WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Impacts des conflits liés à  la mobilité pastorale sur le développement et la gouvernance dans la province du Mayo-Kebbi ouest (Tchad)


par Souleymane ALI SALEH
Université de Dschang - Master en Science Politique, spécialité Gouvernance Locale, Décentralisation et Développement  2020
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

SECTION 2 : AMÉLIORATION DES MECANISMES DE GESTION DES CONFLITS

Les mécanismes de gestion des conflits liés à la mobilité pastorale sont défaillants. Les textes qui encadrent la mobilité pastorale ne favorisent qu'une catégorie d'acteurs en l'occurrence les éleveurs et par conséquent nécessitent une nette amélioration (Paragraphe I) pour propulser les deux secteurs de l'économie nationale. Le champ d'intervention des acteurs qui participent à la résolution de ces conflits est flou. L'Etat doit faire un effort d'harmonisation des textes régissant le monde rural et de détermination du champ d'intervention exact des acteurs d'application de ces textes (Paragraphe II).

PARAGRAPHE I - AMÉLIORATION DES TEXTES EN VIGUEUR

Le principal texte qui encadrait la mobilité pastorale de 1959 à 2014 était la loi n° 4 du 31 octobre 1959. À partir de 2014, un code pastoral fut adopté, il a pour objet de déterminer les principes fondamentaux en matière de pastoralisme en République du Tchad116, vu que le dispositif en vigueur à savoir la loi n°4 du 31 octobre 1959 portant réglementation du nomadisme et de la transhumance est tombée en désuétude117. Pour tous les observateurs tchadiens, ce code est partial et ne favorise que le pastoralisme. Ces allégations s'avèrent vraies, c'est pourquoi une révision de celle-ci est impérative (A). Pour arriver à un climat de paix entre les agriculteurs et les éleveurs, l'Etat peut appuyer l'élaboration des codes pastoraux locaux (B) en conformité avec le code pastoral de la République prenant en compte les réalités de chaque localité.

A. Réviser le code pastoral

Le code pastoral du Tchad a été très controversé dès le début de son adoption. Il a été adopté en 2014 par l'Assemblée Nationale mais après un tollé général de la population, ce code a été retoqué par le Président de la République. Au début de l'année 2015, une nouvelle loi portant code pastoral a été adoptée par l'Assemblée Nationale après une seconde lecture.

116 Article 1 du code pastoral de la République du Tchad

117 Rapport de la Commission Développement Rural et Environnement du 7 novembre 2014

82

Malgré toutes ces controverses sur la loi, le code pastoral n'a jamais satisfait une partie de la population, les agriculteurs et fait la part belle aux éleveurs. Beaucoup d'agriculteurs pensent que « Le code pastoral a pour but de transformer le sud du Tchad en un grand champ de pâture au bétail des éleveurs du nord » à la suite du discours du député et président du parti UNDR (Union Nationale pour le Renouveau et la Renaissance) à l'Assemblée Nationale en septembre 2015 rapporté par le Journal Abba Garde. Ce code n'a jamais fait l'unanimité malgré qu'il a passé trois fois devant l'Assemblée Nationale. Il doit être révisé pour palier à ce problème de partialité. Tout le monde est aujourd'hui conscient que les conflits agriculteurs/éleveurs ont été aggravés par le phénomène de nouveaux éleveurs c'est-à-dire les autorités administratives civiles et militaires qui pratiquent l'élevage ou l'agriculture intensive dans le sud du pays. Lors d'une interview accordée à Info235, le Secrétaire Général du PDL (Parti pour la Démocratie et les Libertés) dit ceci : « Les administrateurs civils et militaires sont devenus des éleveurs possédant plusieurs milliers de têtes de bétail. Ils louent les services des bouviers à qui ils donnent armes et minutions.» Conscient de ce phénomène, le député NDIGUINDJITA DODIH KEMTOBAYE a envoyé un texte d'amendements comportant un titre et trois nouveaux articles à la Commission Développement Rural et Environnement réunie le 7 novembre 2014 pour proposer une nouvelle version du code pastoral. Il propose : (1) Les autorités administratives civiles et militaires et le personnel des forces de défense et de sécurité détendeurs de capital-bétail seront interdits de pratiquer l'élevage et l'agriculture extensifs dans le ressort territorial de l'exercice de leur fonction. (2) Les autorités administratives civiles et militaires et le personnel des forces de défense et de sécurité détenteurs de capital-bétail seront interdits de s'ingérer dans le règlement pacifique des conflits survenus entre les usagers des ressources naturelles sauf cas de trouble à l'ordre public. (3) Les autorités administratives civiles et militaires et le personnel des forces de défense et de sécurité, responsables ou complices de pratiques incompatibles avec l'exercice de leur fonction tel que stipulé dans le « code pastoral nouveau » seront relevés d'office de leur fonction dans les quinze (15) jours francs qui suivent la constatation des faits par un agent assermenté de l'Etat et seront radiés de l'effectif de leur corps d'origine. Ils doivent être passibles de poursuites judiciaires. Le capital-bétail sera mis à la disposition des établissements pénitentiaires et hospitaliers ou à l'armée pour servir l'alimentation des effectifs. Ces amendements ont été rejetés par le gouvernement en raison de la sensibilité du problème dit-il. Un tel amendement ne peut passer devant la présidente de la Commission Développement Rural et Environnement de l'Assemblée Nationale, le ministre en charge de l'Elevage et de l'Hydraulique ou même le Président de la République qui sont tous eux-

83

mêmes des éleveurs. Nous pensons que ces amendements sont idoines pour diminuer les conflits liés à la mobilité pastorale et nous déplorons le refus délibéré de l'Etat par quel moyen que ça soit d'interdire l'élevage et l'agriculture extensifs aux autorités administratives civils et militaires dans leur zone d'affection.

L'article 46 de ce code postule : Les normes de maillage à observer pour l'implémentation des puits pastoraux sont les suivants :

- En zone saharienne : 50 kilomètres entre deux points d'eau ; - En zone sahélienne : 25 kilomètres entre deux points d'eau ; - En zone soudanienne : 25 kilomètres entre deux points d'eau.

Cette disposition du code est perçue comme arbitraire par les populations du sud du fait qu'elle ne respecte pas les réalités de la zone soudanienne. La zone saharienne est une zone moins habitée et n'est pas une zone d'agriculture extensive dont les normes de maillage ne posent pas de problèmes, de même que la zone sahélienne. Dans la zone soudanienne, les réalités diffèrent nettement, elle est une zone d'agriculture extensive et la densité de la population est importante. Une distance de 25 kilomètres entre les puits pastoraux occasionnait des destructions fréquentes des champs. Dans le premier code pénal, cette distance était de 12,5 kilomètres, après des amendements de la part de la majorité des députés du sud, elle a été ramenée à 25 kilomètres.

L'article 43 dudit code dispose : « Il est fait obligation aux agriculteurs de clôturer à tout moment les parcelles maraîchères.» Lors du débat autour du code pénal à l'Assemblée Nationale, le député HAROUN KABADI par ailleurs président de cette assemblée a suggéré la reformulation de l'article en : « Il est fait obligation aux agriculteurs de construire des clôtures des champs ». La commission a rejeté cet amendement en avançant l'argument suivant : la construction des clôtures des champs est source de destruction de l'environnement. L'idée derrière « clôturer les champs » est qu'elle peut se faire avec les branches d'arbres ou arbustes épineux et l'idée derrière « construire des clôtures » est qu'elle peut se faire avec un mur en briques et tout autre moyen que l'agriculteur juge efficace. Le fait que le code pastoral refuse la construction des clôtures des champs sous prétexte de destruction de l'environnement est pour beaucoup, une manière où l'Etat après avoir garanti tout le domaine national à l'élevage fait de leurs champs des espaces de pâturage aux animaux. Cet état d'esprit de clivage dans le code pastoral peut être au moins atténué avec des codes locaux.

84

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon