de 70% des CNS. La courbe de suivi de la croissance n'est mise à jour que dans 60% des consultations et, surtout, l'état nutritionnel de l'enfant n'estexpliqué à sa mère que dans presque la moitié des consultations.

Ces résultats sont largement en dessous de ceux obtenus par NIKIEMA P. [21] lors de son étude en 2003 à Ouagadougou. Il a indiqué que 96.6% des agents enquêtés ont déclaré déterminer chaque fois l'indice nutritionnel, 91.4% ont affirmé tracer régulièrement la courbe etprès de 90% ont soutenu fournir l'explication de l'état nutritionnel des enfants aux parents.

Nous pensons que l'explication de cet écartentre nos résultats réside dans la différence des techniques utilisées. NIKIEMA P. a procédé par un questionnaire alors que nous avons utilisé une observation directe. Dans le cas de N IKIEM A P ., les agents ont probablement indiqué ce qu'il convenait de faire et non ce qu'ils faisaient réellement.

Ainsi, nous constatons que dans le D S de Tougan , des insuffisances existent, que ce soit au niveau de la planification de la lutte contre la M PE ou au niveau des CNS proprement dites. Ces insuffisances,ajoutées aux facteurs de risque liés aux enfants et à leurs parents que nous avons déjà mis en évidence, sont certainement à l'origine de l'état nutritionnel non insatisfaisantdes enfants de moins de cinq ans.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci