WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La protection du droit de manifester dans l'espace public


par Charles ODIKO LOKANGAKA
Université de Kinshasa - Doctorat 2020
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

B. Les manifestations de janvier 2015 contre la loi électorale

Les événements des 11,12, 19,20, 21 janvier 2015 survenus à Kinshasa en sont une nette illustration du type de violence liée au processus électoral que risque de vivre la RDC. « Ces événements ont occasionné plusieurs cas de morts des innocents, des blessés, des arrestations arbitraires et enlèvements dans le rang des manifestants ». Le Bilan des morts varie selon la source, 42 morts selon la Fédération Internationale des Droits de l'Homme (FIDH), et 27 morts selon le dernier bilan du gouvernement de la RDC, sans préciser l'identité des gens à la base de ces morts presque banalisées.

C. Les manifestations de septembre 2016 dénommées « carte jaune »

Des manifestations de l'opposition ont été organisées le 26 mai 2016 dans tout le pays pour protester contre le Président Joseph Kabi a et son ambition de rester au pouvoir au terme de son deuxième mandat.

Selon le Bureau Conjoint des Nations Unies aux Droits de l'Homme (BCNUDH), au moins neuf manifestations ont été interdites par les autorités municipales, et 59 personnes ont été arrêtées pendant les manifestations322(*). Le rapport d'Amnesty Internationale (Al), fait état d'au moins 16 villes empêchées de manifester ou ayant connu des manifestations dispersées323(*). Le Gouverneur du Nord-Kivu a interdit toute manifestation dans sa province.324(*)

Parmi les manifestations ayant été dispersées, figurent notamment celles ayant été organisées dans les villes suivantes : Tshikapa (Kasaï), Kananga (Kasai-Central), Butembo (Nord-Kivu), Béni (Nord-Kivu), Goma (Nord-Kivu), Bunia (Ituri), Kisangani (Tshopo), Kalemie (Tanganyika), Moba (Tanganyika), Lubumbashi (Haut-Katanga), Mbujt-Mayi (Kasai-Orïental), Mbandaka (Équateur), Matadi, (Kongo-central).325(*) Le BCNUDH indique que 101 personnes en rapport avec ces manifestations ont été arrêtées entre le 23 et le 26 mai 2016326(*). Selon le Colonel Mwana Mputu, porte-parole de la Police nationale congolaise (PNC), 9 personnes ont été interpellées sur l'ensemble du territoire327(*).

Selon Human Rights Watch (HRW): « Le 26 mai 2016, les forces de sécurité ont tiré du gaz lacrymogène et à balles réelles alors qu'elles cherchaient à empêcher la poursuite de manifestations à Goma, tuant au moins une personne et en blessant au moins 11 autres, dont quatre enfants »328(*). La manifestation a été interdite mais les manifestants se sont tout de même regroupés. Une personne a été tuée lors d'un accident de la route causé par la fuite de manifestants.

Ces personnes sont membres de partis d'opposition tels que l'UNC, le MPCR et RECO. Ils s'étaient réunis au domicile de Tex Maybinga, membre de l'UNC, dans le quartier Ciné Palace de Matadi, pour préparer la manifestation du 26 mai, lorsqu'ils ont été arrêtés par la police. Ces arrestations ont suscité de vives réactions notamment de la part de Vital Kamerhe (supra), qui a insisté sur le fait que ces arrestations se sont produites dans un lieu privé. L'UNC a affirmé qu'il s'agissait d'une réunion de préparation à la manifestation du 26 mai et perçoit ces arrestations comme une tentative d'intimidation.

La répression des manifestations a suscité de nombreuses réactions internationales. Le 21 juillet 2016, le Haut-Commissaire de la MONUSCO, Zeid Ra'ad Al Hussein, a exprimé ses inquiétudes quant à la situation en RDC. Il a dénoncé un «  harcèlement croissant, (une) répression des voix qui s'opposent au gouvernement (et des) dispersions excessives et parfois mortelles de manifestations ». Il a en outre souligné que « Les manifestations et réunions organisées par l'opposition et par la société civile sont souvent entravées ou réprimées, alors que celles organisées par la majorité présidentielle se déroutent généralement sans obstruction »329(*).

Dans une lettre adressée le 7 septembre 2016 au conseil des droits de l'Hommes de l'ONU, HRW a indiqué que : « Depuis janvier 2015, le gouvernement congolais exerce une répression brutale à l'encontre de ceux qui se sont prononcés contre ou se sont opposés aux tentatives de prolonger ta présidence de Joseph Kabila au-delà de la limite constitutionnelle de deux mandats, dont le second prend fin le 19 décembre 2016. Les forces de sécurités et officiels gouvernementaux ont arrêté arbitrairement des dizaines de dirigeants de l'opposition et activistes, ouvert le feu sur des manifestants pacifiques, interdit des manifestations de l'opposition, bloqué des médias, accusé déjeunes activistes pro-démocratie de fomenter des actes terroristes, et empêché des dirigeants de l'opposition de circuler librement dans le pays. Le Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits humains en RD Congo a documenté 760 violations des droits humains liées à des restrictions en matière d'espace démocratique, dont 500 intervenues en 2016»330(*).

Avant, pendant et après les événements du 19 et 20 décembre, les autorités congolaises ont conduit des arrestations massives et des détentions de personnes suspectées de planifier ou de participer à des manifestations, dans le but d'empêcher toute démonstration. Entre le 15 et le 31 décembre 2016, au moins 917 personnes, dont au moins 30 femmes et 95 enfants, ont été arrêtées par des agents de l'État sur l'ensemble du territoire de la RDC : 414 à Lubumbashi, 184 à Kinshasa, 115 à Goma, 76 à Matadi, 43 à Boma, 30 à Oicha (province du Nord-Kivu), trois à Kasumbalesa (province du Haut-Katanga) 25 à Bukavu (province du Sud-Kivu), 12 à Luebo, huit à Mbuji-Mayi, quatre à Beni, deux à Kalemie (province du Tanganyika), et une à Kananga.331(*) De nombreux civils arrêtés par les forces armées ont été conduits dans des camps militaires, en violation des standards internationaux. Les équipes du BCNUDH se sont vues refuser l'accès aux camps militaires et aux centres de détention de l'ANR.

Le 26 décembre 2016, 49 personnes arrêtées par la police à Lubumbashi pour pillage et vandalisme de propriétés publiques et privées ont été transférées devant le Parquet de grande instance de Lubumbashi, et condamnées pour vol, destruction méchante, association de malfaiteurs, rébellion et incendie volontaire par le Tribunal de grande instance de Lubumbashi, en procédure de flagrance.

Le 28 décembre, en procédure de flagrance également, le même Tribunal a condamné 22 manifestants arrêtés entre le 20 et le 22 décembre à des peines allant de 12 mois avec sursis (pour huit manifestants, qui ont ensuite été relâchés), à trois ans de servitude pénale principale pour rébellion et participation à un mouvement insurrectionnel. Le Tribunal a en même temps acquitté 27 autres personnes.

Dans la nuit du 27 au 28 décembre, 102 personnes, dont 30 mineurs, ont été arrêtées par les forces de défense et de sécurité lors d'une opération de ratissage dans la commune de Katuba pour y rechercher les biens pillés pendant les manifestations du 20 décembre. Parmi ces 102 personnes, 96 dont les 30 mineurs ont été relâchés du DLCC le 28 décembre. Les six autres individus ont été transférés au Parquet de grande instance de Lubumbashi accusés de vol qualifié.

A Goma, au moins 115 personnes, dont cinq femmes, des membres des partis d'opposition et de mouvements de citoyens332(*), ont été arrêtées par les forces de défense et de sécurité dans le cadre des manifestations contre le président Kabila restant au pouvoir. Les arrestations ont commencé le 15 décembre, date à laquelle les agents de la PNC ont arrêté de manière préventive 15 jeunes sans-abris soupçonnés de vouloir participer aux manifestations du 19 décembre. Les 18 et 19 décembre, 28 personnes ont été arrêtés au cours d'une opération de ratissage menée par des agents de la PNC. Le 19 décembre, l'ANR a arrêté cinq personnes et des agents de la PNC ont arrêté 22 personnes pour avoir porté des t-shirts rouges symbolisant un «carton rouge» donné au président Kabila pour quitter son poste. Au moment de la rédaction du présent rapport, sur les 115 personnes arrêtées à Goma, 102 avaient été libérées et 13 étaient toujours en détention.333(*)

À Matadi, au moins 76 civils, dont au moins un mineur, ont été arrêtés par les agents de la PNC les 20 et 21 septembre, principalement dans leurs maisons, dans des magasins, des garages, des cabines téléphoniques ou des bars et non pendant les manifestations. Ils ont été emmenés dans des cellules du commissariat urbain local de la PNC et à la Direction des renseignements généraux (DRG). Parmi les personnes arrêtées, beaucoup ont été libérées entre le 20 et le 22 décembre après le paiement d'une somme d'argent demandée par les agents de la PNC. Treize personnes ont été transférées au Parquet de grande instance, dont sept ont été relâchées le 26 décembre, tandis que cinq étaient toujours détenues à la prison centrale de Matadi pour vol et rébellion, en attendant une audience devant le Tribunal de grande instance de Matadi.

À Boma, entre le 20 et le 21 décembre 2016, des agents de la PNC déployés dans toute la ville ont arrêté 43 personnes, dont deux femmes et quatre mineurs de moins de 14 ans. Vingt de ces personnes ont été libérées après avoir versé diverses sommes d'argent, alors que les 23 autres ont été transférés au Boma. Parquet de grande instance, qui a immédiatement ordonné la libération des deux femmes et des quatre enfants et de huit personnes supplémentaires. Au moment de la rédaction de ce rapport, neuf personnes étaient toujours détenues dans la prison centrale de Boma et poursuivies par le Parquet de grande instance pour rébellion, destruction méchante et association criminelle.

Il convient de rappeler que, depuis la fin de 2015, dans la plupart des grandes villes, les autorités locales ont continué d'interdire les manifestations publiques, alors que dans d'autres villes, des manifestations spécifiques ont été interdites après que les organisateurs aient communiqué les lieux des rassemblements prévus aux autorités.

Le 13 décembre 2016, dans un télégramme, le commissaire général de la PNC, Charles Bisengimana, a demandé à tous les commissaires provinciaux de la PNC d'adopter des mesures visant à empêcher toutes les marches collectives avant, pendant et après le 19 décembre, tout en rappelant la nécessité de le faire dans le respect des droits de l'homme. Les autorités locales de Goma et de Bukavu, ainsi que de la province du Haut-Uélé, ont interdit les manifestations avant le 19 décembre de cette même année. À Kinshasa, une interdiction générale et illimitée de toutes les manifestations publiques, ordonnée par le Gouverneur de la Ville après les événements du 19 septembre 2016, était toujours en place.

Les interdictions générales de manifestations imposées de facto ou de jure en RDC sont injustifiées et disproportionnées au regard de la nécessité de maintenir l'ordre public et sont contraires au droit international relatif aux droits de l'homme et aux articles 25 et 26 de la Constitution congolaise. L'utilisation disproportionnée de la force et de la répression contre des manifestants pacifiques sur la base de ces interdictions devrait donc être considérée comme contraire aux normes internationales relatives aux droits de l'homme et aux dispositions pertinentes de la Constitution congolaise.

Le 15 décembre 2016, l'Autorité de Régulation des Postes et des Télécommunications (ARPTC) a ordonné aux fournisseurs d'accès à l'internet de restreindre l'accès à tous les réseaux sociaux à partir du 18 décembre 2016 à 23h59. L'accès aux réseaux sociaux a ainsi été coupé en République démocratique du Congoen date du 20 décembre au 28 décembre 2016.334(*) Certains fournisseurs d'accès Internet ont même dû couper entièrement la connexion en internet pendant la même période335(*).

* 322 BCNUDH, Recours illégal, injustifié et disproportionne à la force lors de la gestion des manifestations publiques en République Démocratique du Congo de janvier 2017 à janvier 2018, version originale, 2018, p. 20.

* 323 AMNESTY INTERNATIONAL, Ils sont traités comme des criminels. La RDC fait taire des voix discordantes pendant la période préélectorale, novembre 2016, p. 38.

* 324Idem, p. 40.

* 325 Informations disponible sur www.rfi.fr>afrique>, consulté le 12 avril 2018.

* 326BCNUDH, Recours illégal, injustifié et disproportionne à la force lors de la gestion des manifestations publiques en République Démocratique du Congo de janvier 2017 à janvier 2018, Op. cit, p. 20.

* 327 Informations disponible sur https://www.radiookapi.net, consulté le 12 avril 2018.

* 328 HUMAN RIGHTS WATCH, 2016, Rapport mondial 2016 : République Démocratique du Congo, https://www.hrw.org/fr/worldreport/2016/country-chapters/285142, (octobre 2016).

* 329BCNUDH, Rapport sur les violations des droits de l'homme en République Démocratique du Congo dans le contexte des évènements du 19 décembre 2016, Op. cit, p. 16.

* 330 HUMAN RIGHTS WATCH, « La République Démocratique du Congo au bord du précipice, 28/09/2016 », OFPRA, « Les manifestations de l'opposition », DIDR, Mars 2017, p. 9.

* 331Le nombre total de personne détenues pourrait être plus important étant donné que le personnel du BCNUDH s'est vu refusé l'accès à plusieurs lieux de détention militaires.

* 332Ces cas sont détaillés dans les qui suivent.

* 33312 membres du Rassemblement et un de la LUCHA restaient en détention.

* 334 Ceci est devenu depuis un certain laps de temps la marque de gestion autant dans les pays occidentaux que dans les pays en transition démocratique.

* 335 Cette pratique devient généralisée

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle