WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le développement de la finance verte


par Antoine DRY
ESPI Nantes - Mastère 2 Manager en Ingénierie de la Finance Immobilière 2021
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

37

C. Les stress tests climatiques

Dans la première partie de ce mémoire, nous avons parlé du réseau NGFS qui est l'effort commun des banques centrales afin de « verdir » en interne le système bancaire actuel. Nous avons également évoqué la notion de stress climatique comme levier et nous allons nous pencher davantage sur ce système et détailler quels risques sont couverts et de quelle manière ces tests sont réalisés. À titre informatif, le site du NGFS74 et celui de l'Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR)75 mettent à disposition l'intégralité des études sur les stress test climatique.

Depuis la crise des subprimes de 2008, les superviseurs ont ressenti le besoin d'avoir plus de visibilité sur les effets néfastes d'une nouvelle crise financière. Ils ont donc mis en place un panel d'outils permettant d'évaluer les risques et les vulnérabilités des institutions financières. L'objectif est de savoir si les institutions financières disposent d'assez de fonds propres76 pour résister à une nouvelle crise et continuer à fonctionner correctement tant sur la partie financement que sur la partie gestion au quotidien. Les superviseurs demandent de nombreuses informations aux institutions financières. Ainsi, au fil des années, les stress tests ont également permis de récolter des informations précieuses qui servent à alerter les marchés financiers. S'il est plus simple de récolter des informations concernant les marchés et les risques opérant, il est plus difficile d'avoir des informations concernant l'impact des changements climatiques sur le système financier. C'est un risque difficilement quantifiable et qui est très récent pour le monde de la finance. La création du réseau NGFS permet de pallier le manque d'information concernant les risques climatiques, mais encore une fois, nous ne sommes qu'à l'aube de ces analyse extra-financières environnementales.

Les stress tests climatiques ont le même objectif que les stress tests classiques. Les superviseurs veulent s'assurer que les fonds propres des institutions financières seront assez élevés pour absorber une catastrophe climatique. Cependant, la nature des chocs est différente puisque non financière mais naturelle. Ils ont des caractéristiques très différentes. L'ACPR distingue trois typologies de risques climatiques77 :

- Le risque physique : il mesure l'impact direct du changement climatique sur les personnes et les biens (sécheresse, inondations, épisodes climatiques extrêmes, etc.).

74 Site du NGFS :

https://www.ngfs.net/sites/default/files/medias/documents/820184 ngfs scenarios final version v6.pdf

75 Site de l'ACPR : https://acpr.banque-france.fr/scenarios-et-hypotheses-principales-de-lexercice-pilote-climatique

76 Fond propre : Les fonds propres bancaires correspondent à la réserve d'argent qu'un établissement bancaire doit détenir afin de pouvoir distribuer des crédits et assurer le financement de ses clients. Ces fonds propres doivent également permettre à la banque d'assurer sa structure financière en cas de crise financière. Les fonds propres bancaires sont régis par les accords de bale 3.

77 Source : Article « Évaluer les risques et les vulnérabilités et sensibiliser les acteurs financiers au risque de changement climatique : le rôle des stress test » paru dans la revue « Revue d'économie financière » par Laurent Clerc (2020).

38

- Le risque de transition : ce risque résulte d'une modification du comportement des agents économiques et financiers en réponse à la mise en place de politiques énergétiques (fiscalité carbone, taxes sur les carburants, etc.), de changements technologiques ou d'un ajustement spontané des marchés financiers.

- Le risque de responsabilité : il correspond aux dommages et intérêts qu'une personne morale devrait payer si elle était jugée responsable du réchauffement climatique. Ce risque est parfois considéré comme un catalyseur du risque de transition et rattaché à ce dernier.

Il est difficile d'anticiper ces risques car la nature est imprévisible. Cependant ils peuvent se produire à court et moyen terme. Nous le voyons au quotidien tant par rapport au réchauffement climatique qu'aux inondations ou encore aux tempêtes comme Katrina78. Le risque de transition est probablement celui qui se manifestera en premier en conséquence de la mise en place de politiques énergétiques importante comme les accords de Paris ou le Grenelle de l'environnement. Le risque physique peut également survenir mais il dépend du facteur géographique. En effet, si les catastrophes naturelles surviennent dans des zones habitées, le risque sera largement plus fort. Le risque de responsabilité peut être représenté par le recul du Gouvernement français dans l'application de certaines lois comme la loi bas carbone mise à mal par le mouvement des gilets jaunes. En reculant l'application de la loi bas carbone, le Gouvernement français endosse al responsabilité de l'augmentation de Co2 dans l'air.

Nous venons de voir que les risques climatiques étaient identifiés et classés en trois catégories. Afin de mieux comprendre les mécanismes des stress tests climatiques nous allons à présent détailler les risques que le régulateur (l'ACPR) souhaite couvrir. Ce sont des risques bancaires mais également des risques liés aux assureurs. Les banques et les assurances sont les deux grandes institutions financières, il est donc légitime de couvrir leurs risques. Nous pouvons retrouver ces mêmes risques dans les stress tests réalisés sur les marchés financier en cas de crise économique par exemple. Ce sont les risques courant des banques et assurances.

Les risques bancaires sont les suivants :

- Le risque de crédit : c'est le risque pour un établissement bancaire que son client (particulier, entreprise ou institutionnel) ne rembourse pas sa dette. Il doit donc être calculé dans les stress test climatique et ce sur l'ensemble du globe, un événement climatique pouvant arriver n'importe où.

- Le risque clients (impact sur les ménages) : l'augmentation soudaine du prix des énergies peut être problématique et affecter le budget des ménages. Il y a le prix des énergies que les ménages utilisent (maison, transport, etc.) mais également le prix des énergies des entreprises des ménages. L'objectif ici est de calculer le risque crédit sur les ménages par rapport à l'augmentation

78 Tempête Katrina : Katrina est le nom qui a été donné à un ouragan qui a ravagé les USA en 2005. Il est considéré comme l'un des plus violent de sa génération.

39

éventuel du prix des énergies. On sous-entend que les ménages devront s'endetter pour absorber l'augmentation des énergies (crédit consommation et crédit immobilier).

- Le risque de marché : c'est le risque le plus connu dû aux diverses crises financières. Ici, c'est le risque qu'une catastrophe naturelle vienne perturber les marchés financiers et créer une nouvelle crise financière. Étant donné l'importance de ce risque, il a été divisé en trois sous-parties :

l La réévaluation des portefeuilles de produits financiers à leur juste valeur : l'objectif est de réévaluer les portefeuilles dans le cadre de la transition énergétique. Les réévaluations portent donc sur les titres/obligations d'entreprises d'hydrocarbures en particulier et les entreprises nuisant à l'environnement. La valeur des entreprises sera amenée à diminuer ce qui impose une réévaluation des portefeuilles.

l Le risque de contrepartie : C'est le fait qu'une contrepartie fasse défaut. Par exemple : nous achetons une obligation d'État français via une banque mais l'État français n'est plus en mesure de rembourser sa dette. La contrepartie, ici l'État, fait défaut. Ici, l'objectif est de contrer les effets de la transition écologique sur le marché. Il est demandé aux établissements bancaires de dresser une liste de contreparties à risque liées à la transition écologique.

l Le risque souverain : Le risque souverain est tout simplement le risque qu'un État soit fortement affecté par l'impact économique des scénarios de transition écologique ou que les finances publiques soient durement touchées par ce phénomène.

Les scénarios de tests climatiques sont réalisés par le réseau NGFS. Tous les acteurs qui encadrent les banques sont réuni dans ce réseau ce qui explique pourquoi il a la charge de réaliser les stress tests. L'objectif des tests est donc de couvrir l'ensemble des risques évoqués plus haut et de tester la résistance des banques au risque de transition écologique. Le réseau NGFS a élaboré quatre classes de scénarios en fonction de la manière dont se réalise la transition (si les objectifs imposés par le réseau NGFS ou les États sont atteints). Les classes de scénarios ont été intégrées dans un tableau ci-dessous :

79

40

Schéma 5: Schéma descriptif des objectifs et des risques liés à leurs atteintes

Si la transition écologique est ordonnée (qu'elle respecte le calendrier et les engagements imposés par les États dans la validation des objectifs climatiques), les risques seront moindres. A l'inverse, une transition plus lente et qui n'atteint pas ses objectifs sera désordonnée et causera plus de dégâts d'où l'augmentation des risques. La transition ordonnée est la transition de référence qui doit être atteinte en 2050. Les scénarios proposés intègrent des données difficilement quantifiables dans le présent mémoire, tel que le calcul des émissions mondiales de CO2 (à la baisse ou à la hausse en fonction des scénarios), l'augmentation ou la diminution de la température (réchauffement climatique), la montée des océans, l'augmentation de la population mondiale, le développement de nouvelles technologies pouvant affecter la diminution des rejets de GES, la transition entre l'utilisation du charbon et des énergies plus vertes ou encore l'utilisation des terres agricoles et des forêts.

Les banques centrales et le régulateur (ACPR) qui forment le réseau NGFS sont en quelque sorte des lanceurs d'alertes en cas de crise climatique pouvant affecter le système financier. Leur rôle à travers les stress tests est donc préventif mais il permet également de récolter un grand nombre d'informations sur le système financier actuel et sa santé. Les banques participent donc à la protection de l'environnement à travers leur produits et politiques internes et sont en quelques sortes protégées ou averties des risques économiques en cas de crise

79 Source du tableau : https://acpr.banque-france.fr/scenarios-et-hypotheses-principales-de-lexercice-pilote-climatique

41

climatique. Il n'y a pas que les produits financiers verts qui peuvent permettre aux établissements financiers d'agir en faveur de l'environnement. En effet, certaines banques spécialisées ont mis leurs ressources en commun afin de participer directement à la préservation des océans à travers le financement responsable des navires de commerce. Cette initiative s'appelle « les principes de Poséidon » que nous allons développer dans notre prochaine sous-partie.

D. Les principes de Poséidon, le financement responsable des

navires marchands.

Le transport maritime international représente environ 80% des échanges mondiaux. La plupart des produits de consommation passent par le transport maritime. Les bateaux de commerce qui sont de grands porte-conteneurs sont loin d'être à la pointe de la technologie et dégagent énormément de gaz à effet de serre (GES). Cela représente entre 2% et 3% des émissions annuelles mondiales. À titre de comparaison, c'est ce que l'Allemagne (6ème plus gros émetteur de GES au monde) rejette sur une année. Force est de constater que ce problème doit impérativement être résolu et que des solutions doivent être apportées. Dans ce sens, l'Organisation maritime internationale80 (OMI) élabore la convention internationale pour la préservation de la pollution marine par les navires (MARPOL) le 2 novembre 1973. Nous ne détaillerons pas les objectifs de la convention MARPOL car ce n'est pas l'objet de ce travail. Nous devons retenir que cette convention a été amendée plusieurs fois et qu'à l'heure actuelle, son objectif est de réduire les GES émis par le secteur maritime, et des navires de transport en premier lieu, de 50% entre 2008 et 2050.

Alertées par l'OMI, les banques ont reconnu qu'elles avaient un rôle important à jouer dans ce défi mondial. En effet, elles sont les principaux financeurs des navires de transport. Elles disposent donc de portefeuilles de crédits navals importants. Cette prise de conscience a amené les banques à travailler de concert avec l'OMI pour créer en juin 2019 les Principes de Poséidon. L'objectif de cette initiative est, pour les banques, de mener une politique de transition écologique du transport maritime. Cette politique vise à intégrer dans les financements des navires des critères de développement durable afin de promouvoir la décarbonisation du transport maritime international. Cela n'est pas sans rappeler la notion de critères ESG que nous avons évoqués tout au long de ce mémoire. Ces principes ne s'appliquent pas uniquement aux prêteurs (banques). Ils visent également les bailleurs et les garants financiers. Aujourd'hui, 24 institutions financières ont signé les Principes de Poséidon. Cela représente environ 175 milliards de dollars d'encours bancaires, soit près de 50% du portefeuille mondial de financement de navires.

Les Principes de Poséidon sont organisés en association dirigée par un comité de direction composé de onze membres élus parmi les banques signataires. Le comité n'est pas là pour surveiller ou sanctionner mais plutôt pour harmoniser

80 Organisation Maritime Internationale : est une institution qui dépend directement de l'ONU. Son rôle est d'assurer la sécurité et la sureté des transports maritimes et de prévenir de la pollution en mers par les navires qu'ils soient de transports ou destinés à la pêche.

42

les démarches et faire partager les techniques que certains établissements auraient développées pour gérer plus efficacement leurs portefeuilles de crédits maritimes. Les principes sont au nombre de quatre :

- Principe 1 - L'évaluation par rapport à l'alignement climatique81 : L'objectif de ce principe est de mesurer annuellement l'intensité carbone des portefeuilles maritimes afin de s'assurer qu'ils soient en ligne avec l'objectif établi, à savoir la réduction de 50% des GES à horizon 2050 (objectif fixé par l'OMI). Pour calculer cet alignement, les Principes de Poséidon utilisent la méthode dite du ratio d'efficacité annuelle (REA), plus utilisé sous sa forme anglaise ARE (Annual Efficiency Ratio). Ce ratio prend en compte la consommation de carburant annuelle d'un navire, la distance qu'il a parcourue sur une année, et son poids au tirant d'eau d'été82. Par la suite, l'ARE du navire est comparé avec la trajectoire de décarbonisation83. Pour un portefeuille de navire, il suffit de faire une moyenne pondérée et de la comparer avec la trajectoire de décarbonisation. Chaque taille de navire dispose de sa propre trajectoire de décarbonisation qui est établie par le bureau des Principes de Poséidon.

Si les navires ne sont plus dans l'alignement, les banques peuvent alors émettre des recommandations aux armateurs pour diminuer leur GES. Il est également possible que la banque refuse de renégocier les financements, voire de ne plus financer certains navires.

- Principe 2 - Le principe de responsabilité : À travers ce principe, les signataires s'engagent à n'utiliser que des données, sources, techniques ou tout autres services pour réaliser leurs calculs, fournis par l'OMI. Cela garanti la véracité des informations et assure la conformité de leurs calculs.

- Principe 3 - Le principe de mise en vigueur : À travers ce principe, les signataires s'engagent et garantissent que les informations permettant l'évaluation des navires sont transmises avec le consentement et l'aide des armateurs propriétaires des navires. Les signataires s'engagent également à travailler avec les clients des armateurs. Tout cela pour permettre le bon calcul de l'intensité carbone des navires.

- Principe 4 : Le principe de transparence : Comme pour les reportings extra-financiers que nous avons évoqués dans la partie sur les produits verts, les signataires doivent se plier à un reporting annuel auprès de l'OMI de l'alignement climatique de leurs portefeuilles. Les établissements financiers signataires doivent publier et reconnaitre qu'ils ont signer la charte des Principes de Poséidon.

81 Alignement climatique : il est défini comme le degré auquel l'intensité en carbone d'un navire, d'un produit maritime ou d'un portefeuille est en ligne avec la trajectoire de décarbonisation imposée par l'OMI.

82 Tirant d'eau d'été : Le tirant d'eau d'été correspond à la partie immergée du bateau en été. La partie immergée varie en fonction des saisons. Le tirant d'eau d'été est égal à 28.60m pour un supertanker (transport de pétrole).

83 Trajectoire de décarbonisation : Elle représente le nombre de grammes de CO2 qu'un navire peut émettre pour déplacer une tonne de marchandise sur une distance d'un mille nautique (1.852km).

Pour résumer, les Principes de Poséidon reposent principalement sur l'analyse de l'émission des GES des navires en portefeuilles des signataires (banques). Les émissions de GES doivent être en ligne avec les recommandations de l'OMI qui fixent une réduction de 50% des GES à horizon 2050. Les principes de Poséidon sont strictement encadrés par quatre principes qui prônent le partage des informations entre les différents intervenants (banques, armateurs, clients des armateurs et l'OMI) et la publication des analyses et résultats communiqués par les signataires.

Dans cette seconde partie de mémoire, nous avons pu voir que les établissements financiers participaient à l'effort collectif de protection de l'environnement à travers la création de produits financiers « green » tels que les obligations vertes et les produits structurés verts permettant de financer des projets écologiques. Nous avons pu constater que les régulateurs comme les banques centrales et l'ACPR, prenaient part au sujet de protection de l'environnement en réalisant des stress tests climatiques afin de s'assurer de la solidité des établissements financiers en cas de catastrophes naturelles tels qu'un tsunami84, un ouragan ou encore un tremblement de terre. Enfin, nous avons pu voir que les établissements financiers étaient capables de mener des actions communes ciblées sur des thématiques précises comme la protection des océans à travers les principes de Poséidéons.

43

84 Tsunami : Tsunami est le mot japonais pour désigner une vague géante formé par une série d'ondes de très grande période se propageant à travers l'eau.

44

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams