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Rwanda, un génocide colonial, politique et médiatique

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par Mathieu OLIVIER
Université Paris 1 - La Sorbonne - Master de Relations Internationales et Action à là¢â‚¬â„¢Etranger 2013
  

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Justification par l'observation

La théorie étant trouvée, il n'y a plus qu'à lui fournir des observations pour la justifier. En 1959, dans une publication catholique, la journaliste belge Lucie Bragard pouvait ainsi écrire que « la distinction physique... était aisée à déterminer entre les Hutu... race bantous et les Tutsi... à longues jambes, .... Pasteurs d'origine hamite, venant vraisemblablement de la Somalie, le long du Nil (sic) ».

A l'inverse d'une classique méthode empirique, on alla chercher des dissemblances physiques entre les peuples d'agriculteurs et les pasteurs afin de donner du poids à la thèse. « Les pasteurs, aux traits fins et à la peau moins sombre que les agriculteurs, devaient être les Chamites. »

La catégorisation était facile à effectuer. Les Tutsi, qui dirigeaient le royaume, devaient être les Hamites. Ils régnaient sur les nègres hutus. Jean-Pierre Chrétien cite ainsi, dans « Le défi de l'ethnisme »1(*)1, J. Sasserath qui écrivait, en 1948, dans « Le Rwanda-Urundi, étrange royaume féodal » :

« Ces Hamites, race de seigneurs, distants, polis, fins, avec un fond de fourberie dominent naturellement les Bahutu, des nègres au nez épaté, aux lèvres épaisses, au front bas, au caractère d'enfant, à la fois timide et paresseux, la classe des serfs ».1(*)2

On passa ainsi sous silence l'existence de petits royaumes hutus. On accentua également l'importance du royaume central Tutsi en y installant des géants de 2 mètres à 2,20 mètres alors qu'en 1907-1908, ceux-ci n'avaient été mesurés, en moyenne, qu'à 1,79 mètres.

« Pygmoïdes twa et « caucasoïdes » tutsi ne sont ainsi que le fruit du contexte culturel et scientifique d'une époque révolue, du moins en principe, celle des théories racistes étudiant les migrations aryennes, celle qui aboutit au génocide des Juifs, des Tziganes et des Slaves avant d'inspirer le génocide rwandais de 1994, celle qui a donné une caution scientifique à l'antisémitisme européen et à ce qu'il convient d'appeler l'anti-hamitisme africain, la haine des hamites, inventée par les colonisateurs »1(*)3, explique ainsi Dominique Franche, rejoint sur ce point par Jean-Pierre Chrétien. Celui-ci estime en effet que « le discours et la pratique du colonisateur et du missionnaire, « civilisateurs » par excellence, ont cautionné une lecture raciale de la société, globalement au profit des Tutsi, baptisés « Européens noirs ». »1(*)1

L'effet pervers de cette catégorisation, véritable « cancer social »13, est qu'elle va s'imposer aux esprits des élites rwandaises formées par les missionnaires et par les colons, notamment l'administration belge. La grille de lecture raciale devient en effet peu à peu partie prenante de la vie politique rwandaise, que les colons laissent en partie aux « autochtones ».

Exemple éloquent : les Belges ont ainsi créé une carte d'identité afin d'y mentionner la catégorie sociale, en d'autres termes l'ethnie, la race même, de la population rwandaise. Et c'est bien souvent cette même carte qui permettra aux Rwandais eux-mêmes de se différencier alors qu'il existait, au départ, un sentiment d'appartenance au même royaume, et surtout une même langue et une même culture.

* 11 Jean-Pierre Chrétien, Le défi de l'ethnisme, Karthala, 1998

* 12 J. Sasserath, Le Rwanda-Urundi, étrange royaume féodal, 1948, pp. 27-28

* 13 Dominique Franche, Généalogie du génocide rwandais, Editions Flibuste, 2004

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