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Le traitement médiatique de l'anorexie mentale, entre presse d'information générale et presse magazine de santé

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par Audrey Arnoult
 - Institut d'Etudes Politiques de Lyon 2006
  

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3. Les conséquences de ces pratiques sur la malade et son entourage

Aborder les conséquences de l'anorexie mentale pour la malade et pour son entourage, revient à s'intéresser aux victimes de cette pathologie. La première victime est la malade elle-même, la particularité étant qu'elle ne se considère pas comme une victime du moins au début. Elle ne prendra conscience de sa position de victime qu'au cours de la prise en charge thérapeutique. L'entourage représente la seconde victime. La notion d'entourage est à comprendre au sens large : dans certains cas il s'agit des parents, dans d'autres des frères et soeurs... Différentes configurations sont possibles même si en général ce sont souvent les parents qui sont en priorité « touchés » par la maladie. Nous aborderons successivement les conséquences physiologiques et les conséquences psychologiques de l'anorexie avant de s'intéresser à l'impact de la maladie sur la famille.

a) Les conséquences physiologiques

L'anorexie mentale a des conséquences graves tant au niveau physiologique que psychique mais les jeunes filles ignorent souvent ces complications. Les perturbations physiques apparaissent et se multiplient au cours de la maladie. Elles sont plus ou moins graves et dépendent « de la vitesse de la perte pondérale, de la durée de l'évolution de la maladie, de l'association aux conduites boulimiques et purgatives... »492(*). Outre les symptômes de la maladie que nous avons déjà mentionné (anorexie, amaigrissement et aménorrhée), il existe beaucoup d'autres complications physiques. La plupart sont la conséquence de la dénutrition et sont réversibles avec la guérison. Il serait trop long d'énumérer tous les dégâts engendrés par l'anorexie, nous ne citerons donc que les plus importants afin de mieux saisir la gravité de la maladie.

La complication somatique la plus frappante est la dénutrition493(*). Plus la maladie est avancée, plus la maigreur s'accentue et plus le risque de décès augmente. P. Jeammet écrit que « physiquement, les anorexiques sont très reconnaissables. Leur visage pâle, émacié, ridé et comme sans âge est très impressionnant. L'ensemble de leur corps est squelettique, sans aucune enveloppe de graisse ni de masse musculaire, mais elles ont parfois des oedèmes de carence aux membres inférieurs »494(*). Ce portrait donne une idée assez précise de l'apparence physique de l'adolescente quand la maladie est avancée. L'amaigrissement engendré par la restriction alimentaire altère l'état général. L'organisme ne peut fonctionner normalement et très vite l'anorexique perd de la masse musculaire, les os sont aussi gravement touchés. Privée de masse grasse, le corps réduit ses dépenses et produit moins de chaleur c'est pourquoi, la plupart des anorexiques se plaignent d'avoir toujours froid. La dénutrition « altère également les muscles de l'estomac et des intestins »495(*) et rend la digestion plus difficile d'où l'argument souvent invoqué par les malades : elles ne peuvent pas manger car la moindre prise de nourriture leur provoque des douleurs gastriques. Notons que C. Lasègue mentionnait déjà ce détail ce qui illustre la pertinence de sa description de l'anorexie. La perturbation de l'appareil digestif entraîne une constipation quasi-constante et « plus de 65% des malades atteints d'anorexie mentale [...] s'[en] plaignent »496(*). Les carences alimentaires altèrent également le fonctionnement du cerveau, l'anorexique a plus de mal à se concentrer, perd parfois la mémoire, ce qui peut sembler contradictoire avec l'investissement scolaire dont elle fait preuve. En réalité, D. Rigaud explique que « la carence alimentaire déclenche une stratégie de veille [...] le cerveau maintient un état de veille alimentaire farouche »497(*), ce qui explique que souvent les malades ne parviennent pas à dormir et se réfugient dans le travail.

Ces complications sont en quelque sorte les conséquences immédiates de l'anorexie car liées à la dénutrition. Il faut savoir que cette maladie entraîne aussi des complications cardiaques, rénales, métaboliques, neurologiques, squelettiques et peut retarder la croissance. Certaines de ces complications apparaissent au bout de quelques mois de la maladie, d'autres se manifestent des années après.

Au-delà de toutes ces perturbations, la mort représente le risque majeur de la maladie. Quand l'anorexie est grave, l'aspect cadavérique de la jeune fille conduit souvent les personnes de son entourage à la comparer à un déporté498(*). Le paradoxe est qu'en réalité l'anorexique ne cherche pas à mourir même si sa quête de l'objet l'entraîne dans un état pathologique aux limites de la mort. Ce témoignage illustre bien l'envie de vivre des anorexiques :

« Vous me dîtes que vous allez m'enfermer, que c'est le seul moyen pour que je me mette à manger, que sinon je vais mourir. Vous me dîtes qu'il y a derrière tout cela un désir de mort, que mon refus de la nourriture est un suicide déguisé. Mais je ne veux pas mourir, ça n'est pas vrai ! J'ai toujours voulu vivre, et maintenant plus que jamais ! Je ne veux pas mourir, je ne veux pas grossir, ce n'est pas pareil. Je veux au contraire qu'on me laisse vivre comme je l'entends. D'ailleurs ma mort ferait bien trop de peine à mes parents, à toute ma famille, même si je pense parfois que ça simplifierait les choses »499(*).

Derrière un apparent mouvement de destruction, se cache en vérité l'envie de vivre. Pourtant, le risque de mort est bien réel. Selon, P. Jeammet, « 7 à 10% des adolescentes souffrant de ce trouble meurent, la moitié des conséquences de la dénutrition, l'autre moitié par suicide » et « dans 20% des cas l'anorexie peut devenir chronique »500(*).

* 492 ALVIN, Patrick, Anorexies et boulimies à l'adolescence, Paris, Editions Doin, Collection « Conduites », 2001, p. 35-36.

* 493 Médicalement, on estime qu'il y a dénutrition quand l'indice de masse corporelle (IMC) est < 18,5kg/m2. En dessous de 14, le pronostic vital est en jeu.

* 494 JEAMMET, [2004], p. 16.

* 495 RIGAUD, Daniel, Anorexie, boulimie et compulsions - Les troubles du comportement alimentaire, Paris, Editions Marabout, 2003, p. 170.

* 496 Idem, p. 171.

* 497 Idem, p. 172.

* 498 Des témoignages d'anorexiques mais aussi de parents nous ont révélé que cette comparaison était fréquente.

* 499 VINCENT, Thierry, L'anorexie, Paris, Editions Odile Jacob, 2000, p. 167.

* 500 JEAMMET, Philippe, Anorexie et boulimie, les paradoxes de l'adolescence, Paris, Editions Hachette Littératures, 2004, p. 170.

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