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L'application par les juridictions répressives internationales de l'article 3 commun aux conventions de Genève et du protocole additionnel II auxdites conventions: cas du tribunal pénal international pour le Rwanda

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par Jean Baptiste UWIHOREYE MUKARAGE
Universite Nationale du Rwanda - Licence en Droit 2006
  

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CHAPITRE I :

LA MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE

PENALE INDIVIDUELLE EN MATIERE DE VIOLATIONS DE L'ARTICLE 3 COMMUN AUX CONVENTIONS DE GENEVE ET DU PROTOCOLE ADDITIONNEL II DEVANT LE TPIR

Bien que la notion de la responsabilité pénale individuelle pour les violations du droit international humanitaire soit ancienne, ce sont en fait les procès contre les grands criminels de guerre à l'issue de la seconde guerre mondiale, qui en font une réalité incontestable19(*). Devant le TPIR, la notion de la responsabilité pénale individuelle est réglementée à l'article 6 du Statut. Cet article traite les différentes formes de la responsabilité pénale pour tous les crimes20(*) qui entrent dans la compétence du Tribunal.

Pour un Tribunal chargé de juger les individus, il faut non seulement démontrer la légalité des instruments légaux qui fondent la compétence matérielle définie à l'article 4 du Statut mais aussi démontrer que l'individu, l'auteur d'infractions graves aux règles coutumières encourt une responsabilité pénale de son chef. A défaut, on pourrait faire valoir que ces instruments se bornent à poser des règles liant les Etats et les parties à un conflit et qu'ils ne sont pas applicables aux individus.

La question de savoir si les normes de droit humanitaire s'appliquent uniquement aux Etats, en tant que personnes morales, ou s'adressent aussi à l'individu, qui est alors susceptible de violer directement par son comportement, semble aujourd'hui résolue en faveur de la seconde possibilité21(*).

Dans ce chapitre, nous aborderons successivement la question de la compétence du TPIR en matière des violations de l'article 3 commun aux Conventions de Genève et du Protocole additionnel II (Section I), et la détermination proprement dite de la responsabilité pénale individuelle (Section II).

SECTION I : LA COMPETENCE DU TRIBUNAL A L'EGARD DES VIOLATIONS DE L'ARTICLE 3 COMMUN AUX CONVENTIONS DE GENEVE ET DU PROTOCOLE ADDITIONNEL II

La compétence d'une juridiction est « l'ensemble des affaires dont cette juridiction a vocation de connaître22(*) ». Dans tout ordre juridique, il est nécessaire non seulement de créer les juridictions afin de régler les différends qui surgiraient entre les personnes vivant dans une société donnée, mais aussi de déterminer la nature des différends pour lesquels ces juridictions sont compétentes. Il s'ensuit qu'une juridiction ne peut trancher un différend qui n'entre pas dans sa compétence ; elle doit se déclarer incompétente si le cas se présente.

Dans l'ordre juridique international où les Etats ont la pleine personnalité juridique (souveraineté), la compétence des organisations internationales - comme celle du TPIR- est essentiellement une compétence d'attribution.

Comme pour toute autre institution juridique, la compétence du TPIR peut être analysée en se basant sur 3 points : d'abord par rapport aux personnes à l'égard desquelles la poursuite peut être engagée, c'est la compétence personnelle (§1) ; ensuite, par rapport à la circonscription géographique et à la période à laquelle les infractions ont été commises, c'est la compétence territoriale et temporelle (§2) ; enfin , par rapport à la nature des infractions qui rentrent dans la compétence du TPIR, c'est la compétence matérielle (§3).

§1. Compétence personnelle

La compétence personnelle du TPIR est prévue à l'article 5 de son Statut. Aux termes de cet article : «  Le Tribunal international pour le Rwanda a compétence à l'égard des personnes physiques conformément aux dispositions du présent Statut ».

A la lecture de ce texte, force est de constater que le Conseil de Sécurité a réaffirmé ici le principe de la responsabilité pénale individuelle. C'est le Tribunal de Nuremberg qui a affirmé pour la première fois ce principe en jugeant que ce sont des hommes et non les entités abstraites qui commettent les crimes dont la répression s'impose comme sanction du droit international23(*).

Dans ce sens, avant que le TPIR ne soit créé, la commission d'experts indépendants, dans son rapport, avait souligné que le principe était clairement établi en droit international et universellement reconnu par la communauté internationale24(*). C'est pourquoi le Conseil de Sécurité n'a pas hésité à accorder au TPIR une compétence à l'égard des personnes physiques.

Cependant, la compétence du TPIR à l'égard des personnes physiques a été contestée par la défense dans l'affaire Kanyabashi relativement à la compétence du Tribunal25(*). Dans cette affaire, la défense soutenait qu'il ne devrait pas y avoir de compétence à l'égard des individus en vertu du droit international car l'octroi au Tribunal d'une compétence vis-à-vis les particuliers est incompatible avec la charte de l'ONU, au motif que le Conseil de Sécurité n'a aucune autorité sur les individus et que seuls les Etats peuvent constituer une menace contre la paix et la sécurité internationale.

A cet effet, la Chambre de première instance du TPIR a rejeté la requête de la défense et a conclu comme suit :

Le Conseil de Sécurité a étendu expressément aux particuliers les obligations et les responsabilités pénales internationales en ce qui concerne les violations du droit international humanitaire, mais l'exception du conseil de la défense n'établit en rien que cette extension de l'applicabilité du droit international aux particuliers n'était pas justifiée et exigée par les circonstances, notamment la gravité et l'ampleur des crimes commis pendant le conflit. Toutefois la Chambre de première instance refuse donc de suivre le conseil de la défense lorsque celui-ci prétend que le Tribunal n'a pas de compétence à l'égard des particuliers .

Par ailleurs, l'article premier du Statut du TPIR stipule que le Tribunal est compétent pour juger les personnes présumées coupables des violations graves de droit international humanitaire commises sur le territoire du Rwanda et les citoyens rwandais présumés responsables de tels crimes commis sur le territoire des pays voisins. Il s'ensuit que pour les crimes commis sur le territoire rwandais, la compétence du Tribunal s'étend à toute personne présumée responsable de ces crimes sans tenir compte de sa nationalité. C'est ce qui a permis au TPIR de juger un ressortissant belge, Georges RUGGIU. Cependant, pour les crimes commis en dehors du territoire rwandais, la compétence du Tribunal est limitée uniquement aux citoyens Rwandais.

Enfin, la lecture de l'article 5 du Statut du TPIR nous conduit à conclure que la responsabilité pénale des personnes morales est en revanche exclue de la compétence du Tribunal. Mais par contre, la responsabilité pénale des personnes morales avait été utilisée à Nuremberg où elle avait notamment permis de criminaliser des organisations telles que les SS26(*), la Gestapo27(*) et les Einsatzgruppen28(*). L'appartenance à ces organisations permettait dès lors d'imputer l'intention criminelle, facilitant d'autant l'administration de la preuve29(*). Sur ce, nous déplorons que la possibilité de criminaliser certaines organisations telles que les milices Interahamwe qui eurent un rôle très important dans les événements tragiques de 1994, n'ait pas été retenue pour le TPIR.

* 19 Affaire Etats Unis c. Yamashita, 327 US I (1945), ILR, 1946, pp. 256-257 cité par M. HENZELIN, Les raisons de savoir du supérieur hiérarchique qu'un crime va être commis par un subordonné, Bruxelles, Bruylant, 2004, p. 81.

* 20 Il s'agit du crime de Génocide, crimes contre l'humanité et les violations de l'article 3 commun aux Conventions de Genève et du Protocole additionnel II.

* 21 Le Procureur c. Jean-Paul Akayesu, affaire n° ICTR-64-4-T, jugement, 2 septembre 1998, §§. 256-257.

* 22 G. CRONU (dir.), Vocabulaire juridique, 6ème éd., Association Henri Capitant, 1996, p. 173.

* 23 Jugement du 30 septembre-1er octobre 1946, Procès des grands criminels de guerre devant le TMI, Doc. Off, Nuremberg, 1947, vol. 1, p. 235 cité par T. GRADITZKY, La responsabilité pénale individuelle pour des actes commis en situation de conflit armé non international, Genève, 1997, p. 2.

* 24 Rapport de la commission d'experts présenté conformément à la résolution 935 du conseil de sécurité, 9 décembre 1994, S/1994/1125, p. 29, §§. 171-172.

* 25 Le Procureur c. Joseph Kanyabashi, affaire n° ICTR-96-15-T, Décision de la Chambre de première instance sur la compétence, 18 juin 1997, §§. 33-36.

* 26 Abréviation de Schutzstaffel (Echelon de protection), organisation du parti nazi formant une police militarisée. La création des SS remonte aux années vingt, où elles constituèrent la garde personnelle d'Hitler. Le pouvoir des SS s'étendit et, à partir de 1934, elles furent chargées de diriger les premiers camps de concentration. Voy. Encyclopédie Microsoft Encarta 2006, « L'Allemagne nazie », [en ligne sur] <http://fr.encarta.msn.com/text76155732183/Allemagnenazie.html>, consulté le 29 juin 2006.

* 27 Contraction de l'allemand Geheime Staatspolizei « police secrète d'Etat », police politique de l'Allemagne nazie. La Gestapo fut créée par HERMANN GÖRING, Ministre de l'Intérieur de Prusse, le 26 avril 1933 à partir de la section politique de la police de la République de Weimar dont il étendit considérablement les pouvoirs en la plaçant hors de toute contrainte constitutionnelle et légale. Elle fut chargée d'éliminer toute opposition au régime national-socialiste ou nazisme. La Gestapo procéda à un nombre considérable d'arrestations, sans compter les rafles massives comme à Clermont-Ferrand, Marseille, Grenoble et Cluny. Voy. Encyclopédie Microsoft Encarta 2006, « L'Allemagne nazie», [en ligne sur] <http://fr.encarta.msn.com/text76155732183/Allemagnenazie.html>, consulté le 29 juin 2006.

* 28 Organisation du parti nazi et l'un des groupes d'intervention mobiles de policiers chargés d'exécuter dans les territoires conquis sur l'URSS les communistes et les Soviétiques juifs.

* 29 MERGRET, F., Le Tribunal Pénal International pour le Rwanda, n° 23, Paris, Ed. Pédone, 2002, p. 31.

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