RESUME
La destruction par effet knock-down des bruches dans le
niébé en stock (action de choc) n'est qu'un aspect de
l'efficacité des formulations agissant comme insecticide de contact.
Cette étude avait pour objectif de vérifier la durée de la
rémanence de l'activité insecticide des huiles essentielles de
Xylopia aethiopica utilisées pures ou mélangées
avec de la poudre de fruits de la même espèce. Une
rémanence plus longue réduit en effet les risques de
réinfestation en provenance de l'extérieur ou par une nouvelle
génération après l'utilisation du produit contre les
parents. Les comparaisons ont été effectuées avec un
témoin et la survie des bruches adultes, leur fécondité et
le nombre de descendants de la première génération ont
été mesurés ainsi que la perte de poids des grains.
Les traitements testés sont le témoin
T01 (niébé seul), l'huile essentielle
diluée dans l'acétone (T02), la poudre de
Xylopia aethiopica (T03) et la poudre
mélangée à l'huile essentielle de Xylopia
aethiopica (THE). La persistance de
l'efficacité de la formulation dans le traitement THE
est meilleure vis-à-vis de la bruche du niébé pendant deux
semaines au moins. Une meilleure réduction des pontes a
été aussi observée dans le traitement
THE. La formulation huile essentielle diluée dans la
poudre de Xylopia aethiopica (THE) provoque encore 55
jours après le traitement des graines une réduction de
ponte d'environ 90%. Ce traitement a un effet résiduel plus
prolongé que pour les autres traitements. L'effet rémanent du
T03 sur la mortalité et la réduction des pontes
est plus long que le traitement T02. Le traitement
T02 provoque une mortalité semblable à celle
observée dans le traitement THE durant les six premiers
jours. Il s'agit d'un effet knock-down qui s'estompe suite à
l'évaporation de la formulation T02 (huile essentielle
diluée dans l'acétone). La rémanence de cette formulation
est donc limitée et les risques de réinfestation existent suite
à la disparition de l'effet répulsif observé les premiers
jours d'incubation.
Nos résultats indiquent qu'une protection durable et
à coût peu élevé contre Callosobruchus
maculatus est possible en utilisant les formulations à base de
fruits secs de Xylopia aethiopica. Compte tenu du fait que Xylopia
aethiopica se retrouve dans les aires de production du
niébé, l'utilisation d'un mélange de la poudre de fruits
secs et l'huile essentielle de cette espèce pour protéger les
récoltes de niébé contre les attaques
sévères de Callosobruchus maculatus peut
représenter une solution alternative supplémentaire pour les
populations locales qui traitent habituellement le niébé avec les
plantes à effet insecticide.
CHAPITRE I : INTRODUCTION
1- Introduction
Pour faire face à la demande alimentaire des
populations vivant dans les pays en développement où la
consommation de viande constitue encore un luxe, les légumineuses
à graines sont une source indispensable de protéines. Parmi ces
légumineuses, le niébé : Vigna unguiculata
L. (Walp), constitue l'un des aliments de base des populations. De par son
rôle dans la restauration de la fertilité du sol, et sa
compatibilité avec plusieurs associations culturales, cette plante est
une composante essentielle des systèmes de culture dans les zones de
savane en Afrique tropicale (Mulongoy et al., 1992). Les
graines sont riches en protéines, en carbohydrates et en vitamines
(Kholi, 1990 ; Quin, 1997). Elles contiennent plus de 25% de
protéines et sont riches en lysine et en tryptophane. Le
niébé vient ainsi équilibrer les régimes à
base de céréales et de tubercules qui sont
généralement pauvres en protéines et riches en hydrates de
carbone (Singh et Singh, 1992). Les feuilles du niébé sont
consommées comme des légumes en Afrique tandis que les
résidus constituent une bonne source de fourrage animal (Tarawali et
al., 1997).
Nonobstant son importance, les rendements du
niébé sont inférieurs dans certaines régions
à la moyenne de l'Afrique qui est de 700kg/ha (FAO, 1998). Parmi les
contraintes à la production du niébé, les insectes
ravageurs causent le plus grand problème au niébé
(Bottenberg, 1995). En effet, le niébé est attaqué par un
large spectre de ravageurs depuis la germination jusqu'à la
récolte (Jackai et Adalla, 1997). Dans la gamme très large de ces
insectes ravageurs du niébé, les Coléoptères
Bruchidae dont notamment Callosobruchus maculatus Fabricius sont parmi
les plus redoutables du fait que leurs attaques débutent au champ, pour
s'étendre ensuite à l'entrepôt où la population de
bruches peut croître rapidement. La conséquence la plus
préoccupante de ces attaques est la diminution qualitative et
quantitative de la récolte au champ ou en cours de stockage.
Plusieurs méthodes sont préconisées pour
le contrôle des ravageurs du niébé. Celles-ci incluent la
lutte biologique, la lutte chimique, la résistance de la plante
hôte et les pratiques culturales. Parmi ces méthodes, la lutte
chimique par les pesticides de synthèse est la stratégie la plus
utilisée et la plus efficace pour le contrôle des ravageurs du
niébé, puisqu'elle a montré des résultats
satisfaisants dans l'accroissement des rendements du niébé dans
maintes régions (Alghali, 1993 ; Amotabi, 1994 ; Jackai,
1995a). Malgré ces réussites, l'utilisation des insecticides de
synthèse n'est pas une stratégie recommandable pour plusieurs
raisons : leur toxicité, la perturbation de l'équilibre
biologique de l'écosystème, le coût élevé des
insecticides, la faible maîtrise des techniques d'utilisation et le
développement des souches résistantes.
Face donc à la demande croissante de promotion d'un
développement durable, et de protection de l'environnement en
l'application de l'Agenda 21 du sommet Planète Terre sur l'environnement
et le développement tenu à Rio de Jane iro en 1992 des
méthodes alternatives sont préconisées. Ainsi, suite aux
désillusions liées à l'emploi des insecticides de
synthèse, il est urgent d'identifier, d'inventorier et de recommander
des méthodes de contrôle, qui soient peu coûteuses et
efficaces, faciles à adopter pour les producteurs du Tiers Monde.
L'accent est donc de plus en plus mis sur l'exploitation des connaissances
locales à travers un recensement des composantes de la
biodiversité (Kossou et al., 2001).
Des études réalisées dans plusieurs
agrosystèmes en Afrique et particulièrement au Nord Cameroun
révèlent que les producteurs utilisent des pratiques
traditionnelles dont des extraits des plantes à effet insecticide et/ou
insectifuge pour la conservation des produits agricoles en particulier le
maïs et le niébé (Ngamo, 2004). De par leur innocuité
et leur faible toxicité pour l'homme (Isman, 2002), ces plantes à
utilités alimentaire et médicinale constituent une alternative
pour la conservation des denrées stockées.
Les huiles essentielles extraites de ces plantes aromatiques
à propriété insecticide et/ou insectifuge ont fait l'objet
d'importants travaux, notamment ceux de Delobel et Malonga (1987), Kétoh
(1998). L'évaluation de la toxicité insecticide par contact de
l'huile essentielle issue de Xylopia aethiopica Dunal, Ocimum
gratissimum L., sur Sitophilis zeamais a montré
que les huiles essentielles de O. gratissimum et X.
aethiopica sont toxiques vis-à-vis du charançon du maïs
(Kouninki, 2005). Cette même étude indique que les formulations
à 0,5% entraînent 100% de mortalité après exposition
des individus de C. maculatus pendant 24h aux grains de
niébé imprégnés de l'huile essentielle de X.
aethiopica issue des téguments. Ces résultats
révèlent donc l'effet Knock down de l'huile essentielle mais
aucune donnée sur l'efficacité à long terme et la
rémanence des produits utilisés n'est disponible.
Le présent travail a pour but d'évaluer l'effet
insecticide des formulations à base d'huile essentielle et des fruits
secs de X. aethiopica sur C. maculatus. L'étude se
propose de tester la rémanence de l'efficacité insecticide des
formulations de fruits secs de X. aethiopica sur la survie de C.
maculatus.
L'intérêt de cette étude réside
dans la recherche de formulations pouvant augmenter la rémanence des
huiles essentielles et être utilisées localement comme
biopesticide pour la protection à long terme du niébé.
CHAPITRE II : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
2- Revue de
littérature
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