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La problématique de la dépénalisation des délits de presse au Bénin

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par M. Koovy YETE
Chaire Unesco des Droits de la Personne et de la Démocration du Bénin - DEA 2007
  

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REPUBLIQUE DU BENIN

MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR

Chaire Unesco des Droits de la Personne et de la Démocratie

Faculté de Droit et de Sciences Politiques

ET DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE

UNIVERSITE D'ABOMEY-CALAVI

MEMOIRE POUR L'OBTENTION DU DIPLOME D'ETUDES APPROFONDIES (DEA)

OPTION : DROITS DE LA PERSONNE ET DE LA DEMOCRATIE

THEME :

LA PROBLEMATIQUE DE LA DEPENALISATION DES DELITS DE PRESSE AU BENIN.

Présenté et soutenu par : Sous la direction de :

Koovy M. YETE Dorothé SOSSA

Agrégé des Facultés de Droit,

Doyen de la Faculté de Droit et de

Sciences Politiques de l'Université

d'Abomey-Calavi.

Année académique  2004-2005

LA CHAIRE UNESCO DES DROITS DE LA PERSONNE ET DE LA DEMOCRATIE N'ENTEND DONNER AUCUNE APPROBATION NI IMPROBATION AUX OPINIONS EMISES DANS LES MEMOIRES.

CES OPINIONS DOIVENT ETRE CONSIDEREES COMME PROPRES A LEURS AUTEURS.

DEDICACE

A

Ashley et Harry,

Votre mère Sidonie O. LATOUNDJI et moi évaluons la longueur du chemin que vous aurez à parcourir pour entrer dignement dans la société des hommes. Nous espérons vous voir mieux faire que nous.

A mes père et mère,

A mes frères et soeurs.

REMERCIEMENTS

A Monsieur Dorothé SOSSA, agrégé des Facultés de Droit, Doyen de la Faculté de Droit et de Sciences Politiques de l'Université d'Abomey-Calavi qui, malgré ses multiples occupations, a accepté diriger ce travail. Puisse l'Eternel faire de vos enfants de dignes représentants ;

A Monsieur Théodore HOLO, agrégé des Facultés de Droit, Titulaire de la Chaire UNESCO des droits de la personne et de la démocratie ;

A la Fondation KONRAD ADENAUER qui nous a permis, grâce à une bourse d'études, de suivre ce programme de DEA ;

Aux professeurs de la Chaire UNESCO, pour leurs riches enseignements ;

Aux membres de l'Administration de la Chaire UNESCO ;

A Monsieur Nassirou S. OUAKE, Directeur du Centre National de Sécurité Routière (CNSR), pour la confiance placée en moi et l'intérêt attaché au travail bien fait ;

A Monsieur Claude Romain WEKE, Chef du Service de la Prévention Routière du CNSR, pour vos sages conseils et votre attachement fraternel ;

A Monsieur Nestor VITODEGNI, Chef du Service Informatique, Statistiques, Etudes et Documentation du CNSR, pour votre précieux soutien ;

A Monsieur François AWOUDO, ex Président de l'ODEM, pour vos nombreuses contributions ;

A Monsieur Clément HOUENONTIN, Vice-président de la HAAC, pour vos pertinentes appréciations ;

A Mademoiselle Hermine L. DOSSOU, pour ta contribution inestimable à la phase technique de ce travail.

SIGLES ET ABREVIATIONS

Art. : Article

éd. : Édition

HAAC  : Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication

ODEM  : Observatoire de la Déontologie et de l'Ethique dans les Médias

p.  : page

UPMB  : Union des Professionnels des Médias du Bénin

V.  : Voir

PLAN

INTRODUCTION

PREMIERE PARTIE :

Intérêt d'une discrimination positive en faveur des délits de presse.

SECONDE PARTIE :

Les préalables à une dépénalisation des délits de presse au Bénin.

CONCLUSION

SOMMAIRE

INTRODUCTION

Première partie : 8

CHAPITRE 1 : LEGITIMITE DE LA DEPENALISATION. 9

Section 1 : La dépénalisation, une exigence propre à la société démocratique. 10

Section 2 : La dépénalisation, une limitation républicaine de la liberté de presse. 17

CHAPITRE 2 : EFFICACITE DE LA DEPENALISATION DES DELITS PRESSE. 23

Section 1 : L'accroissement des garanties et du devoir de responsabilité du journaliste. 24

Section 2 : L'élargissement de l'espace public de libre discussion. 30

Seconde partie : 37

CHAPITRE 1 : LA QUESTION DES MODALITES DE SUPPRESSION DE LA RESPONSABILITE PENALE. 38

Section 1 : Dépénalisation des délits de presse ou de l'ensemble des manifestations de la liberté d'expression. 39

Section 2 : Le sort de la loi 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de la presse devant le juge civil. 45

CHAPITRE 2 : LES CONDITIONS LIEES A LA PROFESSION. 51

Section 1 : Les préalables liés à l'organe de presse et à ses animateurs. 52

Section 2 : Les exigences liées à l'éthique et à la qualité de l'information. 57

CONCLUSION

INTRODUCTION GENERALE

«Quand un journaliste mord un juge, il joue son rôle d'indispensable chien de garde de la démocratie; quand un juge mord un journaliste, par contre, il porte une intolérable atteinte à la liberté de presse »1(*).

Cette formule quelque peu curieuse traduit à l'évidence, les vives réactions très souvent suscitées au sein des associations de presse par la condamnation pénale d'un journaliste. On argumente à loisir qu'il est inadmissible que des journalistes continuent d'être incarcérés pour délits de presse dans un système de démocratie libérale.

Il est, en effet, significatif de constater de nos jours tout le prestige de la démocratie vu la large adhésion qu'elle recueille. De sorte que même « les Etats les plus autoritaires, les plus despotiques n'avouent jamais leur vraie nature. Ils invoquent les grands principes, la démocratie. On constate à l'analyse que même lorsqu'il ne s'agit que d'une fiction, cet hommage du vice à la vertu traduit tout le prestige de l'idée démocratique »2(*).

Dans le contexte de démocratie pluraliste et de respect des droits de l'homme mentionnés dans le préambule de la Constitution du Bénin du 11 Décembre 19903(*), la liberté d'expression, au-delà de sa valeur intrinsèque, joue un rôle essentiel dans la protection des autres droits énoncés par cet instrument. Il en est ainsi car, sans une solide garantie du droit à la liberté d'expression protégé par des tribunaux indépendants et impartiaux, il ne saurait y avoir de pays libre ou de régime démocratique. Cette proposition générale est incontestable4(*).

La liberté d'expression est donc un droit en soi, en même temps qu'un élément d'autres droits protégés par la Constitution. Sa protection se révèle indispensable pour garantir un régime démocratique et l'épanouissement de chaque être humain5(*).

Dans les systèmes juridiques d'inspiration française, les législations sur la liberté de presse ont été fortement inspirées par la loi française du 29 juillet 1881 sur la liberté de presse.

D'inspiration libérale, la loi adoptée par les législateurs de la troisième République s'inscrivait dans l'esprit de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, dont l'article 11 énonce : « la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ». La liberté de presse n'y est pas énoncée de manière spécifique. Elle se déduit de la libre communication des pensées et des opinions. Toutefois, la liberté énoncée aux termes de l'article 11 de la Déclaration précitée ne doit pas empiéter sur les autres libertés et droits fondamentaux.

Au plan universel, cette idée de liberté sauf restriction de la loi ne ressort pas directement de l'article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme. Aux termes de cette disposition : « Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ».

Au plan régional africain, la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples ne parle pas expressément de liberté de presse. Toutefois, le droit à l'information et la liberté d'expression, que consacre la Charte en son article 9, sont enserrés dans des conditions fixées par les lois et règlements6(*).

Au plan national, la liberté de presse est consacrée par la Constitution du Bénin qui énonce qu'elle est reconnue et garantie par l'Etat. Elle est protégée par la Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication (HAAC) dans les conditions fixées par une loi organique7(*). Et, les différentes lois édictées au Bénin sur la liberté de presse8(*) s'inspirent fortement du texte français de 1881 et s'inscrivent toutes dans la dynamique d'un régime de liberté contrôlée. Ce choix délibéré qui marque le régime de répression des délits de presse au Bénin cherche à réaliser un équilibre entre la liberté d'expression et la protection des citoyens et des institutions de la république.

Mais, à l'occasion des débats sur la liberté de presse et ses limites, une autre revendication inspirée du libéralisme pénal9(*) alimente les réflexions.

En effet, de plus en plus, les professionnels de presse parlent de dépénalisation des délits de presse. L'Assemblée nationale togolaise, réunie le 24 août 2004 en session extraordinaire, a adopté dans ce sens et à l'unanimité, un nouveau projet de loi portant code de la presse et de la communication.

En ces temps de suprématie des médias et des nouvelles technologies de l'information et de la communication, il nous semble intéressant de réfléchir sur cette préoccupation des acteurs des médias au Bénin à travers le thème : « la problématique de la dépénalisation des délits de presse au Bénin ».

Toutefois, la matière étant très vaste, nous avons axé le contenu de notre étude sur les règles relatives à la presse écrite, avec parfois, quelques rares incursions dans l'univers mouvant des autres moyens de communication.

Pour les exigences de clarté que requiert ce genre d'analyse, il est important de chercher à cerner les contours des concepts de dépénalisation et de délit de presse.

Selon GUILLIEN R. et VINCENT J., la dépénalisation est « une opération qui consiste à enlever à un fait son caractère d'infraction pénale »10(*). Cette définition trop concise, ne nous permet pas de cerner toutes les implications de la dépénalisation.

Se voulant beaucoup plus précis, MERLE et VITU définissent la dépénalisation en ces termes : « la dépénalisation entraîne la sortie d'un fait réprouvé hors du champ pénal traditionnel sans exclure toutefois l'idée de sanction : le fait cesse d'être infractionnel, mais il reste sanctionné administrativement ou autrement. Il y a donc désescalade dans la répression, la justice pénale étant dessaisie au profit d'une instance non pénale »11(*).

Pour l'association Journalistes En Danger (JED), « dépénaliser les délits de presse, c'est sortir les infractions commises par voie de presse du régime pénal pour en faire des infractions relevant du droit civil. En termes clairs, dépénaliser les délits de presse, c'est faire en sorte qu'aucun journaliste ne puisse aller en prison pour avoir collecter, traiter et diffuser une information, exception faite pour les incitations à la haine ethnique, raciale ou religieuse, l'apologie du crime ou de la violence et les appels au meurtre qui sont des antithèses des valeurs universelles »12(*).

Pour certains professionnels de presse, la revendication vise beaucoup plus la suppression des peines privatives de liberté pour des faits qualifiés de délits de presse. L'amende qui constitue aussi une peine pénale n'est pas toujours prise en compte. Dans cette dynamique, des analystes verront en cette démarche un emploi abusif du terme de dépénalisation13(*). Mais sans exclure les précédentes, la définition donnée par l'association JED retiendra davantage notre attention car, elle paraît suffisamment représentative des aspirations des acteurs des médias par rapport à la question de la dépénalisation des délits de presse.

Par ailleurs, en droit pénal, l'infraction que les lois punissent de peines correctionnelles est un délit14(*). C'est le sens strict du terme délit. Au sens large par contre, le délit est synonyme d'infraction. Celle-ci s'entend d'une « action ou omission, définie par la loi pénale et punie de certaines peines également fixées strictement par celle-ci »15(*).

Quant aux différentes lois régissant la matière de presse au Bénin16(*), elles sont muettes sur la question du moins pour ce qui est d'une définition du délit de presse. La loi 60-12 du 30 juin 1960 parle plutôt « des crimes et délits commis par la voie de la presse ou par toute autre moyen de publication ». La loi 97-01 du 20 août 1997 n'est pas plus explicite. Elle parle « des crimes et délits commis par les moyens d'information et de communication audiovisuelle » sans une définition du délit de presse en soi.

On retrouve dans cette dynamique les délits contre les chefs d'Etats (offense), les délits contre la chose publique, les délits contre les personnes (injure et diffamation), les publications interdites.

On pourrait déduire que chaque fois que la presse sert de moyen d'expression à une infraction, cette infraction devient un délit de presse. Le délit de presse peut donc être le fait d'un professionnel des médias ou de n'importe quel individu qui se servirait d'un support écrit ou audiovisuel propre aux médias pour commettre une infraction.

En somme, ces infractions de presse réalisent leur unité par leur structure et mode de perpétration. Ces infractions supposent en effet et essentiellement un élément de publicité et un élément moral ou intentionnel coupable.

Mais, au-delà de ces approches de définitions, deux préoccupations fondamentales permettront d'explorer l'univers controversé17(*) de la dépénalisation des délits de presse au Bénin. Ces deux préoccupations prennent leur source dans la question de savoir quel intérêt y aurait-il, dans un régime de démocratie libérale, à soustraire le journaliste du champ des peines privatives de liberté chaque fois qu'il commet une infraction qualifiée de délit de presse ?

En effet, entrés pleinement dans l'ère des techniques et de l'économie de marché, les médias connaissent un surcroît de puissance mais présentent aussi des risques nouveaux. Peut-on dans un tel contexte, assurer la qualité de l'information par la suppression des peines privatives de liberté au profit des professionnels de la presse?

Que faire en définitive pour que l'information soit non seulement libre, mais fiable et digne de confiance pour permettre à l'opinion de comprendre et de juger, en d'autres termes, pour contribuer à la démocratie ?

Pour répondre à ces préoccupations, il importera d'abord d'apprécier l'intérêt qui serait attaché à une discrimination positive en faveur des délits de presse dans un régime de démocratie libérale (1ère partie).

Cette démarche permettra d'analyser les éléments de légitimité de la dépénalisation des délits de presse au Bénin (Chapitre 1) ainsi que la question de son efficacité dans un régime de démocratie libérale (Chapitre 2).

Mais, ce premier essai ne suffira pas à cerner toutes les exigences de la dépénalisation des délits de presse au Bénin car, la souplesse sollicitée du législateur à travers la dépénalisation est une option qui nécessite un certain nombre de garanties.

En effet, si la suppression des peines de prison au profit des journalistes est concevable dans un régime démocratique, sa mise en oeuvre requiert assurément des préalables (2ème partie). Ces préalables tiennent d'une part à l'étendue de la mesure de dépénalisation (Chapitre 1) et d'autre part à des exigences liées à la profession de journaliste elle-même (Chapitre 2). La démarche consistera à vérifier si dans les faits, le contexte béninois actuel d'expression de la liberté de presse satisfait à ces préalables.

Première partie :

Intérêt d'une discrimination positive en faveur des délits de presse.

La démocratie et la presse sont liées par un rapport originel.

En effet, la liberté de presse, en tant que composante de la liberté d'expression, est un droit fondamental de l'homme qui trouve son épanouissement dans un système démocratique.

Il s'ensuit que l'état de la liberté de presse est, par conséquent, un précieux indicateur de celui de la démocratie car, toute évolution portant sur le statut de l'opinion que la presse contribue à forger en indique immédiatement sur celui de la démocratie18(*).

Cette considération suffit pour reconnaître quelque intérêt au débat sur la dépénalisation des délits de presse dans un contexte de démocratie libérale.

A côté de cette considération d'ordre général, la question de l'intérêt de la dépénalisation dans un régime démocratique sera analysée sous le double angle de la légitimité d'une telle revendication (Chapitre I) et de l'efficacité de cette mesure dans un régime démocratique (Chapitre II).

CHAPITRE 1 : LEGITIMITE DE LA DEPENALISATION.

Le débat sur la dépénalisation des délits de presse tire sa légitimité de deux considérations.

Il s'agit d'une part de l'importance du rôle reconnu à la presse dans une société démocratique. Tous les gouvernements quel que soit le régime politique dont ils relèvent, recherchent le soutien ou l'approbation de la population pour la conduite de leurs politiques19(*). Et cette population est touchée par les moyens de communication de masse.

Par ailleurs, la presse dans un régime démocratique offre une enceinte au débat public afin de donner à l'opinion les moyens de se faire entendre. A ces différents titres, la presse et les médias en général, du fait qu'ils s'adressent à l'ensemble de la population, complètent et renforcent l'action du parlement. La dépénalisation des délits découlant de cette activité est une revendication qui trouve donc à s'exprimer uniquement dans une société qui reconnaît l'existence de la presse et lui assure les moyens de son fonctionnement (Section 1).

D'autre part, cette problématique de la dépénalisation puise sa légitimité dans une nécessaire définition des limites de la liberté de presse dans une société démocratique (Section 2).

Section 1 : La dépénalisation, une exigence propre à la société démocratique.

Le constat, qui chaque jour se précise au niveau de la pratique judiciaire au Bénin en matière de mise en oeuvre de la responsabilité pénale de la presse, est celui des nombreuses condamnations avec sursis des professionnels de la presse20(*).

Cette étape du fonctionnement du système de responsabilité ne pose véritablement pas de problème au sein de la corporation des journalistes21(*). Ces derniers au demeurant se satisfont de ces condamnations avec sursis et se réjouissent de cette situation dans laquelle des infractions pénales établies en tant que telles par le pouvoir législatif ne sont quasiment plus poursuivies par le pouvoir judiciaire.

Mais, cette attitude de plus en plus marquée des juges est en fait une tendance propre au système de démocratie libérale caractérisé entre autre par une forte exaltation du droit d'informer et du droit du peuple à l'information22(*). Au coeur de cette tendance subsiste une question ancienne, celle de la nécessité de la responsabilité pénale de la presse dans un régime de démocratie libérale.

Paragraphe 1 : L'exaltation du droit du peuple à l'information.

Le droit du peuple à l'information a été fermement agité lors des discussions sur le projet de loi sur la presse en 188123(*), loi qui aujourd'hui demeure le fondement juridique de la liberté de presse en France.

Mais, le combat perdu des partisans de la liberté absolue de la presse n'a pas pour autant épuisé la question de la nécessité de la responsabilité pénale de la presse.

A. Le combat perdu des partisans de la liberté absolue de la presse.

La problématique de la dépénalisation des délits de presse fait à nouveau retentir les échos d'un vieux débat sur la loi de 1881 sur la liberté de la presse. Ce vieux débat opposa les partisans d'une liberté illimitée et ceux d'une liberté de la presse régulée par une loi spéciale24(*).

Déjà, à l'occasion de ce débat sur la relativité ou non de la liberté de presse, des tendances visant à soumettre le régime des délits de presse au droit commun de la responsabilité civile ont été clairement affirmées25(*).

De sorte que quand le projet de loi sur la presse arriva le 25 janvier 1881 devant la Chambre des députés que présidait Léon GAMBETTA26(*), la question préliminaire était de savoir : à quoi bon une loi spéciale ? La liberté de presse exigeait-elle autre chose que le droit commun par analogie au droit anglais et américain ? Les partisans de la liberté absolue de la presse avaient déposé un amendement tenant en quelques mots : « il n'y a pas de délits spéciaux de la presse, quiconque fait usage de la presse ou de tout autre moyen de publication est responsable selon le droit commun »27(*).

Dans cette dynamique, le doyen de la presse française Emile de Girardin28(*) suggérait que la loi sur la presse ne devrait comporter qu'un unique paragraphe : « Tous les articles de presse seront signés et l'article 1382 du Code Civil sera la seule sanction qui sera appliquée »29(*).

Pour d'autres, cette loi devrait consacrer une liberté de presse qui interdise au pouvoir législatif lui-même de la restreindre ainsi que cela est établi aux Etats-Unis d'Amérique30(*).

C'est surtout l'ancien ministre de l'Intérieur Floquet qui mènera le combat contre le régime dérogatoire. Il fera remarquer en ce sens que : « les lois libérales ont été inutiles contre les coups d'Etat, les répressions ont été inutiles contre les révolutions (...) Il s'agit de savoir si nous voulons continuer à entasser les unes sur les autres des lois inutiles ou si nous voulons entrer dans une voie nouvelle»31(*). Cette voie nouvelle selon Floquet, c'est le droit commun et rien d'autre. Et, le droit commun en matière préventive, c'est l'absence d'entrave pour le citoyen qui veut écrire sur les affaires de son pays, aucune entrave différente de celles qui entourent tous les autres citoyens.

Du point de vue civil, le droit commun a son siège dans l'article 1382 du Code civil qui rend chacun responsable de son fait, de sa faute et l'oblige à réparer le dommage qu'il a causé. Le combat des partisans de la liberté absolue de la presse n'aura pas été totalement inutile. Ils ont obtenu des satisfactions non négligeables. Ainsi, par exemple, toute trace de délit d'opinion est effacée.

Néanmoins, la liberté de la presse sera garantie par la République et aménagée par elle, contrairement à la conception de Common law britannique et à celle américaine aux termes desquelles la liberté de la presse est assurée par l'abstention de l'Etat32(*).

En somme, le débat ouvert en août 1789 sur la question de savoir jusqu'où la liberté d'expression est tolérable, a été provisoirement clos33(*) par une loi unique, celle du 29 juillet 1881. La loi 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de presse au Bénin traduit dans son contenu, les principes consacrés par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de presse.

Mais, plus de deux siècles après 1881 et à la faveur du vent de démocratisation qui souffle sur le continent africain, les interrogations sur les libertés individuelles font encore une fois place à la question de la nécessité de la responsabilité pénale de la presse.

B. La question de la nécessité de la responsabilité pénale de la presse

La tendance du juge à une véritable protection des professionnels de presse est remarquable. En matière de presse, les peines privatives de liberté ne sont quasiment pas prononcées. Dans les cas où elles le sont, la décision est souvent assortie de sursis. Mais, devons-nous nous réjouir de cette impunité pénale de fait ?

La condamnation du journaliste a des dommages et intérêts peut-elle offrir une forme de réparation sociale suffisante ? C'est tout le sens du débat sur la dépénalisation. Débat à l'occasion duquel les partisans de la dépénalisation tentent de démontrer que, dans le domaine de la presse, une responsabilité pénale n'est plus nécessaire notamment en ce qui concerne les peines privatives de liberté. On peut déjà remarquer la nette avancée réalisée par la loi n° 97-010 du 20 août 1997 portant libéralisation de l'espace audiovisuel et dispositions pénales spéciales relatives aux délits en matière de presse et de communication audiovisuelle en République du Bénin en ce qui concerne la détention préventive34(*).

Intervenant au sujet du recours systématique des plaideurs à la juridiction civile en Belgique, Robert LEGROS affirme que « (...) le fait qu'on ait limité les recours jusqu'à présent à l'action civile (devant les tribunaux belges) n'a pas causé grands troubles. Ce n'est pas une sanction, c'est une réparation qui est tout de même marquante. Et cette réparation d'ailleurs, à une époque où on parle de dépénalisation et notamment de médiation pénale, pourrait être considérée comme suffisante, surtout quand les dommages et intérêts sont élevés et la publication du jugement ordonnée »35(*).

Dirk VOORHOOF à ce sujet, qualifie d'évolution positive la dépénalisation de facto des délits de presse devant les tribunaux belges et le recours systématique aux procédures civiles fondées sur l'article 1382 du Code civil.

Pour lui, les sanctions civiles en matière de presse méritent d'être soutenues, d'autant plus que la jurisprudence des tribunaux civils témoigne en général d'une appréciation équilibrée des intérêts en présence36(*).

Dans le même sens, Michel HANOTIAU s'interroge sur l'utilité sociale d'une condamnation pénale. « L'honneur des personnes en est-il mieux réparé ? Ne faut-il pas craindre que la menace de la sanction n'effraie que les journalistes consciencieux et qu'elle exerce plutôt une sorte de fascination sur les autres (ou soit pour eux une occasion de publicité) ? »37(*) 

Cette interrogation révèle bien que dans le monde de la presse comme dans toute société humaine, il y a des brebis saines et des brebis galeuses. Elle montre également l'importance de la fonction d'amendement du délinquant que doit remplir la sanction pénale. Si cette fonction n'est pas remplie, la sanction devient inutile et doit être repensée.

Dans l'appréciation qu'il fait de la situation de fait qui a cours devant les tribunaux belges et qui est caractérisée par le fait qu'aucun délit de presse n'est plus envoyé devant la Cour d'assises en Belgique, Jan VELAERS considère que la responsabilité pénale a, à force de non efficacité, prouvé son inutilité. Pour lui, « dès lors que, pendant cinquante (50) ans, aucun délit de presse n'a été poursuivi, c'est un commencement de preuve que, dans notre société, il n'est pas réellement nécessaire de poursuivre pénalement les délits de presse »38(*).

Mais, dans le cadre d'un tel argument, on pourrait objecter que si les délits de presse ne sont plus poursuivis au pénal en Belgique, c'est moins une question d'efficacité de la sanction pénale qu'une défaillance imputable à la politique des poursuites.

Ce qui est constant est que cette absence de poursuite est motivée par la sauvegarde d'une valeur supérieure à savoir la démocratie dont la presse en est l'indispensable chien de garde39(*).

La dépénalisation des délits de presse est par conséquent une exigence conforme aux textes fondamentaux.

Paragraphe 2 : Une exigence conforme aux textes fondamentaux.

Fondamentalement, la liberté de presse est une liberté dont la proclamation s'accompagne immanquablement de limitations.

Le débat sur la dépénalisation, contrairement aux critiques, ne tend pas à soustraire les infractions de presse à la sanction. La légitimité du débat découle de ce qu'il conserve toujours à la liberté de presse son caractère de liberté relative (A). Et une telle démarche est d'autant plus légitime qu'elle pourrait être perçue comme une exigence en faveur de la démocratie (B).

A. Le maintien de la relativité de la liberté de presse.

Ainsi que le fait remarquer Pierre LEGROS citant Patrick de FONTBRESSEN, « dans une société démocratique, l'exercice d'une liberté, fut-elle le pilier de la défense des droits fondamentaux, ne peut se justifier par la commission d'infractions, à peine de contester la légitimité des règles d'ordre public, et par là même, du système tout entier »40(*).

En effet, il n'appartient à la presse ni de salir injustement l'honneur d'un homme, ni de publier par exemple des informations de nature à mettre en péril la défense nationale.

Le débat sur la dépénalisation, qui du reste n'a de sens que dans une société démocratique, ne rejette pas cette exigence attachée à la société libérale en tant que cadre de fixation des limitations nécessaires à la lutte contre l'autoritarisme et la dissolution du lien social.

A l'évidence, les critiques contradictoires sont des exigences du libéralisme quand elles restent enserrées dans des conditions bien précises.

Aux termes de l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, « la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ».

Quant à l'article 24 de la Constitution du Bénin du 11 décembre 1990, il dispose : « la liberté de presse est reconnue et garantie par l'Etat. Elle est protégée par la Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication dans les conditions fixées par une loi organique ».

Cette proclamation qui fait de la liberté de presse une liberté constitutionnelle, ne manque pas de préciser qu'elle s'exerce dans des conditions fixées par une loi organique. Et, la loi béninoise n° 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de presse, fortement inspirée du texte français de 1881 répond abondamment sans le mentionner, à la seconde partie de l'article 11 de la déclaration de 178941(*). Car, le contenu de ce texte déjà en son article premier ne mentionne que l'imprimerie et la librairie42(*) en annonçant ainsi la relativité de la liberté de presse. Sans doute pourra-t-on en déduire la liberté de presse, mais juridiquement, c'est la liberté de publication ou de diffusion que le texte consacre et non celle d'une entité appelée presse, autonome et destinée à jouer un rôle social et démocratique.

La question de la dépénalisation des délits de presse trouve sa légitimité dans la circonstance qu'elle ne remet pas en cause cet équilibre essentiel réalisé par la Constitution. La liberté de presse conserve toujours à l'intérieur de ce débat, son caractère de liberté relative. Car, la répression des abus de cette liberté n'est pas remise en cause par le débat sur la dépénalisation. Il s'agit plutôt d'analyser à la fois la proportionnalité des sanctions édictées par la loi béninoise sur la liberté de presse pour y ressortir son efficacité. Toute la question est donc de savoir quel mode de sanction doit lui être appliqué ?

En tout état de cause, cette sanction doit être en faveur du processus démocratique. Et la dépénalisation semble en être une exigence.

B.Une exigence en faveur de la démocratie.

La presse, communément appelée le quatrième pouvoir, est un atout nécessaire dans l'édification d'un Etat démocratique. Toutefois, ce pouvoir à l'instar de tout pouvoir devient dangereux et peut même ruiner le processus démocratique par l'inconscience de certains de ses membres43(*). Le souci de tout Etat a donc toujours été de limiter la liberté de la presse en prévoyant et en réprimant certains comportements érigés en infraction44(*).

Cependant, il faudra veiller à ce que, en limitant la liberté de la presse, l'on ne persécute pas les professionnels de la presse. Les limitations de cette liberté doivent être conçues dans le seul but de sauvegarder la démocratie et non de protéger les tenants du pouvoir.

D'ailleurs, il n'y a quasiment pas de procès en diffamation dans les régimes de dictature puisque les journalistes dans un tel régime sont sous le contrôle de l'Etat employeur. Les procès en diffamation ou injure se révèlent donc comme des sujets qui n'ont valablement cours que dans un système où la liberté d'expression est reconnue et garantie au citoyen. Un système qui assure l'existence et l'épanouissement d'une opinion plurielle. Et, on admet avec Patrice ROLLAND que « si l'opinion est la reine du monde, la démocratie libérale est le régime qui met en forme sa souveraineté »45(*).

Ceux qui oeuvrent à forger cette opinion essentielle pour la vie démocratique doivent bénéficier d'un traitement de faveur. La sanction à infliger aux contrevenants à la liberté de presse doit viser la sauvegarde de la démocratie.

La dépénalisation permet donc de démocratiser la société en consolidant la liberté de presse. Vu sous cet angle, la dépénalisation vise d'abord l'assouplissement de l'arsenal répressif.

Le législateur dans une telle démarche ne doit conserver les peines privatives de liberté que pour des infractions revêtant un certain degré de gravité. A l'évidence, on s'accorde sur l'idée que les crimes commis au moyen de la presse ne sauraient faire l'objet de dépénalisation.

Perçue dans ce cadre, la dépénalisation s'analyse plutôt en une limitation républicaine de la liberté de presse.

Section 2 : La dépénalisation, une limitation républicaine de la liberté de presse.

A la différence des régimes démocratiques, les régimes autoritaires, pour reprendre l'expression de Maurice KAMTO, se caractérisent doublement par le refus du pouvoir partagé et le refus du pouvoir contrôlé46(*). Dans un tel contexte, aucun débat portant sur le thème de cette étude ne saurait prospérer.

En revanche, seul un système démocratique peut légitimer une telle préoccupation. L'explication vient du fait que la liberté de presse est un fondement essentiel de la société démocratique. De sorte qu'une discrimination positive qui consisterait à dépénaliser certaines infractions de presse devient un mécanisme de promotion du rôle de la presse.

Paragraphe 1 : La liberté de presse, un fondement essentiel de la démocratie.

« Si l'opinion est la reine du monde, il faut convenir que la démocratie est le régime politique qui met en forme sa souveraineté. Démocratie et opinion sont donc liées par un rapport originel »47(*).

Cette pensée insiste sur la relation d'interdépendance qui existe entre la démocratie et la presse par le biais de l'opinion que cette dernière contribue à forger.

En effet, la démocratie constitue sans nul doute le cadre par excellence d'éclosion et de protection de la liberté de presse qui, elle-même contribue à l'épanouissement des libertés individuelles. De sorte que toute sanction des manifestations de cette liberté fondamentale et essentielle en démocratie doit tenir compte de ce « rapport originel ».

A.La démocratie cadre d'éclosion et de protection de la liberté de presse.

La floraison des journaux au lendemain du renouveau démocratique au Bénin apporte la preuve du terrain fertile que constitue la démocratie pour la presse.

Pendant longtemps, le monolithisme médiatique caractéristique des années de dictature militaire, ne permettait la circulation spontanée de l'information que de façon informelle48(*). Il ne pouvait y avoir de procès en diffamation car, ainsi qu'il a été souligné, les journalistes, ayant pour seul employeur l'Etat, ne diffamaient pas puisque leurs articles passaient à la censure des pouvoirs publics.

La question de la dépénalisation n'était à l'époque pas opportune puisque les journalistes n'exerçaient pas librement leur fonction. A contrario, la volonté affirmée des conférenciers à la Conférence Nationale des Forces vives de la nation béninoise de faire du renouveau médiatique le support du renouveau démocratique49(*) a, effectivement, conduit à l'éclosion d'une presse écrite privée et très souvent virulente. Une nouvelle forme de journalisme, fondée sur le commentaire et l'opinion émergea. Et, les sujets habituellement tabous (malversations financières, conditions de détention, etc.) sont révélés au public avec un soutien manifeste de la population.

A l'évidence, la démocratie a été au Bénin, le cadre d'éclosion de la liberté de presse. La consécration de l'entière souveraineté de l'opinion pourrait être de soustraire les journalistes des peines privatives de liberté pour les fautes commises dans le cadre de l'exercice de leur fonction, sauf si ces fautes sont de nature criminelle.

Mais, ainsi formulé, la simplicité du schéma ne résiste assurément pas à la question de savoir si la liberté de presse dont la démocratie marque l'accession à la souveraineté ne peut pas devenir dangereuse pour la démocratie elle-même surtout lorsqu'elle est détournée de son objectif ?

S'il est évident, que la liberté de presse doit être limitée, il reste cependant que cette limitation ne saurait se faire comme dans n'importe quel régime politique50(*). Car, se faisant, la démocratie perdrait ce qui la différencie des régimes non démocratiques. Ici apparaît tout le sens de la suppression de certaines sanctions pénales et du maintien à l'encontre du professionnel de presse, d'amende, de sanctions civiles et disciplinaires, en tant que modes par excellence de répression des abus de cette liberté.

Cette discrimination est d'autant plus légitime que la liberté de presse reste un facteur objectif d'épanouissement des autres libertés individuelles et collectives.

B. La liberté de presse, facteur de promotion de la liberté humaine.

On pourrait conjecturer que la dépénalisation des délits de presse est une forme moderne de promotion de la liberté de presse51(*), elle-même liée à la promotion de la liberté humaine.

En effet, une presse libre et responsable, à l'abri de l'épée de Damoclès que constituent les peines privatives de liberté, a assez souvent une influence positive dans tout pays.

Pour que les citoyens puissent jouer un rôle actif dans la vie économique et politique de leur pays, ils doivent être informés52(*). Même le fait de voter peut s'avérer difficile si l'on ne dispose pas d'informations suffisantes. Une presse libre transmet au peuple des informations sur ses dirigeants, sur les politiques des autres nations et même sur leurs pratiques économiques et sociales.

Le culte ainsi voué à la liberté de presse à travers la dépénalisation des délits de presse repose ici sur la conviction que, lorsque les citoyens comprennent pleinement la situation et l'état des choses dans leurs pays et dans le monde, ils choisissent des institutions politiques et adoptent des pratiques qui préservent et protègent de manière optimale les libertés civiles et les droits fondamentaux de l'homme. Cet environnement devient un «marché des idées» où les citoyens et les consommateurs opèrent des choix et accordent leur appui aux idées qui leur semblent les plus valables.

Un tel système assure l'obtention de meilleurs résultats sans empêcher quiconque d'exprimer son point de vue. Toutes ces convictions fondent le premier Amendement de la Constitution des Etats Unis qui dispose : «Le Congrès ne fera aucune loi (...) qui restreigne la liberté de la parole ou de la presse (...) ».Cet axiome fondamental de la démocratie américaine justifie tout l'arsenal de lois qui protègent les droits des médias de façon impressionnante et qui fait de la presse des Etats-Unis, du moins en théorie, l'une des plus libres au monde.

A l'inverse, là où les journalistes sont empêchés d'exercer leur métier, par l'intimidation voire la violence physique, on peut être sûr que le sort des libertés en général n'est guère plus enviable. Au Bénin, les lois n° 60-12 du 30 juin 1960 et n° 97-010 du 20 août 1997 instaurent la liberté de la presse. Mais, elles dressent aussi un catalogue conséquent de limites, d'interdictions et de sanctions. Ce schéma ne demeure pas moins conforme à la démocratie. Pourtant, malgré ces limites fixées par la loi, une tendance plus libérale se répand53(*). Elle est motivée par la nécessité de promouvoir le rôle de la presse.

Paragraphe 2 : La dépénalisation, mécanisme de promotion du rôle de la presse.

Au Bénin comme ailleurs, la presse a toujours joué un rôle prépondérant dans l'avènement de la démocratie. Mais en plus, elle oeuvre également au respect des principes fondamentaux de cette forme d'organisation sociale.

La presse à travers ce rôle se pose comme « l'indispensable chien de garde de la démocratie »54(*).

A. Rôle de la presse béninoise dans l'avènement de la démocratie.

Le traitement particulier sollicité en faveur de la presse prend également sa source dans l'importance de son rôle. Au Bénin, l'instauration progressive de la démocratie depuis l'historique Conférence des Forces vives de la Nation tenue en 1990 est aussi le résultat du sérieux effort consenti par la presse.

Dans le monde entier, les médias indépendants constituent l'une des forces les plus puissantes dans la lutte engagée pour transformer les régimes fermés et répressifs en sociétés ouvertes et productrices.

La Gazette du Golfe et Tam-Tam Express qui virent successivement le jour en mars 1998 et en juin de la même année font partie au Bénin de la génération de la presse qualifiée de pionniers dans l'avènement de la démocratie au Bénin.

Apparus avant même la transition démocratique, ces organes ont joué un rôle moteur dans la lutte pour l'émergence d'une société démocratique pluraliste au Bénin55(*).

Ces organes de presse se sont fait les relais de la contestation sociale en dénonçant les malversations du régime du Président Mathieu KEREKOU et en suscitant la réflexion au sein du peuple. Après la Conférence nationale et à la veille des élections, de nombreux autres titres ont vu le jour. Cette éclosion spectaculaire des médias et leur degré d'engagement continuent de frapper l'observateur jusqu'à ce jour. Leur rôle au cours de la transition démocratique reste d'une grande importance.

En effet, la transition démocratique et l'émergence du pluralisme médiatique ont induit de profondes mutations structurelles au niveau gouvernemental56(*).

Dans cette dynamique, le Ministère de l'Information, de la Sécurité et de l'Orientation Nationale (MISON), a été changé en Ministère de la Culture et de la Communication. Il était devenu délicat de laisser subsister dans un régime démocratique, un Ministère de l'Information. En conséquence, la Direction de l'Information et de la Propagande, instance suprême de contrôles et de censure, a été remplacée par deux autres Directions à savoir celle de la presse écrite et celle de la presse audiovisuelle.

Par ailleurs, la presse s'est vue décerner une motion spéciale de félicitation pour son rôle d'information des populations sur les assises de la conférence nationale. Cette motion spéciale de félicitation est ainsi libellée. « Considérant que le travail d'information fourni par la presse nationale a été un puissant appui et a joué un rôle déterminant pour le succès des travaux, la conférence nationale des forces vives de la nation félicite les journalistes béninois pour leur soutien à la lutte du peuple béninois, pour leur talent, leur professionnalisme confirmé et leur dévouement au service de la nation. Elle leur lance un appel pour qu'ils continuent d'apporter leur soutien à la lutte du peuple béninois pour l'instauration de la démocratie »57(*). Seize (16) années après, ce rôle prépondérant sera confirmé sur le plan international par la position de leader que la presse béninoise va successivement occuper58(*).

Au-delà de la satisfaction générale, c'est plutôt le rôle de « chien de garde de la démocratie » que la presse béninoise est invitée à jouer avec davantage de professionnalisme.

B. La presse, chien de garde de la démocratie.

Cette ultime justification de la légitimité de la dépénalisation prend sa source dans le rôle que la presse est conviée à jouer pour assurer désormais le bon fonctionnement des institutions en régime démocratique. Considérée comme le quatrième pouvoir, c'est ici que la presse joue son rôle fondamental d'organe de surveillance des agissements des représentants du pouvoir public et de leurs collaborateurs.

Les médias, dans ce cadre agissent comme des acteurs isolés des mouvements sociaux59(*) mais, deviennent aussi un contre-pouvoir terrifiant à travers leur stratégie d'information et de dénonciation.

Dans ce rôle, la presse alerte le public sur les menaces qui pèsent sur les libertés. Que ces menaces soient le fait des gouvernants ou d'autres puissances.

Au Bénin, les alertes inlassables de la presse contre les velléités de révision de la Constitution60(*) ont donné de l'envergure aux différents mouvements de la société civile. Son rôle dans la surveillance du fonctionnement des institutions au cours des échéances présidentielles de mars 2006 a également été d'une importance capitale dans l'issue pacifique de ces consultations.

Sur le plan international, on n'a de cesse à citer les grandes alertes de la presse. Pour nous en tenir à quelques exemples, c'est le journalisme d'investigations qui a mis à jour les conditions dans lesquelles les services secrets français ont coulé le RAINBOW WARRIOR61(*) affrété par une association hostile aux essais nucléaires français dans le Pacifique. On cite également la récente affaire de financement occulte dénommée l'affaire CLEARSTREAM62(*).

Cette fonction capitale qui fait craindre la divulgation des abus stimule les pouvoirs publics au respect des règles du jeu démocratique. Elle devient une condition essentielle de l'ordre démocratique d'un Etat.

Dans leur rôle de sauvegarde des principes et valeurs démocratiques, les médias agissent également comme acteurs à part entière des mouvements sociaux63(*). Porte flambeau des aspirations populaires, ils sont également un espace de mise en scène de ces mouvements sociaux64(*).

Pour que la presse exerce pleinement ces rôles, elle doit bénéficier de plus de garanties et de protection. La soustraction de certains actes du journaliste du champ pénal et notamment des peines privatives de liberté devient une légitime exigence.

Mais, la légitimité de la revendication d'une dépénalisation des délits de presse n'épuise pas la question de l'intérêt de cette discrimination positive en faveur de la presse. C'est pourquoi, il importe de s'appesantir également sur l'efficacité que pourrait revêtir cette démarche dans un régime démocratique.

CHAPITRE 2 : EFFICACITE DE LA DEPENALISATION DES DELITS                           PRESSE.

Il n'est assurément pas superflu de rappeler que la liberté de la presse est une liberté essentielle en démocratie. C'est pourquoi toute réflexion portant sur la liberté de presse, corollaire de la liberté d'expression suscite un intérêt certain.

Or, cette liberté est en conflit permanent avec d'autres droits qui viennent fixer les bornes de son empire65(*). Le droit à la vérité dont elle procède n'étant, lui-même, pas absolu. Par conséquent, tout débat sur le régime juridique des infractions qui découlent de l'exercice de cette liberté tend véritablement à modifier les données de ce conflit nécessaire à la coexistence de chacun des droits.

C'est pourquoi, au-delà de la légitimité, la question de l'efficacité de la dépénalisation des délits de presse reste à élucider.

Dans un processus démocratique en consolidation comme c'est le cas au Bénin, quelle efficacité peut-on espérer d'une option de dépénalisation des délits de presse ?

A l'analyse, l'efficacité de la dépénalisation des délits de presse dans le contexte béninois doit être recherchée à deux grands niveaux.

D'abord, sur le plan de l'accroissement des garanties et du devoir de responsabilité du journaliste (section 1).

Ensuite, les résultats de cette approche du traitement des délits de presse doivent être appréciés par rapport à l'élargissement de l'espace public de libre discussion (section 2).

Section 1 : L'accroissement des garanties et du devoir de responsabilité du journaliste.

Les garanties dont il s'agit s'analysent en termes de sécurité juridique élargie en faveur du journaliste. (Paragraphe 1). A côté de cet élément d'importance, la dépénalisation loin d'être perçue comme une situation d'impunité en faveur du journaliste peut à terme favoriser une plus grande responsabilité de ce dernier. (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Le besoin de sécurité du journaliste

Les animateurs de presse recherchent à travers la dépénalisation un élargissement du champ des garanties qui président à l'exercice de leur métier (A). Ce besoin n'a certes pas encore rencontré l'assentiment du législateur, mais il se dégage en pratique une attitude de souplesse dans l'exécution des décisions de condamnation des journalistes au Bénin (B).

A.Garantie du besoin de sécurité du journaliste.

Il est à remarquer que le régime procédural dérogatoire de droit commun mis en place par les différentes lois sur la liberté de presse au Bénin constitue déjà une garantie substantielle pour le journaliste66(*).

Toutefois, au sein de la corporation des journalistes, l'on s'accorde aujourd'hui sur le fait que la presse ne peut véritablement accomplir la mission d'informer qui est la sienne tant que sera suspendue sur la tête de chaque journaliste l'épée de Damoclès que constituent les peines privatives de liberté.

Ce besoin de sécurité agité par les journalistes dès 1996 et à l'orée de la loi sur la libéralisation de l'espace audiovisuel, visait à modifier le contenu de la loi 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de la presse au Bénin, notamment en y retranchant purement et simplement les peines d'emprisonnement et en allégeant par la même occasion les peines pécuniaires.

Curieusement, la loi 97-010 du 20 août 1997 portant libéralisation de l'espace audiovisuel et dispositions pénales spéciales relatives aux délits en matière de presse et de communication audiovisuelle en République du Bénin, s'est révèlée plus sévère.

En effet, le législateur a, non seulement maintenu les peines d'emprisonnement mais encore, a multiplié par cent le minimum des peines d'amendes et en moyenne par deux (02) le maximum desdites sanctions pécuniaires. Les valeurs de référence étant les montants des peines pécuniaires minimales et maximales prévues par la loi 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de presse au Bénin.

Ainsi, en est-il par exemple de la diffamation envers les particuliers précédemment prévue par l'article 27 de la loi 60-12 du 30 juin 1960 et punie dans une fourchette de cinq mille (5.000) F CFA à deux millions (2.000.000) F CFA.

La condamnation pécuniaire résultant de la sanction de cette infraction par les tribunaux varie désormais aux termes de la loi 97-010 entre 500.000 et 5.000.000 F CFA. Ici se pose encore l'implacable question de la nécessité de la responsabilité pénale du journaliste ainsi que celle de l'efficacité des sanctions pécuniaires excessives pour les organes de presse au Bénin.

Ne faudra t-il pas craindre, comme s'interroge HANOTIAU, que la menace de la sanction n'effraie que les journalistes consciencieux et qu'elle exerce une sorte de fascination sur les autres ou soit pour eux une occasion de publicité ?67(*)

Même si cette vision des choses n'est pas encore partagée au Bénin, il se dégage une forte tendance à la protection du journaliste. Et cela transparaît dans l'exécution des décisions de justice.

B.L'attitude de souplesse dans l'exécution des décisions de justice.

Aux termes du Rapport national sur l'état de la liberté de la presse au Bénin, deux cent trente deux (232) décisions de condamnation consécutives au traitement des affaires de presse ont été prononcées de 1999 à 2005 sur un total connu de 355 plaintes68(*). L'espace couvert par ce Rapport étant celui des Cours d'Appel de Cotonou et de Parakou, des tribunaux de première instance de Cotonou, Porto-Novo, Lokossa, Abomey, Ouidah, Natitingou, Parakou et Kandi69(*).

Ce rapport fait certes état de la prédominance des décisions de condamnation survenues durant la période et l'espace de réflexion choisis.

Les auteurs dudit Rapport expliquent cette situation à travers deux grandes considérations. Il s'agit d'une part de la méconnaissance par les journalistes des règles édictées en vue de leur permettre de s'assurer une défense efficace et d'autre part, de la méconnaissance par certains magistrats des spécificités de la presse70(*).

Mais, à l'observation, l'exécution des décisions de condamnation des journalistes instaure une situation de fait en faveur du journaliste.

On observe en effet, que malgré une décision de condamnation ferme, le condamné recouvre sa liberté après un bref séjour carcéral. C'est le cas de monsieur Vincent FOLY, Directeur de publication du quotidien le Point au Quotidien, incarcéré à la prison civile de Cotonou le 26 janvier 2000 en exécution d'une décision judiciaire l'ayant condamné par défaut à six (06) mois d'emprisonnement ferme. Le premier février 2000 cependant, soit quatre jours après, il est mis en liberté71(*).

De même, monsieur Jean-Baptiste HOUNKONNOU, Directeur de publication du quotidien Nouvel Essor avait été incarcéré à la prison civile de Parakou le 16 mars 2004 à la suite d'une décision de condamnation à six (06) mois d'emprisonnement ferme pour diffamation. Mais, à la suite de l'examen du dossier par la Cour d'Appel de Parakou, le journaliste a recouvré sa liberté72(*).

On citera à l'occasion l'exemple de monsieur Patrick ADJAMONSI, Directeur de publication du quotidien l'Aurore, arrêté et écroué à la prison civile de Cotonou le 13 août 2004, suite à une condamnation à six (06) mois d'emprisonnement ferme dans un procès en diffamation. Après sept (07) jours de détention carcérale, il recouvre également sa liberté73(*).

Cette constante qui subsiste dans l'exécution des décisions de condamnation des journalistes montre le malaise des tribunaux de voir écrouer pendant longtemps un journaliste bien que reconnu coupable de délit de presse. Les infractions récurrentes étant l'injure et la diffamation.

Par ailleurs, la fréquence des relaxes prononcées en faveur de ces journalistes fait présumer de la conscience que les tribunaux ont de ce malaise ou du caractère trop répressif des textes béninois sur la liberté de la presse.

En ce sens, François AWOUDO remarquera que « l'état des jugements en diffamation témoigne largement l'indulgence des juges »74(*).

De sorte qu'aujourd'hui au Bénin, il est une réalité tangible qu'aucun journaliste ne croupit en prison pour un délit de presse encore moins pour ses convictions politiques75(*).

En tout état de cause, Reporters Sans Frontières (RSF) en rendant public son Rapport 2005 sur l'état de la liberté de la presse dans le monde a classé le Bénin vingt-cinquième (25ème) pays au rang mondial et premier (1er) sur les cinquante-trois (53) Etats du continent africain.

Mais, au lieu de se satisfaire de cette situation dans laquelle des condamnations prononcées ne sont pas totalement exécutées, n'est-il pas opportun de consacrer la suppression des poursuites pénales pour ces infractions de presse qui, en pratique ne sont plus sanctionnées ?

Le journaliste et ses sources d'informations se sentiraient plus confortés dans leur devoir d'informer le peuple à travers une information de qualité.

Paragraphe 2: La qualité de l'information.

Le mouvement de dépénalisation peut se révéler décisif dans l'amélioration de la qualité de l'information actuellement distillée par la myriade d'organes de presse existante compte tenu de la disponibilité qu'elle induirait au niveau des sources d'information (A).

Il n'est, en effet, pas exclu que la mesure de dépénalisation des délits de presse forge le sens d'engagement des sources journalistiques et l'engouement des professionnels de presse pour le journalisme d'investigations (B).

A. La disponibilité des sources d'informations.

Le besoin soulevé par les sources journalistiques est la traditionnelle garantie de confidentialité. A ce besoin, la Cour de Strasbourg a répondu par la protection des sources journalistiques en tant que l' « une des pierres angulaires de la liberté de presse »76(*)

Il est vrai que dans l'arrêt Goodwin C/ le Royaume Uni, la Cour de Strasbourg ne déduit pas un principe général applicable à toutes les sources d'information77(*).

En mentionnant le conflit de valeurs en présence, la Cour estime tout simplement que la volonté de démasquer un salarié ou un collaborateur déloyal ne constitue pas un intérêt suffisant susceptible de l'emporter sur l'intérêt public capital que constitue la protection de la source du journaliste.

A côté de ce conflit lancinant qui oppose les nécessités de l'information à la protection de la source d'information, le problème que la dépénalisation pouvait contribuer à résoudre est celui de la disponibilité de la source d'information du journaliste. C'est-à-dire la détermination de la source à jouer pleinement le rôle de pourvoyeuse d'informations nécessaires à la vie démocratique. Car, très souvent convaincu du risque d'emprisonnement encouru par le journaliste et les représailles auxquelles la source elle-même s'exposerait, cette dernière adopte une attitude de réticence.

En effet, l'absence de protection tout comme la connaissance du risque d'emprisonnement du journaliste dissuadent parfois les sources journalistiques d'aider la presse à informer le public sur des questions d'intérêt général.

Il s'ensuit une sorte de tarissement des sources au profit de tièdes communiqués officiels ou encore de déclarations sans grand intérêt pour le public en quête d'informations sur la gestion de la cité. La presse n'est plus à même de jouer son indispensable rôle de chien de garde encore moins de fournir des informations précises et fiables.

A contrario, la dépénalisation ainsi comprise pourrait augmenter les sources d'informations du journaliste. Car, les questions relatives à la co-activité et à la complicité ne se poseront plus à l'égard desdites sources. Celles-ci, libérées de la peur, seront amenées à réduire leurs appréhensions dans la collaboration avec le professionnel des médias.

En somme, le droit reconnu au journaliste de réaliser des publications ne suffit pas à lui seul ; le cadre juridique qui consacre cette liberté doit également prévoir et éliminer les obstacles liés à la collecte de l'information.

Sous un autre angle, la dépénalisation des délits de presse pourrait contribuer également à forger un engouement du journaliste pour l'investigation.

B. L'engouement pour le journalisme d'investigations.

En l'état actuel du droit sur la presse au Bénin, l'établissement d'un régime de responsabilité pénale spécifique instituant une présomption de responsabilité du directeur de publication, constitue l'une des quatre grandes spécificités78(*) de la loi 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de presse.

Mais, cette présomption de responsabilité posée par la loi comme corollaire obligé de la liberté de presse freine le journaliste dans son élan de découverte et surtout de révélation. Il y a donc toujours des informations que le journaliste se voit obligé de livrer en partie au public. La démarche donne l'impression aux personnes concernées que le journaliste n'a pas la version complète des faits. En réalité, elle vise essentiellement à adoucir les élans de poursuite pénale79(*).

C'est une situation qui prévaut au détriment du public qui, malheureusement, est lésé dans son droit à une information vraie, exacte et complète. La menace d'une sanction pénale confine le journaliste dans une forme outrancière d'autocensure qui l'empêche d'accomplir pleinement sa mission.

A l'inverse, la dépénalisation des délits de presse peut rendre le journaliste plus engagé dans la recherche de la vérité. Le journaliste dans un tel contexte sera libéré de la peur de la prison, libéré des tracasseries diverses imputables à la police judiciaire, libéré enfin des instruisions intempestives de l'autorité administrative.

C'est en définitive à la faveur de cet affranchissement de la peur que assurément, le journaliste pourra contribuer à l'élargissement de l'espace public de libre discussion.

Section 2 : L'élargissement de l'espace public de libre discussion.

L'espace public de libre discussion renferme l'ensemble des informations susceptibles de diffusion dans le cadre de la liberté d'expression. Il s'agit des sujets débattus conformément à la liberté d'expression reconnue aux citoyens dans une société démocratique sans que cela ne fasse l'objet de condamnation à l'encontre de ceux qui les véhiculent80(*).

Or, la liberté d'expression dont procède la libre discussion est, elle-même, une liberté relative. Elle admet des limites qui rappellent que toutes les informations ne sont pas sujettes à publication.

Par conséquent, la libre discussion comporte des limites. Il en est ainsi car « dans une société démocratique, l'exercice d'une liberté, fut-elle le pilier de la défense des droits fondamentaux ne peut se justifier par la commission d'infractions, à peine de contester la légitimité des règles d'ordre public et par là même du système tout entier »81(*).

Mais, la définition des limites de cet espace ouvert à la contradiction ne va pas de soi. La grande diversité des solutions adoptées par les différentes démocraties libérales le démontre82(*).

Dans le système mixte83(*) qui est celui du Bénin, la dépénalisation des délits de presse pourrait être l'occasion d'étendre le champ de l'espace public de libre discussion. Cela peut se faire par l'admission du caractère obsolète de certaines infractions actuellement réprimées par le droit en vigueur sur la presse (Paragraphe 1). Il est vrai que ce point de vue est quelque peu contestable (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La question du caractère obsolète de certaines sanctions.

Si la presse, communément appelée le quatrième pouvoir est un atout dans l'édification d'un Etat démocratique, il est vrai aussi que, non limité, ce pouvoir devient dangereux et peut même ruiner le processus démocratique par l'inconscience de certains de ses membres.

Toutefois, il importe aussi de veiller à ce que l'on ne persécute pas les professionnels de presse à travers un arsenal législatif et règlementaire trop répressif. Il faudra veiller à ne conserver les peines privatives de liberté que pour les infractions revêtant un certain degré de gravité.

A l'analyse, cet équilibre n'est pas assuré par la loi 60-12 du 30 juin 1960. Elle aménage certaines interdictions et cela a pour conséquence la restriction de l'espace public de libre discussion. Ainsi, en est-il par exemple du traitement de l'offense au Président de la République (A) et des publications interdites (B).

A.La répression de l'offense au Chef de l'Etat.

C'est l'article 23 de la loi 60-12 du 30 juin 1960 qui prévoit l'incrimination d'offense au Chef de l'Etat. Cet article est complété par l'article 34 de la même loi qui traite de l'offense envers les Chefs d'Etats étrangers, les Chefs de gouvernements étrangers, les Ministres des affaires étrangères de gouvernements étrangers.

La similitude de ces deux dispositions réside dans la peine privative de liberté qui va de un (01) à cinq (05) ans ainsi que dans le plafond de la peine pécuniaire fixée à cinq millions (5.000.000) de francs CFA.

Cependant, la loi 60-12 ne définit pas l'offense. Il s'agit en fait d'un « délit spécial que constituent, lorsqu'ils concernent le Chef de l'Etat, des manques d'égards qui resteraient impunis s'ils concernaient une autre personne »84(*).

C'est en définitive ces manques d'égards que les articles 23 et 34 de ladite loi élèvent au rang d'infractions suffisamment graves, passibles de peine privative de liberté.

S'agissant donc d'une infraction liée au respect dont a droit un Chef d'Etat, il importe alors de se demander jusqu'à quel seuil le journaliste peut-il critiquer dans un régime présidentiel, la politique du Gouvernement sans être accusé d'outrage au Chef de l'Etat ?

Comment le journaliste peut-il s'assurer que par sa critique, il ne se met pas en marge de l'espace public de libre discussion circonscrit par la loi 60-12 ?

Apparemment, seul le juge dans son interprétation peut élargir cet espace en faveur du journaliste ou encore le restreindre davantage suivant sa conception du respect de l'autorité.

Pourtant, dans une société appelée à se construire comme Etat démocratique, il faut réaffirmer le droit de critiquer les décisions des pouvoirs établis pour ouvrir la voie à la contradiction et au débat pluriel85(*).

Ailleurs, comme en France par exemple, l'infraction d'offense au Chef de l'Etat a cessé de faire l'objet de peine privative de liberté. L'article 26 de la loi française du 29 juillet 1881 modifiée dispose en effet : « l'offense au Président de la République par l'un des moyens énoncés dans l'article 23 est punie d'une amende de trois cent mille (300.000) F ».

Cette disparité de traitement de l'infraction d'offense au Chef de l'Etat dans ces deux (02) ordres juridiques suscite une forte interrogation.

En effet, dans une société où les frontières sont de plus en plus abolies et où les injures, les secrets d'Etat, les fausses nouvelles, les documents confidentiels peuvent être divulgués, sans sanctions particulières, par la presse étrangère, sur Internet ou par voies de communication satellitaires, y a-t-il encore lieu de ne punir que les infractions de presse commises entre les frontières nationales ?

Sortir cette infraction du champ de la sanction pénale est un important signal visant à lever les tabous autour de certains sujets et à élargir par la même occasion le champ de la critique.

L'assouplissement de l'arsenal répressif par rapport à certaines publications interdites participe aussi de ce souci.

B.La sanction de certaines publications interdites.

Les relations entre la presse et la justice ne se limitent pas à l'emprise de cette dernière sur la déontologie de l'information. Bien plus encore, la presse et la justice sont deux acteurs essentiels de la société démocratique.

Mais, à l'origine déjà, le législateur avait marqué son appréhension par rapport à la médiatisation de certaines phases du procès. Les impératifs d'une bonne administration de la justice sont à l'origine de cette prohibition. Dans ce cadre, certaines publications faites au cours des différentes étapes de la procédure judiciaire font l'objet d'interdictions particulières.

Une comparaison avec le système français duquel s'inspire fortement le droit positif en la matière, permet de s'apercevoir que les textes béninois en la matière sont demeurés très répressifs.

Pour cette catégorie de publications interdites en effet, la loi française ne prévoit désormais que des peines d'amende. La loi de 1881 sur la presse en France a évolué en s'assouplissant. En revanche, si plus de quarante cinq (45) ans après les indépendances, la loi béninoise sur la liberté de presse conserve ce caractère répressif, c'est bien parce que dans la pratique, la presse n'a pas toujours été considérée comme un recours légitime du citoyen, encore moins comme un moyen de contrôle des pouvoirs.

Les intérêts collectifs définis par l'Etat ont presque toujours été préférés à ceux de la libre expression. De même, la protection de la personne l'a généralement emporté sur la libre investigation. Or, la presse dans une démocratie doit être perçue comme un moyen et un acteur dans le processus de formation de l'opinion publique86(*). La liberté de la presse doit être considérée comme la garantie de la liberté de parole, de l'information et du débat public.

Mais pour y arriver, il ne s'agit pas de l'affirmer. Cette confiance en la liberté de presse doit se traduire par l'assouplissement des peines liées à son exercice. Certes, le législateur conservera les peines privatives de liberté mais uniquement pour des infractions revêtant un certain degré de gravité.

C'est ainsi par exemple qu'aux termes de la loi française, l'injure et la diffamation ne sont punies d'emprisonnement que lorsqu'elles revêtent un caractère racial ou ethnique. Il s'agit notamment de l'incitation à la haine raciale et à la discrimination.

C'est à cette évolution dans la répression que devrait parvenir le régime juridique de la liberté de presse au Bénin selon les acteurs des médias.

Dès lors, il devient important de définir un nouveau cadre normatif de l'exercice de la liberté de la presse au Bénin.

Mais, peut-on valablement transposer les évolutions législatives françaises en matière de presse dans le contexte béninois actuel même si le texte de base sur la liberté de presse dans l'ordre juridique béninois est fortement inspiré de la loi française de 1881 ?

Paragraphe 2 : Le caractère obsolète de certaines sanctions en matière de presse, un point de vue contestable

Deux questions capitales restent à élucider pour mieux cerner les conséquences de l'uniformisation des sanctions pénales telles qu'envisagées par cette étude au paragraphe précédent.

Comment s'assurer d'une part de l'absence de risque dans cette démarche lorsqu'on sait que le propre des incriminations légales est d'être fluctuantes selon les époques, les nations, les groupes sociaux et même selon les circonstances87(*). (A)

D'autre part, ne serait-il pas indiqué de rechercher la vraie réaction sociale vis-à-vis d'une infraction de presse au Bénin. (B)

A. la relativité des législations

Les législations en générale sont soumises à des variations dans le temps et dans l'espace. Jusqu'à une période récente, l'homosexualité était traitée de la même manière en France qu'au Bénin. Aujourd'hui en France, la question fait toujours partie du domaine public de libre discussion mais plus encore, les débats ont concouru à assurer une sécurité juridique aux individus affirmant ouvertement leur adhésion à ce statut. La connaissance du statut d'homosexuel d'un citoyen n'émeut plus outre mesure en France.

A contrario, une telle révélation au Bénin serait porteuse de conséquences sociales inouïes pour la personne soupçonnée qui y verrait d'ailleurs une atteinte grave à son honneur. Toujours dans le domaine de la vie sexuelle et familiale, des incriminations telles que l'adultère, l'avortement ou la propagande anticonceptionnelle sont désormais ressentis par une partie de la population française comme ridicules ou odieux, à tel point que le législateur a dû abroger le délit d'adultère et a autorisé l'avortement dans certaines hypothèses88(*).

Un autre exemple peut être tiré de l'évolution du droit civil au Bénin. En effet, depuis l'adoption du Code des personnes et de la famille89(*), les époux se sont vu reconnaître la faculté de mettre un terme à leur relation par consentement mutuel. Cette faculté accordée aux époux témoigne de l'adhésion du corps social à cette forme de dissolution du lien matrimonial de sorte que cela ne heurte plus la conscience collective. On ne pouvait le conjecturer quelques années plus tôt.

De nos jours, la réaction sociale face au vol et autres larcins reste véhémente et fait même le lit à la vindicte populaire. Ailleurs par contre, même si ces agissements occasionnent sans doute déception et irritation, ils ne provoquent guère de réactions aiguës. Des polices d'assurance sont même souscrites dans ce cadre. Tout se passe, comme si les grands axes de l'inquiétude se déplaçaient90(*).

Au total, ces exemples montrent que les valeurs collectives évoluent avec les structures sociales et le traitement de l'infraction change lorsque des mutations s'opèrent dans les valeurs adoptées par la majorité des citoyens. Certes existe-t-il toujours un décalage entre la révision des définitions légales de l'infraction et les transformations des valeurs sociales91(*).

Et si chaque génération a ses épouvantails, quelle est donc la vraie réaction sociale contre les dérives des animateurs des médias au Bénin ?

B. Les réactions sociales contre les infractions de presse

Il est important de rechercher le sens de la réaction sociale vis-à-vis des écrits dans la presse pour espérer donner une réponse judicieuse au caractère obsolète ou non des sanctions actuelles qui pèsent sur les animateurs des médias en général. Pour satisfaire à cet exercice, on pourrait se poser une série d'interrogations dont les réponses aideraient à mieux percevoir la nature de cette réaction sociale.

On pourrait en effet, se demander s'il existe aujourd'hui au Bénin  une réelle inquiétude du citoyen vis-à-vis des dérives du journaliste?

Ou encore, le citoyen attribue-t-il ces dérives à une mauvaise organisation sociale ou encore à une mauvaise compréhension du journaliste délinquant ?

Les sociologues nous apprennent que la réaction pénale est un réflexe de défense de l'organisation sociale contre les actes qui la perturbent. Et la réaction émotionnelle ne peut se produire, selon Durkheim, que si une atteinte est portée aux « états forts et définis de la conscience collective »92(*).

L'exercice consiste donc à rechercher si l'offense au Chef de l'Etat ainsi que les publications interdites constituent des faits qui heurtent les états forts et définis de la conscience collective au point de légitimer les peines privatives de liberté dont elles sont assorties.

Dans cette dynamique, on pourrait observer que la majorité des plaintes proviennent des particuliers alors que dans le même temps l'actualité politique couvre la quasi-totalité des pages des journaux béninois93(*).

Par ailleurs, on se souvient difficilement que le Président Mathieu KEREKOU ait été à la base d'une poursuite en délit de presse initiée par l'un des procureurs de la République à l'ère du renouveau démocratique. La récente affaire de diffamation contre le Président Thomas BONI YAYI s'est elle aussi soldée par la relaxe pure et simple du journaliste gardé à vue.

En somme, les réactions profondes de l'opinion publique face aux dérives de la presse sont difficiles à stigmatiser notamment en ce qui concerne l'infraction d'offense au Chef de l'Etat.

Par contre, les plaintes des particuliers contre la presse témoignent de la crise qui s'est progressivement installée entre le citoyen et ce secteur d'activité. Cette situation s'accentue avec la propension de plus en plus affichée des organes de presse pour les faits divers touchant la vie privée des citoyens et des articles publiés sans précisions et preuves suffisantes. Dans ce cadre, les statistiques du Rapport national sur l'état de la liberté de la presse au Bénin nous imposent une attitude prudente face à toute volonté de modification du cadre juridique de la responsabilité pénale du journaliste.

C'est, au demeurant, cette prudence qui, inexorablement, nous conduit sur le sentier des nécessaires préalables à une éventuelle dépénalisation des délits de presse au Bénin.

Seconde partie :

Les préalables à une dépénalisation des délits de presse au Bénin.

La légitimité avérée du débat sur la dépénalisation des délits de presse et l'efficacité attendue d'une telle mesure sont loin d'épuiser le conflit sans cesse avivé entre la liberté de presse et les autres libertés concurrentes.

Bien que fondamentale, la liberté de presse est cependant une liberté dont la proclamation doit immanquablement s'accompagner de limitation. La société démocratique et libérale est celle qui s'emploie à fixer ces limitations et à veiller à l'équilibre entre la liberté de presse et les autres libertés concurrentes.

A l'inverse, là où les journalistes sont empêchés d'exercer leur métier, par l'intimidation voire la violence physique, on peut être sûr que le sort des libertés en général n'est guère plus enviable. Il en est ainsi, compte tenu de l'importance notoire du rôle de la presse dans un Etat de droit.

Mais, si l'on convient au regard de la légitimité de la dépénalisation et de l'efficacité espérée de cette démarche qu'il faille supprimer la responsabilité pénale en matière de délits de presse, il est cependant nécessaire de satisfaire à certains préalables.

Le premier préalable auquel il faut apporter une réponse franche et objective est celui de savoir jusqu'où le législateur devra-t-il aller face à la revendication implacable de la dépénalisation. S'agit-il d'aboutir à la conclusion que la responsabilité pénale n'est tout simplement pas nécessaire ?

Ici apparaît toute la nécessité de ressortir les préalables contenus dans la notion même de dépénalisation et de les clarifier afin d'aider les professionnels de la presse à mieux formuler leur revendication dans ce domaine.

Ce premier préalable en effet, se pose en termes d'étendue de la dépénalisation des délits de presse ou encore de modalités pratiques de suppression de la responsabilité pénale en matière de presse au Bénin (Chapitre 1).

A côté de cette clarification nécessaire à l'orientation du débat par les professionnels de la presse, une deuxième catégorie de préalables cette fois-ci extérieure à la notion même de dépénalisation doit être satisfaite. Elle s'analyse en un ensemble de conditions auxquelles doivent déférer l'ensemble des acteurs de la presse (Chapitre 2). Le processus de dépénalisation se révèle à la portée des journalistes qui deviennent les seuls à pouvoir justifier de par leur pratique, l'opportunité de sa mise en oeuvre.

CHAPITRE 1 : LA QUESTION DES MODALITES DE SUPPRESSION

DE LA RESPONSABILITE PENALE.

La question de l'étendue de la dépénalisation des délits de presse vise à assainir les débats parfois biaisés à ce sujet et qui n'aident pas forcément à faire la lumière nécessaire. Du côté des journalistes, que ce soit pour des raisons objectives ou parce que enclin à trop de corporatisme, on crie invariablement à l'atteinte à la liberté de presse chaque fois qu'un journaliste est interpellé94(*).

S'agissant par contre des pouvoirs publics, la relativité attachée à la liberté de presse et la fonction jusque-là accordée à la peine font que l'on n'ose pas évoquer la question de la dépénalisation des délits de presse.

La question de l'étendue de la dépénalisation des délits de presse comporte deux grands volets auxquels il faut apporter des réponses pertinentes.

En effet, elle appelle d'abord à répondre à la préoccupation de savoir si la dépénalisation telle que revendiquée doit être partielle ou totale (section 1). On rappellera que MERLE et VITU définissent la dépénalisation en ces termes : « la dépénalisation entraîne la sortie d'un fait réprouvé hors du champ pénal traditionnel sans exclure toutefois l'idée de sanction : le fait cesse d'être infractionnel, mais il reste sanctionné administrativement ou autrement. Il y a donc désescalade dans la répression, la justice pénale étant dessaisie au profit d'une instance non pénale »95(*).

Et si nous nous en tenons à cette définition, quel sera alors le sort des lois actuelles qui répriment les délits de presse devant l'instance non pénale qui sera amenée à en connaître? (Section 2).

Section 1 : Dépénalisation des délits de presse ou de l'ensemble des

manifestations de la liberté d'expression.

Cette interrogation mérite qu'on s'y attarde car à l'occasion des échanges avec quelques acteurs des médias et certaines personnalités en dehors du monde de la presse, la question a toujours nourri les débats.

Pourquoi, au-delà des justifications fondées sur la démocratie et le rôle que la presse y joue, doit-on accepter une dépénalisation partielle de la manifestation de la liberté d'expression et non une dépénalisation totale ? (Paragraphe 1)

Si le législateur devait un jour aborder la question au Bénin, ne serait-il pas plus objectif pour lui de dépénaliser tous les délits liés à la libre expression et de voir en cette démarche toute sa cohérence ? (Paragraphe 2)

Paragraphe 1 : Pourquoi une dépénalisation partielle ?

En réalité, le contenu de cette suggestion n'est rien d'autre que la dépénalisation des seuls délits de presse dont il est débattu jusque-là. Ce sont plutôt les arguments tendant à justifier cette démarche qui nous intéressent. Ils tendent à donner plus d'envergure à la conception classique du délit de presse. Ces arguments ne manquent pas de logique même s'ils restent peu satisfaisants.

A. Les justifications de la suggestion

La justification de la thèse de la dépénalisation des délits de presse procède du fait que cette revendication ne concerne pas que les journalistes mais s'étend à tous les citoyens. Cette démarche tend même à récuser l'idée selon laquelle la dépénalisation des délits de presse serait une forme de discrimination positive à l'égard des journalistes.

En tant que composante de la liberté d'expression, la liberté de la presse est une liberté de tous. Elle n'est pas que l'affaire des seuls journalistes96(*). Et le législateur a eu une vue très large du délit de presse de sorte qu'en réalité, ce qu'il incrimine c'est l'abus de la liberté de presse quel que soit l'auteur de cet abus. Ce qui est incriminé, c'est plutôt l'usage des médias pour commettre une infraction prévue et réprimée par la loi.

Ainsi, chaque fois que la presse sert de moyen d'expression à une infraction, cette infraction devient un délit de presse.

Cette interprétation met en exergue la variété et la diversité du délit de presse.

On remarque en ce sens que le législateur, aux termes des lois 60-12 du 30 juin 1960 et 97-010 du 20 août 1997, n'a pas défini le délit de presse de façon spécifique. Le délit de presse est plutôt déduit de la définition de la diffamation, de l'injure, de l'offense, sans qu'il soit spécifiquement fait mention du journaliste.

Non seulement ces définitions ne donnent pas une idée claire de la notion de délit de presse mais plus encore, elles consacrent une sorte d'universalité du délit de presse. L'infraction cesse donc d'être le fait fautif du seul journaliste puisque le texte qui définit la diffamation, ou l'injure parle de « toute allégation »97(*) sans distinguer entre les auteurs de cette allégation. Le texte, en effet, ne parle pas de journaliste.

La conclusion logique qui vient justifier l'idée selon laquelle la liberté de presse n'est pas l'affaire des seuls journalistes est que toute personne qui aura commis, par voie de presse écrite ou audiovisuelle une infraction de quelque nature que ce soit peut être poursuivie pour délit de presse.

Cette conclusion logique est, par ailleurs, confortée par le système de responsabilité en cascade prévue par les articles 40 de la loi 60-12 et 97de la loi 97-010.

En effet, aux termes de ce système de responsabilité qui constitue une dérogation aux règles sur la participation criminelle, les auteurs du fait délictueux sont poursuivis à défaut du directeur de publication. Et les auteurs peuvent être des journalistes ou de simples particuliers ayant émis une opinion délictueuse par voie de presse.

Mais, cet essai visant à soustraire le délit de presse du champ de la répression pénale, motif pris de ce que l'infraction aura emprunté le support de la presse, paraît peu satisfaisant.

B. Une solution peu satisfaisante.

La dépénalisation des seuls délits de presse à la lumière des justifications ci-dessus énumérées paraît peu satisfaisante. Il en est ainsi car, malgré ces justifications, des questions non moins pertinentes restent en suspens. Et comme l'expose Henri BOSLY « cette solution paraît difficilement acceptable. Pourquoi une infraction cesserait-elle d'être punissable parce qu'elle est commise par la voie de la presse ? Ainsi par exemple, l'injure orale est punissable quand elle est publique. La lettre injurieuse publiée tombe également sous le coup de la loi pénale. Pourquoi, cesserait-il de l'être parce qu'elle est reproduite en de nombreux exemplaires ? [...] On ne peut s'empêcher de penser que l'intention de protéger la liberté de la presse serait alors détournée de son but pour couvrir des infractions dont la gravité pourrait être considérable »98(*).

Dans cet ordre d'idée, Patrick de FONTBRESSIN fera remarquer que : « dans une société démocratique, l'exercice d'une liberté, fut-elle le pilier de la défense des droits fondamentaux ne peut se justifier par la commission d'infractions, à peine de contester la légitimité des règles d'ordre public, et par là même, du système tout entier »99(*).

En d'autres termes, il est difficilement concevable qu'un message, parce qu'il est véhiculé par voie de presse, prenne automatiquement la dimension d'une information qui, au nom de la liberté de presse, devient une valeur fondamentale à l'abri de toute poursuite pénale à l'encontre de celui qui la véhicule. A l'appui d'une telle réflexion, on ajoutera que la seule référence de la presse ne saurait, en aucune manière, justifier l'aveu d'une infraction dans un Etat de droit, et effacer la poursuite pénale qu'il induit. Selon la belle expression de Patrick de FONTBRESSIN, « une démocratie ne peut se satisfaire d'une purification d'infraction par bain de presse, à peine de détruire ses propres fondements »100(*).

Au total, il est dans l'intérêt du journaliste d'éviter de se retrancher dans un tel espace pénalement immunisé car cette forme de liberté conduirait à la destruction de la liberté elle-même et partant, du système qui l'a vu naître.

A l'opposé de la dépénalisation des seuls délits de presse, ne serait-il pas plus cohérent si l'on tient à faire disparaître le système pénal des délits de presse, d'opter alors pour une dépénalisation totale, c'est-à-dire de l'ensemble des manifestations de la liberté d'expression ?

Paragraphe 2 : Dépénalisation de l'ensemble des manifestations de la liberté

d'expression.

Cette demande tirée du caractère fondamental de la liberté d'expression en démocratie satisfait à un souci de cohérence dans la démarche (A). Mais, elle reste une solution difficile en pratique pour plusieurs raisons aussi importantes les unes que les autres (B).

A. Un souci de cohérence

On pourrait évoquer une dépénalisation de l'ensemble des manifestations de la liberté d'expression. C'est l'article 10, paragraphe 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme (CEDH) qui, dans son énoncé, donne une composition détaillée de cette liberté101(*).

En effet, aux termes du paragraphe 1 de cet article, le droit à la liberté d'expression  comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées.

La dépénalisation totale aurait le mérite de la clarté puisqu'elle lèverait tout débat autour de la question même de l'intérêt de la dépénalisation des seuls délits de presse.

La cohérence proviendrait elle-même de l'importance de la valeur évoquée et non de la qualité de journaliste ou du statut de la personne qui en jouit.

La défense de cette réclamation est assise sur la liberté d'expression elle-même en tant que fondement essentiel d'une société démocratique. L'ensemble des citoyens, toutes catégories confondues, devrait pouvoir profiter de cette mesure en tant qu'acteurs de la société démocratique, elle-même comprise comme la société de l'expression plurielle.

On garde toutefois à l'esprit qu'une dépénalisation n'aura pas pour effet de faire disparaître les actes actuellement constitutifs d'infractions pénales, mais seulement de les transférer purement et simplement dans la sphère civile.

On assisterait en quelque sorte à un mouvement similaire à celui enregistré en 1997 en Belgique avec l'abrogation des articles 387 et 390 du Code pénal. L'adultère constituait une infraction pénale parce que la loi belge le considérait comme une atteinte non seulement au devoir de fidélité mais aussi, plus largement, à l'ordre moral. Par l'abrogation de ces dispositions, l'adultère cessa alors d'être une infraction pénale, mais resta (en tant que violation du devoir de fidélité consacré par l'article 213 du Code Civil) un cas d'injure grave pouvant justifier que le divorce soit prononcé aux torts de celui qui s'en était rendu coupable.

En somme, l'injure, la diffamation, seront toujours maintenus mais, leur sanction au pénal, du moins pour ce qui est du prononcé des peines privatives de liberté, ne sera plus possible.

Mais, en réalité, la dépénalisation totale des manifestations d'opinion est-elle admissible dans le contexte béninois actuel ? Peut-on valablement transférer la solution retenue pour l'adultère aux infractions découlant de l'usage de la liberté d'expression ?

B. Une solution difficile en pratique.

L'idée de la dépénalisation totale de l'ensemble des manifestations de la liberté d'expression se heurte à deux grandes objections.

D'abord, c'est toute la fonction symbolique de la répression pénale qui serait remise en cause car, aux termes de cette démarche, il faudra abroger tous les articles du code pénal qui répriment l'expression d'une opinion (injure, calomnie, diffamation). Il faudra également abroger toutes les dispositions pénales des autres lois érigeant en infractions certaines manifestations d'opinion.

Il s'agit en l'espèce, notamment des délits contre la chose publique, contre les personnes, contre les chefs d'Etat et agents diplomatiques étrangers et encore des publications interdites prévues par les articles 23 et suivants de la loi 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de la presse.

Même si la dépénalisation totale envisagée ne prend pas en compte la provocation aux crimes et les actes inspirés par le racisme et la xénophobie, il semble difficile, dès lors que l'on parle de dépénalisation totale, de garder dans la sphère pénale certains sujets d'expression alors que dans le même temps on en extrairait d'autres.

S'agissant toujours du symbolisme de la répression pénale et de la difficile conciliation de ses objectifs avec un mouvement de dépénalisation totale, M. VAN DE KERCHOVE fait remarquer : « le recours instinctif et quasi automatique du législateur à la sanction pénale pour appuyer chacune de ses interventions ne s'explique-t-il pas, en effet, par le fait que la plupart des groupes favorables à cette intervention - qu'ils soient progressistes ou conservateurs - attachent à la présence d'une telle sanction une symbolique sans égale, indépendamment de son efficacité sur le plan instrumental ? »102(*).

L'autre objection de droit est qu'il est difficile de contester aujourd'hui que la Déclaration française de 1789 qui inspire fortement la Constitution du Bénin du 11 décembre 1990, ait été un des phares de la liberté dans le monde et en particulier pour la formulation de la liberté d'expression.

La Déclaration Universelle des Droits de l'Homme que l'Organisation des Nations Unies (ONU) a adopté le 10 décembre 1948 et que le constituant béninois a annexé à la Constitution du Bénin du 11 décembre 1990 précise en son article 29103(*) le sens et les implications de la liberté d'expression. Il s'agit d'une liberté relative.

C'est cette tradition de liberté contrôlée qui est fortement ressortie dans la loi 60-12 sur la liberté de presse au Bénin même si à l'heure actuelle, la majorité des journalistes ne disposent sans doute pas encore d'une formation juridique assez poussée pour son respect.

Avons-nous par conséquent, des raisons pertinentes de remettre en cause le principe de fond de la liberté sauf restrictions par la loi qui sous-tend toute la philosophie de ces différents instruments juridiques de référence ?

On ne saurait clôturer les objections que soulève la dépénalisation de l'ensemble des manifestations de la liberté d'expression sans souligner le conflit qui subsiste entre la liberté d'expression, les nécessités de l'information et la protection de la réputation des personnes.

En effet, ces objections prennent également leur source dans le symbolisme de la sanction pénale. En dépénalisant, les droits d'autrui s'en trouveront-ils mieux protégés ? La dépénalisation ne conduirait-t-elle pas à de nombreux abus ? Surtout qu'au Bénin, la mentalité est encline à craindre la peine d'emprisonnement beaucoup plus que la peine pécuniaire. La privation de la liberté frappe beaucoup plus que la peine d'amende, ou la sanction civile, fussent-elles porteuses d'importantes amputations dans le patrimoine.

En somme, si l'on admettait de soustraire les peines privatives de liberté des délits de presse, quel sera sur le plan de la technique juridique le sort à réserver aux lois actuelles sur la liberté de la presse devant le juge civil ?

Le juge civil sera t-il tenu d'appliquer ces lois dans leur intégralité ou au contraire, va-t-il recourir aux règles de la procédure civile et partant, asseoir la recherche de la responsabilité sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ?

Section 2 : Le sort de la loi 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de la presse devant le

juge civil.

Ce préalable doit également être élucidé car les professionnels des médias ne voient pas toujours toutes les implications d'une éventuelle dépénalisation dans la conduite du procès d'une infraction de presse. On a tôt fait d'admettre qu'en réalisant la dépénalisation, la responsabilité du journaliste sera désormais recherchée sur le fondement de l'article 1382 du Code civil. Cette conséquence semble hâtive et mérite des clarifications. (A). Il en est de même des modalités d'application de la loi 60-12 devant le juge civil en cas de dépénalisation. (B). L'analyse du sort de la loi 60-12 sur la liberté de presse devant le juge civil se fera à travers ces deux grandes préoccupations.

Paragraphe 1 : Application intégrale de la loi 60-12 du 30 juin 1960 devant le juge civil.

Actuellement, la question de l'application partielle ou intégrale des différentes lois sur la liberté de presse ne se pose pas encore puisque les procès de presse se déroulent au pénal. Elle surgira dès lors que le législateur prendra sur lui de supprimer les peines privatives de liberté. Il se posera la question de savoir si, en tant que textes pénaux, les lois sur le liberté de presse ont vocation à s'appliquer dans leur intégralité avec leurs dispositions de fond et leurs règles de procédure dans le cadre d'une action civile menée devant un juge civil ?

A.Une application réalisable.

Selon le principe de droit commun, prévu à l'article 4 du Code de procédure pénale applicable au Bénin, une partie lésée par une infraction pénale peut, à son choix, poursuivre la réparation de son préjudice, soit devant les tribunaux civils, soit devant les tribunaux répressifs par voie d'action civile accessoire à l'action publique. Ce principe s'applique en matière de presse, sauf dans le cas des articles 27 et 28 de la loi 60-12.

En effet, l'article 44 de la loi 60-12 dispose: « l'action civile résultant des délits de diffamation prévus et punis par les articles 27 et 28 ne pourra, sauf dans les cas de décès de l'auteur du fait incriminé ou d'amnistie, être poursuivie séparément de l'action publique ».

Les imputations diffamatoires dont il s'agit sont en réalité celles commises à l'encontre des cours et tribunaux, armées, corps constitués, administrations et fonctionnaires publics etc., pour lesquelles la juridiction civile est radicalement incompétente. Dans ce dispositif répressif, où pourra-t-on alors situer la compétence du juge civil ?

En fait, ces incertitudes que soulève une transposition d'une procédure pénale à une procédure civile semblent surmontables car, si la nécessité de protéger les droits individuels l'emporte, on aura donc recours aux règles du droit commun de la procédure civile. Par contre, si l'on entend privilégier la liberté de presse, on reconnaîtra aux lois actuelles sur la liberté de presse un statut particulier qui va s'imposer au juge civil.

Ainsi par exemple, il n'est pas impossible que conformément à l'article 47 de la loi 60-12104(*), l'assignation qualifie avec précision le fait incriminé et qu'elle fasse également une référence explicite à la disposition de la loi 60-12 dont l'application est requise. C'est-à-dire que les avocats devront apporter à la rédaction de l'assignation le même soin qu'à l'élaboration de la citation devant le tribunal correctionnel. Car, contrairement au principe selon lequel le juge civil n'est pas lié par les qualifications retenues par le demandeur105(*), le juge civil peut être contraint de modifier sa pratique dans le domaine des procès de presse selon l'option faite par le législateur.

Dans une telle hypothèse, le juge civil perdrait la faculté de requalification qu'il tient de l'article 12 du Code de procédure civile. Il ne sera donc, par exemple, pas possible de viser la diffamation et subséquemment l'injure et de s'en remettre à l'arbitrage du juge.

En tout état de cause, une telle modification de la pratique du juge civil aura pour effet, d'assurer la clarté et la rigueur qu'impose la loi 60-12 aux assignations.

De même, les mesures relatives à l'élection de domicile telles qu'elles ressortent de l'article 51 de la loi 60-12 doivent être respectées. L'assignation devra contenir une élection de domicile dans la ville où siège la juridiction saisie.

La loi 60-12 peut donc trouver à s'appliquer devant le juge civil.

On aboutira ainsi au rejet pur et simple de la vocation substitutive de l'article 1382 du Code civil.

B.Le rejet de la fonction substitutive de l'article 1382 du Code civil

On constate, à la lumière de l'analyse, que même en cas d'acceptation par le législateur de procéder à la dépénalisation, le recours à l'article 1382 du Code civil pour fonder la responsabilité des journalistes n'est pas systématique. Simplement parce que c'est tout l'équilibre du droit de la presse qui serait remis en cause.

En effet, si les possibilités d'utiliser le droit commun de la responsabilité en matière civile sont élargies au domaine de la presse, cela entraînerait une dilution des règles encadrant la liberté d'information dans le droit commun de la réparation des dommages.

A ce sujet, le professeur Jean CARBONNIER se posait déjà la question de savoir si la loi du 29 juillet 1881 (qui inspire fortement celle béninoise n°60-12 du 30 juin 1960) « n'avait pas entendu instituer, pour toutes les manifestations de la pensée, un système juridique clos, se suffisant à lui-même, arbitrant une fois pour toutes, tous les intérêts en présence, y compris les intérêts civils et enlevant, du même coup, à l'article 1382 du Code civil une portion de sa compétence diffuse »106(*).

Le journaliste exerce sa profession dans le cadre d'une liberté fondamentale protégée par la Constitution du 11 décembre 1990 qui dispose en son article 24: « La liberté de la presse est reconnue et garantie par l'Etat. Elle est protégée par la Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication dans les conditions fixées par une loi organique ». Le texte constitutionnel prévoit donc que le régime juridique applicable à cette liberté trouvera son siège dans une loi organique. La loi 60-12 en l'espèce.

En conséquence, on ne peut traiter le dommage causé dans ce cadre de la même manière qu'on aborde la question de la responsabilité qui découle de n'importe quelle autre activité civile.

A côté de cette protection constitutionnelle, il ressort que certains termes de cette loi 60-12 peuvent être utilement invoqués pour contester l'application de l'article 1382 du Code civil en matière de presse.

En effet, en admettant que le diffamateur est exonéré de responsabilité lorsqu'il établit la vérité du fait diffamatoire107(*), la loi 60-12 admet implicitement mais nécessairement qu'un journaliste peut intentionnellement causer un dommage à autrui sans être tenu à réparation. Il en sera ainsi chaque fois qu'il rapportera la preuve du fait pourtant dommageable pour le plaignant.

Une autre objection sérieuse peut être soulevée pour contester l'application pure et simple de l'article 1382 du Code civil en matière de presse.

En fait, si les tribunaux décidaient que toute faute ou erreur commise par voie de presse peut être réparée sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, une disposition générale évincerait définitivement une loi spéciale pourtant reconnue comme étant d'ordre public et destinée à protéger une liberté fondamentale.

Une telle attitude se révèlerait contraire aux principes généraux d'interprétation du droit que traduit l'adage specialia generalibus derogant108(*) aux termes duquel les lois spéciales dérogent aux lois qui ont une portée générale. A la lumière du droit positif actuel sur la presse, l'article 1382 du Code civil ne peut donc avoir en matière de presse de vocation substitutive des textes spéciaux.

Toutefois, il convient d'analyser les contours de la fonction complétive du droit commun de la responsabilité civile en matière de presse.

Paragraphe 2 : L'intervention du droit commun de la responsabilité civile en

matière de presse.

L'idée majeure ici est qu'on peut cantonner, même en cas de dépénalisation, l'intervention de l'article 1382 du Code civil en matière de presse aux comportements qui ne peuvent relever d'une qualification prévue par un texte spécial. C'est en fait la reconnaissance d'une vocation complétive à l'article 1382 du Code civil. (A) qui elle-même admet des limites. (B)

A. L'admission de la fonction complétive de l'article 1382 du Code civil

On rappellera à l'occasion que le débat sur la dépénalisation des délits de presse ne se confond pas à celui de l'abrogation pure et simple du texte qui constitue aujourd'hui le socle du droit de la presse.

Précisons également qu'à l'analyse, la loi 60-12 sur la liberté de presse n'est pas moins protectrice des professionnels de la presse. A y voir de près, le système répressif exorbitant du droit commun qu'elle aménage est fait dans l'intérêt du journaliste.

Ainsi qu'on l'avait déjà souligné plus haut, la courte prescription, le formalisme exacerbé de la procédure, la référence précise au délit de presse évoqué, sont autant de garanties en faveur de la protection du journaliste. Garanties qui, du reste, trouveront droit de cité auprès du juge civil même si l'ensemble du procès lui était confié.

Cela étant, dès lors qu'il est acquis que l'article 1382 du Code civil peut avoir une fonction complétive, il importe de s'interroger sur la portée de cet article en matière de délits de presse.

En effet, lorsque les faits ne peuvent être qualifiés en application de la loi du 30 juin 1960 sur la liberté de presse, ou d'un autre texte spécifique sur la presse, le juge ainsi que nous l'avions déjà remarqué, n'aura pas l'opportunité d'user de son pouvoir de requalification109(*). Il sera donc nécessairement contraint de déterminer si le comportement reproché au journaliste doit entraîner une sanction fondée sur l'article 1382 du Code civil ou non.

Doit-il dans ce cas considérer que la responsabilité civile du journaliste, peut être engagée pour toutes fautes, même légères ou d'imprudence, ou au contraire admettre qu'en raison des particularités de l'activité, il convient de limiter l'application de l'article 1382 du Code civil aux seules hypothèses de fautes dites qualifiées ou d'une particulière gravité ?

On se rend compte que s'il faut admettre la responsabilité du journaliste pour toute faute légère on poserait par la même occasion le principe d'une responsabilité plus lourde dans l'espace de liberté consenti aux journalistes par le législateur. L'illustration de cette fâcheuse situation, dont doivent tenir compte les journalistes dans leur élan de dépénalisation, peut être tirée de l'article 31 de la loi 60-12 du 30 juin 1960110(*).

Au terme de cette disposition, le législateur a voulu sanctionner l'atteinte intentionnelle à l'honneur ou à la considération des héritiers, époux ou légataires universels vivants. Ce serait donc manifestement contraire au souhait du législateur que de faire revivre au profit des héritiers dans cette hypothèse, une action en responsabilité fondée sur l'article 1382 sous le régime duquel la faute non intentionnelle peut-être également punie. Cet exemple nous introduit dans les limites au-delà desquelles la fonction complétive dévolue à l'article 1382 du code civil en matière de presse, ne saurait prospérer.

B. Les limites à la vocation complétive de l'article 1382 du code Civil en matière de presse.

A l'analyse de la jurisprudence française, l'application de l'article 1382 du Code civil en matière de presse, est subordonnée à deux (02) conditions111(*). La première condition, négative est l'absence de possibilité de qualification au regard des textes spéciaux (loi du 29 juillet 1881 ou sur l'atteinte à la vie privée). Il est possible de poser cette même condition à la loi 60-12 du 30 juin 1960.

La seconde condition est positive et tient à la gravité de la faute ou du dommage. C'est-à-dire que le comportement reproché au journaliste doit consister en une dénaturation ou une déformation des faits traduisant une intention malveillante ou une négligence manifeste dans la vérification de l'information112(*). La faute à la charge du journaliste se déduit donc d'une attitude malveillante ou du non respect d'une obligation élémentaire de vérification.

Le danger lié à une telle extension du champ de la responsabilité civile avait déjà été dénoncé en son temps par Henri MAZEAUD dans un article toujours d'actualité.

L'auteur s'interrogeait déjà sur la possibilité pour une victime d'invoquer l'article 1382 du Code civil dans les domaines où le législateur avait tracé une réglementation et organisé une sanction. Sa position mérite d'être rapportée in extenso :

« Nous pouvons demander réparation, mais à la condition que le législateur n'ait pas spécialement prévu le dommage que nous subissons, soit pour nous contraindre à le supporter sans indemnité, auquel cas nous ne pouvons rien réclamer, soit pour soumettre à certaines conditions plus ou moins strictes sa réparation ou le quantum de l`indemnité, auquel cas nous sommes tenus de nous incliner devant cette réglementation. Les articles 1382 et suivants ne peuvent servir à tourner la loi. Principe évident, si évident qu'il n'a pas été souvent dégagé ! Son application ne fait pas difficulté dans les situations où le législateur en réglementant une institution particulière, a nettement marqué sa volonté de soumettre à cette réglementation et à elle seule tous les conflits susceptibles de s'élever dans ce domaine »113(*).

Soixante onze ans plus tard, cette opinion pourrait être reprise à la lettre s'agissant des rapports entre l'article 1382 du Code civil et la loi 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de presse.

Mais, à y voir de près, la loi 60-12 du 30 juin 1960 est-elle l'expression exhaustive de la réglementation en matière de liberté de presse ? Notamment dans son chapitre IV qui définit les crimes et délits commis par la voie de la presse ou par tout autre moyen de publication ?

En réalité, cette loi ne prétend pas exclure le jeu normal de la responsabilité civile. Ce constat est confirmé par l'article 42 de la loi 60-12 du 30 juin 1960 qui dispose : « les propriétaires des journaux ou écrits périodiques sont responsables des condamnations pécuniaires prononcées au profit des tiers contre les personnes désignées dans les deux (02) articles précédents, conformément aux dispositions des articles 1382, 1383, 1384 du Code civil français ».

Au total, ce qu'il importe de sauvegarder, c'est le socle du droit sur la liberté de presse. Ce socle est constitué par les lois 60-12 du 30 juin 1960 et 97-010 du 20 août 1997 qui établissent des garanties procédurales en faveur de la liberté de presse.

Ces clarifications sont nécessaires pour une meilleure appropriation des implications de la dépénalisation par le législateur et par le journaliste.

Finalement, on se rend compte que la dépénalisation des délits de presse est davantage subordonnée aux profondes mutations que doivent opérées les journalistes au sein même de leur corporation.

CHAPITRE 2 : LES CONDITIONS LIEES A LA PROFESSION.

Les réticences que suscite la dépénalisation des délits de presse sont pour la plupart motivées par les faiblesses de la presse elle-même. Ces faiblesses s'analysent entre autres en termes de corruption, d'absence de qualification, de méconnaissance ou encore de non respect des règles d'éthique et de la déontologie qui gouvernent la profession.

« Nombre de ses animateurs (ceux de la presse) se livrent à une véritable marchandisation du travail journalistique. Celle-ci consiste à utiliser la liberté de presse pour assurer non seulement le financement des médias, mais également l'enrichissement personnel.

Les pratiques en cours se résument en un complexe de corruption qui touche aussi bien les médias publics que privés »114(*) .

Cette réflexion traduit l'importance des préalables auxquels doivent satisfaire les professionnels de la presse afin d'assurer que la dépénalisation ne se retourne pas contre la liberté d'expression au nom de laquelle elle est revendiquée.

Ces préalables sont d'abord relatifs aux organes de presse et au profil des personnes chargées de les animer. (Section 1) Ils sont ensuite liés au respect de l'éthique et de la déontologie qui doivent gouverner la profession. (Section 2)

Section 1 : Les préalables liés à l'organe de presse et à ses animateurs.

La définition d'un cadre normatif nouveau et dépénalisé pour l'exercice de la presse doit, pour donner satisfaction, résoudre les questions liées à la difficile émergence des entreprises de presse au Bénin.

Ce cadre doit en outre, définir de façon précise les conditions d'accès à la profession et d'exercice de cette profession.

Paragraphe 1 : Nécessaire émergence des entreprises de presse

Au nombre des faiblesses des organes de presse figure la question de leur financement et de l'influence de la loi du marché sur le traitement de l'information.

A. Des structures financièrement fragiles.

Pour être autorisée, une station de radiodiffusion sonore privée commerciale doit avoir un capital d'au moins dix millions (10.000.000) de francs CFA115(*). Quant à une télévision privée commerciale, elle doit être une entreprise béninoise de droit béninois, ayant un capital d'au moins deux cent cinquante millions (250.000.000) de francs CFA116(*).

Si dans le domaine de l'audiovisuelle, il n'est point de place pour l'amateurisme compte tenu du coût de la technologie à mettre en place et du capital dont il faut justifier, il n'en est pas de même de la presse écrite. Tout journal, ou écrit périodique peut être publié, sans autorisation préalable ni dépôt de cautionnement, après la déclaration prescrite par l'article 5 de la loi 60-12 du 30 juin 1960117(*).

Cette abondante affirmation de liberté entraîne en pratique des difficultés d'émergence de véritables entreprises de presse. Parmi le nombre impressionnant de titres qui paraissent au Bénin, seuls quelques uns remplissent les conditions d'entité économique et commerciale créée dans le but d'exploiter, comme activité principale, la collecte, le traitement, la production et la diffusion de l'information ou des programmes.

En conséquence, le journal marchandise précède la création de l'entreprise de presse chargée de produire un bien dénommé « journal ». Toute personne qui, de quelque manière que ce soit, obtient un peu d'argent peut, le lendemain, mettre sur le marché deux cahiers noircis dénommés journal. Le propriétaire est à la fois directeur de publication, rédacteur en chef, journaliste sous plusieurs pseudonymes.

Aux lendemains de l'ouverture démocratique, de nombreux hommes politiques ont créé un journal qui, en fait, constituait un instrument de propagande et d'anéantissement de l'adversaire. Par ailleurs, le flou au niveau des conditions de travail fait le lit à la corruption et à la magouille. On peut citer entre autres grandes manifestations de la corruption dans le monde des médias, l'affaire dite de la filière togolaise et celle de l'organisation de la communication dans le scandale du rachat de la Société Nationale de Commercialisation des Produits Pétroliers (SONACOP)118(*).

Comment expliquer en pareilles circonstances le privilège de juridiction qu'on accorderait aux journalistes ? Le débat sur la dépénalisation doit d'abord résoudre ces préalables.

D'autres réalités bouleversent le domaine de l'information et de la presse. Il s'agit de l'emprise générale de l'économie de marché dans le monde d'une part, l'irruption des nouvelles techniques de l'information et de la communication de l'autre.

B. La loi du marché.

Après l'effondrement du bloc socialiste, la liberté d'expression progresse sur tous les continents à la faveur de la démocratie et de l'économie de marché. Le développement d'une information de qualité va dépendre des moyens mis en oeuvre et de l'autonomie de l'entreprise. Le marché a aussi le grand mérite de signifier aux médias qu'ils sont au service de leur public. Cette dominante économique a cependant des conséquences complexes.

Par nature, les médias sont doubles, à la fois entreprises commerciales et vecteurs d'un bien immatériel, culturel et social. L'information, comme on l'a souvent souligné a cette particularité de se vendre deux fois, d'abord au public mais aussi, aux annonceurs publicitaires. Encore que cette double appartenance au monde du commerce et à la collectivité n'est pas particulière aux médias. Mais, dans le cas spécifique de l'information, les risques sont particuliers. Si tout est subordonné au commerce, le contenu passe au second rang et les libertés individuelles et collectives sont alors menacées.

Trop souvent pour assurer la vente, le citoyen est traité comme un consommateur à séduire au lieu d'un citoyen digne d'être informé. Ainsi, se développe le divertissement et les informations à caractère sensationnel qui se vendent bien. Parallèlement, l'information citoyenne est délaissée au mépris de la démocratie dont elle est le pilier. Cet attrait pour le sensationnel est présent au sein des rédactions et se développe aussi au mépris de la qualité des articles de presse. Les méthodes sont celles du marketing et de la séduction. Elles ne favorisent pas toujours la recherche d'informations et d'idées d'intérêt public. Daniel CORNU dresse un inventaire provisoire des « zones critiques »119(*) qui selon lui, entament la crédibilité de la presse. Il s'agit de :

- l'indépendance fragile des journalistes dans leurs relations avec les divers pouvoirs ;

- les défaillances dans la vérification des informations, sous l'influence conjuguée des lois du marché et de la vitesse de l'information ;

- la confusion entre la liberté d'expression qui appartient à tous et la liberté de la presse qui est détenue par quelques uns ;

- la mise en spectacle de l'information qui privilégie certains aspects de la réalité pour rester dans la course à l'audience ou au lectorat ;

- les blessures infligées aux personnes par l'exploitation de la violence, les atteintes à la vie privée, les manquements au respect de la présomption d'innocence.

En définitive, c'est à la résolution préalable de ces difficultés que devraient s'atteler les professionnels des médias.

A côté de ces exigences liées aux organes de presse, une autre question d'importance nourrit les réticences face à la revendication de la dépénalisation. Il s'agit du mode d'accès à la profession de journaliste au Bénin.

Paragraphe 2 : L'accès à la profession

Cette question sera étudiée sous le double angle du critère de qualification du journaliste (A) et du critère de son identification (B).

A. Le critère de qualification

« Malgré les efforts remarquables faits et les moyens déployés ces quinze (15) dernières années dans le domaine de la formation des professionnels des médias, des lacunes liées à la maîtrise du métier de journaliste subsistent toujours et s'étalent tous les matins aux grands carrefours - points de vente de journaux à la criée - et sur les antennes de radio et les écrans de télévision »120(*).

Ce constat n'est qu'une conséquence logique du mode d'accès à la profession de presse qui, au Bénin, n'est en pratique pas subordonné à une qualification préalable. La pratique consacre journaliste, toute personne sachant parler français et aligner des mots intelligibles et ayant pu se retrouver dans un journal, une radio ou une télévision. Aucun cursus scolaire spécifique n'est exigé.

La plupart des animateurs des médias béninois sont des diplômés des universités béninoises ou d'ailleurs, ayant suivi un cursus académique généralement sans rapport avec les techniques de la communication121(*). Ces dernières années, quelques filières de journalisme ont été ouvertes dans les établissements préparant au Brevet de Technicien Supérieur (BTS), au Master etc.. Mais, malgré les besoins de formation liés au libéralisme de l'espace médiatique, ces établissements ne sont pas toujours bien outillés pour ce genre de formation. Sans radio ni TV école, sans journal école, les étudiants n'ont même pas à leur disposition la presse quotidienne.

Le manque de formation et surtout de vocation professionnelle des jeunes rédacteurs venus au journalisme plus par souci de résoudre un problème d'emploi de manière passagère que par amour du métier, entraînent une omniprésence du journalisme « de commande » ou le reporter est rémunéré par l'organisateur de l'évènement qu'il va couvrir122(*).

Beaucoup de jeunes journalistes, poursuit le Rapport 2005 sur l'état de la presse au Bénin, ont embrassé la profession, compte tenu des perdiems. Les organisateurs de manifestations qui ne s'acquittent pas de ce devoir courent le risque de voir saboter le traitement de l'information.

A côté, il y a une catégorie de journalistes qui n'attendent plus d'être invités ou d'être désignés par leur rédaction pour se rendre sur les lieux des événements. Ils scrutent les banderoles ou parfois consultent les agendas des rédactions pour s'auto inviter aux reportages « juteux »123(*). N'ayant pas l'obligation de rendre compte, ils peuvent se présenter à plusieurs endroits. L'essentiel pour eux, c'est de signer les fameuses listes que font circuler les Attachés de Presse et qui sont sanctionnées par la distribution de primes de reportage124(*).

Ces réflexions renseignent sur la précarité dans laquelle le journalisme est exercé au Bénin. Tant que la formation ne sera pas prise en compte par les journalistes eux-mêmes, il sera difficile d'accéder à une revendication comme celle de la dépénalisation.

Une autre difficulté procède également du critère d'identification du journaliste au Bénin.

B. Le critère d'identification

Quels sont au Bénin, les critères juridiques d'identification du journaliste ? Dans quelles conditions cesse t-on de l'être. Les deux lois qui régissent le secteur des médias sont muettes sur les questions125(*). Il en est également ainsi des statuts de l'Union des Professionnels des Médias du Bénin (UPMB).

C'est plutôt la Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication (HAAC) qui donne une définition du journaliste.

« Est journaliste professionnel, tout rédacteur ou tout reporter d'images qui a pour occupation principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs agences de presse, dans une ou plusieurs publications quotidiennes ou périodiques, ou dans une ou plusieurs entreprises de presse audiovisuelle et qui en tire le principal de ses revenus »126(*).

Au-delà de cette approche de définition se trouve posée la question du statut du journaliste.

En effet, étant entendu qu'ils entrent dans le métier comme dans un moulin, très peu de journalistes sont en position de mettre en avant des exigences salariales. Cette situation qui fait le lit à la misère ne met pas le journaliste à l'abri des tentations. En pareille situation, quelle garantie de responsabilité peut-on escomptée tant que le journaliste, suite à son indigence, est sujet de manipulation et de mercenariat ?

Peut-on raisonnablement dépénaliser les délits de presse et espérer une plus grande responsabilité du journaliste dans les circonstances actuelles où le journaliste, en proie à l'instabilité professionnelle et sociale, est confronté au ballottage de sa conscience ?

Ne dit-on pas que la pratique de la vertu suppose un minimum de bien-être ?

Dans le cadre de la législation actuelle sur la presse et vu la pratique des relaxes anticipées, les procès de presse deviennent des occasions d'affaires pour les patrons de presse.

En effet, le journaliste condamné à une peine de prison avec sursis et à une amende réalise toujours une bonne affaire chaque fois que l'amende prononcée est largement en deçà du montant à lui proposé pour la rédaction de l'article diffamatoire ou injurieux.

La réponse à la question préalable des critères d'identification du journaliste passe également par l'établissement et la délivrance saine des cartes de presse. Incontestablement, la carte de presse constitue un attribut extérieur de professionnalisation du secteur. La suppression des peines de prison du droit des médias suppose certainement une meilleure régulation de l'accès à la profession et de l'exercice du métier. Le législateur ne pourra objectivement et sérieusement dépénaliser sans s'assurer des exigences de qualité dont doit faire montre le journaliste.

Le respect des règles d'éthique et de déontologie de la profession participe aussi de cette exigence.

Section 2 : Les exigences liées à l'éthique et à la qualité de l'information.

Les exigences liées à la qualité de l'information véhiculée par la presse sont aujourd'hui ressenties aussi bien dans les médias qu'au sein des organisations représentatives de la société. Le manque de rigueur dans la vérification des faits, la mise en cause imprudente des personnes à propos de faits divers, la confusion entre l'information et les démarches à caractère publicitaire, le bidonnage, sont autant de réalités qui reposent dans son entièreté la question de la responsabilité du journaliste.

Pour assurer que la dépénalisation ne se retourne pas contre la démocratie, l'éthique dans l'information doit être suffisamment prouvée à travers la pratique du journaliste et la gestion de l'entreprise de presse. Quant aux organes de régulation et d'autorégulation, ils doivent disposer de moyens objectifs pour assurer une éthique et une qualité de l'information.

Paragraphe 1 : L'éthique dans l'information, une question décisive pour la démocratie

Le citoyen soucieux de la gestion des affaires de la cité a, vis-à-vis de la presse, des attentes qui dépassent largement ceux du simple consommateur prêt à absorber, souvent presque par inadvertance un « produit d'information ». Il existe par conséquent, un lien étroit entre la presse et la réalité démocratique.

C'est pourquoi des réponses adéquates doivent être apportées aux dérapages constamment enregistrés avant toute réforme du cadre législatif actuel de la presse. (A) Dans cette dynamique, le journaliste devra rechercher sa légitimité dans l'éthique et la déontologie qui gouverne sa profession. (B)

A. Les menaces de l'activité sur la démocratie

La soustraction du journaliste du champ de la peine privative de liberté, si elle ne veut pas paraître comme une vue de l'esprit, reste subordonnée à la maîtrise des dérapages de plus en plus enregistrés dans la profession.

Les grands reproches faits à la corporation et qui sont perçus comme les plus graves sont connus. Les atteintes à la vie privée viennent largement en tête des questions les plus préoccupantes en ce qui concerne la déontologie journalistique127(*). Elles concernent ce que d'aucuns qualifient de harcèlement de certaines personnalités menacées ou se retrouvant soudainement placées sous les projecteurs d'une actualité douloureuse, au travers de faits divers.

Les atteintes à la présomption d'innocence suscitent des émotions comparables et parfois identiques. Tout en éludant l'éthique, ces manquements illustrent l'insuffisance ou encore le manque de formation de la grande majorité des animateurs de la presse béninoise.

Dans cette dynamique, des réputations sont piétinées, des condamnations médiatiques sont prononcées par les journalistes dans des affaires encore non élucidées par les tribunaux. Des personnes sont brutalement citées, suspectées voire dénoncées, faisant ainsi d'elles des blessées de l'information. La diffusion d'une multitude d'inexactitudes ou d'approximations témoigne du manque de sérieux ou de compétence de la part de nombreux journalistes.

Certes, le respect de la vie privée est le plus souvent opposé au principe de l'intérêt public. Et il arrive que le journaliste soit confronté à un dilemme moral opposant ces deux valeurs. Pour résoudre ce dilemme, le journaliste doit délibérer en vue de faire le choix le plus approprié en se demandant notamment si:

- l'information qu'il souhaite diffuser au public le concerne t-il vraiment ? 

- le public a vraiment un intérêt légitime à connaître cette information de nature privée ?

- l'information apportera t-elle un bienfait réel au public ?

- l'information risque-t-elle d'attaquer ou de nier un droit fondamental ? Etc.

Ces questions ne conduisent pas nécessairement aux mêmes réponses, mais elles structurent sans la déterminer une délibération morale essentielle et nécessaire pour concrétiser le concept de « liberté responsable de presse ». A l'heure actuelle, où remplir les colonnes d'un journal compte parmi les tâches les plus faciles à acquitter, ce concept de liberté responsable n'est pas encore intégré aux habitudes professionnelles de la grande majorité des journalistes.

On insistera à l'occasion sur la nécessité pour les journalistes de se former, avant d'entrer dans la profession, mais aussi tout au long de leur activité. Pour une profession à forte responsabilité, on ne peut qu'être formé à l'exercice de celle-ci. Elle appelle comme toutes les professions du genre, une compétence sans cesse actualisée.

Il s'agit d'un préalable sans lequel tout débat autour de la question de la dépénalisation des délits de presse devient prématuré. Il faut en d'autres termes parvenir d'abord à un seuil de compétence tel que l'éthique et le respect des règles de déontologie puissent devenir des indicateurs de légitimité du journaliste.

B. Ethique et déontologie comme éléments de légitimité du journaliste

La légitimité de l'informateur public qu'est le journaliste trouve son origine dans la volonté ou le consentement des personnes informées, des citoyens qui reconnaissent en lui un représentant. Cette idée selon laquelle «les journalistes et les élus puisent leur légitimité à la même source, le public»128(*) n'est pas nouvelle.

Elle mérite néanmoins d'être rappelée afin d'apprécier toute l'importance qu'elle doit avoir pour quiconque s'intéresse au journalisme et prend au sérieux cette activité sociale et professionnelle. C'est ce que fait Dominique Wolton en rappelant aux journalistes que « leur seule légitimité, la seule condition de leur liberté, c'est le public. C'est aussi leur seul capital »129(*).

Daniel Cornu affirme, quant à lui, que le journaliste «est le représentant du citoyen. À ce titre, il lui incombe de nourrir le pluralisme par ses activités d'information, de commentaire et de critique »130(*). De même, il soutient que le journaliste «est également comptable de son information. Il l'est devant son public au sens large, qui légitime son activité dans la communauté politique »131(*) car, l'éthique et la déontologie du journalisme sont directement associées aux responsabilités de la presse dans une société démocratique.

Pour d'autres, la responsabilité du journaliste prend sa source dans un contrat implicite entre la presse et la société. Contrat à partir duquel on peut justifier les privilèges de la presse afin qu'elle puisse fournir aux citoyens des informations adéquates132(*).

Selon ces auteurs133(*), on peut évaluer une information diffusée par des journalistes à la compréhension qu'elle procure des faits sociaux, essentielle à la délibération d'un individu qui doit faire librement des choix. Ils estiment que la justification des privilèges accordés à la presse cesse d'être valable si celle-ci ne parvient pas à satisfaire à ces exigences134(*). Certes, un tel contrat n'existe pas dans un texte, mais il constitue le prolongement naturel de la liberté d'expression et des vertus démocratiques qui y sont associées.

Le contrat liant la presse et la société reconnaît une importante marge de liberté à la première afin de mieux servir la seconde. Il y a similarité avec Jean-Jacques Rousseau qui a reconnu que même si les clauses de son « Contrat social » n'ont «peut-être jamais été formellement énoncées, elles sont partout les mêmes, partout tacitement admises et reconnues»135(*).

Dans cette dynamique, l'érosion de la légitimité du journaliste proviendrait du non-respect flagrant et répété des termes du contrat social. Cette situation est de nature à remettre en cause la crédibilité de la presse. Dans ce contexte de méfiance, un régime de responsabilités et de devoirs plus lourds et contraignants pourrait lui être imposé par les tribunaux et le législateur.

Le renforcement des sanctions contenues dans la loi n°97-010 du 20 août 1997 portant libéralisation de l'espace audiovisuel et dispositions pénales spéciales relatives aux délits en matière de presse et de communication audiovisuelle en République du Bénin pourrait trouver sa justification en l'espèce.

Au total, compte tenu de la tendance de plus en plus affirmée à judiciariser les litiges opposant les médias et les citoyens, il y a certainement urgence et nécessité, pour les entreprises de presse de sensibiliser davantage leurs journalistes aux aspects éthiques et déontologiques de leur travail. Cela peut aussi servir à améliorer la crédibilité des médias et à protéger l'exercice de la liberté de la presse. Cette exigence insiste en fait sur les préalables liés aux organes de régulation et d'autorégulation des médias au Bénin.

Paragraphe 2 : Les préalables liés aux organes de régulation et d'autorégulation

Dans le système mixte d'encadrement de la liberté de presse qui est le nôtre, le rôle attendu des instances de régulation et d'autorégulation dans les médias est capital. Pour une dépénalisation conséquente, des réformes et des initiatives sont attendues aussi bien de l'ODEM que de la HACC.

A. L'ODEM, pour plus de déontologie dans les médias

Dans une société démocratique et pluraliste où s'impose la règle de droit, l'éthique et la déontologie du journalisme permettent de s'opposer avec un certain succès à une presse irrespectueuse des droits et libertés des citoyens.

Au Bénin, la responsabilité sociale de la presse a motivé la création de l'Observatoire de la Déontologie et de l'Ethique dans les Médias (ODEM) qui a démarré ses activités le 3 mai 1999. Dans cette dynamique, il est apparu nécessaire d'élaborer des règles de conduites professionnelles qui agiront en quelque sorte comme normes inhibitrices des égarements et dérapages médiatiques, sources d'injustices profondes pour ceux qui sont mis en cause.

En septembre 1999, les professionnels béninois des médias ont conçu un Code de déontologie en vingt-six (26) articles, qui énonce les devoirs et les droits du journaliste dans l'exercice de sa profession. Pour faire respecter ces dispositions, l'ODEM, qui apparaît comme la police interne de la corporation, agit par communiqués. Mais, il y a encore énormément de chemin a parcourir par l'ODEM dans cet environnement où les règles que l'Observatoire est appelé à garantir sont trop souvent foulées au pied.

Aujourd'hui, normes professionnelles et pratiques professionnelles sont en conflit presque permanent. Mais, toute la difficulté de l'ODEM réside en fait dans l'absence de contrainte qui caractérise ses communiqués. Il est vrai que la déontologie est une morale professionnelle dont les règles, à l'inverse du droit, ne sont contraignantes que volontairement.

Toutefois, la sanction morale que vise l'ODEM, à travers ses prises de position, devrait tout de même contribuer à asseoir au sein de la corporation, un code moral fondé sur des valeurs comprises, acceptées et respectées par la majorité de ses membres. Ce qui aujourd'hui n'est pas encore le cas.

L'autre difficulté réside dans son incapacité matérielle à suivre de près et à rappeler à l'ordre sur les nombreux manquements à la déontologie couramment enregistrés. Cela aurait été d'une grande utilité même si les décisions prises ne revêtent que le sceau de la sanction morale.

A la base de cette difficulté se trouve la charge financière insupportable qu'induirait cette activité pour l'ODEM. Cette instance se contente de faire vérifier le respect de la déontologie par quelques journalistes qu'il emploie souvent sur une période d'un mois au taux forfaitaire de cinq mille francs CFA par jour.

On se demande, au regard de l'élan qui a présidé à la création de l'ODEM, si dans cette même foulée il ne pouvait pas être institué au sein de la corporation, une forme de participation financière de chaque journaliste au budget de fonctionnement de l'ODEM ? Cette participation pourrait permettre à l'ODEM d'assurer un contrôle plus régulier. Cette suggestion s'explique par la nécessité de doter cette instance de plus de moyens financiers.

Par ailleurs, le retard accusé par cette instance d'autorégulation dans l'examen de certaines plaintes à elle adressées est également une difficulté à surmonter. Il est vrai que le citoyen béninois n'est pas plaideur de nature, de sorte que de nombreux manquements passent sous silence. Mais ce retard dans l'étude des plaintes frustre le citoyen diligent qui, parfois, soupçonne une forme pernicieuse de collusion entre l'Observatoire et les journalistes qu'il est appelé à contrôler.

En effet, le sentiment de protection outrancière des journalistes que ressent le citoyen vis-à-vis d'un tel silence jugé éloquent conduit ce dernier à saisir le juge. En attendant de résoudre ces préalables, l'ODEM pourrait déjà proposer la suppression de l'interdiction faite au journaliste de prouver la vérité des faits diffamatoires lorsque ces faits remontent à plus de dix ans. Cette interdiction prescrite par l'alinéa b de l'article 32 de la loi 60-12 nous paraît arbitraire. Il en est ainsi car, dans certaines hypothèses, malgré la véracité des faits allégués, le journaliste sera condamné pour diffamation motif pris de l'écoulement d'un certain délai.

Par ailleurs, la loi 97-032 du 20 août 1997 portant libéralisation de l'espace audiovisuel et dispositions pénales spéciales relatives aux délits en matière de presse et de communication audiovisuelle en république du Bénin réalise une avancée notable par rapport à la loi 60-12 sur la liberté de presse. Face à l'hésitation de la loi 60-12, qui énonce en son article 50 qu' « en matière de presse, la détention préventive est en principe interdite », la loi 97-032, plus affirmative, dispose en son article 107 que « la détention préventive en matière de presse est interdite ». Dans cette dynamique, on pourrait suggérer que l'interdiction énoncée à l'article 107 de cette loi soit étendue à la garde à vue.

Tout comme l'ODEM, la HAAC également n'est pas à l'abri des améliorations recherchées.

B. Le renforcement des capacités de contrôle de la HAAC

Pour accomplir efficacement la mission qui lui est assignée, la HAAC a été dotée de nombreuses attributions qui font encore d'elle aujourd'hui, une institution adulée par ses paires136(*). La Constitution du Bénin du 11 décembre 1990 investit cette institution d'une mission générale de garant de « la liberté et la protection de presse ainsi que de tous les moyens de communication de masse dans le respect de la loi »137(*).

D'autres dispositions législatives renseignent sur l'étendue des missions conférées à cette institution138(*).

Essentiellement de trois ordres, ces attributions sont d'abord relatives au pluralisme et à la liberté de la presse, ensuite à l'exercice de la profession de journaliste et enfin à la gestion des fréquences139(*).

Mais, pour ce qui est de cette étude, les préalables qui doivent être remplis par l'institution avant tout processus de dépénalisation sont surtout liés aux attributions relatives à l'exercice de la profession de journaliste. Dans ce domaine, des actions louables de promotion de la déontologie sont certes menées par l'institution. Il s'agit notamment des séminaires et colloques périodiquement organisés par la HAAC. Mais ces actions restent insuffisantes face à l'ampleur des besoins en formation140(*).

Il en est ainsi d'abord parce que les rencontres dont il s'agit ne sont pas fréquentes. Ensuite, lorsqu'elles se tiennent, elles mobilisent un nombre assez réduit d'acteurs des médias. Ces obstacles à surmonter par la HAAC pourraient bien avoir des origines économiques car l'organisation des séminaires et ateliers de formation à intervalles réguliers comporte nécessairement une charge financière que l'institution ne saurait acquitter au regard de ses ressources.

Une autre difficulté pas toujours soulevée réside dans l'hostilité sourde des professionnels des médias face au rôle de la HAAC en matière de déontologie. Au sein des professionnels de la presse, l'on admet difficilement que les questions de déontologie soient du ressort de la HAAC141(*).

En réaction contre cette situation, l'Union des Journalistes de la Presse Privée du Bénin avait déféré à la censure de la Cour Constitutionnelle, une décision de la HAAC142(*). Une autre manifestation tangible de cette hostilité est tirée de la création de l'ODEM en mai 1999143(*).

C'est dans ce même esprit que s'inscrit la désapprobation des professionnels des médias au lendemain de la décision de la HAAC portant réglementation des commentaires et autres analyses entre les deux tours des élections présidentielles de mars 2006.

Mais, cette attitude suscite cependant une interrogation. Comment dans un monde où chacun se soumet à la réflexion et se trouve confronté à l'exigence de transparence, les journalistes pourraient-ils prétendre que la déontologie et l'éthique qui gouvernent leur profession ne peuvent être jugées que par eux-mêmes ? Il est vrai que la décision d'un tribunal des pairs revêt toujours un caractère exceptionnel. Toutefois, la présence de journalistes praticiens au sein de la HAAC devrait pourtant suffire à dissiper les appréhensions vis-à-vis de cette institution.

Par ailleurs, il est à souhaiter que la HAAC rende effective sa décision n°05-154/HAAC du 16 septembre 2005 portant réglementation de la carte de presse au Bénin. Il s'agit d'accélérer la procédure de délivrance de la carte de presse.

De même, au titre des pièces mentionnées à l'article 20 de ladite décision, la HAAC aurait pu exiger de façon expresse des coupures de presse aux candidats à la carte de presse avec obligation pour ces derniers de préciser les genres journalistiques dans lesquels s'inscrivent leurs articles. Cette exigence permettrait au jury chargé de l'étude des dossiers, de statuer sur les connaissances du postulant en matière d'écriture de presse.

Le renforcement des capacités de la HAAC devrait être également recherché en termes d'autonomie financière à accorder à l'institution afin de lui permettre d'imprimer davantage de célérité à ses prestations.

CONCLUSION GENERALE

Le débat sur la suppression des peines d'emprisonnement en matière de délits de presse au Bénin semble, à l'analyse, quelque peu prématuré. Ainsi qu'il a été souligné, de nombreux préalables doivent être remplis afin que la dépénalisation telle que réclamée ne remette pas en cause l'équilibre qui doit nécessairement exister entre la liberté de presse et la protection des citoyens et des institutions de la république.

Mais, ce débat a tout de même l'avantage de montrer que des aménagements peuvent être apportés au régime actuel de répression des délits de presse au Bénin.

En tout état de cause, de fermes convictions ainsi que de légitimes préoccupations se dégagent de cette étude. Au Bénin, la liberté d'expression en général et celle de la presse en particulier n'apparaissent pas menacées par les pouvoirs publics. Quant à la menace qui pèse sur cette liberté du fait des acteurs des médias eux-mêmes, elle est plutôt certaine. Les nombreuses atteintes à la vie privée et à la présomption d'innocence des citoyens du fait des médias en sont la preuve. Pourtant, la presse conserve aujourd'hui les moyens d'accomplir la tâche qui lui est dévolue et qui consiste à donner une information suffisamment vérifiée, objective, honnête et loyale.

Mais, il reste que la responsabilité morale et juridique de la presse doit être à la hauteur de cette tâche. Car, tant que la presse servira sa véritable mission d'information, la liberté au nom de laquelle elle officie lui assurera toujours sa protection. L'information est une arme et les journalistes doivent justifier de leur aptitude à la posséder et de leur capacité à s'en servir.

Car, ainsi que le souligne Etienne MONTERO : « On sait combien les fausses nouvelles, les vagues rumeurs, les approximations, les demi vérités, les demi mensonges [...] peuvent, en un instant, ébranler le crédit ou ruiner la réputation des personnes visées, et, à la longue, semer la confusion dans l'opinion publique, jeter le discrédit sur les institutions et faire douter de tout et de tous. Bref, autant l'information contribue à édifier les intelligences et à maintenir en éveil le sens critique des citoyens, autant la désinformation mine la démocratie »144(*).

Malheureusement, cette double preuve de leur capacité et de leur aptitude ne fait pas encore l'unanimité au sein du public. Les acteurs de la presse eux-mêmes sont convaincus de cette réalité.

Sur un autre registre, les études sur la presse au Bénin sont riches en histoire, en droit, en sociologie, mais rarement en économie. Lorsqu'elles existent, ces études économiques partent d'un point de vue micro-économique et se concentrent sur la situation des organes de presse. Les études macro-économiques sont rares, sans doute du fait de l'hétérogénéité des médias, notamment de la presse écrite, ou aussi, à cause du contexte quasi artisanal qui caractérise encore largement la presse.

Pourtant, la pratique du journalisme en système libéral comme c'est le cas au Bénin, s'inscrit nécessairement dans une logique de marché. Et toute réflexion sur l'état de la presse doit en tenir compte et intégrer le noyau dur des objectifs économiques des médias dans les stratégies de performance du secteur.

Malheureusement, face à ce noyau dur, les journalistes apparaissent comme un corps encore trop fragile et quasiment sans défense face aux incursions des hommes politiques davantage guidés par la propagande que la communication.

Dans ce contexte, malheureusement, les contours de la profession restent encore flous. Tant et si bien que les fonctions sociales de la presse et le savoir-faire de ses animateurs sont diversement appréciés. L'existence de normes éthiques et déontologiques, d'instances de régulation et d'autorégulation ne permet pas encore de dessiner d'un trait sûr les limites de l'univers professionnel des journalistes au Bénin. Il en est ainsi compte tenu des nombreuses dérives enregistrées chaque jour aussi bien sur les ondes que dans les colonnes de la myriade d'organes de presse existant sur le territoire du Bénin.

Ces réalités, qui dominent le contexte actuel d'exercice de la profession de journaliste au Bénin, ne militent pas en faveur d'une option de dépénalisation des délits de presse. Il est donc nécessaire que des préalables soient remplis.

Aujourd'hui, l'un des principaux enjeux de l'Union des Professionnels des Médias du Bénin (UPMB) est de faire reconnaître le journalisme comme une profession et de permettre à ses membres d'acquérir un statut de «journaliste professionnel». Cet enjeu louable en indique par la même occasion sur toute la porosité de la profession à diverses formes d'amateurisme.

En définitive, cette logique de réhabilitation de la fonction de journaliste doit également intégrer de façon sérieuse les conditions de travail du journaliste en y voyant un élément de garantie pour la communauté nationale. Car, la pratique de la vertu suppose un minimum de bien-être. Ce qui, aujourd'hui, est loin d'être l'apanage du journaliste béninois et de celui des organes de presse privée encore moins.

ANNEXE I :

Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse en France

Aperçu historique

La loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse est le texte fondateur du cadre légal de la presse. D'inspiration libérale, la loi adoptée par les législateurs de la IIIème République s'inscrivait alors dans l'esprit de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, dont l'article 11 énonce : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ».

Ainsi, la protection de cette liberté ne doit pas empiéter sur la reconnaissance d'autres libertés et droits fondamentaux. Suivant cette idée, les nombreuses modifications législatives ont eu pour effet d'instituer un régime de liberté contrôlée.

La loi du 29 juillet 1881 a été modifiée et complétée notamment par la loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle et celle du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse. A ces textes est venu s'ajouter l'importante loi du 13 juillet 1990 sur le racisme, dite « loi Gayssot ».

Textes associés

- Loi du 29 juillet 1982 ;

- Loi du 1er août 1986 ;

- Loi du 13 juillet 1990.

____________________________

CHAPITRE Ier - DE L'IMPRIMERIE ET DE LA LIBRAIRIE

Article 1er

L'imprimerie et la librairie sont libres.

Article 2

(Décret-loi du 29 juillet 1939 Journal Officiel du 3 août 1939)

(Loi n° 58-92 du 4 février 1958 art. 1 Journal Officiel du 5 février 1958)

(Loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 art. 16 Journal Officiel du 31 décembre 1977)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 et 329 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

Tout écrit rendu public, à l'exception des ouvrages de ville ou bilboquets, portera l'indication du nom et du domicile de l'imprimeur, à peine, contre celui-ci, de 25000 F d'amende.

La distribution des imprimés qui ne porteraient pas la mention exigée au paragraphe précédent est interdite et la même peine est applicable à ceux qui contreviendraient à cette interdiction.

Une peine de six mois d'emprisonnement pourra être prononcée si, dans les douze mois précédents, l'imprimeur a été condamné pour contravention de même nature.

Toutefois, si l'imprimé fait appel à des techniques différentes et nécessite le concours de plusieurs imprimeurs, l'indication du nom et du domicile de l'un d'entre eux est suffisante.

CHAPITRE II - DE LA PRESSE PERIODIQUE

Paragraphe 1er : Du droit de publication, de la gérance, de la déclaration et du dépôt au parquet

Article 5

Tout journal ou écrit périodique peut être publié, sans autorisation préalable et sans dépôt de cautionnement, après la déclaration prescrite par l'article 7.

Article 6

(Ordonnance du 26 août 1944 art. 15 Journal Officiel du 30 août 1944)

(Loi n° 52-336 du 25 mars 1952 art. 1 Journal Officiel du 26 mars 1952)

(Loi n° 86-897 du 1 août 1986 art. 9 Journal Officiel du 2 août 1986)

Toute publication de presse doit avoir un directeur de la publication.

Lorsqu'une personne physique est propriétaire ou locataire gérant d'une entreprise éditrice au sens de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse ou en détient la majorité du capital ou des droits de vote, cette personne est directeur de la publication. Dans les autres cas, le directeur de la publication est le représentant légal de l'entreprise éditrice. Toutefois, dans les sociétés anonymes régies par les articles 118 à 150 de la loi 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, le directeur de la publication est le président du directoire ou le directeur général unique.

Si le directeur de la publication jouit de l'immunité parlementaire dans les conditions prévues à l'article 26 de la Constitution et aux articles 9 et 10 du Protocole du 8 avril 1965 sur les privilèges et immunités des communautés européennes, l'entreprise éditrice doit nommer un codirecteur de la publication choisi parmi les personnes ne bénéficiant pas de l'immunité parlementaire et, lorsque l'entreprise éditrice est une personne morale, parmi les membres du conseil d'administration, du directoire ou les gérants suivant la forme de ladite personne morale.

Le codirecteur de la publication doit être nommé dans le délai d'un mois à compter de la date à partir de laquelle le directeur de la publication bénéficie de l'immunité visée à l'alinéa précédent.

Le directeur et, éventuellement, le codirecteur de la publication doivent être majeurs, avoir la jouissance de leurs droits civils et n'être privés de leurs droits civiques par aucune condamnation judiciaire.

Toutes les obligations légales imposées au directeur de la publication sont applicables au codirecteur de la publication.

Article 7

(Ordonnance du 26 août 1944 Journal Officiel du 30 août 1944)

(Loi n° 52-336 du 25 mars 1952 art. 2 Journal Officiel du 26 mars 1952)

(Loi n° 86-897 du 1 août 1986 art. 14 Journal Officiel du 2 août 1986)

Avant la publication de tout journal ou écrit périodique, il sera fait au parquet du procureur de la République, une déclaration contenant :

1° Le titre du journal ou écrit périodique et son mode de publication ;

2° Le nom et la demeure du directeur de la publication et, dans le cas prévu au troisième alinéa de l'article 6, du codirecteur de la publication ;

3° L'indication de l'imprimerie où il doit être imprimé.

Toute mutation dans les conditions ci-dessus énumérées sera déclarée dans les cinq jours qui suivront.

Article 8

(Ordonnance du 26 août 1944 art. 15 Journal Officiel du 30 août 1944)

Les déclarations seront faites par écrit, sur papier timbré, et signées du directeur de la publication. Il en sera donné récépissé.

Article 9

(Ordonnance du 26 août 1944 art. 15 Journal Officiel du 30 août 1944)

(Loi n° 52-336 du 25 mars 1952 art. 3 Journal Officiel du 26 mars 1952)

(Décret n° 80-567 du 18 juillet 1980 art. 2 Journal Officiel du 23 juillet 1980)

(Loi n° 86-897 du 1 août 1986 art. 14 Journal Officiel du 2 août 1986)

(Décret n° 89-989 du 29 décembre 1989 art. 1 Journal Officiel du 31 décembre 1989 en vigueur le 1er janvier 1990)

(Décret n° 93-726 du 29 mars 1993 art. 2 Journal Officiel du 30 mars 1993 en vigueur le 1er mars 1994)

En cas de contravention aux dispositions prescrites par les articles 6, 7 et 8, le propriétaire, le directeur de la publication et, dans le cas prévu au troisième alinéa de l'article 6, le codirecteur de la publication seront punis de l'amende prévue pour les contraventions de la 5° classe. La peine sera applicable à l'imprimeur à défaut du propriétaire ou du directeur ou, dans le cas prévu au troisième alinéa de l'article 6, du codirecteur de la publication.

Le journal ou écrit périodique ne pourra continuer sa publication qu'après avoir rempli les formalités ci-dessus prescrites, à peine, si la publication irrégulière continue, de l'amende prévue pour les contraventions de la 4° classe prononcée solidairement contre les mêmes personnes, pour chaque numéro publié à partir du jour de la prononciation du jugement de condamnation, si ce jugement est contradictoire, et du troisième jour qui suivra sa notification, s'il a été rendu par défaut ; et ce, nonobstant opposition ou appel, si l'exécution provisoire est ordonnée.

Le condamné, même par défaut, peut interjeter appel. Il sera statué par la cour dans le délai de trois jours.

Article 10

(Ordonnance du 26 août 1944 Journal Officiel du 30 août 1944)

(Loi du 31 décembre 1945 finances Journal Officiel du 1er janvier 1946)

(Décret n° 72-473 du 12 juin 1972 Journal Officiel du 13 juin 1972)

(Décret n° 80-567 du 18 juillet 1980 Journal Officiel du 23 juillet 1980)

(Décret n° 93-726 du 29 mars 1993 art. 2 Journal Officiel du 30 mars 1993 en vigueur le 1er mars 1994)

Au moment de la publication de chaque feuille ou livraison du journal ou écrit périodique, il sera remis au parquet du procureur de la République, ou à la mairie dans les villes où il n'y a pas de tribunal de grande instance, deux exemplaires signés du directeur de la publication .

Dix exemplaires devront, dans les mêmes conditions, être déposés au ministère de l'information pour Paris et le département de la Seine et pour les autres départements à la préfecture, à la sous-préfecture ou à la mairie, dans les villes qui ne sont ni chefs-lieux de département ni chefs-lieux d'arrondissement.

Chacun de ces dépôts sera effectué sous peine de l'amende prévue pour les contraventions de la 4° classe contre le directeur de la publication.

Article 11

(Ordonnance du 26 août 1944 art. 15 Journal Officiel du 30 août 1944)

(Décret n° 80-567 du 18 juillet 1980 art. 2 Journal Officiel du 23 juillet 1980)

(Décret n° 93-726 du 29 mars 1993 art. 2 Journal Officiel du 30 mars 1993 en vigueur le 1er mars 1994)

Le nom du directeur de la publication sera imprimé au bas de tous les exemplaires, à peine contre l'imprimeur de l'amende prévue pour les contraventions de la 4° classe par chaque numéro publié en contravention de la présente disposition .

Paragraphe 2 : Des rectifications

Article 12

(Ordonnance du 26 août 1944 art. 15 Journal Officiel du 30 août 1944)

(Loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 art. 12 Journal Officiel du 31 décembre 1977)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 et 329 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

Le directeur de la publication sera tenu d'insérer gratuitement, en tête du prochain numéro du journal ou écrit périodique, toutes les rectifications qui lui seront adressées par un dépositaire de l'autorité publique, au sujet des actes de sa fonction qui auront été inexactement rapportés par ledit journal ou écrit périodique .

Toutefois, ces rectifications ne dépasseront pas le double de l'article auquel elles répondront.

En cas de contravention, le directeur de la publication sera puni de 25000 F d'amende.

Article 13

(Loi du 29 septembre 1918 Journal Officiel du 1er octobre 1919)

(Ordonnance du 26 août 1944 art. 15 Journal Officiel du 30 août 1944)

(Loi n° 46-2151 du 5 octobre 1946 art. 33 Journal Officiel du 8 octobre 1946)

(Loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 art. 16 Journal Officiel du 31 décembre 1977)

(Décret n° 80-567 du 18 septembre 1980 art. 2 Journal Officiel du 23 juillet 1980)

(Loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 art. 50 et 51 Journal Officiel du 5 janvier 1993)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 et 329 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 94 Journal Officiel du 16 juin 2000)

Le directeur de la publication sera tenu d'insérer dans les trois jours de leur réception, les réponses de toute personne nommée ou désignée dans le journal ou écrit périodique quotidien sous peine de 25000 F d'amende sans préjudice des autres peines et dommages intérêts auxquels l'article pourrait donner lieu.

En ce qui concerne les journaux ou écrits périodiques non quotidiens, le directeur de la publication, sous les mêmes sanctions, sera tenu d'insérer la réponse dans le numéro qui suivra le surlendemain de la réception.

Cette insertion devra être faite à la même place et en mêmes caractères que l'article qui l'aura provoquée, et sans aucune intercalation.

Non compris l'adresse, les salutations, les réquisitions d'usage et la signature qui ne seront jamais comptées dans la réponse, celle-ci sera limitée à la longueur de l'article qui l'aura provoquée. Toutefois, elle pourra atteindre cinquante lignes, alors même que cet article serait d'une longueur moindre, et elle ne pourra dépasser deux cents lignes, alors même que cet article serait d'une longueur supérieure. Les dispositions ci-dessus s'appliquent aux répliques, lorsque le journaliste aura accompagné la réponse de nouveaux commentaires.

La réponse sera toujours gratuite. Le demandeur en insertion ne pourra excéder les limites fixées au paragraphe précédent en offrant de payer le surplus.

La réponse ne sera exigible que dans l'édition ou les éditions où aura paru l'article.

Sera assimilé au refus d'insertion, et puni des mêmes peines, sans préjudice de l'action en dommages intérêts, le fait de publier, dans la région desservie par les éditions ou l'édition ci-dessus, une édition spéciale d'où serait retranchée la réponse que le numéro correspondant du journal était tenu de reproduire.

Le tribunal prononcera, dans les dix jours de la citation, sur la plainte en refus d'insertion. Il pourra décider que le jugement ordonnant l'insertion, mais en ce qui concerne l'insertion seulement, sera exécutoire sur minute, nonobstant opposition ou appel. S'il y a appel, il y sera statué dans les dix jours de la déclaration, faite au greffe.

Pendant toute période électorale, le délai de trois jours prévu pour l'insertion par le paragraphe 1er du présent article sera, pour les journaux quotidiens, réduit à vingt-quatre heures. La réponse devra être remise six heures au moins avant le tirage du journal dans lequel elle devra paraître. Dès ouverture de la période électorale, le directeur de la publication du journal sera tenu de déclarer au parquet, sous les peines édictées au paragraphe 1er, l'heure à laquelle, pendant cette période, il entend fixer le tirage de son journal. Le délai de citation sur refus d'insertion sera réduit à vingt-quatre heures, sans augmentation pour les distances, et la citation pourra même être délivrée d'heure à heure sur ordonnance spéciale rendue par le président du tribunal. Le jugement ordonnant l'insertion sera exécutoire, mais en ce qui concerne cette insertion seulement, sur minute, nonobstant opposition ou appel.

Si l'insertion ainsi ordonnée n'est pas faite dans le délai qui est fixé par le présent alinéa et qui prendra cours à compter du prononcé du jugement, le directeur de la publication sera passible de trois mois d'emprisonnement et de 25000 F d'amende.

L'action en insertion forcée se prescrira après trois mois révolus, à compter du jour où la publication aura eu lieu.

Sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent, toute personne nommée ou désignée dans un journal ou écrit périodique à l'occasion de l'exercice de poursuites pénales peut également exercer l'action en insertion forcée, dans le délai de trois mois à compter du jour où la décision de non-lieu dont elle fait l'objet est intervenue ou celle de relaxe ou d'acquittement la mettant expressément ou non hors de cause est devenue définitive.

Article 13-1

(inséré par Loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 art. 7 Journal Officiel du 14 juillet 1990)

Le droit de réponse prévu par l'article 13 pourra être exercé par les associations remplissant les conditions prévues par l'article 48-1, lorsqu'une personne ou un groupe de personnes auront, dans un journal ou écrit périodique, fait l'objet d'imputations susceptibles de porter atteinte à leur honneur ou à leur réputation à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.

Toutefois, quand la mise en cause concernera des personnes considérées individuellement, l'association ne pourra exercer le droit de réponse que si elle justifie avoir reçu leur accord.

Aucune association ne pourra requérir l'insertion d'une réponse en application du présent article dès lors qu'aura été publiée une réponse à la demande d'une des associations remplissant les conditions prévues par l'article 48-1.

Paragraphe 3 : Des journaux ou écrits périodiques étrangers

Article 14

(Décret-loi du 6 mai 1939 Journal Officiel du 7 mai 1939 rectificatif JORF 13 mai)

(Loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 art. 16 Journal Officiel du 31 décembre 1977)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

La circulation, la distribution ou la mise en vente en France des journaux ou écrits, périodiques ou non, rédigés en langue étrangère, peut être interdite par décision du ministre de l'intérieur.

Cette interdiction peut également être prononcée à l'encontre des journaux et écrits de provenance étrangère rédigés en langue française, imprimés à l'étranger ou en France.

Lorsqu'elles sont faites sciemment, la mise en vente, la distribution ou la reproduction des journaux et écrits interdits sont punies d'un an d'emprisonnement et de 30000 F d'amende.

Il en est de même de la reprise de la publication d'un journal ou d'un écrit interdit, sous un titre différent. Toutefois, en ce cas, l'amende est portée à 60000 F.

Il est procédé à la saisie administrative des exemplaires et des reproductions de journaux et écrits interdits et de ceux qui en reprennent la publication sous un titre différent.

CHAPITRE III - DE L'AFFICHAGE, DU COLPORTAGE ET DE LA VENTE SUR LA VOIE PUBLIQUE

Paragraphe 1er : De l'affichage

Article 15

(Loi n° 69-1067 du 28 novembre 1969)

Dans chaque commune, le maire, désignera, par arrêté, les lieux exclusivement destinés à recevoir les affiches des lois et autres actes de l'autorité publique.

Il est interdit d'y placarder des affiches particulières.

Les affiches des actes émanés de l'autorité seront seules imprimées sur papier blanc. Toutefois, est licite l'usage du papier blanc pour l'impression d'affiches publicitaires lorsque celles-ci sont recouvertes de caractères ou d'illustrations de couleur et lorsque toute confusion, soit dans le texte, soit dans la présentation matérielle, est impossible avec les affiches administratives.

Toute contravention aux dispositions du présent article sera punie des peines portées en l'article 2.

Article 16

Les professions de foi, circulaires et affiches électorales pourront être placardées, à l'exception des emplacements réservés par l'article précédent, sur tous les édifices publics autres que les édifices consacrés au culte, et particulièrement aux abords des salles de scrutin.

Article 17

(Décret n° 80-567 du 18 juillet 1980 art. 1, art. 2, art. 3 Journal Officiel du 23 juillet 1980)

(Décret n° 93-726 du 29 mars 1993 art. 1 et 2 Journal Officiel du 30 mars 1993 en vigueur le 1er mars 1994)

Ceux qui auront enlevé, déchiré, recouvert ou altéré par un procédé quelconque, de manière à les travestir ou à les rendre illisibles, les affiches apposées par ordre de l'Administration dans les emplacements à ce réservés, seront punis de l'amende prévue pour les contraventions de la 2° classe.

Si le fait a été commis par un fonctionnaire ou un agent de l'autorité publique, la peine sera de l'amende prévue pour les contraventions de la 4° classe.

Seront punis de l'amende prévue pour les contraventions de la 2° classe ceux qui auront enlevé, déchiré, recouvert ou altéré par un procédé quelconque, de manière à les travestir ou à les rendre illisibles, des affiches électorales émanant de simples particuliers, apposées ailleurs que sur les propriétés de ceux qui auront commis cette lacération ou altération.

La peine sera de l'amende prévue pour les contraventions de la 4° classe, si le fait a été commis par un fonctionnaire ou agent de l'autorité publique, à moins que les affiches n'aient été apposées dans les emplacements réservés par l'article 15.

Paragraphe 2 : Du colportage et de la vente sur la voie publique

Article 18

Quiconque voudra exercer la profession de colporteur ou de distributeur sur la voie publique ou tout autre lieu public ou privé, de livres, écrits, brochures, journaux, dessins, gravures, lithographies et photographies, sera tenu d'en faire la déclaration à la préfecture du département où il a son domicile.

Toutefois, en ce qui concerne les journaux et autres feuilles périodiques, la déclaration pourra être faite, soit à la mairie de la commune dans laquelle doit se faire la distribution, soit à la sous-préfecture. Dans ce dernier cas, la déclaration produira son effet pour toutes les communes de l'arrondissement.

Article 19

La déclaration contiendra les nom, prénoms, profession, domicile, âge et lieu de naissance du déclarant.

Il sera délivré immédiatement et sans frais au déclarant un récépissé de sa déclaration.

Article 20

La distribution et le colportage accidentels ne sont assujettis à aucune déclaration.

Article 21

(Décret n° 80-567 du 18 juillet 1980 art. 1, art. 2 et art. 3 Journal Officiel du 23 juillet 1980)

(Décret n° 93-726 du 29 mars 1993 art. 1 et 2 Journal Officiel du 30 mars 1993 en vigueur le 1er mars 1994)

L'exercice de la profession de colporteur ou de distributeur sans déclaration préalable, la fausseté de la déclaration, le défaut de présentation à toute réquisition du récépissé constituent des contraventions.

Les contrevenants seront punis de l'amende prévue pour les contraventions de la 3° classe.

Article 22

Les colporteurs et distributeurs pourront être poursuivis conformément au droit commun, s'ils ont sciemment colporté ou distribué des livres, écrits, brochures, journaux, dessins, gravures, lithographies et photographies, présentant un caractère délictueux, sans préjudice des cas prévus à l'article 42.

CHAPITRE IV - DES CRIMES ET DELITS COMMIS PAR LA VOIE DE LA PRESSE OU PAR TOUT AUTRE MOYEN DE PUBLICATION

Paragraphe 1er : Provocation aux crimes et délits

Article 23

(Loi n° 72-546 du 1 juillet 1972 Journal Officiel du 2 juillet 1972)

(Loi n° 85-1317 du 13 décembre 1985 art. 18-i Journal Officiel du 24 décembre 1985)

Seront punis comme complices d'une action qualifiée crime ou délit ceux qui, soit par des discours, cris ou menaces proférés dans des lieux ou réunions publics, soit par des écrits, imprimés, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images ou tout autre support de l'écrit, de la parole ou de l'image vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics, soit par des placards ou des affiches exposés au regard du public, soit par tout moyen de communication audiovisuelle, auront directement provoqué l'auteur ou les auteurs à commettre ladite action, si la provocation a été suivie d'effet .

Cette disposition sera également applicable lorsque la provocation n'aura été suivie que d'une tentative de crime prévue par l'article 2 du code pénal.

Article 24

(Loi du 12 décembre 1893 Bulletin LOIS N° 1585 p. 905)

(Loi du 10 janvier 1936 Journal Officiel du 12 janvier 1936)

(Ordonnance du 6 mai 1944 Journal Officiel du 20 mai 1944 rectificatif p. 418)

(Loi n° 51-18 du 5 janvier 1951 Journal Officiel du 6 janvier 1951)

(Loi n° 56-1327 du 29 décembre 1956 art. 7 finances Journal Officiel du 30 décembre 1956)

(Loi n° 72-546 du 1 juillet 1972 Journal Officiel du 2 juillet 1972)

(Décret n° 80-567 du 18 juillet 1980 art. 2 Journal Officiel du 23 juillet 1980)

(Loi n° 86-1020 du 9 septembre 1986 art. 8 Journal Officiel du 10 septembre 1986)

(Loi n° 87-1157 du 31 décembre 1987 art. 15 Journal Officiel du 5 janvier 1988)

(Loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 art. 8 Journal Officiel du 14 juillet 1990)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 246, 322, 326, 330, 331 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

Seront punis de cinq ans d'emprisonnement et de 300 000 F d'amende ceux qui, par l'un des moyens énoncés à l'article précédent, auront directement provoqué, dans le cas où cette provocation n'aurait pas été suivie d'effet, à commettre l'une des infractions suivantes :

1° Les atteintes volontaires à la vie, les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne et les agressions sexuelles, définies par le livre II du code pénal ;

2° Les vols, les extorsions et les destructions, dégradations et détériorations volontaires dangereuses pour les personnes, définis par le livre III du code pénal.

Ceux qui, par les mêmes moyens, auront directement provoqué à l'un des crimes et délits portant atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation prévus par le titre Ier du livre IV du code pénal, seront punis des mêmes peines.

Seront punis de la même peine ceux qui, par l'un des moyens énoncés en l'article 23, auront fait l'apologie des crimes visés au premier alinéa, des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité ou des crimes et délits de collaboration avec l'ennemi.

Seront punis des peines prévues par l'alinéa 1er ceux qui, par les mêmes moyens, auront provoqué directement aux actes de terrorisme prévus par le titre II du livre IV du code pénal, ou qui en auront fait l'apologie.

Tous cris ou chants séditieux proférés dans les lieux ou réunions publics seront punis de l'amende prévue pour les contraventions de la 4° classe.

Ceux qui, par l'un des moyens énoncés à l'article 23, auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, seront punis d'un an d'emprisonnement et de 300000 F d'amende ou de l'une de ces deux peines seulement.

En cas de condamnation pour l'un des faits prévus par l'alinéa précédent, le tribunal pourra en outre ordonner :

1° Sauf lorsque la responsabilité de l'auteur de l'infraction est retenue sur le fondement de l'article 42 et du premier alinéa de l'article 43 de la présente loi ou des trois premiers alinéas de l'article 93-3 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, la privation des droits énumérés aux 2° et 3° de l'article 131-26 du code pénal pour une durée de cinq ans au plus;

2° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal.

Article 24 bis

(Loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 art. 9 Journal Officiel du 14 juillet 1990)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 247 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

Seront punis des peines prévues par le sixième alinéa de l'article 24 ceux qui auront contesté, par un des moyens énoncés à l'article 23, l'existence d'un ou plusieurs crimes contre l'humanité tels qu'ils sont définis par l'article 6 du statut du tribunal militaire international annexé à l'accord de Londres du 8 août 1945 et qui ont été commis soit par les membres d'une organisation déclarée criminelle en application de l'article 9 dudit statut, soit par une personne reconnue coupable de tels crimes par une juridiction française ou internationale.

Le tribunal pourra en outre ordonner :

1° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal.

Paragraphe 2 : Délits contre la chose publique

Article 26

(Ordonnance du 6 mai 1944 Journal Officiel du 20 mai 1944 rectificatif P. 418)

(Loi n° 56-1327 du 29 décembre 1956 art. 7 finances Journal Officiel du 10 décembre 1956)

(Loi n° 72-546 du 1 juillet 1972 art. 2 Journal Officiel du 2 juillet 1972)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 90 Journal Officiel du 16 juin 2000)

L'offense au Président de la République par l'un des moyens énoncés dans l'article 23 est punie d'une amende de 300.000 F.

Les peines prévues à l'alinéa précédent sont applicables à l'offense à la personne qui exerce tout ou partie des prérogatives du Président de la République.

Article 27

(Ordonnance du 6 mai 1944 Journal Officiel du 20 mai 1944 rectificatif p. 418)

(Loi n° 56-1327 du 29 décembre 1956 art. 7 finances Journal Officiel du 30 décembre 1956)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 90 Journal Officiel du 16 juin 2000)

La publication, la diffusion ou la reproduction, par quelque moyen que ce soit, de nouvelles fausses, de pièces fabriquées, falsifiées ou mensongèrement attribuées à des tiers lorsque, faite de mauvaise foi, elle aura troublé la paix publique, ou aura été susceptible de la troubler, sera punie d'une amende de 300.000 F.

Les mêmes faits seront punis 900.000 F d'amende, lorsque la publication, la diffusion ou la reproduction faite de mauvaise foi sera de nature à ébranler la discipline ou le moral des armées ou à entraver l'effort de guerre de la Nation.

Paragraphe 3 : Délits contre les personnes

Article 29

Toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l'identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés.

Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait est une injure.

Article 30

(Ordonnance du 6 mai 1944 Journal Officiel du 20 mai 1944 rectificatif p. 418)

(Loi n° 56-1327 du 29 décembre 1956 art. 7 finances Journal Officiel du 30 décembre 1956)

(Loi n° 72-546 du 1 juillet 1972 art. 2 Journal Officiel du 2 juillet 1972)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 90 Journal Officiel du 16 juin 2000)

La diffamation commise par l'un des moyens énoncés en l'article 23 envers les cours, les tribunaux, les armées de terre, de mer ou de l'air, les corps constitués et les administrations publiques, sera punie d'une amende de 300.000 F.

Article 31

Sera punie de la même peine , la diffamation commise par les mêmes moyens, à raison de leurs fonctions ou de leur qualité, envers un ou plusieurs membres du ministère, un ou plusieurs membres de l'une ou de l'autre Chambre , un fonctionnaire public, un dépositaire ou agent de l'autorité publique, un ministre de l'un des cultes salariés par l'Etat, un citoyen chargé d'un service ou d'un mandat public temporaire ou permanent, un juré ou un témoin, à raison de sa déposition.

La diffamation contre les mêmes personnes concernant la vie privée relève de l'article 32 ci-après.

Article 32

(Décret-loi du 21 avril 1939 Journal Officiel du 25 avril 1939)

(Ordonnance du 24 novembre 1943 Journal Officiel du 27 novembre 1943)

(Loi n° 72-546 du 1 juillet 1972 Journal Officiel du 2 juillet 1972)

(Loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 art. 16 Journal Officiel du 31 décembre 1977)

(Loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 art. 10 Journal Officiel du 14 juillet 1990)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 247 et 322 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 90 Journal Officiel du 16 juin 2000)

La diffamation commise envers les particuliers par l'un des moyens énoncés en l'article 23 sera punie d'une amende de 80.000 F.

La diffamation commise par les mêmes moyens envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée sera punie d'un an d'emprisonnement et de 300000 F d'amende ou de l'une de ces deux peines seulement.

En cas de condamnation pour l'un des faits prévus par l'alinéa précédent, le tribunal pourra en outre ordonner :

1° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal.

Article 33

(Décret-loi du 21 avril 1939 Journal Officiel du 25 avril 1939)

(Ordonnance du 24 novembre 1943 Journal Officiel du 27 novembre 1943)

(Loi n° 72-546 du 1 juillet 1972 Journal Officiel du 2 juillet 1972)

(Loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 art. 16 Journal Officiel du 31 décembre 1977)

(Loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 art. 11 Journal Officiel du 14 juillet 1990)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 247 et 322 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 90 Journal Officiel du 16 juin 2000)

L'injure commise par les mêmes moyens envers les corps ou les personnes désignés par les articles 30 et 31 de la présente loi sera punie d'une amende de 80.000 F.

L'injure commise de la même manière envers les particuliers, lorsqu'elle n'aura pas été précédée de provocations, sera punie d'une amende de 80.000 F.

Sera punie de six mois d'emprisonnement et de 150.000 F d'amende l'injure commise, dans les conditions prévues à l'alinéa précédent, envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.

En cas de condamnation pour l'un des faits prévus par l'alinéa précédent, le tribunal pourra en outre ordonner :

1° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal.

Article 34

(Loi du 29 septembre 1919 Journal Officiel du 1er octobre 1919)

Les articles 29, 30 et 31 ne seront applicables aux diffamations ou injures dirigées contre la mémoire des morts que dans le cas où les auteurs de ces diffamations ou injures auraient eu l'intention de porter atteinte à l'honneur ou à la considération des héritiers, époux ou légataires universels vivants.

Que les auteurs des diffamations ou injures aient eu ou non l'intention de porter atteinte à l'honneur ou à la considération des héritiers, époux ou légataires universels vivants, ceux-ci pourront user, dans les deux cas, du droit de réponse prévu par l'article 13.

Article 35

(Ordonnance du 6 mai 1944 Journal Officiel du 20 mai 1944 rectificatif p. 418)

(Loi n° 52-1350 du 19 décembre 1952 Journal Officiel du 20 décembre 1952)

(Loi n° 98-468 du 17 juin 1998 art. 44 Journal Officiel du 18 juin 1998)

La vérité du fait diffamatoire, mais seulement quand il est relatif aux fonctions, pourra être établie par les voies ordinaires, dans le cas d'imputations contre les corps constitués, les armées de terre, de mer ou de l'air, les administrations publiques et contre toutes les personnes énumérées dans l'article 31.

La vérité des imputations diffamatoires et injurieuses pourra être également établie contre les directeurs ou administrateurs de toute entreprise industrielle, commerciale ou financière, faisant publiquement appel à l'épargne ou au crédit.

La vérité des faits diffamatoires peut toujours être prouvée, sauf :

a) Lorsque l'imputation concerne la vie privée de la personne ;

b) Lorsque l'imputation se réfère à des faits qui remontent à plus de dix années ;

c) Lorsque l'imputation se réfère à un fait constituant une infraction amnistiée ou prescrite, ou qui a donné lieu à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la révision ;

Les deux alinéas a et b qui précèdent ne s'appliquent pas lorsque les faits sont prévus et réprimés par les articles 222-23 à 222-32 et 227-22 à 227-27 du code pénal et ont été commis contre un mineur.

Dans les cas prévus aux deux paragraphes précédents, la preuve contraire est réservée. Si la preuve du fait diffamatoire est rapportée, le prévenu sera renvoyé des fins de la plainte.

Dans toute autre circonstance et envers toute autre personne non qualifiée, lorsque le fait imputé est l'objet de poursuites commencées à la requête du ministère public, ou d'une plainte de la part du prévenu, il sera, durant l'instruction qui devra avoir lieu, sursis à la poursuite et au jugement du délit de diffamation.

Article 35 bis

(inséré par Ordonnance du 6 mai 1944 Journal Officiel du 20 mai 1944 rectificatif p. 418)

Toute reproduction d'une imputation qui a été jugée diffamatoire sera réputée faite de mauvaise foi, sauf preuve contraire par son auteur.

Article 35 ter

(inséré par Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 92 Journal Officiel du 16 juin 2000)

I. - Lorsqu'elle est réalisée sans l'accord de l'intéressé, la diffusion, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, de l'image d'une personne identifiée ou identifiable mise en cause à l'occasion d'une procédure pénale mais n'ayant pas fait l'objet d'un jugement de condamnation et faisant apparaître, soit que cette personne porte des menottes ou entraves, soit qu'elle est placée en détention provisoire, est punie de 100.000 F d'amende.

II. - Est puni de la même peine le fait :

- soit de réaliser, de publier ou de commenter un sondage d'opinion, ou toute autre consultation, portant sur la culpabilité d'une personne mise en cause à l'occasion d'une procédure pénale ou sur la peine susceptible d'être prononcée à son encontre ;

- soit de publier des indications permettant d'avoir accès à des sondages ou consultations visés à l'alinéa précédent.

Article 35 quater

(inséré par Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 97 Journal Officiel du 16 juin 2000)

La diffusion, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, de la reproduction des circonstances d'un crime ou d'un délit, lorsque cette reproduction porte gravement atteinte à la dignité d'une victime et qu'elle est réalisée sans l'accord de cette dernière, est punie de 100 000 F d'amende.

Paragraphe 4 : Délits contre les chefs d'Etat et agents diplomatiques étrangers

Article 36

(Décret-loi du 30 octobre 1935 Journal Officiel du 3 novembre 1935)

(Ordonnance du 6 mai 1944 Journal Officiel du 20 mai 1944 rectificatif p. 418)

(Loi n° 56-1327 du 29 décembre 1956 art. 7 finances Journal Officiel du 30 décembre 1956)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 90 Journal Officiel du 16 juin 2000)

L'offense commise publiquement envers les chefs d'Etats étrangers, les chefs de gouvernements étrangers et les ministres des affaires étrangères d'un gouvernement étranger sera punie d'une amende de 300.000F.

Article 37

(Ordonnance du 6 mai 1944 Journal Officiel du 20 mai 1944 rectificatif p. 418)

(Loi n° 56-1327 du 29 décembre 1956 finances art. 7 Journal Officiel du 30 décembre 1956)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 90 Journal Officiel du 16 juin 2000)

L'outrage commis publiquement envers les ambassadeurs et ministres plénipotentiaires, envoyés, chargés d'affaires ou autres agents diplomatiques accrédités près du gouvernement de la République, sera puni d'une amende de 300.000 F.

Paragraphe 5 : Publications interdites, immunités de la défense

Article 38

(Décret-loi du 29 juillet 1939 art. 128 Journal Officiel du 3 août 1939)

(Loi n° 51-1078 du 10 septembre 1951 Journal Officiel du 12 septembre 1951)

(Loi n° 53-1215 du 8 décembre 1953 art. 2 Journal Officiel du 9 décembre 1953)

(Ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 art. 13 Journal Officiel du 18 novembre 1958)

(Loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 art. 16 Journal Officiel du 31 décembre 1977)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 249 et 326 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 97 Journal Officiel du 16 juin 2000)

(Loi n° 2001-539 du 25 juin 2001 art. 22 Journal Officiel du 25 juin 2001)

Il est interdit de publier les actes d'accusation et tous autres actes de procédure criminelle ou correctionnelle avant qu'ils aient été lus en audience publique et ce, sous peine de l'amende prévue pour les contraventions de la 4° classe.

Sans préjudice des dispositions de l'article 15 du code pénal, il est interdit, sous la même peine, de publier aucune information relative aux travaux et délibérations du conseil supérieur de la magistrature, à l'exception des informations concernant les audiences publiques et les décisions publiques rendues en matière disciplinaire à l'encontre des magistrats. Pourront toutefois être publiées les informations communiquées par le président ou le vice-président dudit conseil.

Article 38 ter

(Loi n° 81-82 du 2 février 1981 Journal Officiel du 3 février 1981)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 83 Journal Officiel du 16 juin 2000 en vigueur le 1er janvier 2001)

Dès l'ouverture de l'audience des juridictions administratives ou judiciaires, l'emploi de tout appareil permettant d'enregistrer, de fixer ou de transmettre la parole ou l'image est interdit. Le président fait procéder à la saisie de tout appareil et du support de la parole ou de l'image utilisés en violation de cette interdiction.

Toutefois, sur demande présentée avant l'audience, le président peut autoriser des prises de vues quand les débats ne sont pas commencés et à la condition que les parties ou leurs représentants et le ministère public y consentent.

Toute infraction aux dispositions du présent article sera punie de 30000 F d'amende . Le tribunal pourra en outre prononcer la confiscation du matériel ayant servi à commettre l'infraction et du support de la parole ou de l'image utilisé.

Est interdite, sous les mêmes peines, la cession ou la publication, de quelque manière et par quelque moyen que ce soit, de tout enregistrement ou document obtenu en violation des dispositions du présent article.

Article 39

(Ordonnance du 6 mai 1944 Journal Officiel du 20 mai 1944 rectificatif p. 418)

(Loi n° 53-184 du 12 mars 1953 Journal Officiel du 13 mars 1953)

(Loi n° 54-1218 du 6 décembre 1954 Journal Officiel du 8 décembre 1954)

(Loi n° 72-3 du 3 janvier 1972 art. 8 Journal Officiel du 5 janvier 1972)

(Loi n° 75-617 du 11 juillet 1975 art. 22 Journal Officiel du 12 juillet 1975 date d'entrée en vigueur 1er janvier 1976)

(Loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 art. 16 Journal Officiel du 31 décembre 1977)

(Loi n° 81-82 du 2 février 1981 Journal Officiel du 3 février 1981)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

Il est interdit de rendre compte des procès en diffamation dans les cas prévus aux paragraphes a, b et c de l'article 35 de la présente loi. Il est pareillement interdit de rendre compte des débats et de publier des pièces de procédures concernant les questions de filiation, actions à fins de subsides, procès en divorce, séparation de corps et nullités de mariage, procès en matière d'avortement. Cette interdiction ne s'applique pas au dispositif des décisions, qui peut toujours être publié.

Les dispositions qui précèdent ne s'appliquent pas aux publications techniques à condition que soit respecté l'anonymat des parties.

Dans toutes affaires civiles, les cours et tribunaux pourront interdire le compte rendu du procès.

Il est également interdit de rendre compte des délibérations intérieures, soit des jurys, soit des cours et tribunaux.

Toute infraction à ces dispositions sera punie de 90000 F d'amende.

Article 39 bis

(Loi n° 55-1552 du 28 novembre 1955 art. 1 Journal Officiel du 1er décembre 1955)

(Loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 art. 16 Journal Officiel du 31 décembre 1977)

(Loi n° 55-1552 du 28 novembre 1955 art. 1 Journal Officiel du 1er décembre 1955)

(Loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 art. 16 Journal Officiel du 31 décembre 1977)

(Loi n° 89-487 du 10 juillet 1989 art. 15 Journal Officiel du 14 juillet 1989)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 250 et 322 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 99 Journal Officiel du 16 juin 2000)

Est puni de 100.000 F d'amende le fait de diffuser, de quelque manière que ce soit, des informations relatives à l'identité ou permettant l'identification :

- d'un mineur ayant quitté ses parents, son tuteur, la personne ou l'institution qui était chargée de sa garde ou à laquelle il était confié ;

- d'un mineur délaissé dans les conditions mentionnées aux articles 227-1 et 227-2 du code pénal ;

- d'un mineur qui s'est suicidé ;

- d'un mineur victime d'une infraction.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsque la publication est réalisée à la demande des personnes ayant la garde du mineur ou des autorités administratives ou judiciaires.

Article 39 quater

(Loi n° 66-500 du 11 juillet 1966 art. 4 Journal Officiel du 12 juillet 1966 date d'entrée en vigueur 1er novembre 1966)

(Loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 art. 16 Journal Officiel du 31 décembre 1977)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

Il est interdit, moins de trente ans après la mort de l'adopté, de publier par le livre, la presse, la radiodiffusion, le cinématographe ou de quelque manière que ce soit, une information relative à la filiation d'origine d'une personne ayant fait l'objet d'une adoption plénière.

Les infractions à la disposition qui précède sont punies de 40000 F d'amende ; en cas de récidive un emprisonnement de deux ans pourra être prononcé.

Article 39 quinquies

(Loi n° 80-1041 du 23 décembre 1980 Journal Officiel du 24 décembre 1980)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 et 329 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 97 Journal Officiel du 16 juin 2000)

Le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, des renseignements concernant l'identité d'une victime d'une agression ou d'une atteinte sexuelles ou l'image de cette victime lorsqu'elle est identifiable est puni de 100 000 F d'amende.

Les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsque la victime a donné son accord écrit.

Article 39 sexies

(Inséré par Loi n° 95-73 du 27 janvier 1995 art. 28 Journal Officiel du 24 janvier 1995)

Le fait de révéler, par quelque moyen d'expression que ce soit, l'identité des fonctionnaires de la police nationale, de militaires de la gendarmerie nationale ou d'agents des douanes appartenant à des services ou unités désignés par arrêté du ministre intéressé et dont les missions exigent, pour des raisons de sécurité, le respect de l'anonymat, est puni d'une amende de 100 000 F.

Article 40

(Ordonnance du 6 mai 1944 Journal Officiel du 20 mai 1944)

(Loi n° 56-1327 du 29 décembre 1956 art. 7 finances Journal Officiel du 30 décembre 1956)

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 322 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

Il est interdit d'ouvrir ou d'annoncer publiquement des souscriptions ayant pour objet d'indemniser des amendes, frais et dommages intérêts prononcés par des condamnations judiciaires, en matière criminelle et correctionnelle, sous peine de six mois d'emprisonnement et de 300000 F d'amende , ou de l'une de ces deux peines seulement .

Article 41

(Loi n° 50-10 du 6 janvier 1950 art. 21 Journal Officiel du 7 janvier 1950)

(Ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 art. 9 Journal Officiel du 18 novembre 1958)

(Loi n° 82-506 du 15 juin 1982 art. 5 Journal Officiel du 16 juin 1982)

Ne donneront ouverture à aucune action les discours tenus dans le sein de l'Assemblée nationale ou du Sénat ainsi que les rapports ou toute autre pièce imprimée par ordre de l'une de ces deux assemblées.

Ne donnera lieu à aucune action le compte rendu des séances publiques des assemblées visées à l'alinéa ci-dessus fait de bonne foi dans les journaux.

Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux.

Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages intérêts.

Pourront toutefois les faits diffamatoires étrangers à la cause donner ouverture, soit à l'action publique, soit à l'action civile des parties, lorsque ces actions leur auront été réservées par les tribunaux, et, dans tous les cas, à l'action civile des tiers.

Article 41-1

(inséré par Loi n° 85-1317 du 13 décembre 1985 art. 18 II Journal Officiel du 24 décembre 1985)

Pour l'application des dispositions des paragraphes 4 et 5 du présent chapitre, la communication audiovisuelle est regardée comme un mode de publication.

CHAPITRE V - DES POURSUITES ET DE LA REPRESSION

Paragraphe 1er : Des personnes responsables de crimes et délits commis par la voie de la presse

Article 42

(Ordonnance du 26 août 1944 art. 15 Journal Officiel du 30 août 1944)

(Loi n° 52-336 du 25 mars 1952 art. 4 Journal Officiel du 26 mars 1952)

Seront passibles, comme auteurs principaux des peines qui constituent la répression des crimes et délits commis par la voie de la presse, dans l'ordre ci-après, savoir :

1° Les directeurs de publications ou éditeurs, quelles que soient leurs professions ou leurs dénominations, et, dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article 6, de les codirecteurs de la publication ;

2° A leur défaut, les auteurs ;

3° A défaut des auteurs, les imprimeurs ;

4° A défaut des imprimeurs, les vendeurs, les distributeurs et afficheurs.

Dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article 6, la responsabilité subsidiaire des personnes visées aux paragraphes 2°, 3° et 4° du présent article joue comme s'il n'y avait pas de directeur de la publication, lorsque, contrairement aux dispositions de la présente loi, un codirecteur de la publication n'a pas été désigné.

Article 43

(Ordonnance du 26 août 1944 art. 15 Journal Officiel du 30 août 1944)

(Loi n° 52-336 du 25 mars 1952 art. 5 Journal Officiel du 26 mars 1952)

Lorsque les directeurs ou codirecteurs de la publication ou les éditeurs seront en cause, les auteurs seront poursuivis comme complices.

Pourront l'être, au même titre et dans tous les cas, les personnes auxquelles l'article 60 du Code pénal pourrait s'appliquer. Ledit article ne pourra s'appliquer aux imprimeurs pour faits d'impression, sauf dans le cas et les conditions prévus par l'article 107 du Code pénal sur les attroupements ou, à défaut de codirecteur de la publication, dans le cas prévu au deuxième alinéa de l'article 6.

Toutefois, les imprimeurs pourront être poursuivis comme complices si l'irresponsabilité pénale du directeur ou du codirecteur de la publication était prononcée par les tribunaux. En ce cas, les poursuites sont engagées dans les trois mois du délit ou, au plus tard, dans les trois mois de la constatation judiciaire de l'irresponsabilité du directeur ou du codirecteur de la publication.

Article 44

(Loi n° 52-336 du 25 mars 1952 art. 6 Journal Officiel du 26 mars 1952)

Les propriétaires des journaux ou écrits périodiques sont responsables des condamnations pécuniaires prononcées au profit des tiers contre les personnes désignées dans les deux articles précédents , conformément aux dispositions des articles 1382, 1383, 1384 du Code civil.

Dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article 6, le recouvrement des amendes et dommages intérêts pourra être poursuivi sur l'actif de l'entreprise.

Article 45

(Loi du 16 mars 1893))

(Loi du 10 janvier 1936 Journal Officiel du 12 janvier 1936)

Les infractions aux lois sur la presse sont déférées aux tribunaux correctionnels sauf :

a) Dans les cas prévus par l'article 23 en cas de crime;

b) Lorsqu'il s'agit de simples contraventions.

Article 46

L'action civile résultant des délits de diffamation prévus et punis par les articles 30 et 31 ne pourra, sauf dans les cas de décès de l'auteur du fait incriminé ou d'amnistie, être poursuivie séparément de l'action publique.

Paragraphe 2 : De la procédure

Article 47

(inséré par Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

La poursuite des délits et contraventions de police commis par la voie de la presse ou par tout autre moyen de publication aura lieu d'office et à la requête du ministère public sous les modifications ci-après.

Article 48

(Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

(Loi n° 53-184 du 12 mars 1953 Journal Officiel du 13 mars 1953)

(Loi n° 72-546 du 1 juillet 1972 Journal Officiel du 2 juillet 1972)

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 98 et 100 Journal Officiel du 16 juin 2000)

1° Dans le cas d'injure ou de diffamation envers les cours, tribunaux et autres corps indiqués en l'article 30, la poursuite n'aura lieu que sur une délibération prise par eux en assemblée générale et requérant les poursuites, ou, si le corps n'a pas d'assemblée générale, sur la plainte du chef du corps ou du ministre duquel ce corps relève ;

1° bis Dans les cas d'injure et de diffamation envers un membre du Gouvernement, la poursuite aura lieu sur sa demande adressée au ministre de la justice ;

2° Dans le cas d'injure ou de diffamation envers un ou plusieurs membres de l'une ou de l'autre Chambre, la poursuite n'aura lieu que sur la plainte de la personne ou des personnes intéressées ;

3° Dans le cas d'injure ou de diffamation envers les fonctionnaires publics, les dépositaires ou agents de l'autorité publique autres que les ministres et envers les citoyens chargés d'un service ou d'un mandat public, la poursuite aura lieu, soit sur leur plainte, soit d'office sur la plainte du ministre dont ils relèvent ;

4° Dans le cas de diffamation envers un juré ou un témoin, délit prévu par l'article 31, la poursuite n'aura lieu que sur la plainte du juré ou du témoin qui se prétendra diffamé ;

5° Dans le cas d'offense envers les chefs d'Etat ou d'outrage envers les agents diplomatiques étrangers, la poursuite aura lieu sur leur demande adressée au ministre des affaires étrangères et par celui-ci au ministre de la justice ;

6° Dans le cas de diffamation envers les particuliers prévu par l'article 32 et dans le cas d'injure prévu par l'article 33, paragraphe 2, la poursuite n'aura lieu que sur la plainte de la personne diffamée ou injuriée. Toutefois, la poursuite, pourra être exercée d'office par le ministère public lorsque la diffamation ou l'injure aura été commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ;

7° Dans le cas de diffusion de l'image d'une personne menottée ou entravée prévue par l'article 35 ter, la poursuite n'aura lieu que sur la plainte de la personne intéressée ;

8° Dans le cas d'atteinte à la dignité de la victime prévue par l'article 35 quater, la poursuite n'aura lieu que sur la plainte de la victime.

En outre, dans les cas prévus par les 2°, 3°, 4°, 5°, 6°, 7° et 8° ci-dessus, ainsi que dans les cas prévus aux articles 13 et 39 quinquies de la présent loi, la poursuite pourra être exercée à la requête de la partie lésée.

Article 48-1

(Loi n° 72-546 du 1 juillet 1972 art. 5 Journal Officiel du 2 juillet 1972)

(Loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 art. 12 Journal Officiel du 14 juillet 1990)

(Loi n° 2001-434 du 21 mai 2001 art. 5 Journal Officiel du 23 mai 2001)

Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant, par ses statuts, de défendre la mémoire des esclaves et l'honneur de leurs descendants, de combattre le racisme ou d'assister les victimes de discrimination fondée sur leur origine nationale, ethnique, raciale ou religieuse, peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions prévues par les articles 24 (dernier alinéa), 32 (alinéa 2) et 33 (alinéa 3), de la présente loi.

Toutefois, quand l'infraction aura été commise envers des personnes considérées individuellement, l'association ne sera recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l'accord de ces personnes.

Article 48-2

(inséré par Loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 art. 13 Journal Officiel du 14 juillet 1990)

Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, qui se propose, par ses statuts, de défendre les intérêts moraux et l'honneur de la Résistance ou des déportés peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne l'apologie des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité ou des crimes ou délits de collaboration avec l'ennemi et en ce qui concerne l'infraction prévue par l'article 24 bis.

Article 48-3

(inséré par Loi n° 91-1257 du 17 décembre 1991 Journal Officiel du 19 décembre 1991)

Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits et inscrite auprès de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, qui se propose par ses statuts de défendre les intérêts moraux et l'honneur des anciens combattants et victimes de guerre et des morts pour la France, peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les délits de diffamation ou d'injures qui ont causé un préjudice direct ou indirect à la mission qu'elle remplit.

Article 49

(inséré par Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

Dans tous les cas de poursuites correctionnelles ou de simple police, le désistement du plaignant ou de la partie poursuivante arrêtera la poursuite commencée.

Article 50

(inséré par Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

Si le ministère public requiert une information, il sera tenu, dans son réquisitoire, d'articuler et de qualifier les provocations, outrages, diffamations et injures à raison desquels la poursuite est intentée, avec indication des textes dont l'application est demandée, à peine de nullité du réquisitoire de ladite poursuite.

Article 51

(inséré par Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

Immédiatement après le réquisitoire, le juge d'instruction pourra, mais seulement en cas d'omission du dépôt prescrit par les articles 3 et 10 ci-dessus, ordonner la saisie de quatre exemplaires de l'écrit, du journal ou du dessin incriminé.

Toutefois, dans les cas prévus aux articles 24 (par. 1er et 3), 25, 36, et 37 de la présente loi, la saisie des écrits ou imprimés, des placards ou affiches, aura lieu conformément aux règles édictées par le Code de procédure pénale.

Article 52

(Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

(Loi n° 93-1013 du 24 août 1993 art. 46 Journal Officiel du 25 août 1993 en vigueur le 2 septembre 1993)

Si la personne mise en examen est domiciliée en France, elle ne pourra être préventivement arrêtée, sauf dans les cas prévus aux articles 23, 24 (par. 1er et 3), 25, 27, 36 et 37 ci-dessus.

Article 53

(inséré par Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

La citation précisera et qualifiera le fait incriminé, elle indiquera le texte de loi applicable à la poursuite.

Si la citation est à la requête du plaignant, elle contiendra élection de domicile dans la ville où siège la juridiction saisie et sera notifiée tant au prévenu qu'au ministère public.

Toutes ces formalités seront observées à peine de nullité de la poursuite.

Article 54

(inséré par Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

Le délai entre la citation et la comparution sera de vingt jours outre un jour par cinq myriamètres de distance.

Toutefois, en cas de diffamation ou d'injure pendant la période électorale contre un candidat à une fonction électorale, ce délai sera réduit à vingt-quatre heures, outre le délai de distance, et les dispositions des articles 55 et 56 ne seront pas applicables.

Article 55

(inséré par Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

Quand le prévenu voudra être admis à prouver la vérité des faits diffamatoires, conformément aux dispositions de l'article 35 de la présente loi, il devra, dans le délai de dix jours après la signification de la citation, faire signifier au ministère public ou au plaignant au domicile par lui élu, suivant qu'il est assigné à la requête de l'un ou de l'autre :

1° Les faits articulés et qualifiés dans la citation, desquels il entend prouver la vérité ;

2° La copie des pièces ;

3° Les noms, professions et demeures des témoins par lesquels il entend faire la preuve.

Cette signification contiendra élection de domicile près le tribunal correctionnel, le tout à peine d'être déchu du droit de faire la preuve.

Article 56

(inséré par Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

Dans les cinq jours suivants, en tous cas moins de trois jours francs avant l'audience, le plaignant ou le ministère public, suivant le cas, sera tenu de faire signifier au prévenu, au domicile par lui élu, les copies des pièces et les noms, professions et demeures des témoins par lesquels il entend faire la preuve du contraire sous peine d'être déchu de son droit.

Article 57

(inséré par Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

Le tribunal correctionnel et le tribunal de police seront tenus de statuer au fond dans le délai maximum d'un mois à compter de la date de la première audience.

Dans le cas prévu à l'alinéa 2 de l'article 54, la cause ne pourra être remise au-delà du jour fixé pour le scrutin.

Article 58

(Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

(Loi n° 81-759 du 6 août 1981 Journal Officiel du 7 août 1981)

Le droit de se pourvoir en cassation appartiendra au prévenu et à la partie civile quant aux dispositions relatives à ses intérêts civils. Le prévenu sera dispensé de se mettre en état.

La partie civile pourra user du bénéfice de l'article 585 du Code de procédure pénale sans le ministère d'un avocat à la Cour de cassation.

Article 59

(inséré par Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

Le pourvoi devra être formé, dans les trois jours au greffe de la cour ou du tribunal qui aura rendu la décision. Dans les vingt-quatre heures qui suivront, les pièces seront envoyées à la Cour de cassation, qui jugera d'urgence dans les dix jours à partir de leur réception.

L'appel contre les jugements ou le pourvoi contre les arrêts des cours d'appel qui auront statué sur les incidents et exceptions autres que les exceptions d'incompétence ne sera formé, à peine de nullité, qu'après le jugement ou l'arrêt définitif et en même temps que l'appel ou le pourvoi contre ledit jugement ou arrêt.

Toutes les exceptions d'incompétence devront être proposées avant toute ouverture du débat sur le fond : faute de ce, elles seront jointes au fond et il sera statué sur le tout par le même jugement.

Article 60

(inséré par Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

Sous réserve des dispositions des articles 50, 51, et 52 ci-dessus, la poursuite des crimes aura lieu conformément au droit commun.

Paragraphe 3 : Peines complémentaires, récidive, circonstances atténuantes, prescription

Article 61

(inséré par Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

S'il y a condamnation, l'arrêt pourra, dans les cas prévus aux articles 24 (par. 1er et 3), 25, 36 et 37, prononcer la confiscation des écrits ou imprimés, placards ou affiches saisis et, dans tous les cas, ordonner la saisie et la suppression ou la destruction de tous les exemplaires qui seraient mis en vente, distribués ou exposés aux regard du public. Toutefois, la suppression ou la destruction pourra ne s'appliquer qu'à certaines parties des exemplaires saisis.

Article 62

(inséré par Ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 Journal Officiel du 14 septembre 1945)

En cas de condamnation prononcée en application des articles 23, 24 (alinéas 1er et 2), 25 et 27, la suspension du journal ou du périodique pourra être prononcée par la même décision de justice pour une durée qui n'excédera pas trois mois. Cette suspension sera sans effet sur les contrats de travail qui liaient l'exploitant lequel reste tenu de toutes les obligations contractuelles ou légales en résultant.

Article 63

(Loi n° 72-546 du 1 juillet 1972 Journal Officiel du 2 juillet 1972)

L'aggravation des peines résultant de la récidive ne sera applicable qu'aux infractions prévues par les articles 24 (alinéa 5), 32 (alinéa 2) et 33 (alinéa 3) de la présente loi .

En cas de conviction de plusieurs crimes ou délits prévus par la présente loi, les peines ne se cumuleront pas, et la plus forte sera seule prononcée.

Article 64

(Loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 323 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994)

(Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 art. 95 Journal Officiel du 16 juin 2000)

Lorsque ont été ordonnées en référé des mesures limitant par quelque moyen que ce soit la diffusion de l'information, le premier président de la cour d'appel statuant en référé peut, en cas d'appel, arrêter l'exécution provisoire de la décision si celle-ci risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Article 65

(Loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 art. 52 Journal Officiel du 5 janvier 1993)

L'action publique et l'action civile résultant des crimes, délits et contraventions prévus par la présente loi se prescriront après trois mois révolus, à compter du jour où ils auront été commis ou du jour du dernier acte d'instruction ou de poursuite s'il en a été fait.

Toutefois, avant l'engagement des poursuites, seules les réquisitions aux fins d'enquête seront interruptives de prescription. Ces réquisitions devront, à peine de nullité, articuler et qualifier les provocations, outrages, diffamations et injures à raison desquels l'enquête est ordonnée.

Les prescriptions commencées à l'époque de la publication de la présente loi, et pour lesquelles il faudrait encore, suivant les lois existantes, plus de trois mois à compter de la même époque, seront, par ce laps de trois mois, définitivement accomplies.

Article 68

Sont abrogés les édits, lois, décrets, ordonnances, arrêtés, règlements, déclarations généralement quelconques, relatifs à l'imprimerie, à la librairie, à la presse périodique ou non périodique, au colportage, à l'affichage, à la vente sur la voie publique et aux crimes et délits prévus par les lois sur la presse et les autres moyens de publication, sans que puissent revivre les dispositions abrogées par les lois antérieures.

Est également abrogé le second paragraphe de l'article 31 de la loi du 10 août 1871 sur les conseils généraux, relatif à l'appréciation de leurs discussions par les journaux.

ANNEXE II :

Loi 60-12 du 30 juin 1960 relative à la liberté de presse au Bénin

ANNEXE III :

Loi n° 97-010 du 20 août 1997 portant libéralisation de l'espace audiovisuel et dispositions pénales spéciales relatives aux délits en matière de presse et de communication audiovisuelle en République du Bénin.

ANNEXE IV :

L'affaire Clearstream

ESSAI DE RESUME DE L'AFFAIRE CLEARSTREAM

Les investigations portent sur la chambre de compensation internationale Cedel International, basé au Luxembourg, qui deviendra Cedel-Clearstream puis Clearstream . Ernest Backes, ancien dirigeant de Cedel International, et Denis Robert soutiennent que cette société entretient des comptes occultes qui permettraient des transferts illégaux internationaux.

Les listings de Clearstream

Des sources ont communiqué à Denis Robert des listings informatiques de comptes ouverts chez Clearstream. La chambre de compensation luxembourgeoise n'en a jamais contesté l'authenticité et a porté plainte pour viol du secret bancaire.

Ces fichiers recensent les principales banques du monde entier utilisatrices du système informatique de compensation mis en place par Clearstream. On y découvre que les établissements bancaires multiplient les filiales dans les paradis fiscaux et les paradis bancaires et ouvrent des comptes au nom de trusts anonymes.

De 2004 à 2006 se développe l'affaire du corbeau de Clearstream (Affaire Clearstream 2). Les enquêteurs soupçonnent que le corbeau utilise les listings de Denis Robert comme base de crédibilité pour sa manipulation. Au cours de deux auditions comme témoin en octobre 2005 et en mars 2003, Denis Robert a déclaré avoir remis à Imad Lahoud deux cédéroms recensant plus de 33 000 établissements clients de Clearstream. A l'époque, Imad lahoud travaillait pour la DGSE sur le financement des réseaux terroristes islamistes qui aurait pu transiter par Clearstream.

Les comptes de personnes physiques

En tant que chambre de compensation, Cedel International et Clearstream ne devraient avoir que des comptes de banques ou d'établissements financiers. Denis Robert assure que des personnes physiques apparaissent bien sur les listings de Cedel International et Clearstream.

Dans un entretien publié jeudi 20 avril 2006 sur le site internet de la revue Challenges, le responsable des relations presse de Clearstream, Bruno Rossignol, a affirmé à nouveau que la chambre de compensation ne fournit pas de compte aux personnes physiques. Dans un droit de réponse, Denis Robert rappelle avec Pascal Lorent, co-auteur de documentaires sur Clearstream, que "des noms de particuliers apparaissent par dizaines dans les listes que nous nous sommes procurées".

Le 28 avril 2006, des comptes nominatifs issus de listings de Clearstream sont publiés sur le blog de Denis Robert.

NB: Les protagonistes de cette affaire sont présumés innocents et nient toute implication.

AFFAIRE CLEARSTREAM

Mon enquête dit la vérité, par Denis Robert

Paru dans Libération du 17 mai 2006.

Je suis dans l'oeil du cyclone depuis quelques semaines. Ce n'est pas un choix de ma part. C'est ainsi. Depuis qu'Imad Lahoud est venu me voir à Metz, j'ai constamment observé, cherchant la vérité dans cet imbroglio où les intérêts des uns et des autres s'imbriquent et se heurtent tellement que tout le monde s'y perd.

Imad Lahoud s'est présenté à moi comme un broker. Je lui ai remis le listing Clearstream 2001 parce qu'il me l'a demandé pour éclairer un dossier (où il se disait victime) et parce qu'il m'a proposé de m'aider à avancer dans mon enquête. Je prépare un livre sur le sujet, je suis dans une logique de journaliste et d'écrivain. J'ai compris plus tard qu'il travaillait pour la DGSE, les services étant intéressés par le rôle éventuel joué par Clearstream dans la dissimulation de diverses transactions liées au terrorisme.

Un rapport sortira de ce travail, montrant, une fois de plus, le rôle de cette entreprise dans l'opacification des transactions financières. La presse en a fait état, accréditant ainsi ce que j'explique depuis longtemps. J'ai remis ce même listing, qui a servi de base aux lettres du corbeau, à Ernest Backes, contrairement à ce que ce dernier affirme dans Libération du 13 mai. Ernest, coauteur avec moi de mon premier livre sur Clearstream (Révélation$, les Arènes, 2001), détenait déjà un listing 2000 où les mêmes noms propres apparaissaient (Gomez, Martinez, mais avec d'autres prénoms). Le détail est important et démontrable, car je n'ai bien évidemment jamais ajouté d'autres noms dans ce listing. Il ne figurait à l'époque aucun nom d'hommes politiques ou d'industriels ou de vedettes du show-biz.

Je ne suis l'auteur d'aucune lettre, d'aucune enveloppe et ne suis en rien lié à ces manipulations. Ernest Backes, qui en a été l'un des cadres fondateurs, a quitté la firme en 1982. I l m'a permis de comprendre au début de mon enquête le fonctionnement de ce qui s'appelait alors Cedel et qui deviendra Clearstream. D'habitude, les auteurs ne mettent pas le nom de leur source sur la couverture de leur livre. Je l'ai fait, lui cédant la moitié des droits. Nos destins se sont ensuite séparés. Ernest Backes n'a pas accepté que j'aie voulu rencontrer d'autres informateurs et prendre d'autres contacts.

J'ai écrit un second tome de mon enquête, la Boîte noire, en 2002, où il n'était plus qu'un protagoniste parmi d'autres, à son grand dam. Il vit également sous la pression des procédures harassantes de Clearstream et de la magistrature luxembourgeoise, qui lui conseille de prendre ses distances avec moi.

Dans Libération du 13 mai, il minimise en effet à dessein le rôle de Régis Hempel, vice-président de Clearstream dont il était le responsable informatique, avec plus de 150 informaticiens de haut niveau sous ses ordres. Quand Régis Hempel explique devant la mission parlementaire ou les tribunaux français, sous serment, qu'il était chargé d'effacer les traces de transactions financières portant, quotidiennement, sur plusieurs dizaines de millions de dollars, il est crédible.

Clearstream a tenté de l'empêcher de parler en portant plainte pour infraction au devoir de réserve (et non pour diffamation). La firme a perdu en première instance et fait appel. Cet élément est fondamental pour qui s'intéresse à l'affaire Clearstream 1 ou 2. C'est ce contact avec Hempel que cherchait d'abord Imad Lahoud.

Je ne savais pas que le juge Van Ruymbeke avait vu Jean-Louis Gergorin avant l'envoi des lettres. Je l'ai appris en lisant le Canard enchaîné. De même, je n'ai jamais dit que Lahoud m'avait confié que le corbeau était Rondot, puis Juillet. Il m'avait dit qu'il avait pour contact, référent, protecteur, ces deux pontes des services secrets. Quant aux listes originelles qui ont servi de base à mes livres, elles n'ont jamais été remises en cause par Clearstream. Les tribunaux ont, à plusieurs reprises, estimé mon enquête suffisamment sérieuse pour ne pas me condamner du chef de diffamation quand j'ai mis en cause la multinationale et son système de transfert de valeurs.

Si le système Clearstream est légal, son dévoiement est évident. Ce sont ses clients, et parmi eux des particuliers, qui blanchissent ou noircissent des fonds. Clearstream ne blanchit pas, c'est un outil idéal pour dissimuler et effacer les traces entre clients. La nuance est de taille. Et le ou les corbeaux l'ont bien compris. Toutes ces manipulations, c'est l'évidence aujourd'hui, n'ont pu exister que parce que mon enquête est solide. C'est là que malheureusement j'interviens.

Sources :

· Stéphane Denis, Clearstream : le général Rondot parle, Le Figaro, 2 mai 2005 ;

· Laurent Zecchini, Affaire Clearstream : la version du général Philippe Rondot, Le Monde, 2 mai 2005 ;

· Eric Decouty, Clearstream : le corbeau traqué dans les allées du pouvoir, Le Figaro, 18 avril 2006 ;

· Clearstream-Sarkozy : le mystère s'éclaircit, L'Express, 19 janvier 2006

· Les protagonistes, L'AFFAIRE CLEARSTREAM , PORTRAITS, Nouvel Observateur, 30 avril 2006 ;

· Les coulisses d'une affaire d'État, L'Express, 13 décembre 2004

· Frégates : L'affaire d'État qui fait trembler toute la classe politique, Le Point, 8 juillet 2004 ;

· Clearstream: en attendant Dominique de Villepin, Le Monde, 20 septembre 2006 ;

· http://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_Clearstream_2

ANNEXE V :

AFFAIRE DU RAINBOW WARRIOR

Les faits

En juillet 1985, le Rainbow Warrior, bateau de l'organisation écologiste Greenpeace mouille à Auckland en Nouvelle-Zélande. Son but est d'emmener d'autres bateaux vers l'atoll de Mururoa pour protester contre les essais nucléaires français et les gêner dans la mesure du possible.

Le gouvernement français (sous la présidence de François Mitterrand) fait appel à la DGSE (Direction Générale de la Sécurité Extérieure) pour parer à cette menace. Probablement à la demande explicite du ministre de la Défense, Charles Hernu, l'amiral Pierre Lacoste, chef des Services secrets français, lance l'opération « Satanic » dans l'urgence. Malgré les protestations des officiers de la Direction des opérations, les délais indispensables à la préparation et aux reconnaissances ne sont pas respectés. Deux agents de la DGSE, opérant sous la fausse identité (et sous de faux passeports suisses) des époux Turenge (Dominique Prieur alias Sophie Turenge et Alain Mafart alias Alain Turenge) sont chargés de mener l'opération. Le plan consiste à placer sous la coque du navire deux charges explosives, une première de faible puissance destinée à faire sortir les occupants du bateau alors à quai, une seconde de forte puissance destinée à le couler. Ces deux agents sont chargés de réaliser les repérages alors qu'une deuxième équipe arrivée en voilier et composée de trois agents apporte le matériel. Les trois agents du voilier l'Ouvéa sont des nageurs de combats.

L'opération se déroule le 10 juillet 1985. Le matériel est transféré de la camionnette des faux époux Turenge dans le canot pneumatique des trois nageurs de combat. Deux des nageurs posent les bombes et le troisième pilote le canot. Le pilote sera ensuite identifié comme l'homme au bonnet rouge et l'Express affirmera qu'il s'agit de Gérard Royal (frère de Ségolène Royal) devenu ensuite lieutenant-colonel avant de quitter l'armée. À 23h50, le navire est coulé mais le photographe néerlandais, d'origine portugaise, Fernando Pereira, parti récupérer ses équipements photographiques après la première explosion, meurt dans la seconde. En outre, les faux époux Turenge sont facilement arrêtés par la police néo-zélandaise d'Auckland à cause de la camionnette qu'ils ont louée pour récupérer les plongeurs chargés de placer les explosifs. Un concours de circonstances fait que, un certain nombre de cambriolages ayant précédemment eu lieu sur le port, un vigile placé là en surveillance, voyant cette camionnette attendant dans un coin discret note son numéro d'immatriculation, ce qui permet à la police de réagir rapidement.

Ils seront définitivement identifiés comme étant les poseurs de bombe grâce à leurs empreintes digitales qui furent retrouvées sous le canot pneumatique qui avait servi à poser la bombe. A cette époque, la technique pour relever des empreintes sur un objet ayant séjourné dans l'eau (comme ce fût le cas pour le dessous du canot) était très peu connue. Malheureusement pour les faux époux Turenge, une équipe d'experts internationaux se trouvait sur place à cette époque par pur hasard et c'est eux qui mirent à disposition leur savoir-faire tout nouveau et relevèrent les empreintes qui, quelques mois auparavant, seraient restées inexploitables.

Dès le 12 juillet à 9h du matin, la police néo-zélandaise interpelle deux touristes suisses munis de faux papiers, les "faux époux Turenge" , qui sont en fait les deux agents de la DGSE, Alain Mafart et Dominique Prieur. Méfiant, le surintendant Alban Galbraith, chef de la Criminal Investigation Branch envoie 2 télex, l'un à Londres, l'autre à Berne. La réponse arrive le 14 juillet : ces passeports sont des faux. La presse néo-zélandaise commence à mettre en cause les services spéciaux français.

Ils sont inculpés de meurtre le 23 juillet. Le Premier ministre néo-zélandais, David Lange, accuse des "éléments étrangers" d'avoir pris part à l'attentat, visant implicitement la France. Le 26 juillet, la justice néo-zélandaise lance un mandat d'arrêt international contre les passagers du voilier Ouvéa, qui a levé l'ancre d'Auckland la veille du sabotage et contre l'agent de la DGSE qui avait infiltré l'organisation avant l'opération pour faire des repérages.

Alors que le ministre nie toute implication de la DGSE, l'imminence de la publication de documents compromettants décide François Mitterrand à commander le 6 août un rapport au conseiller d'État Bernard Tricot, qui conclura le 26 août à blanchir la DGSE, suscitant même les doutes du Premier ministre Laurent Fabius. Après la révélation, le 17 septembre par le quotidien Le Monde, d'une troisième équipe alors que la défense de la France s'appuyait sur l'impossibilité pour les faux époux Turenge et les hommes de l'Ouvéa d'avoir commis l'attentat, le scandale rebondit. Le surlendemain, le Président réclame à son Premier ministre des sanctions. Le 20 septembre, le ministre de la Défense Charles Hernu démissionne et l'amiral Pierre Lacoste est limogé. Le 22, Laurent Fabius finit par admettre à la télévision que les services secrets français avaient mené l'attaque du Rainbow Warrior.

Le 4 novembre 1985, Alain Mafart et Dominique Prieur comparaissent devant la cour d'Auckland pour les premières auditions; ils plaident coupable d'homicide involontaire. Le 22 novembre, les agents français sont condamnés à 10 ans de prison. Ils sont transférés en juillet 1986 sur l'atoll de Hao puis rapatriés en France.

Le procès a été filmé malgré l'opposition des français et sera diffusé sur une chaîne nationale à compter du 26 septembre 2006. Les agents français ont été déboutés par la cour suprême néo-zélandaise de leur opposition à la diffusion de la vidéo du procès.

Rappelons qu'il avait été envisagé par les services français de dégrader le gazole du navire en déversant des bactéries dans les réservoirs, avant de retenir l'option de la bombe.

Le 29 septembre 2006, Antoine Royal déclare à la presse que son frère Gérard Royal, se serait vanté d'avoir lui-même posé la bombe, ce que l'intéressé dément par la suite. Le premier ministre a exclu toute nouvelle action concernant le Rainbow Warrior compte tenu des engagements internationaux pris entre la France et la Nouvelle Zélande.

Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_du_Rainbow_Warrior

BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES GENERAUX

1- BOUVENET (Gaston-Jean) et HUTIN (Paul), Recueil annoté des textes de droit pénal applicables en Afrique Occidentale Française, éd. Union Française, Paris, 797 p.

2- DEBBASCH (Charles) et Pontier (Jean-Marie), Introduction à la politique, Dalloz, 2000, 453 p.

3- DEGOFFE (Michel), Droit de la sanction non pénale, Economica, 2000, 375 p.

4- KAMTO (Maurice), Pouvoir et droit en Afrique noire, L.G.D.J., Paris, 1987, 384 p.

5- MACOVEI (Monica), Liberté d'expression, Précis n°2 sur les droits de l'homme, Conseil de l'Europe, juillet 2003, 65 p.

6- MERLE (Roger) et VITU (André), Traité de droit criminel, tome 1, 7ème éd., CUJAS, Paris, 1068 p.

7- MONTESQUIEU, De l'esprit des lois, Gallimard, Paris, 1995, vol I, 604 p. 

8- NEVEU (Erik), Sociologie des mouvements sociaux, La Découverte, Paris, 3è éd., 2002, 129 p.

9- PRADEL (Jean), Droit pénal comparé, Précis Dalloz, 1995, 733 p.

10- RIVERO (Jean), Les libertés publiques, tome 2, le régime des principales libertés, Thémis, PUF, 417 p.

11- ROUSSEAU (Jean-Jacques), Du contrat social, Paris, Flammarion, 1992, 256 p.

12- WACHSMANN (Patrick), Libertés publiques, 3è éd., Dalloz, 2000, 542 p.

OUVRAGES SPECIALISES

1- ADJOVI (V. Emmanuel), Les instances de régulation des médias en Afrique de l'ouest, le cas du Bénin, Karthala, Fès, 2003, 278 p.

2- CORNU (Daniel), Ethique de l'information, Que sais-je, n°3252, PUF, 1997. 139 p.

3- CORNU (Daniel), Journalisme et vérité, pour une éthique de l'information, LABOR et FIDES, 1994, 510 p.

4- FRERE (Marie-Soleil), Presse et démocratie en Afrique francophone, les mots et les maux de la transition au Bénin et au Niger, Karthala, Paris, 2000, 540 p.

5- LIBOIS (Boris), Les médias entre droit et pouvoir, redéfinir la liberté de la presse, éd. Université de Bruxelles, 1994, 124 p.

6- PIGEAT (Henri) et LEPRETTE (Jean), La liberté de la presse, le paradoxe français, PUF, 2002, 188 p.

7- PIGEAT (Henri) et HUTEAU (Jean), Ethique et qualité de l'information, PUF, 2003, 180 p.

THESE ET ARTICLES DE DOCTRINE

1- ADJOVI (V. Emmanuel), Affairisme médiatique au Bénin, in politique africaine, n°92, p. 158.

2- BIGOT (Christophe), Le champ d'application de l'article 1382 du Code civil en matière de presse, in Liberté de la presse et droits de la personne, Sous la dir. de DUPEUX Jean-Yves et LACABARATS Alain, Dalloz, Paris, 1997, 163 pp. 63-80.

3- BURGELIN (Jean-François), Le point sur l'application de la loi du 29 juillet 1881 devant les juridictions civiles, in Liberté de la presse et droits de la personne, Sous la dir. de DUPEUX Jean-Yves et LACABARATS Alain, Dalloz, Paris, 1997, pp. 39-53.

4- CARBONNIER (Jean), Le silence de la gloire, D. 1951. Chron. 119. rédigée à l'occasion de l'arrêt dit Branly, (Cass. civ. 27 févr. 1951. 329, JCP 1951. II. 6193).

5- CHARRON J., Les relations entre les élus et les journalistes parlementaires à l'Assemblée nationale du Québec: une analyse stratégique, Sainte-Foy, Université Laval, thèse de PHD. en science politique, octobre 1990, 606 p.

6- FEYDEAU Marie-Thérèse, Le juge civil et l'application de la loi sur la presse, in Liberté de la presse et droits de la personne, Sous la dir. de DUPEUX Jean-Yves et LACABARATS Alain, Dalloz, Paris, 1997, pp.55-58.

7- JONGEN (François), Quand un juge mord un journaliste (contribution à une réhabilitation de la responsabilité pénale des médias), in Mélanges à Michel HANOTIAU, Bruylan, Bruxelles, 2000, pp. 53-88.

8- LAMBERT (Pierre), Liberté de la presse, la protection de la réputation d'autrui et la Convention européenne des droits de l'homme, in Liber Amicorum EISSEN (M-A.), Bruylant, L.G.D.J., 1995, pp. 271-278.

9- LANDRY (Bruno), L'application des règles de procédure de la loi du 29 juillet 1881 devant la juridiction civile : point de vue d'un avocat, in Liberté de la presse et droits de la personne, Sous la dir. de DUPEUX Jean-Yves et LACABARATS Alain, Dalloz, Paris, 1997, pp. 59-62.

10- LEGROS (Pierre), Liberté de la presse, immunité pénale et hiérarchie des valeurs, in Mélanges offerts à Michel HANOTIAU, Bruylan, Bruxelles, 2000, pp. 113- 121.

11- LIBOIS (Boris), Liberté de la communication ou liberté des médias ? , in Mélanges offerts à Michel HANOTIAU, Bruylan, Bruxelles, 2000, pp. 123-137.

12- MAZEAUD (Henry) L'« absorption » des règles juridiques par le principe de responsabilité civile, D.H., 1935, Chron. 5.

13- MONTERO (Etienne), La responsabilité civile des médias, in Prévention et réparation des préjudices causés par les médias, sous la dir. de STROWEL A. et TULKENS F., Bruxelles, Larcier, 1998, pp. 93-134.

14- ROLLAND (Patrice), Du délit d'opinion dans la démocratie française, in Pouvoir et Liberté, Etudes offertes à Jacques Mourgeon, Bruylan, Bruxelles, 1998, pp.645-670.

15- ROUJOU (de Boubée), La loi du 17 janvier 1975 sur l'interruption volontaire de grossesse, D., 1975. Chron., p. 209 et s.

16- WACHSMANN (Patrick)., Liberté d'expression, in Libertés et droits fondamentaux, sous la direction de CABRILLAC Rémy, FRISON-ROCHE (Marie-Anne) et REVET Thierry, 10è éd., Dalloz, Paris, 2004, pp. 369-400.

17- WAQUET (Claire), L'application de l'article 1382 du Code civil à la liberté d'expression et au droit de la presse, in Liberté de la presse et droits de la personne, Sous la dir. de DUPEUX Jean-Yves et LACABARATS Alain, Dalloz, Paris, 1997, pp. 80-85.

LOIS, ORDONNANCES, DECISIONS

1- Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de presse.

2- Convention européenne des droits de l'homme du 4 novembre 1950.

3- Loi 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de presse au Bénin.

4- Ordonnance n°25 P.R. /M.J.L., du 7 août 1967, portant Code de procédure pénale en république du Bénin.

5- Loi n° 90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin.

6- Loi organique n°92-021 du 21 août 1992 relative à la Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication.

7- Loi n° 97-010 du 20 août 1997 portant libéralisation de l'espace audiovisuel et dispositions pénales spéciales relatives aux délits en matière de presse et de communication audiovisuelle en République du Bénin.

8- Loi n°2002-07 24 août 2002, portant Code des personnes et de la famille en République du Bénin.

9- Décision n°05-154/HAAC du 16 septembre 2005 portant réglementation de la carte de presse en république du Bénin.

RAPPORT, REVUE ET RECUEIL

1- ODEM, Rapport national sur l'état de la liberté de la presse au Bénin, 1ère édition, 2005, COPEF, 172 p.

2- Les cahiers de l'alternance, Rôle des médias dans un régime démocratique, n°3, Fondation Konrad Adenaeur, p.47.

3- Cour constitutionnelle, Recueil des décisions et avis, 1995.

ACTES DE COLLOQUES

1- AWOUDO (François), La problématique de dépénalisation des délits de presse au Bénin : intérêt pour le journaliste et la société, contribution au séminaire atelier sur la législation en matière d'information au Bénin, Abomey-Calavi, le 23 mars 2006.

2- Journaliste En Danger (JED), Plaidoyer pour une dépénalisation des délits de presse en république démocratique du Congo, Institut PANOS Paris et la Coopération britannique, mai 2004, 43 p.

AUTRES

1- GUILLIEN (Raymond) et VINCENT (Jean), Lexique des termes juridiques, 14è éd., Dalloz, 2003, 619 p.

2- MENGUE (ME ENGOUANG Fidèle), Cours de méthodologie, DEA, Droits de la personne et de la démocratie, année académique 2004-2005.

TABLES DES MATIERES

INTRODUCTION

Première partie : 8

CHAPITRE 1 : LEGITIMITE DE LA DEPENALISATION. 10

Section 1 : La dépénalisation, une exigence propre à la société démocratique. 10

Paragraphe 1 : L'exaltation du droit du peuple à l'information. 11

A. Le combat perdu des partisans de la liberté absolue de la presse. 11

B. La question de la nécessité de la responsabilité pénale de la presse 13

Paragraphe 2 : Une exigence conforme aux textes fondamentaux. 15

A. Le maintien de la relativité de la liberté de presse. 15

B.Une exigence en faveur de la démocratie. 16

Section 2 : La dépénalisation, une limitation républicaine de la liberté de presse. 18

Paragraphe 1 : La liberté de presse, un fondement essentiel de la démocratie. 18

A.La démocratie cadre d'éclosion et de protection de la liberté de presse. 18

B. La liberté de presse, facteur de promotion de la liberté humaine. 19

Paragraphe 2 : La dépénalisation, mécanisme de promotion du rôle de la presse. 21

A. Rôle de la presse béninoise dans l'avènement de la démocratie. 21

B. La presse, chien de garde de la démocratie. 22

CHAPITRE 2 : EFFICACITE DE LA DEPENALISATION DES DELITS                           PRESSE. 25

Section 1 : L'accroissement des garanties et du devoir de responsabilité du journaliste. 25

Paragraphe 1 : Le besoin de sécurité du journaliste 26

A.Garantie du besoin de sécurité du journaliste. 26

B.L'attitude de souplesse dans l'exécution des décisions de justice. 27

Paragraphe 2: La qualité de l'information. 29

A. La disponibilité des sources d'informations. 29

B. L'engouement pour le journalisme d'investigations. 31

Section 2 : L'élargissement de l'espace public de libre discussion. 32

Paragraphe 1 : La question du caractère obsolète de certaines sanctions. 33

A.La répression de l'offense au Chef de l'Etat. 33

B.La sanction de certaines publications interdites. 34

Paragraphe 2 : Le caractère obsolète de certaines sanctions en matière de presse, un point de vue contestable 36

A. la relativité des législations 36

B. Les réactions sociales contre les infractions de presse 37

Seconde partie : 40

CHAPITRE 1 : LA QUESTION DES MODALITES DE SUPPRESSION DE LA RESPONSABILITE PENALE. 42

Section 1 : Dépénalisation des délits de presse ou de l'ensemble des manifestations de                    la liberté d'expression. 42

Paragraphe 1 : Pourquoi une dépénalisation partielle ? 43

A. Les justifications de la suggestion 43

B. Une solution peu satisfaisante. 44

Paragraphe 2 : Dépénalisation de l'ensemble des manifestations de la liberté 45

d'expression. 45

A. Un souci de cohérence 45

B. Une solution difficile en pratique. 47

Section 2 : Le sort de la loi 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de la presse devant le 49

juge civil. 49

Paragraphe 1 : Application intégrale de la loi 60-12 du 30 juin 1960 devant le juge civil. 49

A.Une application réalisable. 49

B.Le rejet de la fonction substitutive de l'article 1382 du Code civil 51

Paragraphe 2 : L'intervention du droit commun de la responsabilité civile en 52

matière de presse. 52

A. L'admission de la fonction complétive de l'article 1382 du Code civil 53

B.Les limites à la vocation complétive de l'article 1382 du code Civil en matière de presse. 54

CHAPITRE 2 : LES CONDITIONS LIEES A LA PROFESSION. 56

Section 1 : Les préalables liés à l'organe de presse et à ses animateurs. 56

Paragraphe 1 : Nécessaire émergence des entreprises de presse 56

A. Des structures financièrement fragiles. 57

B. La loi du marché. 58

Paragraphe 2 : L'accès à la profession 59

A. Le critère de qualification 59

B. Le critère d'identification 61

Section 2 : Les exigences liées à l'éthique et à la qualité de l'information. 62

Paragraphe 1 : L'éthique dans l'information, une question décisive pour la démocratie 62

A. Les menaces de l'activité sur la démocratie 63

B. Ethique et déontologie comme éléments de légitimité du journaliste 64

Paragraphe 2 : Les préalables liés aux organes de régulation et d'autorégulation 66

A. L'ODEM, pour plus de déontologie dans les médias 66

B. Le renforcement des capacités de contrôle de la HAAC 68

CONCLUSION

Annexes ...................................................................................76

Bibliographie..................................................................................133

Table des matières ............................................................................138

* 1 JONGEN (François), Quand un juge mord un journaliste (contribution à une réhabilitation de la responsabilité pénale des médias), in Mélanges à Michel HANOTIAU, Bruylan, Bruxelles, 1998, p. 53.

«Le principe enseigné dans les écoles de journalisme comme régissant le fonctionnement de la presse aujourd'hui : quand un chien mord un homme, ce n'est pas une information ; quand un homme mord un chien, c'est, par contre, une information digne d'être publiée » ;

* 2 DEBBASCH (Charles) et PONTIER (Jean-Marie), Introduction à la politique, Dalloz, 2000, p.245.

* 3 Loi n° 90-32 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin, Préambule §.6. : « Affirmons solennellement notre détermination par la présente Constitution de créer un Etat de droit, de démocratie pluraliste, dans lequel le respect des droits fondamentaux de l'homme, les libertés publiques, la dignité de la personne humaine et la justice sont garantis, protégés et promus comme la condition nécessaire au développement véritable et harmonieux de chaque béninois tant dans sa dimension temporelle, culturelle que spirituelle. »

* 4 MACOVEI (Monica), Liberté d'expression, Précis n°2 sur les droits de l'homme, Conseil de l'Europe, juillet 2003, p. 7.

* 5 WACHSMANN (Patrick), La liberté d'expression, in Libertés et droits fondamentaux, 10è éd., Dalloz, Paris, 2004, p. 368.

* 6 Article 9, Charte africaine des droits de l'homme et des peuples :

« 1. Toute personne a droit à l'information.

2. Toute personne a le droit d'exprimer et de diffuser ses opinions dans le cadre des lois et règlements ».

* 7 Art. 24, Constitution du Bénin du 11 décembre 1990.

* 8Lois n° 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de la presse, et n° 97-010 du 20 août 1997 portant libéralisation de l'espace audiovisuel et dispositions pénales spéciales relatives aux délits en matière de presse et de communication audiovisuelle en République du Bénin.

* 9« On peut définir le libéralisme pénal comme la reconnaissance, face à l'appareil étatique, de l'individu en tant que valeur autonome, impliquant son respect et sa dignité. Appliqué au délinquant, le libéralisme implique aussi le souci de sa réinsertion sociale. Appliqué à la victime, il implique encore la réparation de son préjudice ».  MERLE (Roger) et VITU (André), Traité de droit criminel, 7ème éd, CUJAS, Paris, tome 1, p.136.

* 10 GUILLIEN (Raymond) et VINCENT (Jean), Lexique des termes juridiques, 14è éd., Dalloz, Paris, p. 206.

* 11 MERLE (Roger) et VITU (André), ibid., p.155.

* 12 Journaliste En Danger (JED), Plaidoyer pour une dépénalisation des délits de presse en république du Congo, Institut Panos, Paris, 2004, p.7.

* 13 ODEM, Rapport national sur l'état de la liberté de la presse au Bénin, 1ère édition, 1995, COPEF, p.79.

* 14 BOUVENET (Gaston -Jean) et HUTIN (Paul), Recueil annoté des textes de droit pénal, Paris, éd. Union Française, p.1. ; GUILLIEN (Raymond) et VINCENT (Jean), Lexique des termes juridiques, op. Cit., p. 198.

* 15 Ibid., p.317.

* 16 Lois n° 60-12 du 30 juin 1960 et n° 97-010 du 20 août 1997 précitées, p. 3.

* 17 Journaliste En Danger (JED), Pour ou contre les délits de presse en République Démocratique du Congo, ibid., p. 23. AWOUDO (François), La problématique de dépénalisation des délits de presse au Bénin : intérêt pour le journaliste et la société, contribution au séminaire atelier sur la législation en matière d'information au Bénin, Abomey-Calavi, le 23 mars 2006.

* 18 ROLLAND (Patrice), Du délit d'opinion dans la démocratie française, in Pouvoir et Liberté, Etudes offertes à Jacques Mourgeon, Bruylan, Bruxelles, 1998, p. 645.

* 19Les cahiers de l'alternance, Rôle des médias dans un régime démocratique, n°3, Fondation Konrad Adenauer, p.47.

* 20 ODEM, Rapport national sur l'état de la liberté de la presse au Bénin, 1ère édition, 1995, COPEF, p.9.

* 21 Ibid., p.8.

* 22 KAMTO (Maurice), Pouvoir et droit en Afrique noire, L.G.D.J., Paris, 1987, pp.246-247.

* 23 PIGEAT (Henri) et LEPRETTE (Jean), La liberté de la presse le paradoxe français, PUF, 2003, p. 28.

* 24 PIGEAT (Henri) et LEPRETTE (Jean), ibid., p. 34.

* 25 PIGEAT (Henri) et LEPRETTE (Jean), ibid., p. 74.

* 26 Léon Gambetta (2 avril 1838 - 31 décembre 1882), homme politique français. Il fut Président de la Chambre des députés de 1879 à 1881 puis Président du Conseil et Ministre des Affaires Étrangères du 14 novembre 1881 au 27 janvier 1882.

* 27 PIGEAT (Henri) et LEPRETTE (Jean), op. Cit., p. 34.

* 28 Émile de Girardin, publiciste et homme politique (Paris, 1806-1881), fut le promoteur du journal à prix modique et créa en 1836 la Presse, quotidien qui faisait une large place à la publicité pour s'assurer des ressources et au roman-feuilleton pour conserver des lecteurs.

* 29PIGEAT (Henri) et LEPRETTE (Jean), ibid., p. 35.

* 30 Article 1er des dix premiers amendements à la Constitution américaine : « Le Congrès ne fera aucune loi (...) qui restreigne la liberté de la parole ou de la presse (...) ».

* 31 PIGEAT (Henri) et LEPRETTE (Jean), ibid., p.56.

* 32 Article 1er des dix premiers amendements à la Constitution américaine, précité, p. 10.

* 33 Car, plusieurs siècles après, la question est relancée. La question de la dépénalisation n'est donc pas nouvelle. Seul est récent le concept de dépénalisation qualifié de nouvelle stratégie sociale. Terme emprunté au titre de la 19è conférence de recherche criminologique du Conseil de l'Europe, Strasbourg 1990. V. PRADEL (Jean), Droit pénal comparé, Précis Dalloz, 1995, p.147.

* 34 Art 107, loi n° 97-010 du 20 août 1997 : « La détention préventive en matière de presse est interdite ».

* 35 LEGROS (Robert), Table ronde « Quel avenir pour le jury populaire en Belgique ? », Journal des procès, 242, 25 juin 1993, p. 32, cité par JONGEN (François), in Mélanges à Michel HANOTIAU, op. Cit., p. 63.

* 36 Mélanges à Michel HANOTIAU, op. Cit., p. 63.

* 37 HANOTIAU (Michel), « la responsabilité en cascade en matière civil », R.C.J.B., 1998, p.386. Cité par JONGEN (François), in Mélanges à Michel HANOTIAU, op. Cit., p. 63.

* 38 VELAERS (Jean), cité par JONGEN F. in Mélanges à Michel HANOTIAU, op. Cit., p. 63.

* 39 C'est dans l'affaire Lingens (1986) que les juges de Strasbourg soulignèrent pour la première le rôle de la presse en tant que « chien de garde politique ». Le requérant, un journaliste, avait critiqué, dans une série d'articles, le chancelier fédéral autrichien de l'époque pour avoir tenté une manoeuvre politique en annonçant son intention de former une coalition avec un parti dirigé par un ancien nazi. L'intéressé (M. Lingens) avait qualifié le comportement du chancelier d' « immoral et dépourvu de dignité » et estimé qu'il relevait de l' « opportunisme le plus détestable ». A la suite d'une action privée intentée par le chancelier, les tribunaux autrichiens estimèrent ces déclarations diffamatoires et condamnèrent le journaliste à une amende. Lors des débats judiciaires, ils relevèrent que l'intéressé était incapable de prouver la véracité de ses allégations. Sur ce dernier point, les juges de Strasbourg établirent que l'approche des tribunaux nationaux était erronée, dans la mesure où les opinions (jugements de valeur) ne prêtent pas à une démonstration de leur exactitude. Examinant les motifs de l'inculpation du journaliste, la Cour souligna l'importance de la liberté de la presse dans le débat politique. Ces principes revêtent une importance particulière pour la presse : si elle ne doit pas franchir les bornes fixées en vue, notamment, de la protection de la réputation d'autrui, il lui incombe néanmoins de communiquer des informations et des idées sur les questions débattues dans l'arène politique, tout comme sur celles qui concernent d'autres secteurs d'intérêt public. A sa fonction qui consiste à en diffuser s'ajoute le droit, pour le public d'en recevoir [...].

* 40 LEGROS (Pierre), Liberté de la presse, immunité pénale et hiérarchie des valeurs, in Mélanges offerts à Michel HANOTIAU, op. Cit., p.113.

* 41 « [...] sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi » 

* 42 Art. 1er, loi béninoise n° 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de presse : « L'imprimerie et la librairie sont libres ».

* 43 Montesquieu, De l'esprit des lois, livre III, chap. V., p. 94. 

* 44 Lois n° 60-12 du 30 juin 1960 et n° 97-010 du 20 août 1997 précitées, p. 3.

* 45 ROLLAND (Patrice), Du délit d'opinion dans la démocratie française, in Pouvoir et Liberté, Etudes offertes à Jacques Mourgeon, Bruylan, Bruxelles, 1998, p. 644.

* 46 KAMTO (Maurice), Pouvoir et droit en Afrique noire, L.G.D.J., Paris, 1987, pp.244-246.

* 47 ROLLAND (Patrice), op. Cit. p. 645.

* 48 FRERE (Marie-Soleil), Presse et démocratie en Afrique francophone, les mots et les maux de la transition au Bénin et au Niger, Karthala, Paris, p.74.

* 49 FRERE (Marie-Soleil), op. Cit., p. 72. 

L'isolement du régime du PRPB (Parti de la Révolution Populaire du Bénin), totalement discrédité sur le plan national comme international, et son impopularité croissante l'avaient emmené à procéder à une petite ouverture à travers l'autorisation de deux organes : La gazette du Golfe et Tam-TAM express qui connurent tout de même des censures et des saisies. V. FRERE (Marie-Soleil), op. Cit., pp. 61-63.

* 50 KAMTO (Maurice), op. Cit., p.247.

* 51 PRADEL (Jean), Droit pénal comparé, Précis Dalloz, 1995, p.147.

* 52 Dans l'arrêt Ligens, les juges de Strasbourg firent aussi valoir que la liberté de la presse fournit à l'opinion publique l'un des meilleurs moyens de connaître et de juger les idées et attitudes des dirigeants et que, par conséquent, le libre jeu du débat politique se trouve au coeur même de la société démocratique. C'est la raison pour laquelle ils accordent au débat politique entretenu par la presse une large protection.

* 53 MERLE (Roger) et VITU (André), Traité de droit criminel, 7ème éd, CUJAS, Paris, tome 1, p.136.

* 54 Cf. Arrêt Lingens précité, p. 13.

* 55 FRERE (Marie-Soleil), op. Cit. , p.73.

* 56 FRERE (Marie-Soleil), op. Cit., p. 72.

* 57 FRERE (Marie-Soleil), ibid., p. 68.

* 58 Le Bénin est régulièrement classer parmi les bons élèves en matière de respect de la liberté de presse au terme des rapports de Reporters Sans Frontière : 1er en 2002 ; 1er pays africain et 25è sur le plan mondial en 2005.

* 59 NEVEU (Eric), Sociologie des mouvements sociaux, La Découverte, Paris, 3è éd., p.97.

* 60 Constitution du Bénin du 11 déc. 1990.

* 61 L'attentat du Rainbow Warrior est un scandale qui met en cause les services secrets français, en 1985. Le Rainbow Warrior, bateau de l'organisation écologiste Greenpeace qui mouillait à Auckland en Nouvelle-Zélande en vue de protester contre les essais nucléaires français dans le Pacifique a été coulé par les services secrets français. V. annexe V.

* 62 La fonction officielle de Clearstream est de servir de chambre de compensation pour les opérations de règlement-livraison de titres entre établissements financiers. C'est une mission indispensable pour faciliter les transactions de titres entre tous les établissements financiers. Ayant eu accès à une partie des listes des clients de Clearstream lors de ses recherches, le journaliste Denis Robert a pu montrer qu'il existait des comptes occultes. V. annexe IV.

* 63 NEVEU (Eric), Sociologie des mouvements sociaux, op. Cit., p.97.

* 64FRERE (Marie-Soleil), op. Cit. , p. 42.

* 65 LIBOIS (Boris) et HAARSCHER (Guy), Les médias entre droit et pouvoir, éd. Université de Bruxelles, 1994, p. 1.

* 66 Il s'agit des règles contraignantes limitant les poursuites notamment le régime de courte prescription afin de protéger la liberté de presse. Art. 62, Loi n° 60-12 du 30 juin 1960 sur la liberté de la presse au Bénin.

* 67 HANOTIAU (Michel), « la responsabilité en cascade en matière civil », R.C.J.B., 1998, p.386. Cité par JONGEN (François) in Mélanges à Michel HANOTIAU, op. Cit., p. 63. ; V. VELAERS (Jean), cité par JONGEN (F.) in Mélanges à Michel HANOTIAU, op. Cit., p. 63.

* 68 ODEM, Rapport national sur l'état de la liberté de presse au Bénin, 1ère édition, novembre 2005, p.42.

* 69 ODEM, ibid., p. 49.

* 70 ODEM, op. Cit., pp. 71-78.

* 71 ibid., p. 35.

* 72 ibid., op. Cit., p. 36.

* 73 ibid., op. Cit., p. 36.

* 74 AWOUDO (François) Avant-propos du Rapport national sur l'état de la liberté de la presse au Bénin, p. 9.

* 75 ENGELS (Jan Niklas), in Rapport national sur l'état de la liberté de presse au Bénin, op. Cit., p.5.

* 76 Cour européenne des droits de l'homme, 27 mars 1996, Rev. Trim. Dr. h., 1996 p. 493 en cause Goodwin c/ le Royaume Uni. La Cour de Strasbourg a tranché le conflit qui opposait un journaliste britannique à une société commerciale qui s'opposait à la publication d'un article la concernant au motif que les informations détenues par le journaliste viendraient d'un projet confidentiel de plan de développement, qui avait disparu. Un juge des référés, saisi par la société, décida, sur la base de l'article 10 de la loi anglaise sur le « Contempt of Court » que le journaliste devait produire ses notes afin de révéler l'identité de son informateur. Le journaliste s'y refusa et fut condamné à une amende. Il introduisit un recours devant la Commission, estimant que l'injonction qu'il avait reçue portait atteinte à sa liberté d'expression garantie par l'article 10 de la Convention. Par son arrêt en date 27 Mars 1996, la Cours a estimé, qu'une ordonnance de divulgation sommant un journaliste de révéler l'identité de son informateur, ainsi que l'amande infligée pour refus d'obtempéré, constitue une atteinte au droit de la liberté d'expression garantie par le paragraphe 1er de l'article 10 de la Convention. V. LEGROS (Pierre), Liberté de la presse immunité pénale et hiérarchie des valeurs, in Mélanges offerts à Michel HANOTIAU, op. Cit., p. 115

* 77 LAMBERT (Pierre), Liberté de la presse, la protection de la réputation d'autrui et la Convention européenne des droits de l'homme, in Liber Amicorum EISSEN M-A., Bruylant, L.G.D.J., 1995, p. 271.

* 78 La loi n°60-12 s'articule autour de quatre grandes spécificités :

- un régime administratif de la presse écrite exempte de tout contrôle préalable comportant une obligation de déclaration auprès du procureur de la république et des formalités de dépôt légal ;

- la définition de diverses infractions (diffamation, offense, injure...) -visant à instituer un équilibre entre la liberté et la protection des personnes- susceptibles d'être caractérisées quels que soient le support et le moyen de l'expression, la seule condition tenant à la publicité portant l'infraction à la connaissance d'autrui ;

- L'établissement d'un régime de responsabilité pénale spécifique instituant une présomption de responsabilité du directeur de la publication ;

- La mise en place d'un régime procédural particulier, dérogeant au droit commun, avec des règles contraignantes limitant les poursuites, notamment une prescription des infractions réduites à trois mois, afin de protéger la liberté de presse.

* 79 AWOUDO (François), ancien président de l'ODEM, communication sur : la problématique de la dépénalisation des délits de presse au Bénin : intérêt pour le journaliste et la société, Abomey-Calavi, 23 Mars 2003.

* 80 WASCHMANN (Patrick), Liberté d'expression, in Libertés et droits fondamentaux, sous la direction de CABRILLAC (Rémy), FRISON-ROCHE (Marie-Anne) et REVET (Thierry), Dalloz, 2001, p. 376.

* 81 LEGROS P., Liberté de la presse, immunité pénale et hiérarchie des valeurs, op. Cit., p. 118.

* 82 WASCHMANN (Patrick), op. Cit., p. 377.

* 83 Système dans lequel les limitations de la liberté de presse sont assurées aussi bien par la loi que par des instances de régulation et d'autorégulation. V. PIGEAT (Henri), Ethique et qualité de l'information, op. Cit. p. 76.

* 84 GUILLIEN (Raymond) et VINCENT (Jean), Lexique des termes juridiques, op. Cit., p. 400.

* 85 «Pour se concilier avec la liberté d'expression ces infractions devront être entendues de manière à ne pas faire obstacle à l'échange d'idée qui caractérise la société démocratique. S'il est claire qu'on ne peut admettre l'agression injuste ou la violence verbale, il devrait être non moins évident qu'on ne peut faire obstacle à la recherche de la vérité et à la critique, même véhémente, du comportement et du discours d'autrui». WASCHMANN (Patrick), op. Cit., p. 388.

* 86 Les cahiers de l'alternance N°3, le rôle des médias dans un régime démocratique, Partenariat FKA-CESTI, p.47.

* 87 MERLE (Roger) et VITU (André), Traité de droit criminel, op. Cit., p.23.

* 88 MERLE (Roger) et VITU (André), op. Cit., p.26 ; Loi du 11 juillet 1975 portant réforme du divorce en France. V. aussi ROUJOU (De Boubée), la loi du 17 janvier 1975 sur l'interruption volontaire de grossesse, D., 1975. Chron., p. 209 et s.).

* 89 Loi n°2002-07 24 août 2002, portant Code des personnes et de la famille en République du Bénin, Titre III, Chap. II, Art. 222 : « Le divorce par consentement mutuel peut avoir lieu sur demande conjointe des deux époux ou par suite d'un accord postérieur constaté devant le juge au contentieux. »

* 90MERLE (Roger) et VITU (André), ibid., p. 27.

* 91MERLE (Roger) et VITU (André), ibid., p. 30.

* 92 Durkheim E., cité par MERLE (Roger) et VITU (André), in Traité de droit criminel, op. Cit., p. 31.

* 93 Cette observation concerne l'espace judiciaire béninois ci après : Cours d'appel de Cotonou et de Parakou, Tribunaux de première instance de Cotonou, Porto-Novo, Lokossa, d'Abomey, Ouidah, Natitingou, Parakou et Kandi. Période d'étude : 1999 à 2004, in Rapport national sur l'état de la presse au Bénin, 1ère édition, novembre 2005.

* 94 JONGEN (François), Quand un juge mord un journaliste, Contribution à une réhabilitation de la responsabilité pénale des médias, op. Cit., p. 53.

* 95 MERLE (Roger) et VITU (André), op. Cit., p.155.

* 96 ADAU AKELE P. Dépénaliser les délits de presse au Congo : Pourquoi et comment ? , in Plaidoyer pour un dépénalisation des délits de presse en RDC, op. Cit., p. 12.

* 97 Art. 26 Loi n° 60-12 citée :«Toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation... ». 

* 98 BOSLY (Henri), Les relations entre la justice et la presse. Aspects de droit pénal et de droit de la procédure pénale, in Justice et Médias, 1995, p. A 28, cité par JONGEN (François), in Mélanges à Michel HANOTIAU, op. Cit. p. 65.

* 99 FONTBRESSIN (Patrick), cité par LEGROS (Pierre), in Mélanges à Michel HANOTIAU, op. Cit. p. 118. ; Cf. LIBOIS (Boris) et HAARSCHER (Guy), Les médias entre droit et pouvoir, op. Cit., p. 103.

* 100 Ibid., p. 119.

* 101 CEDH, art. 10 : « Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n'empêche pas les Etats de soumettre les entreprises radiophoniques, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisations ».

* 102 M. VAN DE KERCHOVE, Symbolisme et instrumentalité. Stratégies de pénalisation et de dépénalisation dans une société pluraliste, in Punir, mon beau souci. Pour une raison pénale, s. la dir. de RINGELHEIM F., Revue de l'ULB, 1984. pp. 164-165. Cité par JONGEN (F.), in Mélanges à Michel HANOTIAU, op. Cit., p. 66.

* 103 Art. 29 §2 : « dans l'exercice de ses droits et dans la jouissance de ses libertés, chacun n'est soumis qu'aux limitations établies par la loi exclusivement en vue d'assurer la reconnaissance et le respect des droits et libertés d'autrui et afin de satisfaire aux justes exigences de la morale, de l'ordre public et du bien-être général dans une société démocratique ».

* 104 Sur la substance de l'article 47 voir annexe II.

* 105 Art. 12 Code de procédure civile.

* 106 CARBONNIER (Jean), Le silence de la gloire, D. 1951. Chron. 119. rédigée à l'occasion de l'arrêt dit Branly, (Cass. civ. 27 févr. 1951. 329, JCP 1951. II. 6193). V. aussi BIGOT C., Le champ d'application de l'article 1382 du Code civil en matière de presse, in Liberté de la presse et droits de la personne, Dalloz, Paris, 1997, sous la dir. de DUPEUX (Jean-Yves) et LACABARATS (Alain).

* 107 Articles 32 et 53 de la loi 60-12 V. Annexes.

* 108 GUILLIEN R., Lexique des termes juridiques, op. Cit. p. 545. Sur ce principe cf. LARROUMET C., Droit civil, t. 1. Introduction à l'étude du droit privé, 2ème éd. Economica, 1995, n° 153 et 235 ; TERRE F., Introduction générale au droit, Précis Dalloz, 3ème éd., 1996, n° 469.

* 109 BURGELIN (Jean-François), Le point sur l'application de la loi du 29 juillet 1881 devant les juridictions civiles, in Liberté de la presse et droits de la personne, Dalloz, Paris, 1997, p.43. Sous la dir. de DUPEUX (Jean-Yves) et LACABARATS (Alain)

* 110 « Les Art. 28, 29 et 30 ne seront applicables aux diffamations ou injures dirigées contre la mémoire des morts que dans les cas où les auteurs de ces diffamations ou injures, auraient eu l'intention de porter atteinte à l'honneur ou à la considération des héritiers, époux ou légataires universels vivants. Que les auteurs des diffamations ou injures aient eu ou non l'intention de porter atteinte à l'honneur ou à la considération des héritiers, époux ou légataires universels vivants, ceux-ci pourront user, dans les deux cas du droit de réponse prévu par l'article 11 », art. 31, Loi 60- 12.

* 111 BIGOT (Christophe), Le champ d'application de l'article 1382 du Code civil en matière de presse, in Liberté de la presse et droits de la personne, op. Cit., p. 74.

* 112 BIGOT (Christophe), Le champ d'application de l'article 1382 du Code civil en matière de presse, in Liberté de la presse et droits de la personne, op. Cit., p. 74.

* 113 MAZEAUD (Henri), L'« absorption » des règles juridiques par le principe de responsabilité civile, D.H., 1935, Chron. 5.

* 114ADJOVI (V. Emmanuel), Affairisme médiatique au Bénin, in politique africaine, 2003, n°92, p. 158.

* 115 Art. 39, Loi 97-010 du 20 août 1997, cité.

* 116Art. 49, Loi 97-010, citée.

* 117 V. Annexe II.

* 118 ODEM, Rapport 2005 sur l'état de la liberté de presse au Bénin, op. Cit., p.40. ; V. aussi ADJOVI (Emmanuel), Affairisme médiatique au Bénin, op. Cit., p.159.

* 119 CORNU (Daniel), Ethique de l'information, Que sais-je, n°3252, Paris, PUF, 1997. p. 9.

* 120 ODEM, Rapport national sur l'état de la liberté de la presse au Bénin, op. Cit., p. 23.

* 121 ODEM, ibid., p. 23.

* 122 FRERE (Marie-Soleil), Presse et démocratie en Afrique francophone, les mots et les maux de la transition au Bénin et au Niger, op. Cit., p. 439.

* 123 ODEM, op. Cit., p. 24.

* 124 ODEM, op. Cit., p. 28.

* 125 Ibid., p. 26.

* 126 Ibid., p. 26.

* 127 ODEM, op. Cit., p. 49.

* 128 CHARRON J., Les relations entre les élus et les journalistes parlementaires à l'Assemblée nationale du Québec: une analyse stratégique, Sainte-Foy, Université Laval, thèse de PHD en science politique, octobre 1990, p. 7., V. CORNU D., Journalisme et vérité, pour une éthique de l'information, LABOR et FIDES, 1994, p.16.

* 129 STROOBANTS J-P. «Opinions et débats», Entrevue avec Dominique Wolton in Le Soir, mardi 21 mars 1995, p. 2.

* 130 CORNU Daniel. Éthique de l'information, Paris, PUF, coll. Que sais-je, 1997, p. 74.

* 131 CORNU, 1997, op. Cit., p. 71.

* 132 KLAIDMAN Stephen et BEAUCHAMP Tom L., The Virtuous Journalist, New York: Oxford University Press, 1987, pp. 129-130.

* 133 KLAIDMAN Stephen et BEAUCHAMP Tom L

* 134 KLAIDMAN Stephen et BEAUCHAMP Tom L., ibid, p.130.

* 135 ROUSSEAU (Jean-Jacques), Du contrat social, Paris, Flammarion, 1992, p. 39.

* 136 ADJOVI (Emmanuel), Les instances de régulation des médias en Afrique de l'ouest, le cas du Bénin, Karthala-Fes, 2003, p.87.

* 137 Constitution du Bénin du 11 déc. 1990, art. 142.

* 138 Loi organique n°92-021 du 21 août 1992 relative à la Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication et la loi n°97-010 du 20 août 1997 portant libéralisation de l'espace audiovisuel et dispositions pénales spéciales relatives aux délits en matière de presse et de communication audiovisuelle en république du Bénin.

* 139 ADJOVI (Emmanuel), ibid. pp. 86 et suivants.

* 140 ADJOVI (Emmanuel), op. Cit. pp. 108 à 110.

* 141 ADJOVI (Emmanuel), ibid., 113.

* 142 ADJOVI (Emmanuel), ibid., p. 113 ; DDC 95-041 du 12 décembre 1995, in Cour Constitutionnelle, Recueil des décisions et avis, 1995, pp.199-201.

* 143 ADJOVI (Emmanuel), ibid., p. 114

* 144 MONTERO (Etienne), La responsabilité civile des médias, in Prévention et réparation des préjudices causés par les médias, sous la dir. de STROWEL A. et TULKENS F., Bruxelles, Larcier, 1998, p.134.






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