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Les droits communautaires des procédures collectives dans l'espace OHADA

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par Dieynaba Sakho
Université Gaston Berger de Saint Louis, Sénégal - DEA 2008
  

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SOMMAIRE

INTRODUCTION GENERALE 3

TITRE I/ La pluralité des sources communautaires du droit des procédures collectives dans l'espace OHADA 9

CHAPITRE I/ L'existence d'un droit commun des procédures collectives dans l'espace OHADA 9

SECTION 1/ Le domaine d'application du droit OHADA des procédures collectives 9

Paragraphe 1/ L'application du droit OHADA aux sociétés commerciales 9

Paragraphe 2: L'application du droit OHADA à un autre espace juridique 18

SECTION 2/ Le contenu du droit OHADA des procédures collectives 24

Paragraphe 1: Les procédures de sauvegarde des entreprises 24

Paragraphe 2/ Les procédures entraînant la disparition de l'entreprise 29

CHAPITRE II/ La consécration des droits des procédures collectives dérogatoires au droit OHADA 35

SECTION 1/ La spécificité du domaine d'intervention des droits des procédures collectives dérogatoires au droit OHADA 35

Paragraphe 1/ L'activité exercée par les sociétés assujetties aux droits dérogatoires des procédures collectives 35

Paragraphe 2/ La prise en compte des intérêts en cause 40

SECTION 2/ L'intervention de l'autorité administrative dans les droits des procédures collectives dérogatoires au droit OHADA 43

Paragraphe 1/ La subordination de l'ouverture de la procédure collective à l'avis de l'autorité administrative 43

Paragraphe 2/ Le contrôle des opérations de procédure collective par l'autorité administrative 48

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE 54

TITRE II/ La contrariété des différents droits communautaires des procédures collectives dans l'espace OHADA 56

CHAPITRE I/ L'autonomie des sources des droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 56

SECTION 1/ L'équivalence des sources des droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 56

Paragraphe 1/ Les modalités d'application des droits communautaires des procédures collectives 56

Paragraphe 2/ La neutralisation réciproque des droits communautaires des procédures collectives 61

SECTION 2/ L'inexistence d'une hiérarchie entre les droits communautaires des procédures collectives 65

Paragraphe 1/ L'absence d'un critère d'élection d'un droit communautaire des procédures collectives 65

Paragraphe 2/ Les possibilités de règlement des conflits de droits communautaires 70

CHAPITRE II/ Les manifestations de l'autonomie dans les droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 73

SECTION 1/ Les objectifs des droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 73

Paragraphe 1/ Les choix politiques des droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 73

Paragraphe 2/ Les manifestations des choix politiques dans la mise en oeuvre des procédures collectives 78

SECTION 2/ Les rapports entre les droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 84

Paragraphe 1/ La dimension négative des rapports entre les droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 84

Paragraphe 2/ La dimension positive des rapports entre les droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 91

CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE 95

CONCLUSION GENERALE 97

TABLE DES MATIERES 100

BIBLIOGRAPHIEINTRODUCTION GENERALE

Les Etats africains sont engagés dans divers processus d'intégration qui, dans leurs derniers développements, entendent constituer de véritables ordres juridiques1(*). A cet effet, de nombreux ensembles et sous ensembles régionaux ont été mis en place. La multiplicité de ces ordres juridiques n'est pas sans poser quelques contradictions dans les rapports qu'ils entretiennent. Aussi, leur efficacité repose sur la cohérence juridique et judiciaire. C'est l'une des missions fondamentales assignée à l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA)2(*). L'OHADA malgré sa dénomination n'est pas la seule organisation s'intéressant au droit des affaires. Elle partage son domaine d'intervention3(*) avec d'autres organisations sous régionales. Bien avant son avènement, l'harmonisation4(*) du droit des affaires en Afrique s'est essentiellement accomplie dans des secteurs particuliers qui se sont trouvés en crise vers la fin des années 805(*). Ce fut le cas des entreprises du secteur bancaire et des marchés d'assurance régies respectivement par les dispositions de l'Union Economique Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) et de la Conférence Interafricaine des Marchés d'Assurance (CIMA).

Instituée par un traité signé à Dakar le 10 janvier 1994 et regroupant huit pays6(*) d'Afrique de l'ouest, l'UEMOA qui constitue le prolongement de l'UMOA7(*), est une organisation qui a pour principal objectif le renforcement de « la compétitivité des activités économiques et financières des Etats membres dans le cadre d'un marché ouvert et concurrentiel et d'un environnement juridique rationalisé et harmonisé... »8(*). A cet effet, l'article 22 du traité UEMOA dispose: "Afin de permettre la pleine application des principes d'union monétaire définis ci-dessus, les Gouvernements des Etats membres conviennent d'adopter une réglementation uniforme dont les dispositions seront arrêtées par le conseil des ministres de l'union concernant notamment: l'exécution et le contrôle de leurs relations financières avec les pays n'appartenant pas à l'union; l'organisation générale de la distribution et le contrôle du crédit; les règles générales de la profession bancaire et des activités s'y rattachant; les effets de commerce; la falsification des signes monétaires et de l'usage des signes falsifiés". Relativement à la profession bancaire, il faut noter que celle-ci est aujourd'hui organisée dans les pays de la zone UEMOA par trois textes fondamentaux que sont: la loi-cadre bancaire, le décret-cadre relatif au classement, à la forme juridique et aux opérations des établissements financiers et la loi portant réglementation des institutions mutualistes ou coopératives d'épargne et de crédit9(*).

A l'instar de l'UEMOA, la CIMA intervient elle aussi dans une branche du droit des affaires. La CIMA a été instituée par traité signé à Yaoundé le 10 juillet 1992. Elle succédait ainsi à la convention de coopération en matière de contrôle des entreprises d'assurances des Etats africains et malgache signée à Paris le 27 novembre 1973, laquelle faisait suite à la convention de coopération signée également à Paris le 27 juillet 196210(*). Le traité CIMA proprement dit contient les règles d'organisation de la conférence interafricaine des marchés d'assurances et deux annexes portant d'une part, code des assurances des Etats membres11(*) de la CIMA, et d'autre part statut et missions des directions nationales des assurances. De l'ensemble des dispositions du traité et de ses annexes, il ressort que la CIMA poursuit deux objectifs : d'abord la réglementation unique des entreprises et des opérations d'assurance, ensuite celle des contrats d'assurance par un seul code. Désormais, toutes les entreprises d'assurance, quelles que soient leur forme et les opérations d'assurance auxquelles elles se livrent « sont soumises à un régime commun »12(*), qu'il s'agisse de leur constitution, de leur fonctionnement ou de leur liquidation13(*).

La notion de droit des affaires ne connaît pas une définition précise. Seul l'article 2 du traité OHADA dresse une liste de matières entrant dans ce domaine avec la possibilité accordée au conseil des ministres de l'OHADA de l'élargir14(*). Dans une acception large, on considère que le droit des affaires englobe la réglementation des différentes composantes de la vie économique. A ce titre, le secteur bancaire tout comme celui des Assurances ne saurait échapper à cette branche du droit. C'est ainsi qu'on retrouve dans l'espace OHADA, d'autres organisations régionales qui légifèrent toutes dans le domaine du droit des affaires et composées des mêmes Etats membres. En effet, les Etats membres15(*) de l'OHADA sont tous parties au traité de l'UEMOA. A l'exception de la Guinée Bissau, ils sont également membres de la CIMA.

Le secteur bancaire en Afrique de l'Ouest est essentiellement régi par les textes de l'UEMOA. Conformément à la définition retenue par l'article 2 de la loi n°2008-26 du 28 juillet 200816(*) portant réglementation bancaire, les établissements de crédit agréés en qualité de banque ou d'établissement financier à caractère bancaire effectuent à titre de profession habituelle des opérations de banque que sont la réception de fonds du public, les opérations de crédit ainsi que la mise à disposition de la clientèle et la gestion de moyen de paiement. A l'image du secteur bancaire, le secteur des marchés d'assurance est lui aussi régi par un texte communautaire à savoir le code CIMA.

L'assurance est l'activité par laquelle, une personne dite « assureur » s'engage envers une ou plusieurs personnes dites « assurées » à couvrir, moyennant le paiement d'une somme d'argent dite « prime » une catégorie de risques déterminés par contrat.17(*)

L'environnement économique ouest africain est, en partie, marqué par la présence des banques et des sociétés d'assurance. Les activités de ces dernières (commerciales en général), de même que la forme (sociétés commerciales) que ces entités revêtent conduisent à considérer que ces secteurs d'activités sont susceptibles de tomber dans le domaine du droit des affaires pourtant régi par le traité OHADA.

La coexistence des différentes normes de ces organisations communautaires peut soulever de nombreux conflits dont on note quelques exemples au niveau du droit des procédures collectives. En effet, la pléthore des sources communautaires de ce droit n'est pas sans soulever quelques contradictions normatives.

Le vocabulaire utilisé par la doctrine pour traiter de la prévention et du traitement des difficultés des entreprises a, selon le Pr. Yves Guyon, « une connotation plus médicale et militaire que juridique car prévenir, c'est à la fois soigner et défendre »18(*). En outre la matière est complexe en raison du nombre de questions et de conflits d'intérêts qu'elle traite. Enfin elle fait appel à d'autres matières tel que le droit civil, le droit commercial, le droit bancaire, la procédure civile, le droit pénal, les voies d'exécution, le droit des sûretés...L'existence de plusieurs normes indépendantes les unes des autres et régissant la matière ne fait qu'en accentuer la complexité.

S'il est exact que la mise en place de plusieurs institutions ayant pour vocation une intégration juridique et ou économique bénéficie d'un consensus général quant à sa pertinence, sa réalisation concrète suscite plusieurs interrogations. En effet, bien vrai que le droit des procédures collectives est considéré comme l'ensemble des procédures faisant intervenir la justice lorsque le débiteur n'est plus en mesure de payer ses dettes en vue d'assurer le paiement des créanciers et dans la mesure du possible, le sauvetage de l'entreprise ou de l'activité, la mise en oeuvre de cette procédure peut rencontrer quelques difficultés en raison de la pléthore de sources juridiques en la matière.

En effet l'OHADA dispose d'un acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif19(*). De même la conférence interafricaine des marchés d'assurance a émis un code dont la section trois (3) du livre trois (3) contient des dispositions relatives aux procédures de redressement et de sauvegarde des entreprises d'assurance. En outre, les orientations portant organisation de la profession bancaire dans la zone UEMOA à savoir la loi 2008-26 du 28 juillet 2008 portant réglementation bancaire20(*), la loi Projet d'appui à la réglementation des mutuelles d'épargne et de crédit (PARMEC)21(*), et la loi 2008-47 du 3 septembre 200822(*) portant réglementation des systèmes financiers décentralisés contiennent toutes des dispositions relatives aux procédures collectives des établissements de crédit.

Du point de vue du champ d'application du droit des procédures collectives, le droit OHADA s'applique aux personnes physiques commerçantes ainsi qu'aux personnes morales de droit privé23(*) quels que soient leur but (lucratif ou non) et la nature de leur activité économique (civile ou commerciale). Les banques et les sociétés d'assurance devraient-elles être considérées comme toutes les personnes morales de droit privé au sens de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif ? Existe-t-il une hiérarchie entre ces normes régissant le droit des procédures collectives ? Où alors faut-il considérer qu'il existe un droit commun des procédures collectives et un droit spécial organisé par d'autres textes ? Répondre à toutes ces questions revient à évoquer les différentes sources des droits des procédures collectives de l'espace OHADA.

Relativement aux différents traités qui coexistent dans l'espace OHADA, il faut noter que, selon l'article 6 du traité de l'UEMOA « les actes arrêtés24(*) par les organes de l'Union pour la réalisation des objectifs du présent traité et conformément aux règles et procédures instituées par celui-ci sont appliqués dans chaque Etat membre nonobstant toute législation nationale contraire, antérieure ou postérieure ». En outre, l'article 43 du même traité énonce que les règlements ont une portée générale. Ils ont obligatoires dans tous leurs éléments et sont directement applicables dans tout Etat membre.

De même les articles 40 et 47 du traité instituant la CIMA énoncent respectivement : "Les règlements et les décisions sont obligatoires. Le règlement a une portée générale et est directement applicable dans tous les Etats membres. La décision désigne ses destinataires et est directement applicable..."; " les juridictions nationales appliquent les dispositions du présent traité et les actes établis par les organes de la Conférence nonobstant toute disposition nationale contraire antérieure ou postérieure à ces textes ". De même l'article 10 du traité OHADA affirme clairement que les actes uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les Etats parties nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antérieure ou postérieure.

Les normes dérivées de ces traités s'inscrivent dans cette même logique. Ainsi l'article 257 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif dispose : « sont abrogées toutes les dispositions antérieures contraires à celle du présent Acte uniforme... » De même l'article 114 de la loi 2008-26 du 28 juillet 200825(*) dispose : « sont abrogées, à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente loi, toutes dispositions contraires... ». Il en est de même pour l'article 85 de la loi PARMEC26(*) qui déclare abrogées à compter de sa date d'entrée en vigueur toutes dispositions contraires ou antérieures. On retrouve les mêmes dispositions au niveau de l'article 149 de la loi 2008-47 du 3 septembre 200827(*).

Ainsi sont affirmées la force obligatoire et la supranationalité des différentes dispositions émanant tant des traités instituant ces organisations communautaires que des normes édictées par elles.

La supranationalité signifie un système institutionnel et normatif qui permet de privilégier le bien commun, c'est-à-dire celui de la communauté, par rapport aux intérêts nationaux à savoir celui des Etats membres. Cette supranationalité peut s'observer dans le pouvoir d'édicter des normes communautaires ou régionales qui sont immédiatement applicables et ont des effets directs. En outre la supériorité des normes communautaires sur les règles juridiques nationales antérieures mais surtout postérieures en découle aisément.

Les trois ordres juridiques précédemment cités présentent toutes, à des degrés différents, tout ou partie des caractéristiques qui viennent d'être évoquées. L'UEMOA, l'OHADA tout comme la CIMA produisent toutes des normes immédiatement applicables et qui ont des effets directs dans l'ordre interne. Enfin toutes trois affirment explicitement la primauté des normes qu'elles produisent.

Lorsqu'il s'agit de solutionner un problème faisant appel à une disposition de droit national et une norme communautaire, la difficulté ne se posera pas puisque la norme communautaire s'appliquera en raison de sa primauté sur la disposition interne.

La question qu'il convient alors de se poser est de savoir quelle solution adopter lorsque les trois dispositions ont vocation à régir une même situation ?

Relativement au droit des procédures collectives, les conflits de normes voire les contradictions sont inévitables. On retiendra notamment les inopposabilités de la période suspecte, la notion de cessation des paiements, les paiements anormaux, le principe de l'irrévocabilité des ordres de paiement, la compensation effectuée en chambre de compensation, la règle de l'opposabilité aux tiers de la pension dès la livraison des valeurs...Autant de règles qui sont envisagées différemment d'un ordre juridique à un autre.

Démontrer les problèmes posés par la pluralité des sources du droit des procédures collectives dans l'espace géographique OHADA, apprécier les tentatives de solutions apportées à ces problèmes présentera un intérêt tant théorique que pratique.

D'une part, la coexistence de plusieurs normes de procédures collectives soulèvera des difficultés pour l'application de ce droit dans l'espace OHADA tant pour le juge que pour les praticiens. D'autre part, ces difficultés ne manqueront pas d'influer sur la jurisprudence en la matière. Enfin, elles risquent de remettre en cause les objectifs d'uniformisation de ce droit.

Dès lors, la question qu'il convient de se poser est celle de savoir quels sont les problèmes posés par la coexistence des normes communautaires portant organisation des procédures collectives dans l'espace OHADA ? Répondre à cette question nous renverra au débat relatif à l'harmonisation des législations communautaires, au pluralisme juridique ordonné. A ce titre, retenons ces propos du Pr. Delmas-Marty qui estime que « ce qui domine le paysage juridique actuel, c'est le grand désordre d'un monde tout à la fois fragmenté à l'excès, comme disloqué par une mondialisation anarchique, et trop vite unifié, voire uniformisé, par une intégration hégémonique... Ordonner le multiple sans le réduire à l'identique, admettre le pluralisme sans renoncer à un droit commun, à une commune mesure du juste et de l'injuste, peut dès lors sembler un objectif inaccessible et même contradictoire... »28(*). En effet, la coexistence de plusieurs droits communautaires régissant le droit des procédures collectives dans l'espace OHADA n'est pas sans susciter diverses contradictions qui affectent le domaine normatif mettant ainsi en exergue plusieurs règles susceptibles de s'appliquer à une même situation et de proposer des solutions différentes ou contraires. Cette situation influe sur l'état de la jurisprudence en matière de procédure collective. Le rôle primordial des procédures collectives étant l'apurement du passif, l'insécurité juridique et judiciaire provenant de la contrariété entre plusieurs normes de procédure collective tend à remettre en cause les efforts d'intégration et d'harmonisation de cette branche du droit des affaires. C'est à ce niveau que se trouve tout l'intérêt du débat relatif à l'harmonisation des droits communautaires.

Cette question de la rationalisation des droits communautaires dans l'espace OHADA se posera avec acuité si on considère le foisonnement d'ordres juridiques qui se chevauchent dans un même espace géographique et légifèrent indépendamment dans un domaine similaire. Edifié par à-coups et en ordre dispersé, le droit des affaires est, à maints égards, à l'antipode de ce qu'il devrait être : harmonisé certes, du moins par blocs compartimentés, mais pas du tout harmonieux, et complexe plutôt que simplifié. Le Pr. Tiger évoque cette « mosaïque juridique du droit des affaires »29(*) comme une question préoccupante. Et bien avant, le juge Kéba Mbaye épinglait le risque d'une contrariété des normes émanant des différentes instances africaines d'harmonisation juridique30(*). Cette situation complique du coup, non pas la compréhension ou l'insertion des normes dans l'ordre juridique interne des Etats, mais leur coexistence dans l'espace (titre I) et leur application à des situations déterminées pouvant créer des contradictions diverses (II).

TITRE I/ La pluralité des sources communautaires du droit des procédures collectives dans l'espace OHADA

Le droit des procédures collectives dans l'espace OHADA est caractérisé par l'existence de plusieurs sources, toutes indépendantes les unes des autres. Cette pluralité de sources est à la base de différents conflits attachés à l'application de ce droit dans l'espace OHADA. Les règles émanant de ces différentes sources sont souvent concurrentes et le juge doit choisir entre elles.

Cependant, au sein de l'espace OHADA, ce choix peut s'avérer difficile puisqu'a priori il n'y a aucun critère d'éligibilité d'une norme communautaire par rapport à une autre entre les dispositions de l'UEMOA, de l'OHADA et de la CIMA. Dans l'ensemble, la solution adoptée est de considérer qu'il existe, d'une part, un droit commun des procédures collectives dans l'espace OHADA (chapitre I) et d'autre part, des droits dérogatoires (chapitre II).

CHAPITRE I/ L'existence d'un droit commun des procédures collectives dans l'espace OHADA

Au sein de l'espace OHADA, les sources du droit des procédures collectives ne présentent aucune hiérarchie entre elles. De plus, il est difficile de camper les règles de droit des procédures collectives dans le domaine du droit commun ou du droit spécial. Toutefois, la doctrine31(*) s'est ingéniée à reconnaître que les dispositions de l'OHADA constituent le droit commun des procédures collectives en raison de son domaine d'application (Section 1) et de son contenu (Section 2).

SECTION 1/ Le domaine d'application du droit OHADA des procédures collectives

De façon générale, on reconnaît que le droit OHADA constitue le droit commun des affaires au sein de l'espace OHADA. Ce droit se caractérise par la généralité de son domaine d'intervention et du contenu des dispositions. A ce propos, on note que le droit des procédures collectives OHADA s'applique, non seulement, au sein de l'espace OHADA (paragraphe 1) mais s'étend aussi en dehors des limites de son espace (paragraphe 2)

Paragraphe 1/ L'application du droit OHADA aux sociétés commerciales

Le droit OHADA des procédures collectives s'applique aux sociétés commerciales de l'espace OHADA. Ces sociétés commerciales (A) sont déterminées par les textes de l'OHADA et doivent remplir un certain nombre de conditions pour se voir appliquer ce droit (B).

A- Les sociétés commerciales de l'espace OHADA

Il ne s'agira pas uniquement des sociétés régies par les textes OHADA. En effet, toutes les sociétés se trouvant dans la l'espace OHADA sont susceptibles d'être soumises au droit OHADA. On distinguera ainsi les sociétés commerciales du droit OHADA (1) et les sociétés des autres espaces juridiques (2).

1- Les sociétés commerciales du droit OHADA

La commercialité d'une société en droit OHADA dépend soit de sa forme, ou de son objet (a). En outre les sociétés commerciales de l'espace OHADA obéissent à une structuration bien définie (b).

a- La commercialité par l'objet ou la forme

L'acte uniforme a réalisé des progrès au sujet de la notion de commercialité par la forme32(*). En effet, l'acte uniforme sur les sociétés commerciales donne une liste définitive de sociétés qui, quelle que soit la nature de leur activité, sont commerciales par la forme. Selon l'article 6 de l' AUSCGIE, "Le caractère commercial d'une société est déterminé par sa forme ou son objet. Sont commerciales à raison de leur forme et quel que soit leur objet, les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite simple, les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés anonymes". Qu'en est-il de la commercialité par l'objet? Certes la loi définit l'objet de la société comme l'activité qu'elle entreprend et qui doit être déterminée et décrite dans les statuts. Cependant, l'acte uniforme sur les sociétés commerciales ne donne aucune indication au sujet de la commercialité par l'objet. Sans doute faudra-t-il se référer à l'acte uniforme portant droit commercial général qui suppose l'accomplissement d'actes de commerce à titre de profession habituelle33(*).

On mesure, en effet, l'importance pratique de la règle ainsi que la simplicité qu'elle apporte à l'analyse juridique si on considère le nombre élevé des entreprises qui fonctionnent sous l'une ou l'autre forme consacrée par le législateur OHADA des sociétés commerciales. Toutes les opérations accomplies par une société commerciale par la forme sont elles-mêmes commerciales par l'application du critère de l'accessoire même lorsque l'activité est civile. Malgré les critiques formulées par la jurisprudence34(*) ou la doctrine française35(*) à l'égard de cette solution, le législateur OHADA n'en a pas tenu compte. Il a plutôt préféré se ranger derrière l'idée défendue par une partie de la doctrine36(*) de l'accessoire commercial objectif37(*).

Les entreprises publiques ayant la forme d'une personne morale de droit privé38(*) sont elles aussi soumises aux procédures collectives. Avant l'avènement de l'acte uniforme, une procédure dérogatoire de droit commun avait été spécialement conçue pour ces entreprises. Il s'agissait des sociétés nationales et des sociétés d'économie mixte. Elles étaient créées par une loi39(*) et c'est la loi qui devait procéder à leur liquidation. Il n'y avait pas de procédure spécifique de redressement et c'est l'Etat qui venait en garantie pour faire face au passif consécutif à l'activité de ces entreprises. L'acte uniforme vient harmoniser les procédures de redressement et de liquidation de ces personnes morales car elles ont la même activité et revêtent la même forme que les personnes morales de droit privé.

b- La structuration des sociétés commerciales de l'espace OHADA

La société commerciale, telle que conçue par l'AUSCGIE, est créée de deux manières: elle peut résulter d'un acte unilatéral ou d'un contrat. En effet l'article 4 de l'AUSCGIE dispose: "la société commerciale est créée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent, par un contrat, d'affecter à une activité des biens en numéraire ou en nature, dans le but de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui pourra en résulter...". De même, selon les dispositions de l'article 5 du même acte uniforme, "la société commerciale peut être également créée... par une seule personne dénommée associé unique par un acte écrit".

L'exercice des droits dont jouit la société suppose une volonté qui se charge de les mettre en oeuvre. La personne morale est donc représentée par des organes, les dirigeants.

Pour les sociétés en nom collectif, le fonctionnement est assuré par un ou plusieurs gérants nommés dans les statuts (gérant statutaire) ou par un acte ultérieur40(*). Sans stipulation des statuts, tous les associés sont gérants. Les associés ont un droit de communication et d'information. Ils prennent leurs décisions en assemblée générale et peuvent difficilement sortir de la société dans la mesure où l'intuitu personae41(*) demeure le fondement de l'existence de la société en nom collectif.

La gérance au niveau des sociétés à responsabilité limitée est assurée par un ou plusieurs gérants, associé ou non. Ces gérants sont nommés par les associés dans les statuts ou dans un acte ultérieur. Comme dans toute sociétés, les associés on un droit de communication permanent. Ils participent aux assemblées, engagent leur responsabilité en cas de dette et peuvent décider de quitter la société. Il existe deux types d'assemblée: l'assemblée générale ordinaire annuelle qui doit se tenir dans les six mois qui suivent la clôture de l'exercice et l'assemblée générale extraordinaire. Celle-ci concerne toutes les décisions importantes qui doivent être prises à une forte majorité.

Au niveau des sociétés en commandite simple, la gérance est assurée par tous les associés commandités sauf stipulation contraire des statuts qui peuvent désigner un ou plusieurs gérants parmi les associés commandités. L'associé ou les associés commanditaires ne peuvent faire aucun acte de gestion externe, même en vertu d'une procuration.

L'acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales a apporté une innovation à l'administration et à la direction de la société anonyme. Désormais deux possibilités sont offertes aux actionnaires: la SA avec conseil d'administration ou la SA avec administrateur général. La société anonyme avec conseil d'administration est dirigée soit par un président directeur général, soit par un président du conseil d'administration et un directeur général. Pour les sociétés anonymes comprenant un nombre d'actionnaires égal ou inférieur à trois, elles ont la faculté de ne pas constituer un conseil d'administration et peuvent juste désigner un administrateur général qui assume les fonctions d'administration et de direction de la société.

Dans les rapports avec les tiers, le principe est que les dirigeants peuvent accomplir tous les actes que la loi ne réserve pas à la compétence des assemblées générales d'associés. Sur cette base, les gérants assurent la gestion courante de la société. Dans les rapports avec les associés, les statuts peuvent valablement limiter les pouvoirs légaux de gestion des dirigeants.

2- Les sociétés commerciales des autres espaces juridiques

Les sociétés commerciales des autres espaces juridiques sont essentiellement les sociétés de banque (a) et les sociétés d'assurance (b).

a- Les sociétés de banque et les établissements financiers

Les sociétés commerciales en la forme au sein de l'espace OHADA sont: la société anonyme, la société à responsabilité limitée, la société en commandite simple et la société en nom collectif. L'acte uniforme sur les sociétés commerciales vient unifier sur ce point le régime des sociétés commerciales de personnes et des sociétés commerciales de capitaux. Ces quatre types de sociétés restent commerciales, quelle que soit la nature de leur objet42(*). Ces mêmes sociétés sont assujetties au droit des procédures collectives. Cette position de l'acte uniforme suppose que toute société constituée sous l'une de ces formes est passible de tomber sous le champ d'application du droit des procédures collectives. Qu'en est -il des sociétés de banque pourtant régies par les textes de l'UEMOA?

Aux termes de l'article 31 de la loi n°2008-26 du 28 juillet 2008 portant réglementation bancaire, "les banques sont constituées sous forme de sociétés anonymes à capital fixe ou, par autorisation spéciale du ministre des finances donnée après avis conforme de la commission bancaire, sous la forme de sociétés coopératives ou mutualistes à capital variable..." De même l'article 32 de la même loi dispose: "les établissements financiers à caractère bancaire sont constitués sous forme de sociétés anonymes à capital fixe, de sociétés à responsabilité limitée ou de sociétés coopératives ou mutualistes à capital variable".

L'ensemble de ces dispositions s'accordent avec l'article 25 de la loi-cadre portant réglementation bancaire de l'UEMOA. En effet, aux termes de l'article 20 de cette loi-cadre, "les banques doivent être constituées sous forme de sociétés. Elles peuvent exceptionnellement revêtir la forme d'autres personnes morales. Celles qui ont leur siège en ( )43(*) doivent être constituées sous forme de sociétés anonymes à capital fixe ou, par autorisation spéciale du ministère des finances donnée après avis conforme de la commission bancaire, sous forme de sociétés coopératives ou mutualistes à capital variable".

Il ressort de toutes ces dispositions que les banques revêtent presque toujours la forme de personne morale de droit privé et plus précisément de sociétés commerciales en la forme. Or selon les dispositions de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, les personnes morales de droit privé sont assujetties au droit des procédures collectives. Les sociétés de banque sont-elles alors soumises au droit OHADA? La réponse en a été donnée par la Cour commune de justice et d'arbitrage44(*) de l'ohada dans un avis rendu le 26 avril 200045(*). Interrogée sur l'applicabilité aux banques et établissements financiers des dispositions de l'article 449 de l'acte uniforme sur les sociétés commerciales et GIE, la Cour a axé son avis sur des considérations relatives à l'acte uniforme en question et les conséquences et dérogations qui s'y rattachaient. En effet, la Cour a estimé: "Les dispositions de l'acte uniforme relatif aux sociétés commerciales et GIE étant d'ordre public46(*) et s'appliquant à toutes les sociétés commerciales à raison de leur forme et quel que soit leur objet, l'article 449 dudit acte uniforme s'applique aux banques et aux établissements financiers entrant dans cette détermination juridique. Les seules dérogations admises sont celles prévues par l'acte uniforme lui-même qui renvoie à cet égard aux dispositions législatives nationales auxquelles sont assujetties les sociétés soumises à un régime particulier". Toutefois ni les actes uniformes ni la CCJA ne donnent une définition de la notion de "régime particulier". Aucune indication ne permet de donner une signification à cette notion. Si on s'attache à préciser le sens de régime, ce ne sera que pour en rappeler la définition classique. Un régime est défini par l'ensemble des règles de droits qui régissent une situation juridique. Mais quid du mot "particulier"? Il est vrai que lorsqu'une situation présente des spécificités, il est de coutume de la soumettre à un régime dérogatoire du droit commun. Mais à quelle condition une société présente-elle cette singularité qui justifie sa soumission à un régime particulier? Cette particularité tient-elle à la forme ou à l'objet? De toute évidence la forme ne peut en aucune manière être à l'origine de la spécificité dans la mesure ou l'article 6 de l'acte uniforme sur les sociétés commerciales indique avec précision les sociétés commerciales en la forme et ce, quel que soit leur objet. C'est qu'au titre de la forme, toutes les sociétés sont logées à la même enseigne. Seulement, la commercialité d'une société ne s'établit pas du seul fait de sa forme. En fait, le caractère commercial d'une société est également déterminé par son objet. Et c'est là, peut-être, que prennent racine toutes les complications.

L'incertitude de l'application du droit OHADA aux sociétés commerciales ne concerne pas qu'uniquement les banques. Le problème demeure le même pour les sociétés d'assurance.

b- Les sociétés d'assurance

Les sources du droit des assurances sont aujourd'hui multiples et complexes. L'abondance de textes particuliers et des pratiques en la matière donne au droit des assurances la physionomie d'une véritable branche spécifique, étudiée dans des instituts spécialisés.

Selon l'article 301 du code CIMA "toute entreprise d'assurance d'un Etat membre mentionnée à l'article 300 doit être constituée sous forme de société anonyme ou de société d'assurance mutuelle. Toutefois une société d"assurance ne peut se constituer sous la forme d'une société anonyme unipersonnelle". Toutes les entreprises d'assurance, quelles que soient leur forme et les opérations d'assurance47(*) auxquelles elles se livrent, "sont soumises à un régime commun" (livre III: articles 300 à 329-2) qu'il s'agisse de leur constitution, de leur fonctionnement ou de leur liquidation.

Les entreprises d'assurance sont constituées sous la forme de sociétés commerciales au sens de l'acte uniforme sur les sociétés commerciales et GIE. Sont-elles alors soumises au droit OHADA?

L'article 325 du code CIMA dispose que la faillite d'une société d'assurance ne peut être prononcée à l'égard d'une entreprise assujettie aux dispositions du livre III traitant des entreprises d'assurance qu'à la requête de la commission de contrôle des assurances ou avec son accord. Un arrêt de la Cour d'Appel de Dakar48(*) fait état de la question à propos de la liquidation de la Nationale d'assurance dont l'agrément venait d'être retiré; l'arrêt reconnaît des poursuites individuelles et l'application de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif alors qu'on aurait pu penser le contraire.

Le code CIMA règlemente les entreprises d'assurance selon la forme particulière en laquelle elles sont constituées (livre III): sociétés anonymes d'assurance et de capitalisation (articles 329-3 à 329-7), sociétés d'assurance mutuelle (articles 330 à 330-48), sociétés de réassurance mutuelle (article 330-40) ou société tontinière (articles 331 à 331-13).

La CCJA ne donne aucune indication quant à l'applicabilité du droit OHADA aux sociétés d'assurance; mais étant donné que le droit OHADA est considéré comme le droit commun des affaires, il s'applique sous réserve de dispositions dérogatoires. En outre, les dispositions OHADA étant plus récentes, elles s'appliquent en vertu de la prévalence de la loi nouvelle.

Les sociétés soumises à un régime particulier correspondent à celles qui exercent une activité réglementée. Ces sociétés réglementées sont parfois celles qui jouent un rôle moteur dans les économies. Il s'agit des banques et des sociétés d'assurance. Or, si celles-ci échappent à l'uniformisation, les tentatives d'ériger un espace commun doté d'un droit des affaires harmonisé, simple, moderne et adapté à la situation des entreprises sont compromises.

B- La situation économique et financière des sociétés commerciales

L'ouverture des procédures collectives nécessite la réunion de plusieurs conditions dont la plus importante est la situation économique et financière de la société. A ce titre, il faudra distinguer les sociétés en situation financière difficile (1) et les sociétés en cessation des paiements (2).

1- Les sociétés en situation financière difficile

Il s'agira de déterminer la nature des difficultés financières (a) et de présenter les solutions envisagées par l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives (b).

a- La nature des difficultés financières

L'ouverture du règlement préventif est conditionnée à l'existence d'une situation économique et financière difficile. A priori, le débiteur ne doit pas être en situation de cessation des paiements. Les difficultés financières ne peuvent en aucun cas être assimilées à la cessation des paiements. L'acte uniforme portant organisation des procédures collectives précise que la situation du débiteur ne doit pas être irrémédiablement compromise49(*).

La situation financière difficile non irrémédiablement compromise est une notion juridico-économique, qui correspond au constat de la non cessation des paiements et à celui du maintien des chances de redressement. Elle est la conséquence en général, de mauvais résultats d'exploitation se traduisant par un endettement lourd, des fonds propres très faibles, un fonds de roulement détérioré, une politique d'investissement mal contrôlée, le financement d'immobilisations par des fonds à court terme, un environnement économique défavorable, des facteurs accidentels ou imprévus...Il faut juste que ces difficultés fassent craindre le dépôt de bilan. A la différence de la cessation des paiements, il n'existe pas encore de manifestations dangereuses telles que l'arrêt matériel des paiements, des protêts, et le crédit est encore conservé par l'entreprise auprès de ses banques et de ses fournisseurs. Cette situation de fait, encore plus insaisissable que la cessation des paiements, n'est définie que négativement par rapport à elle ; l'entreprise se trouve ainsi menacée à court terme du point de vue financier.

La notion de situation économique non irrémédiablement compromise est une formule reprise de l'ordonnance de 1967 en France sur la suspension des poursuites individuelles contre le débiteur en situation économique financière difficile. Elle impose au juge une casuistique qui, finalement a amené certains auteurs à considérer qu'entre la cessation des paiements et la situation financière difficile mais non irrémédiablement compromise, il n'y a pas de différence de nature mais juste de degré50(*).

b- Les solutions envisagées par le droit OHADA des procédures collectives

L'une des originalités de l'AUPC est le règlement préventif qui permet d'éviter la cessation des paiements et d'apurer le passif au moyen d'un concordat préventif. En effet, l'article 2 alinéa 1 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif dispose: "Le règlement préventif est une procédure destinée à éviter la cessation des paiements ou la cessation d'activité de l'entreprise et à permettre l'apurement du passif au moyen d'un concordat préventif".

L'initiative du règlement préventif provient du débiteur qui dépose une requête au greffe du tribunal régional. Cette requête doit contenir la situation économique et financière de l'entreprise ainsi que les perspectives de redressement. Elle doit également contenir les créances pour lesquelles le débiteur sollicite la suspension des poursuites individuelles. L'article 6 de l'AUPC énumère les documents qui doivent être déposés en même temps que la requête.

La requête est transmise sans délai au président du tribunal qui prend certaines décisions attachées au dépôt de la requête. En premier lieu il s'agit de la suspension des poursuites individuelles aussi bien à l'encontre du débiteur que de ses créanciers. En second lieu, il y a la désignation d'un expert qui fait un rapport sur la situation économique et financière du débiteur. Enfin il est interdit au débiteur d'accomplir certains actes.

Lors du dépôt de la requête ou au plus tard dans les 30 jours qui suivent ce dépôt, le débiteur fait une proposition de concordat à ses créanciers. La proposition de concordat doit contenir toute mesure que le débiteur jugera utile pour le redressement de l'entreprise et l'apurement du passif. Le concordat doit être écrit et homologué par le juge après avis d'expert. Cependant, e juge n'est pas obligé d'homologuer. Il peut constater la cessation des paiements et prononcer soit le redressement judiciaire ou la liquidation. Il n'est pas obligé de suivre l'avis de l'expert.

Le concordat homologué devient obligatoire pour les créanciers. Mais ce concordat produit également des effets à l'égard du débiteur. Les créanciers ayant consenti délais et remises sont soumis aux stipulations concordataires. Le juge peut rendre obligatoire le concordat aux créanciers ayant refusé délais et remises. Cette faculté a pour seule limite de ne pas mettre en péril l'entreprise des créanciers et les délais imposés ne doivent pas dépasser deux ans, et un an pour les créanciers de salaires. Le débiteur est tenu dans les termes du concordat. Il bénéficie de la réduction de ses dettes. La date d'exigibilité des créances est différée de façon à lui permettre de faire face çà ses obligations échues. Il retrouve la liberté d'administration sur ses biens. L'homologation du concordat le remet entièrement à la tête de ses affaires.

2- Les sociétés en cessation des paiements

L'ouverture d'une procédure collective n'est pas seulement liée à l'existence d'une situation financière difficile. Dans certains cas, cette situation financière difficile aboutit à une véritable cessation des paiements.

a- La notion de cessation des paiements

L'importance de la notion de cessation des paiements réside en ce qu'elle a constitué pendant longtemps le seul facteur déclenchant des procédures collectives. Le législateur africain des procédures collectives d'apurement du passif OHADA du 1er janvier 1999 reprend la même solution tout en étendant son application à des situations résultant principalement des difficultés de trésorerie et d'un non respect des grands équilibres du bilan.

L'article 25 de l'AUPC dispose ainsi: "le débiteur qui est dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible est en état de cessation des paiements". Cette définition résulte d'une longue évolution jurisprudentielle51(*). En adoptant cette qualification du fait juridique que constitue la cessation des paiements, le législateur OHADA fait prévaloir une conception économique et financière sur celle strictement juridique qui existait jusqu'alors52(*).

Pendant longtemps a prévalu une conception dualiste de la cessation des paiements distinguant :

- la cessation des paiements ouverte qui se traduit par l'arrêt matériel du service de caisse, autrement dit le non-paiement d'une ou de plusieurs dettes certaines, liquides, exigibles, de nature commerciale ou civile, et qui sert à ouvrir la procédure ;

- la cessation des paiements déguisée qui se traduit par l'utilisation de moyens frauduleux, ruineux ou factices, en d'autres termes la gêne financière, et qui sert à reporter dans le temps la cessation des paiements53(*).

Théoriquement, la cessation des paiements est différente de l'insolvabilité, caractérisée, elle, par le fait que l'actif total est inférieur au passif total. Dans les faits cependant, il arrive fréquemment que la cessation des paiements recouvre une véritable insolvabilité, ce qui rend difficile et même impossible le redressement de l'entreprise et le paiement des créanciers. D'une manière générale, l'on peut estimer que la cessation des paiements, même lorsqu'elle ne recouvre pas une véritable insolvabilité, correspond à une situation qui est irrémédiablement compromise54(*). De ce fait, le redressement de l'entreprise est rendu très difficile, voire impossible, et les créanciers ont très peu de chance de recevoir un paiement substantiel.

b- L'adaptation de la notion de cessation des paiements aux banques et aux sociétés d'assurance

Selon l'article 25 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, "le débiteur qui est dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible doit faire une déclaration de cessation des paiements...". La cessation des paiements est donc le fait pour le débiteur de ne pouvoir honorer ses dettes exigibles avec toutes les disponibilités qu'il a.

Pour les sociétés commerciales du droit OHADA, c'est le plus souvent une étude du bilan qui permet de constater l'état de cessation des paiements.

Peut-on associer aux sociétés de banque, la même définition de l'état de cessation des paiements donnée par l'acte uniforme? Bien qu'étant des sociétés commerciales, ces dernières obéissent à une réglementation particulière. A ce titre, l'article 86 de la loi 2008-26 du 28 juillet 2008 portant réglementation bancaire dispose: "Nonobstant les dispositions de l'article 25 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, sont en état de cessation des paiements, les établissements de crédit qui ne sont pas en mesure d'assurer leurs paiements immédiatement ou à terme rapproché". Selon le Pr. Bonneau, "le paiement immédiat consiste en la capacité pour une banque, de rembourser les dépôts à vue. Le paiement à terme rapproché concerne le remboursement d'une épargne à court terme, comme le livret A ou le compte d'épargne".55(*)

Le problème résulte de la spécificité de l'institution bancaire régie par les dispositions de l'UEMOA qui définissent des critères particuliers destinés à surveiller la bonne santé des établissements bancaires afin de protéger les intérêts des déposants et des tiers ainsi que le bon fonctionnement du système bancaire. En effet, il existe au sein des dispositions UEMOA des ratios et des normes prudentielles visant essentiellement à assurer la liquidité et la solvabilité des banques. Ces ratios devraient constituer des indicateurs avancés de la situation financière des établissements assujettis à leur respect56(*).

La loi-cadre portant réglementation bancaire au sein de l'UEMOA, de même que la loi bancaire de 2008 ont défini le pouvoir de contrôle de la Commission bancaire qui est non seulement chargée de vérifier le respect des ratios prudentiels, mais aussi les conditions d'exploitation ainsi que la situation financière des établissements de crédit. Cependant, ces établissements sont souvent tentés de dissimuler leur situation, la cessation des paiements devient difficile à constater.

L'examen de la doctrine57(*) permet d'avancer qu'il existe deux thèses en présence pour définir la cessation des paiements des banques. La première repose sur le refinancement de l'établissement. Selon cette thèse, il ne peut y avoir de cessation des paiements tant que l'établissement est en mesure de se refinancer sur le marché interbancaire. La seconde qui défend le non respect des rations prudentiels estime que le refinancement dont bénéficie l'établissement de crédit ne doit pas être irrégulier; or, il l'est dès lors qu'un seul des ratios n'est plus respecté et que cette situation a été dissimulée à la commission bancaire58(*).

La définition de la cessation des paiements donnée par l'article 25 de l'AUPC est difficile à appliquer aux sociétés de banque. En effet, cette définition prend en compte des éléments du bilan alors que le bilan d'une banque ne traduit souvent qu'une partie des activités bancaires puisqu'il faut y ajouter les opérations hors bilan qui sont souvent des opérations de service financier non liées à des crédits, des opérations de crédit contingent telles que l'octroi de garantie ou encore des contrats sur taux d'intérêt ou taux de change.

Le non respect de la réglementation prudentielle par un établissement de crédit peut être considéré comme une condition nécessaire mais pas suffisante pour qualifier l'état de cessation des paiements. Elle est à rapprocher de la définition de l'article 25 AUPC en tant que notion relative à la trésorerie de l'entreprise et à l'insuffisance de l'actif disponible pour faire face au passif exigible.

Concernant les entreprises d'assurance, l'article 335 alinéa 1 du code CIMA dispose: "Les engagements réglementés tels que définis à l'article 334 doivent, à toute époque, être représentés par des actifs équivalents, placés et localisés sur le territoire de l'Etat membre sur lequel les risques ont été souscrits". De même l'article 337 énonce que toute entreprise soumise au contrôle en vertu de l'article 300 doit justifier d'une marge de solvabilité relative à l'ensemble de ses activités. C'est dire que la solidité et la solvabilité d'une compagnie d'assurance peuvent être mesurées à l'aide de ratios. Elles font également l'objet d'une appréciation globale en principe en temps réel pour les divers acteurs du marché de l'assurance sous forme de notation par des agences spécialisées, qui s'appuient sur les mêmes types de ratios que ceux évoqués plus haut, mais également sur une analyse plus large, prenant en compte le contexte économique, la stratégie et la gestion, les résultats techniques, la capitalisation boursière, la liquidité des titres, la flexibilité financière.

Paragraphe 2: L'application du droit OHADA à un autre espace juridique

L'espace juridique hors OHADA est caractérisé par l'existence d'ordres juridiques intervenant dans des branches du droit des affaires. Mais on remarque que toutes ces organisations ont tendance à conférer la primauté au droit OHADA.

A- Le domaine normatif de l'intervention des autres ordres juridiques de l'espace OHADA

Pour l'essentiel, le domaine d'intervention des autres ordres juridiques de l'espace OHADA est le droit des affaires. En raison de l'élasticité de la notion et de son contenu, l'intervention d'autres ordres juridiques (2) dans cette branche est sectorielle (1).

1- Une intervention sectorielle dans le domaine du droit des affaires

Le droit des affaires est une notion dont on ne trouve aucune définition précise dans les dispositions des différentes organisations y intervenant. Dans l'ensemble, c'est la doctrine qui pallie à cette insuffisance (a) alors que la loi se limite juste à en donner le contenu (b).

a- La polysémie de la notion de droit des affaires

Une difficulté majeure provient du fait qu'il n'existe pas de définition unanimement admise du droit des affaires, ni même du droit commercial auquel il a longtemps été assimilé. Selon le Pr. Guyon, on peut seulement avancer selon une première approximation, que "le droit des affaires est une branche du droit privé qui, par dérogation au droit civil, réglemente de manière spécifique la plupart des activités de production, de distribution et de services"59(*)

Pendant longtemps, le droit des affaires a été désigné par l'expression "droit commercial"60(*). Cette dénomination n'était pas à l'abri des critiques car le dit "droit commercial" régissait à la fois les activités de distribution et la plupart des activités de production. Aujourd'hui, on parle plus de doit des affaires, voire de droit économique ou de droit de l'entreprise.

Selon l'opinion dominante, le droit des affaires a un domaine plus vaste que le droit commercial qui était entendu traditionnellement comme le droit privé du commerce. Le droit des affaires englobe notamment des questions qui relèvent du droit public, du droit fiscal, du droit du travail...Le droit des affaires pousse des incursions dans des domaines qui intéressent tout aussi bien le droit civil notamment la protection des consommateurs. Il est beaucoup plus pluridisciplinaire que le droit commercial car les questions qui se posent aujourd'hui dans la gestion des entreprises sont de plus en plus diverses61(*).

b- La conception du droit des affaires en droit OHADA

Le traité de l'OHADA ne définit pas théoriquement ce qu'il entend par Droit des Affaires, mais procède par une énumération non limitative de matières à harmoniser62(*). Ainsi, entrent dans le domaine du droit des affaires l'ensemble des règles relatives au droit des sociétés et au statut juridique des commerçants, au recensement des créances, aux sûretés et aux voies d'exécution, au régime de redressement des entreprises et de la liquidation judiciaire, au droit de l'arbitrage, au droit du travail, au droit comptable, au droit de la vente, au droit des transports, etc. ; et toute autre matière que le Conseil des Ministres déciderait d'y inclure, dans les formes d'adoption des Actes Uniformes.

Cette faculté offerte par les dispositions in fine de l'article 2 du traité de l'OHADA au Conseil des Ministres d'étendre le champ d'harmonisation du droit des affaires a été récemment exploitée par celui-ci à sa réunion tenue en mars 2001 à Bangui. Ainsi, à la première énumération de l'article 2, viennent s'ajouter désormais: le droit de la concurrence, le droit bancaire, le droit de la propriété intellectuelle, le droit des sociétés civiles, le droit des sociétés coopératives et mutualistes, le droit des contrats, le droit de la preuve. De ce vaste champ d'harmonisation, certaines matières énumérées à l'article 2 du traité sont déjà adoptées sous forme d'Actes Uniformes et sont entrées en vigueur, d'autres sont en chantier ; la liste nouvellement adjointe à l'article 2 attend d'être mise dans le processus d'élaboration et d'adoption des Actes Uniformes.  Les matières déjà engagées dans le processus d'harmonisation non encore achevée sont : le droit de la vente au consommateur, le droit des transports de marchandises par route, le droit du travail. Les sept (7) Actes uniformes en vigueur à ce jour sont : l'Acte uniforme portant droit commercial général, l'Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique, l'Acte uniforme portant organisation des sûretés, l'Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution, l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, l'Acte uniforme relatif au droit d'arbitrage, l'Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises sises dans les Etats parties au traité OHADA, qui crée le système comptable OHADA. A cela, il faut ajouter le dernier né des Actes Uniformes, celui sur les contrats de transport de marchandises par route adopté à Yaoundé lors du Conseil des Ministres des 20 au 22 mars 2003.

Cependant, on remarque que l'OHADA n'est pas la seule organisation à légiférer dans ces branches du droit tantôt citées. En effet, le droit de la propriété intellectuelle fait l'objet d'une réglementation par l'OAPI63(*), le droit bancaire par l'UEMOA, de même que le droit de la concurrence. S'il est vrai que le droit OHADA se donne pour objectif d'harmoniser le droit des affaires en réglementant plusieurs matières qu'elle juge appartenir au droit des affaires, il n'en demeure pas moins qu'il existe une multitude d'autres organisations légiférant dans des domaines appartenant aussi au droit des affaires. C'est à ce niveau qu'on note le caractère sectoriel de l'intervention des autres ordres juridiques de l'espace hors OHADA.

2- Les organisations intervenant dans le droit des affaires

La pluralité des organisations intervenant dans le droit des affaires au sein de l'espace OHADA n'empêche pas d'en établir une classification. En effet, on peut distinguer les organisations d'intégration juridique (a) des organisations d'intégration économique (b). Cependant, une intégration économique ne saurait se faire sans une intégration juridique. C'est tout le sens des propos du Pr. Allais selon qui, "la véritable réforme économique, c'est la réforme du cadre juridique de l'économie".64(*)

a- Les organisations d'intégration juridique

L'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires a permis l'élaboration d'actes uniformes qui forment aujourd'hui un véritable système O.H.A.D.A. Une des originalités de cette organisation, soulignée par la doctrine, réside sans doute dans son objectif fondamental qui est la réalisation d'une uniformisation progressive et générale des législations. On rappelle que le Traité la créant a été signé le 17 octobre 1993 à Port-Louis, capitale de l'Ile Maurice, entre quatorze Etats francophones d'Afrique noire francophone, rejoints après par deux autres pays, la Guinée et la Guinée Bissau. Il précise, dès son article 1er, qu'il "a pour objet l'harmonisation du droit des affaires dans les Etats Parties par l'élaboration et l'adoption de règles communes simples, modernes et adaptées à la situation de leurs économies, par la mise en oeuvre de procédures judiciaires appropriées, et par l'encouragement au recours à l'arbitrage pour le règlement des différends contractuels". Les actes pris pour l'adoption de ces règles communes sont qualifiés "Actes uniformes" qui peuvent inclure des dispositions d'incrimination pénale, à l'exclusion des sanctions pénales qui demeurent de la compétence de chaque Etat Partie.

De même, l'article 1er, 7°, du Traité de Yaoundé du 10 juillet 1992 instituant une Organisation Intégrée de l'Industrie des Assurances se propose de poursuivre la politique d'harmonisation et d'unification des dispositions législatives et réglementaires relatives aux opérations techniques d'assurance et de réassurance, et au contrôle applicable aux organismes d'assurance et de réassurance. C'est en application de cette disposition du Traité que le code des assurances des Etats membres de la Conférence Interafricaine des Marchés d'Assurances, communément  "Code C.I.M.A.)", a été adopté et annexé au Traité.

b- Les organisations d'intégration économique

En Afrique, les formes de l'intégration économique sont multiples et se sont souvent fondues dans, voire confondues avec des organisations panafricaines ou régionales à vocation politique ou de coopération ; mais certaines autres se sont vu assigner un but plus spécifique sur le plan économique et plus limité sur le plan régional. C'est ainsi que des organisations économiques se sont créées regroupant les Etats africains par zones géographiques se recoupant entre elles ou recouvrant la zone franc.

L'intégration économique se réalise également par l'intermédiaire d'organisations spécialisées telles que des organisations monétaires et des institutions financières ; des organisations de mise en valeur des fleuves et des bassins fluviaux ; des organisations de protection des cours et de promotion des produits agricoles, des organisations techniques.65(*)

On enregistre en ce moment en Afrique de l'ouest plusieurs traités visant l'intégration économique globale des Etats66(*). Tous ces traités poursuivent les mêmes objectifs: libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux, droit d'établissement, coordination des politiques nationales, notamment dans les domaines de l'agriculture, des ressources humaines, des ressources naturelles, des transports et télécommunications, de l'énergie, de l'environnement, établissement d'un tarif extérieur commun et d'une politique commerciale commune.

Le plus récent est celui de l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (U.E.M.O.A.), signé à Dakar le 10 janvier 1994.

L'objectif premier de l'UEMOA est l'intégration économique et monétaire des Etats d'Afrique de l'ouest. Pour y parvenir il faudra sans doute passer par une harmonisation ou une uniformisation juridique. C'est ainsi que l'UEMOA a eu à intervenir dans certaines branches réputées appartenir au droit des affaires: le droit de la concurrence, le droit bancaire, le droit des entreprises en difficultés.

B- La tendance à conférer la primauté au droit OHADA

Organisations d'intégration juridique ou économique, on note que dans le cadre du droit des procédures collectives, elles ont toutes tendance à renvoyer aux dispositions de l'OHADA (1) malgré leurs efforts de spécialisation en la matière (2).

1- Le renvoi aux dispositions de l'OHADA

Le droit des procédures collectives trouve ses source tant dans les dispositions de l'UEMOA, du code CIMA que de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif. On note cependant que parmi tous ces droits, celui de l'OHADA semble être le droit commun. En effet plusieurs dispositions renvoient aux règles de l'OHADA (a) indépendamment du fait que ce droit présente un caractère commun (b).

a- Le caractère d'ordre public des dispositions des actes uniformes

Dans un avis rendu le 26 avril 200067(*), la CCJA rappelle que les dispositions de l'acte uniforme relatif aux sociétés commerciales et GIE sont d'ordre public et s'appliquent à toutes les sociétés commerciales à raison de leur forme et de leur objet. Ce caractère d'ordre public s'étend-t-il aux autres actes uniformes ? En tout état de cause, on note une certaine tendance, de la part des autres ordres juridiques de l'espace OHADA, à conférer à celle-ci la primauté. C'est ainsi que les articles 44 et 42 des conventions relatives au système interbancaire de compensation automatisé et au système de transfert automatisé et de règlement de l'UEMOA disposent : « Tout différent né de l'application ou de l'interprétation d'une clause quelconque de la présente convention que les parties ne pourraient régler à l'amiable, sera, de convention expresse, soumis à l'arbitrage selon le règlement de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires ». Le droit OHADA est donc considéré comme le droit commun.

A la question de définir le droit commun et le droit spécial, aucune réponse unanime n'a été donnée par la doctrine68(*).

Cependant on considère le droit commun comme étant l'ensemble des "règles applicables à une situation juridique, ou à un rapport juridique entre des personnes physiques ou morales, quand il n'est pas prévu que des règles particulières sont applicables à cette situation ou à ce rapport. Une règle de droit commun est, en langage non juridique, une règle qui joue par défaut"69(*). Cette présentation fait résonance à l'adage qui veut que le spécial déroge au général. C'est ainsi que plusieurs dispositions des autres ordres juridiques réglementant les procédures collectives renvoient à l'AUPC.

Selon l'article 84 de la loi 2008-26 du 28 juillet 2008 portant réglementation bancaire, "les dispositions du droit commun relatives au règlement préventif, au redressement judiciaire et à la liquidation des biens sont applicables aux établissements de crédit, tant qu'il n'y est pas dérogé par les dispositions de la présente loi". On retrouve la même formule au niveau de l'article 126 de la loi 2008-47 portant réglementation des systèmes financiers décentralisé.

L'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives constitue ainsi le droit commun des entreprises en difficulté. Les dispositions de l'UEMOA n'y dérogent que pour des raisons tenant aux spécificités des sociétés de banque.

Cependant, au niveau du code CIMA on ne retrouve aucune disposition renvoyant à l'acte uniforme. L'explication tient au fait que la rédaction du code CIMA est antérieure à l'avènement de l'OHADA. La doctrine estime alors que le droit OHADA constitue le droit commun et doit s'appliquer chaque fois qu'il n'y est pas dérogé par le code CIMA en raison du fait que le droit OHADA est plus récent. Cette argumentation est basée sur la prévalence de la loi nouvelle sur la loi ancienne70(*).

b- Le caractère commun du droit OHADA

Si le droit OHADA est considéré comme le droit commun, c'est sans doute parce que celui-ci présente un degré de généralité qu'on ne retrouve pas au niveau des autres ordres juridiques. En effet, l'OHADA couvre un domaine normatif plus large et prévoit même de l'élargir. . Du point de vue géographique, ce droit s'étend sur une superficie plus large que les espaces géographiques CIMA et UEMOA. Dans son ensemble, la doctrine s'accorde sur le principe selon lequel, entre plusieurs normes d'égale valeur juridique, celle relevant de l'ordre juridique le plus vaste doit l'emporter sur celle relevant des ordres juridiques qu'elle englobe. La justification de ce principe n'est pourtant pas juridique. Elle ne pourrait l'être que si l'ensemble des ordres juridiques "inférieurs" conférait la primauté à l'ordre juridique "supérieure"71(*).

En outre, la CCJA rappelle que le droit OHADA se substitue au droit des Etats parties en application de l'article 10 du traité. Dans un arrêt rendu le 18 avril 2002, la Cour estime que "les actes uniformes contiennent des lois de fond et de procédure qui ont seules vocation à s'appliquer dans les Etats parties". Elle précise en outre que "chaque acte uniforme contient en son sein son droit commun, entendu au sens de dispositions générales dudit acte uniforme par rapport aux dispositions spécifiques. Il en résulte que "droit commun" n'est pas synonyme de "droit interne des Etats parties"".

2- La spécialisation du droit des procédures collectives

La diversité des normes de procédure collective au sein de l'espace OHADA ne pose pas seulement des problèmes. En effet, malgré les contrariétés qu'elle peut susciter, la coexistence entre ces différentes normes permet de constater qu'il y a d'une par un effort d'adaptation des règles aux spécificités des entreprises (a) et d'autre part une application distributive de ces normes en vue de combler certaines lacunes (b).

a- Une application opportune des règles de procédure collective

S'il est vrai que le droit OHADA des procédures collectives est considéré comme le droit commun des entreprises en difficulté, il n'en demeure pas moins que pour les sociétés de banque et d'assurance, ce droit trouve du mal à s'appliquer dans sa plénitude. En effet, il faut souligner le besoin d'adaptation des règles juridiques à l'activité économique. Les activités d'une société d'assurance tout comme celles d'une banque ne sont pas assimilables à celles des sociétés commerciales ordinaires. En outre, la prise en compte d'éléments économiques est plus présente en cas de faillite d'une banque ou d'une société d'assurance. C'est à ce titre que l'article 102 de la loi 2008-26 portant réglementation bancaire dispose: "les établissements de crédit sont soumis à une réglementation spécifique tenant compte des particularités des établissements de crédit".

Conscient de cela, le pouvoir normatif ne se contente pas de trouver des mobiles économiques à la loi, il s'emploie aussi à donner à la règle de droit une structure qui intègre la dimension économique. C'est ainsi que pour les banques et les sociétés d'assurance, les procédures collectives font l'objet d'une réglementation spéciale plus soucieuse de prévenir les difficultés de l'entreprise que de la liquider. C'est ce qui justifie dans une certaine mesure toutes les difficultés qu'il y a à déclencher la procédure collective, et aussi l'intervention omniprésente de l'autorité administrative ainsi que des organismes de régulation (Commission bancaire, commission de contrôle des assurances).

b- Une application distributive des règles de procédure collective

Du caractère supranational que les traités confèrent aux organisations internationales qu'ils instituent, il résulte que les règlements et les actes uniformes pris par ces dernières sont d'applicabilité immédiate et directe, et priment sur les ordres juridiques nationaux. Et puisqu'il n'y a pas lieu d'établir de hiérarchie entre les traités, il s'ensuit que les règles qui en dérivent parviennent dans les ordres juridiques nationaux revêtues du même titre et ayant une égale vocation à s'appliquer aux situations entrant dans leur domaine d'application respectif. Le justiciable placé dans une telle situation est désemparé, incertain qu'il est quant à la pertinence de son choix de la norme applicable. La solution, au besoin, devra être recherchée par le recours à l'instance judiciaire, tant nationale que communautaire ou commune. Mais même à ce niveau, la solution ne s'impose pas.

La première situation envisage que les normes communautaires de procédure collective puissent être appliquées de manière distributive à la situation litigieuse. Dans une telle situation, le juge national devra respecter les compétences attribuées aux organes juridictionnels des ordres juridiques concernés par le litige. Toute autre solution aurait pour conséquence qu'une juridiction communautaire ou commune interprèterait une norme ne faisant pas partie de l'ordre juridique qu'elle est chargée d'unifier. Ceci implique que chacune des juridictions pourrait être saisie selon les procédures prévues par chacun des ordres juridiques concernés pour appliquer et (ou) interpréter les règles qu'elle a mission d'appliquer et (ou) d'interpréter. Le conflit n'est donc pas inextricable puisqu'il est possible de le traiter en respectant les fonctions assignées à chacune des juridictions concernées par le litige. Il ne faut cependant pas se cacher qu'un tel morcellement du procès pourrait pour certains litiges aboutir à des solutions manquant de cohérence ou d'harmonie, voire inconciliables.

SECTION 2/ Le contenu du droit OHADA des procédures collectives

L'acte uniforme portant organisation des procédures collectives comportent plusieurs innovations. A ce titre, il ne s'est pas seulement contenté de reprendre les solutions du droit positif. La première de ses innovations est la mise en place de procédures de sauvegarde de l'entreprise (Paragraphe 1) à côté des règles traditionnelles de liquidation des biens (Paragraphe 2).

Paragraphe 1: Les procédures de sauvegarde des entreprises

Le droit des procédures collectives OHADA comporte plusieurs innovations. La première est l'institution d'une procédure de prévention des difficultés de l'entreprise qui n'existait pas dans la plupart des Etats parties au traité OHADA. Dans le souci de sauvegarder le plus possible l'activité des entreprises, on retrouve l'institution du règlement préventif (A) et le redressement judiciaire (B).

A- Le règlement préventif

Selon l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, le règlement préventif est une procédure destinée à éviter la cessation des paiements ou la cessation d'activité de l'entreprise et à permettre l'apurement de son passif au moyen d'un concordat préventif72(*).La procédure de règlement préventif passe par une phase préparatoire (1) avant de produire certains effets (2).

1- La phase préparatoire au règlement préventif

Le règlement préventif est conditionné par l'existence d'une situation difficile mais non irrémédiablement compromise. La procédure débute par une requête en règlement préventif (a) et peut aboutir sur une décision de suspension des poursuites (b).

a- La demande en règlement préventif

La demande en règlement préventif est faite sous la forme d'une requête déposée par le débiteur auprès de la juridiction compétente. La requête expose d'une part, la situation économique et financière de l'entreprise qui doit être difficile mais non irrémédiablement compromise. D'autre part, elle doit contenir les perspectives de redressement de l'entreprise et d'apurement du passif. La requête indique les créances pour lesquelles le débiteur demande la suspension des poursuites. Cela suppose que le débiteur connaît l'étendue de son passif et va opérer une discrimination en fonction des caractéristiques de ses dettes: montant élevé ou faible, exigibilité immédiate ou à terme, existence ou non d'une sûreté, importance du bien servant d'assiette à la sûreté.

Le règlement préventif peut permettre à un débiteur in bonis de ne pas payer momentanément ses dettes. De ce fait, il y a des risques sérieux que certains débiteurs en abusent et y recourent à titre purement dilatoire. Pour éviter ou limiter ces abus, l'acte uniforme prévoit qu'aucune requête en règlement préventif ne peut être présentée par le débiteur avant l'expiration d'un délai de cinq ans suivant une précédente requête ayant abouti à une décision de règlement préventif73(*).

Plusieurs documents doivent être joints à la requête74(*). Si l'un des documents ne peut être fourni, ou ne peut l'être que de manière incomplète, la requête doit indiquer le motif de cet empêchement. Cependant, on ne connaît pas les conséquences attachées à cet empêchement. La requête et les documents peuvent être accompagnés ou suivis d'une requête de concordat préventif. Lors de l'introduction de sa requête et au plus tard dans les trente jours qui suivent, le débiteur doit déposer une offre de concordat préventif.

b- Les effets du dépôt de la proposition de concordat préventif

Il s'agit essentiellement de la suspension des poursuites individuelles, de la désignation d'un expert et de l'interdiction faite au débiteur d'accomplir certains actes75(*).

La suspension des poursuites vise certaines actions et certains créanciers. Il s'agit des actions tendant à obtenir paiement mais uniquement pour les créances antérieures à la suspension.

La loi interdit aussi bien les actions en justice que les voies d'exécution. Les actions en justice tendant au paiement sont nombreuses. Dans le cadre des procédures collectives, les paiements doivent être entendus non seulement comme l'exécution volontaire d'une obligation, mais également comme l'extinction de quelle que manière que ce soit de la dette du débiteur (dation en paiement, compensation, remise de dette, délégation...)

Par contre, toute action qui n'est pas destinée à substituer une procédure d'exécution est envisageable. En effet l'article 9 alinéa 4 dispose: "La suspension des poursuites individuelles ne s'applique ni aux actions tendant à la reconnaissance des droits ou des créances contestées ni aux actions cambiaires dirigées contre les signataires d'effet de commerce autres que le bénéficiaire de la suspension des poursuites individuelles". On remarque donc que ce qui est interdit, ce sont les actions qui aboutissent à un prélèvement sur l'actif du débiteur.

Les créances faisant partie de l'actif du débiteur, les créanciers ne peuvent poursuivre les débiteurs du débiteur. Par conséquent, action directe et action oblique ne peuvent être exercées. La décision de suspension concernera les créanciers chirographaires, les créanciers privilégiés et les créanciers titulaires d'une sûreté réelle si ces créanciers sont visés par le débiteur.

En plus de la décision de suspension des poursuites, un expert est désigné. Il fait un rapport sur la situation économique et financière de l'entreprise et les perspectives de redressement compte tenu des délais et remises consentis ou susceptible de l'être.

En contrepartie de la suspension des poursuites, il est interdit au débiteur d'accomplir certains actes, notamment le paiement de dettes antérieures à la décision de l'article 8 AUPC, les actes de dispositions étrangers à l'exploitation normale de l'entreprise. Il lui est également interdit de désintéresser les cautions qui ont acquitté des créances nées antérieurement à la décision prévue à l'article 8.76(*)

2- La mise en place d'un concordat préventif

L'accord passé entre le débiteur et ses créanciers doit être homologué par le juge (a) avant de pouvoir produire certains effets (b) ;

a- L'homologation par le juge de l'accord avec les créanciers

L'homologation du concordat préventif reste une faculté pour le juge.

Le concordat préventif requiert que le débiteur parvienne avec chacun des créanciers à un accord sur les délais ou les remises qu'il consent. Cependant certains créanciers peuvent refuser délais et remises sans que cela affect la formation du concordat. Dans les cas ou les délais n'excèdent pas deux ans, la juridiction compétente peut rendre ce délai opposable aux créanciers qui ont refusé tout délai et toute remise, sauf si ce délai met en péril l'entreprise de ces créanciers77(*). Toutefois, les créanciers de salaires ne peuvent consentir aucune remise ni se voir imposer un délai qu'ils n'ont pas consenti eux-mêmes. Par l'homologation, on remarque ainsi que le concordat passe d'un simple accord entre les parties pour revêtir une dimension normative et s'appliquer à des personnes qui n'y ont pas participé ou ont même manifesté leur désaccord.

Pour produire les effets que l'acte uniforme y attache, l'accord entre le débiteur et les créanciers doit faire l'objet d'une homologation judiciaire. La juridiction compétente ne peut homologuer le concordat que si les conditions suivantes sont réunies: les conditions de validité du concordat sont remplies78(*), aucun motif tiré de l'intérêt collectif ou de l'ordre public ne parait de nature à empêcher le concordat; il faut aussi que le concordat offre des possibilités sérieuses de redressement de l'entreprise, de règlement du passif et des garanties suffisantes d'exécution, en d'autres termes le concordat préventif doit être viable. En outre, les délais consentis ne doivent pas excéder trois ans pour l'ensemble des créanciers et un an pour les créanciers de salaires.

Si ces conditions sont remplies et que la situation du débiteur le justifie, la juridiction rend une décision de règlement préventif et homologue le concordat préventif. Cependant l'homologation peut ne pas intervenir s'il y a cessation des paiements, si les conditions mises à l'homologation ne sont pas remplies et si la juridiction estime que la situation du débiteur ne relève d'aucune procédure collective. Dans ce cas, la juridiction rejette le concordat préventif proposé par le débiteur et annule la décision de suspension provisoire des poursuites, ce qui remet les parties en l'état antérieur à cette décision.

b- Les effets du concordat préventif

La décision de règlement préventif ou d'homologation du concordat met fin à la mission de l'expert. Cela est logique puisque sa mission qui consiste à aider le débiteur à parvenir à un accord avec ses créanciers, c'est-à-dire un concordat préventif homologué, est arrivée à son aboutissement. L'expert rend compte de sa mission au président de la juridiction dans le délai d'un mois à compter de la décision homologuant le concordat.

Le concordat homologué s'impose à tous les créanciers antérieurs, qu'ils soient chirographaires ou munis de sûretés, dans les conditions de délais et de remises qu'ils ont consenties au débiteur sauf, si le délai n'excédant pas deux ans, la juridiction l'a rendu opposable même au créancier qui ont refusé tout délai et toute remise. S'agissant du débiteur, sa situation est très simple. Il recouvre la liberté d'administration de son entreprise et la libre disposition de ses biens dès que la décision de règlement préventif est passée en force de chose jugée, sous réserve cependant du respect de ses engagements concordataires auquel veillent les organes mis en place.

En effet, le jugement de règlement préventif met en place les organes suivants: juge-commissaire, syndic, contrôleurs. La désignation d'un syndic et ou des contrôleurs est facultative. Il est simplement prévu qu'ils sont chargés de surveiller l'exécution du concordat dans les mêmes conditions que celles prévues pour le concordat de redressement judiciaire. Le syndic contrôle l'exécution du concordat, autrement dit le respect des engagements pris par le débiteur tant en ce qui concerne le paiement des créanciers qu'en ce qui concerne les mesures d'assainissement de l'entreprise. Il signale tout manquement au juge-commissaire dont le rôle consiste à servie d'intermédiaire entre le syndic et ou les contrôleurs d'une part, et le tribunal d'autre part afin d'aboutir à la correcte exécution du concordat ou d'en sanctionner les manquements. Il exerce lui-même le contrôle de l'exécution du concordat et dénonce les manquements qui s'y produisent à la juridiction compétente.

A côté du règlement préventif destiné à éviter la cessation des paiements, il y a le redressement judiciaire qui intervient après cessation des paiements mais consiste à maintenir les chances de survie de l'activité.

B- Le redressement judiciaire

La procédure de redressement judiciaire obéit à certaines conditions (1) avant de produire des effets (2).

1- Les conditions d'ouverture du redressement judiciaire

La procédure de redressement judiciaire ne peut se dérouler qu'après constatation de la cessation des paiements (a) et prononcé d'un jugement d'ouverture (b).

a- L'effectivité de la cessation des paiements

La cessation des paiements est une condition indispensable au prononcé du redressement judiciaire. C'est donc une notion de droit et il revient à ce titre à la juridiction d'exercer un contrôle sur le point de savoir si les faits souverainement constatés par les juges du fond sont révélateurs de la cessation des paiements79(*). On peut raisonnablement penser que la situation du débiteur, c'est-à-dire l'existence ou non de la cessation des paiements, doit être appréciée non pas en fonction de la situation prévalant le jour de la saisine de la juridiction, mais plutôt le jour où celle-ci statue. Cette solution qui est retenue en France80(*) répond mieux au réalisme du droit des entreprises en difficulté. A la différence de la situation prévalant dans les Etats qui n'avaient pas réformé leur législation et où la cessation des paiements n'était pas légalement définie, l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif apporte une définition légale de la cessation des paiements. Celle-ci est définie par l'article 25 AUPC comme la situation où le débiteur est dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Dans ce cas, le débiteur est tenu de faire une déclaration aux fins d'ouverture de redressement judiciaire. La requête est déposée au greffe de la juridiction compétente contre récépissé.

b- L'existence d'un jugement d'ouverture en redressement judiciaire

Comme toute procédure collective, le redressement judiciaire suppose l'existence d'un jugement d'ouverture la prononçant. La juridiction compétente, dès lors qu'elle constate la cessation des paiements, doit choisir de se prononcer sur une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens. L'alinéa 2 de l'article 33 de l'AUPC montre clairement que la question du choix de la procédure se pose dès le jugement d'ouverture. La juridiction prononce le redressement judiciaire s'il apparaît que le débiteur a proposé un concordat sérieux. Dans le cas contraire, elle prononce la liquidation des biens81(*). Le critère du choix entre le redressement et la liquidation est donc le fait de proposer ou non un concordat sérieux. Le concordat sérieux est probablement celui qui, tout en préservant et en assainissant l'entreprise, assure le paiement des créanciers dans des conditions acceptables.

Avant le prononcé du jugement d'ouverture, le président de la juridiction compétente peut désigner un juge du siège ou toute personne qu'il estime qualifiée pour établir un rapport, dans le délai qu'il détermine, sur la situation et les agissements du débiteur ainsi que sur la proposition de concordat faite par lui.

La juridiction statue à la première audience utile. Elle ne peut rendre sa décision avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de sa saisine. Le contenu des motifs du jugement n'est pas fixé. On peut néanmoins soutenir qu'il traite des circonstances de la cause: saisine, situation économique de l'entreprise (cessation des paiements), qualité du débiteur, pièces déposées, absence ou existence d'une proposition de concordat sérieux...

2- Les effets du redressement judiciaire

Le redressement judiciaire emporte réduction des prérogatives du débiteur (a) et uniformisation de la condition juridique des créanciers (b).

a- La réduction des prérogatives du débiteur

La décision d'ouverture du redressement judiciaire emporte de plein droit, à sa date, assistance du débiteur. Le débiteur doit alors, pour certains actes de gestion, être assisté du syndic. Il s'agit des actes de gestion courante entrant dans le cadre de l'exploitation. Il peut accomplir tout seul les actes conservatoires. En revanche, pour les actes de disposition et d'administration, il lui faut l'assistance du syndic. L'acte de gestion ne peut être rangé parmi les catégories traditionnelles des actes de disposition, d'administration et de conservation. On considère que c'est une notion sui generis qui constitue une nouvelle catégorie juridique.

Le débiteur a toute sa capacité mais ne peut accomplir certains actes. L'article 52 alinéa 1er de l'AUPC précise qu'il doit être assisté pour tous les actes relatifs à l'administration et à la disposition de ses biens. Si le débiteur ou les dirigeants refusent d'accomplir un acte nécessaire au fonctionnement de l'entreprise, le syndic peut le réaliser à la condition d'y être autorisé par le juge-commissaire. Si le débiteur accomplit seul les actes qui lui sont interdits, les conséquences pécuniaires de son activité juridique seront inopposables aux créanciers. Autrement dit, les créanciers n'auront pas à subir la concurrence des créanciers postérieurs au jugement82(*).

b- L'uniformisation de la condition juridique des créanciers

A partir du jugement d'ouverture, tous les créanciers antérieurs à la décision d'ouverture de la procédure collective sont agrégés en une masse représentée par un syndic qui seul, agit en son nom et pour son compte83(*).

La masse est composée par les créanciers dont la créance est antérieure au jugement et n'a pas été déclarée inopposable en vertu des articles 68 et 69 de l'AUPC.

Il s'est posé la question de savoir si la masse avait la personnalité juridique. La personnalité morale de la masse a été affirmée pour la première fois en 1956. Dans un arrêt de 195684(*), la cour de cassation française appliquait à la masse le principe posé par l'arrêt du 28 janvier 195485(*) à propos des comités d'établissement. Selon cet arrêt, "la personnalité juridique n'est pas une création de la loi. Elle appartient en principe à tout groupement pourvu d'une possibilité d'expression collective pour la défense d'intérêts licites, dignes, par suite, d'être juridiquement reconnus et protégés; si le législateur a le pouvoir, dans un but de haute police, de priver de la personnalité civile telle catégorie déterminée de groupements, il en reconnaît, au contraire, implicitement mais nécessairement l'existence en faveur d'organismes créés par la loi elle-même avec mission de gérer certains intérêts collectifs présentant ainsi le caractère de droits susceptibles d'être déduits en justice". L'article 13 de la loi française du 13 juillet 1967 dont la formulation est reprise par l'acte uniforme a été considéré comme une consécration de la personnalité juridique de la masse.

Les discussions se sont ensuite déplacées sur le contenu du patrimoine de la masse et sur le régime applicable à l'actif et au passif de la masse. Si en France le débat a porté sur l'existence d'un patrimoine de la masse distinct de celui du débiteur, il n'en n'est pas de même en droit OHADA où il n'existe qu'un seul patrimoine, celui du débiteur, gage de la masse.

Paragraphe 2/ Les procédures entraînant la disparition de l'entreprise

La disparition de l'entreprise est une situation malheureuse dans la mesure où son maintien aurait permis de sauver l'activité et l'emploi. Cependant c'est une situation fréquente qui intervient souvent par le biais de la liquidation des biens (A) ou de la clôture pour insuffisance d'actif (B).

A- La liquidation des biens

L'union est la solution par excellence de la liquidation des biens. La liquidation des biens résulte de la conversion du redressement judiciaire en cas de retrait de la proposition de concordat sérieux ou en cas de rejet par les créanciers, ou en cas de non homologation de celui-ci. Des articles 146 à 172 AUPC qui régissent la matière, il apparaît que les opérations de la liquidation des biens impliquent la réalisation de l'actif (1) et l'apurement du passif (2) après lesquels la procédure prendra fin.

1- La réalisation de l'actif

Sur le plan juridique, la réalisation de l'actif apparaît comme l'opération la plus importante de la liquidation des biens puisque la plupart des dispositions relatives à celle-ci la concernent. La réalisation de l'actif concernera aussi bien les meubles (a) que les immeubles (b).

a- La réalisation des meubles

En prenant le terme de meubles au sens large, la réalisation des meubles comprend d'une part la vente ou la cession des biens meubles, d'autre part le recouvrement des créances du débiteur. Les règles y afférant visent à la fois à obtenir le meilleur prix de la vente des éléments de l'actif mobilier et le montant le plus élevé du recouvrement des créances du débiteur et à assurer une certaine rapidité indispensable à l'efficacité de la liquidation des biens.

Il convient de noter que le syndic poursuit seul la vente des marchandises et meubles du débiteur, le recouvrement des créances et le règlement des dettes de celui-ci. Le syndic est aussi autorisé à céder les créances à long terme du débiteur dans les mêmes conditions que pour les compromis et les transactions, l'objectif étant de ne pas retarder les opérations de liquidation. Il doit également déposer immédiatement les fonds provenant des ventes dans un compte spécialement ouvert à cet effet et dans les conditions prévues par l'article 45 AUPC.

Finalement, la réalisation des meubles et le recouvrement des créances sont caractérisés par les pouvoirs importants attribués au syndic ainsi que par la simplicité et la célérité de la procédure. Les mêmes objectifs se retrouvent dans la réalisation des immeubles mais avec une lenteur et une lourdeur procédurale inévitables en raison de la nature de ces biens.

b- La réalisation des immeubles

La réalisation des immeubles fait l'objet de nombreuses règles qui visent à tenir compte de la nature de ces biens et tout particulièrement à protéger les créanciers, le débiteur et les tiers acquéreurs.

La réalisation des immeubles doit intervenir rapidement. En effet, si passé le délai de trois mois suivant la décision de liquidation des biens, le syndic n'a pas entrepris la procédure de réalisation des immeubles, le créancier hypothécaire peut reprendre son droit de poursuite individuelle à charge d'en rendre compte au syndic. S'agissant de la procédure et des formes, ce sont celles prescrites en matière de vente sur saisie immobilière, sauf à préciser que c'est le juge-commissaire qui fixe la mise à prix et les conditions essentielles de la vente, détermine les modalités de la publicité après avoir recueilli les observations des contrôleurs.

A côté des de ces dispositions communes à la réalisation des immeubles, on retrouve dans l'acte uniforme des dispositions particulières relatives à la vente sur saisie immobilière86(*), d'autres relatives à la vente par voie d'adjudication amiable87(*), et à la vente de gré à gré.

Enfin dans le cadre de la liquidation des biens, l'acte uniforme reconnaît la possibilité d'une cession globale et ou partielle d'actif. En effet, l'article 160 AUPC dispose: "tout ou partie de l'actif mobilier ou immobilier comprenant, éventuellement, des unités d'exploitation, peut faire l'objet d'une cession globale". La réglementation de cette cession globale ou partielle dans le cadre de la liquidation des biens ne diffère pas fondamentalement de celle de la cession partielle en cas de redressement judiciaire.

L'apurement du passif, quant à lui, même s'il fait l'objet de dispositions moins nombreuses, est susceptible d'entraîner des situations plus complexes.

2- L'apurement du passif

L'apurement du passif fait l'objet de règles générales (b) et de certaines dispositions spécifiques relatives à l'ordre de paiement des créanciers. Auparavant, la notion d'apurement du passif mérite d'être précisée (a).

a- La notion d'apurement du passif

L'apurement du passif est une opération essentielle dans toutes les procédures collectives. S'agissant de la liquidation des biens, il en constitue l'unique finalité. Mais l'apurement du passif implique-t-il le paiement effectif et intégral des créanciers? Au sens large, il signifie faire disparaître le passif. Le droit français est assez avancé dans cette direction puisqu'à quelques exceptions près, la clôture de la procédure pour insuffisance d'actif ne fait pas recouvrer aux créanciers leur droit de poursuite individuelle: le débiteur voit ainsi son passif apuré sans que tous les créanciers aient été payés. Cette solution a été justifiée par le souci de mettre fin à un traitement discriminatoire entre les petits commerçants et artisans, qui devaient continuer à supporter le poids de leurs dettes, et les dirigeants sociaux qui étaient immédiatement et définitivement libérés après la clôture d'une procédure collective. En outre, l'affirmation légale du droit pour les débiteurs de ne pas payer leurs dettes n'en est pas moins regrettable du point de vue de la moralité commerciale et n'est pas de nature à inciter les commerçants en situation difficile à respecter leurs engagements88(*).

Sur ce plan, l'acte uniforme est résolument classique puisque la clôture de l'union fait recouvrer aux créanciers partiellement ou totalement impayés l'exercice individuel de leurs actions, avec même le bénéfice d'un titre exécutoire si les créances ont été vérifiée et admises.

b- Les règles générales de l'apurement du passif

L'apurement du passif incombe au juge-commissaire et au syndic. Le premier prend les décisions importantes et le second est chargé des mesures d'exécution juridique et matérielle.

Le montant de l'actif, rendu liquide, est réparti entre tous les créanciers dont la créance est vérifiée et admise. En raison des dispositions relatives à l'ordre de paiement89(*), certains créanciers peuvent ne rien recevoir. Il y a lieu de soustraire de l'actif les frais et dépens de la liquidation des bains ainsi que les secours qui auraient été apportés au débiteur et à sa famille.

Selon les dispositions de l'article 169 AUPC, chaque semestre, le syndic dresse un rapport sur l'état de la liquidation des biens. Cette disposition fait craindre que les opérations de liquidation ne s'éternisent, accroissant ainsi les frais de la procédure au détriment des créanciers. Le rapport du syndic est déposé au greffe et est notifié en copie au débiteur, à tous les créanciers et aux contrôleurs s'il en a été nommé. Le juge-commissaire peut cependant dispenser le syndic de cette notification. Dans tous les cas, le syndic informe le débiteur des opérations de liquidation au fur et à mesure de leur réalisation.

L'apurement du passif ou le plus souvent l'emploi de l'intégralité de l'actif au paiement des créanciers met fin à la procédure collective.

B- La liquidation des sociétés commerciales in bonis

La liquidation des sociétés commerciales in bonis est celle qui précède la dissolution de la société et survient lorsque cette dernière n'éprouve pas de difficultés financières. Avant l'avènement de l'acte uniforme sur les sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique, le régime de la dissolution et de la liquidation des sociétés commerciales demeurait d'inspiration prétorienne. Les textes antérieurs étaient muets, ou ne réglementaient pas assez ce type de liquidation de société.

1- Les modalités de la liquidation des sociétés commerciales in bonis

L'A.U.S.C.G.I.E en ce qui concerne la liquidation des sociétés commerciales in bonis, distingue une liquidation conventionnelle (a) et une liquidation par voie de justice (b).

a- La liquidation par voie conventionnelle

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La liquidation conventionnelle est régie par les statuts ou la convention des associés survenue après la dissolution de la société90(*). Ainsi, le législateur communautaire, soucieux d'organiser ce type de liquidation dans l'espace OHADA, a donné le premier rôle à l'autonomie de la volonté. En principe la liquidation des sociétés commerciales in bonis est régie par les dispositions contenues dans les statuts91(*).

Aussi, la liquidation des sociétés a pour but de mieux organiser la transmission du patrimoine social en vue d'éviter les inconvénients de sa dissolution non seulement à l'égard des associés, mais aussi à l'égard des créanciers sociaux. Il est donc essentiel pour ces protagonistes, qu'ils continuent de trouver en face d'eux l'être moral. Dès lors, la situation juridique de la société en liquidation revient à reconnaître tout d'abord la survie de la personnalité morale de la société ainsi que la conduite de la vie sociale.

b- La liquidation par voie de justice

Elle est consacrée par les dispositions des articles 223 à 241AUSCGIE dites «  dispositions particulières à la liquidation par voie de justice ». Elles s'appliquent a défaut de clauses statutaires ou de conventions expresses entre les parties, ou encore, malgré les dispositions statutaires et conventionnelles, sur décision judiciaire obtenue par les associés ou les créanciers sociaux sous certaines conditions.

Il importe cependant de faire deux remarques essentielles. D'une part, dans l'espace OHADA, la combinaison entre ces deux régimes est possible du fait qu'en présence des clauses statutaires ou de dispositions conventionnelles insuffisantes, il y'a lieu d'appliquer a la liquidation, alors conventionnelle pour l'essentiel, les règles de la liquidation par voie de justice concernant les questions non réglées par les statuts ou la convention. Aussi, les dispositions des articles 223 à 241, de l'acte uniforme précité, outre qu'elles régissent la liquidation par voie de justice, serviront de règles supplétives en matière de liquidation amiable.

D'autre part, le caractère impératif des dispositions de l'AUSCGIE, conséquence de la nature de la liquidation, obligatoire en cas de dissolution de la société, ne concerne pas uniquement la liquidation par voie de justice, mais également la liquidation amiable.

Si la liquidation amiable est moins étroitement réglementée que la liquidation par voie de justice, elle est néanmoins tenue de respecter un ensemble de règles impératives prévues dans la rubrique « dispositions générales ». Celles-ci s'appliquent d'ailleurs aussi à la liquidation par voie de justice de sorte que, conformément a leur application, elles concernent toute liquidation légale, conventionnelle ou mixte.

Il apparaît ainsi que l'application de l'AUSCGIE à la liquidation des sociétés commerciales exigera souvent un effort délicat de combinaisons entre les « dispositions générales », celles qui concernent non seulement la liquidation par voie de justice, et éventuellement les dispositions statutaires ou conventionnelles.

2- L'exercice des opérations de liquidation

Les opérations de liquidation sont mises en oeuvre par le liquidateur (a) et leur dénouement (b) marque en principe la fin de la procédure collective.

a- La mise en oeuvre des opérations par le liquidateur

« Le liquidateur représente la société qu'il engage dans tous les actes de la liquidation ». Telle est la substance de l'article 230 alinéa 1 de l'AUSCGIE. Ce texte vise à assurer la sécurité des transactions vis-à-vis des tiers, mais comme il relève du chapitre relatif à liquidation par voie de justice on peut penser qu'il ne trouve pas à s'appliquer en cas de liquidation amiable, ce qui n'est pas le cas. En outre, s'il y a plusieurs liquidateurs, il y a lieu de se conformer à la clause statutaire qui prévoit qu'ils peuvent agir ensemble ou séparément.

Dans le cas ou les statuts ou la convention expresse des parties sont muets sur les pouvoirs du liquidateur, on se réfèrera aux règles de la liquidation par voie de justice. Mais, si la liquidation est conventionnelle sur tous les points et si les stipulations statutaires ou conventionnelles restreignent les pouvoirs du liquidateur, celles-ci seront opposables aux tiers. Cela étant, il faut remarquer que la mise en oeuvre des opérations par le liquidateur implique que ce dernier doit réaliser l'actif social ceci en vue de régler le passif de la société.

Le liquidateur doit effectuer tout acte conservatoire ou d'administration nécessaire à une liquidation efficace. Ainsi, des sa nomination, et ceci dans les six mois, le liquidateur doit convoquer les associés et faire le point sur la situation active et passive de la société. De même, il doit leur apporter les informations nécessaires. Dans cette optique, des obligations générales lui sont reconnues. Il doit, quel que soit le régime de liquidation, après avoir effectué les formalités de publicité, dresser l'inventaire des biens de la société92(*).

Il doit en outre établir le compte des gérants ou administrateurs, il doit se procurer les livres comptables dont la tenue est imposée aux commerçants par la loi ou les usages du commerce. Il doit par ailleurs autoriser la levée des scellés s'il en a été apposé à la requête des créanciers ou des associés eux-mêmes au début de sa gestion.

Le liquidateur a en outre le pouvoir d'accomplir les opérations diverses et annexes. Il peut procéder à tous les actes nécessaires pour assurer la conservation de l'actif social, exercer des actions en justice93(*), le liquidateur peut également désister ou acquiescer94(*), il a en outre qualité pour exercer des transactions et des compromis au nom de la société. La portée de ses pouvoirs lui donne le droit de vendre les biens de la société.

b- Le dénouement des opérations de liquidation

Le dénouement des opérations de liquidation marque la fin des opérations de liquidation mises en oeuvre par le liquidateur. Elle se manifeste d'abord par un exercice préalable, la clôture des opérations de liquidation. La société ayant été constituée par une série de divers apports, il faut procéder au partage de la société dissoute.

La clôture de la liquidation, ne donnait lieu, avant l'avènement de l'AUSCGIE, à aucune constatation officielle, ni à aucune publicité. Le législateur OHADA a consacré la nécessité d'une publicité et selon l'article 217 de l'acte uniforme précité, c'est normalement à l'assemblée des associés qu'il appartient de statuer sur le compte définitif, sur le quitus de gestion du liquidateur, la décharge du mandat du liquidateur et la clôture des opérations. Il ne s'agit pas d'une convention, mais d'une décision prise en assemblée, c'est-à-dire à la majorité et dans certaines conditions. La convocation de l'assemblée est normalement effectuée par le liquidateur, mieux à même que quiconque d'apprécier son opportunité en fonction de l'état d'achèvement de la liquidation. En cas d'inertie du liquidateur, il est reconnu aux associés le droit de saisir le tribunal chargé des affaires commerciales compétent et le liquidateur va y déposer au greffes, les copies nécessaires.

Le compte du liquidateur doit être soumis à l'approbation des associés et ces derniers doivent lui donner quitus si la gestion est bonne. Les formalités de publicité de la clôture doivent être respectées. Elles sont doubles et concernent d'une part la décision relative aux comptes, au quitus et la décharge de mandat, et d'autre part l'avis de clôture et cet avis doit, a notre sens, contenir les mentions contenues dans l'article 266 précité. Ce qui ne va pas sans entraîner de conséquences.

Alors que pour les sociétés civiles, la disparition de la personnalité morale a lieu le jour de la publication de la clôture de la liquidation95(*), la date de la disparition de la personnalité morale des sociétés commerciales est fixée au jour de la clôture de la liquidation. Telle est la vision de l'AUSCGIE qui dispose a l'article 220 : « ...le liquidateur demande la radiation de la société au R.C.C.M dans le délai d'un mois à compter de la publication de la clôture de la liquidation ».

La clôture des opérations de liquidation entraîne des conséquences pour la société car elle est radiée du R.C.C.M par le liquidateur et à défaut de ce dernier, par tout intéressé, ou par le tribunal d'office. En outre, la personnalité morale de la société disparaît. Car, la liquidation est terminée et la continuation de sa personnalité juridique durant la liquidation a pour support les besoins de celle-ci.

En ce qui concerne les représentants de la société, la clôture des opérations de liquidation entraîne la cessation définitive des fonctions du liquidateur et paiement de son solde définitif. Dans cette optique, le liquidateur se trouve déchargé de son mandat en même temps qu'il lui est donné quitus de sa gestion.

Cependant, force est de constater que le caractère définitif de la cessation des fonctions du liquidateur parait contradictoire avec le maintien de la personnalité morale tant que les droits et obligations à caractère social n'ont pas encore été liquidés96(*). La liquidation ne peut de nouveau être ouverte et cette réouverture implique, le cas échéant, la nomination d'un mandataire ad hoc97(*). Ce qui pourrait avoir une influence sur la réalisation du partage.

CHAPITRE II/ La consécration des droits des procédures collectives dérogatoires au droit OHADA

Si le droit OHADA est considéré comme le droit commun des procédures collectives, il n'en demeure pas moins qu'il existe d'autres ordres juridiques qui régissent la matière. Ces autres droits sont dérogatoires au droit OHADA en raison de la spécificité de leur domaine d'intervention (SECTION 1) et du caractère très administratif de leurs procédures (SECTION 2).

SECTION 1/ La spécificité du domaine d'intervention des droits des procédures collectives dérogatoires au droit OHADA

Le domaine d'intervention des droits des procédures collectives dérogatoires au droit OHADA est spécifique en raison de l'activité exercée par les sociétés assujetties à ces droits (Paragraphe 1) et aussi à la prise en compte de certains intérêts (Paragraphe 2).

Paragraphe 1/ L'activité exercée par les sociétés assujetties aux droits dérogatoires des procédures collectives

Il s'agit essentiellement des activités bancaires (A) et des activités des sociétés d'assurance (B).

A- Les activités bancaires

Aux termes de l'article 2 alinéa 2 de la loi 2008-26 portant règlement bancaire, « constituent des opérations de banque ...la réception de fonds du public, les opérations de crédit, ainsi que la mise à disposition de la clientèle et la gestion de moyens de paiement ». On note ainsi que l'activité bancaire tourne essentiellement autour de la commercialisation de produits financiers, du commerce de l'argent, de la gestion des moyens de paiement98(*). Ces activités présentent une certaine particularité (1) comparée aux activités des autres sociétés commerciales qui se limitent souvent à la production de biens et aux prestations de service. Cependant, on note que le commerce de banque présente de plus en plus de complexité depuis qu'on a remarqué une certaine immixtion dans le secteur des assurances (2).

1- La particularité du commerce de banque

Les banques mènent des activités commerciales. Cependant ces activités présentent une certaine particularité par rapport aux activités commerciales qui sont communes aux autres sociétés commerciales. En effet, le commerce de banque est essentiellement un commerce d'argent (a) intégré dans un environnement institutionnel tout aussi particulier (b).

a- Le commerce de l'argent

En reprenant la définition donnée de la banque par l'article 2 de la loi bancaire, on peut y trouver quelques éléments caractéristiques de cette profession à travers la nature des « biens » vendus, l'origine de ces biens et leur utilité dans le monde contemporain. En clair, le commerce de banque est un commerce d'argent ; cet argent a pour origine, essentiellement les dépôts du public. Par ailleurs les banques sont le plus souvent les principaux bailleurs de crédit des sociétés commerciales. Les activités de ces dernières ne sauraient se passer de certains services bancaires tels l'octroi de crédit, la domiciliation de certains effets de commerce, la constitution de sûretés...

Si nul ne peu ignorer le rôle incontestable joué par l'argent dans développement de l'activité économique, en revanche, on en méconnaît les méfaits. En réalité, l'utilité et le danger du commerce de l'argent doivent être appréciés comme des conséquences, engendrées par les comportements de ses utilisateurs, acteurs du jeu économique.

La quantité de monnaie en circulation dans un pays ne doit être ni excessive ni insuffisante. C'est pour cette raison qu'il importe de mettre sous surveillance le système bancaire, lui qui a vocation, par la collecte de dépôts et par la distribution de crédits, à faire de la création monétaire. C'est cette allocation optimale sous forme de crédits, des ressources d'autrui vouées à être restituées, souvent à première demande puisque déposées à vue, qui constitue un pari sur l'aptitude des crédités à conduire correctement leurs affaires, et sur leur capacité à assurer le remboursement normal des concours reçus.

Emission, circulation, création, gestion de l'argent, constituent les principaux opérations des banques qui se trouvent ainsi au coeur de la politique monétaire et économique caractérisée par son uniformité dans l'espace monétaire UMOA devenu depuis 1994, par l'adjonction de la dimension économique qui lui faisait défaut, Union économique et monétaire ouest africain.

b- Un commerce intégré dans un environnement institutionnel particulier

En portant attention à l'article 22 du traité de l'UMOA, on note qu'il y est clairement stipulé qu'afin de permettre la pleine application des principes d'union monétaire, « les gouvernants des Etats membres ont convenu d'adopter une réglementation uniforme » concernant notamment : l'exécution et le contrôle des relations financières avec les pays n'appartenant pas à l'union, l'organisation générale de la distribution et du contrôle du crédit, les règles générales d'exercice de la profession bancaire et des activités s'y rattachant, les effets de commerce. En tenant compte de l'énumération de l'article 22 du traité UMOA, il y a lieu de convenir que l'UMOA a son champ d'intervention, balisé par l'article 916 de l'acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales. Cet acte uniforme devient ainsi le droit commun applicable aux banques dont la forme juridique imposée par la loi bancaire est la société anonyme, étant toutefois entendu que la spécificité bancaire permet d'écarter toutes les dispositions relatives aux sociétés anonymes qui viendraient contrarier celles édictées au nom de cette spécificité par l'union monétaire ouest africaine.

En mettant en oeuvre la loi portant réglementation bancaire, le conseil des ministres de l'UMOA, tout en soumettant la banque, du point de vue de sa forme juridique, aux règles de la société anonyme, donc de l'Acte uniforme de l'OHADA, s'attache à exercer son rôle de réglementation quant à l'organisation générale de la distribution, du contrôle du crédit, ainsi qu'aux règles d'exercice de la profession bancaire et des activités s'y rattachant, pour les aspects relevant de la spécificité bancaire.

A l'instar de l'OHADA, l'UMOA, dans le domaine particulier qui est le sien, exerce ses prérogatives nées de son traité en conservant son particularisme que justifie tout l'arsenal juridique, comptable te financier composant l'environnement institutionnel des établissements de crédit.

2- L'immixtion dans la profession d'assurance

En plus d'assurer leurs tâches traditionnelles de collecte de fonds, les banques se sont investies aujourd'hui dans des secteurs d'activité qui généralement relèvent des sociétés d'assurance. C'est ainsi qu'à côté de la bancassurance (a) on retrouve l'assurance-vie et les bons de capitalisation pratiqués par les banques (b).

a- Le phénomène de la bancassurance

Ce néologisme désigne le rapprochement des banques et des compagnies d'assurance, soit par la création de sociétés d'assurance filiales captives des banques, soit par des participations des groupes d'assurance dans des groupes bancaires. Il en résulte que les banques distribuent de plus en plus des produits d'assurance, cette activité étant favorisée par les réseaux de guichets dont elles sont titulaires99(*).

Traditionnellement, l'activité des banques consiste à recevoir des fonds du public, à effectuer des opérations de crédit, ainsi qu'à gérer des moyens de paiement100(*). Compte tenu de l'évolution du paysage financier et notamment des mouvements d'intégration qu'on a pu observer avec l'effacement des cloisons traditionnelles qui s'ensuit, cette définition de l'activité bancaire ne révèle plus qu'une fraction de celle-ci et devient insuffisante pour tenir compte des nombreux aspects que cette activité recouvre aujourd'hui.

La bancassurance désigne l'activité qui s'est développée au sein des établissements de crédit qui, en plus de leurs tâches traditionnelles de banquier, ont élargi la gamme des produits proposés à leur clientèle, en offrant à la vente des produits d'assurance. Le terme couvre donc le large champ allant de la simple distribution de produits d'assurance par les guichets bancaires jusqu'à l'intégration au sein d'un même groupe d'un établissement bancaire et d'une société d'assurance en vue d'une exploitation maximale des synergies potentielles, en passant par l'activité d'assurance prestée par une compagnie d'assurance au bénéfice d'assurés qui sont clients de la banque101(*).

Bien que peu perceptible au sein de l'espace OHADA, le phénomène de la bancassurance ne demeure pas une hypothèse d'école. Il est vrai qu'un tel phénomène ne manquera pas de soulever de nombreux problèmes juridiques dans la mesure où les sociétés de banque et d'assurance ainsi que leurs activités sont soumises à des normes relevant d'ordres juridiques indépendants et qui, a priori n'ont pas envisagé la possibilité d'une rencontre entre les activités bancaires et les activités des sociétés d'assurance.

b- L'assurance-vie et les bons de capitalisation

Selon la doctrine classique, tout sujet de droit a un patrimoine défini comme « l'ensemble des biens d'une personne, envisagé comme formant une universalité de droit »102(*). Ce patrimoine existe même si finalement aucun bien ne le compose ; mais son maintien ou son accroissement en valeur nécessite de le gérer, c'est-à-dire de l'administrer en réalisant des placements qui présentent idéalement les critères de liquidité, de sécurité et de rentabilité103(*). C'est pourquoi il est utile de prendre conseil auprès de professionnels comme les établissements de crédit.

Dans le domaine de la gestion du patrimoine, les banques offrent deux produits à savoir l'assurance-vie et les bons de capitalisation.

L'assurance-vie « est le contrat par lequel l'assureur s'engage envers le souscripteur, moyennant une prime, à verser au bénéficiaire désigné une somme déterminée, l'exécution de son obligation dépendant de la durée de la vie de l'assuré »104(*). Elle est gérée en capitalisation, l'épargne produisant des intérêts qui s'ajoutent au capital afin que ceux-ci produisent eux-mêmes des intérêts et donnent lieu au versement d'une somme forfaitaire dont le montant est stipulé au contrat et qui prend la forme d'un capital ou d'une rente. Ce système subit ainsi les conséquences de la dépréciation monétaire.

Les bons de capitalisation obéissent à des techniques similaires. Ces bons produisent des intérêts, eux-mêmes capitalisés afin de générer des intérêts qui seront à leur tour capitalisés. Ces produits bénéficient d'une grande sécurité, sont rentables et avantageux du point de vue fiscal.

Cette diversification des activités bancaires reflète la mutation du métier de banquier. Celui-ci ne se limite plus aux opérations de banque et peut concerner d'autres activités. Cette mutation a principalement un fondement économique. Elle est également due à l'internationalisation des activités, ce qui peut parfois poser le problème de la détermination de la loi applicable105(*).

B- Les activités des sociétés d'assurance

Les sociétés d'assurance assurent généralement la couverture des risques (1). Mais depuis un certains temps, on note des incursions limitées sur les compétences spécifiques des banques (2).

1- La couverture des risques

Compte tenu de leur importance économique et sociale, le code CIMA a minutieusement réglementé les opérations d'assurance en distinguant les opérations portant sur les risques autres que le décès (a) des opérations portant sur les branches vie et capitalisation (b).

a- Les risques portant sur les branches autres que le risque décès

L'article 328 du code CIMA dispose : « L'agrément prévu à l'article 326 est accordée branche par branche. A cet effet, les opérations d'assurance sont classées en branches de la manière suivante... » L'article distingue les opérations de la branche IARD. Ce sont les assurances relevant des maladies, des corps de véhicules terrestres à moteur, les corps de véhicules ferroviaires, les corps de véhicules aériens, les corps de véhicules maritimes, lacustres et fluviaux, les marchandises transportées, les incendies et éléments naturels, autres dommages aux biens, responsabilité civile véhicules terrestres à moteur, responsabilité civile véhicules aériens, responsabilité civile véhicules maritimes, lacustres, fluviaux, responsabilité générale, crédit, caution, pertes pécuniaires diverses, protection juridique, assistance.

b- Les risques portant sur les branches vie et capitalisation

Selon les dispositions de l'article 328 du code CIMA, toute opération comportant des engagements dont l'exécution dépend de la durée de la vie humaine est rattachée à la branche vie et capitalisation. Il s'agit des assurances vie mais aussi des opérations d'assurance comportant des engagements dont l'exécution dépend de la durée de la vie humaine et liées à un fond d'investissement. De même, y sont inclues toutes opérations comportant la constitution d'associations réunissant des adhérants en vue de capitaliser en commun leurs cotisations et de répartir l'avoir ainsi constitué, soit entre les survivants, soit entre les ayants droits des décédés.

Les opérations d'appel à l'épargne en vue de la capitalisation et comportant, en échange des versements uniques ou périodiques, directs ou indirects, des engagements déterminés quant à leur durée et à leur montant sont des opérations de capitalisation.

Les activités des sociétés d'assurance se démarquent nettement des activités ordinaires des autres sociétés quand bien même leur caractère commercial n'est pas contesté. Cependant leur aspect financier très prononcé justifie qu'on ne saurait envisager pour elles les règles de droit commun des procédures collectives d'autant plus qu'elles ont tendance à s'insurger sur le terrain des activités bancaires.

2- Des incursions limitées sur les compétences spécifiques des banques

A l'image des banques qui s'insurgent dans la profession d'assurance, on remarque aujourd'hui que certaines compagnies d'assurance se démarquent quelque peu de leur rôle habituel de couverture des risques. C'est ainsi qu'est apparu le phénomène de l'assurfinance (a) ainsi que l'assurance-épargne (b).

a- L'assurfinance

L'assurfinance se reporte à l'activité nouvelle des compagnies d'assurance qui, en plus de leurs tâches traditionnelles, ont été amenées à développer une autre gamme de produits touchant tant au domaine de la banque que de la finance, c'est-à-dire essentiellement de produits financiers ou d'épargne qui, tout en conservant certains caractéristiques de base de l'assurance, visent en réalité à atteindre des objectifs financiers.

Le concept d'assurfinance qui ne doit pas être considéré comme une notion de nature juridique, présente cependant une importance pratique particulière puisqu'il permet de rendre compte de l'élargissement progressif de l'éventail des produits et des services offerts tant par les compagnies d'assurance que par les banques.

b- L'assurance-épargne

Les produits d'assurance épargne connaissent aujourd'hui un essor considérable : il s'agit d'abord du placement ensuite de la retraite. Par conséquent, l'assurance pure fondée sur l'estimation des probabilités de survie ou de décès, ou d'invalidité et de maladie a une importance décroissante au regard de l'analyse financière106(*).

Les formules d'assurance-épargne empruntent les mêmes supports financiers dans tous les réseaux, mais le coût de mise en place des produits nouveaux sera beaucoup plus élevé pour l'assureur traditionnel.

Sur le plan macro-économique, l'avantage escompté de la stimulation de l'offre d'assurance vie est une contribution au redressement du taux d'épargne des ménages et surtout la mise en place d'une épargne longue, de façon à étayer les systèmes de retraite par la prévoyance complémentaire.

L'assurance-crédit est une assurance par laquelle un créancier peu faire assurer la solvabilité de son débiteur. Le code CIMA, dans son article 1er, exclut nommément l'assurance-crédit du domaine d'application des règles générales communes au contrat d'assurance contenues dans le livre premier. Le fondement de cette exclusion est la quasi-assimilation de l'assurance-crédit aux opérations de banque. L'assurance-crédit aurait pour finalité essentielle de fournir à l'assuré des facilités bancaires. Il ne s'agirait pas, par conséquent d'une véritable opération d'assurance. De nos jours, l'opération d'assurance-crédit ne vise pas principalement à octroyer des facilités bancaires à l'assuré mais à garantir le créancier des risques de non recouvrement de sa créance. En effet, les polices d'assurance-crédit couvrent effectivement, en contrepartie des primes, le risque d'insolvabilité du débiteur. Il faut cependant préciser que cette exclusion est inopportune parce qu'elle laisse en dehors de la protection légale le crédit qui joue un rôle sans cesse croissant dans l'économie.

Paragraphe 2/ La prise en compte des intérêts en cause

L'autre aspect qui témoigne de la spécificité des droits des procédures collectives dérogatoires au droit OHADA résulte de la prise en compte de certains intérêts, notamment la protection du système financier (A) et la sauvegarde de l'épargne publique (B).

A- La protection du système financier

Le système financier constitue l'un des premiers intérêts à prendre en compte par les procédures collectives dérogatoires au droit OHADA. Sa solidité (1) doit être assurée par des moyens efficaces (2).

1- La solidité du système financier

Les crises financières de la fin des années 90 ont mis en évidence les liens entre l'évolution macroéconomique et la solidité du système financier. En fait, la fragilité des institutions financières, les carences de la réglementation et du contrôle bancaire ainsi que le manque de transparence étaient au coeur de ces crises. C'est pourquoi l'UEMOA a intensifié ses efforts afin d'aider les pays membres à définir et à mettre en oeuvre des mesures propices à la création d'un système financier solide.

a- La nécessité d'assurer la solidité du système financier

Des systèmes financiers solides et bien réglementés sont essentiels pour assurer la stabilité macroéconomique et financière dans un monde où les flux de capitaux ont augmenté. Le système financier d'un pays comprend les banques, les bourses de valeurs mobilières, les fonds de pension, les assureurs, la banque centrale et les instances de réglementation nationales. Ces sociétés et institutions constituent le cadre permettant d'effectuer les opérations économiques et de conduire la politique monétaire. Elles contribuent aussi à orienter l'épargne vers l'investissement. Un système financier solide est donc essentiel à la croissance économique. Les problèmes du système financier peuvent diminuer l'efficacité de la politique monétaire, aggraver ou prolonger les récessions économiques et, en cas de problèmes à grande échelle, provoquer la fuite des capitaux ou peser lourdement sur le budget en raison du renouvellement des institutions financières en difficulté. Toutes ces considérations conduisent à confirmer l'idée selon laquelle les entreprises du secteur bancaire et du secteur des assurances ne peuvent être logées à la même enseigne que toutes les autres sociétés commerciales. Les conséquences d'une procédure collective à leur égard sont tellement importantes qu'elles légitiment l'existence d'une législation dérogatoire au droit commun et adaptée à leur environnement économique.

b- La prise en compte des risques systémiques

Pour préserver leur bonne santé, les banques et les sociétés d'assurance doivent gérer activement les risques inhérents à leurs activités de façon à préserver leur viabilité. Il existe cependant des chocs potentiellement très dangereux et hors du contrôle de leurs gestionnaires qui peuvent affecter le système financier dans son ensemble. Ces risques sont désignés sous le vocable de risque systémique. Adam Smith, déjà, soulignait les dangers de ce type de risque inhérent surtout à l'activité bancaire. Dans son ouvrage « La richesse des nations », il établit une analogie entre « le besoin qu'éprouvent les pouvoirs publics de violer l'espace naturel de libertés des banques en réglementant leurs activités, et la nécessité d'inciter les voisins à édifier des barrières mitoyennes pour éviter qu'un éventuel incendie ne gagne l'ensemble d'une communauté d'habitants ».

Défini de manière très générale, le risque systémique correspond à un évènement soudain et généralement inattendu qui secoue les marchés financiers et les empêche d'acheminer efficacement le flux de capitaux là où les investissements sont les meilleures. Lorsque cela se produit, les entreprises et les investisseurs particuliers, à court de fonds, cessent d'investir ou de dépenser et il s'ensuit un ralentissement de l'activité économique voire même une récession. Les banques et les sociétés d'assurance sont des acteurs du système financier. Leur faillite entraîne souvent des difficultés au sein des autres entreprises qui sont en étroites relations avec elles. C'est pourquoi les procédures collectives auxquelles elles sont assujetties poursuivent moins le but de désintéresser les créanciers que d'assainir le secteur des entreprises qui pourraient causer des dommages à d'autres entreprises du fait de leur situation compromise. C'est la protection de l'économie qui présente plus d'intérêt.

2- Les moyens de protection du système financier

En raison de son importance dans l'économie, le système financier a besoin d'être protégé de manière efficace. Cette protection passe par la surveillance des acteurs du système financier (a) et l'assistance technique qui leur est apportée (b).

a- La surveillance des sociétés d'assurance et des banques

Les sociétés d'assurance et les banques sont des acteurs du système financier. De leur bonne santé, dépend la solidité du système. C'est pourquoi, au sein de l'espace UEMOA tout comme dans l'espace CIMA, il est institué un dispositif de surveillance des banques et des sociétés d'assurance.

La réglementation de l'UEMOA en matière bancaire soumet les établissements de crédit à des ratios prudentiels qui permettent de gérer les équilibres financiers et d'éviter des difficultés financières. Les banques doivent ainsi respecter les règles de liquidité ainsi qu'un certain nombre de règles relatif au ratio de structure du portefeuille.

Les sociétés d'assurance sont elles aussi soumises à la surveillance par la commission régionale de contrôle des assurances. Elle veille au respect des conditions de la profession d'assurance et le cas échéant, envisage des mesures de redressement des sociétés d'assurance traversant des difficultés. C'est dire que toute cette panoplie de mesures normatives vise en fait à maintenir en vie ces entreprises particulières qui sont des moteurs de l'économie.

b- L'assistance technique aux sociétés d'assurance et aux banques

L'article 64 de la loi 2008-26 du 28 juillet 2008 dispose : « Le président de la commission bancaire peut, en tant que de besoin, inviter les actionnaires, associés ou sociétaires d'un établissement de crédit en difficulté, à apporter leur concours à son redressement. Il peut, en outre, inviter l'ensemble des adhérents de l'association professionnelle des banques et établissements financiers à examiner les conditions dans lesquelles ils pourraient apporter leur concours au redressement de l'établissement de crédit ».

Les auteurs du traité CIMA ont réservé au conseil des ministres la possibilité de créer de nouvelles institutions autonomes ; néanmoins, ils ont décidé de maintenir celles qui existaient sous l'égide des conventions antérieures notamment l'institut international des assurances. Celui-ci a deux missions principales : la formation et l'assistance technique. Cette mission est très diversifiée. Elle consiste à former des cadres d'assurance de tous niveaux et de toutes spécialisations pour les compagnies, les administrations du contrôle des assurances et tout autre organisme qui en exprimerait le besoin. Au niveau de l'UEMOA et de la CIMA il est donc institué tout un dispositif préventif afin de parer à d'éventuelles difficultés au sein des sociétés d'assurance et des banques.

B- La sauvegarde de l'épargne publique

Tout comme le système financier, l'épargne publique constitue une donne essentielle dans les économies. C'est ce qui a justifié la création d'une institution de régulation (a) aux pouvoirs étendus (b) au sein de l'UEMOA.

1- La mise en place d'une institution de régulation

Dans le cadre de sa mission de protection de l'épargne publique, il a été institué au sein de l'UEMOA, un Conseil régional de l'épargne public et des marchés financiers. Ce conseil a été créé le 3 juillet 1996 par décision du conseil des ministres de l'UMOA dans le cadre de la mise en place du marché financier régional dont il assure la tutelle. Il est chargé d'une mission générale de protection de l'épargne investie en valeurs mobilières et en tout autre placement donnant lieu à une procédure d'appel public à l'épargne dans l'ensemble des Etats membres de l'union.

2- Les pouvoirs de l'institution de régulation

Le Conseil régional de l'épargne public a un pouvoir de contrôle sur toutes les opérations d'appel public à l'épargne. Ces opérations doivent être autorisées par le conseil au moyen de l'octroi d'un visa. De même, le conseil est seul compétent pour homologuer les tarifs des intervenants commerciaux notamment les sociétés de gestion et d'intermédiation et les sociétés de gestion de patrimoine.

SECTION 2/ L'intervention de l'autorité administrative dans les droits des procédures collectives dérogatoires au droit OHADA

Les procédures collectives dérogatoires au droit OHADA se singularisent par leur forte dimension administrative. En effet, l'ouverture de la procédure est subordonnée à l'avis de l'autorité administrative (Paragraphe 1). De même les opérations de la procédure sont soumises au contrôle permanent de l'autorité administrative (Paragraphe 2).

Paragraphe 1/ La subordination de l'ouverture de la procédure collective à l'avis de l'autorité administrative

Les autorités administratives jouent un rôle dans l'ouverture des procédures collectives. Pour les banques, il s'agit de la Commission bancaire de l'union monétaire ouest africaine (A) et pour les sociétés d'assurance, de la commission de contrôle des assurances (B).

A- L'intervention de la Commission Bancaire dans les procédures collectives

L'ouverture d'une procédure collective pour les banques nécessite l'avis conforme de la commission bancaire de l'union monétaire ouest africaine. Ainsi, l'article 87 de la loi 2008-26 du 28 juillet 2008 portant règlementation bancaire dispose : « L'ouverture d'une procédure de règlement préventif, instituée par l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, est, relativement à un établissement de crédit, subordonnée à l'avis de la commission bancaire ». De même, l'article 88 de la même loi dispose : « Les procédures de redressement judiciaire et de liquidation des biens, instituées par l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, ne peuvent être ouvertes à l'égard d'un établissement de crédit qu'après avis conforme de la commission bancaire... ».

Dans le cadre des procédures collectives, on remarquera que la commission bancaire ne joue pas seulement le rôle d'une autorité administrative indépendante (1) elle est aussi une juridiction (2).

1- La commission bancaire : une autorité administrative indépendante

La commission bancaire est un organe de l'UEMOA. Elle est également une autorité administrative en ce sens qu'elle est indépendante (a) et présente un certain degré d'autorité (b).

a- L'indépendance de la commission bancaire

La jurisprudence et la doctrine s'accordent à reconnaître qu'une autorité administrative indépendante, hormis son rattachement à un pouvoir administratif, se caractérise par son indépendance et son autorité107(*).

L'indépendance de la commission bancaire se mesure à l'aune de ses conditions d'organisation autrement dit, sa composition, les garanties statutaires de ses membres et son fonctionnement.

La commission est composée du gouverneur de la banque centrale, d'un représentant désigné ou nommé par chaque Etat participant à la gestion de la banque centrale. Pour les Etats de l'union monétaire ouest africaine, ce représentant est le directeur du trésor ou le représentant de la direction de tutelle des banques et établissements financiers. Elle est aussi composée de huit membres nommés par le conseil des ministres de l'union108(*).

Les membres de la commission bancaire sont indépendants et jouissent d'une immunité juridictionnelle dans l'exercice de leurs fonctions. Dans le cadre des procédures collectives, les décisions de la commission bancaire ne peuvent être frappées de recours que devant le conseil des ministres de l'union.

La commission bancaire est donc un organe central dans le déroulement des procédures collectives. Les procédures de règlement préventif, de redressement ou de liquidation des biens ne peuvent être déclenchées sans l'avis conforme de la commission bancaire. A ce titre, la commission possède un pouvoir discrétionnaire pour se prononcer sur l'opportunité d'ouverture d'une procédure collective après réception des documents décrivant la situation du débiteur109(*). De même, avant qu'il ne soit statué sur l'ouverture d'une procédure collective à l'égard d'un établissement de crédit, le président de la juridiction compétente saisit par écrit la commission bancaire d'une demande d'avis. Cette demande est accompagnée des pièces nécessaires à l'information de la commission bancaire. Dans tous les cas, que ce soit le débiteur ou la juridiction compétente qui envisage l'ouverture d'une procédure collective, l'avis conforme de la commission bancaire est toujours requis.

b- L'autorité de la commission bancaire

Les pouvoirs confiés à la commission bancaire dans le cadre des procédures collectives sont multiples.

En premier lieu, elle a un pouvoir de contrôle. Ce pouvoir constitue le moyen déterminant d'exercice déterminant des pouvoirs de la commission bancaire c'est-à-dire le pouvoir de se faire communiquer les documents aux dates prévues, le pouvoir d'obtenir des renseignements, éclaircissements ou justification nécessaires. Ce droit de communication préalable à l'ouverture d'une procédure collective est important puisqu'il porte en général sur le rapport des commissaires aux comptes et aussi de certains documents comptables dont elle peut demander certification.

La commission bancaire dispose aussi d'un pouvoir réglementaire. La question s'est posée au lendemain de la loi bancaire de savoir si la commission bénéficiait d'un pouvoir réglementaire. Cependant, la nouvelle législation a démontré qu'elle conservait encore un pouvoir réglementaire en ce qu'elle a la faculté de déterminer la liste, le modèle et les délais de transmission des documents et informations qui doivent lui être remis. Les auteurs s'accordent à reconnaître que, par sa participation à la détermination du contenu des règles, elle exerce une parcelle de pouvoir réglementaire.

La commission bancaire dispose aussi du pouvoir de prendre des décisions individuelles. Les pouvoirs qui lui sont conférés sont nombreux : mise en garde en cas de manquement aux règles de bonne conduite de la profession, injonction de prendre toutes mesures destinées à rétablir ou renforcer l'équilibre financier ou à corriger les méthodes de gestion.

A ces pouvoirs s'ajoute le pouvoir de désigner un administrateur provisoire et de nommer un liquidateur.

2- La commission bancaire : une juridiction

Le caractère juridictionnel de la commission bancaire se justifie par l'obligation de motivation des mesures disciplinaires qu'elle prend (a) mais aussi par l'existence de voies de recours contre les décisions qu'elle prend (b).

a- L'obligation de motivation des décisions de la commission bancaire

Selon les dispositions de l'article 30 de l'annexe à la convention portant création de la commission bancaire, les injonctions, décisions avis et propositions de la commission bancaire doivent être motivés d'autant plus que celle-ci dispose d'un pouvoir disciplinaire. En effet, selon l'article 23 de l'annexe à la convention, lorsque la commission bancaire constate une infraction à la réglementation bancaire sur le territoire d'un Etat membre de l'union, elle peut prononcer une ou plusieurs sanctions disciplinaires, notamment l'avertissement, le blâme, la suspension ou l'interdiction de tout ou partie des opérations, toutes autres limitations dans l'exercice de la profession, la suspension ou la démission d'office des dirigeants responsables, le retrait d'agrément. Agissant dans ce cadre, la commission est soumise au principe du contradictoire. C'est dire que la commission bancaire est soumise au droit commun des juridictions administratives. En effet, l'article 25 de l'annexe à la convention portant création de la commission bancaire dispose : « aucune sanction disciplinaire ne peut être prononcée par la commission bancaire sans que l'intéressé, personne physique ou morale, ait été entendu ou dûment convoqué ou invité à présenter ses observations par écrit à la commission bancaire... ».

b- Les voies de recours contre les décisions de la commission bancaire

Le caractère juridictionnel de la commission bancaire se caractérise aussi par les voies de recours dont ses décisions peuvent faire l'objet. A ce titre, l'article 31 de l'annexe à la convention portant création de la commission bancaire dispose : « Les décisions de la commission bancaire ne peuvent être frappées de recours que devant le conseil des ministres de l'union... » Dans le cadre des procédures collectives, la décision d'ouverture d'une procédure collective ou de nomination d'un liquidateur était considérée comme juridictionnelle lorsqu'elle était prise à titre disciplinaire110(*) et administrative lorsqu'elle était appliquée à un établissement dont l'agrément a été retiré à la demande de l'intéressé ou après une injonction de cesser toute activité111(*). La loi bancaire ne précise pas la nature de la décision de la commission bancaire mais renvoie juste à une voie de recours qui est le conseil des ministres de l'union.

En France, la loi a parfaitement distingué les fonctions de la commission. Aucun texte ne prévoyant de procédure d'appel, le seul recours est celui en cassation devant le conseil d'Etat. Au cours de cette procédure, la commission est représentée par le ministre de l'économie et des finances, d'une part parce que la décision est juridictionnelle, d'autre part parce que la commission n'a pas la personnalité morale et n'est pas dotée d'un commissaire du gouvernement. Dans l'exercice de sa fonction juridictionnelle, la commission est donc soumise au droit commun du contentieux administratif.

B- L'intervention de la Commission de contrôle des assurances

La commission régionale de contrôle des assurances est l'organe régulateur de la CIMA. Elle est chargée du contrôle des entreprises d'assurance, de l'organisation et de la surveillance générale des marchés d'assurance. En dehors de ces missions précitées (2) elle constitue un organe incontournable dans les procédures collectives des entreprises d'assurance (1).

1- Le rôle de la commission régionale de contrôle des assurances dans les procédures collectives

La commission de contrôle des assurances est un des organes ayant l'initiative de la procédure collective (a). Et même dans les cas où elle ne déclenche pas la procédure, son avis est nécessaire à l'ouverture de la procédure (b).

a- L'ouverture des procédures collectives

Le code CIMA ne prévoit que trois formes de saisine de la juridiction compétente pour ouvrir la procédure collective : la requête de la commission de contrôle des assurances, la saisine d'office du tribunal ou la saisine par le ministère public après avis conforme de la commission.

Le code CIMA consacre des dispositions relatives à la liquidation rédigées en des termes qui suscitent bien des interrogations aussi bien en cas de fa illite qu'en cas de retrait d'agrément. Seuls ces deux cas de liquidation sont prévus par le code CIMA. On peut alors se demander si ces règles sont applicables pour d'autres causes telles que par exemple, la dissolution de l'entreprise décidée par l'assemblée générale des actionnaires ou des assurés.

La première cause de liquidation est la faillite de l'entreprise d'assurance112(*). Bien que l'article 325 cite explicitement la faillite, il faut comprendre par là toute procédure collective ouverte pour cause de cessation des paiements et devant conduire à la liquidation des biens de l'entreprise. Une fois la faillite prononcée, elle produit tous ses effets. Cependant, il faut noter que la procédure organisée par les articles 325-1 à 325-10 n'est applicable qu'au cas de retrait d'agrément.

Il fau noter que les règles édictées par le code CIMA pour la dissolution des deux seules formes de sociétés d'assurance autorisée (société anonyme et société mutuelle) sont dérogatoires du droit commun interne et doivent, en principe, l'emporter sur celui-ci par application des principes généraux retenus en la matière. Pour la société anonyme, la question est plus complexe puisqu'elle est réglementée aussi par l'AUSCGIE si bien que les règles du code CIMA et celles de l'OHADA peuvent entrer en contradiction. Une telle difficulté devrait se résoudre par la prééminence de la législation supranationale la plus récente, c'est-à-dire celle de l'OHADA. En outre, celle-ci dispose dans son article 916 de l'AUSCGIE : « L'acte uniforme n'abroge pas les dispositions auxquelles sont assujetties les sociétés soumises à un régime particulier ». Dans tous les cas l'ouverture d'une procédure collective à l'égard d'une société d'assurance ne peut se faire sans l'avis de la commission de contrôle des assurances.

b- La nécessité d'un avis conforme préalable à l'ouverture des procédures collectives

L'article 325 du code CIMA dispose : « La faillite d'une société régie par le présent code ne peut être prononcée à l'égard d'une entreprise soumise aux dispositions du présent livre qu'à la requête de la commission de contrôle des assurances ; le tribunal peut également se saisir d'office ou être saisi par le ministère public d'une demande d'ouverture de cette procédure après avis conforme de la commission de contrôle des assurances. Le président du tribunal ne peut être saisi d'une demande d'ouverture du règlement amiable qu'après avis conforme de la commission de contrôle des assurances ».

Les dispositions de cet article montrent le rôle prépondérant de la commission de contrôle des assurances dans l'ouverture de la procédure collective. Le pouvoir de la commission est exorbitant du droit commun des procédures collectives. Il ne laisse aucune place à l'assignation par les créanciers, les assurés et les bénéficiaires des contrats et subordonnent la saisine d'office par le tribunal à sa propre appréciation. Ce pouvoir est discrétionnaire et peut conduire à des situations anormales d'autant plus qu'une faillite non voulue par la commission peut conduire à une faillite de fait, si les créanciers, assurés et bénéficiaires de contrats, titulaires de titres exécutoires contre la société d'assurance entreprennent des saisies-exécutions individuelles.

2- Les missions de la Commission régionale de contrôle des assurances

Le pouvoir exorbitant de la commission de contrôle des assurances se justifie par le fait qu'elle a pour mission d'organiser le marché des assurances (a) et de contrôler en permanence les entreprises d'assurance (b). Ce qui explique qu'elle veille à maintenir en vie le plus longtemps possible ces entreprises.

a- L'organisation du marché des assurances

Dans le cadre de sa mission d'organisation et de surveillance du marché des assurances, la commission de contrôle des assurances dispose de plusieurs prérogatives113(*).

Elle émet des avis qui conditionnent la délivrance des agréments. Elle dispose de tous documents et statistiques concernant les marchés nationaux des assurances des Etats membres. Elle communique au Conseil des ministres ses observations et propositions sur le fonctionnement du secteur des assurances, sur les modifications du traité et de la législation unique des assurances qui lui paraissent appropriées. Elle transmet aux autorités des Etats membres ses observations concernant les suites à donner à ses décisions sur leur territoire ainsi que ses recommandations sur le fonctionnement des marchés nationaux des assurances.

Les décisions de la commission ne peuvent être frappées de recours que devant le conseil des ministres et dans u délai de deux mois à compter de leur notification114(*). Les recours n'ont pas d'effet suspensif.

b- Le contrôle des entreprises d'assurance

La commission organise sur pièce et sur place, le contrôle des sociétés d'assurance exerçant leur activité sur le territoire des Etats membres. Quand elle constate le non-respect de la réglementation des assurances ou un comportement mettant en péril l'exécution des engagements contractés envers les assurés, elle enjoint à la société concernée de prendre les mesures de redressement qu'elle indique. Dans le cadre des procédures collectives, le contrôle de la commission consiste à faire éviter la cessation des paiements et la liquidation. A cet effet trois mesures sont prévues : les mesures de sauvegarde, le plan de redressement, le blocage des actifs et la suspension des paiements.

Ces mesures sont levées ou confirmées par la commission après une procédure contradictoire dans un délai de quatre mois. Pendant ce délai, les dirigeants sont mis à même d'être entendus et peuvent se faire assister par un professionnel de l'assurance de leur choix.

Paragraphe 2/ Le contrôle des opérations de procédure collective par l'autorité administrative

Qu'il s'agisse des banques ou des sociétés d'assurance, les procédures collectives auxquelles elles sont assujetties témoignent d'une forte implication de l'autorité administrative qui n'est autre que la commission bancaire ou la commission de contrôle des assurances. Cette implication de l'autorité administrative dans les procédures collectives induit un contrôle au caractère transversal (A) qui emporte certaines conséquences au niveau de la procédure (B).

A- Le caractère transversal du contrôle de l'autorité administrative

L'intervention de l'autorité administrative dans les procédures collectives dérogatoires au droit OHADA se manifeste essentiellement au niveau du contrôle par elle. Ce contrôle présente certaines particularités tant au niveau de son domaine (1) que de sa nature (2).

1- Le domaine du contrôle de l'autorité administrative

Le domaine du contrôle de l'autorité administrative se caractérise par son étendue. Il intervient autant à l'ouverture de la procédure collective (a) que lors de son déroulement (b).

a- Le contrôle à l'ouverture des procédures collectives

L'ouverture d'une procédure collective à l'égard d'une banque ou d'une société d'assurance ne peut se faire sans lavis conforme de la commission bancaire ou de la commission régionale de contrôle des assurances. En effet, l'autorité administrative a le pouvoir de décider de l'ouverture d'une procédure collective après que toutes les informations lui soient transmises. Aucune ouverture de procédure collective à l'égard d'une banque ou d'une société d'assurance ne peut se faire sans son intervention. En effet, que ce soit le juge ou le débiteur, l'avis conforme demeure une condition sine qua none du déclenchement de la procédure collective. En effet, dans le cadre du règlement préventif, l'article 87 alinéa 3 de la loi 2008-26 dispose : « le représentant légal d'un établissement de crédit, qui envisage de déposer une requête aux fins d'ouverture d'une procédure de règlement préventif, doit, par lettre recommandé avec accusé de réception ou lettre remise contre récépissé, saisir la commission bancaire d'une demande d'avis préalablement à la saisine du président de la juridiction compétente... ». Qu'il s'agisse des sociétés d'assurance ou des sociétés de banque, l'autorité administrative effectuera toujours un contrôle avant de se prononcer sur l'ouverture de la procédure collective. Ce contrôle sera certainement axé sur l'importance des difficultés que traverse l'entreprise justifiant le choix entre un règlement préventif, un redressement judiciaire ou une liquidation des biens.

Ce contrôle ne se limitera pas uniquement à l'ouverture de la procédure collective, elle sera plus poussée en cours de procédure.

b- Le contrôle lors du déroulement des procédures collectives

Les opérations de procédure collective applicable aux banques et aux sociétés d'assurance sont entièrement soumises au contrôle de l'autorité administrative. Pendant toute la durée de la procédure collective, l'établissement de crédit ou la société d'assurance demeure soumis au contrôle de la commission bancaire, de la banque centrale et, de la commission régionale de contrôle des assurances. Sans doute, ce contrôle a-t-il été institué en raison des activités particulières des entreprises visées. En effet, les exigences de protection du système financier et de protection de l'épargne publique justifient que ce contrôle soit effectué par l'autorité administrative plutôt que par un juge plus apte à veiller sur les intérêts des parties à la procédure collective.

2- La nature du contrôle exercé par l'autorité administrative

Le contrôle exercé par l'autorité administrative n'a pas fait l'objet d'une précision dans les législations dérogatoires au droit OHADA en matière de procédures collectives (a). Cependant, ses modalités sont clairement dégagées (b).

a- l'imprécision de la nature du contrôle de l'autorité administrative

Ni les dispositions de l'UEMOA relatives à l'organisation de la profession bancaire, ni celles du code CIMA ne donnent une définition exacte de la nature du contrôle effectué par l'autorité administrative. Généralement, il est reconnu deux types de contrôle administratifs : les contrôles de légalité et les contrôles d'opportunité. La loi ne précise pas de quel type de contrôle il s'agit.

Selon l'article 87 de la loi 2008-26 portant réglementation bancaire, « l'ouverture d'une procédure de règlement préventif, instituée par l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, est, relativement à un établissement de crédit, subordonnée à l'avis conforme de la commission bancaire... » Sur quel fondement cet avis est-il émis ? L'article souligne juste que la demande du débiteur doit comporter les pièces nécessaires à l'information de la commission bancaire. Celle-ci donne son avis par écrit dans un délai d'un mois à compter de la date de réception de la demande. S'il est vrai que les banques sont soumises au respect de certains ratios garantissant leur solvabilité, on peut penser que la commission bancaire exercera un contrôle de légalité avant d'émettre son avis. Cependant, à la lecture de ce texte, on pourrait envisager la probabilité d'un contrôle d'opportunité dans la mesure où l'émission de l'avis reste une faculté de la commission bancaire. En tout état de cause, les décisions de la commission bancaire ne peuvent être frappées de recours que devant le conseil des ministres de l'union.

Par ailleurs, l'ouverture d'une procédure collective à l'égard d'une société d'assurance ne peut être faite qu'après avis conforme de la commission nationale de contrôle des assurances. Ici encore, le code CIMA ne donne aucune indication quant à la nature du contrôle. Il s'agit là d'une faculté qui est offerte à la commission régionale de contrôle des assurances.

L'intérêt qu'il y a de distinguer les deux types de contrôle réside dans les voies de recours offertes au demandeur. Cependant, malgré l'imprécision de la nature du contrôle, les seules voies de recours autorisées autant par la réglementation bancaire que par celle des assurances sont la saisine du conseil des ministres de l'UEMOA pour les banques et du conseil des ministres de la CIMA pour les entreprises d'assurances. Si les voies de recours ne constituent pas un élément pertinent dans la détermination de la nature du contrôle exercé lors de l'ouverture de la procédure, la question qu'il conviendra de se poser est sans doute celle de savoir si le sort d'une entreprise en difficulté dans les zones UEMOA et CIMA reste à la libre appréciation de l'autorité administrative, ou bien y a-t-il un soubassement légal à cette appréciation ?

Si la nature du contrôle de l'autorité administrative reste imprécise, ses modalités par contre sont clairement dégagées.

b- Les modalités du contrôle de l'autorité administrative

L'article 96 de la loi 2008-26 portant réglementation bancaire dispose : « Pendant la durée de la liquidation, l'établissement de crédit concerné demeure soumis au contrôle de la Commission bancaire. Il ne peut effectuer que les opérations strictement nécessaires à l'apurement de sa situation. Il doit préciser dans tous ses documents et ses relations avec les tiers qu'il est en cours de liquidation ». La commission bancaire n'est pas le seul organe exerçant un contrôle sur les opérations de la procédure. Ainsi l'article 98 dispose : « le liquidateur doit présenter au Ministre des Finances ainsi qu'à la commission bancaire et à la banque centrale, au moins une fois tous les trois mois, un rapport sur l'évolution des opérations de liquidation et, au terme de la liquidation, un rapport circonstancié sur celle-ci ».

Dans le cadre de la surveillance des opérations de la procédure collective des établissements de crédit, on retrouve trois instances administratives à savoir la commission bancaire, le ministre des finances et la banque centrale. Le contrôle passe par l'intermédiaire du liquidateur nommé par le ministre des finances qui délivre tous les trois mois un rapport sur les opérations de la procédure.

Le contrôle administratif s'applique aussi aux sociétés d'assurance soumises à une procédure collective. Selon l'article 321-2 du code CIMA, lorsque conformément aux dispositions de l'article 321 c)115(*), un administrateur provisoire est désigné auprès d'une entreprise soumise au contrôle de la commission de contrôle des assurances en vertu des article 300 et 309, un conseil de surveillance est mis en place par le Ministre en charge des assurances. Ce conseil est composé du directeur des assurances ou de son représentant et d'un représentant de l'agence nationale de la banque centrale. Le conseil exerce un contrôle permanent de la gestion de l'entreprise et doit notamment être avisé préalablement à leur exécution de toutes les décisions prises par l'administrateur provisoire. Pendant la durée de la liquidation, l'entreprise d'assurance demeure soumise au contrôle de la commission régionale de contrôle des assurances et du juge contrôleur116(*). Ceux-ci peuvent demander à tout moment au liquidateur tous renseignements et justifications et faire effectuer les vérifications sur place. En outre, le liquidateur doit adresser trimestriellement un rapport sur l'état de la liquidation dont il dépose un exemplaire au greffe du tribunal.

A travers le contrôle exercé par l'autorité administrative sur les opérations de la procédure, on constate à quel point celle-ci est un élément incontournable dans le déroulement des procédures collectives dérogatoires au droit OHADA. Ces pouvoirs exorbitants qui lui sont reconnus ne manqueront pas de produire certains effets.

B- Les incidences du contrôle effectué par l'autorité administrative sur les opérations de procédure collective

Les procédures collectives d'apurement du passif en droit OHADA sont marquées par l'omniprésence du juge tout au long de la procédure. Il n'en est pas de même dans les procédures dérogatoires où la dimension administrative a un caractère prononcé (1), ce qui ne manquera pas de produire certaines conséquences (2).

1- Le caractère prononcé de la dimension administrative des procédures collectives

Le caractère prononcé de la dimension administrative dans les procédures collectives dérogatoires au droit OHADA renvoie à une double constatation : d'une part, la plupart des décisions judiciaires sont soumises à l'approbation de l'autorité administrative (a) et d'autre part, on note un certain recul de la dimension judiciaire dans ces procédures collectives (b).

a- La subordination de la décision judiciaire à l'approbation de l'autorité administrative

Les droits des procédures collectives dérogatoires au droit OHADA témoignent de l'existence d'un juge aux pouvoirs quelque peu amoindris. En effet, le juge dans les procédures collectives dérogatoires au droit OHADA n'a pas la même marge de manoeuvre que dans les procédures collectives d'apurement du passif OHADA. La plupart de ces décisions sont soumises à l'avis de l'autorité administrative, d'autres sont prises par elle-même. Le rôle du juge en tant que conciliateur des intérêts des parties à la procédure collective perd de son essence. En effet, l'autorité administrative a tendance à s'insurger dans les domaines traditionnellement reconnus au juge et même à lui suggérer une ligne de conduite dans certains cas. C'est pourquoi, on note un certain recul de la dimension judiciaire dans les procédures collectives auxquelles sont assujetties les banques et les sociétés d'assurance.

b- Le recul de la dimension judiciaire dans les procédures collectives dérogatoires

Le droit des procédures collectives est un droit de rencontre entre plusieurs intérêts souvent divergents. Entre les intérêts des créanciers et ceux du débiteur, le juge est amené à trancher. Si ce schéma est plus représentatif des procédures collectives d'apurement du passif du droit OHADA, il n'en est pas de même dans les procédures collectives dérogatoires.

En effet, dans le cadre des procédures collectives spécialement mises en place pour les banques et les sociétés d'assurance, l'autorité administrative conduit la procédure dans sa presque totalité. Ainsi, l'ouverture de la procédure ne peut se faire sans l'avis conforme de l'autorité administrative. Lorsque la commission bancaire décide de mettre sous administration provisoire un établissement de crédit, c'est le ministre chargé des finances qui nomme un administrateur provisoire117(*). De même, lorsque la commission bancaire met sous liquidation un établissement de crédit, c'est le ministre des finances qui nomme un liquidateur. La liquidation des biens est certes prononcée par l'autorité judiciaire compétente mais sur saisine du liquidateur nommé par le ministre des finances118(*). Par ailleurs, si un syndic est nommé par application des dispositions du droit commun, c'est-à-dire de l'AUPC, celui-ci est assisté par le liquidateur nommé par le ministre des finances.

Relativement aux entreprises d'assurance, la commission de contrôle des assurances, ou le ministre en charge des assurances, après avis conforme du secrétaire général de la CIMA peuvent désigner un administrateur provisoire à qui sont transférés les pouvoirs nécessaires à l'administration et à la direction de l'entreprise lorsque la situation financière de celle-ci est telle que les intérêts des assurés et bénéficiaires de contrats sont compromis ou susceptibles de l'être119(*). Toutes les opérations de la procédure sont soumises au contrôle de la commission de contrôle des assurances.

A la lecture des dispositions de la loi bancaire et du code CIMA, on remarque que l'administration a un important pouvoir dans la conduite des procédures collectives. Le juge judiciaire qui normalement concilie les intérêts dans la procédure, est quasiment subordonné à l'autorité administrative. Certaines de ses prérogatives à l'image de la désignation d'un liquidateur, sont exercées par l'autorité administrative. On peut ainsi remarquer que la dimension judiciaire dans les procédures collectives dérogatoires tend de plus en plus à être occultée par les pouvoirs qui sont reconnus à l'administration.

2- Les conséquences attachées au pouvoir exorbitant de l'autorité administrative dans les procédures collectives

L'autorité administrative possède sans doute un pouvoir exorbitant dans la mise en oeuvre des procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance. Ce pouvoir exorbitant peut être à l'origine de faillites non prononcées (a) et substituer à la procédure collective des initiatives individuelles émanant des créanciers de l'entreprise en difficulté (b).

a- Les risques d'existence de faillites non prononcées

L'autorité administrative joue un rôle déterminant dans les procédures collectives prévues pour les banques et les sociétés d'assurance. L'ouverture de la procédure est assujettie à son avis. Dès lors, le problème qui peut se poser est l'existence de faillites que le juge ne peut prononcer du fait de l'absence d'un avis conforme de l'autorité administrative. Par ailleurs les lenteurs de l'administration peuvent occasionner des lourdeurs dans la procédure et porter atteinte à la célérité souhaité dans les procédures collectives, laissant ainsi le temps au débiteur de mauvaise foi, la possibilité d'organiser des fraudes au détriment de ses créanciers. En outre, il faut noter une certaine inexpérience de l'administration face à des questions relatives à la liquidation et au redressement judiciaire. En effet, le personnel administratif est souvent composé de personnes n'ayant généralement pas reçu une formation relative aux entreprises en difficulté, ou qui, même ayant reçu cette formation n'ont pas acquis assez d'expérience dans la pratique. En effet, la commission bancaire de l'UEMOA est composée du gouverneur de la banque centrale, d'un représentant désigné ou nommé par chaque Etat participant à la gestion de la banque centrale, de huit membres nommés par le conseil des ministres de l'union120(*).

Les possibilités d'existence de faillites non prononcées se répercutent sur le comportement que les créanciers adopteront à l'égard du débiteur défaillant.

b- L'acharnement éventuel des créanciers sur le débiteur

L'ouverture d'une procédure collective produit certains effets sur les créanciers. A travers la suspension des poursuites individuelles qui survient dans la procédure collective, les créanciers se retrouvent en une masse et ne peuvent plus exercer de poursuites individuelles. Cette mesure constitue pour le débiteur une sorte de protection en ce qu'elle lui permet d'envisager son retour à une bonne fortune (en cas de règlement préventif ou de redressement judiciaire). En même temps, elle constitue pour les créanciers un moyen de protection pour eux-mêmes. En effet, n'eut été la décision de suspension des poursuites, les créanciers auraient certainement entrepris des poursuites individuelles contre le débiteur, et le patrimoine de ce dernier serait distribué suivant l'ordre de poursuite des créanciers et les sûretés dont ils disposent. Cette situation pourrait entraîner la rupture de l'égalité entre les créanciers dans la procédure collective et amoindrir les chances de redressement du débiteur.

Un tel état de fait peut se produire au niveau des banques et des sociétés d'assurance. En effet, il ne faut pas oublier que la décision d'ouverture d'une procédure collective à l'égard de ces entreprises est soumise à l'avis conforme de l'autorité administrative. A la lumière des dispositions de la loi bancaire et du code CIMA, il n'apparaît pas de solution alternative au refus de l'administration d'émettre un avis conforme. Cependant, l'article 31 de l'annexe à la convention portant création de la commission bancaire dispose en son alinéa 1er : « les décisions de la commission bancaire ne peuvent être frappées de recours que devant le conseil des ministres de l'union ». Il en est de même pour la commission régionale de contrôle des assurances dont les articles 317 du code CIMA et 22 du traité disposent que les décisions ne peuvent être frappées de recours que devant le conseil des ministres. Du reste, l'annulation des décisions des commissions reste une faculté pour le conseil des ministres et, les textes ne précisent pas si le pouvoir d'annulation est exercé en légalité ou en opportunité. Peut-on ranger le refus d'émettre un avis conforme dans la catégorie des décisions susceptibles de recours devant les autorités administratives ? Et même si tel est le cas, les délais de recours (deux mois) laissent largement le temps aux créanciers, sentant le débiteur aux abois, d'entreprendre des poursuites contre le débiteur avant que l'ouverture d'une procédure collective ne soit prononcée. Cet acharnement contre le débiteur ne manquera pas de porter préjudice aux créanciers qui n'ont pas su recouvrer à temps leur créance. En effet, ces derniers risquent de retrouver devant eux un patrimoine vidé de ses forces les plus utiles.

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

Les droits communautaires des procédures collectives dans l'espace OHADA ne posent pas uniquement le problème des rapports que peuvent entretenir ces différents droits. Au-delà des diverses questions relatives à l'articulation des droits communautaires au sein de l'espace OHADA, se pose particulièrement celle de la délimitation du droit commun et des droits spéciaux. La question a fait l'objet de débats doctrinaux qui n'ont jamais été épuisés.

Traditionnellement, on entend par droit spécial, celui qui donne une règle particulière à une série de cas déterminés. On l'oppose au droit commun qui détermine les règles applicables à tous les cas qui composent un genre donné. La distinction entre droit commun et droits spéciaux revêt ainsi un caractère purement quantitatif. Selon le Pr. R. Gassin, cette distinction exprime un rapport d'espèce à genre. Peu importe qu'une loi déroge à la règle générale ou se borne à l'appliquer, le seul fait que son champ d'application soit plus limité suffit à lui attribuer le caractère de loi spéciale121(*).

La distinction du droit commun et des droits spéciaux paraît remonter à Aristote122(*). Elle est connue du droit romain et de l'Ancien droit, notamment au travers de maximes célèbres relatives à l'abrogation des lois. Aujourd'hui, cette notion de droit spécial s'est enrichie d'un caractère supplémentaire : elle est le plus souvent l'oeuvre de spécialistes123(*).

Cette affirmation trouve illustration dans le cadre du droit des procédures collectives dans l'espace OHADA. En effet, si on distingue les procédures collectives d'apurement du passif de celles qui sont relatives aux banques et aux sociétés d'assurance, on remarque d'emblée le relent de spécialisation présent dans les textes considérés comme dérogatoires.

La distinction traditionnelle droit commun/droit spécial présente des intérêts pratiques certains. Ainsi, dans l'espace OHADA ou la pluralité des sources du droit des procédures collectives peut constituer un handicap à l'application de ce droit, la première solution retenue a été de considérer le droit OHADA comme étant le droit commun. De ce fait, la distinction présente aussi l'intérêt de constituer une technique d'agencement entre plusieurs sources qui a priori sont indépendantes les unes des autres.

La justification de cette solution est à rechercher dans les règles juridiques traditionnelles. En effet, on considère que le droit commun se caractérise à la fois par une très grande stabilité et par une application très générale. La force des principes qu'il consacre tend ainsi à éliminer de l'ordre juridique positif toutes les dispositions qui les nient. Le droit OHADA des procédures collectives présente un certain degré de généralité qu'on ne retrouve pas dans les autres droits régissant la matière. Le droit OHADA s'applique en principe à toutes les sociétés commerciales. En même temps, le législateur OHADA précise que l'acte uniforme n'abroge pas les dispositions législatives auxquelles sont assujetties les sociétés soumises à un régime particulier. Par ailleurs, dans un arrêt rendu le 26 avril 2000124(*), la CCJA rappelle le caractère d'ordre public des dispositions OHADA. Ainsi, en même temps qu'il est consacré le caractère commun du droit OHADA, il est reconnu l'existence de droits dérogatoires.

Cependant délimiter la frontière entre le droit commun et le droit spécial ne semble pas chose aisée et, même si on reconnaît la primeur au droit OHADA, il ne faut pas oublier que les différentes sources du droit des procédures collectives sont toutes indépendantes les unes des autres. A ce titre, il est évident qu'elles entretiennent des rapports qui peuvent constituer des problèmes quant à l'application du droit des procédures collectives.

TITRE II/ La contrariété des différents droits communautaires des procédures collectives dans l'espace OHADA

Le droit des procédures collectives au sein de l'espace OHADA est régi tant par les dispositions de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives que par celles de l'Union Economique et Monétaire Ouest africaine et de la Conférence Interafricaine des Marchés d'Assurance. Il est indéniable que ces différents droits communautaires des procédures collectives entretiennent des relations qui vont de la complémentarité à la contrariété. Cette contrariété présente un intérêt particulier. En effet, ces droits des procédures collectives sont émis par des organisations communautaires dont les espaces juridiques se chevauchent. La contrariété des rapports qu'ils entretiennent provient essentiellement de leur autonomie (Chapitre I) et se manifeste dans plusieurs domaines du droit des procédures collectives (Chapitre II).

Chapitre I/ L'autonomie des sources des droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA

Les différents droits des procédures collectives émanent d'ordres juridiques totalement indépendants les uns des autres. Cette indépendance tient au fait que ces ordres juridiques sont crées par des traités distincts, émanant de diverses volontés. Ces droits des procédures collectives sont donc totalement autonomes (Section 1). Cette autonomie est d'autant plus renforcée qu'il n'existe entre eux aucune hiérarchie (Section 2).

Section 1/ L'équivalence des sources des droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA

L'équivalence des sources des droits communautaires des procédures collectives s'analyse au regard de leurs modalités d'application au sein de l'espace OHADA (Paragraphe 1). Du fait de leur dimension communautaire, ces droits ont tendance à neutraliser toute autre législation qui leur est contraire grâce à la technique de l'abrogation (paragraphe 2).

Paragraphe 1/ Les modalités d'application des droits communautaires des procédures collectives

Les différents droits des procédures collectives s'appliquent directement au sein de l'espace OHADA (A). Par ailleurs ils ont d'effet immédiat (B).

A- L'effet direct des droits communautaires des procédures collectives

L'effet direct des droits des procédures collectives trouve son fondement dans les modalités d'application de tout droit communautaire. La notion (1) connaît une définition précise et emporte certaines conséquences (2).

1- La notion d'effet direct des droits communautaires

L'effet direct signifie que les règles du droit communautaire doivent déployer la plénitude de leurs effets d'une manière uniforme dans les Etats membres, à partir de leur entrée en vigueur et pendant toute la durée de leur validité. Ces dispositions sont une source de droits et d'obligations pour tous ceux qu'elles concernent, qu'il s'agisse des Etats membres ou des particuliers qui sont parties à des rapports juridiques relevant du droit communautaire125(*).

a- Le fondement de l'effet direct des droits communautaires des procédures collectives

A la différence des traités internationaux ordinaires, les traités OHADA, UEMOA et CIMA ont institué des ordres juridiques propres intégrés au système juridique des états membres lors de leur entrée en vigueur. Ces ordres juridiques s'imposent aux juridictions des Etats membres. En instituant une communauté de durée illimitée, dotée d'attributions propres, de la personnalité, de la capacité juridique, d'une capacité de représentation internationale et plus précisément, de pouvoirs réels issus d'une limitation de compétence ou d'un transfert d'attributions des états à la communauté, ces traités ont limité, bien que dans des domaines restreints, les droits souverains des Etats et créé ainsi un corps de droit applicable à leurs ressortissants et à eux-mêmes. Cette intégration au droit de chaque Etat membre de dispositions qui proviennent de source communautaire, et plus généralement les termes et l'esprit des traités, ont pour corollaire l'impossibilité pour les états de faire prévaloir, contre un ordre juridique accepté par eux sur une base de réciprocité, une mesure unilatérale ultérieure qui ne saurait lui être opposable.

La force exécutive du droit communautaire ne saurait,en effet,varier d'un état à l'autre à la faveur des législations internes ultérieures,sans mettre en péril la réalisation des buts des traités (harmonisation du droit des affaires126(*), création d'un marché commun127(*), unification des marchés d'assurance128(*)). Le transfert opéré par les états, de leur ordre juridique interne au profit des ordres juridiques communautaires entraîne donc une limitation définitive de leurs droits souverains contre laquelle ne saurait prévaloir un acte unilatéral ultérieur incompatible avec les objectifs poursuivis.

L'effet direct du droit communautaire joue aussi bien pour le droit primaire que pour le droit dérivé. En d'autres termes, l'effet direct des droits communautaires des procédures collectives trouve son fondement dans l'ensemble des dispositions des traités les ayant institué et s'insère dans le cadre de la poursuite des différents objectifs visés par ces traités.

b- L'évolution du critère de l'effet direct des droits communautaires des procédures collectives

La Cour de Justice des Communautés Européennes a affirmé clairement ,pour la première fois en 1963:"le droit communautaire, indépendant de la législation des états membres, de même qu'il crée des charges dans le chef des particuliers, est aussi destiné à engendrer des droits qui entrent dans leur patrimoine juridique"129(*).
Depuis cet arrêt, le critère de l'applicabilité directe a évolué. A l'origine, pour être considérée d'applicabilité directe, une disposition communautaire devait être claire et précise, courante et juridiquement parfaite, et énoncer une obligation inconditionnelle. En résumé, l'applicabilité directe était liée au fait que l'application de la disposition communautaire ne nécessitait aucune autre mesure nationale ou communautaire. Cette exigence a été abandonnée par la Cour qui a admis que des obligations de faire pouvaient avoir une applicabilité directe à condition que les états ou les institutions chargées de prendre des mesures d'application ne disposent d'aucune appréciation discrétionnaire pour ce faire.

2- Les conséquences attachées à l'effet direct des droits communautaires des procédures collectives

L'effet direct des droits communautaires des procédures collectives permet aux personnes assujetties d'invoquer tous ces droits (a). Eventuellement, au cours d'un litige, ils peuvent avoir le choix entre plusieurs normes identiques ou concurrentes (b).

a- L'invocabilité des différents droits des procédures collectives par les particuliers

Si l'effet direct du droit communautaire suppose l'invocation par les particuliers des diverses prérogatives qui en résultent, encore faut-il déterminer la nature de la disposition communautaire en question.

Le règlement a une portée générale en droit UEMOA et CIMA. En effet, les articles 40 du code CIMA et 43 du traité UEMOA disposent que les règlements ont une portée générale et sont directement applicables dans tout Etat membre. En raison de sa nature même et par sa fonction dans le système des sources du droit communautaire, il produit des effets immédiats et est, comme tel, apte à conférer aux particuliers des droits que les juridictions nationales ont l'obligation de protéger130(*).C'est pourquoi les autorités nationales doivent s'abstenir de prendre toute mesure susceptible de porter atteinte à cet effet direct. Le règlement pouvant imposer des obligations aux particuliers, il pourra être invoqué par des particuliers à l'encontre d'autres particuliers. La Cour de cassation française a reconnu la primauté et l'applicabilité directe des règlements communautaires et, notamment, l'effet abrogatoire des règlements sur le droit national131(*). En droit OHADA, ce sont des actes uniformes qui sont pris pour l'adoption de règles communes. Au même titre que les règlements en droit CIMA et UEMOA, ces actes uniformes ont une portée générale et sont directement applicables dans tout Etat membre de l'OHADA.

On notera que l'ensemble des mesures pris en application des objectifs des différents traités sous la forme de règlements ou d'actes uniformes présente une dimension obligatoire et s'applique directement dans tous les Etats signataires. C'est ce qu'on désigne généralement sous le vocable « effet direct du droit communautaire ».

Transposé au droit des procédures collectives, l'effet direct des droits communautaires aura pour conséquence de proposer différentes solutions ou des solutions identiques à un même problème avec la possibilité pour les particuliers de se prévaloir de chacune des normes issues des différents droits communautaires des procédures collectives. En effet, dès lors que le règlement en droit CIMA et en droit UEMOA s'applique directement et est obligatoire au même titre que les actes uniformes en droit OHADA, cela veut dire qu'ils font naître des droits au profit des justiciables qui peuvent les invoquer devant une instance juridictionnelle.

Au sein de l'espace OHADA, la détermination de l'effet direct des droits communautaires des procédures collective ne posera pas de difficultés particulières puisque l'ensemble des textes en la matière l'affirme explicitement132(*).

b- L'obligation pour le juge d'appliquer les droits communautaires des procédures collectives

L'effet direct des droits des procédures collectives suppose la possibilité pour les personnes assujetties d'avoir le choix entre plusieurs normes pouvant s'appliquer à une situation identique. Dans tous les cas, le juge est chargé d'appliquer le droit. S'il s'agit d'un conflit mettant en présence l'application du droit communautaire et du droit national, le problème ne se posera pas pour le juge. Il appliquera le droit communautaire en raison de la primauté de celui-ci sur le droit national. Cependant, cette règle n'a pas toujours été admise.

En effet, en France, contrairement à la Cour de cassation, le Conseil d'Etat français a refusé, pendant longtemps de reconnaître la primauté du droit communautaire sur une loi postérieures aux traités133(*). Puis, dans un premier temps, en se fondant sur l'article 55 de la Constitution française, il a admis la supériorité des dispositions du Traité CE sur les lois nationales postérieures134(*). Par la suite, il a étendu cette jurisprudence aux règlements et aux directives communautaires135(*).

B- L'applicabilité immédiate des droits communautaires des procédures collectives

L'applicabilité immédiate des droits communautaires des procédures collectives a pour corollaire leur insertion immédiate dans l'ordre juridique interne (a) et produit certaines conséquences à l'égard des personnes assujetties (b).

1- L'insertion immédiate des droits communautaires des procédures collectives dans l'ordonnancement juridique interne

Le droit international retient le principe selon lequel les états sont obligés de respecter les traités qui les lient en les faisant appliquer par les organes législatif, exécutif et judiciaire sous peine d'engendrer leur responsabilité à l'égard des Etats envers lesquels ils se sont obligés. Toutefois, celui-ci ne fixe pas les conditions dans lesquelles les dispositions des traités doivent être intégrés dans l'ordre juridique des Etats membres pour être appliqué par leurs organes et juridictions. Sur ce point, deux conceptions doctrinales s'opposent : l'une est dite dualiste (b) et l'autre moniste (a).

a- La théorie moniste

Par le courant moniste, le droit et un ensemble de normes qui peuvent être soit nationales, soit internationales.

Le traité s'applique en tant que tel dans l'ordre juridique sans réception ni transformation dans l'ordre juridique interne des Etats parties sous réserve de sa ratification et de sa publication. Le droit communautaire postule le monisme et en impose le respect par les Etats membres. Le droit dérivé n'échappe pas à l'applicabilité immédiate. Celle-ci se déduit de la réception globale et anticipée de la loi de ratification. En d'autres termes, la loi de ratification, en introduisant le traité dans l'ordre juridique interne, a également introduit tout le droit dérivé qui en découlerait.

Ainsi donc, les règlements, décisions, directives, accords externes comme l'ensemble du droit communautaire bénéficient de l'applicabilité immédiate dans les Etats membres par le seul effet de leur publication au journal officiel.

b- La théorie dualiste

Pour le courant dualiste appelé aussi transformiste, les ordres juridiques nationaux et communautaires étant séparés, le droit communautaire ne peut recevoir application dans le droit des Etats membres qu'après avoir obéi à la procédure de réception en droit interne, c'est-à-dire avoir été transformé en norme nationale, généralement en une loi, ou encore après y avoir été introduit par une formule juridique qui en opère la réception. Ici, la norme communautaire subit une véritable transformation de nature. Il y a nationalisation du traité de même que du droit dérivé136(*).

2- Les conséquences attachées à l'applicabilité immédiate des droits communautaires des procédures collectives

L'application du droit communautaire dans les ordres juridiques nationaux exclut toute mesure de réception. Ainsi, les dispositions du droit communautaires pénètrent dans l'ordre juridique interne sans le secours d'aucune mesure d'introduction nationale.

a- L'interdiction de toute transformation des droits communautaires des procédures collectives

L'introduction des droits communautaires des procédures collectives dans l'ordre juridique des Etats se fait de manière directe. L'applicabilité immédiate des droits communautaires prohibe la transformation de quelle que manière que ce soit, du texte originaire, celui-ci se suffisant à lui seul. Par ailleurs cette interdiction participe du souci d'éviter toute discordance dans l'élaboration du droit communautaire pouvant émaner de plusieurs modifications apportées par les législateurs nationaux.

b- La proscription de toute procédure de réception

Les Etats parties au traité de l'UEMOA, de l'OHADA, et de la CIMA sont tous de tradition moniste. La réception des droits des procédures collectives dans leur ordre juridique ne nécessite par conséquent aucune mesure de réception ou d'introduction dans les ordres juridiques. Cette automaticité de l'entrée en vigueur des actes et leur immédiateté d'application font que « l'exclusivisme territorial » des Etats s'effrite : les autorités nationales ou plutôt les souverainetés nationales ne constituent plus un obstacle pour l'intégration des actes des institutions communautaires dans les systèmes juridiques des Etats membres. Les normes édictées ont ainsi un caractère transnational et acquièrent automatiquement statut de droit positif.

L'applicabilité immédiate a ainsi pour conséquence l'interdiction de toute transformation et la proscription de toute procédure de réception des normes communautaires. Ce faisant tout acte recognitif ou confirmatif est non seulement inutile mais inadmissible. A ce propos, l'on peut se demander si l'article 9 du Traité de l'OHADA ne va pas à l'encontre de cette affirmation. Cette disposition prévoit, en effet, la publication des actes uniformes, non seulement au Journal Officiel de l'OHADA mais également « au Journal Officiel des Etats parties ». A l'analyse, il n'y a pas de véritable opposition. En effet, pour l'applicabilité immédiate, qualifiée d'opposabilité par le Traité, il suffit que l'Acte uniforme ait été publié au journal officiel de l'OHADA.

Paragraphe 2/ La neutralisation réciproque des droits communautaires des procédures collectives

Les différents traités constitutifs d'ordres juridiques au sein de l'espace OHADA déclarent explicitement l'abrogation de tout texte qui leur est contraire. On retrouve la même situation dans les divers droits communautaires des procédures collectives. Il y a ainsi une diversité de formules abrogatoires (A) qui présentent un certain degré d'imprécision (B).

A- La diversité des formules abrogatoires

L'une des plus grandes difficultés d'interprétation des droits communautaires des procédures collectives réside dans la diversité des formules d'abrogation. Ceci pose le problème de la survie de certains textes et peut se révéler ruinant quant aux objectifs recherchés par le droit des procédures collectives.

1- La dimension abrogatoire des droits communautaires des procédures collectives

Il convient de distinguer les dispositions abrogatoires du droit des procédures collectives OHADA consacrées par l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif (a) de celles des législations UEMOA et CIMA (b).

a- La dimension abrogatoire du droit des procédures collectives de l'OHADA

« Les actes uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les Etats parties nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antérieure ou postérieure137(*) ». La CCJA a eu l'occasion de préciser la portée de l'article 10 du traité OHADA dans un avis du 30 avril 2001. Elle a admis que l'article 10 contient une règle de supranationalité parce qu'il prévoit l'applicabilité directe et obligatoire dans les Etats parties des actes uniformes et institue par ailleurs leur suprématie sur les dispositions de droit interne antérieures ou postérieures. L'article 10 contient donc une règle relative à l'abrogation du droit interne par les actes uniformes.

C'est dans cette logique que s'inscrit l'article 257 de l'AUPC qui dispose : « Sont abrogées toutes les dispositions antérieures contraires à celles du présent acte uniforme... » L'acte uniforme vient remplacer dans chacun des Etats parties au traité de l'OHADA l'ensemble de la législation en vigueur relative aux procédures collectives.

b- La dimension abrogatoire des droits des procédures collectives des autres ordres juridiques de l'espace OHADA

Selon l'article 6 du traité UEMOA « Les actes arrêtés par les organes de l'Union pour la réalisation des objectifs du présent Traité et conformément aux règles et procédures instituées par celui-ci, sont appliqués dans chaque Etat membre nonobstant toute législation nationale contraire, antérieure ou postérieure ». De même l'article 47 du traité CIMA énonce : « Les juridictions nationales appliquent les dispositions du présent traité et les actes établis par les organes de la Conférence nonobstant toute disposition nationale contraire antérieure ou postérieure à ces textes ». Par ailleurs, il précise que le code des assurances figurant à l'annexe I du présent traité définit la législation unique des assurances138(*).

Ces principes annoncés dans les traités se retrouvent au niveau du droit dérivé. Ainsi, l'article 114 de la loi 2008-26 du 28 juillet 2008 dispose : « Sont abrogées, à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente loi, toutes dispositions antérieures contraires... » Il en est de même de l'article 71 de la loi-cadre portant règlementation bancaire dans l'espace UEMOA qui dispose en son alinéa 2 : « Sont abrogées à compter de cette date, toutes dispositions antérieures, contraires... ».

Au vu de ces dispositions, on peut en déduire que les droits des procédures collectives dérivés des traités communautaires s'inscrivent dans la même logique. Ils ont tous une dimension abrogatoire sur les textes antérieurs. Cette dimension abrogatoire est parfois explicitement affirmée dans le texte.

2- La portée abrogatoire des droits communautaires des procédures collectives

L'effet abrogatoire des droits communautaires des procédures collectives induit la primauté de ces droits sur les législations nationales (a) ainsi que la neutralisation de toute dispositions contraires (b).

a- La primauté des droits communautaires sur le droit national des Etats parties

L'applicabilité immédiate et directe des droits communautaires des procédures collectives aux systèmes juridiques nationaux oblige les Etats membres à assurer dans leur ordre interne la primauté de ces normes communautaires sur leurs sources de droit. En Europe, en l'absence d'une clause générale de supériorité du droit communautaire sur les droits nationaux dans les traités constitutifs, c'est la Cour de justice qui a posé le principe de primauté, en 1964, dans l'arrêt Costa contre ENEL, en se fondant sur une interprétation globale du système communautaire.

Le principe de primauté vaut pour l'ensemble des sources de droit communautaire et il s'applique à toutes les sources de droit interne. Un Etat ne peut donc pas invoquer une règle de son droit interne, même constitutionnelle, pour empêcher l'application d'une norme communautaire à condition, toutefois, que celle-ci soit entrée en vigueur.

C'est aux autorités nationales et notamment aux juges nationaux, qu'il appartient d'assurer la prévalence du droit communautaire en utilisant les moyens d'action dont ils disposent dans leurs ordres juridiques internes pour assurer le respect des règles nationales.

C'est ainsi que la cour de justice de l'UEMOA rappelle que « la primauté bénéficie à toutes les normes communautaires, primaires comme dérivées, immédiatement applicables ou non, et s'exerce à l'encontre de toutes les normes nationales, administratives, législatives, juridictionnelles ou même constitutionnelles, parce que l'ordre juridique communautaire l'emporte dans son intégralité sur les ordres juridiques nationaux...Ainsi le juge national, en présence d'une contrariété entre le droit communautaire et une règle de droit interne, devra faire prévaloir le premier sur la seconde en appliquant l'un et en écartant l'autre 139(*) ».

b- L'annihilation des dispositions contraires aux droits communautaires

L'effet abrogatoire des droits communautaires des procédures collectives annihile toutes les dispositions contraires. Cet état de fait s'inscrit dans la logique d'uniformisation du droit des procédures collectives. En effet, il aurait été inconcevable que les objectifs d'uniformisation du droit, de sécurité dans le droit des entreprises en difficulté puissent être compromis par des législations nationales pouvant empêcher sa concrétisation.

En raison du principe de la supranationalité posé par l'article 10 du traité OHADA, les Actes uniformes sont directement applicables et obligatoires sans passer par le truchement d'un quelconque instrument juridique national tel qu'un décret d'application, par exemple. Il s'ensuit qu'ils deviennent obligatoires nonobstant toutes dispositions contraires de droit interne. Cette interprétation apparaît d'autant plus autorisée qu'elle est confirmée en droit des procédures collectives par les dispositions finales de l'AUPC qui contiennent la formule selon laquelle sont abrogées toutes dispositions de droit interne qui leur sont contraires. Mais alors surgit une autre difficulté d'interprétation. Faut-il comprendre cette abrogation comme concernant tout texte ayant le même objet général que l'Acte uniforme ou simplement telles ou telles dispositions d'un texte national contraires à celles des Actes uniformes ayant le même objet précis.

Cette dimension abrogatoire se retrouve dans les autres législations communautaires à savoir les dispositions de l'UEMOA et de la CIMA.

B- L'imprécision des formules abrogatoires des droits communautaires des procédures collectives

La détermination de la portée abrogatoire des droits communautaires des procédures collectives doit se faire à partir de deux sources : d'une part, les article 10 du Traité de l'OHADA, 6 du traité UEMOA et du traité CIMA, d'autre part, les dispositions abrogatoires de chacun des droits des procédures collectives dérivés. Mais cette entreprise est quelque peu gênée par la rédaction maladroite de ces dispositions tant du point de vue formel (1) que matériel (2).

1- L'imprécision formelle des formules abrogatoires

Le principal objectif juridique recherché aussi bien dans l'OHADA, l'UEMOA que dans la CIMA est l'harmonisation des législations. Il s'agit de réduire les disparités quant aux textes applicables par l'élaboration d'une réglementation commune à l'ensemble des Etats membres en évitant une quelconque emprise des parlements nationaux sur ces dispositions communes ou communautaires adoptées.

Ces préoccupations sont d'ailleurs fort justement prises en compte par les traités créant les institutions concernées et traduites par des dispositions pertinentes dans des termes identiques. En effet, l'article 6 du traité UEMOA dispose : « Les actes arrêtés par les organes de l'Union pour la réalisation des objectifs du présent Traité et conformément aux règles et procédures instituées par celui-ci, sont appliqués dans chaque Etat membre nonobstant toute législation nationale contraire, antérieure ou postérieure » tandis que l'article 10 du traité OHADA prévoit que les actes uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les Etats parties nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antérieure ou postérieure. On retrouve les mêmes dispositions au niveau de l'article 47 du code CIMA qui dispose : « Les juridictions nationales appliquent les dispositions du présent traité et les actes établis par les organes de la Conférence nonobstant toute disposition nationale contraire antérieure ou postérieure à ces textes ».

Ces textes sont le siège de la règle de la primauté du droit communautaire. Si l'article 6 du traité de l'UEMOA est préservé aussi bien dans sa lettre que dans son esprit à travers les textes adoptés par les organes de l'union, il n'en est pas de même en ce qui concerne les actes uniformes de l'OHADA. En effet, à propos des actes uniformes, on constate que d'un acte à un autre, les formules d'abrogation ne sont pas les mêmes.

Si certains actes ont adopté une formulation très proche de celle de l'article 10 du traité OHADA, d'autres par contre s'en sont totalement éloigné, du moins dans la lettre du texte et par voie de conséquence dans la compréhension. C'est ce qui apparaît à la lecture de l'article 257 de l'AUPC qui dispose : « sont abrogées toutes les dispositions antérieures contraires à celles du présent acte uniforme. Celui-ci n'est applicable qu'aux procédures collectives ouvertes après son entrée en vigueur ».

Cette zizanie dans les formules d'abrogation révèle une absence de politique cohérente du point de vue de la méthode d'élaboration des droits des procédures collectives. Ce qui donne lieu à une confusion remarquable du fait de la divergence inévitable dans l'interprétation des formules d'abrogation.

Les textes de l'UEMOA ne s'embarrassent point de ce type de formules, l'article 6 du traité servant de fondement quant à la primauté. Ce qui d'ailleurs est l'attitude adoptée dans l'ancienne CEE devenue union européenne où tous les règlements finissent par la même formule uniforme suivante : « Le présent règlement est obligatoire dans tous ces éléments et directement applicable dans tout Etat membre ». Cette approche a l'avantage de la simplicité en même temps qu'elle permet de faire l'économie de divergences éventuelles d'un texte à un autre.

2- L'imprécision matérielle des formules abrogatoires

La première lecture que l'on peut avoir de la diversité des formules d'abrogation c'est la grande différence quant à leur signification. Relativement à l'OHADA, la Cour Commune de justice et d'Arbitrage (CCJA) a eu l'occasion de donner un avis140(*) consultatif sur le sens et la portée de tous ces textes. Selon cet avis, l'article 10 du traité OHADA contient bien une règle relative à l'abrogation du droit interne des Etats parties.

Ces dispositions abrogatoires se retrouvent également dans les autres droits communautaires. Si l'abrogation des droits nationaux apparaît clairement dans les dispositions communautaires, il n'en est pas de même en ce qui concerne l'abrogation entre dispositions communautaires. En d'autres termes, si les dispositions de droits communautaires pénètrent dans l'ordre juridique interne de manière directe et immédiate et en constituent le droit positif, peut-on considérer qu'une norme de droit communautaire puisse en abroger une autre ? A priori, une réponse négative s'impose. Mais dans le flou des textes, la question trouve toute sa pertinence. En effet, l'article 927 de l'AUPC dispose : « sont abrogées toutes les dispositions antérieures contraires à celles du présent acte uniforme... » Que renferme la notion de disposition ? S'agit-il d'une disposition de droit interne, ou de toute disposition contraire y compris une disposition communautaire.

En toute logique, on retiendra que les droits communautaires des procédures collectives proviennent d'instances autonomes et sont dotées d'une égale force juridique. Cette autonomie explique qu'il n'existe aucune hiérarchie entre elle et justifie le fait qu'aucun d'entre eux ne puisse en abroger un autre. Ils coexistent dans un même espace et ont vocation à régir souvent les mêmes situations sans qu'aucune préférence ne puisse être faite entre eux.

Section 2/ L'inexistence d'une hiérarchie entre les droits communautaires des procédures collectives

Les droits communautaires des procédures collectives émanent d'ordres juridiques qui sont l'expression de volontés étatiques et poursuivent des objectifs précis. Il s'agit de l'harmonisation du droit des affaires (OHADA), l'intégration économique (UEMOA) et l'unification du marché des assurances (CIMA). Ces droits des procédures collectives coexistent dans un même espace géographique et ne présentent aucun critère d'élection d'un droit au détriment d'un autre (paragraphe 1) lorsqu'il s'agit de solutionner un problème auquel ils ont tous apporté une réponse. Par ailleurs, les solutions traditionnelles de règlement des conflits restent souvent sans effet devant les situations contradictoires qu'ils peuvent provoquer (paragraphe 2).

Paragraphe 1/ L'absence d'un critère d'élection d'un droit communautaire des procédures collectives

L'autonomie des droits des procédures collectives dans l'espace OHADA se manifeste lors de la survenance d'un litige auquel tous ces droits ont vocation à s'appliquer. On note alors qu'il n'y a, a priori, aucun critère juridique (A) ou judiciaire (B) permettant au juge d'appliquer une norme au détriment d'un autre.

A- L'inexistence d'un critère juridique d'élection d'un droit communautaire des procédures collectives

Un ordre juridique apporte aux normes qui le composent la cohérence que leur confère le fait de relever de la même norme fondamentale, mais il les sépare en même temps des normes qui relèvent d'autres ordres, d'autres normes juridiques fondamentales, et cela d'autant plus qu'il est doté d'organes bien structurés qui seront tentés de faire prévaloir leurs propres normes. En d'autres termes, l'inexistence d'un critère juridique d'élection d'un droit communautaire des procédures collectives à l'occasion d'un litige tient son explication de l'indépendance des traités fondateurs des ordres juridiques auxquels ils appartiennent (1). Cette indépendance rejaillit de même sur les droits relevant de ces ordres juridiques (2).

1- L'indépendance des traités constitutifs des ordres juridiques de l'espace OHADA

L'indépendance des traités constitutifs des ordres juridiques qui se partagent l'espace OHADA se manifeste à travers l'inexistence d'une hiérarchie entre les différents traités les ayants institués (a). Cette situation trouve son explication dans plusieurs théories juridiques (b).

a- L'inexistence d'une hiérarchie entre les différents traités communautaires de l'espace OHADA

Pour préciser le problème, il convient de distinguer les normes juridiques communautaires et les sources formelles du droit communautaire. Par normes, on entend le contenu, la substance d'une règle élaborée selon les exigences procédurales de telle ou telle source formelle141(*). Une même norme peut donc être issue de plusieurs sources différentes.

S'il convient d'insister sur cette question de terminologie, c'est notamment que la solution du problème de la hiérarchie ne répond pas aux mêmes règles pour les normes communautaires que pour les sources du droit communautaire.

Le principe est que pour les sources, il n'existe pas de hiérarchie en droit communautaire. Que les sources formelles ne soient pas hiérarchisées n'oblige pas à considérer qu'il n'existe pas de hiérarchie entres les normes juridiques. Cette hiérarchie ne pourra évidemment pas être déduite de l'origine de ces normes puisqu'il s'agit de sources formelles. Mais elle peut résulter d'autres caractéristiques : le degré relatif de généralité des normes en cause, leur position chronologique142(*)...

Adapté au contexte du droit des procédures collectives, cela signifie que les différentes sources formelles de ce droit, c'est-à-dire les traités OHADA, UEMOA et CIMA ne peuvent pas êtres hiérarchisés. Par contre, les normes communautaires des procédures collectives dérivées de ces traités peuvent faire l'objet d'une hiérarchisation selon les critères de généralité ou de chronologie.

b- Le fondement de l'absence d'une hiérarchie entre les traités communautaires de l'espace OHADA

On appelle ordre juridique l'ensemble, structuré en système, de tous les éléments entrant dans la constitution d'un droit régissant l'existence et le fonctionnement d'une communauté humaine143(*). Les traités UEMOA, OHADA, CIMA ont donné naissance à des ordres juridiques.

Selon Hans Kelsen, le traité correspond au même phénomène en droit communautaire que le contrat en droit interne144(*). Partant de cette hypothèse, les traités de l'espace OHADA sont des manifestations de volontés étatiques séparées et indépendantes les unes des autres. A priori, aucun critère ne permet d'établir une hiérarchie entre eux puisqu'ils ont été conclus pour des objectifs précis et différents. « L'autonomie de la volonté » des Etats parties à tous ces traités rend chacun d'entre eux exécutoire et obligatoire à l'égard de ses destinataires. A ce propos, Kelsen affirme qu'en droit communautaire, le traité sert à constituer un ordre juridique autonome dont les règles sont posées par les parties et s'imposent à elles.

On peut ainsi affirmer que les traités OHADA, CIMA et UEMOA existent de manière autonome et obligatoire pour les Etats signataires. C'est ce qui justifie qu'on ne puisse établir de hiérarchie entre eux ni supposer l'abrogation d'une disposition de droit communautaire par une autre.

2- L'indépendance des droits dérivés des traités constitutifs des ordres juridiques de l'espace OHADA

L'indépendance des droits dérivés des traités constitutifs des ordres juridiques dans l'espace OHADA se traduit par l'absence de liens entre eux (a) et leur égalité partagée (b).

a- L'absence de liens entre les sources des droits des procédures collectives

Dans l'ordre juridique et dans les Etats démocratiques la position particulière de chaque norme dans la hiérarchie des normes est fonction du degré de souveraineté de l'organe qui l'élabore. On ne trouve rien de tel dans l'ordre communautaire. Cet ordre est constitué d'Etats souverains juxtaposés, non soumis à un pouvoir politique qui leur serait supérieur. Dès lors l'ordre juridique communautaire ne peut être qu'un ordre conventionnel formé à partir d'abandons partiels de souverainetés des Etats, consenti et accepté par eux. C'est ce qui explique qu'il n'existe pas de liens entre les sources des droits communautaires des procédures collectives au sein de l'espace OHADA. A priori, ils s'appliquent à des personnes bien déterminées même si des recoupements sont possibles. Par ailleurs les objectifs qu'ils poursuivent sont différents ; de plus les ordres juridiques dont ils font partis n'entretiennent dans la pratique aucun rapport.

b- L'égalité des sources du droit communautaire

La doctrine refuse en général toute idée d'égalité entre les diverses sources du droit communautaire145(*). Cependant, le droit communautaire est toujours élaboré directement ou indirectement par les Etats. Ce sont donc des souverainetés qui s'expriment à travers des organisations communautaires qui produisent des règles de droit dans le but de réaliser des objectifs précis.

Du point de vue de la formation des divers ordres juridiques de l'espace OHADA, on peut noter que les procédés sont les mêmes. Ensuite les droits secrétés par ces organisations communautaires poursuivent des objectifs différents même si ils ont parfois vocation à intervenir dans des domaines identiques. Mais cela n'empêche pas qu'ils sont tous revêtus de la même autorité. Leur coexistence dans un même espace géographique voire normatif ne peut manquer de créer certaines difficultés d'autant plus qu'il n'existe aucun critère judiciaire d'élection de l'un d'entre eux au détriment des autres.

B- L'absence d'un critère judiciaire d'élection d'un droit communautaire des procédures collectives

L'absence d'un critère d'élection d'un droit des procédures collectives au sein de l'espace OHADA s'illustre lors des litiges soulevés devant le juge. Etant donné qu'il n'existe aucun critère juridique permettant d'appliquer un droit unique des procédures collectives, il paraît difficile au juge d'opérer un choix d'autant plus qu'il existe plusieurs juridictions chargées de l'application des droits communautaires (1). Cette situation n'est pas sans produire certaines conséquences (2).

1- L'existence de juridictions autonomes chargées de veiller à l'application des droits communautaires

La part de plus en plus importante prise par le droit dans certaines organisations d'intégration se manifeste par la création d'institutions juridictionnelles chargées d'interpréter de manière uniforme le droit communautaire. Ainsi, à côté du juge national chargé d'appliquer le droit communautaire, se trouve le juge communautaire chargé d'interpréter le droit communautaire.

a- Les difficultés pour le juge national de concilier les droits communautaires des procédures collectives

Les droits des procédures collectives sont marqués par l'intervention du juge. Quelle que soit la part importante de l'autorité administrative, il n'en demeure pas moins que le juge reste un élément central de toute procédure collective. Les sources du droit des procédures collectives émanent d'organisations communautaires qui ont toutes institué des juridictions chargées de veiller à la bonne application de leurs droits. Dans tous les cas, il revient au juge national d'appliquer les droits des procédures collectives. L'hypothèse la plus simple serait celle d'un litige dont la solution se trouve au niveau d'un seul texte communautaire. Dans ce cas, l'application de la norme communautaire ne posera pas de problème. Cependant, il peut arriver que le juge soit confronté à des situations faisant appel à l'application de plusieurs droits communautaires. Un conflit de normes peut alors se poser à lui. L'expression « conflit de normes » ne présente pas d'analogie avec la technique dite de conflit des lois, habituellement utilisée en droit international privé. L'expression désigne ici l'éventuelle incompatibilité ou même la simple coexistence entre plusieurs dispositions des procédures collectives émanant de l'AUPC, de la loi bancaire, du code CIMA ayant vocation à régir différemment une même situation. La difficulté à ce moment paraît insurmontable ; et même si le juge national parvient à régler la question, l'éventualité d'un recours devant la juridiction communautaire est à envisager. Cependant, il faut noter que les compétences de celle-ci sont limitées à son propre ordre juridique.

b- Le cloisonnement des juridictions communautaires dans leurs ordres juridiques respectifs

L'Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires s'est doté d'un Cour commune de justice et d'arbitrage. Celle-ci est chargée de l'application du traité, des règlements pris pour son application et des actes uniformes146(*). Par ailleurs, l'UEMOA a aussi institué une Cour de justice. Celle-ci est dotée de fonctions juridictionnelles147(*) et consultatives. La CIMA quant à elle, délègue la bonne application de son code aux juridictions nationales148(*).

Relativement au droit des procédures collectives, il faut noter que son application incombe au juge national. Cependant, dans le cadre d'un conflit, les juridictions communautaires peuvent être amenées à se prononcer sur l'application ou l'interprétation d'une norme communautaire. Là encore, le problème de l'élection d'un critère n'est pas réglé puisque chaque juridiction communautaire a vocation à n'interpréter que le droit relevant de son ordre juridique. Certes la coexistence de règles aptes à régir une même situation n'est pas inconnue en droit des procédures collectives. Dans cette situation aucune juridiction communautaire ne peut s'arroger le pouvoir d'opérer un choix entre les normes en concurrence. La raison est qu'il revient au droit communautaire de fixer sa sphère d'applicabilité matérielle. Aucune norme communautaire ne peut davantage régler la question de l'applicabilité du droit communautaire produit par les autres institutions que celle qui a produit la norme. Ainsi il ne revient pas à la CCJA ou à la Cour de justice de l'UEMOA de déterminer l'applicabilité ou non d'une norme de procédure collective qui ne relève pas de son dispositif.

2- Les conséquences de l'absence d'un critère judiciaire d'élection d'un droit des procédures collectives

Le problème du choix du droit applicable se posera au juge chargé de trancher le litige. En effet, des contrariétés peuvent naître de cette situation et créer dans le même temps une jurisprudence hétérogène relative à une question touchant le droit des procédures collectives (a). Par ailleurs, le droit des procédures collectives étant un droit étroitement lié à l'économie des entreprises, les contrariétés relatives à la multiplicité des droits applicables peuvent avoir des conséquences fâcheuses sur le sort des créanciers, de l'entreprise et de manière générale sur les objectifs d'uniformisation de ce droit (b).

a- La possibilité d'existence d'une jurisprudence éparse et contradictoire

La possibilité d'existence d'un litige pouvant être réglé par plusieurs dispositions des droits communautaires des procédures collectives n'est pas une hypothèse d'école. A ce moment, le juge devra rendre une décision sur la base d'une règle de droit. Si un problème de choix de normes contraires se pose au juge, il n'en demeure pas moins qu'il devra forcément opérer ce choix au risque de commettre un déni de justice. Sur la base de quelles considérations fera-t-il ce choix ? La réponse ne se trouve certainement pas dans des principes juridiques puisqu'il n'y a aucun critère permettant de reléguer une norme communautaire parmi d'autres qui ont vocation à s'appliquer. Cette situation peut alors conduire à l'existence d'une jurisprudence hétérogène relative à une question de droit des procédures collectives. En effet, si pour un même problème il existe une diversité de solutions proposées par plusieurs droits sans qu'un choix puisse être fait, on retrouvera plusieurs solutions d'un juge à un autre.

Si cet inconvénient ne se limitait qu'à une disparité juridique, les conséquences seraient moins fâcheuses, mais il peut s'étendre à des domaines plus importants, notamment les objectifs du droit des procédures collectives.

b- Les atteintes aux objectifs du droit des procédures collectives

Les objectifs des droits des procédures collectives varient selon qu'on convoque le droit OHADA, le droit UEMOA, ou le droit CIMA. Pour l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, la finalité est expressément indiquée par l'intitulé du texte : il s'agit de l'apurement du passif. L'UEMOA n'étant pas une organisation d'intégration juridique, c'est par ricochet qu'elle a eu à légiférer dans le cadre de ses objectifs car une intégration économique nécessite souvent une intégration juridique. Notons simplement que son objectif d'intégration économique justifie une uniformisation de la législation bancaire, d'où l'élaboration d'un droit des procédures collectives adapté aux sociétés de banque. Pour la conférence interafricaine des marchés d'assurance, l'objectif réside dans l'unification des marchés d'assurance. C'est aussi ce qui justifie une incursion dans la production de normes adaptées à ce genre de société et identiques pour tous les Etats membres.

Dans tous les cas, quelle que soit la finalité poursuivie, il demeure toujours que le droit des procédures collectives est lié à l'économie. La pluralité de droits ayant vocation à s'appliquer et pouvant créer des contrariétés et des incertitudes sur l'application de ce droit dans l'espace OHADA peut conduire à des situations fâcheuses tant pour les créanciers que pour les débiteurs. Au final, c'est la confiance accordée au juge qui est sapée par ces incertitudes. Au demeurant, c'est l'objectif d'uniformisation du droit des procédures collectives dans l'espace OHADA qui est battue en brèche.

Cela ajoute, bien sûr, à la confusion et à la ruine des fondements de l'harmonisation recherchée d'autant plus que l'interprétation divergente même de lois uniformes peut conduire à une résurgence inéluctable des conflits de lois149(*).

Paragraphe 2/ Les possibilités de règlement des conflits de droits communautaires

Les conflits entre les droits communautaires des procédures collectives paraissent inévitables en raison du chevauchement de leur domaine d'intervention. Pour résoudre ces conflits des solutions préventives ont été envisagées (A) à côté des méthodes curatives (B).

A- Les solutions préventives

Au titre de la prévention des conflits, on notera l'institution d'un système de consultation permanente entre les différentes instances ayant en charge l'élaboration des droits des procédures collectives (1) ainsi que l'intervention des instances nationales (2).

1- L'institution d'un système de consultation permanente entre les différentes instances ayant en charge l'élaboration des normes de procédures collectives

La méthode préventive consiste à instituer un système de consultation permanente entre les différentes instances ayant en charge l'élaboration des normes. Aucun lien organique n'existant entre les instances de décision des organisations d'intégration, il n'y a pas de rapport hiérarchique entre elles et, de ce point de vue, seules des concertations, fussent-elles informelles, pourraient permettre de prévenir les conflits éventuels et y apporter des solutions en amont.

C'est ainsi que l'article 13 du traité UEMOA dispose en son alinéa 1er : « L'Union établit toute coopération utile avec les organisations régionales ou sous-régionales existantes. Elle peut faire appel à l'aide technique ou financière de tout Etat qui l'accepte ou d'organisations internationales, dans la mesure où cette aide est compatible avec les objectifs définis par le présent Traité ». Cette disposition montre d'une certaine manière la volonté de l'UEMOA d'établir une concertation avec les autres organisations d'intégration. Cette mesure évitera certainement quelques conflits relatifs à la concurrence de normes. En effet, en application de l'article 2 du traité OHADA150(*), le Conseil des Ministres de l'OHADA a inscrit sept nouvelles matières à harmoniser dont le droit bancaire et le droit de la concurrence151(*).

2- Les recours préjudiciels

Une autre solution que le juge peut adopter consiste à introduire un recours préjudiciel avant de rendre sa décision. Cette option présentera l'avantage d'avoir certainement un point de vue uniforme sur une question de droit. Cependant, on se demande bien sur quelle base le juge communautaire écartera un texte au profit d'un autre ? Son intervention ne pourra se limiter qu'au droit dont la bonne interprétation lui incombe.

En outre, les juridictions communautaires ne peuvent introduire entre eux des recours préjudiciels. En effet, aucune liaison n'est établie entre les juridictions d'intégration régionale. Dans son avis du 2 février 2000152(*) rendu à propos du projet de code communautaire des investissements, la Cour de justice de l'UEMOA faisait justement remarquer d'une part que la Cour commune de justice et d'arbitrage « ne peut saisir la cour de justice de l'UEMOA en renvoi préjudiciel parce qu'elle n'est pas une juridiction nationale » et d'autre part que l'interprétation par la cour de justice de l'UEMOA des actes uniformes de l'OHADA porterait atteinte à « l'exclusivité de la Cour commune de justice et d'arbitrage de l'OHADA dans l'application et l'interprétation des actes uniformes ». Plus loin la juridiction affirme « la nécessité d'une concertation entre les deux organisations en vue de la coordination de leur politique normative et de leur juridiction respective ».

B- Les solutions curatives

Il s'agit d'abord de l'application distributive des droits communautaires des droits des procédures collectives lors des litiges soumis au juge (1). Cependant, on notera que dans le cas d'une concurrence entre ces différents droits, cette application peut s'avérer impossible (2).

1- L'application distributive des droits communautaires des procédures collectives

L'application distributive des droits communautaires des procédures collectives suppose l'hypothèse d'un conflit mettant en présence plusieurs normes qui s'appliquent à certaines questions bien précises (a). Mais quelle serait l'attitude du juge devant un litige ayant vocation à être réglé par plusieurs droits communautaires (b) ?

a- La possibilité d'application de normes non concurrentes

Il peut arriver qu'un litige né du droit des procédures collectives fasse appel à l'application de plusieurs normes communautaires différentes. Si l'application de ces normes peut se faire de manière distributive, la solution du litige ne posera pas de problème pour le juge puisqu'il s'agira d'appliquer chaque norme à la question qui l'intéresse et à condition que cette question n'ait pas fait l'objet d'une réglementation par un autre droit et qu'elle n'entre pas en contradiction avec les autres solutions apportées par les autres droits. Cependant une situation aussi simple se produit rarement et le plus souvent, le juge est dans l'impossibilité de procéder à une application distributive des droits communautaires des procédures collectives.

b- L'impossibilité d'application de la règle en cas de normes concurrentes

Cette situation envisage l'hypothèse d'un litige où les droits communautaires des procédures collectives ne peuvent être appliqués de manière distributive. En d'autres termes, ils revendiquent tous leur application aux mêmes éléments du litige. On perçoit que le conflit devient inextricable lorsque ces normes apportent des solutions différentes aux mêmes questions qui sont posées pour la solution du litige. Rationnellement, le juge national ne peut appliquer des règles inconciliables ou contradictoires pour solutionner le litige dont il est saisi. La saisine des juridictions communautaires ne peut en outre que cristalliser le conflit puisqu'on voit mal comment la juridiction communautaire pourrait écarter la solution du droit qu'elle est chargée d'appliquer et ou d'interpréter. La seule solution serait pour le juge national, de recourir aux règles de droit international public portant sur les conflits de convention.

2- L'inefficacité des méthodes de règlement de conflit des normes

La singularité des droits communautaires des procédures collectives réside dans la coexistence dans un même espace juridique de plusieurs ordres juridiques dont chacun revendique sa suprématie. La situation du juge national s'en trouve davantage compliquée. Ainsi, ce juge appliquant les dispositions de l'Acte uniforme pourrait voir sa décision combattue à la suite d'un recours en manquement devant une juridiction communautaire. S'il adoptait l'attitude inverse, la même décision pourra être attaquée devant la CCJA pour non application d'un Acte uniforme, véritable impasse même si le juge a eu recours à une règle de rattachement ou règle de conflit éventuelle.

a- Les difficultés du choix de la règle de conflit

Quelle pourrait être la règle de conflit que le juge pourrait choisir? La loi spéciale dérogera-t-elle à la loi générale ? La loi postérieure l'emportera-t-elle sur la loi antérieure ?

Si le choix de la règle de conflit selon laquelle la loi spéciale déroge à la loi générale est fait par le juge, on se demande bien sur quel fondement reposera un tel choix. En effet, si le droit OHADA est considéré comme le droit commun des procédures collectives dans l'espace OHADA, on comprendrait alors que l'ensemble des règles organisant le droit des entreprises en difficulté relève de manière générale de l'acte uniforme ; exceptionnellement, des dérogations sont admises en ce qui concerne les sociétés de banque et les sociétés d'assurance. Dans ce cas, le droit commun est le droit OHADA et les droits spéciaux sont la règlementation bancaire et le code CIMA. La seule difficulté qui a trait à cette argumentation, c'est qu'on ne saurait définir de manière exacte les limites du droit commun et du droit spécial. Ainsi dans une autre approche, on pourrait considérer qu'il existe plusieurs droits communs des procédures collectives : celui des banques, celui des sociétés commerciales et celui des sociétés d'assurance. Cette démarche peut être illustrée au regard des différentes dispositions des droits communautaires des procédures collectives. En effet, contrairement au code CIMA, la législation UEMOA renvoie dans certains cas à l'AUPC. Faut-il alors considérer que le droit UEMOA des procédures collectives constitue le droit commun pour les banques et le droit OHADA le droit spécial ? Toutes ces considérations peuvent entraver le choix de la norme de conflit.

Par ailleurs, le choix de la règle selon laquelle la loi postérieure prime sur la loi antérieure peut s'avérer difficile pour le juge. En tenant compte de la chronologie, le droit OHADA des procédures collectives est postérieur au code CIMA. Partant de cet état de fait, les commentateurs du code CIMA ont estimé que le droit OHADA déroge au droit CIMA en raison de son caractère plus récent. En application de cette théorie, ce serait la législation CIMA qui dérogerait au droit OHADA en ce qu'elle est postérieure à celle-ci. Ce principe ne semble pas applicable au droit UEMOA puisque la législation bancaire est postérieure à celle de l'OHADA.

Pour le juge national, le choix du droit applicable semble difficile et même dans les cas où ce choix est fait, il se montre plutôt inopérant.

b- Le caractère inopérant des règles de conflit

A l'évidence, compte tenu de la revendication de la primauté de ses règles par chaque système doté par ailleurs d'une juridiction suprême, toutes ces solutions basées sur la méthode conflictuelle à mettre en oeuvre par une juridiction nationale paraissent totalement inefficaces et inopérants.

Ainsi, quand la loi bancaire153(*) autorise la compensation effectuée par la chambre de compensation et qu'à l'opposé l'AUPC154(*) déclare inopposable la compensation dans la procédure collective, le juge national devient nécessairement impuissant car quelle que soit sa décision, l'une des parties pourrait obtenir la remise en cause de ce jugement à la faveur du cadre juridictionnel existant.

Par ailleurs, les difficultés de déterminer les contours de chaque droit communautaire des procédures collectives rendent la tâche plus ardue pour le juge. En effet, les domaines d'application de ces droits des procédures collectives restent flous, les personnes assujetties à ces droits sont quelque part difficiles à déterminer et les différents recours dont disposent les particuliers pour neutraliser les décisions judiciaires sont nombreux.

CHAPITRE II/ Les manifestations de l'autonomie dans les droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA

Les droits communautaires des procédures collectives sont autonomes. Cette autonomie ne tient pas seulement à leurs sources ou aux institutions qui les ont crées. Elle se manifeste aussi dans les différents objectifs qu'ils poursuivent (Section 1) mais aussi dans les rapports qu'ils entretiennent entre eux (Section 2).

SECTION 1/ Les objectifs des droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA

Les droits communautaires des procédures collectives poursuivent plusieurs objectifs. Dans l'ensemble, leur préoccupation majeure reste le règlement des difficultés des entreprises. Cependant, cette préoccupation s'opère de différentes manières d'un droit des procédures collectives à un autre. Par ailleurs, l'objectif de règlement des difficultés des entreprises cache d'autres finalités qui, elles aussi, sont différentes selon les différents droits des procédures collectives. C'est ainsi qu'on distingue différents choix politiques des droits communautaires des procédures collectives (Paragraphe 1) qui se manifestent tout aussi différemment dans la mise en oeuvre des procédures collectives (Paragraphe 2).

Paragraphe 1/ Les choix politiques des droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA

On distingue plusieurs choix politiques des droits communautaires des procédures collectives. Si pour les procédures collectives du droit OHADA, le principal choix politique est l'apurement du passif (A), pour les droits des procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance, l'objectif primordial reste la prévention des risques systémiques (B).

A- Des procédures destinées à apurer le passif

L'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives contient un ensemble de dispositions traitant des possibilités de redressement de l'entreprise, de liquidation des biens et de sanctions à l'égard du débiteur défaillant. A la lecture de toutes ces dispositions, on remarque que l'objectif premier de l'AUPC est l'apurement du passif (1). Cet objectif est clairement affirmé dans le texte de l'Acte uniforme et mérite quelques éclaircissements (2).

1- L'apurement du passif : choix principal de l'AUPC

Le droit des procédures collectives du droit OHADA est consigné dans un acte intitulé Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif. L'intitulé de l'acte uniforme renseigne sur son principal objectif à savoir l'apurement du passif (a). Cependant l'examen des dispositions de l'acte uniforme montre qu'il accorde un certain intérêt au redressement des entreprises viables (b).

a- Un choix clairement affirmé

La finalité affichée par l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif est d'aboutir à l'apurement collectif du passif. C'est ce qui ressort explicitement de l'intitulé de l'acte uniforme mais également de son article 1er qui dispose : « Le présent acte uniforme a pour objet d'organiser les procédures collectives de règlement préventif, de redressement judiciaire et de liquidation des biens du débiteur en vue de l'apurement collectif de son passif... ». Cet objectif met en première ligne l'intérêt des créanciers. A ce niveau on note l'effort de clarification de la situation des créanciers à travers notamment leur classement et l'existence de diverses possibilités d'intervention dans la procédure.

L'évolution du droit des procédures collectives s'est faite dans le sens d'une atténuation du caractère personnel de façon à donner plus d'importance à la dimension patrimoniale. En d'autres termes, si la sanction du débiteur défaillant est encore prise en compte par le droit des procédures collectives, c'est en fait le désintéressement des créanciers qui présente plus d'intérêt aujourd'hui.

b- Les raisons du choix de l'apurement du passif

Le règlement des créanciers a toujours constitué un objectif primordial du droit des procédures collectives quelle que soit l'évolution de cette matière155(*). La raison en est simple, la cessation des paiements étant liée à la défaillance du débiteur à l'égard d'un ou plusieurs créanciers. Autrement dit, pendant longtemps le droit des procédures collectives a eu pour objet de régler les relations entre créanciers et débiteurs. Au-delà de la répression, il s'agit donc de résoudre une difficulté d'ordre patrimonial. En effet, le débiteur défaillant n'est plus en mesure d'exécuter ses obligations envers ses créanciers. L'évolution du droit des obligations dans le sens patrimonial a ainsi influé sur le droit des procédures collectives. Il s'agit de satisfaire les intérêts des créanciers.

Le droit romain a, par exemple, connu différentes procédures collectives156(*). Si dans un premier temps, celles-ci se sont exercées sur l'homme aboutissant parfois au partage du corps du débiteur entre les créanciers, dans un deuxième temps il a été admis que l'on puisse saisir l'ensemble des biens du débiteur pour organiser une vente globale. Cette conception de la procédure collective traversera les frontières et sera véhiculée tout au long de l'histoire où elle sera adoptée et adaptée en France157(*). Sa traduction moderne a pour siège l'actuelle procédure de liquidation judiciaire. L'optique est alors liquidative, c'est-à-dire qu'il convient de tirer le meilleur prix des actifs du débiteur pour désintéresser au mieux les créanciers.

Si l'intérêt des créanciers est favorisé par rapport au redressement de l'entreprise, celui-ci est cependant loin d'être négligé.

2- Les choix secondaires de l'AUPC

Bien vrai que l'Acte uniforme semble privilégier l'apurement du passif dans les procédures collectives, il n'en demeure pas moins qu'il prête une certaine attention au sauvetage de l'entreprise (a) et accorde une place résiduelle (b) au sort de l'emploi.

a- Le sauvetage de l'entreprise

L'apurement du passif semble être l'objectif premier de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif. Cependant une importance est accordée au redressement de l'entreprise. Ainsi, l'article 1er de l'AUPC dispose : « Le règlement préventif est une procédure destinée à éviter la cessation des paiements ou la cessation d'activité de l'entreprise et à permettre l'apurement de son passif au moyen d'un concordat préventif...Le redressement judiciaire est une procédure destinée à la sauvegarde de l'entreprise et à l'apurement de son passif au moyen d'un concordat de redressement... ». On note que les objectifs d'apurement du passif et de redressement de l'entreprise sont également visés par l'acte uniforme.

Cet objectif de redressement de l'entreprise apparaît à travers l'institution de plusieurs procédures curatives. On remarque de ce fait que l'intervention judiciaire a de plus en plus pour objet de favoriser le redressement de l'entreprise, tout en apurant au moins partiellement le passif. Cette dimension est remarquable dans la procédure de règlement préventif ou le juge impose des délais au créancier et prononce la suspension des poursuites à l'égard du débiteur.

En France, plutôt que d'opérer un traitement un traitement des difficultés des entreprises, la doctrine a pensé qu'il serait préférable de prévenir ces mêmes difficultés158(*) avant même que l'entreprise ne soit en cessation des paiements. Il s'agit désormais d'anticiper la défaillance de l'entreprise afin d'augmenter les chances de sauvegarde de cette dernière. L'anticipation est donc devenue l'un des moteurs du droit économique des entreprises en difficulté.

b- Une protection résiduelle accordée à l'emploi

De manière générale, la règle de droit intègre l'économie en raison de sa nature particulière qui fait qu'elle s'imprègne d'autres règles sociales. C'est l'expression du « phénomène d'inter-normativité » décrit par le Pr. Carbonnier et par lequel « la règle de droit est capable de s'approprier n'importe quelle autre règle sociale, mais...l'inverse n'est point vrai159(*) ». Cette manifestation permet de comprendre pourquoi la défaillance des entreprises ne relève pas du monopole du droit. Il y a en effet une dimension économique et sociale qui est prise en compte.

Cependant, on remarque que l'acte uniforme se s'attarde point sur ces considérations. S'il est vrai que le redressement de l'entreprise profite certes à l'emploi, il n'en demeure pas moins que l'acte uniforme lui accorde une place de moindre importance. En effet, au regard des dispositions de l'acte uniforme on note que les rares fois ou l'acte uniforme intervient en faveur des salariés c'est juste pour les conforter dans des droits qu'ils tiennent de la législation du travail. La sauvegarde de l'emploi ne constitue donc pas un objectif primordial de l'acte uniforme quand bien, même la défaillance d'une entreprise entraîne souvent des conséquences désastreuses au plan social, surtout dans les pays de l'espace OHADA ou le taux de chômage est assez élevé.

B- Des procédures destinées à atténuer les risques systémiques

Les sociétés de banque et d'assurance mènent des activités commerciales qui présentent des particularités comparées aux autres activités des sociétés commerciales. Le plus souvent elles sont vecteurs de crédit pour les sociétés commerciales et supportent des risques pour elles. Par ailleurs, leurs activités sont teintées d'une forte dimension financière. Lorsque des difficultés surviennent à leur niveau, ce n'est pas seulement la société de banque ou d'assurance qui supporte les conséquences de la procédure car celles-ci peuvent s'étendre à d'autres sociétés en relation avec elle. Ce qui peut créer des situations de perturbation de l'économie. C'est pourquoi il est apparu nécessaire de créer un droit économique des procédures collectives adapté aux défaillances des banques et des sociétés d'assurance (1). D'autre part, ce droit économique des procédures collectives doit être apprécié au regard de son efficacité (2).

1- La nécessité d'un droit spécial adapté aux défaillances des entreprises de banque et d'assurance

La nécessité d'un droit des procédures collectives adapté aux défaillances des sociétés d'assurance et de banque a conduit au concept de droit économique des procédures collectives (a). Cette conception trouve sa justification dans les rapports que l'économie entretient avec le droit d'une manière générale et particulièrement avec le droit des procédures collectives (b).

a- Vers une conception économique du droit des procédures collectives

Le droit des procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance repose sur un objectif économique majeur, la sauvegarde des entreprises de banque et d'assurance. Pour atteindre cet objectif, le législateur donne priorité à l'anticipation plutôt qu'au traitement de la défaillance. Il est en effet peu contestable que l'anticipation présente plus d'efficacité en terme de sauvegarde même si elle donne lieu à moins de réussite en nombre de procédures ouvertes.

A cet effet, on note chez l'autorité administrative une volonté d'encadrer au mieux les procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance. Cette autorité administrative est la commission bancaire de l'UEMOA et la commission régionale de contrôle des assurances. L'aspect préventif des difficultés de ces entreprises est pris en compte par leurs législations à travers l'obligation de certains ratios auxquels elles sont soumises. L'objectif de redressement est présent dans toutes les dispositions antérieures à l'ouverture d'une procédure collective. On retrouve ainsi le pouvoir d'injonction de l'autorité administrative lorsqu'une banque ou une société d'assurance agit de manière à porter atteinte à sa liquidité, les panoplies de sanctions destinées aux entreprises ayant enfreint les règles prudentielles, de même que l'assistance technique qui leur est apporté en cas de difficulté c'est-à-dire la nomination d'un administrateur provisoire par le ministre des finances.

L'objectif de redressement de l'entreprise trouve sa justification dans des considérations d'ordre économique.

b- La justification d'une conception économique du droit des procédures collectives

Dire de l'économie qu'elle sert de justification au droit de la défaillance des entreprises a deux significations qui ne s'opposent pas mais au contraire se complètent. Selon une première signification, l'économie, au sens de l'activité humaine de production, de distribution, de consommation, correspond à la cause, à la raison d'être du droit des défaillances d'entreprises. Dans un deuxième sens, qui est plus moderne, l'économie, en tant que science sociale, permet de justifier l'existence d'un corps de règles juridiques spécifiquement consacré à la défaillance des entreprises

Sur un plan historique le droit des procédures collectives s'intègre dans le droit marchand qui a pour objet les échanges économiques. Ces derniers, selon qu'ils se développent ou régressent suscitent des innovations sur le plan juridique. C'est donc la conjoncture économique qui provoque un besoin de règles juridiques nouvelles en cas de défaillance d'une société de banque ou d'assurance160(*). Ces sociétés mènent des activités financières et sont sources de crédit pour d'autres sociétés commerciales aux activités « ordinaires ». L'ouverture d'une procédure collective à leur égard mettrait en péril l'épargne publique et pourrait provoquer des risques systémiques par le biais des faillites en chaîne. Par ailleurs, la protection de ces entreprises suscite un autre intérêt : celui de la protection du crédit, crédit en tant que confiance accordée par les particuliers aux institutions financières, mais aussi en tant que moteur essentiel de la vie des affaires. Il est donc nécessaire de maintenir au mieux la survie de ces entreprises ou du moins de créer un corps de règles spécifiques au traitement de leurs difficultés. Ces règles permettraient de prendre en compte les retombées économiques liées à la liquidation d'une entreprise de banque ou d'assurance.

2- L'efficacité d'un droit économique des procédures collectives

L'efficacité du droit économique des procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance s'apprécie grâce à son évaluation. Celle-ci peut se faire à deux niveaux : au niveau économique (a) et au niveau juridique (b).

a- L'évaluation économique de l'efficacité du droit des procédures collectives

Objet situé à l'intersection du droit et de l'économie, le droit des procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance doit être pensé en fonction des effets qu'il exerce sur la vie des entreprises. Ce point n'échappe pas à un ensemble de travaux qui cherchent à identifier de quels mécanismes d'incitation sont dotées les procédures collectives pour encourager les acteurs d'une économie de marché à la prise de décisions saines qui démontrent que les moyens dont se dotent les procédures collectives doivent être équilibrés afin de ne pas apparaître trop pénalisants et décourager la prise de risque inhérente à la stratégie d'entreprenariat et au bon fonctionnement de l'économie de marché161(*).

Une évaluation sensée de l'efficacité économique du droit des procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance doit être pensée en tenant compte du rôle de l'Etat, des autorités administratives et du jeu des règles et des institutions publiques. Leur présence façonne le marché et évite la transformation du jeu économique en un état de nature ou chacun chercherait à protéger ses intérêts.

b- L'évaluation juridique de l'efficacité du droit des procédures collectives

Le système juridique du droit des procédures collectives ayant pour objectif l'atténuation des risques systémiques repose plus sur l'intervention de l'autorité administrative que judiciaire. Il est donc essentiel de vérifier si cette organisation juridictionnelle est efficace. A ce propos, le Pr. Frison-Roche note que « l'évaluation de l'organisation juridictionnelle et des procédures, dans leur adéquation à réagir efficacement, n'est pas un pan parmi d'autres de l'évaluation, elle est la condition de pertinence de tout autre mesure ». L'efficacité du droit des procédures collectives passe par la sécurité produite par la règle qui suppose que ceux qui l'appliquent (juge ou administration) soient impartiaux et compétents.

Ce qu'on constate dans les droits des procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance, c'est l'omniprésence de l'autorité administrative. Ce dernier est au début et à la fin de la procédure. Cette situation porte atteinte souvent à la célérité de la procédure. En effet, les délais de réaction de l'autorité administrative sont souvent longs dans la pratique et entravent parfois l'action du juge et des parties. En outre, sur plusieurs questions sensibles du droit des procédures collectives, l'autorité administrative est la seule à disposer d'un véritable pouvoir d'action qui en plus est discrétionnaire.

Paragraphe 2/ Les manifestations des choix politiques dans la mise en oeuvre des procédures collectives

Les droits communautaires des procédures collectives dans l'espace OHADA ne poursuivent pas les mêmes objectifs. Leurs choix politiques sont différents au regard de leurs finalités respectives. Cette différence de choix politiques se manifeste à travers le rôle de l'organe judiciaire dans la procédure collective d'apurement du passif (A) et celui des organe de régulation dans les procédures applicables aux banques et aux sociétés d'assurance (B).

A- L'office du juge dans les procédures collectives d'apurement du passif

Les procédures collectives sont, de manière générale, imprégnées d'une forte dimension judiciaire. En d'autres termes le juge y occupe une place très importante. En effet, étant le garant des intérêts individuels, il intervient fréquemment dans le règlement des difficultés des entreprises. C'est ce qui justifie les larges pouvoirs qui lui sont conférés (1). Cependant, lors du déroulement de la procédure collective, on remarquera que le juge exercera ses pouvoirs avec d'autres acteurs de la procédure, d'où l'intérêt attaché au rôle des créanciers (2).

1- Les pouvoirs étendus du juge dans les procédures collectives d'apurement du passif

Dans les procédure collective d'apurement du passif, de larges pouvoirs d'appréciation sont reconnus au juge (a). Cette liberté d'appréciation va jusqu'à conférer à certaines de ces décisions une dimension normative (b).

a- Les libertés d'appréciation du juge dans les procédures collectives d'apurement du passif

Les procédures collectives d'apurement du passif tournent essentiellement autour de l'intervention du juge. Celui-ci bénéficie d'une grande liberté d'appréciation dans la procédure. En grande partie, le rôle du juge consiste à faire régner, ou tout au moins à faire prévaloir, l'égalité et la justice dans les procédures collectives d'apurement du passif. C'est à ce titre qu'on appréciera l'intervention judiciaire tout au long de la procédure. En effet, le juge interviendra dans la prévention des difficultés de l'entreprise ainsi dans les conditions d'ouverture de la procédure. Il sera également face au débiteur et aux créanciers.

Dans les procédures préventives, on notera que le juge joue un rôle très important notamment dans le règlement préventif. En effet, il revient au juge de se prononcer sur l'opportunité ou non d'ouverture d'une procédure de règlement préventif. Le cas échéant, il lui reviendra également de se prononcer sur l'homologation ou non du concordat ainsi que sur la désignation de certains organes de la procédure162(*).

Il n'y a pas lieu d'insister sur l'importance des conditions d'ouverture pour le juge. De tout temps, le juge est intervenu pour contrôler le respect des conditions d'ouverture et prononcer la décision d'ouverture de la procédure collective.

L'intervention du juge dans les procédures collectives ne manquera pas de produire certains effets à l'égard du débiteur. En effet, plusieurs décisions touchant au patrimoine du débiteur relève de l'appréciation du juge. A ce titre, le juge peut prendre la décision de levée des scellés en vue des opérations d'inventaire sur réquisition du juge-commissaire163(*), il peut aussi autoriser, dans des conditions restrictives, la poursuite d'activités en cas de liquidation des biens164(*), il connait de la demande en résiliation du bail introduite par le bailleur165(*), Il peut aussi prononcer la compensation entre les acomptes reçus par le contractant et les dommages-intérêts auxquels celui-ci a droit du fait de la résolution du contrat ou l'autoriser à différer la restitution des acomptes jusqu'à ce qu'il soit statué sur les dommages-intérêts166(*). Par ailleurs le juge décide en cas de liquidation des biens si le débiteur ou les dirigeants peuvent être employés pour faciliter la gestion et en fixe les conditions167(*). De même, il peut autoriser la mise du fonds de commerce sous location-gérance dans les conditions prévues par l'article 115 de l'AUPC.

Les procédures collectives d'apurement du passif confèrent au juge une large panoplie de pouvoirs qui sont souvent discrétionnaires. Celui bénéficie d'une liberté étendue en ce qu'il constitue l'organe incontournable de la procédure.

b- Le pouvoir normatif du juge dans les procédures collectives d'apurement du passif

Le droit des procédures collectives est un droit de compromis entre des intérêts contradictoires : ceux des créanciers qui demandent à être payés, ceux des créanciers titulaires de sûretés qui demandent à exécuter leur garantie, ceux des banquiers qui souhaitent voir le débiteur exécuter ses engagements... Il s'agit pour le juge de trouver le juste équilibre entre tous ces intérêts. Généralement, le débiteur parvient à obtenir un accord avec ses créanciers en vue de procéder au redressement de son entreprise. Cet accord est plus connu sous l'appellation de concordat. Le concordat est un accord entre les créanciers et le débiteur. Les premiers acceptent de consentir au second des délais et des remises de façon à éviter la cessation des paiements et la cessation d'exploitation. Le pacte collectif ainsi conclu engage ceux qui ont donné leur accord mais également toutes les personnes qui ont refusé d'accepter les propositions du débiteur et dont l'adhésion à l'accord est indispensable à son succès. On parvient à cet effet en faisant intervenir le juge qui homologue l'accord. L'homologation du concordat est le meilleur exemple qui permet d'affirmer que le juge à une sorte de pouvoir normatif dans le droit des procédures collectives d'apurement du passif. En effet, par l'homologation, le juge impose l'exécution d'un contrat aussi bien aux personnes qui ont consenti qu'aux personnes qui ont refusé toute sollicitude au débiteur.

S'il est vrai que le contrat ne produit d'effet qu'entre les parties, le concordat, en tant que convention et obéissant aux mêmes règles que les contrats, ne devrait produire effet qu'entre les parties qui l'ont conclu. Cependant, le législateur OHADA a donné au juge le pouvoir d'étendre la force obligatoire d'un accord collectif hors du cercle des personnes ayant négocié sa conclusion. Le concordat ne leur est pas opposable mais obligatoire. On remarque ainsi que le juge a le pouvoir de conférer une dimension normative à un simple accord de volonté. Une fois l'accord homologué, il a force de loi pour toutes les personnes intéressées par la situation du débiteur.

Si ces pouvoirs sont reconnus au juge c'est sans doute parce que l'AUPC s'est donné pour objectif principal, l'apurement du passif, c'est-à-dire le paiement de tous les créanciers. D'où l'intérêt particulier qui leur est accordé.

2- Le rôle des créanciers dans les procédures collectives d'apurement du passif

Le droit des procédures collectives d'apurement du passif accorde une place importante aux créanciers. Indépendamment du fait que la procédure est ouverte pour les désintéresser, les créanciers jouent un rôle actif et passif dans la procédure. Dans tous les cas, on notera leur présence à l'ouverture (a) de la procédure ainsi que lors du déroulement de celle-ci (b).

a- L'ouverture de la procédure collective à l'initiative des créanciers

L'article 28 alinéa 1er de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif dispose : « la procédure collective peut être ouverte sur la demande d'un créancier, quelle que soit la nature de sa créance, pourvu qu'elle soit certaine, liquide et exigible ». Sur le fondement de cette disposition, un ou plusieurs créanciers peuvent saisir la juridiction compétente aux fins d'ouverture d'une procédure collective en établissant de manière certaine leurs créances et le défaut de paiement, en exhibant par exemple le protêt d'un chèque ou d'un effet de commerce impayé. Cette initiative de l'ouverture de la procédure collective reconnue aux créanciers s'inscrit dans la logique de l'apurement du passif. En effet, si les procédures collectives ont pour principal objectif le désintéressement de tous les créanciers, on comprend alors que ceux-ci puissent la déclencher en vue de se faire payer.

Cependant, dans la pratique on notera rarement l'exercice de ce pouvoir par les créanciers168(*). En effet, cette initiative individuelle ou collective des créanciers ne présente pas toujours des avantages pour eux. C'est ce qui explique que le droit d'assignation des créanciers n'est pas systématiquement mis en oeuvre. Si le créancier dispose de sûretés solides, il préférera les réaliser. S'il est simplement chirographaire et titulaire d'une créance peu importante, il hésitera à engager les frais d'ouverture d'une procédure collective qui aura pour conséquence la suspension des poursuites et dans les cas où elle aboutirait à une liquidation des biens, profitera d'abord aux créanciers les mieux placés en terme de privilège. Même si dans la pratique, les créanciers peuvent hésiter en mettre en oeuvre leur pouvoir de déclenchement, il n'empêche qu'ils occupent une place importante dans le déroulement de la procédure.

b- La place des créanciers dans le déroulement de la procédure collective

L'une des innovations de l'acte uniforme est sans conteste la place importante qui est accordée aux créanciers dans les procédures collectives. Dès l'ouverture de la procédure collective consécutive à une cessation des paiements, les créanciers sont regroupés en une masse. C'est ce qui ressort des dispositions de l'article 72 de l'AUPC qui énonce : « La décision d'ouverture constitue les créanciers en une masse représentée par le syndic qui, seul, agit en son nom et dans l'intérêt collectif et peut l'engager... »

La personnalité morale de la masse a été affirmée pour la première fois en 1956169(*). La Cour de cassation ne faisait qu'appliquer à la masse le principe posé dans l'arrêt du 28 janvier 1954 rendu à propos des comités d'établissement170(*).

Si un pouvoir d'action collectif est reconnu à la masse pour la défense de ses intérêts lors des procédures de redressement ou de liquidation des biens, il n'en est pas de même dans la procédure de règlement préventif. En effet, dans le règlement préventif, les créanciers ne sont pas encore réunis en une masse, ils ne sont pas représentés par un syndic qui agit en leur nom et pour leur compte. Cela s'explique par le fait que l'entreprise n'étant pas encore en cessation des paiements, la situation des créanciers n'est pas menacée et il urge plutôt de prévenir les difficultés de l'entreprise afin qu'elles n'empirent point. Les créanciers sont ainsi réduits dans leurs droits (suspension des poursuites individuelles, délais et remises accordés, délais imposés...) afin qu'ils ne puissent pas compromettre la situation de l'entreprise en introduisant des demandes de paiements.

L'importance de la place des créanciers s'apprécie au regard des diverses mesures de protection et d'action qui leurs sont reconnues après l'ouverture d'une procédure collective consécutive à une cessation des paiements. L'objectif de ces procédures étant d'apure le passif, c'est-à-dire désintéresser les créanciers, tous les actes du débiteur tendant à aggraver le passif ou diminuer l'actif sont proscrits. A cet effet, le législateur a institué au profit des créanciers les inopposabilités de la période suspecte. Par ailleurs, de larges pouvoirs sont reconnus au représentant des créanciers dans la sauvegarde de leurs intérêts. Toujours dans le but d'assurer le paiement des créanciers, l'acte uniforme a établi un ordre de paiement de ceux-ci.

B- La coexistence des organes de régulation avec les organes judiciaires

Les procédures collectives nécessitent toujours l'intervention du juge. Dans les procédures collectives d'apurement du passif, celui-ci exerce un pouvoir quasiment libre de toute restriction. Par contre, dans les procédures collectives destinées à atténuer les risques systémiques, il partage ce pouvoir avec les autorités de régulation au point que celles-ci en sont arrivées à empiéter parfois sur ses compétences exclusives.

1- Le rôle des organes de régulation dans les procédures collectives destinées à atténuer les risques systémiques

Eléments incontournables de l'action collective, les organes de régulation, en l'occurrence, la Commission Bancaire et la Commission Régionale de Contrôle des Assurances, permettent de réguler les comportements individuels et d'obtenir une base de coopération minimale, diminuant significativement l'incertitude et permettant la continuité de l'activité économique des banques et des sociétés d'assurance. C'est pour cela que dans le cadre des procédures collectives, ces organes disposent de plusieurs pouvoirs allant du déclenchement de la procédure (a) au contrôle de celle-ci (b).

a- Le pouvoir de déclenchement de la procédure collective par l'autorité de régulation

L'objectif des procédures collectives destinées aux banques et aux sociétés d'assurance est d'atténuer les risques systémiques qui peuvent être consécutifs à leur défaillance. Cependant, il faut noter que ce souci d'atténuer les risques systémiques ne se situe pas seulement au niveau du droit des procédures collectives. En effet, il est institué tout un ensemble de dispositions permettant d'éviter que des difficultés ne surviennent au sein de ces sociétés de banque et d'assurance. C'est ce qui explique que malgré toutes les précautions prises, si ces sociétés se retrouvent dans une situation compromise, on estime que c'est l'organe de régulation qui est habilité à déclencher la procédure. En effet, exerçant un contrôle permanent de la gestion de ces sociétés, elle est à mieux de pouvoir apprécier sa situation financière d'autant plus que le plus souvent ses partenaires économiques n'ont pas directement accès au bilan et aux documents comptables. Par ailleurs, le souci de la législation des banques et des sociétés d'assurance est d'éviter au mieux l'ouverture des procédures collectives à l'encontre de celles-ci. En effet, les conséquences fâcheuses d'une procédure collective à l'encontre de ces sociétés peuvent se prolonger jusqu'à d'autres sociétés dont la bonne gestion est souvent dépendante d'une banque. C'est en fait l'ensemble du tissu économique qui est pris en considération à travers ce pouvoir d'ouverture de la procédure collective par l'autorité de régulation.

b- Le pouvoir de contrôle de la procédure par l'autorité de régulation

Les procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance, outre le fait qu'elles ne peuvent être mises en oeuvre que par les autorités de régulation, sont en grande partie soumises à leur contrôle. A cet effet, le liquidateur nommé par le ministre des finances assiste le syndic et rend compte de sa mission à la commission bancaire tous les trois mois. Il en est de même pour les sociétés d'assurance à l'égard desquelles la Commission régionale de contrôle des assurances exerce un contrôle permanent.

Ce pouvoir de contrôle trouve son explication dans le souci de veiller à la bonne exécution des mesures de règlement des difficultés de ces sociétés. Par ailleurs, il faut noter que le but de ces procédures collectives est la prévention des risques systémiques. A cet effet, chaque décision prise en cours de procédure doit être confronté à cet objectif. L'autorité de régulation étant le seul organe qui s'intéresse de près à la marche de ces entreprises est alors à mieux de juger de l'opportunité de certaines décisions relatives à la procédure.

2- Les effets attachés à la coexistence

La coexistence entre l'autorité judiciaire et les autorités de régulation n'est pas sans entraîner certaines conséquences. En effet, cette coexistence est à l'origine de certaines difficultés de mise en oeuvre de la procédure (a) et d'une faible prise en compte des droits des créanciers (b).

a- Les difficultés de mise en oeuvre de la procédure collective

Les procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance sont difficiles à mettre en oeuvre. Cette difficulté résulte de la présence des autorités administratives dans la procédure. Le rôle des autorités administratives étant de veiller à la survie de l'entreprise, elles sont peu enclines à décider de l'ouverture d'une procédure collective. A cet effet, un ensemble de dispositions sont prévues pour éviter au mieux la liquidation de la société. C'est ce qui explique que les partenaires de la société de banque ou d'assurance ont un certain mal à exercer tous leurs droits dans la procédure collective. En outre, les intérêts économiques à protéger l'emportent souvent sur les droits des créanciers.

b- La faible prise en compte des droits des créanciers dans les procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance

Dans le droit des procédures collectives d'apurement du passif, les créanciers sont au coeur de la procédure. Celle-ci est instituée pour leur permettre de se faire payer. On ne peut pas en dire autant des procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance. Le souci de préserver l'activité et d'éviter les risques systémiques l'emporte sur les intérêts des créanciers. Ces derniers ne peuvent déclencher la procédure. L'organe représentatif des créanciers dans les procédures collectives d'apurement du passif, en l'occurrence le syndic, est limité dans ses fonctions dans les procédures dessinées aux banques. Selon l'article 89 de la loi bancaire, lorsqu'un administrateur provisoire a été désigné par le Ministre des Finances, en application de l'article 60 de la présente loi, le syndic nommé par la juridiction compétente, dans le cadre d'un règlement préventif et d'un redressement judiciaire, sera spécialement chargé de la surveillance des opérations de gestion, en vertu de l'article 52, alinéa 2 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif. Or l'article 52 de l'AUPC donne au syndic des pouvoirs qui dépassent largement la surveillance des opérations de gestion. Dans le redressement judiciaire, le syndic assiste le débiteur, et dans la liquidation des biens, le débiteur est dessaisi et c'est le syndic qui assure la gestion. Il est représentant des créanciers et agit en leur nom et pour leur compte. Il signale les manquements au juge-commissaire et rétablit le gage général des créanciers si nécessaire. Cependant dans les procédures collectives applicables aux banques, on ne sent pas la présence du syndic en tant que représentant des créanciers. C'est plutôt l'autorité de régulation qui se charge de l'accomplissement de plusieurs actes et surveille le déroulement des opérations.

Dans les procédures collectives applicables aux sociétés d'assurance prévues par le code CIMA, il n'est pas institué un syndic. Cependant, on retrouve un liquidateur judiciaire dont les missions se rapprochent de celles du syndic. A aucun moment il n'est précisé si ce liquidateur est un organe représentatif des créanciers. En tout état de cause, le liquidateur a les pouvoirs les plus étendus pour administrer, liquider, réaliser l'actif mobilier et immobilier et pour arrêter le passif compte tenu des sinistres non réglés. Il est le seul représentant légal de la société d'assurance et agit sous son entière responsabilité171(*).

La situation des créanciers reste incertaine jusque dans la liquidation des biens de la société d'assurance. En effet, l'article 325-10 du code CIMA dispose : « le tribunal prononce la liquidation sur le rapport du juge contrôleur lorsque tous les créanciers privilégiés tenant leurs droits de l'exécution de contrats d'assurance, de capitalisation ou d'épargne ont été désintéressés172(*) ou lorsque le cours des opérations est arrêté pour insuffisance d'actif ». Ce texte ne manque pas de susciter la perplexité. Cette formulation laisse croire que dès que ces créanciers sont désintéressés, il y a lieu d'arrêter la liquidation, même s'il reste encore d'autres créanciers à désintéresser, ce qui est loin d'être la saine finalité d'une procédure collective organisée de liquidation. Prise à la lettre, une telle formule se désintéresserait des créanciers chirographaires, voire de certains créanciers privilégiés par le droit commun mais auxquels seraient préférés les créanciers visés par l'article 325-10173(*).

SECTION 2/ Les rapports entre les droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA

L'existence de plusieurs droits des procédures collectives dans l'espace OHADA peut impliquer une certaine concurrence entre elles et poser de nombreuses difficultés quant à l'application de ces droits. Cependant, l'aspect conflictuel (Paragraphe 1) n'est pas la seule donne des rapports qu'ils entretiennent. En effet, on peut déceler une certaine part de positivité (Paragraphe 2) dans les relations entre les différents droits communautaires des procédures collectives.

Paragraphe 1/ La dimension négative des rapports entre les droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA

Les rapports antre les différents droits des procédures collectives ne sont pas seulement d'ordre positif. Pour s'en convaincre, il y a lieu de noter les nombreux conflits qui peuvent survenir à l'ouverture de la procédure collective (A) ainsi que ceux qui peuvent survenir en cours de procédure (B).

A- L'existence de conflits à l'ouverture des procédures collectives

La cohabitation entre différents droits des procédures collectives susceptibles parfois de s'appliquer à des situations identiques n'est pas sans poser quelques difficultés. On retrouvera d'abord ces difficultés au niveau de la détermination du droit applicable (1), ensuite au niveau de la mise en oeuvre de la procédure (2).

1- La difficile détermination du droit des procédures collectives applicable

A l'ouverture de la procédure collective, la principale difficulté à laquelle on peut être confrontée est celle du droit applicable. S'il s'agit d'une société commerciale régie par le droit OHADA, le problème ne se posera pas. Cependant, dans les cas où il s'agirait d'une banque ou d'une société d'assurance, des difficultés sur le droit applicable peuvent survenir puisque a priori les banques et les sociétés d'assurance sont des sociétés commerciales par la forme, donc susceptibles de tomber sous le coup de la législation OHADA.

a- Les difficultés tenant aux personnes assujetties au droit des procédures collectives

L'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif est applicable à toutes les personnes morales commerçantes. Parmi ces personnes morales commerçantes, figurent en bonne place les sociétés commerciales. Relativement à la notion de société commerciale, l'acte uniforme portant organisation des sociétés commerciales considèrent les sociétés anonymes, les sociétés à responsabilité limitée, les sociétés en nom collectif et les sociétés en commandite simple comme entrant dans cette catégorie.

Les banques et les sociétés d'assurance sont toujours constituées sous forme de sociétés anonymes ou de sociétés coopératives ou mutualistes à capital variable. En tout état de cause elles sont assimilables aux sociétés commerciales tant par leur forme que par la nature de leurs activités. En toute logique, on devrait considérer qu'elles tombent dans le champ d'application du droit des procédures collectives de l'Acte uniforme. C'est ce qui semble émaner de la décision de la CCJA selon laquelle, les dispositions de l'acte uniforme étant d'ordre public, les banques ne peuvent y déroger. Reste alors à se demander alors quelles sont les dispositions d'ordre public de l'acte uniforme ?174(*)

Suivant cette logique, rien n'empêcherait un particulier de saisir le juge en vue d'appliquer les dispositions de l'AUPC à une société d'assurance ou une banque d'autant plus que les dispositions de l'acte uniforme ont un effet direct et abroge toute disposition contraire.

La première difficulté qui résulte de cette coexistence entre des droits concurrents est sans doute la détermination du droit applicable. Cette difficulté s'étendra jusqu'au domaine d'application.

b- Les difficultés tenant au domaine d'application des droits communautaires des procédures collectives

La concurrence entre les droits communautaires des procédures collectives est à l'origine de nombreux conflits. Dans le but d'éviter ces conflits, on considère que le droit OHADA est le droit commun des procédures collectives. Par ailleurs, pour éviter tout amalgame au sujet des personnes assujetties au droit OHADA des sociétés commerciales, l'article 916 de l'AUSCGIE dispose en son alinéa 1er : « le présent Acte uniforme n'abroge pas les dispositions législatives auxquelles sont assujetties les sociétés soumises à un régime particulier ». L'acte uniforme ne définit pas ce qu'est un régime particulier. Aucune indication dans le texte ne permet de donner une signification à cette notion. De toute évidence, ce régime juridique est un régime dérogatoire. La lecture de certaines dispositions de l'AUSCGIE permet d'en percevoir les linéaments. Ainsi, aux termes de l'article 21 de l'AUSCGIE, lorsque l'activité exercée par la société est réglementée, la société doit se conformer aux règles particulières auxquelles ladite activité est soumise. La loi renforce cette dérogation à travers l'article 916. Les sociétés soumises à un régime particulier correspondent à celles qui exercent une activité réglementée. Dans l'espace OHADA, il s'agit des banques et des sociétés d'assurance. Elles sont régies par des dispositions de droit communautaire. C'est là une première marque révélatrice d'une uniformisation prudente certes mais qui ne va pas jusqu'au bout de sa logique à savoir l'élimination de tout pluralisme. Ce pluralisme trouve un terrain favorable aux conflits dans le droit des procédures collectives puisqu'il s'agit alors de la juxtaposition de plusieurs droits communautaires qui ont vocation à s'appliquer en même temps aux sociétés commerciales.

2- Les lenteurs liés à l'intervention des autorités de régulation

A la lecture des différentes dispositions des droits communautaires des procédures collectives, on note que, relativement aux banques et aux sociétés d'assurance, le déclenchement de la procédure est subordonné à l'avis conforme de l'autorité de régulation. En fait, le problème qui se pose est lié aux délais impartis à l'autorité de régulation dans la mise en oeuvre de la procédure. Selon le comportement de l'autorité de régulation, on pourra craindre certaines atteintes à la célérité de la procédure (a) ainsi qu'a sa sécurité (b).

a- Les atteintes à la célérité de la procédure

La lecture des dispositions de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives laisse entrevoir de nombreux délais liés à la procédure. Dans le souci de prévenir les difficultés des sociétés anonymes, l'acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et GIE, en ses articles 153 à 156 prévoit une procédure d'alerte175(*) par le commissaire aux comptes. Cette procédure se caractérise par sa longueur au vu de l'urgence que nécessite la prévention des difficultés. En effet, le commissaire aux comptes demande par lettre au porteur contre récépissé ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception des explications au président du conseil d'administration, au président directeur général ou à l'administrateur général selon le cas, sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l'exploitation. Celui-ci répond dans le mois qui suit la réception de la demande d'explication. A défaut de réponse ou en cas de réponse insatisfaisante, le commissaire aux comptes dispose d'un nouveau délai de 15 jours pour inviter les dirigeants de la société à se prononcer sur l'état de la question. Si le commissaire aux comptes estime toujours que la situation de la société devient compromise, il établit un rapport qu'il soumet à la prochaine assemblée générale ou en cas d'urgence à une assemblée générale des actionnaires qu'il convoque lui-même.

Cette procédure d'alerte peut s'étaler dans le temps. S'il s'agit d'une banque ou d'une société d'assurance, elle peut être respectée puisqu'il s'agit d'une société anonyme donc régie en principe par les dispositions de l'AUSCGIE. Au final, si l'ouverture d'une procédure collective s'impose, ce retard dans la prévention des difficultés sera encore aggravé par l'intervention obligatoire de l'autorité de régulation. En effet, cette dernière devra se prononcer sur l'ouverture d'une procédure de règlement préventif, de redressement judiciaire ou de liquidation des biens. La commission bancaire dispose d'un délai d'un mois à compter de la date de réception de la demande en règlement préventif du représentant légal de l'établissement de crédit pour se prononcer sur l'ouverture ou non de la procédure176(*). Par ailleurs, elle dispose également d'un délai de 21 jours pour se prononcer sur l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens177(*). Si des délais sont prévus pour encadrer le prononcé de la décision de la commission bancaire, il n'en est pas de même pour la commission de contrôle des assurances. En effet le code CIMA ne prévoit aucun délai quand à l'avis préalable à l'ouverture de la procédure collective.

Cette situation n'est pas sans présenter quelques inconvénients quant à l'ouverture et la mise en oeuvre des procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance. La nature des délais établis par la loi bancaire et l'AUSCGIE n'est pas définie. On ne sait pas si l'autorité de régulation est tenue de se conformer obligatoirement aux délais impartis. En outre, aucune sanction n'est attachée au non respect de ces délais. Un tel état de fait ne manquera pas de produire certaines conséquences liées à la sécurité de la procédure.

b- Les atteintes à la sécurité de la procédure collective

Quel que soit l'objectif affiché par les différents droits communautaires des procédures collectives, il reste toujours que l'objectif final sera le désintéressement de tous les créanciers. Des délais incertains et pouvant tirer en longueur, étroitement liés à la mise en oeuvre de la procédure, pourront constituer un terrain favorable à la fraude. En effet, le débiteur aux abois pourra profiter de cette situation afin d'aggraver son passif ou diminuer son passif pendant que l'autorité judiciaire attend l'aval d'une autorité de régulation. De même, les créanciers, sentant la situation du débiteur compromise peuvent aussi profiter de cette latitude pour exercer des actions en paiements étant donné que la suspension des poursuites n'est pas encore prononcée. Cette situation rompra l'égalité entre les créanciers, principe constant de toute procédure collective. Une fois la décision d'ouverture de la procédure rendue, il se trouvera que certains actes passés par le débiteur, même pendant la période suspecte ou en fraude des droits des créanciers seront peut-être inattaquables par le représentant des créanciers. En effet, certains actes passés par le débiteur auront un sort différent selon le droit des procédures collectives qu'on invoquera. Le problème sera d'autant plus accru que chacun des droits aura vocation à régir la situation litigieuse.

B- La survenance de conflits lors du déroulement de la procédure collective

La confrontation des droits communautaires des procédures collectives n'est pas sans entraîner des conflits dans le déroulement des opérations de procédures collectives surtout lorsque ces droits ont vocation à régir la même situation. Ces conflits ont trouvé un terrain d'expression au niveau de la règle de l'irrévocabilité des ordres de paiements interbancaires (1) et de la compensation effectuée en chambre de compensation (2).

1- La règle de l'UEMOA de l'irrévocabilité des ordres de paiements

Les principes fondamentaux posés par la réforme des systèmes de paiement de l'UEMOA sont confrontés au droit OHADA de l'apurement du passif et en particulier à la règle du « zéro heure » qui peut entraîner l'annulation d'un paiement déjà réglé dans un système de paiement STAR-UEMOA ou SICA-UEMOA. En principe, les ordres de paiement introduits dans un système de paiements interbancaires sont irrévocables. Le moment auquel un ordre de transfert devient irrévocable dans le système est défini par les règles de fonctionnement dudit système. Cette règle de l'irrévocabilité des ordres de paiement présente des incompatibilités avec certaines dispositions de l'AUPC relatives aux nullités de la période suspecte (a). En outre, devant le conflit de droits communautaires posé au juge, le choix du droit applicable se révèle impossible (b).

a- Le caractère inconciliable de la règle avec les dispositions de l'AUPC relatives aux inopposabilités de la période suspecte

La législation OHADA des procédures collectives a institué la règle du « zéro heure » qui signifie que le prononcé de la décision d'ouverture de la procédure collective prend effet à 00h du jour du jugement. La règle présente l'avantage de supprimer toutes les difficultés ayant trait à la détermination du moment précis du prononcé et du début des effets de la décision d'ouverture. Cela permet de rendre inopposables à la masse des créanciers, des actes faits dans la journée du prononcé de la décision d'ouverture de la procédure collective, lesquels ont de fortes chances d'être teintés de fraude émanant du débiteur aux abois ou de ses créanciers178(*).

Toutefois, la règle du « zéro heure » comporte des inconvénients manifestes dans le cadre des paiements interbancaires. Ainsi, pour les systèmes de paiements d'importance systémique, la règle pourrait avoir pour effet d'invalider toutes les transactions effectuées par le participant en faillite dès le début du jour de mise en oeuvre de la procédure collective. Dans un système de paiements interbancaires les conséquences pourraient être la révocation des paiements qui apparaissaient déjà réglées et qu'on pensait définitifs. Cela impliquerait aussi de recalculer toutes les positions nettes et pourrait provoquer de profondes modifications des soldes des participants. Le règlement 15-2002/CM/UEMOA du 19 septembre 2002 relatifs aux systèmes de paiement dans les Etats membres de l'UEMOA vient apporter une dérogation importante en matière bancaire. Cette dérogation est reprise par l'article 99 de la loi bancaire qui dispose : « Les ordres de transferts introduits dans un système de paiements interbancaires conformément aux règles de fonctionnement dudit système, sont opposables aux tiers et à la masse des créanciers. Ils ne peuvent être annulés jusqu'à l'expiration du jour où est rendu le jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens à l'encontre d'un participant, même au motif qu'est intervenu ce jugement ». De même l'article 14 de la convention STAR UEMOA énonce en son alinéa 1er : « Les ordres acceptés par le système sont irrévocables et ne peuvent être ni corrigés ni rappelés ». Ainsi, est posé le principe de l'irrévocabilité des ordres de paiement malgré les dispositions de l'article 67 de l'AUPC qui dispose : « Sont inopposables de droit ou peuvent être déclarés inopposables à la masse des créanciers, telle que définie par l'article 72 ci-après, les actes passés par le débiteur pendant la période suspecte débutant à la date de cessation des paiements et finissant à la date de la décision d'ouverture ». La confrontation de ces deux règles laisse penser que si un paiement est effectué par le débiteur par le biais d'un ordre de transfert introduit dans un système de paiements interbancaires pendant la période suspecte, le syndic, représentant des créanciers et défenseurs de leurs intérêts, ne pourra pas attaquer cet acte sur le terrain des inopposabilités de la période suspecte puisque la législation UEMOA le lui interdit.

En d'autres termes, et en dépit des articles 52 et 53 de l'Acte uniforme, on interdit au représentant des créanciers de poursuivre la neutralisation de ces paiements quand ils ont été réalisés le jour de la procédure collective, donc en période de dessaisissement. Il ne serait pas alors concevable de l'autoriser à les attaquer quand ils sont effectués avant l'ouverture de la procédure collective 32. En fait, ce n'est pas seulement l'application de la règle du «zéro heure» qui est contrariée, c'est la restauration du gage des créanciers que poursuivent certaines règles de la période suspecte qui est devenue impossible à réaliser. Ces opérations sont inattaquables par le syndic ni sur le fondement des inopposabilités de la période suspecte ni sur celui de la violation de l'article 11 de l'Acte Uniforme.

b- Les difficultés du choix entre la législation UEMOA et la législation OHADA

La question qu'il convient de se poser ici est celle de savoir quelle sera l'attitude du juge saisi d'une action du syndic en vue de réclamer l'inopposabilité des transferts interbancaires intervenus en période suspecte ou le jour de la déclaration de cessation des paiements ? Donnera-t-il une suite favorable à la demande du mandataire judiciaire ou conférera-t-il la primauté aux dispositions du Règlement n° 15 au détriment de celles de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif ? Pourra-t-il considérer, comme certains auteurs, que la règle du «zéro heure» demeure en vigueur dans le droit commun des procédures collectives, dans le but notamment d'assurer l'égalité de traitement entre les créanciers, mais avec une exception de taille relative aux paiements et aux compensations interbancaires» ? Il n'y a aucune certitude à ce sujet. Les critères qui permettent le choix d'une législation et le rejet d'une autre ne sont pas toujours probants ; les arguments d'opportunité en faveur d'un corps de règles peuvent être contrariés par des objectifs dont la réalisation doit primer sur toute autre considération.

Il reste à se demander si un règlement de l'UEMOA peut modifier un acte uniforme OHADA. La question est d'autant plus complexe que dans les deux cas, il s'agit d'actes qui sont directement applicables et obligatoires dans les Etats membres nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antérieure ou postérieure et qu'aucun principe ne semble permettre de faire prévaloir l'un sur l'autre. Cette difficulté de choix de la législation applicable produit certaines conséquences. D'une part, il plane une certaine incertitude sur le sort des paiements réalisés dans le cadre d'un système de paiements interbancaires, d'autre part, c'est le gage général des créanciers qui est menacé à travers l'irrévocabilité des ordres de paiement. Au-delà c'est l'objectif d'apurement du passif du droit des procédures collectives qui se trouve entravé179(*).

2- La compensation effectuée en chambre de compensation

Les ordres de paiement introduits dans un système interbancaire de paiement ne sont pas les seuls domaines ou le conflit entre droits communautaires des procédures collectives se manifeste. Il en est de même de la compensation effectuée en chambre de compensation. En effet, cette compensation est irrévocable (a) au regard de la législation UEMOA. Cette règle peut s'avérer inconciliable avec les dispositions de l'OHADA (b).

a- Le caractère irrévocable de la compensation effectuée en chambre de compensation

Au sein de l'espace UEMOA, la compensation effectuée en chambre de compensation ou à un point d'accès à la compensation, est opposable aux tiers et à la masse des créanciers. Ainsi, l'article 7 du règlement 15/2002/CM/UEMOA dispose : « Nonobstant toute disposition contraire, la compensation effectuée en chambre de compensation ou à un point d'accès à la compensation dans le respect des règles de fonctionnement du système de paiement interbancaire concerné, est opposable aux tiers et à la masse et ne peut être annulée au seul motif que serait rendu un jugement d'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation des biens à l'encontre d'un participant au dit système ». Le fondement de cette disposition se trouve dans la spécificité des opérations effectuées dans les systèmes de compensation ou de paiements interbancaires. En effet, les participants à ces systèmes sont souvent des banques et des établissements financiers180(*). La survenance d'un dysfonctionnement interne pourrait entraîner des conséquences en chaîne qui ne manqueraient pas de se répercuter sur le système financier. Le système présente donc un important risque systémique.

Dans la mesure où un important risque systémique plane sur ces systèmes et que plusieurs participants sont concernés, leur crédibilité impose une exécution rapide et sure des ordres de transferts. C'est ce qui justifie l'irrévocabilité des opérations effectuées dans ces systèmes.

En d'autres termes, il y a irrévocabilité de la compensation, même en cas d'ouverture d'une procédure collective contre un participant, alors même que celle-ci serait intervenue en période suspecte ou en cours de dessaisissement. Ce n'est pas seulement la règle du «zéro heure» qui est écartée ; ce sont les inopposabilités de la période suspecte et du dessaisissement qui ne pourront plus être prononcées contre les compensations «au seul motif» de la cessation des paiements d'un participant. L'immunité dont bénéficie ce mode de paiement découle du seul fait qu'il a été réalisé dans le cadre d'un système de paiement intégré. Pour la compensation, le mécanisme mis en place dans l'espace UEMOA est le Système Interbancaire de Compensation Automatisé (SICA-UEMOA).

b- Les incertitudes sur l'application du droit OHADA des procédures collectives à la compensation interbancaire

La législation UEMOA, dans le cadre de l'intégration économique, a prévu un système de compensation interbancaire régit par la Convention de compensation communément nommé Système Interbancaire de Compensation Automatisé.

Dans le cadre des procédures collectives, ce mode de paiement présente le mérite d'être en principe inattaquable sur le fondement de l'article 7 du règlement 15/2002/CM/UEMOA181(*). L'immunité dont bénéficie ce mode de paiement découle du seul fait qu'il a été réalisé dans le cadre d'un système de paiement intégré.

L'article 7 du Règlement s'applique à la compensation interbancaire «nonobstant toute disposition contraire». La règle est reprise d'un système juridique qui entendait écarter les règles relatives aux procédures collectives d'apurement du passif ayant pour effet de neutraliser les paiements effectués par le débiteur en violation des règles relatives au dessaisissement. Mais, il n'est pas douteux que l'expression «nonobstant toute disposition contraire» inclut, non seulement, les règles de la période suspecte, mais également celles du règlement préventif. Dans ce dernier cas, le participant n'est pas en cessation des paiements, il craint juste de se trouver dans cet état sous peu. En effet, à partir du jugement de cessation des paiements, il y a comme une sorte de prohibition générale de l'exécution des engagements souscrits par le débiteur. Il est vrai que l'interdiction n'est pas mentionnée expressément dans l'Acte uniforme mais elle s'induit du dessaisissement182(*). Les créanciers bénéficiaires de ces paiements interdits sont condamnés à rapporter ce qu'ils ont reçu de leur débiteur. Aucune distinction n'est faite en raison du mode de paiement. Il est juste exigé que la dette payée soit antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective. On comprend alors les convoitises que peuvent susciter les règlements interbancaires en cas de défaillance d'un participant frappé de dessaisissement. L'importance des sommes en jeu et, parfois, les conséquences sociales, économiques et financières du blocage d'un virement ou de l'annulation d'une compensation interbancaire peuvent avoir des répercussions qui dépassent les participants au système de paiement.

On note ainsi la présence de deux corps de règles de valeur normative équivalente (UEMOA et OHADA), porteurs de solutions antinomiques, ont vocation à être appliqués à une situation juridique impliquant des enjeux importants et des conséquences économiques, financières et sociales. A priori, on ne perçoit pas de solution car il s'agit de deux ordres juridiques différents, c'est-à-dire de corps de règles possédant leurs propres sources, «dotés d'organes et procédures aptes à les émettre, à les interpréter ainsi qu'à en faire constater et sanctionner, le cas échéant, les violations»183(*). En effet, quoique porteurs de solutions antinomiques, ils sont appelés à régir une situation juridique identique dont les éléments constitutifs ainsi que les effets sont totalement ou partiellement localisés dans l'espace UEMOA-OHADA.

Le conflit de norme n'est pas exceptionnel mais l'embarras qu'il cause peut être juste technique et théorique quand les solutions envisagées sont identiques. En outre, il peut entraîner un trouble économique, social et financier important quand les règles en conflit aboutissent à des résultats antinomiques.

Paragraphe 2/ La dimension positive des rapports entre les droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA

Les droits communautaires des procédures collectives, malgré leur autonomie, n'entretiennent pas que des rapports conflictuels. On peut noter l'existence d'une certaine complémentarité (A) ainsi que l'inexistence d'incompatibilités au regard des objectifs qu'ils poursuivent (B).

A- La complémentarité des droits communautaires des procédures collectives

La complémentarité des droits communautaires des procédures collectives ne s'analyse pas par l'existence de lacunes complétées entre eux. Il s'exprime plutôt par une quasi inexistence de vide juridique (1) ainsi qu'une relative expansion du droit des procédures collectives (2).

1- La quasi inexistence d'un vide juridique en droit des procédures collectives

Pour les juristes, la complétude normative est un leurre. Il ne saurait exister de corps de règles ayant vocation à régir toutes les questions de droits posées. Cependant, même si la pluralité des droits des procédures collectives au sein de l'espace OHADA peut entraîner un certain nombre de conséquences fâcheuses, il n'en demeure pas moins que cette coexistence entre les différents droits des procédures collectives a le mérite d'apporter des solutions à une grande partie des problèmes posés dans la mise en oeuvre du droit des procédures collectives. Le droit des sociétés commerciales est autant régi par l'acte uniforme que par l'ensemble des dispositions de l'UEMOA que de la CIMA. Sur ce point on pourrait avancer que plusieurs lacunes relatives au droit des entreprises en difficulté ont étés comblées.

2- L'expansion du droit des procédures collectives

L'autre trait caractéristique de la dimension positive des rapports entre les différents droits communautaires des procédures collectives est sans doute l'expansion progressive de cette branche du droit des affaires. On ne peut nier que le droit des entreprises en difficulté est une partie intégrante de la vie des affaires. Cette branche du droit est le lieu d'expression de plusieurs volontés et de plusieurs intérêts et découvre en fait les différents acteurs du monde des affaires. A cet effet on retrouve des problèmes liés à l'exécution des sûretés, au droit des travailleurs... On ne saurait alors négliger cette part du droit puisque la restauration de la confiance des partenaires de l'entreprise réside dans la solidité des mécanismes de protection qui leurs sont accordés. Forts conscients de cet état de fait, les législateurs communautaires n'ont pas manqué d'accorder une place importante au droit des procédures collectives.

En l'état actuel de la législation, seules les personnes physiques commerçantes et les personnes morales de droit privé sont assujetties au droit des procédures collectives. Sont donc exclus pour le moment les artisans n'ayant pas la qualité de commerçant, les agriculteurs et probablement les acteurs du secteur informel. Il serait sans doute intéressant d'inclure ces derniers dans le champ d'application du droit des procédures collectives. Des avancées ont été constatées en droit français où les artisans sont soumis au droit des procédures collectives.

B- L'inexistence d'incompatibilités au regard des objectifs du droit des procédures collectives

Les traités UEMOA, CIMA et OHADA sont des traités d'intégration économique et juridique. En d'autres termes, ils poursuivent soit des objectifs d'intégration économique ou juridique. Cependant on ne saurait départager l'intégration économique (2) de l'intégration juridique (1). Dans le domaine du droit des procédures collectives, on se rendra compte que ces objectifs sont toujours poursuivis à travers l'institution d'un corpus de règles qui poursuivent des objectifs particuliers.

1- L'uniformisation du droit des procédures collectives

La fonction essentielle du droit dans un phénomène d'intégration est de faire entrer celui-ci dans une formule juridique adéquate suffisamment précise pour en assurer le fonctionnement. L'intégration économique se caractérise par la création d'un espace économique où d'une part les biens, les personnes, les services et les capitaux peuvent librement circuler, et où, d'autre part, des politiques communes ou coordonnées sont mises en place. Il apparaît difficile que la réalisation de cette intégration économique se réalise dans le cadre d'un espace juridique diversifié184(*). Concernant le droit des procédures collectives, il faut noter que l'intégration juridique se manifeste par les efforts d'assainissement de l'environnement juridique des procédures collectives (a) pilier de la sécurité juridique nécessaire à l'application de ce droit (b).

a- L'assainissement de l'environnement juridique des procédures collectives

Dans la plupart des Etats africains, la législation applicable aux entreprises en difficulté, quelque peu éparpillée, était composée principalement du code de commerce de 1807 tel qu'il a été refondu par la loi du 28 mai 1832, de la loi du 4 mars 1889 sur la liquidation judiciaire, des décrets-lois du 8 août et du 30 octobre 1935185(*). Seuls quelques Etats186(*) avaient réformé leur droit des procédures collectives ou prévoyaient de le faire. A titre d'exemple, le Sénégal avec les articles 927 à 1077 du COCC résultant de la loi 76-60 du 12 juin 1976 complétée par le décret d'application 76-781 du 23 juin 1976 et, le Mali avec les articles 173 à 315 qui ont tous repris la législation française du 13 juillet 1967.

On note ainsi une reprise de la législation française qui s'est montrée vétuste avec l'évolution du droit des affaires. A ce titre on ne peut manquer de relever, une léthargie certaine de beaucoup de législateurs nationaux africains alors que la situation économique évolue et nécessite une adaptation de la législation. Cette pluralité de législations relatives au droit des faillites était à l'origine de l'application de plusieurs droits différents d'un Etat à un autre. Cette situation n'était certainement pas compatible avec les objectifs de création d'un marché commun et d'un environnement juridique homogène187(*). D'une façon générale, l'harmonisation du droit des procédures collectives à travers la suppression de toute cette législation vétuste et disparate n'est qu'une illustration du besoin d'harmonisation totale du droit des affaires. A travers l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, la législation UEMOA en matière bancaire ainsi que le code CIMA pour les marchés d'assurance, on assiste à un assainissement du droit des procédures collectives qui devient ainsi un droit commun à tous les Etats parties à ces organisations.

b- La sécurité juridique dans le droit des procédures collectives

L'unité du droit, surtout si elle émane d'une structure communautaire, présente deux avantages sur le plan de la sécurité juridique ; d'une part, la connaissance de la législation unifiée d'un pays donné (qu'on l'appréhende à la source nationale ou communautaire) garantit qu'il s'agit de la même dans les autres Etats faisant partie de l'espace juridique intégré ; d'autre part, toute modification de la loi unifiée se fait selon une procédure communautaire plus lente qu'une procédure nationale, ce qui donne le temps aux opérateurs économiques et aux consommateurs de réagir en commun et préventivement aux velléités inconsidérées de changement.

Enfin, l'unité des règles de droit applicables élimine les conflits de lois dans les relations commerciales internationales et leurs fâcheuses conséquences pour les plaideurs (lenteur des procès ; application d'une loi non prévue par les parties et inconnue d'elles...). En effet, dans la mesure où la loi est identique d'un Etat à un autre de la zone intégrée, il est sans intérêt pratique de rechercher la loi nationale applicable.

Q'il s'agisse de la législation OHADA, UEMOA ou CIMA, les droits communautaires des procédures collectives poursuive la sécurité dans l'application des procédures collectives. L'objectif est de pouvoir retrouver les mêmes règles quelque soit l'Etat dans lequel on se trouve. Cette finalité présente l'avantage de ne plus se poser la question de savoir quelle règle de droit appliquer. Quel que soit l'espace géographique où se trouvent les créanciers, ils jouissent des mêmes droits attachés à la mise en oeuvre des procédures collectives. En outre, cette situation devrait conforter l'attitude du juge dans l'application des règles. On devrait donc retrouver une jurisprudence concordante dans tous les Etats où ces textes sont applicables.

2- L'intégration économique à travers les droits des procédures collectives

Une intégration économique effective ne peut se faire sans une intégration juridique. En effet, la bonne marche d'une économie repose sur des règles juridiques efficaces et claires pour tous les participants188(*). On notera à cet effet que l'ensemble des droits communautaires des procédures collectives promeuvent l'existence d'entreprises saines et viables (a) dans le souci de conforter la confiance des investisseurs (b).

a- La promotion d'entreprises saines et viables

Un des enseignements qu'on peut tirer de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, c'est que son objectif est a priori l'apurement du passif. Les législations UEMOA et CIMA en matière de droit des entreprises en difficulté poursuivent la principale finalité d'éviter les risques systémiques. Cependant, si la lecture de ces textes semblent laisser pour apparent ces différents objectifs, une analyse profonde montre qu'en réalité, la préoccupation majeure des droits communautaires des procédures collectives est de maintenir des entreprises viables voire performante dans le marché. Il s'agit en fait de liquider les entreprises ne pouvant plus subsister et de permettre aux entreprises présentant des chances de survie de demeurer dans le marché et de retrouver leur bonne santé financière. Cette finalité ne trouve certes pas dans les dispositions concernant le droit des procédures collectives proprement dit, mais plutôt dans les différents textes qui encadrent l'activité des sociétés commerciales les sociétés commerciales. Un important dispositif est mis en place en amont afin d'éviter la survenance des difficultés. A titre d'exemple on peut retenir les ratios prudentiels189(*) que les banques doivent respecter, les contrôles190(*) sur pièce et sur place des autorités de régulation... En aval, on notera la panoplie de sanctions destinées au débiteur défaillant qui aurait conduit son entreprise à la faillite à l'image de celles attachées à la banqueroute simple et à la banqueroute frauduleuse.

b- La garantie des droits des acteurs de la vie économique

La bonne arche des affaires repose sur le crédit. Celui-ci doit être protégé. Il faut que le créancier ait en tout temps l'assurance de rentrer dans ses droits quand il l'exige. Le droit des procédures collectives, quelle que soit la législation prise en compte poursuit toujours le but de désintéresser les créanciers à titre principale ou secondaire. C'est un droit au carrefour des intérêts des créanciers. A ce titre, il est logique que toutes les personnes qui investissent leurs biens dans une entreprise soient sures de pouvoir réaliser leur créance quelle que soit la situation du débiteur. L'existence de règles simples et applicables dans plusieurs Etats permet d'éviter toute disparité relativement au droits des créanciers et l'assurance de retrouver pratiquement les mêmes solutions d'un Etat à un autre. En dépit du souci de promouvoir des entreprises viables et performantes en aval, il y a en amont le besoin de garantir à tous les acteurs de la vie économique une protection efficace de leurs droits par la mise en place de règles adaptées à la situation des entreprises en difficulté.

CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE

Au-delà du reproche de systématisation excessive qui s'attache à juste titre tant au monisme qu'au dualisme, ces deux théories cherchent à réponde à une question inéluctable : comment résoudre les contradictions qui ne peuvent manquer de se produire entre normes relevant d'ordres juridiques différents191(*) ? Un ordre juridique apporte en effet aux normes qui le composent la cohérence que leur confère le fait de relever de la même norme fondamentale, mais il les sépare en même temps des normes qui relèvent d'autres ordres, d'autres normes juridiques fondamentales, et cela d'autant plus qu'il est doté d'organes bien structurés qui seront tentés de faire prévaloir leurs propres normes.

Au sein de l'espace OHADA, on retrouve trois ordres juridiques qui sont tous dotés d'institutions qui veillent à leur bonne application. Ces trois ordres juridiques interviennent dans plusieurs branches du droit des affaires. Leur coexistence ne manquera pas alors de poser des difficultés. En effet, ces ordres juridiques sont autonomes. Par ailleurs ils revendiquent tous leur primauté sur toute autre législation tel qu'il ressort des différents traités les ayant institué. La question de savoir comment résoudre les conflits pouvant naître des rapports entre droits communautaires des procédures collectives est loin d'être résolu puisque a priori il n'existe aucun critère permettant d'écarter un droit au profit d'un autre lorsqu'ils ont tous vocation à s'appliquer.

Au regard de la dimension abrogatoire que tous ces droits expriment, il est douteux qu'un règlement de l'UEMOA puisse abroger un acte uniforme de l'OHADA, ou encore une disposition du code CIMA même si ces droits communautaires rappellent tous la nécessité de les appliquer « nonobstant toute disposition contraire192(*) ». En d'autres termes les droits communautaires relevant de divers ordres juridiques ne peuvent s'abroger entre eux. Les textes abrogeant ont beau affirmer leur caractère impératif, on accepte mal l'idée de faire perdre à une loi qui relève d'un autre ordre juridique sa force obligatoire en raison d'une volonté exprimée par des autorités qui n'ont pas compétence pour adopter, modifier ou annihiler le texte abrogé. Cela n'est possible que s'il y a des rapports entre le texte général et le texte spécifique. Or entre les droits UEMOA, OHADA et CIMA, on ne saurait affirmer clairement qu'il existe des rapports entre texte généraux et textes spéciaux. En effet, aucun critère ne permet de définir avec exactitude lequel des trois est considéré comme droit commun ou droit spécial des procédures collectives.

Les problèmes posés par la coexistence entre ces les différents droits communautaires des procédures collectives seraient moins préoccupants s'il n'avaient qu'une dimension théorique. Cependant ces problèmes se manifesteront devant le juge chargé d'appliquer la règle de droit. Même en l'absence de critère d'élection d'une norme, il devra quand même rendre une décision. Face à ces divergences, il y a lieu de se demander dans quel sens les juges nationaux trancheront s'ils avaient à connaître d'une telle affaire ? « De fait, le juge étatique, en tant qu'il est en même temps juge de droit commun des trois corps de règles, est placé devant un problème, a priori, insoluble. Chacun des trois corps de règles a vocation à s'appliquer et, en cas de contrariété entre eux, à imposer sa solution dans le règlement du litige193(*) ». Ce n'est pas faire oeuvre de prophète que d'affirmer que, du fait de la coexistence de normes contradictoires, le risque est grand de voir s'instaurer non seulement une insécurité juridique consécutive au caractère plural du substrat juridique mais surtout un morcellement du litige, ce, du fait de la compétence d'attribution qui est celle du juge communautaire. On retrouvera au final une jurisprudence contradictoire sur une question liée au droit des procédures collectives qui a vocation à être réglée différemment par plusieurs normes relevant d'ordres juridiques distincts. Un tel état de fait ne manquera pas de produire certaines conséquences fâcheuses notamment des atteintes à l'objectif d'harmonisation du droit des procédures collectives, la sécurité judiciaire et juridique recherchées par toute harmonisation.

CONCLUSION GENERALE

La problématique des rapports entre les différents droits communautaires des procédures collectives soulève certes la question pluralité de ces droits au sein de l'espace OHADA ainsi que les contrariétés qui peuvent en découler. Cependant, au-delà de ces diverses interrogations, c'est non pas la question de l'harmonisation du droit des procédures collectives qui se pose mais plutôt celle de l'harmonisation des organisation d'intégration au sein de l'espace OHADA. Ainsi, tel que l'affirme le Pr. Issa Sayegh « l'intégration juridique de plusieurs Etats (même s'il s'agit de jeunes Etats africains appartenant à la même tradition juridique comme ceux de la zone franc) est une oeuvre mal définie et jamais achevée194(*) ».

Par delà la rationalisation souhaitée du droit des procédures collectives, c'est la question de l'harmonisation de toutes les législations communautaires qui se pose. Les procédures collectives ne sont qu'un exemple révélateur des situations problématiques résultant de la cohabitation de plusieurs droits communautaires créés par des organisations d'intégration autonomes.

La rationalisation des dispositions institutionnelles de l'intégration africaine s'impose donc aujourd'hui comme une thérapeutique au manque de performance des diverses tentatives d'intégration. La résolution de ce problème souvent évoqué mais presque toujours éludé est primordiale, car le désordre qui caractérise les multiples interventions des organisations africaines d'intégration constitue un frein à l'efficacité des actions de ces dernières et expliquent les contre-performances qu'elles affichent depuis quelques années. A ce propos, la recherche de solutions au problème de la coexistence des droits communautaires exige de sonder, dans un premier temps, les solutions existant avant toute exploration de nouvelles pistes.

La compétition négative que se livrent les droits communautaires doit céder la place à une saine complémentarité et à une rationalisation de l'activité des organisations d'intégration de la zone OHADA. La traduction dans les faits de cette exigence connaît un début d'exécution par l'exploitation des potentialités dont sont porteurs les traités constitutifs desdites organisations et les initiatives prises dans le sens de la concertation. Les voies ouvertes sont à la fois juridiques et diplomatiques.

Tant les actes constitutifs des trois organisations que le droit international général offrent des possibilités de prévention des crises inhérentes aux éventuelles incompatibilités. Mais, à l'évidence, les solutions proposées par les trois organisations sont fort partielles.

L'UEMOA d'abord avec les articles 14 et 60 alinéa 2 de son traité. En effet, l'article 14 du Traité UEMOA dispose : « Dès l'entrée en vigueur du présent Traité, les Etats membres se concertent au sein du Conseil afin de prendre toutes mesures destinées à éliminer les incompatibilités ou les doubles emplois entre le droit et les compétences de l'Union d'une part, et les conventions conclues par un ou plusieurs Etats membres d'autre part, en particulier celles instituant des organisations économiques internationales spécialisées ». Cette disposition est complétée par les termes de l'article 60 alinéa 2 qui affirme que « ... la conférence tient compte des progrès réalisés en matière de rapprochement des législations des Etats de la région, dans le cadre d'organismes poursuivant les mêmes objectifs que l'Union ».

L'OHADA, enfin, qui par le truchement de l'article 8, offre, elle aussi, une solution préventive dans la mesure où selon cet article : « L'adoption des Actes uniformes par le Conseil des Ministres requiert l'unanimité des Etats présents et votants. L'adoption des Actes uniformes n'est valable que si les deux tiers au moins des Etats Parties sont représentés. L'abstention ne fait pas obstacle à l'adoption des Actes uniformes ». Cette disposition du droit originaire OHADA ouvre aux Etats membres de l'UEMOA (également membres de l'OHADA) la possibilité d'empêcher l'adoption de tout Acte uniforme qui leur paraîtrait incompatible ou comporter de sérieux risques d'incompatibilité avec le droit communautaire soit en votant contre, du fait de l'exigence de l'unanimité, soit en pratiquant la politique de « la chaise vide », leur absence ne permettant pas d'atteindre le quorum requis des deux tiers.

Quant au droit international général, il permet, grâce à l'article 30, § 4, b) de la

Convention de Vienne, d'envisager un début de solution puisque « Dans les relations entre un Etat-partie aux deux traités [incompatibles] et un Etat partie à l'un de ces traités seulement, le traité auquel les deux Etats sont parties régit leurs droits et obligations réciproques »195(*). Mais comme on peut le constater, ces solutions sont soit très fragiles soit trop négatives. Ce qui explique peut-être la recherche de solutions alternatives par la voie politico-diplomatique.

« L'existence de nombreuses organisations d'intégration en Afrique de l'Ouest poursuivant les mêmes objectifs a entraîné une duplication des efforts et un gaspillage des ressources qui auraient pu servir au développement de la sous région Ouest Africaine. D'où la nécessité de rationaliser les efforts de coopération en Afrique de l'Ouest pour maximiser les gains de l'intégration régionale »196(*).

Cette prise de conscience est de plus en plus forte en Afrique de l'Ouest où des actions ont été entreprises notamment par l'UEMOA et l'OHADA en vue de parvenir à une cohabitation raisonnable.

A cet effet, l'UEMOA a obtenu le statut d'observateur auprès de l'OHADA pour mieux assurer la coordination des actions des deux organisations. Dans ce cadre la Commission de l'UEMOA participe aux réunions techniques et à celles des instances de l'OHADA. La Commission de l'UEMOA et le Secrétariat Général de l'OHADA se communiquent régulièrement le Bulletin Officiel de l'UEMOA et le Journal Officiel de l'OHADA dans lesquels sont publiés les actes adoptés par les différents organes des deux institutions.

Mais malgré ces efforts de coordination et de mise en cohérence de l'action des différentes organisations, il y a lieu de dépasser les actions ponctuelles pour inscrire cette tendance dans la durée par son institutionnalisation.

L'idée ici est de rechercher des solutions définitives au problème de la coexistence des trois organisations. Le noeud du problème réside dans l'autonomie structurelle des organisations197(*). Or il est bien connu que les moyens principaux qui permettent d'assurer à un ordre juridique sa cohérence et son fonctionnement harmonieux résident dans la définition stricte du domaine d'action de chaque type de norme doublée de l'établissement d'une hiérarchie entre les différentes catégories de normes auxquels il convient d'ajouter l'élaboration de règles de conflits de lois dans le temps, et l'organisation du contrôle juridictionnel de la validité des normes et de la cohérence du système en général198(*). C'est dire que plus qu'une simple coordination des activités des organisations d'intégration, il s'agit d'entreprendre une véritable restructuration, une recomposition du paysage Ouest africain des organisations d'intégration. avec comme vecteur fondamental, l'élimination des incompatibilités et, à terme, la création d'une unique communauté économique régionale qui serait investie de tous les pouvoirs juridiques l'autorisant à couvrir toute la région Ouest africaine. L'idée de la restructuration, une fois retenue, reste à la mettre en oeuvre. Se pose donc la question des voies et moyens de sa matérialisation. Comment rationaliser ?

A ce propos, le Pr. Charles ROUSSEAU invite à la prudence quand il écrit : « A beaucoup d'égards, le problème de la contrariété des règles conventionnelles est encore largement dominé par des facteurs d'ordre politique et son règlement est fonction des progrès du sentiment du droit chez les Etats contractants »199(*). Pour avoir quelques chances de réussir, il faut, en effet, éviter un écueil majeur, celui de vouloir penser la rationalisation exclusivement en terme de hiérarchie, de rapports de préséance ou de subordination. Recourir à la seule rationalité managériale pour asseoir un système de coopération inter-organisations d'intégration c'est assurément courir à l'échec.

A l'égard de l'OHADA, et compte tenu de l'ambition de cette organisation de couvrir tout le continent200(*), il y a lieu que les deux autres organisations en l'occurrence l'UEMOA et la CIMA, lui attribue, et cela de façon expresse, la fonction de centre principal de législation en matière de droit des affaires. Ceci reviendrait, dans l'optique d'une telle rationalisation, à les lier par les Actes uniformes pris dans le cadre de l'OHADA. Cette solution présente un double avantage : celui de favoriser l'intégration des Actes uniformes dans les sources du droit communautaire (UEMOA et CIMA) et celui de permettre l'établissement d'une passerelle entre la Cours de Justice de l'UEMOA et la CCJA en vue d'assurer une meilleure coordination dans l'application du droit communautaire et du droit uniforme. Ces aménagements pourront consister, entre autres, à reconnaître à la CCJA une compétence consultative (avis) et juridictionnelle (recours préjudiciel) à l'égard de la de Cour Justice de l'UEMOA pour ce qui est de l'interprétation et l'application des Actes uniformes. Ainsi, seront certainement prévenus les risques de décisions contradictoires ou peu harmonieuses, comme seront réduits les risques d'insécurité judiciaire que celles-ci engendrent. En attendant l'aboutissement de la politique de rapprochement institutionnelle des trois organisations, il convient, dans l'intervalle, d'édicter des normes assurant les rapports de cohérence entre les différents ordres juridiques et des principes clairs de résolution des contrariétés qui pourraient survenir.

Il ressort de ce qui précède que la résolution du problème de la compatibilité UEMOA-OHADA-CIMA est cruciale pour l'avenir de l'intégration en Afrique de l'Ouest. A ce sujet, et il n'y a pas d'illusion à se faire, la seule voie de résolution demeure celle de la négociation, sans idée de préséance, pour un compromis. Reste à espérer que les différentes parties auront une claire et exigeante conscience de l'enjeu et s'attelleront à cette tâche de remodelage des relations inter-organisations d'intégration en Afrique de l'Ouest car, de lui, dépendent en grande partie l'avenir et le renforcement de l'intégration régionale.

La problématique de l'intégration dans cette zone ne doit plus être envisagée dans un contexte concurrentiel mais dans un souci de complémentarité entre l'UEMOA, la CIMA et l'OHADA. Pour que l'intégration des économies Ouest africaines aboutisse, il est nécessaire de supprimer les divergences et incompatibilité relatives aux politiques et programmes des organisations communautaires. Des pas ont été faits dans ce sens, mais beaucoup de chemin reste à faire.

TABLE DES MATIERES

SOMMAIRE 1

INTRODUCTION GENERALE 3

INTRODUCTION GENERALE 3

TITRE I/ La pluralité des sources communautaires du droit des procédures collectives dans l'espace OHADA 9

CHAPITRE I/ L'existence d'un droit commun des procédures collectives dans l'espace OHADA 9

SECTION 1/ Le domaine d'application du droit OHADA des procédures collectives 9

Paragraphe 1/ L'application du droit OHADA aux sociétés commerciales 9

A- Les sociétés commerciales de l'espace OHADA 9

1- Les sociétés commerciales du droit OHADA 10

a- La commercialité par l'objet ou la forme 10

b- La structuration des sociétés commerciales de l'espace OHADA 11

2- Les sociétés commerciales des autres espaces juridiques 12

a- Les sociétés de banque et les établissements financiers 12

b- Les sociétés d'assurance 13

B- La situation économique et financière des sociétés commerciales 14

1- Les sociétés en situation financière difficile 14

a- La nature des difficultés financières 14

b- Les solutions envisagées par le droit OHADA des procédures collectives 15

2- Les sociétés en cessation des paiements 16

a- La notion de cessation des paiements 16

b- L'adaptation de la notion de cessation des paiements aux banques et aux sociétés d'assurance 17

Paragraphe 2: L'application du droit OHADA à un autre espace juridique 18

A- Le domaine normatif de l'intervention des autres ordres juridiques de l'espace OHADA 18

1- Une intervention sectorielle dans le domaine du droit des affaires 18

a- La polysémie de la notion de droit des affaires 18

b- La conception du droit des affaires en droit OHADA 19

2- Les organisations intervenant dans le droit des affaires 20

a- Les organisations d'intégration juridique 20

b- Les organisations d'intégration économique 21

B- La tendance à conférer la primauté au droit OHADA 21

1- Le renvoi aux dispositions de l'OHADA 21

a- Le caractère d'ordre public des dispositions des actes uniformes 21

b- Le caractère commun du droit OHADA 22

2- La spécialisation du droit des procédures collectives 23

a- Une application opportune des règles de procédure collective 23

b- Une application distributive des règles de procédure collective 23

SECTION 2/ Le contenu du droit OHADA des procédures collectives 24

Paragraphe 1: Les procédures de sauvegarde des entreprises 24

A- Le règlement préventif 24

1- La phase préparatoire au règlement préventif 24

a- La demande en règlement préventif 25

b- Les effets du dépôt de la proposition de concordat préventif 25

2- La mise en place d'un concordat préventif 26

a- L'homologation par le juge de l'accord avec les créanciers 26

b- Les effets du concordat préventif 27

B- Le redressement judiciaire 27

1- Les conditions d'ouverture du redressement judiciaire 27

a- L'effectivité de la cessation des paiements 27

b- L'existence d'un jugement d'ouverture en redressement judiciaire 28

2- Les effets du redressement judiciaire 28

a- La réduction des prérogatives du débiteur 28

b- L'uniformisation de la condition juridique des créanciers 29

Paragraphe 2/ Les procédures entraînant la disparition de l'entreprise 29

A- La liquidation des biens 30

1- La réalisation de l'actif 30

a- La réalisation des meubles 30

b- La réalisation des immeubles 30

2- L'apurement du passif 31

a- La notion d'apurement du passif 31

b- Les règles générales de l'apurement du passif 31

B- La liquidation des sociétés commerciales in bonis 32

1- Les modalités de la liquidation des sociétés commerciales in bonis 32

a- La liquidation par voie conventionnelle 32

b- La liquidation par voie de justice 32

2- L'exercice des opérations de liquidation 33

a- La mise en oeuvre des opérations par le liquidateur 33

b- Le dénouement des opérations de liquidation 34

CHAPITRE II/ La consécration des droits des procédures collectives dérogatoires au droit OHADA 35

SECTION 1/ La spécificité du domaine d'intervention des droits des procédures collectives dérogatoires au droit OHADA 35

Paragraphe 1/ L'activité exercée par les sociétés assujetties aux droits dérogatoires des procédures collectives 35

A- Les activités bancaires 35

1- La particularité du commerce de banque 36

a- Le commerce de l'argent 36

b- Un commerce intégré dans un environnement institutionnel particulier 36

2- L'immixtion dans la profession d'assurance 37

a- Le phénomène de la bancassurance 37

b- L'assurance-vie et les bons de capitalisation 38

B- Les activités des sociétés d'assurance 38

1- La couverture des risques 38

a- Les risques portant sur les branches autres que le risque décès 39

b- Les risques portant sur les branches vie et capitalisation 39

2- Des incursions limitées sur les compétences spécifiques des banques 39

a- L'assurfinance 39

b- L'assurance-épargne 40

Paragraphe 2/ La prise en compte des intérêts en cause 40

A- La protection du système financier 40

1- La solidité du système financier 40

a- La nécessité d'assurer la solidité du système financier 41

b- La prise en compte des risques systémiques 41

2- Les moyens de protection du système financier 41

a- La surveillance des sociétés d'assurance et des banques 42

b- L'assistance technique aux sociétés d'assurance et aux banques 42

B- La sauvegarde de l'épargne publique 42

1- La mise en place d'une institution de régulation 42

2- Les pouvoirs de l'institution de régulation 43

SECTION 2/ L'intervention de l'autorité administrative dans les droits des procédures collectives dérogatoires au droit OHADA 43

Paragraphe 1/ La subordination de l'ouverture de la procédure collective à l'avis de l'autorité administrative 43

A- L'intervention de la Commission Bancaire dans les procédures collectives 43

1- La commission bancaire : une autorité administrative indépendante 43

a- L'indépendance de la commission bancaire 44

b- L'autorité de la commission bancaire 44

2- La commission bancaire : une juridiction 45

a- L'obligation de motivation des décisions de la commission bancaire 45

b- Les voies de recours contre les décisions de la commission bancaire 45

B- L'intervention de la Commission de contrôle des assurances 46

1- Le rôle de la commission régionale de contrôle des assurances dans les procédures collectives 46

a- L'ouverture des procédures collectives 46

b- La nécessité d'un avis conforme préalable à l'ouverture des procédures collectives 47

2- Les missions de la Commission régionale de contrôle des assurances 47

a- L'organisation du marché des assurances 47

b- Le contrôle des entreprises d'assurance 48

Paragraphe 2/ Le contrôle des opérations de procédure collective par l'autorité administrative 48

A- Le caractère transversal du contrôle de l'autorité administrative 48

1- Le domaine du contrôle de l'autorité administrative 48

a- Le contrôle à l'ouverture des procédures collectives 48

b- Le contrôle lors du déroulement des procédures collectives 49

2- La nature du contrôle exercé par l'autorité administrative 49

a- l'imprécision de la nature du contrôle de l'autorité administrative 49

b- Les modalités du contrôle de l'autorité administrative 50

B- Les incidences du contrôle effectué par l'autorité administrative sur les opérations de procédure collective 51

1- Le caractère prononcé de la dimension administrative des procédures collectives 51

a- La subordination de la décision judiciaire à l'approbation de l'autorité administrative 51

b- Le recul de la dimension judiciaire dans les procédures collectives dérogatoires 51

2- Les conséquences attachées au pouvoir exorbitant de l'autorité administrative dans les procédures collectives 52

a- Les risques d'existence de faillites non prononcées 52

b- L'acharnement éventuel des créanciers sur le débiteur 53

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE 54

TITRE II/ La contrariété des différents droits communautaires des procédures collectives dans l'espace OHADA 56

Chapitre I/ L'autonomie des sources des droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 56

Section 1/ L'équivalence des sources des droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 56

Paragraphe 1/ Les modalités d'application des droits communautaires des procédures collectives 56

A- L'effet direct des droits communautaires des procédures collectives 56

1- La notion d'effet direct des droits communautaires 56

a- Le fondement de l'effet direct des droits communautaires des procédures collectives 57

b- L'évolution du critère de l'effet direct des droits communautaires des procédures collectives 57

2- Les conséquences attachées à l'effet direct des droits communautaires des procédures collectives 58

a- L'invocabilité des différents droits des procédures collectives par les particuliers 58

b- L'obligation pour le juge d'appliquer les droits communautaires des procédures collectives 59

B- L'applicabilité immédiate des droits communautaires des procédures collectives 59

1- L'insertion immédiate des droits communautaires des procédures collectives dans l'ordonnancement juridique interne 59

a- La théorie moniste 59

b- La théorie dualiste 60

2- Les conséquences attachées à l'applicabilité immédiate des droits communautaires des procédures collectives 60

a- L'interdiction de toute transformation des droits communautaires des procédures collectives 60

b- La proscription de toute procédure de réception 60

Paragraphe 2/ La neutralisation réciproque des droits communautaires des procédures collectives 61

A- La diversité des formules abrogatoires 61

1- La dimension abrogatoire des droits communautaires des procédures collectives 61

a- La dimension abrogatoire du droit des procédures collectives de l'OHADA 61

b- La dimension abrogatoire des droits des procédures collectives des autres ordres juridiques de l'espace OHADA 61

2- La portée abrogatoire des droits communautaires des procédures collectives .......................................................................................... 62

a- La primauté des droits communautaires sur le droit national des Etats parties 62

b- L'annihilation des dispositions contraires aux droits communautaires 63

B- L'imprécision des formules abrogatoires des droits communautaires des procédures collectives 63

1- L'imprécision formelle des formules abrogatoires 63

2- L'imprécision matérielle des formules abrogatoires 64

Section 2/ L'inexistence d'une hiérarchie entre les droits communautaires des procédures collectives 65

Paragraphe 1/ L'absence d'un critère d'élection d'un droit communautaire des procédures collectives 65

A- L'inexistence d'un critère juridique d'élection d'un droit communautaire des procédures collectives 65

1- L'indépendance des traités constitutifs des ordres juridiques de l'espace OHADA 65

a- L'inexistence d'une hiérarchie entre les différents traités communautaires de l'espace OHADA 65

b- Le fondement de l'absence d'une hiérarchie entre les traités communautaires de l'espace OHADA 66

2- L'indépendance des droits dérivés des traités constitutifs des ordres juridiques de l'espace OHADA 66

a- L'absence de liens entre les sources des droits des procédures collectives ....................................................................................... 66

b- L'égalité des sources du droit communautaire 67

B- L'absence d'un critère judiciaire d'élection d'un droit communautaire des procédures collectives 67

1- L'existence de juridictions autonomes chargées de veiller à l'application des droits communautaires 67

a- Les difficultés pour le juge national de concilier les droits communautaires des procédures collectives 68

b- Le cloisonnement des juridictions communautaires dans leurs ordres juridiques respectifs 68

2- Les conséquences de l'absence d'un critère judiciaire d'élection d'un droit des procédures collectives 69

a- La possibilité d'existence d'une jurisprudence éparse et contradictoire 69

b- Les atteintes aux objectifs du droit des procédures collectives 69

Paragraphe 2/ Les possibilités de règlement des conflits de droits communautaires 70

A- Les solutions préventives 70

1- L'institution d'un système de consultation permanente entre les différentes instances ayant en charge l'élaboration des normes de procédures collectives 70

2- Les recours préjudiciels 70

B- Les solutions curatives 71

1- L'application distributive des droits communautaires des procédures collectives 71

a- La possibilité d'application de normes non concurrentes 71

b- L'impossibilité d'application de la règle en cas de normes concurrentes 71

2- L'inefficacité des méthodes de règlement de conflit des normes 72

a- Les difficultés du choix de la règle de conflit 72

b- Le caractère inopérant des règles de conflit 73

CHAPITRE II/ Les manifestations de l'autonomie dans les droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 73

SECTION 1/ Les objectifs des droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 73

Paragraphe 1/ Les choix politiques des droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 73

A- Des procédures destinées à apurer le passif 74

1- L'apurement du passif : choix principal de l'AUPC 74

a- Un choix clairement affirmé 74

b- Les raisons du choix de l'apurement du passif 74

2- Les choix secondaires de l'AUPC 75

a- Le sauvetage de l'entreprise 75

b- Une protection résiduelle accordée à l'emploi 75

B- Des procédures destinées à atténuer les risques systémiques 76

1- La nécessité d'un droit spécial adapté aux défaillances des entreprises de banque et d'assurance 76

a- Vers une conception économique du droit des procédures collectives 76

b- La justification d'une conception économique du droit des procédures collectives 77

2- L'efficacité d'un droit économique des procédures collectives 77

a- L'évaluation économique de l'efficacité du droit des procédures collectives 77

b- L'évaluation juridique de l'efficacité du droit des procédures collectives 78

Paragraphe 2/ Les manifestations des choix politiques dans la mise en oeuvre des procédures collectives 78

A- L'office du juge dans les procédures collectives d'apurement du passif 78

1- Les pouvoirs étendus du juge dans les procédures collectives d'apurement du passif 79

a- Les libertés d'appréciation du juge dans les procédures collectives d'apurement du passif 79

b- Le pouvoir normatif du juge dans les procédures collectives d'apurement du passif 80

2- Le rôle des créanciers dans les procédures collectives d'apurement du passif 80

a- L'ouverture de la procédure collective à l'initiative des créanciers 80

b- La place des créanciers dans le déroulement de la procédure collective 81

B- La coexistence des organes de régulation avec les organes judiciaires 82

1- Le rôle des organes de régulation dans les procédures collectives destinées à atténuer les risques systémiques 82

a- Le pouvoir de déclenchement de la procédure collective par l'autorité de régulation 82

b- Le pouvoir de contrôle de la procédure par l'autorité de régulation 82

2- Les effets attachés à la coexistence 83

a- Les difficultés de mise en oeuvre de la procédure collective 83

b- La faible prise en compte des droits des créanciers dans les procédures collectives applicables aux banques et aux sociétés d'assurance 83

SECTION 2/ Les rapports entre les droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 84

Paragraphe 1/ La dimension négative des rapports entre les droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 84

A- L'existence de conflits à l'ouverture des procédures collectives 84

1- La difficile détermination du droit des procédures collectives applicable 85

a- Les difficultés tenant aux personnes assujetties au droit des procédures collectives 85

b- Les difficultés tenant au domaine d'application des droits communautaires des procédures collectives 85

2- Les lenteurs liés à l'intervention des autorités de régulation 86

a- Les atteintes à la célérité de la procédure 86

b- Les atteintes à la sécurité de la procédure collective 87

B- La survenance de conflits lors du déroulement de la procédure collective 87

1- La règle de l'UEMOA de l'irrévocabilité des ordres de paiements 87

a- Le caractère inconciliable de la règle avec les dispositions de l'AUPC relatives aux inopposabilités de la période suspecte 88

b- Les difficultés du choix entre la législation UEMOA et la législation OHADA 89

2- La compensation effectuée en chambre de compensation 89

a- Le caractère irrévocable de la compensation effectuée en chambre de compensation 89

b- Les incertitudes sur l'application du droit OHADA des procédures collectives à la compensation interbancaire 90

Paragraphe 2/ La dimension positive des rapports entre les droits communautaires des procédures collectives de l'espace OHADA 91

A- La complémentarité des droits communautaires des procédures collectives 91

1- La quasi inexistence d'un vide juridique en droit des procédures collectives 91

2- L'expansion du droit des procédures collectives 92

B- L'inexistence d'incompatibilités au regard des objectifs du droit des procédures collectives 92

1- L'uniformisation du droit des procédures collectives 92

a- L'assainissement de l'environnement juridique des procédures collectives 92

b- La sécurité juridique dans le droit des procédures collectives 93

2- L'intégration économique à travers les droits des procédures collectives 94

a- La promotion d'entreprises saines et viables 94

b- La garantie des droits des acteurs de la vie économique 94

CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE 95

CONCLUSION GENERALE 97

TABLE DES MATIERES 100

BIBLIOGRAPHIE

* 1 Il s'agit  «  d'ensembles organisés et structurés de normes juridiques possédant leurs propres sources, dotés d'organes et de procédures aptes à les émettre, à les interpréter ainsi qu'à en faire constater le cas échéant, les violations » V. G. ISSAC, Droit communautaire général, Paris, Masson, 1989

* 2 L'OHADA est un groupement de seize (16) pays principalement d'Afrique francophone (Bénin, Burkina-faso, Cameroun, Congo Brazzaville, Côte-d'Ivoire, Gabon, Guinée Bissau, Guinée équatoriale, Mali, Niger, République Centrafricaine, Sénégal, Tchad, Togo, Union des Comores). C'est aussi un traité (signé à Port louis le 17 octobre 1993) conclu entre ces pays pour "unifier" le droit des affaires et palier ainsi la fuite des investisseurs, conséquence de l'insécurité juridique et judiciaire qui existait jusque là.

V. Y. LARBA, « L'OHADA, ses institutions et ses mécanismes de fonctionnement » in Revue burkinabé de droit, n° spécial 39-40, p. 37

* 3 Il s'agit d'abord du domaine géographique car l'OHADA n'est pas la seule organisation intervenant dans l'espace constitué par ses Etats membres. Ensuite, d'autres organisations intervenant dans d'autres branches du droit des affaires émettent des normes susceptibles d'interférer avec la législation OHADA

* 4 L'harmonisation est une opération consistant à mettre en accord des dispositions d'origine différente, plus spécialement à modifier des dispositions existantes afin de les mettre en cohérence entre elles tout en respectant plus ou moins le particularisme des législations nationales. Quand à l'uniformisation, elle se présente comme une méthode plus radicale de l'intégration juridique puisqu'elle consiste à effacer les différences entre les législations nationales en leur substituant un texte unique, rédigé en des termes identiques pour tous les Etats concernés. Sur l'ensemble de la question voir J. ISSA-SAYEGH, « Quelques aspectes techniques de l'intégration juridique, l'exemple des Actes uniformes »in Revue de Droit uniforme, 1999-1, p. 5 et s. V aussi A. JEAMMAUD, « Unification, uniformisation, harmonisation : de quoi s'agit-il ? » in Vers un code européen de la consommation, éd. Bruylant, Bruxelles 1998, p. 35 et s.

* 5 V. D. NDIAYE, « Afrique de l'ouest, crise des banques dans l'UEMOA des années 80 : deux poids, deux mesures », Journal Sud Quotidien du 21 mars 2009.

V. B. POWO FOSSO, « Les déterminants des faillites bancaires dans les pays en développement : le cas des pays de l'Union économique et monétaire ouest africaine », Cahier 2000-2002 Université de Montréal sur http//www.sceco.umontréal.ca

* 6 Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo

* 7 Union Monétaire Ouest Africaine créée le 14 novembre 1973 visant l'harmonisation des législations bancaire et monétaire.

V. J. ISSA-SAYEGH, et J. LOHOUES OBLES, OHADA harmonisation du droit des affaires, Bruylant 2002, p.64 à 67

* 8 V. article 4 du traité de l'UEMOA

* 9 Au Sénégal il s'agit de la loi 2008-26 du 28 juillet 2008 portant réglementation bancaire, de la loi 2008-47 du 3 septembre 2008, de la loi 95-03 du 5 janvier 1995 portant réglementation des institutions mutualistes ou coopératives d'épargne et de crédit. Cette loi a été abrogée par la loi 2008-47 du 3 septembre 2008 portant réglementation des systèmes financiers décentralisés ainsi que son décret d'application 2008-1366 du 28 novembre 2008.

* 10 V. J. ISSA-SAYEGH, et J. LOHOUES OBLE, OHADA, harmonisation du droit des affaires, op.cit., p. 81et s

* 11 Bénin, Guinée Bissau, Guinée équatoriale, Centrafrique, Mali, Cameroun, Niger, Comores, Sénégal, Congo, Tchad, Côte d'Ivoire, Togo

* 12 Voir articles 300 à 329-2 livre III code CIMA

* 13 Ces règles ne sont pas toujours compatibles avec les actes uniformes de l'ohada sur les sociétés commerciales et les procédures collectives d'apurement du passif en l'état actuel

* 14 V. article 2 du traité OHADA : « Pour l'application du présent traité, entrent dans le domaine du droit des affaires l'ensemble des règles relatives au droit des sociétés et au statut juridique des commerçants, au recouvrement des créances, aux sûretés et aux voies d'exécution, au régime du redressement des entreprises et de la liquidation judiciaire, au droit de l'arbitrage, au droit du travail, au droit comptable, au droit de la vente et des transports,et de toute autre matière que le Conseil des Ministres déciderait, à l'unanimité, d'y inclure, conformément à l'objet du présent traité et aux dispositions de l'article 8 ci-après ».

* 15 Op. Cit. Note 2

* 16 V. loi n°2008-26 du 28 juillet 2008, JORS du samedi 8 novembre 2008

* 17 V. S. BRAUDO et A. BAUMANN, Dictionnaire du droit privé, 1996-2009

* 18 V. Y. GUYON, Droit des affaires : entreprises en difficulté, redressement judiciaire, faillite, 8ème éd. Economica 2001, n° 1031.

* 19 V. Acte Uniforme du 10 avril 1998 portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, JO OHADA n°7 du 1er juillet 1998, p. 1 et s.

* 20 V. JORS n°6437 du samedi 8 novembre 2008

* 21 Loi 95-03 du 5 janvier 1995, JORS n°5617 du 21 janvier 1995, pp. 47-52

* 22 V. JORS n°6452 du Samedi 31 janvier 2009

* 23 V. article 2 de l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif.

* 24 Il s'agit des règlements, directives, décisions, recommandations, avis

* 25 Op. Cit. p. 5

* 26 Op. Cit. p.5

* 27 Op. Cit. p.5

* 28 V. M. DELMAS-MARTY, Le pluralisme ordonné et les interactions entre ordres juridiques, discours présenté lors d'une conférence en date du 26 janvier 2006 à l'Université Bordeaux IV. Voir aussi C. PONTHOREAU, Les forces imaginaires du droit, le pluralisme ordonné, édition Seuil, 2006.

* 29 TIGER P., Le droit des affaires en Afrique, 3ème éd., coll. « Que sais-je ? », PUF 2001, p. 11

* 30 MBAYE K., « L'unification du droit des affaires en Afrique » in Revue sénégalaise de droit, 1971, n°10, pp.65 et s.

* 31 V. J. ISSA-SAYEGH, » Quelques aspects techniques de l'intégration juridique: l'exemple des actes uniformes de l'OHADA » in Revue de droit uniforme, 1999-1, p.5

* 32 V. Acte uniforme du 17 avril 1997 relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique, JO OHADA n° 2 du 1er octobre 1997, p. 1 et s.

* 33 V. articles 2 et 3 de l'acte uniforme relatif au droit commercial général, JO OHADA n° 1 du 1er octobre 1997, p.1et s

* 34 V. com. 31 janvier 1961, Bull.Civ. III, n° 55, p.48 qui refuse à des sociétés de forme commerciale qui exploitaient une activité civile d'agriculture le statut des baux commerciaux.

* 35 V. W. JEAN-DIDIER, « L'imparfaite commercialité des sociétés à l'objet civil et à forme commerciale » in Dalloz 1979, chron. p. 7

V. A. DEKEUWER, « Le problème des rapports entre la forme et l'objet des sociétés » JCP, éd. CI, 1977, II, 12392

J. NGEBOU, Le droit commercial général dans l'acte uniforme OHADA, coll. Droit uniforme, PUA, 1998, p. 18

* 36 V. F. DEKEUWER DEFOSSEZ, Droit commercial, 4ème édition, Montchrestien 2002, p. 64

* 37 D'après cette doctrine, il faudrait considérer toutes les hypothèses dans lesquelles le caractère commercial est conféré à l'obligation soit par son objet soit parce qu'elle est accessoire à une opération commerciale. Ainsi en est-il des opérations relatives à une société commerciale et de celles relatives à un fond de commerce.

* 38 Il s'agit essentiellement des sociétés nationales et des sociétés d'économie mixte

* 39 Il s'agit de la loi 84-64 du 16 août 1984 fixant les modalités de la liquidation des établissements publics, des sociétés nationales, des sociétés d'économie mixte, JORS du 1er septembre 1984, p. 590 et s.

* 40 V. article 276 de l"acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique

* 41La considération de la personne

* 42 V. article 6 alinéa 2 de l'acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique

* 43 Mention de l'Etat membre

* 44 La Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA) de l'OHADA est une des quatre institutions prévues à l'article 3 du traité relatif à l'harmonisation du droit des affaires, les trois autres étant le Conseil des Ministres, le secrétariat permanent, et l'Ecole Régionale Supérieure de la Magistrature. La CCJA assure dans les Etats parties l'interprétation et l'application commune du traité, des règlements pris pour son application et des actes uniformes. En matière juridictionnelle, la CCJA intervient désormais en lieu et place des Cours de cassation ou des cours suprêmes nationales. Elle est également compétente pour statuer sur le recours en annulation prévu à l'article 18 du traité OHADA. Parmi ses attributions non juridictionnelles, la cour exerce un rôle consultatif et intervient en matière arbitrale.

* 45Avis n° 02/2000 EP de la CCJA du 26 avril 2000

* 46 Selon l'article 2 de l'AUSCGIE, « les dispositions du présent acte uniforme sont d'ordre public...

* 47 Les opérations d'assurance sont classées par l'article 328 en branches Vie et branches IARD (Industries autres que le risque décès), chaque branche étant elle-même subdivisée en sous branches. L'agrément est accordé par branche ou par sous branches si l'entreprise le demande.

* 48 V. CA. Dakar n° 222 du 12 avril 2001

* 49 Cf. article 2 alinéa 2 de l' AUPC op. cit.

* 50 V. V. VENA-ROBARDET, "situation irrémédiablement compromise et cessation des paiements; deux notions à ne pas confondre" note sous cass. Com. 31 mars 2004, Dalloz 2004, p. 1231

* 51 En effet depuis la loi du 28 mai 1838, il était revenu aux tribunaux de définir la notion de cessation des paiements. Cette définition a évolué dans le temps. Du critère purement matériel de l'arrêt du service de caisse retenu au départ, on est finalement revenu à un autre critère: l'insuffisance de l'actif disponible par rapport au passif exigible.

* 52 G. LIKILLIMBA, A. sous cass.com., 28 août 1998, JCP-La semaine juridique, éd. Entreprises et Affaires, n°49 du 3 décembre 1998, p. 1926 et s.

Cf. les articles 437 du code de commerce de 1807 et 1er de la loi de 1889 portant sur la liquidation judiciaire

V. J. TREILLARD, « Les conditions d'ouverture des procédures collectives » in Les procédures collectives de liquidation et de renflouement des entreprises en droit comparé, sous la direction de René Rodière, Economica, 1976, p. 37 et s.

* 53 V.B MARTINEAU, « La cessation des paiements, notion fonctionnelle » RTD com. 2002, p. 245

* 54 L'ordonnance française du 23 septembre 1967 tendant à faciliter le redressement économique et financier de certaines entreprises visait « les entreprises en situation financière difficile mais non irrémédiablement compromise », c'est-à-dire qui ne sont pas encore en état de cessation des paiements

* 55 V. T. BONNEAU, Droit bancaire, 6ème édition, Montchrestien 2005, p. 270

* 56 V. M. WATRIPONT et J. TIROLE, La réglementation prudentielle des banques, éd. Payot, 1993, p. 35

* 57 V. M. NUSSENBAUM, « La cessation des paiements des banques » Revue de droit bancaire et de la bourse, n°55, mai-juin 1996, p. 79 et s.

* 58 Ibid. L'auteur rapporte une jurisprudence française de 1985 selon laquelle l'examen de ces deux thèses permet de considérer que dans le cas d'une banque, il y a cessation des paiements dès lors que l'établissement bancaire, en plus de ne pas respecter les ratios, ne dispose pas de moyens financiers nécessaires pour remédier à sa situation.

* 59 V. Y. GUYON, Droit des affaires, Droit commercial général et sociétés, 12ème éd., Tome 1 Economica 2003, p.3

* 60 V. M. CABRILLAC, « Vers la disparition du droit commercial » in Etudes offertes à J. Foyer, 1997, p. 329

* 61 V. M-J. CAMPANA, « Le droit des affaires au 21ème siècle » Revue de jurisprudence commerciale, n° spécial, janvier 2001

J. PAILLUSSEAU, « Le big bang du droit des affaires à la fin du 20ème siècle ou les nouveaux fondements et notions du droit des affaires » JCP 1988, I 3330

* 62 V. article 2 du traité relatif à l'Organisation pour l'harmonisation des affaires

* 63 Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle signé à Bangui le 2 mars 1977. L'OAPI est une organisation chargée notamment de mettre en oeuvre et d'appliquer les procédures découlant d'un régime unique de la protection de la propriété intellectuelle, contribuer à la promotion et à la protection de la propriété intellectuelle, susciter la création d'organismes nationaux de protection de la propriété intellectuelle, et enfin centraliser et coordonner les informations de toute nature relatives à la protection de la propriété intellectuelle.

* 64 V. M. ALLAIS, A la recherche d'une discipline économique, 1943, cité par JACQUEMIN A. et SCHRANS G., Le droit économique, PUF, coll. Que sais-je? 1981, p. 14

* 65 V. J. ISSA-SAYEGH, « L'intégration juridique des Etats africains de la zone franc » Penant 1997, n° 823, p. 5

* 66 Le plus ancien en date est celui instituant la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (C.E.D.E.A.O.), signé à Lagos le 28 mai 1975 et révisé à Cotonou le 24 juillet 1993. Il regroupe l'ensemble des Etats de la sous-région

* 67 Op. cit. p. 10

* 68 V. R. GASSIN, « Lois spéciales et droit commun » in Rec. Dalloz 1961, chron. P. 121 et s.

* 69 V. R.GUILLIEN R et J. VINCENT, Lexique des termes juridiques, 13ème édition, Dalloz 2002, p.216

* 70 V. A-M. ASSI ESSO, J-I. SAYEGH, et J. LOHOUES OBLE, CIMA, droit des assurances, coll. Droit uniforme africain, Bruylant 2002

* 71 V. J. CHARPENTIER, « Eléments de cohérence entres ordres juridiques distincts » in Mélanges en l'honneur de Louis Dubouis, Au carrefour des droits, Dalloz, juillet 2002, p. 292 et s.

* 72 V. article 2 alinéa 1 de l'AUPC

* 73 V. article 5 alinéa 3 de l'AUPC

V. F. DERRIDA, « Concordat préventif et droit français » Mélanges Hamel, 1961, p. 489

* 74 V. article 6 AUPC

* 75 V. article 8 et 9 de l'AUPC

* 76 V. article 11 AUPC

* 77 V. article 15-2 alinéa 3

* 78 Etant donné que l'acte uniforme est peu explicite sur la question, on peut se référer aux dispositions régissant le concordat de redressement judiciaire ainsi qu'aux conditions de validité de tout contrat.

* 79 Cass. Civ., 14 mai 1930 et 2 mars 1932, Dalloz 1933, I, 121, note Besson

* 80 Cass. Com., 7 octobre 1981, Bull. Cass., 1981, 4, n° 346; Cass. Com., 8 novembre 1988, Rev. Proc. Coll., 1989, 133.

* 81 V. article 33 alinéa 2 de l'AUPC

* 82 Les créanciers antérieurs au jugement de la procédure collective sont appelés créanciers dans la masse. C'est ceux qui ont intérêt à l'ouverture de la procédure collective et justifient la nomination d'un syndic qui les représente et agit en leur nom et pour leur compte.

* 83 V. article 72 AUPC

* 84 Cass. Com., 17 janvier 1956, Dalloz 1956, 265, note Houin

* 85 Cass. Civ., 28 janvier 1954, Dalloz 1954, 217, note Levasseur

* 86 L'article 154 AUPC soumet la vente sur saisie immobilière aux "dispositions relatives à la matière" c'est-à-dire aux dispositions de l'AUPSRVE traitant de la saisie immobilière (articles 246 à 323), sauf celles auxquelles l'acte uniforme déroge.

* 87 Il s'agit des articles 155 à 158 AUPC et des dispositions non contraires de l'AUPSRVE

* 88 V. R. ROBLOT et G. RIPERT, par P. DELEBECQUE et M. GERMAIN, Traité de droit commercial, 15ème éd., tome 2, LGDJ 1995, n°3275

* 89 V. articles 166 et 167 AUPC

* 90 Voir article 203 alinéa 1, A.U.S.C.G.I.E

* 91 Cf art 203 al1 A.U.S.C.G.I.E

* 92 Ce n'est pas un acte notarié, mais un acte amiable dressé sans intervention des commissaires priseurs, mais pour le liquidateur lui-même et conformément aux règles du commerce.

* 93 Il ne faut pas perdre de vue qu'en cas de pluralité de liquidateurs, l'assignation délivrée à un seul d'entre eux serait nulle.

* 94 Alger 5 Fevrier. 1880, Journal des sociétés 1882. p.18

* 95 Telle est la solution qui prévaut de nos jours en Droit Français. L'acte uniforme sur les sociétés civiles en cours de rédaction n'apportera pas des changements dans ce sens.

* 96 Cass. Com. 30 Mai 1918, Revue des sociétés 1919. 351, Note Bousquet, JC. - Cass. Com. 26Jan 1993. Revue des sociétés 1993. 394, Note Chartier, Y.

* 97 A.F. NGOMO, Ouvrage précité, p. 93, No 321. Cass. Com. 26 Jan 1996 précité.

* 98 On note ainsi une importante législation en la matière : le règlement 15-2002/CM/UEMOA, la convention STAR UEMOA, la convention SICA UEMOA

* 99 E. VAN DER HAUTE, « La vente de produits d'assurance par les banques : pièges et écueils » in Actes des séminaires tenus à l'université libre de Bruxelles les 21 février, 7, 14, et 21 mars 2005, p.52

* 100 V. article 2 alinéa 2 de la loi 2008-26 du 28 juillet 2008 portant règlementation bancaire

* 101 V. J-P. BUYLE, « L'organisation de la distribution des produits « bancassurfinance » » in Bancassurance sous la direction de Jean-luc Fagnart, collection de la faculté de droit université libre de Bruxelles, Actes des séminaires tenus les 21 février, 7, 14 et 21 mars 2005, éd. Bruylant 2005

* 102 V. C. AUBRY et R. RAU, Cours de droit civil français, 4ème éd., Tome 6, 1873, p. 229

* 103 V. B. PAYS, La gestion de patrimoine, coll. « Que sais-je ? », PUF 1992, spéc. P. 30 et s.

* 104 V. Y. LAMBERT-fAIVRE, Droit des assurances, 8ème éd. Dalloz 1992, n°888, p. 648

* 105 V. T. BONNEAU, Droit bancaire, coll. Domat Droit privé, éd. Montchrestien 1994, p. 433

* 106 V. D.C. LAMBERT, Economie des assurances, éd. Armand Colin, 1996

* 107 V. C.A COLLIARD et G. TIMSIT, Les autorités administratives indépendantes, PUF, 1988.

* 108 V. article 2 de l'annexe à la convention portant création de la commission bancaire de l'union monétaire ouest africaine

* 109 V. articles 87, 88 de la loi 2008-26 portant réglementation bancaire

* 110 V. CE, 20 février 1963, Comptoir financier A. Samain, Rec., p. 480 cité par M. CONTAMINE-RAYNAUD, « La commission bancaire, autorité et juridiction » in Nouveaux juges, nouveaux pouvoirs ? Mélanges en l'honneur de Roger Perrot, Dalloz 1995, P. 407 et s.

* 111 V. CE 15 octobre 1954, Bontemps, Rec., p. 538 et CE , 18 mars 1984, Crédit commercial, Rec., p. 480 cités par M. CONTAMINE-RAYNAUD op. cit.

* 112 V. article 325 code CIMA

* 113 V. article 20 code CIMA

* 114 V. article 317 du code CIMA et 22 du traité

* 115 Il s'agit de la désignation d'un administrateur provisoire à qui sont transférés les pouvoirs nécessaires à l'administration et à la direction de l'entreprise. Cette désignation est faite soit à la demande des dirigeants lorsqu'ils estiment ne plus être en mesure d'exercer normalement leurs fonctions, soit à l'initiative de la commission régionale de contrôle des assurances ou de son mandataire lorsque la gestion de l'établissement ne peut plus être assurée dans des conditions normales, ou lorsqu'à été prise la sanction prévue au 5° alinéa du paragraphe a) de l'article 312

* 116 V. article 325-2 du code CIMA

* 117 V. article 60 de la loi 2008-26 du 28 juillet 2008 portant règlementation bancaire

* 118 V. article 91 alinéa 2 de la loi 2008-26 du 28 juillet 2008 portant règlementation bancaire

* 119 V. article 321 c) du code CIMA

* 120 V. article 2 de l'annexe à la convention portant création de la commission bancaire de l'union monétaire ouest africaine

* 121 V. R. GASSIN, « Lois spéciales et droit commun » Dalloz 1961, chron. P. 91 et s.

* 122 Aristote proposait de classer les choses d'intérêt social en genres et en espèces afin de déterminer les règles qui doivent leur être appliquées. V. M. VILLEY, Deux conceptions du droit naturel dans l'antiquité, Rev. Hist. Droit 1951, p. 485

* 123 V. J. CARBONNIER, Droit civil, 3ème édition, Tome 1, LGDJ 1960, p. 89

* 124 Avis n°02/2000 EP de la CCJA du 26 avril 2000

* 125 V. CJCE, Affaire 106/77, Simmenthal, 9 mars 1978, Rec. 1978, p. 629 et s. cité par L.M. IBRIGA, et P. MEYER, « La place du droit communautaire UEMOA dans le droit interne des Etats membres » Revue Burkinabé de Droit, n° 37-1er semestre 2000, p. 39.

* 126 V. article 1er du traité du 17 octobre 1993 relatif à l'harmonisation du droit des affaires : « Le présent traité a pour objet l'harmonisation du droit des affaires dans les Etats parties... »

* 127 V. article 4 du traité de l'UEMOA du 29 janvier 2003

* 128 V. Le préambule du traité instituant la CIMA ainsi que l'article 1er du traité

* 129 V. CJCE, arrêt du 05 février 1963, Van Gend en Loos c/ administration fiscale néerlandaise, Grands arrêts de la jurisprudence communautaire, 15ème éd., Dalloz 1993, p.98

* 130 V. CJCE 14 décembre 1971, Politi c/ Ministère des finances,aff.43/71,rec.1039

* 131 V. cass. crim. 07 janvier 1972, Guerrini, RTDE 1972 et 06 juin 1985, Alcain, RGDIP 1986

* 132 V. article 43 du traité UEMOA, article 40 du traité CIMA, article 10 du traité OHADA

* 133 CE., 1er Mars 1968, Syndicat général des fabricants de semoules de France, GAJA, 12ème éd., Dalloz 1999, p.207

* 134 CE., 20 octobre 1989, GAJA, 14ème éd., Dalloz 2003, p. 695

* 135 CE., 24 février 1990, GAJA, 12ème éd., Dalloz 1999, p. 505

* 136 V. J. COMBACAU et S. SUR, Droit international public, 2ème éd. Montchrestien 1995, p. 182

* 137 V. article 10 du traité UEMOA

* 138 V. article 3 du traité CIMA

* 139 CJ UEMOA avis n° 001/2003 en date du 18 mars 2003

* 140 Avis du 30 avril 2001

* 141 V. P.Y. MONJAL, Recherche sur la hiérarchie des normes communautaires, XV, LGDJ 2000, p. 629

* 142 V. P. DAILLIER et A. DELLET, Nguyen Quoc Din, Droit international public, 7ème éd., LGDJ 2002, p. 114-116

* 143 V. C. LEBEN, « De quelques doctrines de l'ordre juridique » Revue française de théorie et de culture juridique, 33. Ordre juridique ? 2001, p. 19 et s.

* 144 V. H. KELSEN, « La théorie juridique de la convention » in Archives de philosophie du droit, 1940, p. 32

* 145 V. D. CARREAU, Droit international, coll. Etudes Internationales, 5ème éd. Pedone 1997, p. 66 et s.

* 146 V. article 14 du traité OHADA

* 147 Au plan juridictionnel, la Cour connaît du contentieux de la déclaration et de l'annulation

* 148 Article 47 du code CIMA

* 149 V. C. ROUSSEAU, « De la compatibilité des normes juridiques contradictoires dans l'ordre international », RGDIP 1932, p. 177 ;

V. P. LESCOT, « L'interprétation judiciaire des règles de droit uniforme » JCP 1963, doct. 1756

V. P. LAGARDE, « Les interprétations divergentes d'une loi uniforme donnent-elles lieu à un conflit de lois : à propos de l'arrêt HOCKE » note sous com. 4 mars 1963 in RCDIP 1964, p. 235

* 150 En application de cet article, le conseil des ministres peut inclure à l'unanimité d'autres matières qu'il considérerait comme relevant du droit des affaires.

* 151 V. M. MAIDAGI, « Organisation et fonctionnement de la CCJA et perspectives d'évolution » Penant n°865, octobre-décembre 2008, p. 405. Ces matières sont le doit bancaire, le droit de la concurrence, le droit de la propriété intellectuelle, le droit des sociétés civiles, le droit des sociétés coopératives et mutualistes, le droit de la preuve et le droit des contrats.

* 152 V. avis 001, dossier 6-99, 2 février 2000, Rev. Burkinabé de droit, 2000, p. 127

* 153 V. article 100 de la loi bancaire 2008-26 portant règlementation bancaire

* 154 V. article 68.4 de l'AUPC : « Sont inopposables de droit s'ils sont faits pendant la période suspecte, tout paiement de dettes échues fait autrement qu'en espèces, effet de commerce, virement, prélèvement, carte de paiement ou de crédit ou compensation légale, judiciaire ou conventionnelle de dettes ayant un lien de connexité entre elles ou tout autre mode normal de paiement »

* 155 V. F. AUBERT, « Les finalités des procédures collectives » in Prospectives du droit économique, Dialogues avec M. Jeantin, Dalloz 1999, p. 379. L'auteur estime que la défense des intérêts des créanciers et le paiement de leurs créances demeurent l'une des finalités incontournables du droit des entreprises en difficulté.

* 156 V. R. SZRAMKIEWICZ, Histoire du droit des affaires, Montchrestien, 1989, p. 57

* 157 V. C. LABRUSSE, « L'évolution du droit français depuis le code de commerce » in Faillites, dir. R. Rodière, Dalloz 1970, p.5

* 158 V. J. PAILLUSSEAU, « Du droit des faillites au droit des entreprises en difficulté » in Mélanges R. Houin, Sirey 1985, p. 109

* 159 V. J. CARBONNIER, « Les phénomènes d'inter-normativité » in Essais sur les lois, Répertoire du notariat Défrénois, 1979, p. 251.

* 160 V. R. BLAZY, La faillite, éléments d'analyse économique, Economica, 2000, p.11

* 161 V. G. RECASSENS, « Faut-il adopter un système pro-créanciers de défaillances ? Une revue de la littérature » in Finance Contrôle et stratégie_ Vol. 6, n°1, mars 2003, p. 125

* 162 V. article 16 de l'AUPC

* 163 V. article 62 de l'AUPC

* 164 V. article 113 de l'AUPC

* 165 V. article 97 de l'AUPC

* 166 V. article 109 de l'AUPC

* 167 V. article 114 alinéa 2 de l'AUPC

* 168 V. A. FENEON, « Aperçu de la jurisprudence OHADA en matière de procédures collectives » in Revue trimestrielle de droit africain Penant, n° 865, octobre-décembre 2008, p.492 et s.

* 169 V. Cass.com., 17 janvier 1956, Dalloz 1956, p. 265

* 170 V. Cass.civ., 28 janvier 1954, Dalloz 1954, p. 217

* 171 V. article 325-2, al. 1er

* 172 Le code CIMA institue un privilège général mobilier pour garantir les engagements des entreprises d'assurance envers les assurés et bénéficiaires de contrats (article 332, al. 1er)

* 173 En effet, le rang de ces créanciers est variable selon la législation de chaque Etat membre sauf si ces Etats sont membres de l'OHADA. En effet, l'acte uniforme portant organisation des sûretés ainsi que l'AUPC ont institué un classement des créanciers bénéficiaires de sûretés (voir articles 166 et 167 de l'AUPC et les articles 148et 149 de l'Acte uniforme portant organisation des sûretés)

* 174 L'article 2 de l'AUSCGIE dispose : « Les dispositions du présent acte uniforme sont d'ordre public... ». Cet article laisse entendre que toutes les dispositions de l'acte uniforme sont d'ordre public. Tel est-il réellement le cas ?

* 175 La procédure d'alerte n'est pas une procédure collective. Cependant elle peut aboutir à l'ouverture d'une procédure collective d'où l'intérêt qui lui est accordé dans le déclenchement de la procédure

* 176 V. article 87 de la loi 2008-26 portant réglementation bancaire op.cit.

* 177 Ibid. article 88

* 178 V. A.T. NDIAYE, « Conflit de normes en droits communautaires OHADA et UEMOA : Exemple des paiements réalisés dans les systèmes de paiement intégrés en cas de procédures collectives d'apurement du passif » in Revue de droit uniforme, 2007, p. 284-322

* 179 Ibid.

* 180 V. articles 3 et 4 du règlement 15/2002/CM/UEMOA

* 181 V. article 7 du règlement 15/2002 op.cit.

* 182 M.N. LEGRAND, «Les pouvoirs du débiteur dessaisi» in Revue des Procédures Collectives, 1991, p. 11

* 183 V. G. ISSAC, Droit communautaire général, Paris, Masson, 1989, op.cit.

* 184 V. E. CEREXHE, « L'intégration juridique comme facteur d'intégration régionale » in Revue burkinabé de droit, n° spécial 39-40, p. 21

* 185 V. F.W. SAWADOGO, « L'application judiciaire du droit des procédures collectives en Afrique francophone à partir de l'exemple du Burkina Faso » in Revue burkinabé de droit, n°26, juillet 1994, p. 191-248

* 186 V. F.M. SAWADOGO, OHADA, droit des entreprises en difficulté, coll. Droit uniforme, Bruxelles, Bruylant 2002, p.11

* 187 V. M.A. FRISON ROCHE, « Les difficultés méthodologiques d'une réforme du droit des faillites » in Rec. Dalloz Sirey, 1994, n° 2, chron. III, p. 20

* 188 V. E. CEREXHE, « L'intégration juridique comme facteur d'intégration régionale » op. cit.

* 189 V. Rapport annuel de la Commission bancaire 2002, le dispositif prudentiel applicable aux banques et aux établissements financiers de l'Union Monétaire Ouest Africaine

* 190 V. Titre VI de la loi bancaire 2008-26 portant réglementation bancaire intitulé Contrôle des établissements de crédit et protection des déposants ; V. Livre III du code CIMA consacré aux entreprises d'assurance, article 300 et s.

* 191 V. M. VIRRALY, « Sur un pont aux ânes : les rapports entre droit international et droits internes » in Mélanges Rolin, Pedone 1964, p. 488-505

* 192 V. article 6 du traité UEMOA, article 47 du code CIMA et articles 10 du traité OHADA et 257 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif

* 193 Ceci explique que le problème de l'incompatibilité entre les règles de l'UEMOA et celles de l'OHADA ne puisse pas être résolu à la lumière de la jurisprudence Simmenthal de la Cour de Justice des Communautés

Européennes qui, tirant toutes les conséquences de la primauté du droit communautaire, affirme l'inapplicabilité de plein droit de toute norme nationale incompatible avec le droit communautaire. V. C.J.C.E., 9 mars 1978, aff. 106/77, Simmenthal, Recueil 1978, p. 609

* 194 V. J. ISSA SAYEGH, « Quelques aspects techniques de l'intégration juridique : l'exemple des actes uniformes de l'OHADA » op.cit.

* 195Une solution du reste consacrée par le droit européen à l'article Article 234 du traité CE de Rome, alinéa 1 qui dispose: « Les droits et obligations résultant de conventions conclues antérieurement à l'entrée en vigueur du présent traité, entre un ou plusieurs Etats membres d'une part, et un ou plusieurs Etats tiers d'autre part, ne sont pas affectés par les dispositions du présent traité » ; tout comme par la jurisprudence de la Cour de Luxembourg (Aff. 21 à 24/72, International Fruit Company, 12/12/72, Recueil, 1972, p. 1219 ; aff. 812/79, Burgoa, 14/10/80, Recueil, 1980, p. 2787).

* 196 Secrétariat Exécutif de la C.E.D.E.A.O., Mémorandum sur les axes de coopération entre l'UEMOA, le

CILSS et la CEDEAO, document référencé ECW/MINCFN/3 septembre 1998, p.1

* 197 Existence de larges domaines concurrents, absence de hiérarchie et d'une instance de régulatrice unique.

* 198V. D. BA, « Le problème de la compatibilité entre l'UEMOA et l'OHADA », in La libéralisation de l'économie dans le cadre de l'intégration régionale : le cas de l'UEMOA, sous la direction de Pierre MEYER, Publication du CEEI N°3, Ouagadougou, Imprimerie Presses Africaines, 2001 p. 182

* 199 V. C. ROUSSEAU, Droit International Public, 11ème édition, Paris Dalloz, 1987, p.55

* 200 V. article 53 alinéa 1er du traité instituant l'OHADA qui dispose : « Le présent traité est, dès son entrée en vigueur, ouvert à l'adhésion de tout Etat membre de l'OUA et non signataire du traité. Il est également ouvert à l'adhésion de tout autre Etat non membre de l'OUA invité à y adhérer du commun accord de tous les Etats parties.»






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