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La libéralisation des prix au Cameroun

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par Pierre Désiré EFFA MESSI
Université de Yaoundé II -  Diplôme d'Etudes Approfondies de droit public  2008
  

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PARAGRAPHE I : LES MODALITES DU DESENGAGEMENT

Le désengagement de l'Etat du secteur productif s'est traduit par une vaste restructuration de secteurs entiers de l'économie (A) au nombre desquels la, une progressive réforme du secteur public et parapublic (B).

A- LA LIBERALISATION DE SECTEURS DE L'ECONOMIE

La libéralisation a concerné les secteurs de l'agriculture, du commerce et de l'industrie ainsi que des monopoles publics.

1- La libéralisation du secteur de l'agriculture113

Ayant opté pour une politique développementaliste, fondée sur l'idéologie de la construction nationale au lendemain des indépendances, et conscient de ses atouts naturels et environnementaux, le Cameroun se lancera dans un vaste mouvement de promotion de l'agriculture sous la houlette de l'Etat. La forte présence de l'Etat dans ce domaine sera manifeste à travers l'encadrement de ladite agriculture par des structures publiques, centrales, ou décentralisées, déconcentrées et même techniques parmi lesquelles des coopératives créées par l'Etat. Les subventions à la production à l'exploitation et l'octroi de crédits le financement de la recherche, l'entretien des points de collecte, la production par des sociétés d'Etat, la réglementation de la commercialisation, la création gestion des marchés et espaces de commercialisation, le contrôle de la qualité du transport ; la fixation, la stabilisation, et le contrôle des prix des produits agricoles d'exploitation par décret ministériel sur proposition de l'Office National de Commercialisation des Produits de Base (O.N.C.P.B), expriment à souhait la présence multi formelle et multifonctionnelle de l'Etat.

Cette présence va cependant s'accompagner de nombreux dysfonctionnements notamment aux conflits de compétence entre différentes institutions publiques. L'échec de l'interventionnisme étatique dans le domaine qui justifiera l'adoption des politiques de déréglementation, synonyme de « modification des termes de l'intervention de l'Etat »114.

113 Pour d'amples développements, lire KAMGNIA DIA (B) « Crise économique et déréglementation dans le secteur de l'agriculture » in TOUNA MAMA (Ss. Dir) Op. Cit PP. 23-89.

114 Idem.

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Cette politique de déréglementation passe par une réactivation de l'entreprenariat privé, la rénovation des mécanismes de stabilisation ainsi que le rétablissement de l'équilibre financier et institutionnel que commanderont la liquidation et même la transformation de plusieurs structures étatiques d'encadrement de l'agriculture115. A cet effet, la rénovation du mécanisme de stabilisation se fera par la mise en place d'un mécanisme plus dynamique, flexible et adaptatif de l'évolution mondiale des prix et sous tendu par des fonds de stabilisation dans les filières porteuses et stratégiques.

2- La libéralisation du secteur de l'industrie et du commerce

Conséquence pratique de l'affirmation du principe de la liberté de commerce et d'industrie, la libéralisation dans ce secteur poursuit également l'objectif d'ouverture aux lois du marché. Avant cette libéralisation, l'environnement institutionnel de l'Etat en la matière était constitué du FOGAPE, du CAPME, et de la SNI. Cette dernière est créée dans le but de promouvoir l'investissement et l'entreprenariat public ; du fait de l'inexistence du secteur privé. Elle doit donc financer le développement industriel. Le portefeuille de l'Etat s'en trouvera lourdement enrichi (cent quatre-vingts entreprises publiques à la fin des années 1990). L'aide à la création était quant à elle l'oeuvre du FOGAPE et du CAPME.

L'environnement normatif était fondé des codes des investissements de 1960, de 1984 et marqué par la reconnaissance de la place centrale de l'Etat dans l'économie. Celui de 1990 apportera un souffle nouveau qui sera entériné par la charte des investissements de 2002, elle-même, conforme à la charte des investissements de la CEMAC116. La politique économique, ayant désormais comme cheval de bataille la relance de la croissance, passe forcément par la promotion de l'industrie locale. C'est ce qui explique la création d'un département ministériel spécialement chargé des petites et moyennes entreprises l'édiction des mesures d'assainissement de l'environnement des affaires en vue de l'attraction des Investissements Directs Etrangers (IDE). L'adhésion à l'OHADA s'inscrit dans cet ordre

115 Liquidation de l'O.N.C.P.B, avènement de L'Office National du Cacao et du Café, (l'O.N.C.C) ; du Comité Interprofessionnel du Cacao et du Café (C.I.C.C) etc...

116 Règlement N° 17/99/CEMAC-020-CM-03 relatif à la charte des investissements. CEMAC, recueil de textes de droit communautaire de la CEMAC, 2nde éd. GIRAF, AIF 2002 P.106.

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d'idées ainsi que l'édiction des lois de la libéralisation sus évoquées dont l'objectif ultime est le démantèlement des secteurs monopolistiques.

3- La libéralisation des secteurs monopolistiques

Plusieurs monopoles d'Etat ont été libéralisés à la faveur de certaines lois.

Le secteur de l'eau traditionnellement géré à titre exclusif par une société d'Etat : la Société Nationale des Eaux du Cameroun (SNEC) a fait l'objet d'une ouverture significative, à la faveur de la loi N°98/005 du 14 Juillet 1998 régissant le secteur de l'eau au Cameroun, la privatisation de cette structure qui en a découlé, faisant suite à la libéralisation du secteur de l'énergie électrique. En effet, conformément à la lettre de la loi N° 98/022 régissant le secteur de l'électricité au Cameroun, la Société Nationale de l'Electricité (SONEL) a été transformée en AES SONEL, une société privée qui cogère ce secteur avec la société chargée de l'électrification rurale. C'est donc cette loi qui ouvre ce secteur à la concurrence. Elle est censée prévenir et juguler les risques de concurrence déloyale à travers la création d'une agence de régulation du secteur de l'électricité (ARSEL)117. Une agence similaire a été créée dans le cas des télécommunications.

Le secteur des télécommunications a fait lui aussi l'objet d'une réforme118 allant dans le sens de la libéralisation119. Cette activité s'est ainsi ouverte à la participation du secteur privé. Elle apparaît aujourd'hui comme celle dans laquelle la libéralisation est le plus visible. En effet, une forte disparité des tarifs téléphoniques pratiqués par les différents opérateurs est notable.120La concurrence dans ce secteur est garantie par l'agence de régulation des télécommunications (ART).

Le transport n'a pas échappé au vent de la libéralisation. Le transport maritime a été ouvert à la concurrence par décret, tandis que le transport aérien l'a été par la loi. Le transport

117 Article 22 de la loi régissant le secteur de l'électricité

118 PEKASSA NDAM (G), « La réforme du secteur des postes et télécommunications au Cameroun », RASJ. Vol 1, 2000, UY, PP. 97-104.

119 MVOGO BELIBI (M.V), la libéralisation du secteur des télécommunications au Cameroun Op. Cit. P.101.

120 Sur le terrain en effet, les tarifs téléphoniques de la Cameroun Télécommunications (CAMTEL) de MTN et Orange Cameroun sont différents en termes de coûts téléphoniques. La communication informelle découlant de la pratique des « Call box » permet d'observer à côté d'un opérateur dudit secteur affichant « 100F /Mn», un autre affichant « 75F/Mn » et même un troisième affichant « 125F/Mn »

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terrestre, certes libéralisé, fonctionne en corporation alors que le transport ferroviaire a fait l'objet d'une privatisation de la REGIFERCAM (Régie des chemins de Fer du Cameroun) devenue CAMRAIL. Dans cet esprit, les aéroports du Cameroun (ADC) sont aujourd'hui parapublics ; les ports autonomes libéralisés, et le transport urbain libre. Il en est de même du commerce des produits pétroliers121 .

Cet ensemble de mesures de libéralisation de secteur de l'économie générale poursuit l'objectif de désétatisation du cadre économique, et de la restructuration des entreprises du secteur public et parapublic.

B- LA RESTRUCTURATION DES ENTREPRISES DU SECTEUR PUBLIC ET PARAPUBLIC

La restructuration des entreprises du secteur public et parapublic en 1999122 était un prélude au souci de soumettre la boulimie institutionnelle étatique à un régime sans précédent. A cet effet, plusieurs modalités ont été engagées sur la base d'un cadre juridique approprié. Le résultat est nuancé.

1- Le cadre juridique de la restructuration

La restructuration du secteur public repose sur un certain nombre d'instruments juridiques tant normatifs qu'institutionnels.

Sur le plan institutionnel, cette réforme est principalement confiée à un organe, à savoir la mission de réhabilitation des entreprises du secteur public et parapublic instituée par décret N°86/656 du 30 Juin 1986. Son but est d'analyser les motivations ou les raisons du désengagement de l'Etat des secteurs productifs en vue d'accroître la participation du secteur privé123. Elle est composée d'un organe de décision et d'un organe technique. Le Comité interministériel, organe de décision, et composé d'une dizaine de membres. Il est appuyé par une sous Commission chargée de la privatisation créée par décret N°90/428 du 27 Février 1990 composée d'experts, et parfois, de consultants nationaux et internationaux. La

121

122 Ordonnance N°99/016 du 22 décembre 1999 portant régime général des établissements du secteur public et parapublic au Cameroun.

123 TAMBA (I), et TOUNA MAMA « Crise économique et déréglementation dans le secteur des entreprises publiques et parapubliques » In TOUNA MAMA (Ss. Dir.) Op. Cit. p.147.

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Commission technique de privatisation et de liquidation (C.T.P.L) est l'organe technique. Il est placé sous l'autorité du Ministre de l'Economie de la Planification et de l'Aménagement du Territoire, il est composé d'experts nommés en raison de leurs compétences et de leurs expériences pratiques. Cette Commission bénéficie de l'assistance technique de la Banque mondiale et peut faire appel à tout autre consultant. Il est à noter que ce cadre institutionnel administratif et public ne favorise pas une participation du secteur privé au processus de privatisation.

Sur le plan normatif, la réforme des entreprises publiques repose sur un nombre impressionnant des textes juridiques124 chaque jour enrichis, notamment pour ce qui concerne la privatisation. En effet, la liquidation/ dissolution autant que la réhabilitation n'ont pas connu la même production normative à l'instar de la privatisation.

2- Le processus de la restructuration

La restructuration du secteur public et parapublic a épousé essentiellement trois modalités : la réhabilitation, la liquidation et la privatisation.

La réhabilitation contient des mesures de nature à accroître le rôle du marché dans le processus d'allocation des ressources et à clarifier le rapport entre l'Etat et les entrepreneurs125. La liquidation quant à elle aboutit à une ouverture aux lois du marché par l'action des acteurs privés qui vont s'accaparer du secteur concerné. Elle est différente de la privatisation en ceci que cette dernière offre la possibilité à l'Etat de rester présent sans plus être exclusif. Les prix ou les tarifs dans les secteurs concernés ne sont forcément plus administrés.

La privatisation constitue au Cameroun la modalité par excellence de réduction de l'omniprésence étatique du secteur productif. Elle a épousé au Cameroun nombre de procédés. Elle est précédée d'une phase de préparation et d'évaluation objective et complète des entreprises concernées. En fait de technique, il s'agit des cessions totales ou partielles d'actions ou d'actifs au secteur privé ; d'une location-gérance des actifs ou du fonds de commerce des entreprises publiques par des personnes physiques ou morales de droit privé ou

124 Idem.

125 Ibid. P 160.

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alors de la signature de contrats de gestion des entreprises à participation publique par des personnes de droit privé. Bref, l'Etat a procédé à la vente des entreprises non stratégiques mais à la cession des entreprises dites stratégiques.

Le processus ainsi enclenché et réalisé ne va pas sans difficultés. Il se heurte à de nombreuses contraintes techniques, institutionnelles, financières, sociales et même idéologiques126. Elle s'est avérée particulièrement coûteuse et conflictuelle127, allant jusqu'à mettre en évidence un flou caractéristique du législateur camerounais qui aurait tant à gagner s'il avait entretenu la clarté et surtout la flexibilité pour ce qui concerne des opérations d'une telle nature. Malgré quelques points positifs, le bilan reste nuancé.

3- Le bilan nuancé de la restructuration

Quatre buts essentiels étaient visés, à savoir améliorer les finances publiques, promouvoir l'entreprenariat privé par l'ouverture de la gestion des entreprises publiques ou secteur privé et à l'application des techniques des droits des affaires. L'accroissement du rôle du marché par une restauration de la concurrence entre acteurs du secteur privé et entre ces derniers et le secteur public constituait le troisième objectif. Le dernier, connexe à tous les autres, était la stimulation et la relance de la croissance. Un regard rétrospectif du processus amène à constater que ces objectifs n'ont que relativement été atteints. La liquidation, la privatisation et même la réhabilitation, non encore achevée, n'ont que relativement ouvert la concurrence dans les secteurs jadis publics aujourd'hui libéralisés. En effet, le passage a le plus souvent été d'un monopole, de droit public à un monopole sinon à un oligopole de droit privé. L'Etat n'a pas perdu la maîtrise des reines de l'économie et demeure inexorablement la locomotive du développement au détriment d'un secteur privé encore fragile. Le partenariat secteur public/secteur privé demeure par ailleurs embryonnaire. En outre, la pauvreté, la corruption et toutes autres formes de vicissitudes sociales y ont fait leur nid. Ce qui dénote de l'échec même de ladite restructuration dont l'objectif social était l'amélioration de la quantité et de la qualité de service.

126 NGUIHE KANTE (P), « Les contraintes de la privatisation des entreprises publiques et parapubliques au Cameroun), Juridis périodique N° 48 Octobre 2001 PP. 79-90.

127 MANGA ZAMBO (E), Op.Cit. p.155.

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Les mesures engagées en vue de décongestionner les circuits tant de production que de commercialisation des biens et services, matérialisent le désengagement de l'Etat des secteurs économiques. Ce désengagement permet la recherche et la réalisation du juste prix dans les opérations et les transactions commerciales. Ce qui emporte sur le plan de la réglementation des prix de nombreuses implications.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault