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Le bouddhisme theravada, la violence et l'état. Principes et réalités

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par Jacques Huynen
Université de Liège - DEA Histoire des religions 2007
  

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L'identité singhalaise

Au cours de l'histoire du Sri Lanka206(*) les Indiens du Sud et les Tamouls ont sans doute toujours été présents. Les Singhalais originaires de l'Inde du Nord--d'où ils arrivèrent sans doute par voie maritime--et parlant une langue indo-aryenne, intégrèrent très tôt des Dravidiens, Tamouls et Indiens du Sud, puisque Vijaya, le légendaire homme-lion, et ses hommes, les premiers Aryens à s'installer sur l'île, épousèrent des femme sud-indiennes (cf Mahâvamsa et TAMBIAH, 1992, p. 129-133). Au IIIe AEC Mahinda, fils d'Asoka y introduit le bouddhisme theravada et y convertit la famille royale207(*). Par la suite plusieurs vagues de migration venant du sous-continent se succédèrent mais en général s'intégrèrent aux Singhalais et furent bouddhisés. Ce qui fut d'autant plus facile que le bouddhisme fait une place aux dieux hindous, bien que subordonnée. La première guerre entre les Singhalais et des Tamouls du Nord, ayant conservé leur identité, guerre dont le Mahâvamsa rend compte, est celle qui oppose Dutthagamini au roi tamoul Elara--homme juste mais « hérétique » dit la chronique. Cette guerre, victorieuse et aboutissant à la reprise de Anurâdhapura, est présentée comme la réponse non pas à une vague de migration mais à une invasion militaire. À partir du VIe-VIIe siècle EC, suite aux progrès d'un sivaïsme hostile au bouddhisme dans le Sud de l'Inde, une première affirmation de l'identité singhalaise fondée sur la spécificité confessionnelle des Singhalais s'exprime dans le Mahâvamsa. Cette identité construite en opposition aux Tamouls n'arrêtera dès lors plus de se consolider. Au XIIe EC la deuxième entreprise guerrière qui sera menée au nom de la défense de l'identité singhalaise et du dhammasasana208(*) sera celle de Parakramabâhu, héro de la période de Polonaruwa, en réponse à une nouvelle intrusion des Tamouls, la dynastie des Chola (qui occupe l'île au Xe et XIe siècle). Les siècles suivant verront, quasiment jusqu'à l'arrivée des Portugais, des tentatives d'incursions de princes du Tamil Nadu et du Kalinga et « leurs bandes » écrit TAMBIAH (1992, p. 140) qui finirent par précipiter la chute du royaume de Polonaruwa dans le Centre-Nord. L'abandon, et le dessèchement, de cette zone de nos jours encore divise l'île entre un domaine singhalais dans le centre et le Sud et un domaine tamoul dans le Nord.

La dialectique Singhalais/Tamouls, bouddhistes/hindous s'illustre encore en plein XIXe siècle par le fait que c'est l'élite kandyenne qui appelle les Britanniques à la rescousse pour la débarrasser d'une dynastie tamoule, les Nayakkar, qu'elle soupçonne de n'être bouddhiste que nominalement.

Dans une démarche anthropologique et phénoménologique, GOMBRICH209(*) suggère qu'au niveau du bouddhisme populaire, en réponse à un nationalisme tamoul croissant à la fin de la période coloniale, le nationalisme singhalais lui emprunta certaines de ses caractéristiques violentes en intégrant dans sa propre mythologie la divinité guerrière hindoue Skanda/Kataragama, fils de Siva, tout en le bouddhisant par subordination au Bouddha. Ce processus serait né de la non-intégration des Tamouls des hauts plateaux, récemment importés (XIXe-XXe EC) par les Britanniques dans la région de Kandy (Centre-Sud) pour travailler dans les plantations de thé, alors que les castes tamoules karâva et salâgama qui les y avaient précédés s'étaient intégrées, singhalisées et bouddhisées.

* 206 On entend par Sri Lanka l'État,en principe laïque, que les leaders politiques srilankais, singhalais, tamouls et musulmans eurent l'intention de fonder lors de l'Indépendance en 1948. Les termes singhalais et tamouls renvoient à des groupes linguistiques. Les Singhalais, sont en majorité bouddhistes avec des minorités catholique et protestante. Les Tamouls sont originaires du Tamil Nadu ou de l'Inde du Sud et sont en général hindous ou chrétiens. On trouve les musulmans (Moors), qui ne représentent que 7%, dans le Nord-Est où la majorité d'entre eux cohabitent--difficilement--avec les Tamouls et parlent le tamoul, ainsi qu'à Colombo, dans le centre et à Kandy où ils parlent singhalais. Les burghers sont des métis d'origine hollandaise ou britannique en général protestants mais parfois bouddhistes.

* 207 L'opinion de François HOUTART (Sri Lanka 1968-72 : Religion and Ideology in Sri Lanka, Colombo, Hansa, 1974) suivant laquelle les monarques pré-bouddhistes du Sri Lanka soutinrent le bouddhisme afin d'opposer une « contre-idéologie » à la tutelle brahmanique a été critiquée, comme manquant de bases textuelles, par E. MEYER, Annales. Histoire, Sciences sociales, 1983, vol. 38, n° 2, pp. 302-305.

* 208 Le bouddhisme, son enseignement et les institutions qui le représentent.

* 209 Buddhism Transformed, 1988, p. 186

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