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Production cotonnière et développement rural au Burkina Faso: controverses et réalité. Cas du département de Diabo dans la province du Gourma

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par Paul Marie MOYENGA
Université de Ouagadougou - Memoire de Maà®trise de Sociologie 0000
  

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I.2.3- Le coton

Le Burkina Faso connaît la culture du coton depuis des temps immémoriaux. Cultivé avant la colonisation pour des impératifs plus sociaux qu'économiques, le coton sera promu pendant la colonisation sur injonction du colonisateur pour la satisfaction des besoins de ce dernier et après la colonisation cette fois-ci sur encouragement du gouvernement. En 2005, le Burkina Faso est devenu le premier (1er) pays producteur du coton en Afrique et le cinquième (5ème) producteur mondial derrière les USA, l'Ouzbékistan, l'Australie et le Brésil. La place que le coton occupe dans le système de production global de nombreux pays africains à l'image du Burkina Faso a suscité un certain nombre de questionnements dont les positions sont parfois inconciliables.

- Les laudateurs du coton

Pour certains auteurs et observateurs, le salut de nombreux pays du tiers monde passe par la production du coton qui leur permet de s'intégrer dans le circuit économique mondial. L'émergence du monde rural est liée à l'enracinement de cette activité. C'est du moins le point de vue développé par le sociologue de l'ORSTOM, A. SCHWARTZ (1987). Pour lui, le développement de la culture de rente, notamment cotonnière, a souvent permis une modernisation générale de l'agriculture. Elle permet l'amélioration des techniques culturales et l'adoption de nouvelles techniques, l'utilisation des intrants parfois étendue aux autres plantes cultivées et la pratique de la culture attelée. Et cela a pour corollaire une augmentation des possibilités alimentaires, la culture attelée permettant une grande exploitation de surface en un temps plus réduit. Aussi, les plantes vivrières qui

suivent le coton dans la rotation sur parcelle bénéficient-elles de l'arrière effet engrais, soutiennent J. PICARD et A. AL HADJI (2002); ainsi, il devient possible pour le paysan de cultiver une parcelle sans trop l'épuiser pendant un nombre d'années plus élevé.

Par rapport à la sécurité alimentaire, le rapport sur le développement dans le monde de la Banque Mondiale (1986) constate que les pays qui ont connu un développement rapide de leur secteur agricole d'exportation sont en même temps ceux qui ont préservé un secteur vivrier dynamique. Dans le même ordre d'idées, S. DIALLO, le Ministre burkinabé de l'agriculture, de l'hydraulique et des ressources halieutiques, soutient qu'au Burkina Faso, « les zones cotonnières sont également celles où la production céréalière est structurellement excédentaire, du fait du système de rotation des cultures, ce qui contribue à la sécurité alimentaire au niveau national » ( www.abcburkina.net). Outre ces avantages, le coton génère plus de devises qu'aucun autre produit agricole. L'économie de nombreux pays africains repose sur ce produit. Pour le cas du Burkina, soutient S. DIALLO, le coton a permis l'émergence au niveau national de deux types d'industrie : les industries textiles, de filature et de tissage et les industries agroalimentaires (SHSB, SOFIB,...). Sur le plan financier, nous renseigne le ministre S. DIALLO (ibid.), le coton contribue à la formation du PIB pour 30% et 60% aux exportations.

Au regard de ces éloges et de ces chiffres éloquents, certains préconisent la promotion de la culture cotonnière comme porte de sortie des populations africaines surtout rurales de leur pauvreté. Mais ces points de vue et ces prises de position n'épuisent pas le débat autour du coton.

-Les détracteurs du coton

S'inscrivant aux antipodes du développement esquissé plus haut, d'autres auteurs pensent que la production du coton est à l'origine de nombreux maux des sociétés africaines et que ses effets néfastes dépassent de loin la satisfaction qu'elle procure. Abordant la question dans le sens de la sécurité alimentaire, des voix soutiennent que le coton est difficilement conciliable avec la production vivrière. C'est dans cette logique que T. LLOYD (1985) mentionne deux records atteints simultanément au cours d'une même année dans cinq (05) pays sahéliens à savoir le Burkina Faso, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Tchad. En effet, en 1984, année

de sécheresse au Sahel, le Burkina Faso a réalisé une production jamais égalée de 154 millions de tonnes de coton. Au cours de la même année, il a importé plus que jamais de céréales à hauteur de 1,77 millions de tonnes (pp25-26).

Le coton serait donc spoliateur des bonnes terres reléguant les vivres aux sols infertiles.

Outre cette entrave vivrière, la production du coton impliquerait des méfaits environnementaux. Les produits chimiques nécessaires à la production du coton sont cause de désertification dans le temps et de dégradation du sol à court terme. G. BELLONCLE, repris par A. SCHWARTZ (1997) remarque que « là où passe le coton, le désert s'installe ». Cette remarque est prolongée par E. Z. SANOU (2001) qui soutient que le Nord burkinabè où il y a environ quarante (40) ans la culture cotonnière était pratiquée se singularise aujourd'hui par sa sécheresse.

Aussi, le coton accapare-t-il l'attention des chercheurs, des crédits et de l'encadrement au détriment des autres cultures vivrières.

R. DUMONT (1986) aborde la question sous l'angle de l'extension de la surface cultivable qu'impose l'enracinement croissant de la culture cotonnière. Toujours poussés à produire davantage, les paysans empiètent sur la jachère qui permettait le pâturage et la fertilisation du sol. « Le résultat est la disparition de l'humus. Privé du seul élément protecteur, la structure des sols n'a cessé de se dégrader et s'est trouvée exposée à l'érosion éolienne » (p.27).

D'autres encore s'insurgent contre le fait que c'est une production "imposée" par les autorités gouvernementales du fait des planifications en vigueur au bénéfice du coton ; et surtout le fait que ces politiques nationales obéissent en réalité à des impératifs du dehors. C'est dans cette optique que R. C. SAWADOGO (1974) pointait du doigt le fait que « la politique agricole -voire la politique économique voltaïque (...)- relève de l'économie de traite coloniale dont la fonction principale est de produire des matières premières à bon marché pour ravitailler les industries métropolitaines capitalistes dans le mépris calculé des produits alimentaires de base des autochtones » (p.46). Abondant dans le même sens, R. DUMONT (1986) « accuse la banque mondiale d'avoir, jusqu'au rapport de Berg de 1981, préféré les cultures d'exportation, "les seules qui permettent de rembourser les emprunts" au dépend des cultures vivrières » (p.257). J. M. ELA (1990) quant à lui nous informe

que « dans les régions où plane la menace de la famine, l'abandon des cultures vivrières est allé de paire avec l'extension de la culture du coton. Les dizaines de milliers de morts paysans et nomades du sahel n'ont pas péri du manque de coton et d'arachide » (p.111).

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