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Les sociétés d'encouragement aux Beaux-Arts en Touraine entre 1789 et 1914


par Brice Langlois
Université François-Rabelais de Tours - Master II Histoire de l'art 2017
  

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A. La Touraine vers le milieu du XIXe siècle : un terreau fertile pour la formation de sociétés savantes et d'encouragement aux Beaux-Arts

Si dès la première moitié du XIXe siècle, les initiatives individuelles soutenues par les instances publiques contribuent dans une certaine mesure à l'encouragement des arts en province, il semble que durant la seconde moitié de ce siècle, un vent nouveau souffle sur les

115 LANGLOIS, Brice, Joseph-Félix Le Blanc de La Combe, collectionneur tourangeau, mémoire d'histoire de l'art contemporain de master 1, sous la direction de France Nerlich, Université François-Rabelais de Tours, 2016.

116 [ANONYME], Explication des ouvrages de peinture, sculpture, gravure, lithographie, et architecture des artistes vivans, exposés au musée royal des arts, le 25 août 1824, Paris, C. Ballard, 1824, n° 390-391 : http://salons.musee-orsay.fr/index/exposant/62842 consulté le 28/03/2017.

117 Ibidem.

[ANONYME], « Tours. Tirage de la loterie des Amis des Arts », Journal d'Indre-et-Loire, n° 75, 23 mai 1841, p. 2.

[ANONYME], « Société des Amis des Arts à Tours », Journal d'Indre-et-Loire, n° 49, 10 avril 1841, p. 1.

118 ARNAUD, Camille d', « Beaux-Arts », L'Artiste, t. VII, 4ème série, 1846, p. 208.

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affaires culturelles des départements, en raison de la multiplication des associations artistiques encouragée par les différentes administrations municipales et nationales depuis 1840. La délégation des affaires culturelles par l'État à ces groupes « d'amateurs intelligents, actifs et riches » invite à une décentralisation artistique « pacifique » comme le souligne Philippe Burty (1830-1890) dans son article consacré à l'exposition de la Société des Amis des Arts de Bordeaux en 1865119. En Touraine les sociétés d'encouragement aux Beaux-Arts semblent suivre la même voie. C'est dans les décennies 1840-1850 que naissent un certain nombre de sociétés plus ou moins investies dans le développement de l'art vivant et dont les périodes d'activité sont extrêmement variables. De fait, ces associations proposent une diversité de manifestations dans un but commun : celui de propager le goût des arts et des études historiques sur le territoire tourangeau.

a) La Société Archéologique comme moteur des activités de recherches scientifiques et de

popularisation de l'art en Touraine par le biais d'expositions

Fondée en 1840 à la suite du regroupement de l'abbé Manceau (1805-1855), de Noël Champoiseau (1795-1859), d'Henri Goüin (1782-1861) et d'Alexandre Giraudet, tous membres par ailleurs de la Société française pour la conservation des monuments historiques créée en 1834 à l'initiative d'Arcisse de Caumont (1801-1873) (2.1.1), la Société Archéologique de Touraine est autorisée officiellement le 18 octobre 1840 par décision ministérielle120. Dans un premier temps il semble que sa formation résulte de l'association de membres de la Société d'Agriculture, Sciences, Arts et Belles-Lettres du département d'Indre-et-Loire « jaloux d'imprimer plus d'activité à ceux qui ont pour objet la science archéologique »121.

Émanée en quelque sorte de votre sein, puisque l'on y compte un grand nombre de vos collègues, cette Société ne pourra qu'agir de concert avec vous en tout ce qui se rapporte à la science qu'elle cultive, et ce sera pour vous, en quelque sorte, une section d'archéologie, comme vous en avez une aujourd'hui d'horticulture122.

Comme le laisse sous-entendre le secrétaire-perpétuel Chauveau, la Société Archéologique est issue de la Société d'Agriculture. Les deux associations ne sont donc pas concurrentes. Dans les faits, il est possible de remarquer à partir des listes des sociétaires

119 BURTY, Philippe, « L'Exposition de Bordeaux », Gazette des Beaux-Arts, t. XVIII, Paris, mai 1865, p. 465.

120 S.A.T., « Statuts de la Société Archéologique de Touraine », Mémoires, t. I, Tours, Imp. Mame, 1842, p. 17.

121 S.A.S.A.B.L., « Rapport de M. le secrétaire perpétuel », Annales, t. XX, Tours, Imp. Mame, 1840, p. 234.

122 Ibid, p. 235.

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publiées dans les Annuaires du département d'Indre-et-Loire en 1840 et 1845, que presque tous les membres du bureau de la Société Archéologique participent aux activités de la Société d'Agriculture, à l'exception de l'abbé Manceau et de l'imprimeur Jean-François Ladevèze123. La Société Archéologique de Touraine est « instituée dans le but de propager le goût des connaissances archéologiques, d'appeler un plus grand nombre de personnes à l'étude et à la recherche de nos richesses monumentales et numismatiques, et de les intéresser à leur conservation »124. Ainsi ses membres contribuent à la publication d'un certain nombre d'études sur l'histoire et le patrimoine bâti de Touraine dans les Annales éditées à partir de 1842.

Pour autant la Société Archéologique ne se contente pas uniquement de fournir des études monumentales. Elle vise aussi à développer dans une certaine mesure, le goût des arts chez ses concitoyens. Une commission est formée au sein de la société dès 1841 pour réfléchir à l'organisation d'une exposition d'objets d'art. Alfred Laurent, imprimeur tourangeau, communique les décisions de la commission dans un rapport lu à la séance du 29 décembre 1841. La Société Archéologique semble prendre en exemple l'exposition organisée la même année par le concours de la Société d'Agriculture et de la Société des Amis des Arts. Cette exposition artistique reçoit en effet une réception encourageante et suscite l'enthousiasme de la commission en charge de l'exposition de la jeune Société Archéologique de Touraine qui reconnait que « la solennité de 1841 fera époque dans [les] annales »125. À l'évidence la commission s'appuie sur le compte-rendu que publie Alfred Laurent sur l'exposition de 1841126.

Pour son exposition, la Société Archéologique paraît emprunter les mêmes voies d'organisation qu'ont choisi la Société des Amis des Arts et la Société d'Agriculture. Elle propose « de nommer immédiatement une commission spéciale et permanente, choisie [en son] sein [É] à laquelle seraient adjoints des membres du Conseil municipal de Tours, des membres du Conseil général d'Indre-et-Loire, et, au besoin, plusieurs personnes étrangères à la Société, lesquelles seraient choisies parmi les propriétaires des plus belles collections dans les

123 [ANONYME], « Sociétés savantes », Annuaire..., op. cit., 1840 et 1845, p. 187-189 et p. 193-196.

124 S.A.T., « Statuts de la Société Archéologique de Touraine », op. cit., p. 17.

125 LAURENT, Alfred, Anonyme, « Rapport lu dans la séance du 29 décembre 1841 au nom de la commission chargée d'examiner le projet d'une exhibition d'objets d'arts antiques, dans la ville de Tours », Mémoire de la Société Archéologique, t. 1, 1842, p. 189.

126 LAURENT, Alfred, Compte-rendu de l'exposition publique des produits de l'industrie, des arts et de l'horticulture, qui a eu lieu à Tours, Paris, 1841.

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départements appelés à concourir »127. Ainsi se réunissent pour l'organisation de l'exposition : Louis Boilleau, conservateur du cabinet archéologique, Boilleau fils, Gaëtan Cathelineau (1787-1859), peintre, Devouge, Henri Goüin fils (1782-1861), banquier, Gustave Guérin (1814-1881), architecte diocésain, Charles Guyot, ancien capitaine au corps royal d'artillerie, André Jeuffrain-Delaveau, Joseph-Félix Le Blanc de La Combe, Alfred Laurent, Julien-Léopold Lobin (1814-1862), peintre, Victor Luzarche, imprimeur, Ernest Mame, imprimeur, Jean-Baptiste Noriet, sculpteur, Jean-Jacques Raverot, conservateur du musée, Rouillé-Courbe, écrivain, Charles-Gabriel Roux, avocat, et M. Smith dont le titre et la profession sont inconnus128. Ce sont donc les élites intellectuelles et les artistes de la ville qui s'engagent dans l'organisation de la future exposition.

Si la Société Archéologique envisage d'ouvrir une exposition d'objets d'art « antiques », il ne faut à l'évidence pas l'entendre au sens contemporain du terme. « Antique » ne désigne pas la période chronologique mais plutôt l'activité de « l'antiquaire » qui « recueille, collectionne des objets provenant des anciens »129. Si à l'heure de la conception, la Société Archéologique privilégie une exposition rétrospective composée « de tableaux des écoles anciennes [É] de dessins, de manuscrits illustrés, de gravures antérieures au siècle de Louis XV, de sculptures antiques de toute matières et de toutes formes, de meubles ciselés, sculptés ou peints, de vases historiés, d'émaux, de cuivres peints, de vitraux, de riches collections de médailles »130, il semble qu'au moment de l'exécution, elle élargisse aux oeuvres des artistes vivants, en raison des différents prêts des collectionneurs et participation des artistes. Ainsi, la collection d'oeuvres contemporaines du colonel de La Combe est exposée en 1847 lors de la XVe session du Congrès scientifique.

M. de Lacombe a mis à la disposition de la commission, avec le plus généreux empressement, sa superbe collection de dessins et d'aquarelles qui, à elle seule, pourrait former une exposition remarquable ; aussi la commission compte-t-elle mettre à la disposition de M. de Lacombe tout un côté du choeur des Minimes ; les nombreux croquis de Charlet, de Géricault, qui seront ainsi groupés, seront très certainement l'une des choses les plus curieuses de l'exposition131.

127 Ibid., p. 193.

128 S.A.T., « Exposition de tableaux et d'objets d'art anciens dans la ville de Tours », Mémoire, t. III, Tours, Lecasna et Alfred Laurent, 1847, p. 283.

129 LAROUSSE, Pierre (éd.), Grand dictionnaire universel du XIXe siècle, t. I, Paris, Larousse, 1866, p. 452.

130 LAURENT, Alfred, op. cit., 1842, p. 191.

131 [ANONYME], « Tours », Journal d'Indre-et-Loire, n°108, 8 août 1847, p. 2.

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Il n'est pas surprenant que Joseph-Félix Le Blanc de La Combe soit convié à l'organisation de cette exposition en prêtant une partie de sa collection, qui de surcroît semble mise en valeur dans la chapelle des Minimes, en lui accordant tout un côté du choeur. En effet, à cette époque la réputation de La Combe en tant que grand collectionneur n'est plus à faire auprès des autres amateurs qu'il fréquente, tels que les membres des familles Mame, Goüin et Roux qui prêtent aussi pour l'exposition de 1847 un certain nombre d'oeuvres dont des tableaux de Nicolas de Largillière (1656-1746) et de Jean-Baptiste Greuze (1755-1805)132. De surcroît des artistes vivants à l'instar de Gaëtan Cathelineau participent à cette exposition, en présentant notamment un double portrait d'un Garçon et d'une jeune fille (fig. 2) et un Ecce Homo (fig. 3), présent déjà en 1841 à l'exposition de la Société des Amis des Arts.

La Société Archéologique de Touraine par l'intermédiaire de son exposition s'efforce « d'initier le peuple au labeur des hommes d'intelligence et de lui apprendre que les travaux les plus rudes ne sont pas ceux qui sont purement manuels [puisqu'il] est bien qu'il comprenne par combien d'études le peintre célèbre a dû passer avant de produire des chefs-d'oeuvre »133. Elle entend de fait mettre en lumière les travaux artistiques des contemporains aux yeux de l'ensemble de la population tourangelle dont les classes les plus modestes.

À sa création la Société Archéologique n'est pas destinée à démocratiser les savoirs artistiques. Pourtant en organisant une exposition en 1847, la société s'emploie à développer le goût des arts chez ses concitoyens. Il faut attendre le dernier quart du XIXe siècle pour qu'elle participe régulièrement à l'organisation d'expositions exclusivement rétrospectives, à l'exemple des expositions de 1873134, 1887135 et 1890136.

b) Des sociétés d'émulation artistiques confidentielles : le cas du Cercle des Beaux-Arts de

la Ville de Tours et de la Société des Amis des Arts de Touraine

Aujourd'hui la Société Archéologique de Touraine continue son entreprise et s'apprête à entrer dans sa cent soixante-dix-septième année. À l'inverse, pour d'autres sociétés la durée d'existence est à l'évidence beaucoup plus courte, en raison d'une visibilité plus restreinte et d'une ambition plus modeste. Tel est le cas notamment du Cercle musical des Beaux-Arts de la

132 [ANONYME], « Tours », Journal d'Indre-et-Loire, n°109, 10 août 1847, p. 1.

133 S.A.T., « Exposition de tableaux et d'objets d'art anciens dans la ville de Tours », Mémoire, op. cit., 1847, p. 290.

134 PALUSTRE, Léon, op. cit., 1873.

135 PALUSTRE, Léon, Mélanges d'art et d'archéologie : objets exposés à Tours en 1887, Tours, L. Péricat, 1887

136 PALUSTRE, Léon, op. cit., 1890.

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Ville de Tours et de la Société des Amis des Arts de Touraine, deux associations artistiques créées dans la décennie 1850. De fait, peu de sources renseignent aujourd'hui l'historien sur les activités de ces deux sociétés d'encouragement aux Beaux-Arts, si ce n'est quelques articles publiés dans la presse locale et documents de police.

C'est à l'occasion de l'ouverture d'une exposition artistique en 1853 dans l'ancienne église des Minimes, organisée sous les auspices « de l'administration municipale, aidée du concours d'une commission composée de quelques amis éclairés des arts »137 qu'est attestée l'existence de la Société des Amis des Arts de Touraine. Peut-être est-elle l'héritière de la Société des Amis des Arts de Tours présidée par Raoul de CroØ en 1841 dont la date de clôture nous est inconnue ? Cela est possible puisque figure dans cette société « un [É] compatriote aussi distingué comme écrivain que comme peintre »138. Pour autant aucune mention de cette commission spéciale n'a pu être recensée dans les registres de délibérations du Conseil municipal de 1853 ou dans les annuaires de l'époque139. Il est plus probable que la Société des Amis des Arts de Touraine ait été fondée en 1853, voire quelques années auparavant. En effet Chantal Georgel mentionne dans son article consacré à la représentation du musée dans la presse illustrée, la création d'une Société des Amis des Arts à Tours en 1850140. Néanmoins l'auteur n'apporte aucune précision quant à ses sources, si ce n'est un renvoi aux articles de Léon Lagrange et Agnès Fine, dans lesquels aucune mention de création d'une Société des Amis des Arts tourangelle n'est avérée141. Outre le préfet du département et le maire de Tours aucun autre membre de cette société n'est mentionné dans la presse. Il semble que cette association ait une existence relativement limitée, en raison de la réception en demi-teinte de son exposition.

Demain l'exposition de Tours aura vécu ; il n'en restera qu'un souvenir attestant les louables intentions de notre administration et de la commission qui ont fait tant d'efforts pour réveiller parmi nous le goût des beaux arts. Les artistes ont répondu avec empressement à l'appel qui leur a été fait ;

137 [ANONYME], « Tours », Journal d'Indre-et-Loire, n° 194, 14 août 1853, p. 1.

138 Ibidem.

139 Registre des délibérations du Conseils municipal de la Ville de Tours, 20 septembre 1851-8 mars 1855, Tours, A.M., 1D62.

140 GEORGEL, Chantal, « Le Musée en représentation », MICHAUD, Stéphane (éd.), MOLLIER, Jean-Yves (éd.), SAVY, Nicole (éd.), Usages de l'image au XIXe siècle, Paris, Créaphis, 1992, p. 144.

141 LAGRANGE, Léon, op. cit.. 1861.

FINE, Agnès, « Bibliographie des expositions en province 1851-1879 », Gazette des Beaux-Arts, n°96, 1980, p. 119-140.

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mais l'indifférence du public en présence de cette tentative nous laisse peu d'espoir de la voir se renouveler, au moins d'ici longtemps142.

Ce rédacteur du Journal d'Indre-et-Loire est quelque peu pessimiste vis-à-vis de la tenue d'une nouvelle exposition artistique à Tours. En effet, malgré les affiches apposées dans la ville (fig. 4 et 5) et les oeuvres importantes envoyées par les artistes parisiens, l'exposition de 1853 peine à recueillir d'adhésion du public. Ainsi, il semble que l'intuition de ce journaliste s'exécute, puisqu'il faut attendre vingt ans pour qu'une nouvelle exposition de Beaux-Arts soit organisée à Tours143.

Si les Tourangeaux ne semblent pas développer un goût particulier pour les expositions artistiques, ils paraissent au contraire témoigner de l'intérêt pour la musique. Ainsi de nombreuses associations musicales se forment à Tours, tels que l'Orphéon fondé en 1853 ou la Société philharmonique, créée en 1838 puis refondée et présidée en 1858 par le colonel de La Combe144. Aussi, de nombreuses sociétés musicales sont créées dans les différentes localités de Touraine à l'exemple de la Société sainte Cécile de Benais en 1868, la Société philharmonique de Loches en 1864, l'Orphéon d'Amboise en 1858 ou encore la Société musicale de Cinq-Mars-la-Pile en 1865 145. C'est dans ce contexte qu'est formé en 1858 le Cercle musical des Beaux-Arts de la Ville de Tours.

Formé à l'initiative de Maurice de Tastes (1818-1886), professeur de physique au Collège de Tours et météorologue publiant ses prévisions dans les Annales de la Société d'Agriculture, ce cercle vise à « développer le goût des Beaux-Arts, par la réunion fréquente des amateurs et artistes musiciens, peintres, sculpteurs et littérateurs » (ann. 2.1.2.3)146. Il réunit de fait de nombreux amateurs de la ville, membres d'autres sociétés à l'instar d'Alexandre Giraudet, Noël Champoiseau, Joseph-Félix Le Blanc de La Combe, Eugène Goüin (1819-1909) ou Gaëtan Cathelineau pour ne citer que les membres les plus connus147. L'engouement que déploient les élites à participer aux activités de l'ensemble des sociétés dépend à l'évidence de la nécessité

142 [ANONYME], « Exposition de Peinture. Quatrième article. », Journal d'Indre-et-Loire, n° 233, 2 octobre 1853, p. 2.

143 BROGARD, Clémence, op. cit., 2016, p. 125.

144 LANGLOIS, Brice, op. cit., 2016, p. 32.

145 Police, associations et cercles, Tours, A.D., 4M 169-173.

146 DELAROCHE, Jules, (secrétaire), TASTES, Maurice de (président), Règlement du Cercle des Beaux-Arts, s. d.., f° 1, Tours, A.D., 4M 171.

147 DELAROCHE, Jules (secrétaire) : Liste des souscripteurs fondateurs du Cercle des Beaux-Arts de la ville de Tours, 6 février 1858, Tours, A.D., 4M 171.

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de conserver un statut d'érudit et développer par ailleurs leur réseau de sociabilité, essentiel pour leurs activités professionnelles et de loisirs.

Ce cercle d'amateurs accorde une large place aux activités musicales en prévoyant l'organisation de soirées d'audition musicale mensuelles et en réservant de façon hebdomadaire ses locaux à la musique de chambre, au chant et à l'orchestre (ann. 2 .1.2.3)148. Toutefois comme le prévoit son règlement, la commission du cercle « peut si elle le juge convenable, ouvrir une exposition d'objets d'art »149. Il paraît bien improbable que cette association ait organisé une exposition en raison de sa très courte durée d'existence. Elle est dissoute le 9 septembre 1858, soit quelques mois seulement après sa création. De surcroît, si son ambition d'encourager les arts en Touraine est noble, il est plus probable que ce cercle ait fourni un endroit de délassement plutôt que de travail à ses membres, en proposant la lecture des revues spécialisées dans le domaine artistique et en concédant également une place non négligeable aux jeux tels que le trictrac, les échecs, les dames et le whist (ann. 2.1.2.4)150. Le recensement des sociétés s'administrant librement en vertu du décret du 25 mars 1852, confirme les activités de récréation du Cercle musical des Beaux-Arts de la Ville de Tours151. Ainsi, l'ambiance décrite par Honoré de Balzac (1799-1850) de la société de Mme de Baudroie dans La Muse du département semble applicable à cette association.

Animée du désir de vivifier Sancerre, Mme de la Baudroie tenta d'y former une Société littéraire. Le président du tribunal (É), qui se trouvait alors sur les bras une maison (É), favorisa la création de cette Société. Ce rusé magistrat vint s'entendre sur les statuts avec Mme de la Baudroie, il voulut être un des fondateurs, et loua sa maison pour 15 ans à la Société littéraire. Dès la seconde année, on y jouait aux dominos, au billard, à la bouillotte, en buvant du vin chaud sucré, du punch ou des liqueurs (É). En fait de littérature, on y lut les journaux, l'on y parla politique, et l'on y causa affaires152.

Si les propos de Balzac sont quelque peu sarcastiques vis à vis des moeurs de ses contemporains, ils semblent pour autant pouvoir s'appliquer à un ensemble de sociétés

148 DELAROCHE, Jules, (secrétaire), TASTES, Maurice de (président), Règlement... op. cit, f 4.

149 Ibidem.

150 DELAROCHE, Jules : Lettre adressée au préfet d'Indre-et-Loire présentant les activités proposées par la société ,25 février 1858, Tours, A.D., 4M 171.

151 État des sociétés s'administrant librement autorisées en vertu du décret du 25 mars 1852 et des sociétés dissoutes de cette catégorie ou qui ont cessé d'exister d'elles-mêmes, Tours, A.D., 4M 262.

152 BALZAC, Honoré, La Muse du département, Paris, Bureau du Siècle, p. 6, in CHALINE, Jean-Pierre, op. cit., 1995, p. 1.

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musicales et littéraires des départements en général et de celui d'Indre-et-Loire en particulier à l'instar du Cercle musical des Beaux-Arts de Tours153.

À l'évidence la Société des Amis des Arts de Touraine et le Cercle des Beaux-Arts de la Ville de Tours partagent assez peu de points communs. Quand la première s'efforce de développer et encourager la dynamique artistique en organisant une exposition, le second paraît à l'inverse proposer un exutoire pour ses membres et mettre l'émulation artistique à la marge. Néanmoins, toutes les deux témoignent de la volonté des élites de fonder des sociétés dans les années 1840-1850 pour se retrouver entre eux.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille