WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La mobilisation de la démarche judiciaire dans le processus de justice transitionnelle en sociétés post-conflit: le cas du Rwanda

( Télécharger le fichier original )
par Claudette Chancelle Marie-Paule BILAMPASSI MOUTSATSI
Université protestante d'Afrique Centrale - Master II en paix et développement 2012
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

B. Le Tribunal Pénal International pour le Rwanda et la justice rétributive

Dans le cadre de la justice transitionnelle, la justice internationale fait partie de la justice rétributive qui se focalise sur les poursuites judiciaires visant à rendre justice aux victimes et à les aider à reconstruire leur vie. Ici, intervient le deuxième pilier de la justice transitionnelle notamment le droit à la justice et plus précisément la compétence subsidiaire des tribunaux pénaux internationaux. Le TPIR établit les responsabilités individuelles. Cet aspect est essentiel pour éradiquer la perception dangereuse selon laquelle une communauté tout entière (« les Hutus » ou « les Tutsis », par exemple) est responsable de la violence et des atrocités. L'idée de culpabilité collective est souvent à l'origine de stéréotypes négatifs, qui provoquent ensuite un regain de violence. Les poursuites judiciaires au sein du TPIR sont considérées comme le moyen de persuasion le plus efficace contre les futures violations des droits humains. Les actions pénales à l'encontre des auteurs de crimes de guerre, de génocide et de crimes contre l'humanité sont rendues obligatoires par le droit international.

L'institution la plus importante de la justice rétributive au Rwanda reste sans conteste le TPIR, qui introduit un facteur explosif dans un système international fondé sur les Etats. En poursuivant le crime contre l'humanité, elle donne à cette dernière une signification tangible qui transcende les nations. En clair, l'action du tribunal, voire sa raison d'être, dépasse la dimension strictement judiciaire de la poursuite des auteurs du génocide. Les objectifs édictés par la résolution 955 du Conseil de sécurité de l'ONU, réconciliation nationale, maintien de la paix, lutte contre l'impunité et appui aux tribunaux et l'appareil judiciaire rwandais

176 Le génocide commis en 1994 est appelé `génocide perpétré contre les Tutsi' parce que le groupe cible était individualisé et identifié comme un groupe ethnique et sa destruction fut massive. De plus, les criminels se percevaient et s'identifiaient comme Hutu et ciblaient leurs victimes en raison de leur appartenance au groupe présenté et perçu comme étant Tutsi. Cette qualification n'exclut toutefois pas la bravoure de certains hutu tués ; des hutu modérés.

177 Ce fut sans doute l'une des raisons qui poussèrent le Rwanda, alors membre du Conseil de Sécurité, à s'abstenir de voter en faveur de la Résolution créa le TPIR qu'il avait lui-même ardemment réclamé.

La mobilisation de la démarche judiciaire dans le processus de justice transitionnelle en sociétés post-conflit : le cas du Rwanda.

démontrent une volonté internationale d'apporter une réponse pénale et symbolique forte à ce génocide. Par Ailleurs, c'est aussi au TPIR que le viol a été reconnu comme véritable arme de guerre ; en donnant une définition du viol comme crime contre l'humanité et crime de génocide. Le TPIR a jugé que le discours raciste à l'encontre des femmes tutsi constituait une incitation criminelle : dans une certaine mesure, cette idéologie sous-jacente a rendu les femmes tutsies « disponibles » au viol. En conséquence, le tribunal a tenu pour responsable les personnes impliquées dans la propagation d'un tel discours. Dans « l'affaire Akayezu », par exemple, premier jugement sur le génocide, la Chambre établit une définition qui exclut l'alibi du consentement et qui fait entrer le viol dans les actes constitutifs même du génocide perpétré contre les Tutsi :

Une invasion physique de nature sexuelle commise sur la personne d'autrui sous l'empire de la contrainte. L'agression sexuelle, dont le viol est une manifestation, est considérée comme tout acte de nature sexuelle, commis sur la personne sous l'empire de la contrainte. Cet acte doit être commis : a) dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique ; b) sur une population civile ; c) pour certains motifs discriminatoires, notamment en raison de l'appartenance nationale, ethnique, raciale ou religieuse de la victime178.

S'agissant du viol constitutif de génocide, dans la même « affaire Akayezu », la Chambre a fixé, à la lumière du génocide perpétré contre les Tutsi, pour de bon des limites infranchissables. Les viols et violences sexuelles sont constitutifs de génocide, au même titre que d'autres actes, s'ils ont été commis dans l'intention spécifique de détruire, en tout ou en partie, un groupe spécifique, ciblé en tant que tel :

En effet, les viols et violences sexuelles constituent certainement des atteintes graves à l'intégrité physique et mentale des victimes et sont même, selon la Chambre, l'un des pires moyens d'atteinte à l'intégrité de la victime, puisque cette dernière est doublement attaquée : dans son intégrité physique et dans son intégrité mentale. Au vu de l'ensemble des éléments de preuve qui lui ont été présentés, la Chambre a constaté que les actes de viols et de violences sexuelles décrits ci-dessus étaient exclusivement dirigés contre les femmes tutsies, qui ont été très nombreuses à être soumises publiquement aux pires humiliations, mutilées et violées. La finalité de ces viols était très clairement d'anéantir non seulement les victimes directes, mais également de porter atteinte aux proches des victimes, leurs familles et leur communauté, en les soumettant à une telle humiliation. Ainsi donc, pardelà les femmes victimes, c'est tout le groupe Tutsi qui faisait l'objet de ces crimes. En ce sens, il apparaît clairement à la Chambre que les viols et violences sexuelles correspondraient, au même titre que d'autres atteintes

178 Voir Tribunal Pénal International pour le Rwanda, résumé du jugement d'Akayezu.

La mobilisation de la démarche judiciaire dans le processus de justice transitionnelle en sociétés post-conflit : le cas du Rwanda.

graves à l'intégrité physique et mentale commises à l'encontre de Tutsi, à la volonté de faire souffrir et mutiler les Tutsi avant même de les tuer, dans le dessein de détruire le groupe Tutsi tout en faisant terriblement179.

De même, depuis fin 2000, le Tribunal avait lancé le démarrage de nouveaux procès, l'annonce des poursuites entamées contre des éléments de l'Armée patriotique rwandaise (APR) bien que celles-ci sont restées presque sans suite. Le TPIR a également permis par ailleurs que soient traduits en justice des individus qui y aurait échappé si la juridiction internationale n'avait pas existé. En cela, le TPIR a rempli l'une des tâches de la justice transitionnelle notamment le droit à la justice. Dans ce qui suit, sans prétendre à l'exhaustivité, nous évoquerons quelques procès phares.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote