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Le renouvellement du journalisme environnemental au prisme de la décroissance


par Guillaume Lemonnier
Sciences Po Lyon  - Master 1 AlterEurope, Études européennes et internationales 2020
  

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I. La décroissance, un courant « obus » qui frappe les esprits mais qui peine à s'unifier

A) Un concept qui s'impose progressivement dans le champ du militantisme écologique

Bien que la décroissance soit un concept apparu subtilement dès les années 1970 avec le « rapport Meadows » et les travaux de Nicholas Georgescu-Roegen, sa popularisation au sein du champ du militantisme écologique ne débute qu'à partir des années 2000. Dans les travaux de recherche portant sur la décroissance, on attribue souvent à Vincent Cheynet et Bruno Clémentin l'entrée du terme décroissance dans le militantisme écologique français. Ces militants écologistes qui oeuvrent dans la contestation « anti-pub » depuis 1999 via leur association Casseurs de pubvont diriger deux numéros de la revue écologiqueSilence, le numéro 280 de février 2002 et le numéro 281 de mars 2002. Ces deux numéros vont être particulièrement populaires auprès des militants écologistes et la décroissance va se diffuser petit à petit. Un événement particulier va aussi permettre d'ouvrir une fenêtre d'opportunité pour la militantisation de ce terme, il s'agitdu colloque international réalisé par l'association La ligne d'horizon de l'économiste François Partant, une association critique du développement, etpar Le Monde Diplomatique au palais de l'UNESCO en mars 2002. Le sujet de ce colloque international portait sur « l'après-développement » et consistait en la discussion d'alternatives au développement. Ce colloque international a connu un succès important au regard de la médiatisation qu'il a suscité et par la présence de nombreux intellectuels, comme Ivan Illich, intellectuel qui estconstamment cité par les écologistes et les décroissants. Par ailleurs, ce colloque a débouché sur la publication d'un livre intituléDéfaire le développement, refaire le monde en 2003 avec un collectif d'auteurs internationaux rassemblant des intellectuels comme Serge Latouche, Ivan Illich mais également des hommes politiques comme José Bové. A partir de 2004, le terme de décroissance commence à être repris par différents projets comme la création du journal La Décroissancepar Vincent Cheynet, Bruno Clémentin et Sophie Divry ou encore du « Parti pour la Décroissance ». La particularité de ce courant décroissant que l'on pourrait croire marginal,est que,certains de ses penseursbénéficient assez vite d'une visibilité internationalecomme l'économiste français Serge Latouche. Ce dernier est régulièrement cité dans les études anglo-saxonnes pour avoir conceptualisé la décroissance (« leadingthinker on degrowth »)28(*), bien que le terme existait déjà de manière implicite auparavant. Les colloques internationaux vont également se poursuivre : Paris en 2008, Berlin en 2011, Istanbul en juin 2011, Vienne en avril 2012, Montréal en mai 2012 ou encore Venise en septembre 201229(*). Pour en revenir à la sphère militante française, il y aura également des actions structurantes comme les multiples « marches pour la décroissance »dans plusieurs villes de France ou encore le contre-grenelle de l'environnement en 2007, tout cela à l'appel de Vincent Cheynet, Serge Latouche ou Paul Ariès.La popularisation de la décroissance dans le militantisme écologique s'explique également par la radicalité que ce mot est venu apporter. Il rompt avec la mollesse, voire l'oxymore de certains concepts comme celui de « développement durable » et redonne du sens à la lutte écologique. C'est notamment ce que pensent Fabrice Flipo, Denis Bayon et François Schneider qui, selon eux, « après la poussée des années 1970, le mouvement écologiste s'est institutionnalisé, il a vieilli, s'est «embourgeoisé« et peut paraître en manque d'inspiration. Être écologiste renvoyait à l'imaginaire des années hippies, des fumeurs de haschich sur les chemins de Katmandou, ce qui ne fait pas davantage rêver que de devenir cadre dans une «multinationale« écolo telle que Greenpeace ou le World WildlifeFund, ou élu sans pouvoir dans une «gauche plurielle« dont les relations avec le monde des affaires sont par tropévidentes. Dans ce paysage, les mouvements de la décroissance ont créé un clivage plus large, plus lisible. Et le «mot-obus« offrait la radicalité souhaitée par certains, notamment les plus jeunes des militants »30(*). Malgré la radicalité de ce mot, la décroissance s'est inscrite durablement dans la sphère militante écologiste.Une manière de quantifier cela est tout simplement le fait que, comme l'évoque Mathieu Arnaudet31(*), « la décroissance s'incarne (...) dans un large répertoire d'actions mais peine à se faire reconnaître comme telle ». En d'autres termes, la décroissance peut être présente un peu partout sans qu'on la revendique forcément, c'est notamment le cas des expérimentations collectives d'agriculture locale (AMAP et circuit court). Par ailleurs, une des particularités des militants décroissants, c'est qu'ils disposent d'un capital culturel et social relativement élevé, ce qui est utilepour faciliter la circulation du « vocabulaire décroissant et des textes références en la matière »32(*).

* 28ASSADOURIAN Erik, « The Path to Degrowth in Overdeveloped Countries » in The Worldwatch Institude, State of the World 2012, Moving toward sustainable prosperity, 2012.

* 29 Le colloque de Paris réalisé par l'association Recherche et décroissance ; le colloque de Berlin réalisé par ATTAC Allemagne ; le colloque d'Istanbul réalisé par la European Society for Ecological Econoics ; le colloque de Vienne réalisé par le Sustainable Europe Research Institute ; la « Conférence internationale sur la décroissance dans les Amériques » à Montréal ; le colloque de Venise intitulé « La grande transition, la décroissance comme changement de civilisation ».

* 30 BAYON Denis, FLIPO Fabrice, et SCHNEIDER François, ibid., p.62-63

* 31 ARNAUDET Mathieu, Militer pour la décroissance. Enquête sur la genèse d'un "mouvement politique" de la décroissance en France. Mémoire de M1 Sciences Politiques, Université Rennes 1 

* 32 ARNAUDET Mathieu, ibid.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld