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La complémentarité de la justice pénale internationale à  la justice nationale des états dans le cas de la cour pénale internationale

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par Emery NUKURI
Université du Burundi - Licence en Droit 2010
  

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CHAP I : LA COUR PENALE INTERNATIONALE, PREMIERE JURIDICTION INTERNATIONALE PENALE PERMANENTE.

Sur le plan international, la lutte contre l'impunité se fait par des juridictions pénales spéciales (TMI, TPI) qui sont :

« Des instances crées par les Etats agissant collectivement et ayant un pouvoir de juger les présumés auteurs des crimes relevant de leur compétence dans leurs statuts respectifs »12(*) et par la CPI.

La CPI est unique en son genre. Aucune des juridictions pénales internationales qui ont préexisté ou qui existent ne cumule ses deux caractéristiques : elle est à la fois universelle et permanente.

Des tribunaux militaires internationaux ad hoc 13(*)(TMI) en passant par les tribunaux pénaux internationaux ad hoc14(*) (TPI), on a abouti, avec la CPI, à une juridiction pénale internationale permanente. Dans ce chapitre, nous aborderons les origines de la CPI, son rôle, son domaine de compétence ainsi que la signification du principe de complémentarité qui gouverne son fonctionnement.

Section 1. Les origines de la CPI.

La CPI est l'aboutissement d'une longue évolution dont les origines se situent bien avant les TMI de la fin de la seconde guerre mondiale. Partie d'une initiative individuelle, l'idée de mettre en place une juridiction pénale internationale permanente va se transposer progressivement au niveau étatique. L'élaboration du Statut de Rome de la CPI peut être présentée en deux étapes marquées par de multiples interruptions.

§1. Aspects historiques.

L'idée de mettre sur pied une juridiction pénale internationale permanente pour traduire en justice les individus, y compris les dirigeants de premier plan présumés responsables des crimes internationaux, remonte à la fin de la première Guerre mondiale.

D'aucuns font remonter les premières formes de répression institutionnalisée au 15ème siècle quand la France, l'Autriche, les Cantons Suisses et les Villes du Haut Rhin ont mis en accusation Pierre HANGENBACH, bailli de haute Alsace et de Brisgau, pour avoir pillé et massacré les habitants de Bresachi dont il avait été gouverneur. Accusé d'avoir commis les « crimes du droit naturel » et d'avoir foulé au pied « les lois humaines et divines », il a été condamné à mort15(*).

En 1815, Joseph de MAISTRE, écrivain et philosophe, écrivait au Comte de Front pour ce qui est du jugement de Napoléon :

« L'idée, mise en avant surtout en Angleterre de le faire juger par les députés de tous les souverains de l'Europe, a quelque chose de séduisant. Ce serait le plus grand et le plus important des jugements qu'on n'eut jamais vus dans le monde, on pourrait y développer les plus beaux principes du droit des gens (...). Ce serait un grand monument de l'histoire »16(*).

L'autre précurseur de l'idée de création d'une cour criminelle internationale fut Gustave MOYNIER17(*). Ce dernier émit en 1872 l'idée de mettre sur pied un tribunal de cinq membres (dont un représentant par belligérant et trois désignés par les pays neutres), afin de punir les atrocités commises lors du conflit Franco-prussien18(*). L'initiative échoua et ne connut pas de succès lorsqu'elle fut renouvelée deux décennies plus tard, en 1895, lors de la session de l'Institut du Droit International en Angleterre.

Cette première série d'échecs ne freina pas pour autant l'action qui avait été lancée. Ainsi, l'initiative fut de nouveau remise en marche pour aboutir à la Convention de La Haye de 190719(*). Avec pourtant une compétence limitée à la capture internationale de navires (piraterie), le tribunal international prévu dans cette convention ne vit jamais le jour malgré la bonne volonté de quelques puissances20(*).

Le traité de Versailles qui mit fin à la première Guerre mondiale prévoyait en son article 227, la création d'un tribunal composé de cinq juges représentant les puissances alliées (les Etats-Unis, le Royaume Uni, la France, l'Italie et le Japon) pour juger l'ancien Kaiser d'Allemagne GUILLAUME II, le mettant en accusation pour la « supreme offence against international morality and the sanity of treaties »21(*). Mais une fois encore, le tribunal ne vit jamais le jour, les Pays-Bas ayant refusé d'extrader l'accusé, invoquant que l'infraction qui lui était reproché ne figurait pas dans la loi néerlandaise et qu'il s'agissait d'une infraction politique22(*).

Avec l'avènement de la SDN, il fut décidé la création d'une Cour Permanente de Justice internationale (CPJI). Le Baron DESCHAMPS, alors président de la Commission chargée de réfléchir sur les statuts de cette cour, émit une idée originale : celle d'annexer à la CPJI une haute cour de justice internationale qui statuerait sur les crimes contre le droit des gens. Cependant, bien que soutenue par l'ensemble de la commission, cette idée fut jugée prématurée par l'ensemble des Etats qui ne donna pas suite à l'initiative23(*).

C'est durant la seconde guerre mondiale que les alliés reprirent l'idée de créer un tribunal pénal international. Ainsi, furent créés les TMI de Nuremberg et de Tokyo respectivement par l'Accord de Londres du 8 août 1945 et par la Proclamation spéciale du commandant en chef des puissances alliées, faite à Tokyo le 19 janvier 1946. Ces tribunaux ont existé, fonctionné et rendu des jugements qui ont été exécutés. Ces tribunaux avaient pour mission de juger les criminels de guerre allemands et japonais. Le TMI de Nuremberg a prononcé trois acquittements et dix neuf condamnations dont douze à la peine de mort, trois à la prison à vie et quatre à la prison à temps. Le TMI de Tokyo a, quant à lui, prononcé sept condamnations à mort, seize à la prison à vie et deux à la prison à temps. Notons que sur vingt cinq accusés, il n'y a pas eu d'acquittements24(*). Bien qu'ils soient considérés comme « une justice des vainqueurs pour juger et punir les vaincus »25(*), ces tribunaux ont été la première manifestation concrète de la justice pénale internationale. Et si les TMI restent un phénomène historique circonscrit, le droit qui y a été énoncé et appliqué, les principes y développés demeurent. C'est là l'intérêt juridique de l'événement26(*).

Quelques années après ces procès historiques, la communauté internationale, plus homogène avec la naissance de l'ONU, signa à New York le 9 décembre 1948 la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide27(*). La particularité de ce texte est qu'il prévoit en son article VI, la création d'une cour criminelle internationale28(*), compétente pour connaître les crimes commis en violation de ses dispositions. Cette Cour ne fut pas mise en place une fois de plus puisque les Etats voulaient garder jalousement leur souveraineté judiciaire et ne voulaient pas la compétence d'un tel tribunal qu'après y avoir consenti au cas par cas29(*). Cette convention donna une grande impulsion pour des réflexions internationales.

§2. Evolution dans le cadre de l'ONU.

En prenant pour repère les travaux réalisés dans le cadre de l'ONU, il a fallu cinquante ans pour aboutir à l'adoption du Statut de la CPI, dont l'article VI de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide envisageait la création.

Dans sa résolution 49/53 du 9 décembre 1949, l'Assemblée générale de l'ONU invita la Commission du Droit International à « examiner s'il est souhaitable et possible de créer un organe judiciaire international chargé de juger les personnes accusées de génocide »30(*) .

Les conclusions de la CDI étant qu'il était souhaitable et possible de le faire, l'Assemblée générale institua un comité chargé de l'élaboration des propositions. Deux projets, virent le jour l'un en 1950, l'autre en 1953, mais « ses travaux connurent une léthargie, due au contexte de la guerre froide et aux divergences d'idéologies qui empêchaient tout débat constructif »31(*) .

Le silence dura jusqu'à la session annuelle de l'Assemblée générale de l'ONU en 1989 au cours de laquelle, Trinidad et Tobago, motivé par le souci de lutter contre le trafic de drogue, proposa de reprendre les réflexions sur la création d'une Cour pénale permanente32(*).

Le véritable tournant interviendra, quelques années plus tard, avec la création, par le conseil de sécurité de l'ONU, des TPI pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda sur base du chapitre VII de la Charte des Nations Unies. L'étendue et la gravité des conflits qui ont déchiré l'ex- Yougoslavie ont amené le Conseil de sécurité à créer un tribunal pénal international chargé de juger les personnes présumées responsables des violations graves du droit international humanitaire commises sur ce territoire depuis 1991, par sa résolution 808 33(*) et dont le statut est annexé à la résolution 827 adopté le 27 mai 199334(*). Une année plus tard, suite au conflit rwandais et aux violations massives des droits de l'homme occasionnées par le génocide, le Conseil de Sécurité crée un deuxième tribunal ad hoc (TPIR) par la résolution 955 dont le statut est calqué pour l'essentiel sur celui du TPIY.

Ainsi et à l'instar des sursauts précédents, ce sont les conflits de grande ampleur qui ont motivé la résurgence de l'idée de mettre en place les TPI ad hoc. Pour la première fois depuis Nuremberg et Tokyo, la répression pénale internationale des crimes considérés comme des offenses à l'humanité toute entière devenait réalité35(*).

Les événements atroces de l'ex-Yougoslavie et du Rwanda, ajoutées à la controverse occasionnée par la création des TPI36(*) ont réussi à convaincre un bon nombre d'Etats que la création d'une cour pénale internationale permanente, par le biais d'une convention multilatérale était la meilleure option. Mais quelques soient les critiques émises à leur égard, les TPI constituent un pas important, un bon exemple du caractère évolutif du droit international pénal. Ils ont servi de laboratoire à la CPI37(*).

La CDI fut en mesure de présenter un projet de statut à l'Assemblée générale des Nations Unies en 1994. Ce projet fut examiné par un comité ad hoc établi en 1995 et dont le rapport fut encore soumis à un comité préparatoire qui a élaboré le document de base des négociations de la conférence diplomatique de Rome. Cette dernière s'est tenue du 15 juin au 17 juillet 1998 et avait pour mission de mettre au point la version finale du Statut de la CPI et surtout d'obtenir son adoption par les Etats. Le Statut de Rome de la CPI a été adopté le 17 juillet 1998 et est entré en vigueur le 1er juillet 2002.

Notons enfin que le Statut de Rome est considéré comme le texte où les principes du droit international pénal ont été codifiés38(*). « D'une manière globale, estime PEJIC, la CPI a rendu possible l'établissement de trois autres corps : le Tribunal Spécial pour la Sierra Léone, pour le Cambodge ainsi que pour le Timor Oriental39(*). »

* 12 A.M. LA ROSA, Dictionnaire de droit international pénal, 1ère édition, Paris, Dalloz, 1998, p.57.

* 13 Ce furent les tribunaux militaires internationaux (celui de Nuremberg issu de l'Accord de Londres du 8.8.1945 et celui de Tokyo créé par la Proclamation spéciale du Comandant en chef des puissances alliés faite à Tokyo le 19 janvier 1946) installés par les forces alliées vainqueurs de la seconde guerre mondiale pour juger les criminels de guerre allemands et japonais.

* 14 Il s'agit des tribunaux pénaux internationaux créés par le Conseil de Sécurité des Nations Unies agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte. Le TPI pour l'ex-Yougoslavie a été créé par le Résolution 808 du 22 février 1993 et TPI pour le Rwanda par la Résolution 955 du 8 novembre 1994.

* 15A.M. LA ROSA, op.cit., p.57.

* 16 Idem, p.58.

* 17 Gustave MOYNIER (1826-1910) est un juriste et humaniste suisse, il est un des membres fondateurs du CICR en 1863.

* 18 Ce conflit opposa la France aux Lands d'Allemagne. Débuté en juillet 1870, il a pris fin avec le Traité de Francfort du 10 mai 1871, sur une cuisante défaite de la France.

* 19 Il s'agit de la Convention XII relative à l'établissement d'une Cour des prises, signées à La Haye le 18 octobre 1907.

* 20 D.D., YIRSOB, Le rôle et la Place des Etats dans le fonctionnement de la Cour pénale internationale, Genève, Université de Genève, Faculté de Droit, mars 2006, s.p. disponible sur le site http ://www.mémoireonline.com/ ( visité le 30.6.2008).

* 21 E. CREPPI, The evolution of individual criminal responsibility under international Law, in R.I.C.R, vol. 81, N° 835, septembre 1995, p.58.

* 22 A.M. LA ROSA, op. cit., p.58.

* 23 D.D. YIRSOB, op .cit., s.p. 

* 24 C. LOMBROIS, Droit pénal international, 2è édition, Paris, Dalloz, 1979, p.141.

* 25 Y. PETIT, Le droit du maintien de la paix, Paris, L.G.D.J., Paris, 2000, p.197.

* 26 E. DAVID, Principes du droit des conflits armés, 2e édition, Bruxelles, Bruylant, 1999, p.572.

* 27 La Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide a été approuvée et soumise à la ratification ou à l'adhésion par l'assemblée générale dans sa résolution 260 A(III) du 9 décembre et entrée en vigueur le 12 janvier 1951, conformément aux dispositions de l'article XIII de la convention.

* 28 Cet article dispose en effet que : « Les personnes accusées (...) sont traduites devant les tribunaux compétents de l'Etat sur le territoire duquel l'acte a été commis, ou devant la cour criminel internationale qui sera compétente à l'égard de celles des parties contractantes qui en auront reconnu la juridiction » Cf. la Résolution 260 A (III) de l'Assemblée générale des Nations Unies en ligne : http://daccassdds.un.org/doc RESOLUTION/GEN/GEN/NROO 4431.pdf ? Open Elément. (Visité le 30 juin 2008).

* 29 La réserve des Etats Unis à propos de l'article VI de cette convention en est la parfaite illustration: « En ce qui concerne la mention d'une cour criminelle internationale à l'article VI de la convention, les Etats Unis d'Amérique déclarent qu'ils se réservent le droit de ne pas participer à un tel tribunal qu'en vertu d'un traité conclu expressément à cette fin avec l'avis et le consentement du Sénat». Pour de plus ample détails à propos des réserves des Etats voir: Traités multilatéraux déposés auprès du Secrétaire général, Etat au 31décembre2005, vol I, partie I, chap. I à X, New York, Nations Unies, p.27.

* 30 J.P. BAZELAIRE et T., CRETIN, La justice pénale internationale, Paris, P.U.F., 2000, p.62.

* 31 D.D. YIRSOB, op.cit. s.p.

* 32 Cf. O. SOLERA, « Complementary jurisdiction and international criminal justice », in R.I.C.R, N°845, Genève, CICR, 2002, p.145.

* 33 S/RES/ 808 du 22 février 1993

* 34 S/RES/ 827du 27 mai 1993

* 35 D.D. YIRSOB, op. cit., s.p.

* 36 Des avis controverses ont été émis dès la création du TPIY sur la question de la légitimité de ces tribunaux au vu de leur mode de création. Ces tribunaux ont été considérés comme illégaux parce qu'ils ne respectaient pas le principe selon lequel un tribunal doit être établi par une loi. Par ailleurs, selon certains auteurs, le Conseil de Sécurité aurait outrepassé ses pouvoirs au regard du Chapitre VII (article 41) en créant un organe judicaire Ainsi, E., DAVID, (« Le TPIY » in R.B.D.I, 1992-2, Bruxelles, Bruyant, 1992, pp.567-569 défendait l'idée de la légalité et de la légitimité du TPIY, tandis que A., ANDRIES, in « Les aléas juridiques de la création du tribunal international pour les crimes de guerre commis depuis 1991 sur le territoire de l'ex-Yougoslavie » in Journal des procès, Bruxelles, No 239, 14mai 1993, pp.17 et ss s'y opposait.

* 37 E.DAVID, op.cit., p.775.

* 38 E. CREPPI, op.cit., p.544.

* 39 J. PEJIC, «Accountability of international crimes: From conjecture to reality», in R.I.C.R, vol.184, p.33.

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