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La libéralisation des prix au Cameroun

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par Pierre Désiré EFFA MESSI
Université de Yaoundé II -  Diplôme d'Etudes Approfondies de droit public  2008
  

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B- LA JUSTICE DES PRIX

La justice des prix renvoie à l'ensemble des institutions tant judiciaires que non judiciaires chargées de trancher les litiges relatifs aux prix. Elle procède d'une juridictionnalisation du prix et pose le problème de l'identification du juge des prix puisque ce dernier partage cette fonction avec de nombreuses structures à vocation juridictionnelle.

1- Le juge des prix

L'identification du juge des prix permet de mieux délimiter ses pouvoirs.

249 Article2 du décret N° 2001/380 du 27 Novembre 2001 portant changement de nomination et réorganisation de la chambre de commerce d'industrie et des mines du Cameroun.

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a- Identification du juge des prix

La notion de juge de prix est un emprunt aux notions similaires telles que celles de juge de l'impôt, de juge du contrat ou encore de juge de la concurrence. Elle désigne ici, toute catégorie de juge incidemment ou directement compétent en matière de prix. L'intervention du juge pour connaître les litiges en matière des prix est consacrée depuis 1972250. Suivant les ordres de juridiction, le juge peut être judiciaire ou administratif, le juge de droit commun des prix est le juge judiciaire conformément à l'article 41 de la loi N°90/031 régissant de l'activité commerciale au Cameroun en tant que composante de la justice commerciale à tous les degrés251. Il peut être saisi pour plusieurs causes252. Le juge des prix peut également être le juge administratif à l'occasion notamment du contentieux de la concurrence ou des voies de fait administratives. Le juge administratif est donc compétent en matière de prix de façon incidente.

En dehors de ces aspects internes, le juge des prix peut également être international, communautaire tel le juge de la cour commune de justice et d'arbitrage de la CEMAC, le juge dans le cadre de l'organe de règlement de différends (ORD) ; dans le cadre du centre international de règlement des différends liés à l'investissement (CIRDI).

Le juge des prix peut également épouser la forme d'un arbitre. L'arbitrage est un mode alternatif de règlement des différends consacré en matière commerciale au Cameroun tant pour ce qui est du plan international que du plan interne253.

Il importe de souligner que l'évolution contemporaine du monde des affaires soumis à de nombreuses mutations juridiques et économiques, révèle l'incapacité des juges actuels à s'adapter à la vitesse des exigences de la mondialisation des échanges. La non appréhension de la complexité du droit OHADA, est fortement révélatrice de cette incapacité du juge. D'où une nécessaire spécialisation du juge des affaires, qui sera à même de résoudre les problèmes relatifs à des domaines aussi techniques que les prix254. La création de tribunaux de

250 Article 12 et 14 de l'ordonnance N°72/018 portant régime général des prix.

251 Lire « la justice commerciale » In NYAMA (JM), éléments du droit des affaires OHADA Cameroun Op. Cit. PP. 36 à 39

252 Actions civiles en réparation du dommage causé par l'une des infractions à la loi commerciale. Défaut ou refus du paiement du prix, défaut ou refus de paiement d'amende suite à un procès verbal en bonne et due forme de l'administration, réception de la prestation de serment des agents assermentés compétents en matière de prix, défaut de publicité des prix, etc...

253 Articles 11 et 12 de la charte des investissements

254 Il devient tout à fait pratiquement impossible, ou du moins peut efficace que le même juge connaissant des matières pénales, criminelles et même administratives se retrouve à trancher des affaires emprunt de technicité et complexité telle qu'en matière des prix.

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commerce, distincts du Tribunal de Grande Instance (TGI) et du Tribunal de Première Instance (TPI), au premier degré tout au moins, semble s'imposer comme un impératif de la gouvernance économique. A défaut, les efforts de formation, de diffusion et de recyclage en matière de droit Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires. Toutes choses qui rendraient davantage efficaces les pouvoirs du juge des prix.

b- Les pouvoirs du juge des prix

Comme tout juge, le juge des prix détient principalement un pouvoir disciplinaire et un pouvoir normateur. Le pouvoir normateur du juge se dégage de son activité de création à travers ses décisions dans les matières non réglementées par le législateur. Son pouvoir disciplinaire se résume en sa capacité à prononcer des sanctions suivant le cas. Le titre 5 de l'ordonnance N°72/018 prévoit à cet effet des sanctions judiciaires. Le juge des prix peut donc appliquer des sanctions pénales, civiles, privatives de liberté, pécuniaires, principales ou accessoires prévues par la législation en vigueur255. La loi régissant l'activité commerciale au Cameroun en ses articles 38 a réglementé les sanctions du juge en matière d'infraction sur les prix. Il faudrait relever qu'en matière de prix, les pouvoirs des juges sont limités. En premier lieu, le juge ne peut s'auto-saisir malgré l'abondance du contentieux des prix. En second lieu, l'action du juge reste dépendante soit de l'aboutissement heureux de la transaction entre le justiciable et l'administration des prix, soit simplement du paiement de l'amende contestée. Cet état des choses subordonne le juge à la volonté de l'administration ou du contrevenant. Mais ce qui limite davantage le pouvoir du juge des prix, c'est l'action concurrente d'autres institutions ayant vocation juridictionnelle en matière de prix.

2- Les institutions à vocation juridictionnelle en matière de prix

Il s'agit de toute institution ayant un rôle dans la réalisation de la justice sur les prix. Nombre d'institutions en effet interviennent dans ce cadre. Elles s'imposent comme auxiliaire du juge ou à défaut d'en être des concurrents. Ceci permet de distinguer les institutions pré-juridictionnelles et les institutions quasi-juridictionnelles.

255 Une panoplie d'articles d'origine diverse fonde en effet le pouvoir des sanctions du juge. Le code pénal prévoit l'application suivant les cas, des articles154,155,156,157,216, 252, 256,257,258et 326 en tant que peine principale et les articles 30,34,35,36,37,39, 40 comme peine accessoire.

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Les institutions pré-juridictionnelles

Il s'agit d'institutions appelées à agir avant que le juge n'intervienne ou afin qu'il rende une décision juste. Sous ce dernier aspect, peuvent être évoqués les Officiers de Police Judiciaires (OPJ) en tant qu'auxiliaire du juge. Ils peuvent en effet participer à la constatation des infractions relatives au prix256 sous réserve de l'exigence d'aviser immédiatement l'agent assermenté du service de commerce, des prix ou de la concurrence.

Certains organismes doivent en effet se prononcer avant toute saisine du juge. Il en est ainsi dans la plupart des cas du Comité antidumping et des subventions, et de la commission nationale de la concurrence. Cette institution joue un rôle d'expertise judiciaire en termes d'assistance du juge à la prise des décisions en matière de concurrence conformément à l'article 2, alinéa 3 du décret fixant sa composition et ses modalités de paiement qui reprend lui-même l'article 28 de la loi relative à la concurrence. Il faudrait d'ailleurs noter que pour certaines infractions, la plainte de l'autorité de tutelle doit obligatoirement requérir l'avis de ladite commission conformément à l'article 18 de la loi régissant l'activité commerciale au Cameroun. La CNC peut donc, par l'absence de son avis empêcher la saisine du juge ou la rendre irrégulière mais également, conditionner la décision du juge par son expertise257. Dans le même sillage, il faudrait se souvenir du rôle de la CNPH au sein duquel sont réglés tous les conflits relatifs aux produits pétroliers avant tout recours devant les tribunaux. Ces institutions pré-juridictionnelles, non exhaustivement énumérées, connaissent la concurrence d'institutions quasi-juridictionnelles.

b- Les institutions quasi-juridictionnelles

Ce sont les institutions statutairement habilitées à trancher les litiges en matière de concurrence et donc forcément de prix ou de tarif des services. Des structures diverses, ont été en réalité créées à la faveur de la libéralisation de l'économie. Elles disposent des mêmes

256 Article 31, loi N° 90/031.

257 Il faudrait cependant regretter le manque de précisions du législateur quant aux modalités de cette assistance judiciaire. Est-elle subordonnée à la demande du juge, ou des parties au litige ? A-t-elle des axes particuliers ou des limites ? Est-elle systématique ? Le mutisme de la loi sur ces questions est autant regrettable que la concurrence de ces fonctions de la CNC, avec l'action d'autres institutions.

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prérogatives que le juge. C'est ainsi que la CNC et l'administration centrale sont chargées de rechercher, de contrôler et le cas échéant, de poursuivre et de sanctionner les pratiques anticoncurrentielles. Il s'agit des agences et des autorités de régulation258 (ARSEL, AER, ART, AACC etc.). Les agences de régulation ont effet compétence pour connaître, dans leurs secteurs d'activités respectifs, des différends nés entre différents agents économiques.

La CNC entre également dans ce registre ; en tant qu'organe de règlement des différends sur toute question relative à la concurrence, au même titre que le juge. Seulement, ses décisions sont des actes administratifs susceptibles de recours devant le juge. A ce niveau, la CNC apparaît comme une instance de premier degré dont les décisions sont connues en appel devant le juge qui les tranche en premier et dernier ressort. La hiérarchie entre le juge et la CNC semble donc nette. Reste toutefois à souligner que la saisine du juge n'est nullement suspensive des injonctions adressées par la CNC. En plus, au détriment de ce dernier, la CNC jouit d'un pouvoir d'auto-saisine. Ceci ne peut que créer d'une part des conflits de compétence entre la CNC et les agences de régulation259 et entre elle et le juge. La nature tumultueuse des relations entre ces autorités sectorielles et l'autorité nationale de la concurrence que constitue la CNC tire ses origines de plusieurs raisons260. Par rapport au juge, les conflits peuvent découler de la divergence d'opinion entre ses décisions et celles des agences de régulation. Mais, tous comptes faits, le juge garde le dessus puisque connaissant, en appel et en dernier ressort, des opérations desdites instances.

La multilatéralisation de l'encadrement des prix par la régulation a ainsi consisté au renforcement, ou mieux, à la précision du rôle et de la place des institutions publiques, administratives ou juridictionnelles et même para juridictionnelles en matière de prix. La marque même de la régulation est désormais la participation systématique des institutions non publiques ou quasi-publiques à l'encadrement des prix.

258 Dont la nature juridique a soulevé un controverse doctrinal sur le plan local .un vrai- faux débat ; puisque le législateur à pris le soin de déterminer la nature juridique desdites institutions. En réalité, la doctrine ne peut créer de catégories juridique ou, ne peut le faire que sous forme de conjectures ; pour susciter une réaction du législateur ou du juge .lequel juge ne peut lui-même le faire que lorsque le flou ou le vide juridique laissé par le législateur l'exige.

259 ESTEGUET (P.E), « Relations entre l'autorité de concurrence et les instances sectorielles de régulation... »Op. Cit. 10. P.

260 La CNC est sous tutelle du MINCOMMERCE alors que les agences sont sous tutelle des Ministères en charge des secteurs concernés. Les agences sectorielles de régulation sont financièrement dépendantes des redevances perçues sur le chiffre d'affaire des opérateur exerçant dans leur secteur il y a donc conflit d'intérêt dans la mesure où lesdits secteurs se réduisent dans la plupart des cas en monopole ou en oligopole ; le caractère récent et donc forcément mal appréhendé du droit de la concurrence dans le paysage économique camerounais ; le retard dans la mise en place de la CNC et surtout l'absence d'un cadre de concertation entre ces différentes autorités. Lire à ce propos ESTEGUET (P.E), Op.Cit. P.6.

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PARAGRAPHE II : LA PARTICIPATION D'INSTITUTIONS QUASI ET NON PUBLIQUES

La distinction privée/publique n'est pas du tout étanche, il n'en demeure pas moins qu'une classification académique est généralement opérée, sinon tolérée, qui permet de distinguer les institutions organiquement ou fonctionnellement privées de celles dites publiques. Les institutions privées sont considérées comme celles ne concernant que les intérêts personnels et particuliers alors que les institutions publiques sont fondamentalement caractérisées par la recherche de la satisfaction de l'intérêt général. La difficulté provient de l'existence de structures ne pouvant être rigoureusement rattachées à aucune de ces catégories. La régulation de l'économie en général et celle en particulier des prix est prolifique de formations participatives dont la nature juridique reste une énigme parce qu'associant l'Etat et les autres acteurs sociaux dans le processus d'encadrement (A) et de plus en plus l'Etat laisse agir des structures avec lesquelles il n'a aucun lien (B).

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery