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Enjeux et jeux pétroliers en Afrique: étude de l'offensive pétrolière chinoise dans le Golfe de Guinée

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par Severin Tchetchoua Tchokonte
Université de Yaoundé 2 - Master 2 science politique 2008
  

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B. Les Etats-Unis et l'indigénisation de la démocratie en Afrique

Au-delà des apparences, et contrairement aux espoirs que l'opinion publique africaine lui voue, l'offensive américaine sur le continent est réfléchie et s'inscrit en droite ligne dans la dialectique des intelligences, visant le renversement du " patronage exclusif " des anciennes puissances coloniales et l'ouverture du marché africain aux investisseurs américains. En effet, les Etats-Unis n'entendent pas continuer à assister impassibles au partage du " gâteau africain " par les différentes chancelleries européennes. Pour s'attirer un certain capital de sympathie au sein de la population africaine, la diplomatie américaine dans son ensemble feint d'adhérer à l'idée de la nécessité de démocratiser le continent. Seulement, les prises de position de l'ancien président américain Bill CLINTON en faveur de la tropicalisation de la démocratie, à ENTEBBE en OUGANDA en 1998, apparait comme un coup fatal au processus démocratique laborieusement engagé sur le continent.

C'est en effet pendant son voyage en Ouganda que Bill CLINTON à l'occasion avait réuni autour de lui plusieurs chefs d'Etat africains : l'ougandais Yoweri MUSEVENI, le congolais Laurent Désiré KABILA, le Rwandais Pasteur BIZIMUNGU, le Kényan Arap MOI et le Tanzanien Benjamin MKAPA déclarait qu' " il n'ya pas de modèle établi pour les institutions ou la transformation démocratique " (Fogue Tedom ; 2008 : 60). Le président américain venait d'annoncer aux progressistes africains que son pays ne pouvait sacrifier ses intérêts économiques sur l'autel de la défense des libertés politiques en Afrique. En effet,  " en soutenant qu'il n'ya pas de model de démocratie, dans un réalisme qui ne peut que renforcer la lecture essentiellement géostratégique de l'action de tous les partenaires étatiques étrangers de l'Afrique, Bill CLINTON, après les puissances européennes responsables du " pouvoir de la minorité "  que la nouvelle politique africaine des Etats-Unis entendait combattre, venait de souscrire lui aussi à une indigénisation de la démocratie en Afrique "  (Fogue Tedom ; 2008 : 60).

C'est par exemple le cas au Cameroun où, après la longue période de défiance qui a précédé l'élection présidentielle de 1992, afin de mieux servir leurs intérêts dans le pays, les Etats-Unis décident de changer d'attitude et de cohabiter harmonieusement avec le pouvoir de Yaoundé. Le soutien américain au régime du président Paul BIYA s'illustre à la veille de l'élection présidentielle de 1997. Redoutant les trucages électoraux, l'opposition refuse de se présenter devant les électeurs, tant que les garanties de transparence ne seront pas données par le pouvoir. Dans l'espoir que les Etats-Unis fassent pression sur le président BIYA pour garantir la transparence du scrutin, un des leaders de l'opposition, Samuel EBOA rencontre le successeur de Frances COOK (ancienne ambassadrice des Etats-Unis au Cameroun) qui lui répond que, " c'est la stabilité politique du Cameroun qui intéresse les Etats-Unis et non le soutien à tel ou tel candidat ou formation politique " (Ela Pierre ; 2002 : 100)55(*). Selon Fogue Tedom (2008 : 84) :

" La réponse du diplomate américain, en fait un revirement au regard de 1992, (...) et annonçait par le fait même le renoncement de son pays par rapport à sa volonté initiale et officielle de ramener aux africains en même temps que le libéralisme économique, la démocratie. Elle dévoilait la réconciliation intervenue entre le gouvernement camerounais et les intérêts américains. C'est donc sans surprise qu'après la création en 1999 de la multinationale américaine EXXONMOBIL, fruit de la fusion d'ESSO et de MOBIL, jusqu'ici limité en Afrique Noire dans le raffinage et la distribution, on apprendra qu'elle a obtenu des autorités camerounaises le permis de prospecter du pétrole sur deux gisements off-shore : Ebodjé et Ebomé Marine ".

Au regard de ce qui précède, il ressort que malgré leur contribution à la promotion voire à l'enracinement d'un embryon de démocratie en Afrique, le principal souci de la France était de sauvegarder ses intérêts, tandis que pour les Etats-Unis, il était avant tout question de remettre en cause la main mise européenne sur l'exploitation des richesses africaines. La France et les Etats-Unis s'intéressent aux richesses africaines, à la seule différence que la France veut garder la main mise sur leur exploitation, alors que les Etats-Unis veulent avoir droit au chapitre. Aussi les Etats-Unis cristallisent-ils leur critique autour de la politique africaine de la France. Fondent leur offensive sur un discours sur la démocratie, les droits de l'Homme et la bonne gouvernance. Se sentant menacée par cette offensive américaine, la France feint elle aussi de s'inscrire dans cette logique progressiste. En effet, le contexte de démocratisation dans lequel intervient la mise en oeuvre de leur nouvelle politique africaine les oblige à s'inscrire dans la dialectique des intelligences. Feignant d'opter pour l'idée de la nécessité de la démocratisation du continent, ils continuent en fonction des circonstances et surtout chaque fois que leurs intérêts l'exigent à soutenir les régimes africains même autoritaires. Les donneurs de leçons se révèlent être les meilleurs amis des régimes dictatoriaux. Leurs différentes prises de position en faveur de la démocratie ne constituent en réalité qu'une manière subtile d'accroître leur capital de sympathie auprès des populations africaines.

De ce fait, au vue de la percée chinoise sur le continent, un conflit entre intérêts occidentaux et chinois sur le continent est à prévoir. En effet, Il est évident que les puissances occidentales qui profitaient du " consensus de Berlin "56(*), et qui s'appropriaient les richesses du continent africain ne la voient pas d'un bon oeil, et ils ont dressé un certain nombre d'obstacles devant la Chine pour l'empêcher de menacer leur position monopolistique. Obstacles consistant pour l'essentiel à obscurcir au maximum l'offensive chinoise en Afrique. En réalité, la pénétration chinoise en Afrique dérange au plus haut point.

Au-delà de leur différence de posture vis-à-vis de la démocratie en Afrique-contrairement aux démocraties occidentales qui par un ensemble de conditionnalités imposées aux pays africains prétendent soutenir l'idée de la démocratisation de l'Afrique, la Chine, outre la non reconnaissance de Taiwan, ne pose pas de conditions politiques à l'établissement des relations diplomatiques avec ses partenaires africains- la Chine, tout comme les puissances occidentales visent avant tout la défense de leurs intérêts. En effet, selon Fogue Tedom(2008 : 158) : " A ce sujet, il faut souligner que si les démocraties occidentales affirment soutenir sans réserve l'opinion africaine qui aspire à la liberté, exige les réformes démocratiques effectives et soulève la question de la légitimité politique des gouvernants, dans les faits, tétanisés par leurs intérêts géostratégiques elles constituent au contraire un obstacle à l'émancipation politique des africains (voir l'attitude de la France dans la gestion de la succession du président togolais en 2005 ou encore la complaisance des Etats-Unis face aux dérives autoritaires du président MUSEVENI en OUGANDA). A partir de cette lecture, si le soutien politique des autorités chinoises aux régimes africains réfractaires aux réformes démocratiques est tout à fait logique au regard de la nature autoritaire du gouvernement de pékin, il est nécessaire de souligner que ce positionnement chinois n'est différent qu'en apparence de celui de ses rivaux que sont les démocraties occidentales ". C'est dire que même quand les valeurs sont présentées comme les motivations dans la politique internationale, il faut être prudent, ne pas prendre pour explication ce qui mérite explication.

Dans leur quête effrénée de matières premières, ces puissances ont transformé l'Afrique en un simple champ de manoeuvre où se déploient au quotidien leurs conflits d'intérêts autour de la quête et du contrôle des matières premières stratégiques (pétrole en l'occurrence). Seulement, leurs luttes de positionnement n'est pas sans effets sur la démocratie et la paix en Afrique.

* 55 Cité par FOGUE TEDOM (2008 : 84).

* 56 Le consensus de Berlin renvoie ici à un accord tacite passé entre les puissances occidentales, visant à ne pas gêner les intérêts de l'une d'entre elles, dans le cadre des dossiers africains.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore