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Connaissance, Développement, division internationale du travail. Quelle place pour les pays émergents? Le cas de la Chine et l'Inde

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par Erick ATANGANA
Université Paris 1 Panthéon Sorbonne - Master Economie de l'industrie et des services 2006
  

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1.1.1.2 Les déterminants de la localisation des activités productives sur la base de la connaissance

- Le rôle des firmes multinationales

Comme mentionné en début de cette première partie, les coûts de transports et la montée en puissance des nouvelles technologies permettent aux firmes multinationales de répartir leurs unités productives dans une large palette de territoires. Elles sont les acteurs majeurs de la globalisation de l'économie, par des mécanismes classiques tels que les IDE (investissements directs étrangers), les fusions acquisitions, les partenariats industriels, l'externalisation...

On peut remarquer que les flux d'IDE restent concentrés entre les Etats-Unis, l'Union Européenne et le Japon (60%). Mais leur part dans le total mondial tend à se réduire au profit des pays émergents. En 2006, l'Union Européenne totalise 421 milliards d'euros en IDE, les USA 136, la France 68, le Royaume Uni 131, la Chine 54, et L'Inde 7 milliards2(*).

Les firmes multinationales jouent un rôle moteur dans la R&D. Elles sont à l'origine de près de la moitié des dépenses mondiales consacrées à la R&D et d'au moins deux tiers des dépenses de recherche des entreprises (évaluées à 450 milliards de dollars).

En 2005, d'après un rapport de la CNUCED, les multinationales consacraient 28% de leurs investissements en R&D à l'étranger. On assiste à un mouvement d'internationalisation de la R&D des entreprises. Ce mouvement peut s'effectuer sous diverses formes : accords, alliances, cessions et acquisitions de licences, acquisitions de firmes étrangères à fort potentiel de R&D, financement de travaux de centre de R&D étrangers ou directement par l'ouverture de centres de R&D à l'étranger. Cependant ce phénomène touche essentiellement les pays d'Europe de l'Ouest, les USA et le Japon où restent concentrées le potentiel mondial de R&D. Si l'on retient l'indicateur de concentration mondiale des activités de R&D, on observe que les firmes américaines représentent à elles seules 43,3% des dépenses de R&D mondiales, suivi du Japon 18,3%, Allemagne 5,8%, Royaume-Uni 5,8%, France 4,3%3(*).

Figure 1. : Répartition des budgets de R&D par pays en 2006

La polarisation des activités de recherche et d'innovation est le reflet à la fois des inégalités régionales liées à la localisation des universités et des centres de recherche dans les grandes métropoles et des inégalités de développement entre les pays. Avec une concentration encore plus marquée pour les activités de haute technologie, (Mouhoud, 2003).

- Pourquoi les activités productives se concentrent-elles dans l'espace ?

· Les économies d'agglomération

Marshall (1920) est l'un des premiers économistes à avoir analysé le concept d'économies d'agglomération. Son étude était basée sur le rôle de la coopération et les relations entre les firmes et l'agglomération. Pour Marshall, la coopération est la forme la plus avancée de l`agglomération. Par la suite de nombreuses contributions ont été apportées permettant d'enrichir ce thème. Becattini (1990) estime qu'un certain nombre de facteurs à la fois historiques, juridiques, politiques amènent les firmes à se concentrer dans un territoire. En plus de ces facteurs on peut citer le stock de connaissances accumulées et le haut degré de spécialisation industrielle.

La nouvelle géographie économique met en exergue deux thèmes pour expliquer la concentration géographique des activités dans l'espace : les rendements croissants et les coûts de transactions.

La polarisation concerne particulièrement les activités à rendement croissant qui peuvent bénéficier du regroupement des firmes, des travailleurs, et de la demande en un seul lieu. Ce regroupement peut encore plus s'intensifier lorsque l'on assiste à la baisse des coûts de transactions (coûts de transports, droits de douane, monnaie unique). Mais il est aussi possible que ce phénomène s'inverse, au profit d'une dispersion. C'est le cas où le poids des forces centrifuges (forte concurrence, hausse des coûts salariaux...) l'emporte sur celui des forces centripètes.

Catin et Al. (2002) développent un modèle qui permet de dégager un ensemble de trajectoires de concentration spatiale des activités technologiques en fonction du stade de développement, de la diffusion des connaissances et des politiques d'ouverture et d'infrastructures des pays. Ils distinguent les PI (pays industrialisés), NPI (nouveaux pays industrialisés), PED (pays en développement).

Le modèle de ces auteurs montre que le degré de concentration spatiale des activités technologiques dépend beaucoup du niveau de développement d'un pays. Ces auteurs considèrent quatre phases de développement pour un PED, une phase de départ, une deuxième phase où le PED s'engage dans une nouvelle étape de développement, la troisième phase où il passe au stade de NPI et la quatrième phase où il devient un pays industriel. La constitution d'une activité technologique dans un PED engagée dans la seconde phase de développement nécessite l'utilisation d'une main d'oeuvre qualifiée spécifique, et des consommations intermédiaires générées par les industries locales à main d'oeuvre peu qualifiée. C'est-à-dire que le PED doit atteindre un niveau d'intégration économique beaucoup plus élevé que dans la première étape pour que l'industrie technologique commence à se répartir dans les centres urbains. L'évolution des structures industrielles et les politiques d'ouvertures internationales conduisent globalement à une concentration puis à une diffusion progressive de l'agglomération vers les régions périphériques. Dans les deux premières étapes, les firmes technologiques restent totalement concentrées dans l'agglomération, après, à partir du stade de NPI, et au fur et à mesure que le pays se développe, le poids des forces centripètes augmente, par exemple : la part des biens consommés qui ont une haute valeur technologique, le niveau de développement des infrastructures ; mais cette augmentation est amoindrie et beaucoup plus compensée par l'augmentation du poids des forces centrifuges telles que la part des firmes multinationales technologiques dans l'industrie, le degré d'ouverture au commerce international, la baisse des coûts de transports due au développement des infrastructures nationales, l'intensité des externalités de connaissance. Ici, le rôle de l'intégration économique est important pour comprendre cette diffusion progressive des activités vers la périphérie. Au fur et à mesure que le pays devient plus intégré économiquement, le nombre de firmes multinationales s'accroît, ce qui tend à renforcer la concurrence avec les firmes locales. Cette concurrence va entraîner la baisse des coûts d'importation des produits technologiques finals, qui couplées à la baisse des coûts de transports va inciter les firmes multinationales à étaler leurs activités au-delà de l`agglomération.

Le modèle proposé par Catin et Al. (2001) met en évidence deux étapes dans la trajectoire de concentration spatiale : dans un premier temps, l'apparition d'une industrie technologique et les effets d'entraînement inter-sectoriels viennent renforcer le processus de concentration existant en agglomération. Puis dans un second temps, l'intégration économique croissante, les investissements dans les infrastructures de transports, et l'évolution des structures économiques tendent à favoriser la diffusion des activités en région périphériques.

La diffusion devient efficiente avec le développement d'une part du phénomène de congestion en agglomération, et d'autre part du fait de développer les infrastructures et les connaissances dans les régions périphériques (Henderson, 2000).

Le modèle de ces trois auteurs montre que le seuil de retournement à partir duquel les activités commencent à se répartir sur le territoire semble largement déterminée par la nature et l'intensité des externalités de connaissances.

· Externalités de connaissance et proximités

Les firmes technologiques s'implantent à proximité des laboratoires de R&D et des universités pour pouvoir bénéficier des  spillovers technologiques et ainsi améliorer leur capacité d'innovation. Avec les NTIC le processus de circulation et de diffusion des connaissances est facilité, on pourrait même penser que dans ce cas une proximité géographique ou physique n'est plus nécessaire.

Torre et Rallet (2005) étudient les relations qui existent entre proximité et localisation des activités économiques. Les auteurs distinguent deux types de proximités : la proximité géographique et la proximité organisationnelle. La proximité organisationnelle est en réalité la proximité relationnelle. C'est la capacité qu'à une organisation de mettre en relation les acteurs de la chaîne productive sans qu'ils ne soient proches géographiquement. Selon ces deux auteurs, la proximité relationnelle génère des mécanismes de coordination très puissants qui permettent de pallier les problèmes liés aux longues distances.

Si l'on distingue la recherche fondamentale de la recherche appliquée, la proximité joue un rôle essentiel dans la phase de recherche amont (recherche fondamentale), en revanche dans la phase aval (recherche appliquée), l'obligation de proximité est plutôt relative (Autant-Bernard, 2000). L'accès à la recherche fondamentale nécessiterait une proximité plus importante que l'accès à la recherche appliquée. En effet, les connaissances nouvelles ou tacites4(*) issues de la recherche fondamentale ( Foray, 2000), nécessitent une proximité géographique pour être construites et diffusées. A l'inverse, les résultats issus de la recherche appliquée, considérés comme codifiés5(*), ont une diffusion plus large.

La distinction entre connaissance tacite et connaissance codifiée est très importante, parce-que ces deux types de connaissances n'ont pas le même mode de diffusion, et la nature des acteurs appelés à échanger est différente. Au-delà de la proximité géographique et physique, la construction et la création de connaissances tacites nécessitent surtout une proximité organisationnelle et culturelle (Gilly et Torre, 2000). Le besoin de proximité physique s'avère plus important dans les phases préliminaires du développement technologique, qui mettent en jeu des connaissances de nature plutôt tacites que codifiées.

Certains auteurs ont aussi essayé d'étudier les relations entre recherche publique et recherche privée, et leur impact dans la diffusion des externalités de connaissance. Les interactions entre secteur public et secteur privé sont traditionnellement liées à l'étroite complémentarité de ces deux secteurs. Le premier privilégiant la recherche fondamentale, le second la recherche appliquée. Pour Kline et Rosenberg (1986), il existe de fortes interactions entre ces deux activités. Chaque type de recherche renforcerait l'autre sans qu'il n'y ait pour autant de concurrence entre elles.

Plusieurs autres études ont été effectuées comme par exemple celle de Mansfield, (1995) et celle de Beise et Tahl, (1999). Les auteurs observent un certain consensus  selon lequel il y aurait bien une diffusion de la recherche publique vers la recherche privée, et cette diffusion se fait principalement par le biais de la coopération. Les entreprises s'installent aussi dans des régions où la politique publique de recherche est efficace (systèmes nationaux d'innovations, subventions à la recherche...) afin de bénéficier des externalités. Aussi, les différences institutionnelles et culturelles qui existent entre les chercheurs publics et privés pourraient nécessiter une proximité géographique pour pallier la faiblesse de la proximité organisée par le souci de coopération (Gallié, Legros, 2005) .

- Une localisation basée sur la recherche de compétences spécifiques

Contrairement à la division technique du travail taylorienne, la division cognitive du travail ne repose pas sur un découpage bien défini et prescrit des opérations. Elle repose plutôt sur la capacité à produire de la connaissance à partir de l'information. C'est par le biais de l'apprentissage que cette production de nouvelles connaissances est possible. La compétence et le savoir jouent en quelque sorte ici un rôle de catalyseur dans le processus de création de connaissances. La politique de localisation de la R&D des entreprises sera donc nécessairement liée au niveau de compétences, de savoirs, et de spécialisations que peuvent apporter les territoires où elles veulent s'implanter (Mouhoud, 2003).

Pour Mouhoud (2003), la délocalisation de la R&D repose beaucoup plus sur la recherche d'éléments favorables au développement des compétences que sur une logique de minimisation des coûts. Les territoires riches en compétences spécifiques seront beaucoup plus recherchés. La R&D est tournée vers l'excellence technologique.

Les pays qui ont développé des compétences particulières et une haute spécialisation technologique vont concentrer toute l'activité de R&D. Cela entraîne une polarisation des activités de r&d au sein des grands pays industriels de la Triade, très riches en ressources cognitives. En d'autres termes, la division cognitive du travail dans les activités intensives en connaissance serait l'apanage des pays présentant des similarités en termes de niveaux technologiques et en stocks de ressources cognitives. Ce qui permet l'échange de biens similaires mais différenciés. C'est plutôt la logique des avantages absolus qui est prise en compte ici (Mouhoud, 1995).

« Ainsi, les pays connaissent une structuration de leurs avantages comparatifs selon trois niveaux d'analyse souvent confondus :

- la condition première de participation à la division internationale cognitive du travail réside dans la similarité de leurs niveaux des ressources cognitives (similarité de niveau ou de stock de R&D);

- cette similarité dans le niveau des ressources cognitives n'empêche pas la spécialisation des pays sur des compétences issues de ces ressources en fonction des interactions entre les institutions, les entreprises et l'histoire des conditions de production et de reproduction des compétences ;

- la différence dans les compétences peut ensuite se traduire par des similarités dans les produits échangés au niveau des biens finals. Cette similarité est en fait de même nature que la première puisque c'est la convergence des revenus par tête qui homogénéise les structures de consommation et qui engendre des demandes de biens similaires différenciés entre pays à niveau de développement comparable » (Mouhoud, 1995).

En ce qui concerne les pays émergents comme la Chine par exemple, ils ne participent qu'à la phase aval qui correspond à la phase de développement. C'est le cas des laboratoires de soutien local qui ont pour objectif d'adapter les produits à la demande locale.

* 2 Source : CNUCED : world investment report 2006

* 3 Voir graphique, source : International r&d scoreboard

* 4 Ce sont les compétences innées ou acquises et difficiles à formaliser, elles peuvent être assimilées au capital intellectuel dans le cadre d'une entreprise

* 5 Ce sont des connaissances clairement articulées, et facilement diffusable, vu qu'elles peuvent apparaître sous forme tangible : courrier électronique, papier écrit

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo