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Problématique environnementale de l'exploitation des sables bitumineux en Alberta (Canada)

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par Claude Bandelier
Université Libre de Bruxelles - Master en Gestion de l'Environnement et Master en Biologie 2010
  

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4.3. Impacts environnementaux globaux 4.3.1. Utilisation de gaz naturel

L'exploitation, l'extraction et la valorisation des sables bitumineux requièrent énormément d'énergie, actuellement fournie par un approvisionnement en gaz naturel important. Les projets de récupération in situ et d'exploitation minière intégrée consomment respectivement 34 mètres cubes et 20 mètres cubes de gaz naturel pour produire un baril de bitume60. Les besoins en gaz naturel du secteur sont approximativement de 25.5 millions de mètre cube par jours, soit 5% de la production du bassin sédimentaire de l'Ouest canadien. Ce qui représente environ 20% de la demande canadienne (Nikiforuk, 2009 ; Office national de l'énergie, 2009). Selon les prévisions, la consommation atteindra 60 millions de mètre cube par jour en 2015, soit près de 12 % de la production de gaz naturel, en supposant que la production de gaz se maintienne à 482 millions de mètres cubes par jour (Office national de l'énergie, 2009).

Les opérations d'extraction in situ reposent actuellement sur la production de grandes quantités de vapeur d'eau, destinées à fluidifier le bitume pour qu'il puisse être pompé à la surface, et nécessitent par conséquent un approvisionnement important en gaz naturel. Durant ces procédés, la quantité de vapeur qui doit être injectée pour récupérer une unité de volume de bitume, appelée rapport vapeur/pétrole, est le facteur critique qui détermine la consommation d'énergie et l'émissions de gaz à effet de serre associées. Ce rapport est une mesure de l'efficience des procédés de production. Une augmentation de ce rapport de 0.5 est approximativement équivalente à un volume additionnel de gaz naturel de 6 m3 par baril de bitume, responsable d'une émission additionnelle de 10 kilogrammes d'équivalent-CO2 par baril (kgCO2eq/bbl) (Charpentier et al., 2009 ; Office national de l'énergie, 2006). Bien que les compagnies tentent d'atteindre un rapport vapeur/pétrole de 2.5, la plupart des projets ont sous-estimé ce rapport et voient leur consommation de gaz naturel augmenter.

La hausse des prix de l'énergie, ces dernières années, a engendré une augmentation significative des coûts de production. Face à l'accroissement et à la volatilité des prix, les producteurs, soucieux de moins dépendre du gaz, continuent d'améliorer l'efficience énergétique des opérations et tentent d'explorer des solutions alternatives pour se procurer l'énergie et l'hydrogène nécessaires à l'exploitation (Levi, 2009).

60 En termes d'énergie, ces quantités sont équivalentes à un huitième et un quart de baril de pétrole, respectivement (Levi, 2009). Ce qui signifie qu'un baril de pétrole environ est consommé pour en produire quatre.

4.3.2. Émissions de gaz à effet de serre et objectifs de Kyoto

Le problème principal engendré par la consommation massive d'énergie fossile par l'industrie des sables bitumineux réside dans la controverse sur les émissions de gaz à effets de serre61 (GES) qui y sont associées. Le secteur des sables bitumineux et de l'industrie des énergies fossiles est le plus grand contributeur à la croissance des émissions de GES au Canada. Bien que l'intensité des émissions ait été fortement réduite par l'industrie62, cette dernière décennie, la rapidité et l'ampleur du développement ont largement annulé ces gains, en termes d'émissions.

En dépit du manque évident de transparence des compagnies pétrolières et de la difficulté de combiner les résultats de différentes études, Charpentier et al., (2009) ont regroupé et comparé les émissions de GES issus de divers types de production de pétrole ( Tableau ).

2L'analyse «well-towheel» - actuellement controversée, car la méthodologie utilisées est critiquée (Nikiforuk, 2009 ; Droitsch et al., 2010) - montre une différence faible entre les émissions de GES en fonction du moyen de production (exploitation minière et valorisation, extraction in situ et valorisation, in situ seulement, pétrole conventionnel). Ceci s'explique dans une premier temps, par la part considérable des émissions de GES due à l'utilisation des véhicules (combustion du carburant final), qui compte pour 60%-80% du total «well-to-wheel », et tend à diluer les différences entre les émissions dégagées au début du processus, et d'autre part, par le recours de plus en plus fréquent à la Récupération Assistée du Pétrole (RAP)63 qui entraîne une augmentation des émissions dans la production dite conventionnelle (Government of Canada, 2008b). Néanmoins, les émissions de GES à la production varient grandement selon l'origine du pétrole. La production issue des sables bitumineux (exploitation minière et valorisation, extraction in situ et valorisation) génère approximativement deux à trois fois plus de GES que la production conventionnelle (Charpentier et al., 2009 ; Government of Canada, 2008b ; Nikiforuk, 2009 ; Woynillowicz et al., 2005).

 

Production
(kgCO2eq/bbl)

"well-to-wheel"
(gCO2eq/km)

Mining and Upgrading (PSB)

62 - 164

260 - 320

in situ and Upgrading (PSB)

99 - 176

320 - 350

in situ (Bitumen)

n.d

270 - 340

Conventional oil production (Crude Oil)

27 - 58

250 - 280

Tableau 2. Emissions de GES exprimées en équivalent-CO2 pour la production et l'utilisation de produits pétroliers en Alberta. Source : auteur, d'après Charpentier et al., 2009.

Le Canada est un des 38 pays industrialisés (pays de l'Annexe I) engagés par le Protocole de Kyoto à des objectifs individuels, légalement contraignants, de réduction ou de limitation de ses émissions de gaz à effet de serre. Les objectifs pour le Canada constituent une réduction totale d'émissions de GES, pour 2012, de 6% par rapport au niveau de 1990. Ainsi, pour respecter ses

61 Les gaz à effet de serre qui font l'objet d'une estimation dans l'inventaire national sont le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4), l'oxyde nitreux (N2O), l'hexafluorure de soufre (SF6), les perfluorocarbures (PFC) et les hydrofluorocarbures (HFC).

62 Suncor (2007) affirme avoir réduit de 57% l'intensité des émissions, entre 1990 et 2006.

63 RAP est un terme utilisé pour définir les techniques (injection de vapeur, de gaz ou de produits chimiques) développées pour augmenter la part extractible d'un gisement donné.

engagements, les émissions totales en 2012 devraient se situer en dessous de 563 mégatonnes (Mt)64.

Les émissions globales de GES, au Canada, ont augmenté de 24%, de 1990 à 2008, ce qui porte les émissions globales à 734 Mt65, soit un dépassement de 30.4% par rapport aux engagements juridiques qu'a pris le Canada dans le cadre du protocole de Kyoto. L'industrie des énergies fossiles est responsable de 30% de cette augmentation et a augmenté ses émission, pour la même période, de 57% (Environment Canada, 2009 ; Government of Canada, 2008b). En 2004, 3% des émissions du Canada étaient issues du secteur des sables bitumineux. Actuellement, ce secteur représente 5% des émissions totales66 (37.2 Mt), et combiné à la production de gaz et de pétrole conventionnel, propulse l'Alberta à la tête des provinces canadiennes avec plus de 30% des émissions totales nationales de GES.

Il est maintenant évident que le Canada ne respectera pas ses engagements pris dans le cadre du Protocole de Kyoto. Et ceci, même en imaginant faire appel aux différents mécanismes de flexibilité prévus par le protocole (Footitt, 2007). Parmi les Etats s'étant engagés à réduire leurs émissions de GES, le Canada se positionne en troisième position des pays ayant les plus mauvais résultats par rapport aux engagements. Entre 1990 et 2004, le Canada est devenu le huitième plus grand émetteur de GES et a dépassé les Etats-Unis, qui affichent un meilleur bilan, en termes de croissance des émissions (Nikiforuk, 2009). Avec environ 0.5% de la population mondiale et approximativement 2% des émissions mondiales, le Canada s'est positionné parmi les plus grands émetteurs de GES per capita.

Après avoir rendu public le bilan des émissions, le gouvernement conservateur de Stephen Harper a été fortement critiqué, d'abord pour avoir mené une politique qui accorde une importance démesurée à l'industrie pétrolière et encourage le développement des sables bitumineux, et ensuite pour avoir remplacé le plan de réduction des GES, que les libéraux du gouvernement Paul Martin avaient mis en place, par des mesures incitatives légères (Francoeur, 2009). Pour justifier l'échec du contrôle des émissions, le Premier ministre Harper s'est défendu en déclarant qu'il était difficile de faire des progrès au Canada en l'absence d'un partenaire américain conciliant. Or ces derniers proposent un plan de relance qui contient bien plus de mesures destinées à encourager les investissements dans le développement d'énergies propres que le budget de Harper présenté fin janvier 2009 (Simpson, 2009).

Bien que les sables bitumineux ne puissent être tenu seuls pour responsable de la croissance des émissions canadiennes, il est évident que le développement de leur exploitation y a joué un rôle important. Les sables bitumineux sont responsables de 98% de la croissance de la production de pétrole entre 1990 et 2004 (Government of Canada, 2008b).

Avec la croissance de l'industrie bitumineuse, les projections prévoient que les émissions de GES issues du secteur atteindront 108 Mt, en 2020, soit un triplement des émissions par rapport à 2008 (Droitsch et al., 2010) ( Figure ).

17Les projections sont généralement basées sur la croissance des sables bitumineux et les intensités des émissions prévues. Si l'intensité des émissions a significativement été réduite par l'industrie (les opérations des sables bitumineux utilisaient du

64 cf. United Nations Framework Convention on Climate Change, http://unfccc.int/2860.php

65 Depuis 2004, la tendance à la croissance semble s'être atténuée et les émissions de GES du Canada, en 2008, ont subi une légère baisse par rapport au niveau de 2007. Cette baisse s'explique en partie par le ralentissement de la croissance économique qui a débuté en 2008.

66 cf. Canada's Oil Sands, http://www.canadasoilsands.ca/en/issues/greenhouse gas emissions.aspx, consulté le 5 juillet 2010.

charbon et du coke comme source d'énergie, alors que le gaz naturel est actuellement le carburant utilisé), il n'est pas prévu, à court et moyen terme, de réductions supplémentaires importantes. Elles n'ont d'ailleurs diminué que de 3%, entre 2004 et 2008 (Droitsch et al., 2010).

Figure 17. Emissions de GHG et prévisions des émissions jusqu'en 2020. Source : Droitsch et al., 2010.

Bien que la croissance du développement de l'exploitation des sables bitumineux concerne tant les opérations minières que l'exploitation in situ, il est attendu que cette dernière prédomine, en terme de production, à partir de 2017. Les résultats de diverses études au sujet des émissions de GES ont par ailleurs montré de manière consistante que la production in situ (91 kgCO2eq/bbl, sans valorisation) est responsable d'émissions de gaz à effet de serre plus importantes que la production minière (36 kgCO2eq/bbl, sans valorisation)67.

Le gouvernement du Canada, s'est tout de même engagé, pour 2020, à réduire les émissions de GES de 17% par rapport au niveau de 2005. Cet engagement a été inscrit dans l'Accord de Copenhague, avec l'avertissement que l'objectif sera aligné avec les objectifs des Etats-Unis et pourrait subir des ajustements.68 En outre, l'objectif visé n'est fixé dans aucune législation canadienne, et jusqu'à présent, le gouvernement fédéral n'a encore publié aucun plan pour y parvenir (Droitsch et al., 2010).

Le captage et stockage du carbone (CSC) que proposent certains experts, pourrait représenter un moyen de réduire les émissions futurs. Cependant, il est improbable que, dans les années à venir, cette technologie soit développée à un niveau suffisant pour exercer un effet sur les émissions comprises dans la seconde échéance prévue par le Protocole de Kyoto. Le CSC est une technologie relativement récente et beaucoup d'incertitudes demeurent quant aux coûts opérationnels et aux résultats escomptés (Footitt, 2007).

Si les émissions de gaz à effet de serre projetées par Environment Canada, selon le scénario business-as-usual, se confirment, elles atteindront, en 2020, un niveau supérieur par rapport à 2005 de 28%, l'expansion des sables bitumineux comptant pour presque la moitié de l'augmentation (Droitsch et al., 2010).

67 Il est estimé que les émissions de GES dégagés pendant les procédés de valorisation se situent entre 52 et 79 kgCO2eq par baril de bitume (Huot and Dyer, 2010).

68 cf. Government of Canada - Canada's Action on Climate Change, http://www.climatechange.gc.ca/default.asp?lang=En&n=72F16A84-1

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard