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Le droit international humanitaire et la protection des personnes fragiles par nature dans les conflits armés

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par Fatou Moctar FALL
Université Gaston Berger - maitrise 2010
  

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Paragraphe 2 : La répression internationale des violations graves du DIH

Aujourd'hui le consensus s'est clairement dégagé dans la Communauté Internationale, sur la nécessité de poursuivre et de punir, en tant que criminels, les auteurs des graves infractions au droit des conflits armés.

L'émergence de la prise de conscience collective de la nécessité de poursuivre et de punir, au niveau international, les crimes les plus graves perpétrés à l'encontre de la personne humaine et des populations civiles, remonte à la fin de la seconde guerre mondiale. En effet, le 8 août 1945, le Tribunal militaire international de Nuremberg est institué pour juger les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité commis par les Nazis. Le 19 janvier 1946, le Tribunal militaire international pour l'Extrême-Orient était créé à Tokyo pour juger les responsables de la guerre du Pacifique. Ces juridictions auront contribué à jeter les bases du droit pénal international moderne, en définissant notamment les crimes contre la paix, les crimes de guerre et contre l'humanité et donner le signal de l'adoption, dans le cadre des Nations Unies, d'une base juridique nouvelle, intégrée dans des conventions internationales.

Il convient donc d'analyser ici le cadre de répression des violations graves du DIH dans le contexte des conflits internes (A), ainsi que les obstacles à cette répression (B).

A- Le cadre de répression des violations graves du DIH

La répression des violations graves du DIH, passe nécessairement par l'établissement d'une juridiction pénale internationale, mais auparavant il faudra situer les responsabilités.

La situation des responsabilités

Il faut faire la distinction entre la responsabilité imputable à l'Etat ou aux groupes d'opposition armés, de la responsabilité pénale individuelle.

La responsabilité de l'Etat et des groupes d'opposition armés pour les violations du DIH

Plusieurs situations peuvent se présenter qui entraînent la responsabilité de l'Etat pour les violations du DIH qui lui sont attribuables. Il s'agit notamment de :

«La responsabilité de l'État en ce qui concerne les violations commises par ses propres organes, y compris ses forces armées».

Cette règle est une application particulière de la règle générale sur la responsabilité des États pour fait internationalement illicite, qui stipule qu'un État est responsable du comportement de ses organes66(*). Les forces armées sont considérées comme un organe de l'État, à l'instar de toute autre instance exerçant des fonctions exécutives, législatives ou judiciaires.

L'application de cette règle générale d'attribution de responsabilité au DIH est reflétée dans les quatre Conventions de Genève, qui stipulent l'existence de la responsabilité de l'État, en plus de l'exigence de poursuivre les personnes qui commettent des infractions graves67(*). Le principe selon lequel la responsabilité des États existe en sus de la responsabilité pénale des individus est aussi réaffirmé dans le Deuxième Protocole à la Convention de La Haye pour la protection des biens culturels68(*).

Il existe aussi de la jurisprudence à l'appui de cette règle. Le TPIY a considéré dans son jugement relatif à l'affaire Furundúija en 1998, comme dans son arrêt en appel dans l'affaire Tadiæ en 1999, qu'un État était responsable du comportement de ses forces armées.

Un État est aussi responsable des omissions commises par ses organes lorsqu'ils ont le devoir d'agir, comme dans le cas des commandants et autres supérieurs hiérarchiques qui ont la responsabilité d'empêcher les crimes de guerre et d'en punir les responsables. Ce principe est reflété à l'art. 2 du Projet d'articles sur la responsabilité de l'État, qui dispose qu'un fait internationalement illicite peut consister «en une action ou une omission».

Les États sont aussi responsables des actes commis par d'autres personnes ou entités qu'ils ont habilitées, conformément à leur droit interne, à exercer des prérogatives de puissance publique69(*). Cette règle se fonde sur l'idée que les États peuvent avoir recours à des entités paraétatiques, plutôt qu'à des organes de l'État, pour effectuer certaines activités, mais qu'ils n'échappent pas pour autant, ce faisant, à leur responsabilité en tant qu'État. Les États sont responsables des actes des sociétés ou des personnes privées qui sont employées par les forces armées pour accomplir des tâches qui incombent habituellement aux forces armées : les mercenaires ou les sociétés militaires privées sont des exemples de ces personnes ou entités.

Un État peut aussi être tenu responsable des actes commis par des personnes ou des groupes qui ne sont ni ses organes, ni habilités, en droit national, à exercer des prérogatives de puissance publique, si ces personnes ou ces groupes agissent en fait sur les instructions ou les directives, ou sous le contrôle, de cet État.

Dans l'arrêt rendu en appel dans l'affaire Tadiæ en 1999, le TPIY a indiqué que le degré requis de contrôle de l'État pouvait être variable. Selon le Tribunal, le comportement d'une personne privée ou d'un groupe sans organisation militaire n'est attribuable à l'État que si des instructions spécifiques concernant ce comportement ont été données. Toutefois, le comportement des forces armées, milices ou unités paramilitaires subordonnées est attribuable à l'État si celui-ci exerce un contrôle «global». Selon le Tribunal, un tel contrôle existe lorsque l'État non seulement assure le financement, la formation et l'équipement de ce groupe ou lui apporte un soutien opérationnel, mais encore lorsqu'il joue un rôle dans l'organisation, la coordination ou la planification des actions militaires du groupe en question. Cependant, l'exigence du «contrôle global» ne va pas jusqu'à inclure «le fait pour l'État de donner des ordres spécifiques, ni la direction par l'État de chaque opération individuelle».

Dans des cas où les groupes armés opèrent sur le territoire d'un autre État, le Tribunal a considéré que «des éléments de preuve plus complets et plus convaincants sont nécessaires pour démontrer que l'État exerce effectivement le contrôle des unités ou des groupes, non seulement par leur financement et leur équipement, mais aussi par une direction générale ou une aide à la planification de leurs actions».

Comme l'indique le commentaire sur le Projet d'articles sur la responsabilité de l'État, «c'est au cas par cas qu'il faut déterminer si tel ou tel comportement précis était ou n'était pas mené sous le contrôle d'un État et si la mesure dans laquelle ce comportement était contrôlé justifie que le comportement soit attribué au dit Etat».

La responsabilité de l'Etat pour violation du DIH, est une responsabilité civile. Ce dernier est donc tenu de réparer intégralement la perte ou le préjudice causé. Ceci découle directement du principe juridique de base selon lequel toute infraction de la loi entraîne une obligation de réparer, ainsi que de la responsabilité de l'État à l'égard des violations qui lui sont attribuables.

La pratique varie en ceci qu'elle fait parfois mention du devoir de réparation en termes généraux, tandis que dans d'autres cas elle mentionne des formes spécifiques de réparation, y compris la restitution, l'indemnisation et la satisfaction. Des réparations ont été fournies dans certains cas parce que le gouvernement reconnaissait sa responsabilité de réparer, et parfois parce qu'il reconnaissait qu'il devrait le faire. Cependant, en raison de la nature des conflits armés non internationaux, les procédures qui ont été instituées pour apporter réparation dans les conflits armés internationaux ne sont pas nécessairement pertinentes dans ce cadre. Dans un conflit armé non international, en particulier, les victimes subissent des violations à l'intérieur de leur propre État, et elles ont généralement accès aux tribunaux internes pour demander réparation conformément au droit interne.

La possibilité pour une victime d'une violation du DIH de demander réparation à un État peut se déduire de l'art. 75, paragraphe 6 du Statut de la CPI, qui stipule que «les dispositions du présent article s'entendent sans préjudice des droits que le droit interne ou le droit international reconnaissent aux victimes». L'art. 38 du Deuxième protocole à la Convention de La Haye pour la protection des biens culturels, qui mentionne expressément l'obligation de réparation des États, s'applique dans tous les types de conflit armé.

Par ailleurs, les groupes d'opposition armés sont tenus de respecter le DIH et doivent opérer «sous la conduite d'un commandement responsable»70(*). On peut donc considérer qu'ils sont responsables des actes commis par leurs membres, mais les conséquences de cette responsabilité ne sont pas claires. L'art. 14, paragraphe 3 du Projet d'articles sur la responsabilité de l'État, tel qu'adopté provisoirement en première lecture en 1996, disposait que le fait que le comportement d'un organe d'un mouvement insurrectionnel ne devait pas être considéré comme un fait de l'État «est sans préjudice de l'attribution du comportement de l'organe du mouvement insurrectionnel à ce mouvement dans tous les cas où une telle attribution peut se faire d'après le droit international». Bien que cet article ait été supprimé par la suite, parce qu'il était considéré comme étranger à l'objet en discussion, le rapporteur spécial avait relevé que «la responsabilité de tels mouvements, à raison par exemple de violations du DIH, peut certainement être envisagée». Du fait de l'exclusion de ce sujet du projet d'articles, l'art. 10 se limite à affirmer que le comportement d'un mouvement insurrectionnel qui devient le nouveau gouvernement doit être considéré comme un fait de cet État d'après le droit international.

Outre la pratique qui indique l'obligation des groupes d'opposition armés de respecter le DIH, il existe quelques exemples d'attribution de responsabilité à des groupes d'opposition armés. Ainsi, dans un rapport sur la situation des droits de l'homme au Soudan, le rapporteur spécial de la Commission des Nations Unies pour les droits de l'homme a déclaré que l'Armée populaire de libération du Soudan était responsable des meurtres et enlèvements de civils, pillages et prises en otage d'agents des organismes de secours commis par «des chefs militaires locaux issus de ses propres rangs».

A l'instar des Etats, les groupes d'opposition armés doivent également réparer les préjudices causés par les violations du DIH.

Il existe des exemples de pratique des Nations Unies à l'appui de l'obligation des groupes d'opposition armés de fournir des réparations appropriées. Dans une résolution sur le Libéria adoptée en 1996, le Conseil de sécurité de l'ONU a demandé «aux chefs des factions» d'assurer la restitution immédiate des biens pillés.

Même si l'on peut faire valoir que les groupes d'opposition armés sont responsables des actes commis par leurs membres, les conséquences de cette responsabilité ne sont pas claires. En particulier, la question de savoir dans quelle mesure les groupes d'opposition armés ont l'obligation de fournir des réparations complètes n'est pas claire, même si, dans de nombreux pays, les victimes peuvent engager une procédure civile pour préjudices subis contre les responsables.

Outre la responsabilité des Etats et des groupes d'opposition armés, la responsabilité civile ou pénale individuelle pour violation des règles du DIH peut être engagé. Toutefois nous n'aborderons ici que la responsabilité pénale individuelle.

La responsabilité pénale individuelle

La responsabilité pénale individuelle pour les crimes de guerre commis dans des conflits armés non internationaux a été explicitement incluse dans trois traités récents de DIH, à savoir le Protocole II à la Convention sur les armes classiques, tel qu'il a été modifié, le Statut de la CPI et le Deuxième Protocole à la Convention de La Haye pour la protection des biens culturels71(*). Il est implicitement reconnu dans deux autres traités récents : la Convention d'Ottawa sur l'interdiction des mines antipersonnel et le Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés, qui exigent des États que les comportements interdits, y compris dans les conflits armés non internationaux, soient passibles de poursuites pénales72(*). Les Statuts du TPIR et du TSSL stipulent explicitement que les personnes physiques sont responsables pénalement pour les crimes de guerre commis dans des conflits armés non internationaux73(*).

Les procès de personnes accusées de crimes de guerre commis dans des conflits armés non internationaux devant le TPIY et le TPIR confirment la responsabilité pénale des personnes physiques à l'égard de ces crimes. L'analyse faite par la Chambre d'appel du TPIY dans l'affaire Tadiæ en 1995 est à cet égard particulièrement pertinente; le Tribunal a conclu à cette occasion à l'existence d'une responsabilité pénale individuelle pour les crimes de guerre commis dans les conflits armés non internationaux.

Les personnes physiques sont pénalement responsables non seulement lorsqu'elles commettent un crime de guerre, mais aussi lorsqu'elles tentent de commettre un tel crime, ainsi que lorsqu'elles apportent leur aide, leur concours ou toute forme d'assistance à la commission d'un crime de guerre. Elles sont aussi responsables si elles planifient ou incitent à commettre un crime de guerre74(*).

Les comandants et autres supérieurs hiérarchiques sont pénalement responsables des crimes de guerre commis sur leurs ordres. Cette règle est inscrite dans les Conventions de Genève ainsi que dans la Convention de La Haye pour la protection des biens culturels et dans son Deuxième Protocole, qui exigent des États qu'ils poursuivent non seulement les personnes qui commettent des infractions ou des violations graves, respectivement, mais aussi les personnes qui donnent l'ordre de les commettre75(*). Les Statuts de la CPI, des TPI pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda et du TSSL76(*).

Pour ce qui est des actes accomplis par des subordonnés conformément à un ordre de commettre des crimes de guerre, il convient de distinguer deux situations. Premièrement, lorsque les crimes de guerre ont effectivement été commis, la pratique étatique est claire : les supérieurs sont responsables, comme l'affirme cette règle. Deuxièmement, lorsqu'il n'y a pas eu commission des crimes de guerre, mais seulement tentative, la pratique des États tend à indiquer qu'il y a aussi responsabilité des supérieurs. Le Statut de la CPI spécifie que la responsabilité des supérieurs hiérarchiques est engagée lorsqu'il y a commission ou tentative de crime77(*).

Les commandants et autres supérieurs hiérarchiques sont aussi pénalement responsables des crimes de guerre commis par leurs subordonnés s'ils savaient, ou avaient des raisons de savoir, que ces subordonnés s'apprêtaient à commettre ou commettaient ces crimes et s'ils n'ont pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables qui étaient en leur pouvoir pour en empêcher l'exécution ou, si ces crimes avaient déjà été commis, pour punir les responsables.

Il faut préciser, que le fait d'obéir à un ordre d'un supérieur hiérarchique n'exonère pas le subordonné de sa responsabilité pénale s'il savait que l'acte ordonné était illégal ou s'il aurait dû le savoir en raison du caractère manifestement illégal de l'acte ordonné. La règle selon laquelle les ordres donnés par des supérieurs hiérarchiques ne peuvent exonérer la personne ayant commis un crime de sa responsabilité est affirmée dans les Statuts de la CPI, des Tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda et du TSSL78(*).

Néanmoins, le fait d'obéir à des ordres peut être pris en considération pour atténuer la peine. Dans son rapport au Conseil de sécurité de l'ONU sur le projet de Statut du TPIY en 1993, le Secrétaire général de l'ONU a évoqué la possibilité que l'obéissance à des ordres donnés par des supérieurs soit considérée comme une circonstance atténuante.

Une fois les responsabilités pénales situées, il convient de faire juger les auteurs de violations graves du DIH par des juridictions pénales internationales.

L'établissement d'une juridiction pénale internationale

C'est à partir de 1993, que des juridictions pénales internationales vont voire le jour dans le cadre des conflits internes au cours desquelles allaient être commis les crimes les plus graves depuis la seconde guerre mondiale, sur les territoires de l'ex-Yougoslavie et du Rwanda. Le 1e juillet 2002, ce fut l'entrée en fonction symbolique de la CPI. Toutefois, L'éloignement excessif des tribunaux ad hoc et de la CPI n'offrant en effet pas la meilleure garantie de réconciliation nationale sur le terrain, a récemment conduit à la mise sur pied de juridictions mixtes.

Les tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda

En l'absence d'une juridiction pénale internationale permanente, le Conseil de sécurité crée, dans le cadre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies relatif à l'«action en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d'acte d'agression», deux tribunaux ad hoc. Le 25 mai 1993, la résolution 827 instituait le TPIY, avec pour mission de poursuivre les personnes responsables de violations graves du droit international sur ce territoire depuis le 1er janvier 1991. Le 8 novembre 1994, la résolution 955 créait le TPIR, chargé de poursuivre les personnes responsables d'actes de génocide et d'autres violations graves du DIH commis sur le territoire du Rwanda ou par des citoyens rwandais sur le territoire des Etats voisins, entre le 1er janvier et le 31 décembre1994.

C'est l'ampleur des crimes perpétrés - avec, d'un côté, plus de deux cent mille morts, des dizaines milliers de réfugiés et de disparus, l'épuration ethnique et les viols érigés comme armes de guerre en ex-Yougoslavie et, de l'autre, la liquidation physique systématique de près d'un million de Rwandais en raison de leur appartenance ethnique ou de leur opposition au régime en place - qui a, dans les deux cas, contraint la communauté internationale à l'action.

Les deux tribunaux ont été créés par une décision politique, pour rechercher et punir les individus responsables des crimes, quelles qu'aient été leurs fonctions à l'époque des faits. Leur existence est limitée tant dans le temps - 2008 étant la date théorique prévue par les Nations Unies pour mettre un terme à l'action de ces tribunaux - que dans l'espace et tous deux ont une primauté sur les juridictions nationales des pays concernés et sur celles de tout autre Etat.

Le TPIY et TPIR ont une procédure identique :

Le Procureur ouvre une information d'office ou «sur la foi des renseignements obtenus de toutes sources». Il est habilité à interroger les suspects, les victimes et les témoins, à réunir des preuves et à procéder sur place à des mesures d'instructions. S'il décide qu'au vu des présomptions, il y a lieu d'engager des poursuites, le Procureur établit un acte d'accusation. L'acte d'accusation est transmis à un juge d'une chambre de première instance.

S'il confirme l'acte d'accusation, le juge saisi décerne sur réquisition du Procureur, les ordonnances et mandats d'arrêts, de dépôt, d'amener ou de remise et toutes autres ordonnances nécessaires pour la conduite du procès.

Toute personne contre laquelle un acte d'accusation a été confirmé est, conformément à une ordonnance ou un mandat d'arrêt décerné par le Tribunal international, placée en état d'arrestation, immédiatement informée des chefs d'accusation portés contre elle et déférée au Tribunal international.

La Chambre de première instance prononce des sentences et impose des peines et sanctions à l'encontre des personnes convaincues de violations graves du DIH.

La sentence est rendue en audience publique à la majorité des juges de la Chambre de première instance. Elle est établie par écrit et motivée, des opinions individuelles ou dissidentes pouvant y être jointes.

Malgré les obstacles rencontrés dans leur fonctionnement (lenteur de procédure, encombrement du greffe, arrestation difficile des inculpés...), les TPI se sont imposés comme des organes juridictionnels vivants et opérationnels. Le fait que le 24 mai 1999, pour la première fois dans l'histoire, un chef d'Etat en activité, Slobodan Milosevic, ait été mis en accusation pour les crimes commis au Kosovo par le TPIY, en est un exemple. En montrant qu'une justice pénale universelle était possible et faisable, ils ont d'une certaine façon aidé à la mise en oeuvre d'un organe judiciaire plus permanent à savoir la CPI.

La Cour pénale internationale

Les négociations en vue de la création d'une CPI permanente ayant compétence à l'égard des crimes les plus graves qui touchent la communauté internationale, ou qu'ils aient été commis, ont débutées en 1994 et ont aboutit à l'adoption du Statut de la CPI en juillet 1998 à Rome, lequel Statut est entré en vigueur le 1e juillet 2002.

La nouvelle juridiction permanente à vocation universelle est l'émanation d'un traité multilatéral et est donc indépendante des Nations Unies, même si, en application de l'article 2 de son statut, elle est liée à celles-ci par un accord approuvé par l'Assemblée des Etats-parties lors de sa première session de septembre 2002.

· Les domaines de compétence de la Cour

Les domaines de compétence de la CPI touchent les crimes de génocide, les crimes contre l'humanité ainsi que les crimes de guerre 79(*)commis à partir du 1er juillet 2002, date d'entrée en vigueur de son statut. Une définition consensuelle du crime d'agression par l'ensemble des Etats n'ayant pas été trouvée lors des négociations du statut de la Cour, c'est à une commission préparatoire qu'a été confiée la mission de la consigner dans un article, qui devrait être adopté par la suite par le biais d'un amendement.

Toute personne âgée de dix-huit ans révolus lors des faits incriminés peut théoriquement être poursuivie et, ce, indépendamment de son statut et des fonctions occupées : aucune exonération de responsabilité pénale n'est en effet prévue pour des actions menées dans le cadre de responsabilités officielles (chef d'Etat ou de gouvernement, membre d'un gouvernement ou d'un parlement, etc.). Selon le statut, cette compétence ne saurait s'exercer que si l'Etat sur le territoire duquel un crime a été commis ou dont le responsable du crime est ressortissant, est partie au Traité. Cependant, au cas où une situation est déférée au Procureur par le Conseil de sécurité, en cas de menace ou d'atteinte à la paix et à la sécurité internationale, aucune condition préalable n'est exigée et la Cour est toujours compétente.

Un Etat qui n'est pas partie au Statut peut, par déclaration, consentir à ce que la Cour exerce sa compétence.

· Les modes de saisines de la Cour

Trois modes de saisine de la Cour sont prévus par le statut :

- tout Etat partie peut déférer au Procureur une situation dans la quelle un ou plusieurs crimes relevant de la compétence de la Cour paraissent avoir été commis ;

- le Procureur peut ouvrir une enquête de sa propre initiative au vu des renseignements concernant des crimes relevant de la compétence de la Cour ; dans ce cas il doit obtenir une autorisation de la Chambre préliminaire pour ouvrir une enquête ;

- enfin, le Conseil de sécurité des Nations unies peut également déférer au Procureur une situation dans laquelle un ou plusieurs crimes paraissent avoir été commis.
C'est sur cette base d'ailleurs que le conseil de sécurité va exercer pour la première fois son pouvoir de saisine en déferant au Procureur de la CPI la situation au Darfour depuis le 1er juillet 2002, par la résolution 1593, adoptée le 31 mars 2005, par 11 voix pour et les absentions de l'Algérie, du Brésil, de la Chine et des Etats-Unis.

· La procédure devant la Cour

Trois phases peuvent être distinguées dans la procédure devant la Cour : l'enquête, la confirmation des charges, le procès.

- L'enquête

La décision d'ouvrir une enquête est prise, sous le contrôle de la chambre préliminaire, par le Procureur, qui peut également conclure qu'il n'y a pas de motifs suffisants pour engager des poursuites. Le Procureur «enquête tant à charge qu'à décharge». Il peut notamment recueillir et examiner des éléments de preuve, convoquer et interroger des personnes faisant l'objet d'un enquête, ainsi que des victimes et des témoins, demander la coopération de tout Etat ou organisation ou dispositif gouvernemental.

Il est possible de voir dans cette disposition une influence des systèmes juridiques latins. Ce contrôle interne des poursuites paraît légitime. Compte tenu de la gravité des infractions à l'égard desquelles la Cour aura compétence, l'ouverture des poursuites peut difficilement être laissée à la discrétion d'une seule autorité.

La chambre préliminaire est appelée à prendre les principales décisions pendant l'enquête. Ainsi, lorsqu'il souhaite ouvrir une enquête de sa propre initiative, le Procureur doit obtenir l'autorisation de la chambre préliminaire.

De même, lorsqu'il considère qu'une enquête offre l'occasion, qui ne se représentera pas par la suite, de recueillir un témoignage ou une déposition, ou d'examiner, recueillir ou vérifier des éléments de preuve aux fins d'un procès, le procureur en avise la chambre préliminaire, qui peut alors prendre toutes mesures propres à assurer l'efficacité et l'intégrité de la procédure, en particulier nommer un expert ou prendre toute mesure nécessaire pour recueillir ou préserver les éléments de preuve.

La chambre préliminaire peut délivrer les mandats nécessaires aux fins d'une enquête, autoriser le Procureur à prendre certaines mesures d'enquête sur le territoire d'un Etat partie sans s'être assuré la coopération de cet Etat lorsque celui-ci est incapable de donner suite à une demande de coopération.

A tout moment, après l'ouverture d'une enquête, la chambre préliminaire peut délivrer sur requête du procureur, un mandat d'arrêt contre une personne.

- La confirmation des charges

L'art. 61 du statut prévoit que «dans un délai raisonnable après la remise de la personne à la Cour ou sa comparution volontaire, la chambre préliminaire tient une audience pour confirmer les charges sur lesquelles le Procureur entend se fonder pour requérir le renvoi en jugement». Cette audience peut se tenir en l'absence de l'intéressé, notamment lorsqu'il a pris fuite.

Au cours de l'audience, le Procureur étaye chacune des charges avec des éléments de preuve suffisants pour établir l'existence de raisons sérieuses de croire que la personne a commis le crime qui lui est imputé.

A l'issue de l'audience, la chambre préliminaire peut confirmer les charges et renvoyer la personne devant une chambre de première instance pour y être jugée, ne pas confirmer les charges, enfin ajourner l'audience en demandant au Procureur d'apporter des éléments de preuve supplémentaires ou de modifier une charge.

- Le procès

Le procès se déroule publiquement devant une chambre de première instance en présence de l'accusé. La chambre de première instance peut prononcer le huis clos, notamment pour protéger la sécurité des victimes et des témoins ou pour protéger des renseignements confidentiels ou sensibles donnés dans des dépositions.

L'accusé a la possibilité de plaider coupable. Dans ce cas, si la Cour est convaincue que l'accusé comprend la nature et les conséquences de l'aveu, qu'il a fait cet aveu volontairement, qu'enfin cet aveu est étayé par les faits de la cause, elle peut reconnaître l'accusé coupable du crime. Dans le cas contraire, elle ordonne que le procès se poursuive selon les procédures normales.

Le statut contient des règles relatives à l'administration des personnes, à la protection et à la participation au procès des victimes et des témoins, à la protection de renseignements touchant à la sécurité nationale.

L'art. 74 prévoit que les juges s'efforcent de prendre leur décision à l'unanimité, faute de quoi ils la prennent à la majorité. La décision est présentée par écrit et contient l'exposé complet et motivé des constatations de la chambre de première instance sur les preuves et les conclusions. S'il n'y a pas d'unanimité, la décision contient les vues de la majorité et de la minorité.

Les difficultés rencontrées par la CPI, notamment son éloignement, ont récemment conduit à la mise sur pied de juridictions mixte.

Les juridictions mixtes

L'objectif recherché à travers ces juridictions est d'impliquer la justice nationale, sous supervision internationale. Cela permettrait la reconnaissance symbolique pour les victimes des crimes commis et l'acceptation de leurs souffrances; selon les experts, ce nouveau «modèle» de tribunal mixte devrait en outre permettre de rendre une justice plus rapide, plus efficace et moins coûteuse.

C'est au Sierra Leone qu'a été pour la première fois inaugurée cette formule originale. Répondant à une demande du gouvernement sierra-léonais de juin 2000, le Conseil de sécurité, dans sa résolution 1315, a demandé à l'ex secrétaire général de l'ONU Kofi Annan, d'engager des négociations avec ce dernier afin de mettre sur pied un tribunal spécial pour la Sierra-Leone, chargé de juger les «principaux responsables de crimes contre l'humanité, de crimes de guerre et de certains crimes prévus par le droit sierra léonais commis depuis le 30 novembre 1996».

Ce tribunal, officiellement créé en juillet 2002 à la suite d'un accord intervenu entre les Nations Unies et les autorités nationales et ratifié par le Parlement, fait partie du système judiciaire sierra-léonais. Il reçoit néanmoins un fort soutien international, via un « Management Committee » qui réunit les représentants de nombreux Etats, dont le Nigeria voisin et les Etats-Unis. En vertu de l'accord, le Secrétaire général des Nations Unies a nommé cinq juges sur les huit que comptent les deux chambres, de même que le procureur - le procureur adjoint et les trois autres juges étant quant à eux désignés par les autorités gouvernementales. Quoiqu'il soit encore trop tôt pour juger du bilan de ce tribunal spécial, on notera qu'une quinzaine de personnes ont d'ores et déjà été inculpées par le procureur.

Au Cambodge, où plus du quart de la population a été décimée sous les Khmers rouges entre 1975 et 1979, des négociations difficiles ont débuté avec les Nations Unies dès 1999 pour trouver une formule permettant de juger leurs auteurs par la justice nationale, avec une implication forte de la communauté internationale. Après le rejet par le gouvernement de la création d'un tribunal international, au motif que celui-ci constituerait une atteinte inadmissible à sa souveraineté, un accord est enfin trouvé avec les Nations Unies en mars 2003 portant création de «chambres extraordinaires» qui doivent être mises sur pied par une loi cambodgienne et être intégrées aux tribunaux existants. Là aussi est prévue une mixité d'origine des juges au sein des deux chambres extraordinaires - chambre de première instance et chambre de la Cour suprême (au total cinq juges internationaux choisis sur une liste de sept noms proposée par le Secrétaire général des Nations Unies et sept Cambodgiens) - de l'accusation et de l'administration.

* 66 Voir art. 4 du Projet d'articles sur la responsabilité de l'État (2001), adopté en 2001 après plus de 40 années de travail. Ces articles «ont pour objet d'énoncer (...) les règles fondamentales du droit international relatives à la responsabilité de l'État pour fait internationalement illicite»

* 67 Ie Convention de Genève, art. 51; IIe Convention de Genève, art. 52 ; IIIe Convention de Genève, art. 131; IVe Convention de Genève, art. 148.

* 68 Deuxième Protocole à la Convention de La Haye pour la protection des biens culturels, art. 38.

* 69 Voir Projet d'articles sur la responsabilité de l'État (2001), art. 5 (la responsabilité de l'État vis-à-vis de telles personnes ou entités est limitée à leur comportement aussi longtemps qu'elles sont habilitées à exercer des prérogatives de puissance publique et qu'elles agissent en cette capacité).

* 70 Protocole additionnel II, art.1, par.1

* 71 Protocole II à la Convention sur les armes classiques, tel qu'il a été modifié, art. 14; Statut de la CPI, art. 8 et 25; Deuxième Protocole à la Convention de La Haye pour la protection des biens culturels, art. 15 et 22.

* 72 Convention d'Ottawa, art. 9; Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés, art. 4

* 73 Statut du TPIR, art. 4 et 5 ; Statut du TSSL, art. premier.

* 74 Voir, p. ex., Statut de la CPI, art. 25 ; Statut du TPIY, art. 7; Statut du TPIR, art. 6 ; Statut du TSSL, art. 6.

* 75 Ire Convention de Genève, art. 49 ; IIe Convention de Genève, art. 50 ; IIIe Convention de Genève (1949), art. 129; IVe Convention de Genève, art. 146; Convention de La Haye pour la protection des biens culturels, art. 28 ; Deuxième Protocole à la Convention de La Haye pour la protection des biens culturels, art. 15

* 76 Statut de la CPI, art. 25, par. 3; Statut du TPIY, art. 7, par. 1; Statut du TPIR, art. 6, par. 1 ; Statut du TSSL, art.6

* 77 Statut de la CPI, art. 25, par. 3, al. b)

* 78 Statut de la CPI, art. 33 ; Statut du TPIY, art. 7, par. 4 ; Statut du TPIR, art. 6, par. 4 ; Statut du TSSL, art. 6, par. 4

* 79 Statut de la CPI, 6, 7 et 8.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard