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L'orientation sectorielle de l'APD francaise en Afrique subsaharienne (1990 = 2005): les cas du Cameroun et du Gabon

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par Patrick Roger Mbida
Université de Yaoundé II - DEA 2007
  

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5) Les motivations de l'aide française ou le règne de l'ambiguïté

La question de la motivation de l'aide veut répondre à la question de savoir quel(s) objectif(s) le pays donateur essaye d'atteindre en octroyant l'aide. En d'autres termes, il est question d'interroger ici les fondements même de l'aide. De manière générale, il existe une littérature assez dense, soit qui traite uniquement des motivations de l'aide d'une part, (Alesina et Dollar, 1998 et 2000 ; Breuning, 1994 ; Gunning, 2004 Jacquet et Naudet, 2006) ; soit qui constitue une partie de la réflexion d'autre part (Gabas, 2002 ; Lumsdaine, 1993 ; Sogge, 2003 ). Au regard de ces différents travaux, il en ressort qu'on peut regrouper les motivations de l'aide en deux principales catégories auxquelles l'aide française sera soumise à savoir les motivations "manifestes" (1) et les motivations "latentes" (2) d'où son ambiguïté.

a) Les motivations "manifestes" de l'aide française

Nous nommons par motivations "manifestes", les motivations généralement présentes et affichées dans les discours et déclarations officielles du pays donateur. Ce sont les motivations généralement affichées et brandies à l'opinion publique aussi bien nationale qu'internationale. Ces motivations peuvent être principalement de deux genres : les motivations économiques ou commerciales (a) et les motivations humanitaires et éthiques (b).

a1) Les motivations économiques de l'aide française

Les motivations économiques de l'aide française envers les pays africains au Sud du Sahara (dont le Cameroun et le Gabon), varient en fonction du contexte et peuvent être analysées à partir de trois découpages temporels : les années 1960 ; les années 1980 et les années 1990.

D'abord dès les années 1960, l'idée même de l'aide dépasse de loin celle d'effectuer un transfert financier vers les pays aidés. La finalité économique de la construction et du développement est l'un des motifs principaux, et elle reçoit le soutien d'entreprises exportatrices, qui y voient l'ouverture des nouveaux marchés que la croissance économique rendra solvable. La théorie économique dominante de l'époque permettait, alors, de diagnostiquer un besoin d'accélération d'investissements pour soutenir la croissance ; et considérait qu'il ne serait réalisable qu'avec des financements additionnels, par rapport à la capacité d'épargne des pays en développement (Jaquet et Naudet, 2006). La priorité est alors à la croissance, dont on attend qu'elle réduise par la modernisation la dualité entre secteur agricole et industriel.

Des modèles (Thorbecke, 2000) privilégient le rôle de l'investissement et le besoin d'influx massif de capital, pour franchir les différentes étapes d'un développement contraint par l'insuffisance de l'épargne locale. Dès lors, l'aide au développement peut être conçue comme un complément externe à une épargne interne jugée insuffisante (Jaquet et Naudet, 2006.). Chernery et Strout (1966) construisent un modèle macro-économique, dans lequel, l'aide extérieure permet de combler soit une insuffisance d'épargne (par rapport à l'effort d'investissement jugé nécessaire), soit une insuffisance de devises (par rapport aux besoins d'importations).
Les années 1980, sur le plan économique des pays en développement, sont marquées par la crise de la dette, dette accumulée envers les créanciers publics au titre d'A.P.D. Pour réduire la pauvreté, il faut d'abord restaurer les grands équilibres économiques, ouvrir et libéraliser l'économie, reformer les institutions et la gouvernance et éliminer les distorsions qui empêchent les marchés de fonctionner correctement (Jaquet et Naudet, 2006 : 61). C'est dans ce contexte que l'aide française va de ce fait financer l'ajustement macro-économique des principaux pays endettés (dont le Cameroun et le Gabon), afin de corriger les déséquilibres des paiements et mettre fin à la spirale de l'endettement.

Dès les années 1990 et après, le discours officiel est axé sur le thème de la lutte contre la pauvreté, qui connaît une consécration solennelle à travers l'adoption le 08/09/2000 par l'Assemblée générale des Nations Unies, des O.M.D qui se positionnent comme un véritable contrat d'objectifs de la communauté internationale, déclinée en 8 objectifs principaux qui eux-mêmes se composent de 18 cibles quantifiées. Ils donnent de la pauvreté une définition multiple, qui ne se réduit pas au seul aspect du revenu par habitant, mais englobe aussi les conditions d'éducation et de santé, l'égalité de genres, la protection environnement de l'insertion dans la mondialisation. C'est dans ce dernier aspect que l'aide française, du point de vue économique, va beaucoup s'accentuer ; car elle doit dès lors permettre à une meilleure insertion des économies des pays en développement (y compris le Cameroun et le Gabon) dans la mondialisation, en développant des occasions de commerce et d'investissements étrangers, y compris un accès stratégique aux matières premières. Au sein des institutions internationales, pour obtenir et pour consolider l'adhésion aux règles économiques (Sogge 2003 : 68).

Au regard de ce qui précède, il apparaît que les motivations économiques de l'aide française répond à certains critères généraux, en fonction de l'évolution de l'environnement économique depuis les indépendance jusqu'à nos jours.

Il est question maintenant de s'intéresser aux motivations humanitaires et éthiques de l'aide française à ces deux pays.

a2) Les motivations humanitaires et éthiques de l'aide française

Ce sont les motivations les plus affichées, les plus faciles à communiquer. L'aide publique au développement d'après Jacquet et Naudet (2006) poursuit très clairement un objectif éthique, d'équité et de solidarité, qui conduit à penser l'aide comme l'amorce d'une politique sociale mondiale visant à promouvoir une distribution plus équitable des revenus pour le présent et pour l'avenir, en aidant au développement des pays pauvres (dont le Cameroun et le Gabon). Cette motivation correspond au rôle que la France entend jouer dans les relations internationales et à sa vision du monde (Naudet, 2006 : 33). En effet, aujourd'hui et plus que jamais, le fossé entre les riches et les pauvres ne cesse de s'agrandir au jour le jour. Devant cette pauvreté, la France ne peut rester insensible, elle, éprise de justice, malgré ses difficultés internes, ne saurait rester impassible à la misère du tiers monde, car il serait intolérable qu'elle se désintéressât à leur sort. Manquer à ce devoir serait, à ne pas douter, renier la civilisation qu'elle a toujours voulu incarner (Essama 1984 : 70).

Le fondement d'un tel comportement philanthropique peut se trouver comme l'indique Gabas (2004) dans une éthique de partage et de solidarité. La thèse religieuse s'adresse aux gens les plus riches, qui doivent faire un effort de transfert altruiste s'ils veulent entrer dans le royaume de Dieu. L'altruisme est ainsi vu comme une réponse aux défaillances du marché ; dans sa capacité à satisfaire des besoins collectifs ou sociaux et devenu un moyen d'assurance mutuelle et inter-générationnelle (Gabas, 2004 : 48-49).

L'aide française au Cameroun et au Gabon va donc obéir à cet impératif moral, qui va s'appliquer à tous les pays pauvres dont ces derniers sont inclus, dans lesquels elle s'attache à réduire la pauvreté. Les OMD, votés par les Nations Unies en 2000, fournissent un guide utile dans la volonté des pays riches d'engager les pays pauvres dans une trajectoire de progrès. Cette approche tire l'A.P.D. française vers une véritable politique sociale mondiale, qui placerait les transferts redistributifs au coeur de la gestion de la mondialisation.

En guise de conclusion partielle, on peut dire qu'au regard des deux motivations de l'aide française suscitées, l'aide française peut être inscrite autour des deux paradigmes globaux de l'aide présentés par Jacquet et Naudet (2006) à savoir le paradigme du Développement : aider les pays du Sud à s'engager dans la phase historique de décollage économique et du rattrapage des pays industrialisés. Le paradigme redistributif : bâtir un système équitable de transferts à l'échelle mondial entre riches et pauvres.

Mais ces deux paradigmes sont à interroger, car au regard de la situation socio- économique délétère des pays en développement, nous ne pouvons dire qu'ils sont restés plus pertinents strictement sur le cadre du discours. L'analyse de l'orientation sectorielle de l'aide française accordée au Cameroun et au Gabon faite plus haut, vient sérieusement battre en brèche ces deux paradigmes. Car on ne saurait soutenir que, les quelques fonds squelettiques affectés par la France à ces deux pays dans les secteurs sus évoqués, participeraient de manière significative, soit d'aider ces deux pays à un relèvement notoire de la situation dans les secteurs sus visés, encore moins à un transfert équitable des fonds de celle-ci à ces deux derniers.

Ceci étant dit après les motivations manifestes de l'aide française, place à l'autre type des motivations annoncées plus haut.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault