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Une expérience d'art thérapie à  dominante danse/ expression corporelle auprès de personnes àągées atteintes de la maladie Alzheimer ou d'autres troubles apparentés

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par Isadora FORTINO
faculté libre de médecine universitaire catholique de Lille - Diplôme universitaire d'art- thérapie 2013
  

Disponible en mode multipage

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FACULTE LIBRE DE MEDECINE

UNIVERSITE CATHOLIQUE DE LILLE

&

AFRATAPEM

Association Française de Recherche &

Application des Techniques Artistiques en Pédagogie et Médecine

UNE EXPÉRIENCE D'ART-THÉRAPIE À DOMINANTE DANSE/EXPRESSION CORPORELLE AUPRÈS DE PERSONNES ÂGÉES ATTEINTES DE LA MALADIE D'ALZHEIMER OU D'AUTRES TROUBLES APPARENTÉS

Mémoire de fin d'étude du

Diplôme Universitaire d'Art-Thérapie

Présenté par

FORTINO Isadora

Année 2013

Sous la direction de

Dr Véronique CHARVET

Médecin Gériatre

EHPAD

Tiers Temps Saint Maur

15, avenue saint-Maur

59110 la Madeleine

REMERCIEMENTS

Je souhaite remercier d'abord tous les résidants de « Saint Maur» pour l'accueil reçu et la confiance accordée aux cours de deux années.

Un merci plus particulier à Véronique CHARVET, ma directrice de mémoire et médecin gériatre de la Structure, pour le temps et les conseils apportés dans la rédaction de mon mémoire.

Merci à Marie FOURIER ma directrice de stage, de m'avoir offert l'opportunité de travailler dans la maison de retraite et merci à tout le personnel soignant qui m'a aidée.

Merci à Richard FORESTIER pour son travail et dévouement, à l'École d'Art-Thérapie de Tours et à la Faculté de Médecine de l'UCL.

Je voudrais remercier Ilena, Clémence, Cyr, Elise, Tiphaine, Zorro et mes autres amis français pour le soutien chaleureux qu'ils m'ont donné (en tant que deuxième famille) dès mon arrivée à Lille. Merci à de nombreux amis qui m'ont aidé à corriger mon français et soutenue inconditionnellement dans les moments difficiles.

Pour finir, merci à mes parents, à mon copain pour les encouragements qu'ils m'ont procuré depuis l'Italie et qui m'ont accompagné dans le chemin du D.U. du début jusqu'à la fin.

PLAN

REMERCIEMENTS...................................................................... p.1 PLAN........................................................................................ p.2

GLOSSAIRE p.6

INTRODUCTION p.7

PREMIERE PARTIE : L'ART-THERAPIE A DOMINANTE DANSE ET EXPRESSION CORPORELLE PEUT ETRE BENEFIQUE POUR UN PATIENT ALZHEIMER OU AVEC D'AUTRES TROUBLES APPARENTES

A. LES MALADIES DÉGÉNÉRATIVES DE LA VEILLESSE: LA DÉMENCE DE TYPE ALZHEIMER ET LES AUTRES TROUBLES ASSOCIEES

A.1 La démence va peser sur la problématique actuelle du vieillissement.........p.9

A.2 Il y a plusieurs formes de démences, caractérisées par différents aspects Neurologiques p.10

A. 3 L'aspect caractérisant la démence Alzheimer, l'atrophie de l'hippocampe, comporte des troubles mnésiques et une souffrance psychologique et sociale

A.3.1 La caractéristique de la démence Alzheimer est l'atrophie de l'hippocampe, une des conséquences la perte de la mémoire p.11

A.3.2 Les conséquences cliniques sont des déficits cognitifs multiples et une grande souffrance psychique p.11

A.4 La perte de la mémoire dans les différents stades de la maladie ; certaines formes de mémoire préservées

A.4. 1 D'abord, la mémoire à court terme est touchée p.12

A.4.2 Si la mémoire épisodique est particulièrement atteinte, la mémoire corporelle et émotionnelle est préservée p.13

A.5 La thérapie pharmacologique doit toujours être intégrée dans un réseau de soins à support psychosocial p.13

A.6 Une forme particulière de la maladie d'Alzheimer : Le SYNDROME DE BENSON p.14

A.7 Altération de la qualité de vie difficultés expressives, d'autonomie et de socialisation chez le malade Alzheimer: Comment aider le patient p.15

B. LE PLAISIR ESTHETIQUE ET LE POUVOIR DE L'ART POUR LE BIEN ETRE DE LA PERSONNE : LES ARTS CORPORELS

B.1 L'Art et le plaisir esthétique peuvent contribuer au bien-être

B.1.1 Le pouvoir expressif et relationnel de l'Art et des Arts Corporels ont été mis en évidence dans le théâtre grec, en philosophie et dans la psychanalyse p.16

B.1.2 Les Neurosciences vont à la découverte des fondements neuraux de la résonance esthétique p.17

B. 2 L'Art-thérapie va exploiter le potentiel bénéfique de l'Art  

B.2.1 L'art-thérapie naît pour aider les personnes en état de souffrance p.18

B.2.2 L'Art-thérapie s'adresse aux parties saines de la personne p.19

B.2.3 «Le BON Le BIEN Le BEAU» sont les trois B liés au bien-être  p.20

B.2.4 ART I et ART II : un modèle pratique décomposeur de l'activité artistique p.20

B.2.5 Interaction corps/ esprit par la danse : L'opération artistique se

déroule par ses différentes étapes p.21

B.3 L'Art comme moyen de socialisation : Communication et Relation par la danse........................................................................................ .... p.22

B.4 «Je ressens, je veux, je peux, je fais » : Affirmation, confiance et estime en soi par l'activité artistique.............................................................................p.23

C. ART-THERAPIE A DOMINANTE DANSE ET EXPRESSION

CORPORELLE DANS LE PROCESSUS DE SOIN DE LA PERSONNE ATTEINTE DE DEMENCE

C.1 Le pouvoir de l'Art et l'expérience esthétique sont à valoriser dans la vieillesse et chez les personne atteintes de démence p.24

C.2 Démonstrations du pouvoir bénéfique de l'Art par des expériences d'Art-thérapie sur le patients Alzheimer

C. 2.1. Les Arts plastiques permettent au patient de s'exprimer et d'éviter l'échec p.25

C.2.2 L'Art améliore la perception de soi chez le patient Alzheimer : une Recherche p.26

C.2.3 L'importance des ressentis pour stimuler le plaisir esthétique et dégager les émotions p.26

C.2.4 Le pouvoir de l'Art peut raviver et stimuler la créativité et la mémoire émotionnelle : expériences avec l'Art visuel, la musique et la danse p.26

C.3 Le corps, lien entre le but de l'idéal esthétique et les facultés motrices, est à valoriser chez les personne atteintes de démence

C.3.1 L' Expression Corporelle fait appel aux émotions, aux sens et aux mouvements p.27

C.3.2 Le corps est l' intermédiaire entre le monde intérieur et le monde extérieur p.28

C.4 La danse et expression corporelle peut aider les non voyants, pénalité de la Syndrome de Bergson, à s'exprimer p.29

C.4 La pratique de la danse et l'expression corporelle comme acte volontaire dirigé peut favoriser l'affirmation de soi ........................................ ..........p.30

II PARTIE : UNE EXPERIENCE PRATIQUE D'ART-THERAPIE AU SEIN D'UNE MAISON DE RETRAITE MEDICALISEE POUR PERSONNES AGEES DEPENDANTES

A. PRESENTATION DE LA MAISON DE RETRAITE

MEDICALISEE «TIERS TEMPS SAINT MAUR»

A.1 TIERS TEMPS SAINT MAUR : Présentation de la structure, lieu de stage, et de l'équipe soignante p.31

A.2 Les objectifs thérapeutiques de la prise en charge des patients sont liés à leur « Projet de Vie » p.32

A.3 TIERS TEMPS SAINT MAUR et les 3 principes fondamentaux pour un projet thérapeutique efficace p.32

A.4 Les activités proposées pour les résidents et l'importance des Ateliers d'Animation p.33

B. MISE EN PLACE DU PREMIER ATELIER D'ART-THERAPIE A DOMINANTE DANSE/ EXPRESSION CORPORELLE A LA MAISON « TIERS TEMPS  SAINT-MAUR »

B. 1 Mise en oeuvre du projet art-thérapeutique

B.1.1 Il s'agit de la première expérience art-thérapeutique à la maison, donc l'art-thérapie a été présentée au sein de l'Etablissement p.33

B.1.2 Le déroulement du stage a été organisé selon un cadre précis et défini p.33

B.1.3 Un temps d'observation a été nécessaire p.34

B.2 Le projet art-thérapeutique en lien avec le projet thérapeutique global de la Structure

B 2.1 La réalisation du stage et de ses objectifs est en lien avec le projet de la structure p.35

B.2.2 Avec l'équipe soignante, on fait le choix des prises en charge individuelles : 4 personnes atteintes de la maladie de type Alzheimer et d'autres formes neurologiques p.35

B.2.3 Le protocole de prise en charge est soumis à une décision collective de l'équipe p.35

B.3 Le projet a inclus la mise en place de l'Atelier selon une méthodologie adaptée

B.3.1 Proposition de mise en place et organisation d' Ateliers d'Art-thérapie à dominante danse et expression corporelle p.36

B.3.2 D'autres phénomènes sont associés : musique, dessin p.36

B.3.3 Un cadre thérapeutique est défini dans ses éléments p.36

B.4 Les Stratégies Thérapeutiques ont été personnalisées selon l'état de base du patient, l'intérêt, les objectifs et les moyens

B. 4.1 Les stratégies ont été différentiées entre les 4 prises en charge p.37

B.4.2 Elles sont relatives à l'état de base, aux objectifs, aux moyens artistiques utilisés, à l'intérêt artistique p.37

B.4.3 Des moyens sont à mettre en oeuvre pour parvenir à l'objectif p.38

B.5 La prise en charge en Art-Thérapie réalisée en plusieurs étapes de la Fiche d'Ouverture au Bilan de fin de prise en charge

B.5.1 Les premières séances ont permis la réalisation d'une Fiche d'ouverture p.39

B.5.2 La Fiche d'ouverture donne l'orientation p.39

B.5.3 Une Fiche d'Observation et les séances ont permis l'élaboration de la prise en charge p.40

B. 6 L'observation et les outils de l'art-thérapeute ont permis la réalisation d'un cheminement thérapeutique

B.6.1 La grille d'observation permet le recueil des informations p.40

B.6.2 Les Items sont fixés en lien avec l'état de base du patient, l'objectif général et le suivi du cheminement p.41

B.6.3 La notation des items, les graphiques et leurs cotations ont permis une évaluation objective de la prise en charge p.41

C. ETUDE DE DEUX CAS : MADAME C. ET MADAME L.

C.1 MADAME C.

C.1.1 Anamnèse et état de base p.42

C.1.2 Le comportement général de madame C. a motivé son indication en art thérapie p.42

C.1.3 Les objectifs de l'équipe soignante visent à améliorer son état dépressif et à favoriser l'autonomie p.42

C.1.4 La confiance en soi et dans ses capacités est l'objectif général de la prise en charge art-thérapeutique p.42

C.1.5 L'image de soi est à évaluer p.43

C.1.6 Des objectifs intermédiaires sont fixés p.43

C.1.7 Analyse de la dynamique des séances avec madame C p.43

C.1.8 Evaluation de Mme C. au cours de la prise en charge : les items sont évalués de façon objective et amènent à une découverte de ses potentialités p.46

C.1. 9 L'Analyse et l'évaluation des observations des séances nous permet de tirer une synthèse et un bilan positif de la prise en charge p.46

C. 2 MADAME L.

C.2.1 Anamnèse et état de base p.50

C.2.2 L'équipe soignante a orienté Mme L vers une prise en charge en raison de son état de passivité et apathie p.50

C.2.3 L'objectif général art-thérapeutique fixé sur Madame L. l'affirmation de ses capacités d'expression et de participation p.50

C.2.4 La prise en charge a été justifiée par l'Art I, Art archaïque  p.50

C.2.5 Des objectifs intermédiaires sont fixés p.50

C.2.6 Analyse de la dynamique des séances avec Madame L. p.51

C.2.7 Evaluation de Mme L. au cours de la prise en charge p.52

C.2.8 Synthèse et bilan de la prise en charge p.52

III PARTIE : DISCUSSION

A. L'EXPÉRIENCE PERMET DE CONFIRMER LES EFFETS BÉNÉFIQUES DE L'ART-THÉRAPIE MALGRÉ LES LIMITES DANS LE DEROULEMENT DU STAGE

A. 1 Limites rencontrées dans le déroulement du stage : le stage peut présenter des limites qui vont influer sur le travail art-thérapeutique

A.1.1 La durée du stage et l'organisation du temps peuvent limiter le travail de l'art-thérapeute p.55

A. 1. 2 Une intégration insuffisante du travail art-thérapeutique au sein de l'équipe soignante p.55

A.1. 3 La difficulté d'organiser la prise en charge d'un groupe peut limiter les effets bénéfiques des prises en charge individuelles p.56

A. 2 Malgré les limites, les effets bénéfiques les plus significatifs de l'art-thérapie à dominante danse/expression corporelle sont à mettre évidence et ils permettent de nouvelle considérations

A. 2.1 L'oeil intérieur peut stimuler l'énergie motrice et créative d'une personne non voyante grâce aux séances d'art-thérapie p.56

A.2.2 La jouissance du jeu renforce la relation avec l'art-thérapeute p.57

A. 2 .3 L'expérience du plaisir kinesthésique lié à la danse peut permettre également une affirmation de soi p.57

A.2.4 Les patients atteints de démence ont des potentialités oubliées que l'art-thérapie aide à retrouver  p.58

B. LA QUALITE DE LA RELATION AVEC L'ART-THÉRAPEUTE ET L'IMPLICATION DU PATIENT SONT LE FONDEMENT D'UN BON PROCESSUS

B.1. L'art-thérapeute doit répondre aux attentes du patient : accepter ses limites et modifier son travail par rapport à lui et à sa condition p.59

B.2 Le stratégies et les moyens artistiques utilisés sont importants, mais le moyen le plus important est la relation et sa qualité

B.2.1 Une bonne relation renforce l'alliance thérapeutique p.59

B.2.2. Une bonne relation renforce l'engagement du patient et lui permet de s'exprimer et d'exprimer ses émotions p.60

B.2.3 Une bonne relation peut aider à raviver le regard positif de la personne sur elle- même et à renforcer l'image de soi p.60

B. 3 Nécessaires continuités des expériences positives art-thérapeutiques dans la relation avec les autres et l'institution p.61

C. RELATION ET COMMUNICATION PAR LES ARTS CORPORELS : COMPARAISON ENTRE L'ART-OPERATOIRE, LES NEUROSCIENCES, L'EMPATHIE PSYCHANALYTIQUE

C.1 Relation/Communication par la danse : comparaison entre le modèle de l'Art-Opératoire et des Neurosciences p.61

C.2 Relation/Communication par les Arts Corporels et l'Alliance Thérapeutique:-comparaison entre le modèle de l'art-opératoire et de l'empathie psychanalytique

C.2.1 L'empathie est un aspect favorisant de l'alliance thérapeutique p.62

C.2.2 Ressenti corporel, activité réfléchie et confiance dans l'autre sont des aspects favorisants l'alliance thérapeutique en art-thérapie p.63

CONCLUSION p.65

BIBLIOGRAPHIE p.66

ANNEXES p.67

GLOSSAIRE

AFRATAPEM : Association Française de Recherche & Application des Techniques Artistiques en Pédagogie et Médecine

Agnosie : incapacité à reconnaitre des objets malgré l'intégrité de la fonction sensorielle Anamnèse : ensemble des renseignements que le médecin recueille en interrogeant un malade sur l'histoire de sa maladie

Aphasie : Altération du langage. Difficulté dans l'expression orale

Aphasie otique : Difficulté à nommer et désigner des formes ou objets perçus visuellement.

Apraxie : compromission de la capacité et de la coordination motrice

Art : Expression humaine et volontaire orientée vers l'esthétique

Art-thérapie : Utilisation du potentiel artistique dans une visée humanitaire et thérapeutique.

EHPAD: Établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes

Expression corporelle : exercices inspirés de la danse et de la gymnastique qui cherchent à développer harmonieusement la maîtrise et la souplesse du corps.

Fiche d'observation: outil qui permet le recueil des observations

Kinesthésie:. Nom féminin venant du grec kinein : se mouvoir et aisthésis : sensation. Ensemble des sensations de mouvement que nous procure notre corps. Mécanisme : Ensemble de pièces destinées à assurer le fonctionnement de quelque chose

Neurologie : spécialité médicale qui étudie le système nerveux et soigne ses maladies

Neurones miroir : désignent une catégorie de neurones du cerveau qui présentent une activité aussi bien lorsqu'un individu exécute une action que lorsqu'il observe un autre individu exécuter la même action, ou même lorsqu'il imagine une telle action, d'où le terme miroir

OMS : Organisation Mondiale de la Santé

Opération artistique : schéma synthétique de l'activité artistique

Phénomène artistique : intention action production

Projet thérapeutique : organisation des éléments en fonction d'un état de base et d'un ou de plusieurs objectifs à atteindre.

Propriocepteur : récepteur sensible aux stimulations causées par les mouvements du corps et des organes.

Protocole : C'est un ensemble d'éléments qui constituent l'intérêt de la prise en charge, sa faisabilité, la réalisation concrète de l'activité thérapeutique, l'analyse, la conclusion et le bilan.

Stratégie thérapeutique : prend en considération l'état de base, les objectifs et les moyens

Santé : Un état de bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité

Simultagnosie : Trouble de l'interprétation globale d'une image Site d'action : situation particulière d'une difficulté sur laquelle l'art-thérapeute doit s'arrêter soit pour progresser soit pour l'éliminer

Troubles neurologiques : Les troubles neurologiques regroupent l'ensemble des maladies qui sont liées au système nerveux. Parmi les maladies neurologiques les plus répandues, on retrouve la maladie d'Alzheimer, la maladie de Parkinson et l'épilepsie. Les définitions proviennent des dictionnaires français Larousse et italien Zanichelli, de sites internet comme Wikipédia et de livres relatifs à l'art-thérapie notamment ceux de l'auteur R. FORESTIER. Ils ont été choisies en fonction de ce que je voulais exprimer dans mon mémoire.

INTRODUCTION

Depuis mon plus jeune âge, j'ai toujours eu un intérêt personnel pour l'Art en général, surtout la peinture et la danse, d'abord classique, puis vers la danse contemporaine et la danse-théâtre. Mes évolutions artistiques en danse et en expression corporelle, dans un cadre plus professionnel avec aussi mes compétences en psychologie, obtenues grâce à mes études universitaires, m'ont permis de me rapprocher de l'Art-thérapie. Ainsi de mêler mes deux aptitudes personnelle et professionnelle dans une vision humanitaire, sociale et médicale.

J'ai vu qu'en France, avec l'École Afratapem de Tours, la méthodologie et l'organisation de la formation art-thérapeutique correspondait à ma façon d'appréhender l'art-thérapie, c'est à dire comme un processus de soin pour une personne en difficulté soit sociale, soit psychologique, soit physique avec l'exploitation de l'ART. En accord avec l'Afratapem, j'ai effectué, pendant mes deux années de formation, 3 stages.

Les deux premiers, définis «stage d'observation», ont été effectués dans un service

de santé mental et un établissement de jeunes handicapés avec lesquels j'ai conduit des interventions d'art-thérapie à dominante danse. Différemment, mon dernier stage fut l'occasion de mettre en pratique un atelier d'art thérapie à dominante danse et expression corporelle auprès d'un public de personnes âgées.

L'objet d'étude de ce mémoire est le stage (de 140 h) que j'ai effectué dans la maison de retraite médicalisée Tiers Temps Saint Maur» avec des personnes âgées qui présentent différentes formes de pathologies neurodégénératives, en particulier la maladie d'Alzheimer. Pourquoi ce choix? Á ma passion pour la danse et l'expression corporelle, par mes études et ma formation universitaire j'ai ajouté un fort intérêt pour la psychoneurologie. Mon mémoire en Psychologie a eu pour objet les mécanismes neurologiques de l'empathie et une partie a été dédiée aux processus développés au contact d'une oeuvre d'art, selon les dernières découvertes des neurosciences. Il faut joindre deux autres aspects qui m'ont dirigée vers ce public: une «sensibilité et une forme d'empathie» que je ressens pour la personne âgée et mon intérêt à comprendre si l'ART, comme émotion et plaisir esthétique, peut avoir des effets bénéfiques et thérapeutiques sur la personne âgée, en particulier sur les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et d'autres troubles apparentés. Plusieurs études sur l'expérience esthétique au cours de la vieillesse ont mis en évidence le pouvoir que la beauté et l'activité artistique peuvent avoir sur le sujet âgé, sur son harmonie intérieure, sa sortie d'isolement..

Dans la première partie, j'analyse l'état de la vieillesse et les maladies cérébrales liées à cette phase de vie, en particulier la maladie d'Alzheimer. Je cible ainsi les conséquences psychologiques et physiques, les déficits qui peuvent être engendrés soit concernant l'état de vieillesse, soit concernant l'état de base lié à l'Alzheimer.

Nous parlerons du plaisir esthétique et du potentiel artistique pour le bien-être de la personne, déjà considérés dans les sciences humaines et dans les neurosciences, en mettant en évidence qu'également les arts corporels peuvent être exploités dans une visée thérapeutique pour revigorer le sujet et lui montrer qu'il est encore capable de ressentir et de s'exprimer. La danse stimule l'énergie motrice grâce à l'élan corporel qu'elle donne et au pouvoir entrainante de la musique. Elle peut donc être exploitée pour donner élan existentiel et améliorer la qualité de la vie.

La deuxième partie est dédiée à la présentation du stage pratique. Elle décrit la mise en place et l'expérience d'un atelier d'art-thérapie à dominante danse et expression corporelle au sein d'une maison de retraite médicalisée et chez des personnes atteintes de troubles neurologiques et de la maladie d'Alzheimer. Le projet thérapeutique fait l'objet d'une méthodologie adaptée

Nous présenterons la structure d'accueil ainsi que les objectifs du stage. Dans cette partie seront également abordées les méthodes de travail de l'art-thérapeute et le déroulement d'une prise en charge à travers ses différentes étapes qui s'inscrivent dans un cadre précis et défini. Il est rendu compte du déroulement des séances, dans la présentation de deux études de cas et de ses outils d'observation. Une analyse et une évaluation des résultats de ces études de cas sont présentées.

Enfin, dans la troisième partie, une discussion aborde ces aspects:

- en remarquant soit les points forts rencontrés, soit les limites de l'expérience de stage : comment l'art-thérapie aurait-elle pu mieux agir au sein de l'équipe soignante et d'un établissement pour donner continuité aux progrès obtenus dans le cheminement de ses prises en charge ?

- Une attention particulière a été donnée à l'implication du patient  et à son engagement dans une alliance thérapeutique avec l'art-thérapeute, fondements d'un bon processus ; mais, toutes les personnes sont-elles capables d'un niveau d'engagement dans une alliance thérapeutique ?

- Donc, en restant sur l'implication relationnelle du patient, une discussion

théorique abordera une mise en relation du modèle de l'art-opératoire avec les

neurosciences et les concepts psychologiques.

PREMIERE PARTIE : L'ART-THERAPIE A DOMINANTE DANSE ET EXPRESSION CORPORELLE PEUT ETRE BENEFIQUE POUR UN PATIENT ALZHEIMER ET/OU AVEC D'AUTRES TROUBLES APPARENTES

A. LES MALADIES CEREBRALES DE LA VIEILLESSE : la démence de type Alzheimer ET LES AUTRES TROUBLES ASSOCIES

A.1 La démence va peser sur la problématique actuelle du vieillissement

A. 1.1 L'actualité de la problématique du vieillissement

Dans notre culture occidentale, l'évolution des sciences et technologies a provoqué un changement global dans la façon de vivre, qui touche chaque génération, ainsi que la vieillesse, la phase la plus avancée du cycle biologique. L' amélioration des conditions de vie et les progrès actuels de la médicine font que la population de plus de 60 ans augmente d'année en année. Mais, cette augmentation de l'espérance d'une vie plus longue augmente de la même manière la durée d'exposition aux facteurs de risque. Les personnes âgées ont des capacités régénératives limitées et sont plus vulnérables aux maladies et syndromes par rapport aux autres adultes.

Des importants changements socioculturels ont touché aussi la façon d'entendre et de vivre la personne âgée. Dans mon pays, en Italie, ce changement a d'abord été dans le contexte familial. Autrefois, la famille était la cellule sociale principale, vécue d'une manière très sérieuse pour chaque membre de la famille. Les personnes âgées, dans ce contexte, avaient aussi un rôle important. Aujourd'hui, la façon de vivre la famille a changé. C'est difficile de trouver une grande famille. On trouve plutôt de petites cellules familiales, dans des petits appartements où chacun veut vivre sa vie avec «intimité ». La personne âgée a perdu sa place et son influence.

La nouvelle façon de vivre la vieillesse a été l'objet de différents articles. Dans une société où l'activité et la productivité donnent son importance à l'individu, la retraite signe et marque un profond bouleversement de la personne. Avec cette transition, les personnes perdent aussi leur rôle social. La personne âgée, donc, se trouve dans une nouvelle vie qui peut mener facilement à un isolement et abandon, surtout si malade.

A.1.2 Souffrance de la personne âgée avec des pathologies dont les démences

Au niveau physiologique, on a dit que le corps subit des changements qui s'inscrivent dans le code génétique de l'action du temps sur l'individu. Les modifications qui peuvent surtout toucher le bien être de la personne âgée sont d'abord ses modifications corporelles. La personne âgée vit avec son corps une relation d'ambivalence : elle prend soin de lui mais elle a aussi peur de lui, car il nous amène vers la maladie et la mort. Ce processus physiologique correspond à une diminution de la résistance et de l'efficacité de l'organisme, à sa fragilité. Les sens aussi deviennent plus faibles : la vue, le goût, l'ouïe peuvent diminuer. Les fonctions sensorielles subissent les effets de l'âge, altérant les mécanismes d'esthésie et les déficiences peuvent isoler progressivement la personne âgée de son entourage. Aussi les atteintes psychomotrices contribuent à l'isolement de la personne âgée et à réduire son autonomie : une personne âgée qui présente ces troubles peut éviter de marcher ou de sortir toute seule de son domicile ou souffrir d'une peur de la chute.

L'action du temps sur le corps et les maladies associées, une diminution de ses

capacités, de ses relations et de son autonomie peuvent avoir des conséquences psychologiques avec une forte souffrance psychique. Ils peuvent provoquer des sentiments dépressifs et de perte liés à une perte d'estime et de confiance en soi, à l'altération de l'image corporelle et, donc, de soi. Différentes causes peuvent amener à ces conséquences. Pour quelqu'un, la retraite peut être vécue négativement, pour d'autres les problèmes sont plutôt liés à la santé, à des problèmes médicaux comme la maladie et la mobilité réduite, douleurs chroniques, déclin intellectuel, maladies cardiaques, AVC (accident vasculaire cérébral), diabète, maladies dégénératives. La démence peut caractériser cette phase : elle est une pathologie qui comporte un affaiblissement mental global frappant l'ensemble des facultés psychiques et altérant progressivement l'affectivité et la personnalité.

A.2 Il y a plusieurs formes de démences, caractérisées par différents aspects neurologiques

Suivant la définition du DSM IV (Diagnostic and Statistique Manual of Mental Disorders), si la mémoire reste la faculté cognitive la plus affectée, dans la démence on trouve, aussi, une altération des autres facultés cognitives : intelligence - attention - concentration - apprentissage - perception - orientation - capacité de solutionner des problèmes et altération de la personnalité

Cette pathologie se présente de manière progressive et permanente et concerne la personne âgée, plus spécifiquement vers les 60-70 ans. La progression de la démence est graduelle, mais toujours dégénérative.

Pour évaluer un sujet dément, il est nécessaire d'effectuer plusieurs examens de laboratoire. L'évolution de la technologie neuroradiologique (grâce surtout à la RM et le SPECT) a permis de déterminer s'il existe une atrophie cérébrale (réduction du volume cérébrale du cerveau) et de confirmer le diagnostic de démence. Elle commence avec certains petits signes, qui d'abord peuvent passer inaperçus et ignorés du patient et de sa famille. Puis, avec l'évolution de la pathologie, ils deviennent importants et l'objet d'attention soit pour le patient soit pour sa famille, soit pour le médecin. Par exemple, dans le stade avancé de la maladie, la personne peut modifier complètement sa personnalité, être profondément désorientée et incohérente. L `évolution de la maladie dépend de la forme de démence. Dans l'Alzheimer, la progression est continue, à la différence de la démence vasculaire, où la progression se fait par paliers. Dans la démence de trauma crânien la pathologie est stable.

Il existe différents types de démence.

La démence type Alzheimer et la démence Vasculaire sont les plus fréquentes, surtout lorsqu'il y a d'autres facteurs de risque vasculaire comme l'hypertension, l'excès de cholestérol, le diabète. La Démence Vasculaire (Dva), aussi appelée démence à infarctus multiples, se produit lorsque les cellules du cerveau sont privées d'oxygène. Un blocage ou une maladie du système vasculaire peut empêcher le sang d'atteindre le cerveau, ce qui entraîne la mort des cellules et des fonctions associées et induit des symptômes de démence. Après la maladie d'Alzheimer, la Dva est la deuxième forme de démence.

Autres types de démence, différents de la démence vasculaire et de l'Alzheimer, par les aspects neurologiques et cliniques sont:

Maladie de Huntington : est une affection héréditaire qui touche le cerveau, tout particulièrement les noyaux gris centraux (situés profondément dans le cerveau). Cette maladie, assez rare, détruit les cellules nerveuses; dans certaines parties du cerveau il en résulte une baisse des taux de neurotransmetteurs, les substances

responsables de la transmission des signaux dans le cerveau. La maladie de

Huntington est caractérisée par des mouvements involontaires, une perte des capacités mentales et des changements touchant la personnalité ou le comportement.

Maladie de Parkinson : Comme dans la maladie de Huntington, la cause de cette pathologie est un dysfonctionnement du sous-cortex cérébral mais non héréditaire, qui provoque un ralentissement progressif des fonctions motrices, associé à un ralentissement des fonctions psychiques, une bradypsychie.

Démence à corps de Lewy : Affection neurodégénérative se caractérisant par des troubles du fonctionnement intellectuel, des hallucinations visuelles et des désordres moteurs qui ressemblent à ceux qui sont observés chez les patients atteints de maladie de parkinson : Des lésions histologiques caractéristiques, les corps de Lewy (du nom de celui qui les a découverts sous le microscope), sont observés dans le cortex cérébral, notamment dans les structures sous-corticales

Démences frontotemporales: Les dégénérescences fronto-temporales (DFT) sont des maladies neurologiques à l'origine d'une mort progressive de cellules du cerveau dans les régions antérieures provoquant une atrophie localisée. Un patient atteint de cette maladie est victime d'une altération de sa personnalité et de son comportement, même si ses facultés cognitives restent préservées initialement.

A.3 L'aspect caractérisant la démence Alzheimer, l'atrophie de l'hippocampe, comporte des troubles mnésiques et une souffrance psychologique et sociale

A.3.1 La caractéristique de la démence Alzheimer est l'atrophie de l'hippocampe, une des conséquences la perte de la mémoire

La maladie d'Alzheimer est une forme de démence qui touche les personnes âgées, mais aussi certaines de 45/50 ans. Elle, qui porte le nom de son découvreur, est donc une démence incurable qui entraine la perte progressive et irréversible de la mémoire.

Même si on ne connait pas encore la principale cause de cette pathologie, la recherche scientifique et la médecine font des progrès et des découvertes importantes. L'observation de l'encéphale d'un sujet malade montre une atrophie cérébrale globale localisée surtout aux régions pariéto-temporales, des lésions du lobe frontal, de l'hippocampe et une dilatation des ventricules cérébraux, histologiquement par des plaques séniles et des dégénérescences neurofibrillaires. L'hippocampe est une des structures liées à la mémoire, précisément à la capacité de rappeler des situations, lieux, notions, personnes. Grace à l'hippocampe, il est possible de consolider les nouvelles informations et donc effectuer le passage de la Mémoire à Court Terme à la Mémoire à Long Terme. La zone avant du lobe frontal est touchée, point d'entrée des circuits de l'organisation de l'action, contrôle de la mémoire, du langage, du comportement et de l'émotion.

Il y a aussi des défaillances des neurotransmetteurs qui transmettent les influx nerveux et permettent la transmission des informations au cerveau : la dopamine, le glutamate: l'acétylcholine, la noradrénaline, la sérotonine.

A.3.2 Les conséquences cliniques sont des déficits cognitifs multiples et une grande souffrance psychique

La pathologie est caractérisée par un processus graduel et dégénératif des facultés cognitives avec cependant des mécanismes neuropathologiques différents de ceux des autres démences . Dans le premier stade de la maladie, le patient présente une constante sensation de fatigue, une difficulté à réaliser des exercices pratiques et mentaux nouveaux et complexes. Avec l'évolution de la pathologie, des difficultés surviennent pour des activités de la vie quotidienne que la personne effectuait jusqu'alors sans problème. La prise de décision et l'organisation deviennent de plus en plus difficiles.
Les principaux déficits sont des Deficits Cognitifs Multiples ( DSM IV TR) 

1) Déficit de la Mémoire : compromission de la capacité d'apprendre de nouvelles informations et de rappeler les informations déjà apprises

2) Altérations cognitives :

a. Aphasie : le patient, parfois, peine à nommer les objets. Au stade sévère de la maladie, la communication verbale est extrêmement réduite

b. Apraxie : compromission de la capacité et de la coordination motrice

c. Agnosie : incapacité à identifier des objets malgré l'intégrité de la fonction sensorielle

d. Troubles des fonctions exécutives : planifier, organiser, abstraire.

e. Orientation : c'est la faculté cognitive qui permet à la personne de bien s'orienter dans l'espace, dans le temps et dans les relations.

Chacun des déficits cognitifs multiples provoque une atteinte significative du bon fonctionnement social et professionnel:

a. Troubles du comportement et du contrôle de l'émotion : Au cours du temps, d'autres troubles peuvent apparaître : troubles du comportement (agressivité, gestes répétitifs et incohérents ....), troubles de l'humeur (tristesse, irritabilité..) et anxiété. Les centres d'intérêt se réduisent et une apathie peut s'installer progressivement (perte d'intérêt, indifférence...)

b. Modification de la personnalité : Le patient montre un changement de son caractère. Parfois, il va accentuer des caractéristiques typiques de sa personnalité, parfois il change complètement son comportement. La personne peut devenir très irritable, agressive et explosive. Aussi, la maladie peut provoquer une perte des convenances sociales et amener la personne à tenir des propos grossiers ou avoir des attitudes inconvenantes comme se dénuder ou se montrer familier avec des inconnus

c. Délires :30-40% des personnes ayant une maladie d'Alzheimer souffrent de délires paranoïaques et de persécution. L'agressivité physique et d'autres formes de violence peuvent se voir chez les déments qui présentent aussi des symptômes psychotiques.

A.4 La perte de la mémoire dans les différents stades de la maladie ; certaines formes de mémoire préservées

A.4. 1 D'abord, la mémoire à Court Terme (MCT) est touchée

La maladie se manifeste souvent, au stade initial, comme une amnésie progressive avec d'autres déficits cognitifs. Le déficit de la mémoire est d'abord limité à des actions ponctuelles de la vie quotidienne : se souvenir de ce qu'on a mangé pour le déjeuner, ce qui a été fait au cours de la journée ou e se rappeler un rendez-vous; il concerne d'abord des troubles de la mémoire immédiate, c'est-a-dire A Court Terme (MCT). Dans ce premier stade, le symptôme le plus commun est l'impossibilité d'acquérir de nouvelles informations et la difficulté à se rappeler les derniers événements, à cause des lésions de l'hippocampe (ANNEXE 2), la région responsable de la fixation de la mémoire;  la mémoire à long terme est conservée plus longuement. Ensuite, avec l'évolution de la maladie, la perte de la mémoire évolue aussi. Progressivement le déficit augmente et, petit à petit, ces troubles de mémoire se portent aussi sur le langage (aphasie), sur l'orientation et les mouvements (apraxie), la reconnaissance des objets (agnosie). Avec la progression de la maladie, même la mémoire à long terme (MLT) est atteinte et présente des troubles et des défaillances graves, soit atteinte de la mémoire épisodique, qui passe par l'hippocampe et permet de se rappeler les épisodes spécifiques de notre vie, devenant fragmentaire, soit atteinte de la mémoire sémantique (les connaissances et leur significations).

A.4.2 Si la mémoire épisodique est particulièrement atteinte, la mémoire corporelle et émotionnelle est préservée

Il y a des types de mémoires qui sont mieux préservées chez un patient Alzheimer: la mémoire procédurale et la mémoire affective.

La mémoire procédurale est aussi une forme de Mémoire à Long Terme. C'est grâce à elle qu'on peut se rappeler de façon automatique, comme se coiffer, manger. Les gestes sont retrouvés et utilisés inconsciemment pour l'exécution de ces procédures qui requièrent à la fois des compétences cognitives et motrices.

« Donc, s' il est aussi important d'éviter de mettre la personne malade en échec, en lui demandant des actes trop difficiles pour elle, qui mettent en jeu toute une suite de processus cognitifs complexes que ne peut réaliser un cerveau affaibli par la maladie, il est aussi important de l'aider à retrouver des automatismes oubliés, en initiant le mouvement, en lui laissant finir l'action et en augmentant la confiance en lui »1(*).

Egalement pour la mémoire corporelle et émotionnelle: c'est-à-dire la capacité de se souvenir de ressentis agréables ou de peur et d'émotions. La mémoire affective a comme centre névralgique l'amygdale qui reçoit des informations par deux circuits (thalamique et cortical) (ANNEXE 2). Il a été découvert qu' à côté du trajet thalamus-cortex- amygdale dans la transmission des stimulus, il y a un lien direct entre le thalamus et l'amygdale, qui fait qu'un stimulus peut déclencher une réponse sans l'intervention du cortex (J. LeDoux, 1996). L'apprentissage affectif peut donc être effectué sans la participation des systèmes de traitement plus élevés du cerveau. Cet aspect a des implications importantes pour le malade Alzheimer, ses thérapies, notamment l'Art-thérapie, ses relations affectives et émotionnelles. Les émotions, en fait, selon des recherches neuroscientifiques, laissent des marques indélébiles dans le cerveau : même quand les souvenirs disparaissent, les émotions qui leur sont liées demeurent.2(*) Les experts ont observé des patients avec des formes sévères d'amnésie et, même si ils étaient incapables de se rappeler une parcelle minime d'un film vu dernièrement, ils évoquaient longuement les émotions provoquées par le film. Il est nécessaire de tenir compte de ces résultats pour aider un patient Alzheimer: la mémoire est détériorée, il ne se souvient pas de ce qu'il a fait 10 minutes avant, mais il conservera la mémoire de la belle émotion d'un geste affectueux ou d'une expérience de plaisir. Inversement, si le malade est maltraité, avec mépris et peu de respect, le souvenir de l'épisode reste même si sa mémoire ne fonctionne pas.

A.5 La thérapie pharmacologique doit toujours être intégrée dans un réseau de soins à support psychosocial

Une certaine stabilisation des fonctions cognitives peut être observée avec l'administration de substances cholinergiques, capables d'augmenter la concentration d'acétylcholine dans la synapse nerveuse, et, donc, d'optimiser la transmission synaptique. Les traitements visent à accroître la neurotransmission cholinergique, en permettant de freiner efficacement les ravages de la maladie à un stade précoce

( B.Dubois, CHU Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris) .

Les symptômes comme l'anxiété, la dépression, fréquents au cours de la maladie, seront traités par un entourage « adapté » ; si les troubles le nécessitent à un moment, un traitement antidépresseur ou anxiolytique à demi-vie courte peut être instauré. Cependant, les scientifiques conviennent que les traitements les meilleurs restent les soins psychosociaux, associés à plusieurs formes de thérapie, notamment pharmacologique, mais pas uniquement. Grâce à la collaboration entre le patient, la famille et les structures sanitaires spécifiques, il est recherché

- La stimulation : par des activités de socialisation, artistiques, ergothérapeutiques. Une grande attention est également accordée à la "thérapie des souvenirs», c'est-à-dire le traitement destiné à maintenir active la capacité de revisiter des événements anciens. Il y a une forme de psychothérapie cognitive dans ce but - La présence d'un entourage facilitant la qualité de vie du patient et de ses relations est très important, soit en famille soit au sein d'un établissement, à la journée, en accueil de jour, ou en permanence en EHPAD

A.6 Une forme particulière de la maladie d'Alzheimer est Le SYNDROME DE BENSON

L'Atrophie Corticale Postérieure (ou syndrome de Benson) est une affection dégénérative rare distincte de la maladie d'Alzheimer classique. Elle est caractérisée par une altération initiale de la vision, puis une évolution vers la démence. L'autopsie des malades révèle des lésions identiques à celles de la maladie d'Alzheimer, d'où son nom : variante visuelle de la maladie d'Alzheimer Les patients développent progressivement une agnosie visuelle associative, une désorientation topographique, une simultagnosie , des troubles de la lecture, une agraphie spatiale, une aphasie optique, une extinction visuelle. Á un stade avancé, on trouve l'apparition d'une cécité corticale, mais l'abolition totale est rare ; il y a une persistance d'une sensibilité à la lumière, aux tonalités chromatiques vives, aux mouvements. L'Apraxie, constructive, idéomotrice, d'habillage, est le symptôme prédominant dans cette pathologie. Á la différence de l'Alzheimer classique, le syndrome de Benson ne présente pas, au début, de troubles dans les facultés cognitives comme la mémoire, le langage, le raisonnement. Celles-ci sont longtemps préservées.

Au niveau comportemental, le patient montre toujours une conscience de ses déficits. Ainsi, même si son comportement reste toujours normal, parfois on peut remarquer des moments de dépression et/ou d'agressivité, la personne se rendant compte de ses déficits. SPECT, Scanner et IRM montrent une atrophie corticale occipito-pariétale et occipito-temporale bilatérale prédominant à droite. Les plaques séniles et la dégénérescence neurofibrillaire se retrouvent spécifiquement dans les régions cérébrales postérieures et parfois dans les aires visuelles primaires. Les traitements antidépresseurs et les aides visuelles sont indispensables à la prise en charge du patient Benson, pour les troubles de la fonction visuelle.

A.7 Altération de la qualité de vie difficultés expressives, d'autonomie et de socialisation chez le malade Alzheimer: Comment aider le patient

Les symptômes présents dans la pathologie amènent un changement de vie de la

personne. Le patient se trouve à renoncer, de plus en plus, aux conditions

essentielles d'une bonne qualité de vie. Le but le plus important de chaque projet

de santé est celui du bien être, lié à la qualité de la vie ; c'est-à-dire, suivant la définition de l'OMS,

«  Il s'agit d'un large champ conceptuel, englobant de manière complexe la santé physique de la personne, son état psychologique, son niveau d'indépendance, ses relations sociales, ses croyances personnelles et sa relation avec les spécificités de son environnement »3(*).

Les chercheurs s'accordent tout de même à considérer la qualité de vie comme un concept qui se structure le plus souvent autour de quatre dimensions 4(*)  :

Etat physique

Autonomie, capacités physiques

Sensations

Somatiques

Symptômes, conséquence des traumatismes ou des procédures

Thérapeutiques, doleurs

Etat psychologique

Emotivité, anxiété, dépression

Statut social

Relations sociales et rapport à l'environnement familial, amical

ou professionnel

Le patient atteint de la maladie d'Alzheimer vit l'altération de sa vie à travers différents éléments:

- Le manque d'autonomie et de liberté

- le manque d'une bonne forme de socialisation et de relation

- le sentiment que plus rien ne lui appartient

Cela contribue à donner à la personne un sentiment de «défaite», de «dévalorisation ». Les conséquences de ces troubles atteignent alors l'intégrité de l'être humain. De plus, la personne atteinte d'Alzheimer, parfois, ne ressemble plus à ce qu'elle était avant la maladie. Ainsi sa vie relationnelle est altérée de manière significative, elle s'isole  avec des altérations du langage, des difficultés expressives, relationnelles et communicatives qui augmentent de plus en plus. Si au niveau clinique il y a une perte de la Mémoire, la souffrance est un cri d'Identité ; la souffrance vis-à-vis de la société est la perte d'autonomie, perte de l'estime de soi et de l'affirmation de soi. La personne démente est dépendante et en perte d'identité.

En EHPAD, une multitude de facteurs peuvent contribuer à altérer sa qualité de vie. La plupart des entrées se font à l'initiative de la famille mais le consentement du futur résident est toujours recherché. L'institution, même si elle est bien organisée, peut être vécue comme une dernière demeure avant la mort. Pour cette raison la personne accueillie doit trouver l'environnement nécessaire à une vie convenable .

L'institutionnalisation du parent arrive lorsque la pression est forte, la fatigue persistante, surtout au stade sévère de la maladie. Les symptômes de la maladie nous cachent l'être humain. Il n'est pas aisé de trouver sa juste place en de telles circonstances . Une inversion des rôles se produit fréquemment : le parent devient l'enfant et perd son autonomie . Or, c'est par la capacité de l'entourage à s'adresser à la personne elle-même et non à la maladie, qu'il lui apporte un apaisement qui participe grandement à limiter la dégradation. La structure où j'ai effectué mon stage a dédié un livret explicatif aux familles des patients, pour communiquer le

plus efficacement ( ANNEXE 3)

La personne atteinte de maladie d'Alzheimer ou d'un trouble apparenté perd peu à peu ses capacités cognitives (mémoire, jugement, orientation...), mais, il reste une capacité longtemps préservée : la capacité à exprimer et à éprouver des émotions, liée à la possibilité d'une mémoire affective. C'est par ce pôle émotionnel, en amenant des actions qui lui donnent du plaisir, qu'on peut entrer en communication le plus efficacement avec le patient Alzheimer, aussi bien en famille que dans l'EHPAD. L'art-thérapie exploite ces capacités. Ainsi, l'activité artistique, stimulant la vie émotionnelle et le plaisir, se présente comme un outil de relation, d'expression et de communication, qui peut être bénéfique à ces personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer.

B. LE PLAISIR ESTHETIQUE ET LE POUVOIR DE L'ART POUR LE BIEN ETRE DE LA PERSONNE : LES ARTS CORPORELS

B.1 L'Art et le plaisir esthétique peuvent contribuer au bien-être

L'art est un idéal de vie.5(*) Il est une activité qui aide l'homme à exprimer son idéal du Beau6(*). Le Beau amène la personne vers un pur « plaisir esthétique », lequel donne, d'abord, une sensation agréable ainsi qu'une particulière « gratification sensorielle et artistique ». L'impact sensoriel que produit l'oeuvre d'art implique une réaction physiologique et psychologique qui peut amener la personne vers un élan corporel, vers une action et une expression artistique.

Le pouvoir et les effets de l'art, grâce à la puissance du plaisir esthétique, sont exploités pour le bien-être et la santé du patient et pour améliorer sa qualité de vie. L'être humain s'adapte au monde qui l'entoure, mais il est heureux lorsque le rapport entre la bonne santé et le bien-être est harmonieux et en fonction de la personnalité de chaque être humain.

La bonne santé est le bon fonctionnement des organes.

Le bien-être est un bon accord entre ce que l'on est, la personnalité, et le monde extérieur, un fonctionnement harmonieux du corps et de l'esprit .

L'être humain peut donc tendre au bien-être par les sensations de bonheur que lui procure l'Art, par son pouvoir expressif et relationnel.

B.1.1 Le pouvoir expressif et relationnel de l'Art, des Arts Corporels en particulaire, a été mis en évidence dans le théâtre grec, en philosophie et dans la psychanalyse

Aristote voit dans la tragédie le pouvoir expressif de l'Art : la catharsis, c'est à dire la

purification des fortes émotions par leur abréaction soit dans le public soit dans les acteurs.

Dans la tragédie, on décrit des évènements pleins de passion, sous forme dramatique, en faisant agir directement les personnages. Par le mécanisme psychique de l'identification, le public se sent lié au vécu émotionnel du personnage, en s'identifiant à celui-ci. Dans le film « Cinema Paradiso » du

sicilien Tornatore, l'attention est portée sur la magie du cinéma avec la

participation chorale des spectateurs, jusqu' à éprouver de fortes émotions, comme les pleurs. Déjà dans la Grèce Classique, il fut observé et mis en évidence ce lien particulier entre les spectateurs et entre l'acteur et le public ; Et déjà, dans le monde grec et latin, la musique, le théâtre et d'autres formes d'Arts Corporels étaient exploités pour leur pouvoir expressif salutaire, comme le montre la catharsis. Dans les traditions médicales du Moyen-âge, la Tarentelle, danse et musique entraînante et cathartique, était prescrite en Italie pour guérir de la piqûre de la tarentule. L'écoute de la tarentelle procurait aussi un ressenti qui reliait les participants dans une résonance réciproque.

Au XIX siècle, avec l'esthétique romantique, le pouvoir de l'Art est sa « résonance esthétique ». Il s'agit d'un état mental qui privilégie le ressentir (pathos) en valorisant les vécus fusionnels de l'âme humaine en communion avec la nature. Ce lien sera repris par le philosophe de l'Art Robert Vischer (1873), selon lequel l'Art est une forme d'identification sentimentale avec les forces de la nature, obtenue grâce à une profonde sympathie entre le sujet et l'objet.

Mais qu'est l'Esthétique ? Esthétique vient de « esthésie », connaissance sensible, c'est-à-dire par les sens. C'est depuis Alexander Gottlieb Baumgarten, philosophe allemand, que l'esthétique s'occupe soit de la connaissance sensible soit de la théorie du Beau. Et pour la philosophie romantique, c'est par le vécu corporel, avec ses sensations physiques qu'on peut exprimer notre jouissance du Beau. Dans l'expérience esthétique, il s'agit donc de projeter, dans l'objet que capture notre attention esthétique, des émotions proprement humaines et donner ainsi « signification et passion » aux choses.

Freud aussi mit en évidence ce phénomène. Dans son écrit, « Le Moïse de Michel-Ange »  (1914), il analyse ses ressentis suscités en contemplant une ouvre d'art, la sculpture de Michel-Ange « Le Moïse », exposée à l'église `S.Pietro in Vincoli'- Rome. Il s'agit d'une syntonie entre les caractéristiques esthétiques formelles de la sculpture et des vécus émotifs du sujet récepteur, qui peut se réfléchir en lui, en donnant « signification et passion » : ses passions, par un mécanisme de projection.. Á la production artistique, l'auteur a dédié un autre écrit , «Un souvenir d'enfance de Léonard de Vinci (1910) », où il va analyser comment il s'agit d'une obscure poussée pulsionnelle qui vient de l'inconscient à évoquer un besoin d'expression de créativité artistique, par le mécanisme de sublimation.

Rayonnement et ressentir sont deux termes pour exprimer le pouvoir expressif et entrainant de l'Art. Ressentir est un terme qui amène au concept de résonance : résonance esthétique, par le plaisir esthétique et sensoriel, résonance émotive, entrainante, comme dans l'expérience de Freud au rayonnement du Moïse de Michel-Ange, de la tragédie grecque et de la tarentelle.

B.1.2 Les Neurosciences vont à la découverte des fondements neuraux de la résonance esthétique.

Aussi les neurosciences ont dédié leurs recherches au phénomène artistique et aux phénomènes de résonance qui se développent au niveau cérébral lorsqu'une personne est en contact avec une oeuvre d'art, en exploitant la découverte des neurones miroirs, un groupe des neurones moteurs du cortex prémoteur ayant une fonction de réfléchissement.

L'identification de ce type de neurones au cours des années 1990 est due à l'équipe de Giacomo Rizzolati, de la faculté de médecine de Parme.7(*) Les neurones miroirs désignent une catégorie de neurones moteurs capables de s'activer et d'entrer en

résonance si stimulés par les sens, c'est-à-dire lorsqu'un individu exécute une

action ou lorsqu'il observe chez un autre la même action, ou même lorsqu'il imagine une telle action, d'où le terme miroir (ANNEXE 1). Le professeur V. Ramarchandran, une autorité dans le domaine, les appelle neurones empathiques, car ils jouent un rôle dans l'empathie et dans sa forme plus primitive, le phénomène de la contagion émotionnelle et les effets de masse. De même, ils ont un rôle très important dans les phénomènes de résonance esthétique. Soit dans l'expérience artistique, ou simplement contemplative, au rayonnement de l'oeuvre d'art et au contact empathique avec les ressentis des autres on active un réseau de circuits neuronaux dans le cortex et dans les structures sous-corticales de l'émotion et du binôme plaisir/déplaisir, agréable/ désagréable. Tout d'abord, le phénomène a été retrouvé à l'observation d'oeuvre s d'art figuratif, où les nouvelles recherches ont mis en évidence les mécanismes neuraux fondant le pouvoir des images par le système des neurones miroirs, c'est-à-dire un ressenti corporel. Selon les chercheurs on va confirmer les considérations philosophiques sur l'expérience esthétique qui est résonance corporelle et émotionnelle avant d'être cognitive : le système miroir permet de simuler l'état émotionnel de l'image artistique dans notre cerveau, au delà de la mise en oeuvre de réseaux de neurones cognitifs complexes et sophistiqués, au delà du raisonnement. Donc, un ressenti et une action ensemble, activent les mêmes neurones. Les auteurs citent une oeuvre du peintre Le Caravage,  « L'incrédulité de saint Thomas », comme exemple de résonance en cas de sensations tactiles8(*) (ANNEXE 1)

Dans la danse, il a été souligné que plus notre répertoire moteur et expérientiel est riche, plus intensément nos neurones miroirs sont activés (Calvo Merino B., 2005, Institute of Movement Neuroscience, University College London). Il a été encore avancé que l'éloignement entre la zone principale des neurones miroirs et celle de l'hippocampe pouvait suggérer qu'une communication bien conduite pourrait, par empathie, influer bénéfiquement sur les troubles psycho-comportementaux des patients atteints de la maladie d'Alzheimer, grâce à un ressenti corporel qui prévient l'activation des circuits neuronaux des fonctions associatives cognitives supérieures 9(*). []

B.2 L'Art-thérapie va exploiter le potentiel bénéfique de l'Art

B.2.1 L'art-thérapie naît pour aider les personnes en état de souffrance

L'art-thérapie naît et s'épanouit surtout dans la moitié des années 40, dans des pays comme la France, l'Angleterre, l'Allemagne et les Êtas Unis, où il y avait un air de rénovation dans les cadres de la psychologie, de la psychiatrie et de la pédagogie.

Déjà, les études des dessins d'aliénés ont le mérite d'avoir associé médecine et art. Vers la fin des années 30, la pédagogue Edith Kramer observait les effets positifs de l'activité artistique sur les enfants expatriés d'Allemagne, victimes de violence et de persécution par le régime nazi, grâce à la possibilité donnée

d'expression des besoins, désirs, angoisses. Par la création artistique, donc, le patient s'immerge dans une activité agréable, qui rend plus facile la résolution de ses propres conflits. Il développe un fort sens d'identité, «connait soi-même». L'art-thérapie, dans ce cas, est un processus de soin qui amène la personne vers un

cheminement de bien-être.

Art, donc, comme un moyen potentiel de thérapie. Depuis les années 60, l'activité artistique devient un élément important de l'activité thérapeutique psychiatrique, où l'art-thérapie trouve un domaine de pratiques très important après la clôture des instituts de réclusion et l'épanouissement de milieux dans lesquels des nouvelles méthodologies vont être activées, y compris l'art-thérapie. Au fil des ans, ses domaines d'application vont s'étendre: toxicomanes, malades du sida, de cancer, enfants et adolescents à risque, malades atteints de la maladie d'Alzheimer.

Mais, plus précisément, qu'est ce que l'art-thérapie ?

«L'Art -thérapie est l'exploitation du potentiel artistique dans une visée humanitaire et thérapeutique» (AFRATAPEM.).

B.2.2 L'Art-thérapie s'adresse aux parties saines de la personne

« Être vivant, c'est avoir quelque chose qui fonctionne. L'art-thérapeute, à la différence d'autres thérapies, par son moyen artistique qui touche aux profondeurs de l'homme va considérer cette partie qui fonctionne et l'aider à se développer: `l'art-thérapie s'adresse aux parties saines de la personne ».( R.Forestier)10(*)

Il ne s'agit pas, donc, de soin tel qu'on peut l'entendre dans un lieu médical.

Elle s'adresse aux personnes qui, suite à un traumatisme physique ou psychique, souffrent de troubles de l'expression, de la communication ou de la relation, mais la méthode consiste à créer les conditions favorables au dépassement des difficultés personnelles.

L'Art, associé à l'esthétique, à la beauté, au plaisir et à l'émotion ressentie, permet une communicabilité directe, spontanée, instinctive par l'utilisation des couleurs, des mouvements, des musiques, d'images, sans forcement besoin de l'intellect ou de la fonction cognitive. La production artistique prend sa valeur juste grâce au plaisir qu'elle provoque et à la signification qu'on lui donne.

La sensibilité, le goût, le plaisir et l'émotion deviennent des éléments fondamentaux dans l'exploitation de son potentiel, en rapport avec les aspects caractérisant l'art, c'est à dire la créativité et l'expressivité. L'activité créatrice est une poussée liée à une tension physique, spirituelle et émotionnelle, provoquée par un stimulus intérieur et extérieur: un sentiment, un souvenir, une image, une musique, une oeuvre d'art. En un mot, une chose qui, avec son pouvoir entraînant crée une tension et amène à réaliser quelque chose, à l'expression créative pour se dégager de cette tension. Musique, danse, théâtre, arts plastiques sont des formes artistiques différentes qui donnent une possibilité d'expression de créativité. Ces aspects impliqués dans la nature humaine expriment le potentiel thérapeutique de l'Art. L'Art peut aider la personne à raviver sa qualité existentielle. Il s'agit, alors, de restaurer, en exploitant au maximum des fonctions défaillantes, mais existantes et oubliées ; rééduquer pour l'amener vers un processus de reconnaissance de sa dignité et de sa valeur ; raviver, stimuler l'énergie motrice avec vigueur. La danse ravive l'énergie motrice avec l'entrainement de la musique et l'élan corporel peut devenir élan existentiel. Pour arriver à ce but, l'exploitation de l'Art doit donner au sujet la possibilité de se vivre non comme objet malade, mais comme un homme avec une maladie et, également, des parties qui fonctionnent. Il devient important, alors, de considérer ces parties qui fonctionnent du sujet, de valoriser ces parties cachées, mais encore vive et puissantes, de l'aider à se développer.

B.2.3 «Le BON Le BIEN Le BEAU» sont les trois B liés au bien-être de la personne et au phénomène artistique

La nature et le travail qui émergent dans l'activité artistique se rejoignent dans le concept de phénomène artistique. Celui-ci concerne « ce qui est observable » et qui par sa captation peut nous conduire vers des intentions, actions et productions artistiques.

Selon le modèle conceptuel de l'École d'Art-Thérapie de Tours AFRATAPEM, les fondements théoriques de l'activité artistique sont les concepts de Bon, Bien et Beau.

Le BON se réfère à la qualité existentielle de l'être humain.

L'être humain, depuis sa naissance, doit satisfaire des besoins et des désirs pour tendre vers un épanouissement: besoins du corps et désirs de l'esprit. Si le besoin répond à un manque, le désir à une aspiration, tous les deux recherchent des gratifications qui amènent vers une bonne qualité existentielle. Puis, il développe ensuite son goût qui lui permettra d'avoir sa personnalité, d'être une personne. Ce développement se fait dans une quête du bonheur Le bonheur recherché se trouve dans l'intention d'atteindre un idéal esthétique, l'Art, qui répond à un besoin d'élévation de l'esprit. Le Bon est à associer à ce bonheur et c'est la recherche du bonheur par les belles choses qui amène aux beaux arts.

L'oeuvre d'art, permettant de ressentir les «belles» choses du monde intérieur ou extérieur, dégage une sensation agréable ; l'être humain se sent bien avec elle.

CONCEPT

FONCTION

CONCRETISATION

FAIT OBSERVABLE

BON

Réception / Réaction

Intention

L'expression

BIEN

Vouloir / Pouvoir

Action

La technicité

BEAU

Fond / Forme

Production

La réalisation

Soumise à l'apprentissage technique et à l'expérience, l'activité devient efficace en ce qu'elle répond à la volonté de l'homme et à son expression. Cette dernière passe par l'activité, qui requiert un comportement adapté avec le fait de savoir « bien » faire les choses. (LE BIEN). Il existe donc une relation entre la recherche du bonheur (LE BON), l'activité et la production artistique (LE BIEN). Le BIEN permet « le passage de l'intention pure à la production »11(*). C'est l'activité, l'action de faire. Si l'homme peut naturellement gesticuler, la maîtrise d'une technique aussi rudimentaire est indispensable dans une action, telle qu'artistique. Dans l'activité artistique à dominante expression corporelle, il permet l'autorégulation motrice et produit des sensations de bonheur. Le BEAU, ce qui suscite un plaisir esthétique, concerne la production artistique. Cela permet de déterminer si le rapport entre la forme et le fond est harmonieux et si les personnes éprouvent un plaisir esthétique. La forme se base sur ce qui plaît par ses aspects agréables et l'harmonie de ses éléments et de ses couleurs. Il s'agit de l'aspect objectif du plaisir esthétique. Le fond est relatif aux ressentis et à la résonance émotive que l'oeuvre suscite, à son pouvoir entrainant. Il s'agit de l'aspect subjectif.

INTENTION- ACTION -PRODUCTION sont, donc, les principes pratiques de

l'activité artistique, fondamentaux, pour déterminer le phénomène artistique.

B.2.4 ART I et ART II

L'Art, grâce à ses types d'activité divers, s'adresse à différents publics et contextes. D'où la distinction entre ART I et ART II.

L`Art I est dirigé vers le geste archaïque; la recherche est orientée vers la gratification sensorielle, spontanée et immédiate. La personne est poussée par son instinct, évolue vers une action volontaire esthétiquement brute. Dans ce cas, même le corps est utilisé de manière globale, il ne suit pas des règles, des techniques et des directives précises, mais il se meut librement et de façon désordonnée, en créant toutefois une action volontaire orientée vers le plaisir sensoriel. Un exemple peut être donné par l'image suivante: mettre les pieds dans

le sable, sentir la sensation agréable en le touchant et créer des mouvements corporels qui dessinent des formes artistiques sur sa surface.

L'Art II, au contraire, propose une activité artistique organisée. Les gestes corporels ne sont plus archaïques, mais plutôt précis, ordonnés et élaborés. Ici est nécessaire l'utilisation de la technique, pour savoir bien faire les choses. Par exemple, avoir l'intention de créer un tableau de sable avec des formes et des dessins esthétiquement élaborés, implique la connaissance d'une technique précise pour une bonne réalisation de l'oeuvre.

Le corps est toujours l'outil d'expression, dans l'Art I comme dans l'Art II.

Cependant, si dans l'Art I l'expression du corps met en évidence son aspect global et anarchique, dans l'ART II l'expression corporelle est ordonnée et spécifique, selon la forme d'art et la technique utilisées. Le corps devient le médiateur fondamental lors d'un passage de l'Art I à l'Art II, puisqu'il permet de passer du geste plus archaïque et instinctif au plus fin et élaboré, mais aussi de changer de façon d'agir et de produire l'activité artistique.

Dans les cas les plus lourds de prises en charge en art-thérapie, on peut utiliser une activité artistique selon le modèle d'Art I.

B.2.5 Interaction corps/ esprit par la danse : L'opération artistique se déroule par ses différentes étapes

L'opération artistique est la manière artistique de mettre à jour l'esthétique. L'organisation implique la captation, l'intention, l'action et la production artistique12(*) et se déroule comme suit :

Avant la phase 1 - Ce qui nous précède: l'élément culturel, social et le patrimoine d'une société.

Phase 1 - Existence d'une oeuvre d'art, chose artistique du monde, qui existe et rayonne: c'est un accident spatio-temporel. Ex : Une danseuse rayonne au regard d'un homme

Phase 2 - Rayonnement et Captation. Cette chose qui rayonne peut être captée, perçue. Ex : la danseuse m'attire

Phase 3 - Traitement archaïque de l'information. Elle est captée par l'être humain : elle devient une information qui est traitée de façon brute, archaïque: c'est la phase du traitement sensoriel de l'information, traitée par tous les mécanismes neurologiques et neurovégétatifs. Ce lien produit une réponse instinctive, sans médiation des fonctions cognitives. Ex. Une dame âgée, atteinte de la maladie d'Alzheimer, ne se rappelle plus le nom de l'art-thérapeute, mais

elle se rappelle les ressentis agréables lorsqu'elle dansait avec lui.

Phase 4 - Traitement mental sophistiqué de l'information: l'activité mentale, dans ses modalités psychologiques, s'impose aux réactions archaïques du corps physique. Les fonctions cognitives, comme la mémoire, les connaissances, les mécanismes de représentation qui permettent l'imaginaire sont opérants et déterminent une intention. Ex.: La chanson lui rappelle sa femme à la mer: envie d'accompagner la chanteuse avec la guitare.

Phase 5 - Poussée corporelle. C'est l'élan corporel donné grâce à la volonté et à l'intention. L'entraînement corporel produit une poussée naturelle à mouvoir le corps. Ex. il tape des pieds et des mains au rythme du flamenco.

Dérivé : Phase 5' le Contemplateur. C'est ce qui concerne la Réception, c'est-à-dire la contemplation artistique. Le spectateur est poussé activement par son attention et son mouvement vers la contemplation. L'inaction repose sur l'intensité de l'intérêt qu'il porte à l'oeuvre contemplée. Il ne faut pas confondre la phase 2 avec la 5'. Dans cette dernière, l'intention fait la différence ; c'est-à-dire qu'il y a l'intention de la contemplation. Ex. Des personnes immobiles fixent leur regard sur La Joconde de Leonard de Vinci.

Phase 6 - Utilisation d'une technique, d'un savoir-faire adapté, en fonction de la production voulue. Le corps est mis en mouvement sous l'autorité de la volonté et est tenu d'agir selon l'intention de la personne. Ainsi, s'instaure un mouvement qui va de la poussée corporelle (ph. 5) à la production, à la réalisation. C'est la phase de la technicité et du savoir-faire, qui implique la motricité, le bon fonctionnement du corps et l'organisation des mouvements.

Phase 7 - La production artistique. Il faut faire, ici, la distinction entre les productions des arts plastiques, la production musicale, les arts corporels (mime, danse, théâtre..). Ils peuvent être dominants ou associés. Dans les Arts Corporels le corps fait part de l'oeuvre en association à d'autres arts. Ex: art-thérapie à dominante de danse, ayant le chant comme phénomène associé.

Phase 8 - Traitement mondain de la production : regards critiques extérieurs pour valider la Production

Phase 1' L'oeuvre devient culture artistique

Représentation graphique de synthèse

1'

251654144

7

1

251653120

8

251657216251658240251656192251648000251650048251649024AVANT

251659264

2 5'

3

251652096

5

251655168 4

B.3 L'Art comme moyen de socialisation est Communication et Relation

L'être humain a toujours ressenti le besoin de communiquer son monde intérieur, utilisant le langage et l'expressivité comme formes de communication : besoin de communiquer avec les autres, d'entrer en relation avec le monde extérieur. « L'être humain est par nature un animal social », selon Aristote. Avec cette vision d'un homme par nature animal social se révèle la véritable essence de l'homme: un être, à sa racine même, relationnel, social et civique, qui se construit par rapport à l'autre: je suis dans l'autre, je m'exprime, je m'affirme par l'autre et

grâce à l'autre.

La communication est donc, sous toutes ses formes, vitale pour l'être humain, indispensable pour son bien-être et pour sa bonne qualité existentielle.

Cependant, l'Art n'est pas juste une forme de communication, c'est plus précisément un moyen de socialisation qui aide la personne à entrer en contact avec l'autre. Dans les cas où il y a des troubles de la communication (par ex. troubles mentaux lourds ou pathologies dans lesquelles sont présentes des difficultés de langage), l'exploitation de l'Art concerne son pouvoir expressif et relationnel.

Il faut une distinction entre Communication et Relation13(*).

Dans la première, il s'agit d'échanger des informations avec un autre, grâce à la médiation des fonctions cognitives. Communication et Relation ne sont pas forcément liées l'une à l'autre. Il peut apparaitre soit un simple échange d'informations entre nous et l'autre (communication), soit une situation plus singulière où aucune transmission n'est réalisée.

La Relation ne se vérifie pas au niveau conceptuel, mais par l'expérience sensorielle et émotionnelle. Il s'agit de ressentir ensemble, grâce au principe physique de la vibration par sympathie. Le principe de « sympathie » est ici entendu comme vibration simultanée des cordes que permet l'Art, par exemple la musique. En groupe, il consiste à ressentir ensemble son pouvoir entrainant dans le même temps. C'est le phénomène de la résonance : ressentir ensemble le plaisir de l'activité artistique, sa gratification sensorielle et sa puissance entrainante. Cette poussée est la fonction existentielle de l'Art. Sans elle, l'Art n'aurait aucun pouvoir thérapeutique.

La danse s'associe toujours à d'autres formes d'Art : la musique, le chant. Donc, son pouvoir d'entraînement et de relation est plus fort et puissant.

B.4 «Je ressens, je veux, je peux, je fais» : Affirmation, confiance et estime de soi par l'activité artistique

Si l'opération artistique a le point de départ dans l'impression sensorielle, la phase 4, l'intention, le « je veux », est le point de départ de la réalisation d'une oeuvre ou d'une activité Affirmation de soi, estime de soi et confiance en soi sont, dans le même temps, moyens et buts de l'Art dans une visée thérapeutique et humaine, ces buts peuvent se réaliser grâce à l'aide de l'art-thérapeute et de ses moyens artistiques, moyen dominant et phénomènes associés, selon une méthodologie adaptée à ces objectifs, par l'intervention du goût, du style et de l'engagement, qui sont concernés dans l'activité artistique.

Le goût va se lier à l'Affirmation de soi, car la personne, en exprimant ses goûts, ses intérêts, AFFIRME ses opinions, sa vision de la vie, mais surtout s'affirme elle-même. Affirmer ses goûts amène la personne à vouloir s'exprimer par une production artistique e l'engagement dans une production artistique (« je fais »), qui nous permet de la valoriser, implique une confiance dans ses capacités, donc, une confiance en soi même. Ce processus, qui aide la personne à renforcer l'image d'elle-même et de sa personnalité, contribue à renforcer son Estime de soi : « je peux ».

Cela signifie retrouver l'envie de raviver et de revigorer la qualité de la vie.

C. ART-THERAPIE A DOMINANTE DANSE ET EXPRESSION CORPORELLE DANS LE PROCESSUS DE SOIN AVEC LA PERSONNE AGEE ATTEINTE D'ALZHEIMER

C.1 Le pouvoir de l'Art et l'expérience esthétique sont à valoriser dans la vieillesse et chez les personne atteintes de démence

Est ce que l'intérêt pour la beauté existe encore dans la vieillesse? Et surtout, la personne âgée, en particulier le dément ou le malade, a-t-elle encore envie de la vivre, la percevoir et l'apprécier ou reste-t-elle repliée sur elle-même sans n'attendre plus rien?

Souvent on croit qu'il y a à la base de la personne âgée une incapacité à capter la beauté, comme s'il y avait un conflit entre beauté et vieillesse. Grâce à plusieurs exemples trouvés dans la clinique et dans le monde de l'art, il émerge un profil de la personne âgée, plutôt ouvert et curieux vers le monde extérieur et ses aspects esthétiques.

Il y a beaucoup de personnes âgées qui, lorsqu'elles se trouvent face à une belle oeuvre d'art ou à d'autres productions artistiques, ressentent des émotions qui touchent leur monde intérieur. Comme cela a été mis en évidence,14(*) ces émotions réveillent en eux un sentiment de plaisir vers la vie, plaisir qui paraissait assoupi.

Le plaisir esthétique permet à la personne âgée de mieux supporter sa vie quotidienne, souvent monotone ou difficile, en particulier pour les personnes malades.

La possibilité d'apprécier le plaisir du beau, au- delà de l'intégrité sensorielle compromise, peut compenser des sentiments de décadence physique et de perte de la beauté du corps liés aux changements du temps qui passe.

La beauté a aussi le rôle pédagogique d'aider la personne âgée à ressentir le plaisir, la jouissance et le réveil de ses émotions intérieures. La beauté a ce pouvoir de réveil émotionnel. La vue d'un beau paysage, l'écoute d'une belle mélodie peut aider la personne âgée à voyager vers son passé, vers ses souvenirs et à revivre les mêmes sensations et émotions vécues auparavant.

La beauté et le plaisir esthétique, avec cette puissance «nostalgique et rêveuse », amènent vers une sensation de paix intérieure, d'harmonie, d'intégration du Soi15(*).

Mais la beauté n'est pas juste une puissance de notre monde intérieur. Elle peut aussi créer chez la personne âgée une ouverture vers les autres, vers le monde extérieur. Elle donne à la personne âgée la possibilité de sortir de son isolement, de sa solitude. La personne, en fait, en ressentant du plaisir esthétique, éprouve aussi l'envie de le partager avec les autres, de partager son enthousiasme. Ainsi la signification de la beauté en vieillesse, exprime et réactive soit le ressenti émotionnel de la personne et son monde intérieur, soit une ouverture vers un monde extérieur qui casse son isolement et sa solitude. C'est en cela que réside la valeur de la beauté dans la vieillesse: donner la possibilité de se ressentir encore vivant, grâce à un réveil émotionnel et relationnel.

La personne âgée peut donc trouver dans l'expression artistique, soit sous forme

d'activité, soit de réception, un moyen qui va donner de la valeur et du sens à la vie. Cela reste vrai, même quand il s'agit de personnes malades.

Le malade, comme la personne âgée, a besoin d'un bel environnement, recherche

un ressenti harmonieux, compromis par les défaillances mentales et corporelles.

L'Art peut répondre à ce besoin et guider la personne vers la qualité existentielle. Il

est nécessaire, alors, qu'une énergie, une poussée motrice ou corporelle, puise dans la tension existentielle de la personne (le BON). Pour cette raison, l'être humain, et la personne âgée, malade en particulier, peut éprouver un manque lorsque l'art est absent dans sa vie.

L'expression artistique répond ainsi au besoin de produire selon un critère esthétique, qui se fonde sur une sensibilité pour le BEAU, un savoir ressentir les « belles » choses. C'est le goût qui concerne l'appréciation qualitative sensorielle des choses, c'est-à-dire que le corps physique est impliqué par les sens. Mais les expériences sensorielles passent aussi `au filtre' de la personnalité et des évaluations des expériences précédentes, qui amènent l'être humain à réagir quantitativement et qualitativement. La personne âgée, ainsi que le malade , pour sa sensibilité et potentielle capacité d'appréciation du beau, affirmant ses goût et ses intérêts personnels, peut être aidée à retrouver son patrimoine d'expérience et, donc, la poussée à stimuler l'énergie motrice, à raviver et revigorer sa qualité existentielle, sa valeur humaine. Il se pose, alors, la question de savoir si une personne âgée démente a la possibilité d'apprécier le rayonnement d'une chose et aussi la capacité à exprimer ses goûts et de produire quelque chose d'artistique ; en un mot, s'il est possible pour elle d'exploiter le pouvoir thérapeutique de l'art.

C.2 Démonstrations du pouvoir bénéfique de l'Art par des expériences d'Art-thérapie sur le patients Alzheimer

C.2.1. Les Arts plastiques permettent au patient de s'exprimer et d'éviter l'échec

Plusieurs expériences indiquent que les arts figuratifs et corporels (peinture, sculpture, danse..) dans la maladie d'Alzheimer peuvent être un outil précieux. Dans des cas plus lourds, l'Art I, art archaïque, est le seul possible, car basé sur le ressenti corporel et sur le plaisir sensoriel: Sentir le rythme musical, toucher par des actions de manipulation. Par exemple, avec les arts plastiques, tous les sens des patients peuvent être mobilisés:


· la vue : utilisation de formes, coloris, outils pour la mise en scène et la création de l'objet, les sculptures modelées


· l'ouïe : mobile sonore de certaines sculptures


· le toucher: la manipulation des matériaux


· l'odorat : parfums et senteurs de certains matériaux.

La perte progressive du langage et, donc, de la capacité de la personne de communiquer ses besoins, sensations, rend le patient isolé et anxieux. Il s'agit d'exploiter le pouvoir entraînant de l'Art, sous l'aspect relationnel: entrer en relation avec les autres par un ressenti commun. L'Art Thérapeute peut aider à s'exprimer sans paroles. Une possibilité est « l'Atelier de terre », c'est-à-dire par le modelage, les arts plastiques, le patient peut mettre en scène, avec l'aide de l'AT, ses besoins, sensations, émotions et trouver qui l'accueille, le comprend et l'accompagne. L'Arts plastiquez chez les malades de démence a été l'objet de nombreuses travails de l'AFRATAPEM.

C.2.2 L'Art améliore la perception de soi chez le patient Alzheimer : une Recherche Le but d'un étude conduite par des chercheurs de Naples16(*) sur un groupe de

patients non lourdement atteints était de vérifier l'efficacité sur la perception de soi, par un programme basé sur l'observation et la description des oeuvres d'art, ainsi que de mesurer l'impact de ces observations et descriptions sur la capacité de communiquer leurs impressions et ressentis. L'hypothèse des chercheurs est une amélioration de l'état psychologique des patients après l'expérience. En parlant d'une oeuvre, il leur est plus aisé et plus surmontable de parler librement de ce qu'elle suscite et il n'y a pas besoin de se rappeler des dates, des noms, ce qui pour certains patients peut faire naître une sensation de malaise et d'échec. Cependant, ils devaient réussir à examiner les oeuvres et à communiquer avec les autres. Pour cette raison, les patients ne devaient pas être très lourdement atteints mais être capables d'utiliser leurs fonctions cognitives, sans obstacle à la communication verbale.

Le cadre expérimental des chercheurs de Naples a prévu la formation de 2 groupes de malades d'Alzheimer d'un stade modéré :

· Le premier, le groupe expérimental, le groupe A, avec l'aide des art-thérapeutes, s'est dédié, en plusieurs séances, à l'observation, au choix et à la description d' oeuvres d'art figuratif, avec des tableaux photocopiés. Les images, aux couleurs fortes brillantes et choisies avec des experts en la matière, étaient liées à la vie quotidienne et à des situations agréables, tels que les voyages, aptes à être expliqués facilement et à être associés à d'autres peintures et d'autres formes d'art (musique, danse, arts plastiques etc.)

· Le groupe B, au contraire, s'est dédié à des activités récréatives de loisirs et de jeux simples, avec un crayon et du papier

Les résultats ont montré que le premier groupe a sensiblement amélioré la perception et l'estime de soi par rapport au groupe B. Egalement, le programme fondé sur l'art a réduit le stress de l'entourage familier. Cette étude, a donc permis d'évaluer positivement l'efficacité de la simple observation des oeuvres à solliciter l'échange des besoins, des désirs, et des sentiments des patients ainsi que l'évocation des souvenirs.

C.2.3 Les ressentis peuvent stimuler le plaisir esthétique et dégager les émotions

De manière globale, ces résultats et d'autres tout aussi importants ont renforcé l'hypothèse que la contemplation d'oeuvres artistiques peut contribuer chez les patients atteints de la maladie d'Alzheimer à maintenir la capacité d'appréciation des qualités esthétiques des choses. C'est-à-dire que, devant les oeuvres d'arts, ces patients ont ressenti des sensations qui les ont envahis et unis. Elles ont été des gratifications sensorielles.

Il a été aussi constaté lors des expériences de prises en charge individuelles que le plaisir est une source de motivation et permet à la prise en charge d'évoluer et de solliciter des prises d'initiatives. L'artiste ou la personne qui a produit l'oeuvre s'est exprimé en faisant appel à des émotions. Plusieurs travails AFRATAPEM sur les malades d'Alzheimer , comme celles-ci, montrent que le ressenti esthétique fortement sollicité stimule les émotions qui finiront par se dégager.

C.2.4 Le pouvoir de l'Art peut raviver et stimuler la créativité et la mémoire émotionnelle : expériences avec l'Art visuel, la musique et la danse

Dans le travail thérapeutique avec la personne atteinte de la maladie d'Alzheimer,

en l'occurrence, l'utilisation de l'art sous ses diverses formes, pour stimuler le plaisir de ressentir, peut aider le patient à retrouver des vieilles émotions, en réactivant la mémoire émotionnelle et l'expression créative. « Un sentier alternatif pour récupérer le souvenir»17(*). Ce dernier aspect est la base de la thérapie cognitive de la réminiscence, qui passe par l'évocation des désirs, des sentiments, malgré le déficit de la mémoire épisodique.

Chaque individu a un potentiel créatif qui peut rester enfoui en lui sans possibilité d'être exploité. Cela reste vrai même pour la personne âgée et atteinte de démence, surtout si elle n'est pas encore aux stades avancés de la maladie.

La créativité est une activité de l'imagination. L'imaginaire est la capacité de représentation de formes, images, objets qui viennent de l'intérieur. C'est la capacité de dégager la fantaisie. Un groupe d'art-thérapeutes18(*) ont mis en évidence l'expérience entrainante de voir l'autre danser (phase 5' de l'Art opératoire), avec un programme de séances en groupe. Dans le programme, le groupe est divisé en 2 sous groupes, le groupe qui danse et un autre qui observe et puis qui parle des impressions éprouvées. « A la question : « `que ressentez-vous lorsque vous voyez danser un autre ? » Ils ont répondu  « Une ensemble de sensations, de souvenirs, des mouvements se réveillent dans mon corps. L'imagination se dégage » : l'impression reçue par le danseur provoque une action créative, par simple jouissance, en regardant l'autre.

D'autres chercheurs (University College London, 2005) ont mis aussi en évidence que toutes ces sensations vont se réactiver d'autant plus facilement qu'elles font déjà partie du patrimoine intérieur du sujet observant. C'est une réactivation d'énergie corporelle, de vieilles émotions et expériences qui ont donné du bonheur.

Ces recherches permettent d'émettre l'hypothèse d'un potentiel d'effet bénéfique chez les personnes atteintes de démence de l'Art à dominante danse/expression corporelle, pour ses caractéristique et sa nature.

C.3 Le corps, lien entre le but de l'idéal esthétique et les facultés motrices, est à valoriser chez le personnes atteintes de démence

C.3.1  L'expression corporelle fait appel aux émotions, aux sens et aux mouvements19(*)

Parmi les activités artistiques avec lesquelles travaille l'art-thérapeute, il y a les arts corporels.

Le corps est utilisé aussi dans les autres arts, mais dans les arts corporels (danse, théâtre, expression corporelle) le corps devient le protagoniste de l'activité artistique. Dans l'expression corporelle, par exemple, on utilise le corps pour l'expression du visage, la gestualité, les mouvements ; la voix pour l'extériorisation des vécus intérieurs. Le mouvement du corps dans la danse est lié au beau, à l'harmonie en suivant la musique. Avec des exercices inspirés de la danse et de la gymnastique qui cherchent

à développer harmonieusement la maîtrise et la souplesse du corps, l'Expression

corporelle est un art, c'est un type d'activité artistique dans lequel des techniques

précises associées à des expressions personnelles se conjuguent ensemble, en

utilisant le corps comme forme expressive et communicative. Grace à l'union

entre techniques utilisées et formes personnelles crées, les gestes deviennent

harmonieux et esthétiques.

Dans la danse « académique », l'exploitation de techniques spécifiques

prédomine sur la spontanéité et sur l'authenticité du geste personnel, en suivant

donc un code précis.

Dans l'expression corporelle, c'est le geste, sa spontanéité et son improvisation qui prennent la parole. Le danseur, dans ce cas, ne suit que son propre code intérieur.

Suivre son propre code, signifie faire appel à ses émotions, sens et mouvements. Le terme émotion vient du latin «emovere », mettre en mouvement. L'émotion, donc, s'exprime par le mouvement. Dans l'oeuvre « La maitrise du mouvement », Rudolf Laban, théoricien de la moderne dance, analyse la nature du mouvement, entendu par l'auteur comme une conséquence d'un impulse intérieur 20(*) : La personne ressent le désir d'exprimer cet impulse par le mouvement corporel, le désir de les décharger par le jeu des différentes forces corporelles et par l'alternance des gestes. Ainsi, le mouvement est exploité dans son aspect sensoriel.

Le regard: il adresse, il indique une intention, il influe sur le déplacement

L'audition: la façon dont le son (hauteur-intensité -timbre) est perçu, a des conséquences sur le déplacement

Le toucher :  exploration de l'espace et des autres, sensibilité à la pesanteur, jeux avec la matière (tissus etc...)

La kinesthésie: Ensemble des sensations de mouvement que nous procure notre corps, c'est-à-dire sensibilité nerveuse consciente concernant les muscles, les articulations, leur position, leur tension et leur mouvement. Les sensations kinesthésiques informent de la qualité de sa production en cours, l'accord entre ce qu'il veut produire, ce qu'il peut produire et ce qu'il a produit. Outre les sens qui mettent en relation le corps avec le monde extérieur (vue, goût, etc.), dans la danse et l'expression corporelle une fonction importante est effectuée.par les sens qui ont la perception du corps intérieur : les propriocepteurs, récepteurs sensibles aux stimulations causées par les mouvements du corps et des organes.

Le corps va donc être utilisé dans sa totalité, en donnant du sens à ce qu'on fait, à ses mouvements. En suivant la pensée des derniers experts des neurosciences (A. Damasio, J. LeDoux) la personne est entendue comme « entité psychocorporelle », il n'y a donc pas de scission entre corps et esprit, mais union entre eux. C'est grâce à cette union psychocorporelle que les émotions deviennent mouvements et que le mental se traduit en corporel.

C.3.2 Le Corps est l'intermédiaire entre le monde intérieur et le monde extérieur

Pour Carolyn Carlson, la danse est l'expression des puissances cachées : souffles mystérieux qui dessinent les mouvements du corps et portent l'âme à se révéler. Dans la danse, l'activité artistique se réalise au regard du monde.

C'est l'harmonie corps-esprit qui vient se montrer par le corps, le lien entre le but de l'idéal esthétique, le monde intérieur et les facultés motrices.

C'est une poussée corporelle liée au pouvoir entrainante de la musique.

Á travers les mouvements, les gestes, les possibilités motrices, vient s'établir une communication entre notre propre intérieur (nos images intérieures, nos émotions) et le monde extérieur. Le corps devient parole. L'action corporelle réalisée avec conscience imaginative va stimuler et enrichir la vie intérieure. L'expression consciente et claire de nos gestes corporels se traduit en expression claire de nous-mêmes, de nos vécus mentaux et émotionnels. Vient donc se créer un lien, une relation entre le monde intérieur et extérieur, car le corps en tant que structure ontologique est d'abord et avant tout la référence première de notre « être-au-monde » (Sartre, L'être et le néant )

« Mon corps est lieu de ma présence » ( Paul Valery).

La personne âgée et malade sent son corps plutôt faible, fatigué ; la danse, ainsi, avec ses mouvements corporels peut aider la personne à ressentir son corps non comme une vieille machine mais plutôt comme encore énergique et dynamique.

C.4 L'Art-thérapie à dominante danse et expression corporelle peut aider les non voyants, pénalité de la Syndrome de Benson, à s'exprimer

Le Syndrome de Benson est une forme de la maladie d'Alzheimer qui atteint en premier la vue. Une des personnes prises en charge avait ce syndrome. Alors, les personnes atteintes de déficits visuels graves peuvent s'exprimer avec maitrise et entrer en relation avec les autres par la danse et les autres arts corporels?

"Pour nous le contact avec les aveugles est intéressant parce qu'ils nous fait connaitre beaucoup de la sensibilité avec laquelle on écoute le rythme. Il semble que la musique leur offre des instruments de survie que nous ne pouvons pas saisir". Ils sont les affirmations d'un couple de danseurs, maitres de bal. Plusieurs recherches et expériences en atelier ont montré que la danse a un rôle très important dans les programmes pour améliorer l'état de bien-être des non voyants, par exemple les projets de l' «Unione Ciechi» d'Italie ; en France le projet d'ACAJOU, qui utilise une méthode de Laban sur l'équilibre kinesthésique.

Le projet d'ACAJOU est né d'une interrogation sur la façon dont les déficients visuels perçoivent l'espace, se le représentent et s'y engagent, et d'un désir de favoriser l'épanouissement de leur imaginaire corporel et spatial. Souvent, les ateliers sont ouverts aux voyants et déficients visuels, afin d'éviter tout enfermement sur le handicap et de favoriser les échanges entre des imaginaires différents. Il s'agit concrètement de rendre l'univers de la danse accessible à un public de non- et malvoyants.

Plusieurs ateliers de danse pour non et mal voyants ont été créés, penchés sur une approche sensorielle plus intense, grâce à des mises en situation dans des espaces riches en stimulation, soit en situation de bals collectifs, soit de couple. Dans le bal de couple, entre deux personnes peut aussi naitre une syntonie corporelle sans l'activité visuelle, en utilisant d'autres modalités sensorielles de manière amplifiée ; par exemple, le toucher auquel le non voyant est habitué est très important. Il est nécessaire de stimuler les sens proprioceptifs et de travailler sur l'orientation dans l'espace. Ces personnes apprennent de manière rapide l'orientation dans l'espace, même sans l'activité visuelle. Un étude de l'Université de Pise mit cela en relation avec les découvertes des neurosciences, en montrant, par la résonance magnétique fonctionnelle, que l' apprentissage par imitation est possible aussi chez les non voyants atteints depuis la naissance, grâce à la présence des neurones- miroir, qui fonctionnent au delà de la vue et par l'activation des autres neurones, en particulier les neurones échos importants pour la musique et la danse. Ces sujets aveugles qui écoutent le son d'actions (sonner la cloche, la plantation d'un clou, frapper à la porte, par exemple) ont dans leur cerveau une réponse des neurones miroir identique à celle des personnes qui voient les mêmes actions.

Pour la danseuse Marie Fux, il faut d'abord leur donner confiance dans l'espace qu'ils

ne pouvaient pas voir par l'activation des autres systèmes de relation à l'extérieur, mais surtout grâce à la confiance qui s'établit avec l'autre et avec eux- mêmes.

C.5 La pratique de la danse et l'expression corporelle comme acte volontaire dirigé peut favoriser l'affirmation de soi dans les personnes atteintes de démence

L'expression est provoquée par une impression. L'expression est ce qui caractérise un changement d'état visible, c'est une activité dans le monde extérieur. La pratique des arts corporels comme activité d'expression humaine volontaire dirigée vers le beau peut favoriser aussi l'affirmation de soi. Lorsqu'une personne s'exprime en arts corporels, lorsqu'elle danse, ou est captivée par le rayonnement d'une danse entrainante, source de jouissance pour elle et qui stimule des mouvements par sympathie, l'élan corporel amène à une gratification existentielle, par la recherche du plaisir esthétique. Rappelons que l'entraînement corporel, pour l'interaction corps-esprit, produit une poussée naturelle à mouvoir le corps (phase 5 de l' Art- Opératoire). La poussée est donnée grâce à la volonté et à l'intention ; elle est intention à extérioriser l'état d'âme. L'intention est le traitement sophistiqué de l'information, qui utilise non seulement le corps mais aussi l'activité mentale dans ses fonctions cognitives et modalités psychologiques.

« je pense, donc j'existe » (Descartes). Je veux, donc j'existe.

En ce cas, l'intention s'exprime par les arts corporels. L'acte met en route le corps. La production est l'objet qui résulte de cette volonté, cette intention et cette action. L'activité artistique relie corps et esprit : « j'ai fais ». L'intérêt pour l'activité artistique nous amène à un épanouissement de nos facultés. Tout cela permet d'envisager la restauration et la rééducation de capacités mentales défaillantes. La danse et l'expression corporelle donnent la possibilité aux personnes âgées, démentes, non voyantes, malades, de s'exprimer (fond), avec charme et style (forme). Il donne la possibilité d'une affirmation de soi à la personne âgée et la pousse à améliorer ses expressions par des mouvements bien faits et répondant bien au passage de l'intention à la production : Dans les villages de l'Italie méridionale, où sont ancrées des traditions populaires anciennes encore très présentes 21(*), les femmes âgées dansent souvent la tarentelle, avec des mouvements frénétiques, représentation des réactions d'une personne mordue par une grosse araignée. Elle est dansée en manière si agile et entrainante que les corps des vieilles femmes, même si rondes ou faibles, deviennent légers comme des libellules et ardents comme celui de jeunes amoureuses (harmonie fond/forme). Leurs corps dansants affirment ainsi leur présence ; les femmes anciennes s'imposent dans leur identité culturelle au regard enchanté des autres, « Je montre » (ph. 8 de l'Art Opératoire).

Sans sa fonction existentielle de communication/relation, l'Art n'aurait aucun potentiel thérapeutique. Dans les cas mentaux lourds et graves, où la communication est presque nulle, persiste tout de même la capacité à entrer en relation. Tout au long de ce travail, donc, nous allons tenter de répondre à l'hypothèse que la danse/expression corporelle peut favoriser l'implication relationnelle des patients, grâce au « ressentir » sa poussée entrainante, et, comme activité d'expression humaine volontaire dirigée, peut favoriser l'affirmation de soi aussi dans les patients démentes les plus lourds.

DEUXIEME PARTIE : UNE EXPERIENCE PRATIQUE D'ART THERAPIE AU SEIN D'UNE MAISON DE RETRAITE MEDICALISEE POUR PERSONNES AGEES DEPENDANTES

A. PRESENTATION DE LA MAISON DE RETRAITE MEDICALISEE «TIERS TEMPS SAINT MAUR»

A.1 TIERS TEMPS SAINT MAUR: Présentation de la structure, lieu de stage, et de l'équipe soignante

Les Résidences «TIERS TEMPS» sont des établissements d'hébergements médicalisés qui accueillent un public de personnes âgées de plus de 60ans dépendantes ou semi dépendantes au niveau de l'autonomie de la vie quotidienne et aussi des patients âgés avec différentes pathologies psychophysiques. Ces résidences font partie du groupe DOMUSVI, qui gère 74 résidences de ce type en France, et accueillent temporairement ou définitivement des personnes âgées en perte d'autonomie.

La Structure où s'est déroulé le stage pratique, TIERS TEMPS Saint-Maur, est composée d'un :

1) EHPAD = Établissement d'Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes

2) ACCUEIL DE JOUR

Dans l'EHPAD, se trouvent 140 résidents. Il s'agit de personnes qui présentent différentes pathologies dont certaines des maladies neurologiques : maladie d'Alzheimer ou autre démence, maladie de Parkinson... .

L'Accueil de jour permet d'accueillir, dans une structure encadrée et spécialisée des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ou de maladies apparentées. Ces personnes sont à domicile et viennent une à plusieurs journées par semaine. Cette structure permet une prise en charge spécifique aux troubles cognitifs. Elle permet, aussi, de soulager l'entourage familier et d'échanger avec des professionnels s'ils le souhaitent.

L'objectif de cet accueil de jour est, d'abord, de sauvegarder le bien-être de la personne par différentes activités mises en oeuvre par une équipe formée. Une AMP est permanente; la psychologue, l'ergothérapeute et la psychomotricienne interviennent ponctuellement. Le médecin assure le recrutement et le suivi des personnes accueillies.

L'équipe de l'EHPAD est pluridisciplinaire:

- Une directrice ; un service administratif ; 3 hôtesses d'accueil ; le service hôtelier 

- un médicine coordinateur ; un cadre de santé ; un psychologue ; 9 IDE (Infirmier Diplômé d'État) ; 9 AMP (Aide Médico- Psychologique) ; 18 AS (Aide- Soignant) ; une psychomotricienne ; une ergothérapeute ; une animatrice

Mon maître de stage a été la psychologue.

Les équipes soignantes garantissent la prise en charge médicale en intervenant et coordonnant l'ensemble des besoins médicaux et paramédicaux des résidents.

Le médecin coordonnateur veille à l'application des bonnes pratiques gériatriques avec l'ensemble de l'équipe soignante. Il travaille en bonne intelligence avec le médecin traitant du résident, son kiné, son orthophoniste si leur état le nécessite ; il prescrit et coordonne également l'action de la psychomotricienne et de l'ergothérapeute

A.2 Les objectifs thérapeutiques de la prise en charge des patients sont liés à leur « Projet de Vie »

La Résidence s'organise autour d'un projet d'établissement.

Si l'objectif général de l'établissement est le bien être des résidents, un projet d'établissement est décliné en projet de soin individualisé, qui permet de formaliser ces objectifs. Lors de l'arrivée d'un nouveau résident, l'ensemble du personnel définit au cours des 2 premiers mois ses besoins en fonction de son histoire de vie, ses désirs pour une prise en charge adaptée, et rendre sa vie dans la résidence la plus agréable possible. Une réunion d'intégration est programmée à l'issue de cette période avec le résident, sa famille. Elle permet d'affiner, de compléter ou de corriger le projet initial.

Le projet de vie comprend le projet de soin, le projet hôtelier, le projet d'animation..

Le projet de soin vise à prévenir et à traiter les maladies, il définit les modalités selon lesquelles l'établissement peut assurer les soins requis par l'état de santé et le niveau d'autonomie de chaque résident.

Le projet hôtelier concerne la restauration, ses goûts, ses allergies éventuelles.

Le projet d'animation s'attache à susciter et favoriser la participation aux sorties et aux activités au sein de la résidence soit à but thérapeutique, ludique ou culturel.

Le projet de vie, quant à lui, limite le désavantage social induit par la perte d'autonomie; il définit les objectifs et les moyens de l'établissement en termes de qualité hôtelière, d'hébergement et de vie sociale. Les logements peuvent être personnalisés. De plus, le résident a la possibilité d'inviter et de recevoir ses proches.

A.3 TIERSTEMPS SAINT MAUR et les 3 principes fondamentaux pour un projet thérapeutique efficace

Les résidences médicalisées disposent d'un personnel paramédical disponible en permanence pour les résidents. Ces établissements sont réputés médicalisés, puisqu'ils ont la capacité de faire face à la dégradation de l'état de santé et à la perte d'autonomie des résidents.

Le projet de soin individuel suit une approche humaine et professionnelle en considérant 3 principes:

- préserver l'autonomie par le respect de l'individu

- favoriser l'expression par l'écoute

- maintenir le rôle social par la participation: animation et vie sociale.

Une attention particulière s'attache à favoriser, maintenir et renforcer la synergie entre les ressources humaines (famille, aidants) et professionnels disponibles dans la résidence.

La finalité prioritaire est donc de garantir une bonne action sur la qualité existentielle

des personnes prises en charge, en favorisant l'intégration sociale; c'est à dire une bonne interaction entre eux et l'environnement dans lequel ils vivent, en donnant à ce public la confiance et l'estime de soi.

A. 4 Les activités proposées pour les résidents et l'importance des Ateliers d'Animation

La place de l'animation au sein du travail d'équipe est une question cruciale pour la vie dans la résidence. Destinée à favoriser l'intégration, la participation et le bien-être des résidents, l'animation est vécue comme le lien entre les différents secteurs d'activités, c'est l'affaire de tous. Des ateliers d'animation et création artistique (musique, chant) étaient organisés avec des rencontres en groupe, conduits par l'animatrice. L'animateur travaille en collaboration avec l'ensemble du personnel. Cela permet au résident de s'exprimer, d'agir, d'inscrire sa vie dans la continuité malgré la rupture que représente pour eux l'arrive en résidence. Le rôle de l'animation, donc, est fondamental dans le projet de vie des résidents dans l'établissement. Les animations favorisent la connaissance des résidents entre eux, permettent d'aiguiser leurs envies et de maintenir le lien avec l'extérieur, avec la participation à la vie sociale. Les activités, variées, auxquelles chaque résident est libre de participer, étaient organisées à la fois par les équipes de l'établissement et par des professionnels, en considérant les habitudes, les goûts et les envies du public concerné.

Outre les activités d'animation, une attention particulière était apportée aux activités thérapeutiques, proposées soit par la psychomotricienne, soir l'ergothérapeute, soit la psychologue.

B. MISE EN PLACE DU PREMIER ATELIER D'ART-THERAPIE A DOMINANTE DANSE/ EXPRESSION CORPORELLE A LA MAISON « TIERS TEMPS  SAINT-MAUR »

B.1 Mise en oeuvre du projet art-thérapeutique

B.1.1 Il s'agit de la première expérience art-thérapeutique à la maison, donc l'art-thérapie a été présentée au sein de l'Etablissement

A la Maison où s'est déroulé le stage, l'art-thérapie était peu connue, car l'arrivé d'un art-thérapeute, était prévue après mon expérience de stage. Il a donc été nécessaire de présenter et d'expliquer l'art-thérapie dans ses finalités, dans ses champs d'applications et méthodologies, en particulier, le modèle et la méthode de l'AFRATAPEM de Tours. Mise en place d'une réunion avec l'équipe soignante pour me faire connaître, aussi la possibilité d'illustrer les objectifs et la spécificité du travail de l'art-thérapeute, en particulier, la différenciation avec les autres professions d'aide ( par exemple le support psychologique) et la profession des animateurs, l'art-thérapie étant souvent confondue avec l'animation.

B.1.2 Le déroulement du stage a été organisé selon un cadre précis et défini

En accord avec les objectifs et les liens établis par l'École d'Art-thérapie

AFRATAPEM, le stage pratique, d'une durée de 140h, s'est déroulé entre juin et

août 2011. Il a été subdivisé en 3 phases :

a. La première phase, il s'agissait là d'une période d'observation d'une durée de 10 jours, en accord avec le maître de stage.

b. Puis, de la mise en oeuvre du projet, avec la prise en charge des résidents et la création des Ateliers d'Art-Thérapie.

c. La troisième et dernière phase, où il s'agissait de la clôture et du bilan du stage, orientés à l'évaluation des résultats atteints des prises en charge et d'un bilan général de cette expérience avec l'aval de mon maître de stage.

Il a été mis en évidence la possibilité de mieux comprendre l'importance de plusieurs facteurs, comme la capacité d'entrer en relation de confiance avec l'équipe soignante et d'une approche critique sur le travail thérapeutique; le respect des personnes prises en charge, de leurs besoins, de l'espace-temps, des potentiels et des limites de chacun.

B.1.3 Un temps d'observation a été nécessaire

Il a été retenu fondamentale une période d'observation, afin de mieux adapter mon projet art-thérapeutique en fonction du projet de l'établissement.

L'objectif du stage pratique était la prise en charge en art thérapie de personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer et il a été choisi une Maison de Retraite Médicalisée, un EHPAD ; donc, le premier objectif a bien été celui de la rencontre et de la prise de connaissance du travail des soignants dans ce type d'établissement, Ainsi, il était important d'observer comment la vie s'organisait au sein des structures, avec l'accord du directeur.

La participation, en outre, aux réunions de transmission, avec le personnel soignant, m'a permis de m'informer sur les patients et de prendre connaissance de leur état de base, de leur situation psychique et de leur évolution.

Ma participation aux animations a également été importante. Cela m'a permis de prendre contact avec les résidents, de signifier ma présence, de créer des liens avec eux et avec l'équipe de soin, ainsi de prendre conscience des capacités générales des patients et du type d'activité qui leur plaisaient. La participation à des groupes d'animation, surtout malades d'Alzheimer, m'a permis, en particulier, d'avoir une première approche sur les capacités d'expression corporelle de ces patients, sur leur modalité d'entrer en relation et en communication avec les autres, ainsi que les stratégies les plus adaptées pour stimuler leur participation. Par exemple, lors du premier groupe auquel j'ai participé, l'animatrice m'a montrer comment stimuler seulement dans le respect de leur besoins et déficits, en privilégiant le réveil de vieux souvenirs et non les discussions.

L'observation, c'est déroulée comme ceci :

- Fonctionnement, organisation et objectifs

- Équipe soignante et leurs fonctions thérapeutiques

- État de base des patients

- Objectifs et stratégies thérapeutiques pour la prise en charge des patients, fixés par l'équipe soignante

- Observation de la méthodologie suivie pour la prise en charge des patients

- Organisation des activités et des autres Ateliers.

B.2 Le projet art-thérapeutique en lien avec le projet global de la Structure

B.2.1 La réalisation du stage et de ses objectifs est en lien avec le projet de la structure

Après la période d'observation commence la deuxième phase du stage, c'est-à-

dire la phase dans laquelle mon projet thérapeutique prend forme, devient active. Ce travail a tenu compte autant de ma formation théorique donnée par l'École d'Art-thérapie AFRATAPEM que de l'orientation et des objectifs fixés ensemble avec l'équipe soignante et la psychologue, mon maitre de stage; cela en lien avec le projet global de la structure. La finalité prioritaire de «Tiers Temps Saint Maur », comme on a vu avant, est donc d'établir `un' projet de vie' personnalisé pour garantir une bonne action sur la qualité existentielle des personnes prises en charge, en favorisant la meilleure autonomie possible, la sortie de l'isolement social et en donnant à ce public la possibilité d'exprimer ses besoins, ses goûts, de prendre plus de confiance en soi et de renforcer l'estime de soi.

En cohérence et linéarité avec ces objectifs, j'ai organisé et dirigé mon travail art-thérapeutique.

L'objectif prioritaire que je me suis fixé était de « travailler sur la qualité existentielle de la personne », par l'exploitation du pouvoir de l'art.

B.2.2 Avec l'équipe soignante, on fait le choix des prises en charge individuelles 

Précisons qu'il existe différentes formes de prises en charge, la forme individuelle, le binôme ou le groupe. Après un premier projet de prises en charge individuelles et collectives, la durée très brève du stage s'est orientée vers un type de prise en charge seulement individuel. Sur indication de ma maitre de stage et de la coordinatrice AMP de l'accueil de jour, 4 personnes ont été prises en charge, chacune atteinte de pathologies différentes :

1) Mme L. 81ans = atteinte de la maladie d'Alzheimer

2) Mme C. 75ans = atteinte du Syndrome de Benson (forme particulière d'Alzheimer), non voyante

3) Mme B. 81ans = atteinte de la maladie de Parkinson avec démence

4) Monsieur E. 67ans = AVC (Accident Vasculaire Cérébral) avec troubles du langage et psychomoteurs

Les personnes prises en charge lors de mes interventions ont été choisies, selon différents critères : d'abord sur l'indication de l'équipe soignante, la connaissance de l'état de base de la personne et le premier contact de syntonie entre le patient et moi. Aussi, par l'intérêt et la curiosité du patient pour l'art en général.

J'ai donc proposé à chacun une prise en charge, un travail art-thérapeutique en cohérence soit avec la méthodologie et l'objectivité de l'art thérapie appris par l'École de Tours, soit avec les principes et les objectifs thérapeutiques fixés par la Structure, mais, surtout, en tenant compte de chaque projet de vie individuel.

B.2.3 Le protocole de prise en charge est soumis à une décision collective de l'équipe

Suite au diagnostic médical réalisé par le médecin, un protocole est établi. Ce protocole est l'ensemble des éléments qui constituent l'intérêt, la faisabilité et la réalisation de l'activité thérapeutique auprès des personnes. Une prise en charge en art-thérapie se réalise en plusieurs étapes, de l'orientation au bilan final, selon un protocole thérapeutique. Ce protocole commence par l'orientation des personnes à prendre en charge par l'équipe soignante.

Il faut que les objectif art-thérapeutiques soient en lien avec ceux de l'équipe soignante.

B.3 Le projet a inclus la mise en place de l'Atelier selon une méthodologie adaptée

B.3.1 Proposition de mise en place et organisation d'Ateliers d'Art-thérapie à dominante danse et expression corporelle

Après la période d'observation, j'ai présenté à ma maître de stage et au reste de

l'équipe soignante, au cours des réunions d'équipe, le projet de la mise en place et de l'organisation de l'Atelier d'Art-thérapie, dont la danse et l'expression corporelle étaient les arts dominants, le chant et le dessin étant des arts associés, expliquant ainsi la qualité thérapeutique de l'atelier d'art-thérapie, qui se distingue d'un atelier d'animation, par son cadre thérapeutique et un cheminement personnalisé pour chaque patient. En bénéficiant déjà de suivis individuels en Accueil de jour, par plusieurs Ateliers, conduits par les différents professionnels soignants (atelier mémoire, chant, musique, jeux de société..), il a pourtant été nécessaire de mettre en évidence ma spécificité : un lieu où pouvoir aider les parties saines du patient, expressives, émotionnelles, communicatives à se développer, avec l'exploitation du potentiel artistique. J'ai proposé et mis en place un Atelier d'Art-thérapie, un cadre thérapeutique et un cheminement personnalisé pour chaque patient, exploitant la danse et l'expression corporelle comme arts dominants, associés à d'autres formes.

Améliorer la qualité existentielle de la personne institutionnalisée implique, à mon avis, tout d'abord  de raviver le regard positif de la personne sur elle-même, la revaloriser en travaillant sur sa propre estime, sur sa propre affirmation et sa confiance. J'ai exploité, donc, le potentiel de la danse et de l'expression corporelle pour améliorer la qualité de vie de la personne, pour favoriser son bien-être. Ainsi, exploiter le corps, pour améliorer et enrichir la communication avec les autres, en contribuant, comme ça, à rejoindre un des objectifs prioritaires pour l'Institution, c'est-à-dire renforcer et améliorer l'intégration sociale.

B.3.2 D'autres phénomènes sont associés : musique, dessin

J'ai eu 4 prises en charge différentes. Avec eux, je n'ai pas toujours exploité ma spécificité comme dominante artistique. Voilà les raisons :

1) Le corps de la personne peut présenter de la fatigue et du coup ne pas avoir ni la force ni l'envie de s'activer, de bouger.

2) La personne, tout simplement, a plutôt l'envie de s'exprimer librement dans d'autres activités artistiques.

3) Pour rejoindre les objectifs fixés, dans le cheminement thérapeutique, il peut être nécessaire d'exploiter plusieurs et différentes techniques.

4) Dans certaines pathologies il n'est pas toujours possible d'utiliser la même activité et la même technique artistique.

Pour ces motifs, sur les 4 prises en charge, avec Mme C. et Mme L., j'ai utilisé la danse et l'expression corporelle comme arts dominants, mais j'ai stimulé à la participation Monsieur E. et Mme B. surtout avec d'autres moyens artistiques, c'est-à-dire la peinture et le dessin, la musique et le chant.

B.3.3 Un cadre thérapeutique est défini dans ses éléments

L'organisation de l'atelier et le cadre thérapeutique sont convenus en accord avec l'équipe soignante et ma maitre de stage. Cette organisation a tenu compte de :

Un lieu aménagé (l'atelier)/ Un temps organisé/ Une méthode/ Des outils artistiques

Pour le lieu de l'Atelier où je pouvais conduire mes séances, j'ai eu à disposition

plusieurs salles de la Structure. La salle de relaxation, la salle de l'accueil du jour ainsi que d'une petite chambre à côté de la grande salle de l'accueil du jour. Cette chambre est utilisée lorsque la personne ressent le besoin de dormir et de se reposer. Comme j'ai dit avant, j'avais 4 prises en charge, dont deux personnes résidaient dans la Structure. Avec ces résidents, les séances se sont déroulées dans leurs chambres. Leur propre chambre dans ce cas devenait l'atelier aménagé.

Le temps, c'est-à-dire la cadence, la durée et la fréquence des séances, les horaires fixés. Ils dépendaient de plusieurs aspects : la nécessité de maintenir les repères, respecter les horaires et les habitudes de chaque personne a été déterminant pour l'organisation du temps et du rythme des séances. En tenant compte aussi des ateliers d'animation auxquels mes prises en charges participaient, j'ai, donc, structuré mon « planning de travail ». Les séances art-thérapeutiques étaient d'une durée de 40-45 minutes poursuivies par une heure de bilan de séance, à raison d'une ou 2 séances par semaine, pour chaque patient.

Dans l'organisation du déroulement, il faut aussi décider quelle méthode utiliser avec chaque prise en charge, en définissant si la séance se déroule sous forme de jeu, de situation libre ou d'exercice. Ont été utilisées différentes méthodes, selon le contexte, le moment, les besoins et les objectifs. Par exemple, avant de commencer la séance, j'avais l'intention de dérouler celle-ci sous forme de situation libre, alors que la séance avait nécessité d'un déroulement qui différait pour être efficace et bénéfique. En comprenant ceci, j'ai dû adapter et changer mes formes et méthodes lors des séances qui suivirent. La même chose s'est passée ainsi pour l'activité artistique. Si la dominante, dans l'atelier, était la danse et l'expression corporelle, ce choix ne m'empêchait pas d'utiliser aussi d'autres phénomènes associés, dans mon cas, la musique et le chant, le dessin et la peinture abstraite. Tout ça dépendait du contexte, du besoin et des désirs du patient ainsi que des objectifs thérapeutiques, des cibles et des items remarqués pendant le cheminement des séances et du travail thérapeutique.

Les outils artistiques étaient liés à la méthode utilisée dans chaque séance. Grâce aux différents ateliers d'animations, je disposais déjà du matériel dont j'avais besoin (musique, couleurs, tissus, instruments musicaux).

B.4 Les Stratégies Thérapeutiques ont été personnalisées selon l'état de base du patient, l'intérêt, les objectifs et les moyens

B.4.1 Les stratégies ont été différentiées entre les 4 prises en charge

Les stratégies thérapeutiques sont les stratégies du travail adoptées par l'art thérapeute afin d'atteindre ses objectifs thérapeutiques (général et intermédiaires) pour chaque prise en charge.

Élaborer une stratégie thérapeutique veut dire cibler les mécanismes défaillants au regard de l'opération artistique, remarquant les sites d'action. Avec mes prises en charge nous avons exploité différentes stratégies, puisque je me trouvais face à différentes pathologies et déficits.

B.4.2 Elles sont relatives à l'état de base, aux objectifs, aux moyens artistiques utilisés, à l'intérêt artistique

Avoir des prises en charge différentes entre elles signifie ainsi avoir un plan thérapeutique différent pour chacun. La connaissance de l'état de base du patient est fondamentale pour établir un plan thérapeutique bien structuré. L'état de base est en relation avec les capacités physiques, cognitives et avec les maladies, les

déficits, le traitement médical.

Dès lors qu'une personne est indiquée par l'équipe soignante, des entretiens

préalables sont organisés pour obtenir les connaissances nécessaires. Les connaissances nous sont procurées par l'équipe soignante, les médecins, mais aussi par le patient lui-même et permettent d'établir des objectifs. Ceux- ici sont fixés en lien avec l'objectif de soin fixé par le médecin coordonnateur.

Entre les 4 prises en charge, sur 2 cas, Mme B. et Mme L., qui avaient des pathologies plutôt lourdes, il a été possible d'effectuer un travail d'art-thérapeutique suivant le modèle Art I, donc une stratégie selon ce modèle et dans lequel il faut privilégier une modalité de contact basé sur la relation plus que sur la communication.

De Mme L., malade d'Alzheimer, et de Mme C., non voyante et atteinte de Syndrome de Benson, nous parlerons ensuite de manière plus détaillée.

Mme B. avait été indiquée pour son état dépressif qui allait aggraver un cadre neurologique parkinsonien déjà très avancé, avec le souhait que l'entrainement dans une activité artistique puisse réveiller un intérêt assoupi et raviver sa vie dans la maison. Mme C.et Monsieur E., au contraire, n'avaient pas de gros troubles cognitifs et ils pouvaient donc suivre un modèle Art II, plus élaboré. Monsieur E., malgré les troubles associés à l'AVC, manifestait déjà son goût artistique ; il s'agissait, alors, de stimuler d'autres aspects, l'énergie motrice, par exemple, et l'envie de participer, de s'engager dans ses intérêts, `la poussée à faire'.

B.4.3 Des moyens sont à mettre en oeuvre pour parvenir à l'objectif

Pour parvenir à l'objectif général, des objectifs intermédiaires peuvent êtres fixés et aussi des moyens imaginés. Ils vont servir de pont vers les objectifs généraux. Les objectifs intermédiaires vont cibler les mécanismes défaillants qui causent un blocage à la personne pour rejoindre l'objectif, qui cible les sites d'action.

Nous allons, donc, nous arrêter sur l'organisation des éléments, des techniques et des moyens artistiques, art dominant et phénomènes associés. Il faut que l'art-thérapeute s'adapte aux difficultés du patient, à son style, à ses goûts, à ses attentes, à ses limites, ainsi sur l'adoption de l'art dominante et phénomènes associés. Pour stimuler la créativité de la personne prise en charge, l'art thérapeute doit être ainsi créatif.

Si avec Mme C. et Mme L., j'ai utilisé la danse et l'expression corporelle comme arts dominants ( voir Etude de deux cas), j'ai stimulé Monsieur E. et Mme B. surtout avec d'autres moyens artistiques.

Avec Monsieur E., homme de 67ans, lequel, à la suite d'un AVC (Accident Vasculaire Cérébral) présente des troubles du langage et des troubles psychomoteurs, j'ai déroulé mon cheminement thérapeutique en utilisant souvent la musique et le dessin, des activités artistiques très aimées par Monsieur E. Même si, avec lui, j'ai plusieurs fois essayé la danse et l'expression corporelle, j'ai remarqué qu'il n'était pas intéressé par nos séances, au point de ne pas se souvenir parfois de nos rendez-vous. J'ai alors préféré diriger mon travail en utilisant d'autres techniques artistiques. De plus, ce patient n'aimait pas du tout la danse et, à cause de ses déficits psychomoteurs, ne présentait ni l'envie, ni la force de bouger son corps. Et cela créait un blocage psychomoteur, mais aussi un blocage sur la capacité de jouissance à la vue d'un autre danser. Malgré cela, j'ai continué mon travail avec lui, car sa situation de solitude dans sa chambre le conduisait vers une sorte d'ennui et d'insatisfaction envers sa vie quotidienne. Nous avons construit des histoires autour de certaines peintures crées par lui-même. À travers l'écoute des différentes musiques nous avons improvisé d' autres mélodies ensemble, en utilisant des outils présents dans sa chambre comme des

instruments musicaux. Nous avons créé des petits histoires autour de vieilles

chansons françaises. Tous ces moyens utilisés dans le cheminement thérapeutique

ont contribué à instaurer une communication, puis une relation entre lui et moi. Au début, nous avons eu des difficultés de syntonie communicative, syntonie qui, petit à petit, s'est développée. Notre point en commun, c'est-à-dire la sensibilité pour l'Art, nous a aidé à créer un lien entre deux personnes de générations différentes et de différentes nationalités. En utilisant le chant, la lecture de poèmes et de textes musicaux, nous avons stimulé son langage, faculté défaillante chez Monsieur E. Si au début, il montrait des inhibitions à chanter et à lire, petit à petit, il s'est laissé aller. Ainsi son langage paraissait plus fluide et clair.

La peinture et le dessin ont été exploités avec une autre de mes résidents, Madame B., femme de 81 ans atteinte de la maladie de Parkinson. Si avec Monsieur E., la syntonie communicative et relationnelle a grandi petit à petit, avec Madame B. une sensation de sympathie réciproque nous a aidé à vite établir notre relation, c'est-à-dire « l'implication relationnelle ». Cette sensation de syntonie lui a donné une confiance en elle et l'envie de partager de beaux moments ensemble. Madame B., indiquée par l'équipe soignante pour son état dépressif et apathique, au contraire de Monsieur E. ne montrait pas un intérêt particulier à l'Art. Je trouve qu'également dans ce cas, l'approche relationnelle et technique a bien contribué à conduire nos séances art thérapeutique et à entrainer Madame B. vers les activités artistiques lors de nos séances. Nous avons effectué, pendant notre travail, autre que la danse et l'expression corporelle, aussi le dessin et la peinture abstraite. A travers la danse, le dessin et la peinture, nous avons créé « l'oiseau du bonheur » (expression dite spontanément par Madame B. lors d'une séance de dessin). Ce sujet artistique lui a provoqué un entrainement particulier au point qu'elle-même proposait une attitude plus constructive vers notre travail, surtout dans les dernières séances.

B.5 La prise en charge en Art-Thérapie réalisée en plusieurs étapes de la Fiche d'Ouverture au Bilan de fin de prise en charge

B.5.1 Les premières séances ont permis la réalisation d'une Fiche d'ouverture

Afin d'exploiter aux mieux les connaissances médicales et paramédicales, l'art-thérapie doit donner une importance particulière à la bonne gestion des informations que l'atelier pourra lui procurer, à commencer par les premières rencontres.

Les premières séances m'ont permis une connaissance globale de la personne en m'aidant à compléter une Fiche d'ouverture.

L'état de base de la personne est défini par plusieurs éléments : Capacités physiques, Capacités intellectuelles, Déficits, Pathologies, Traitement médical.

Dans la fiche d'ouverture on tient compte :

- Des dispositions vers l' esthétique

- Des goûts personnels

- Des capacités relationnelles

Elle met en évidence les aspects fondamentaux et le but de la prise en charge.

B.5.2 La Fiche d'ouverture donne l'orientation

Si les informations recueillies auprès de l'équipe et du médecin ont été importantes et ont participé à la mise en place du projet, la première rencontre avec le patient m'a orientée tout autant. La Fiche d'ouverture est le début de la Fiche d'observation et présente les items théoriques de base sélectionnés ainsi que la motivation de

cette sélection, en permettant d'aller du général au particulier. Les objectifs

généraux et intermédiaires orientent le choix de ces items, en orientant l'activité.

L'utilisation de la fiche d'ouverture, dans mes différentes prises en charge, m'a permis de remarquer les éléments importants sur lesquels baser mon travail.

B.5.3 Une Fiche d'Observation et les séances ont permis l'élaboration de la prise en charge

Mes prises en charge ont été individuelles. J'ai utilisé, pour la compilation des informations relatives aux séances, la Fiche d'Observation, qui concerne les prises en charge individuelles. La fiche d'observation facilite notre travail art thérapeutique lors de nos prises en charge. Elle est, en premier lieu, une sorte de mémoire de chaque séance, composée de différentes rubriques, dont les généralités du patient (identification, raisons de la prise en charge...), phénomène artistique (intention artistique, capacités esthétiques,...), capacités de communication et de relation observées, les moyens utilisés, les bilans des séances. Elle est un moyen de contrôle et de vigilance de l'action thérapeutique (R. Forestier, Tout Savoir sur l'art-thérapie).

De plus, elle ne se présente pas toujours de la même façon, mais s'adapte selon la prise en charge et le contexte. Si l'utilisation de la fiche d'ouverture m' a permis l'orientation, la Rubrique de la Fiche d'observation m'a permis de clarifier les éléments élaborés et traités lors de mes séances et, par conséquence, m' a permis d'évaluer l'évolution de mes prises en charge. Cette évaluation est commentée avec la fiche de clôture, qui comprend une synthèse et un bilan de la prise en charge. C'est la troisième et dernière phase, dédiée à l'évaluation des résultats atteints de la prise en charge et à un bilan général de cette expérience avec l'aval de mon maître de stage. Il a été mis en évidence la possibilité de mieux comprendre l'importance de plusieurs facteurs, comme la capacité d'entrer en relation de confiance avec l'équipe soignante et une approche critique sur le travail thérapeutique; le respect des personnes prises en charge, de leurs besoins, de l'espace-temps, des potentiels et des limites de chacun.

B.6 L'observation et les outils de l'art-thérapeute ont permis la réalisation d'un cheminement thérapeutique

B.6.1 La grille d'observation permet le recueil des informations

La fiche d'observation est propre à chaque prise en charge. Celle-ci est élaborée en lien avec les objectifs thérapeutiques et intermédiaires. Elle regroupe des informations de base, comme la date, le repérage des séances, le rappel des objectifs, mais, plus, particulièrement, elle permet l'appréciation des observations relatives aux objectifs. Cette appréciation permettra d'évaluer l'évolution de la prise en charge. L'outil qui permet le recueil des informations relatives aux observations à apprécier est la `grille d'observation'. Elle recueille les items, ceux de base, ceux émergents petit à petit au cours du cheminement thérapeutique. En fait, pour la gestion des informations, il est nécessaire de considérer

- L'OBJECTIF THERAPEUTIQUE

- ensuite, le CHEMINEMENT thérapeutique adapté pour atteindre cet objectif, avec les SITES D'ACTION et les NIVEAUX d'ORGANISATION qui peuvent faire des cibles thérapeutiques

CHEMINEMENT= C

---T1----T2---T3------------------ETC-----------------------------> OG(Objectif Général )

Si nous considérons le déroulement temporel du cheminement thérapeutique, la mesure de ce temps s'effectue par les abréviations: T1 , pour la première séance, T2 , pour la deuxième...

B.6.2 Les Items sont fixés en lien avec l'état de base du patient, l'objectif général et le suivi du cheminement

L'item est la plus petite unité appréciable d'un Niveau d'Organisation(Tout savoir sur l'art thérapie). Lorsqu'ils sont quantitatifs, sont appréciés en mesure, nombre, temps (par exemple nombres de regards ou de verbalisations) ; lorsqu'ils sont qualitatifs, en termes progressifs (du moins au plus).

En connaissant l'état de base du patient, il est plus facile d'établir des items sur lesquels travailler, donc d'établir l'objectif général sur lequel nous voulons travailler et que nous voulons atteindre. L'item est retenu utile soit pour l'objectif général, soit pour le suivi du cheminement thérapeutique, car il nous aide à clarifier la direction à prendre à fixer des objectifs intermédiaires. Nous distinguons ici les objectifs généraux et intermédiaires qui orientent l'activité et le suivi du cheminement et qui sont localisés dans les sites d'action, c'est-à-dire où il faut travailler pour cibler des difficultés.

B.6.3 La notation des items, les graphiques et leurs cotations ont permis une évaluation objective de la prise en charge

L'item est aussi la base de l'observation et de l'évaluation. Il constitue le plus petit fait observable. Il apparaît comme expression pertinente d'une difficulté. Quand l'item n'est plus expression d'une difficulté, cela peut signifier que la difficulté est surmontée. Donc, la notation de l'item est l'élément qui permet d'évaluer, si une difficulté a été surmontée ou non.

C'est la pertinence du choix de l'item et sa quantification qui permettent l'évaluation de la prise en charge. L'évaluation est la comparaison des mesures du même item dans des situations similaires tout au long des prises en charge du patient 22(*) . De plus, l'évaluation nous donne la possibilité d'un regard objectif sur l'évolution du patient pendant son cheminement thérapeutique (ANNEXE 4). Les grilles des mesures, dans ce cas ici, sont fondamentales car elles permettent de bien clarifier l'évaluation du patient. 251664384

Si les fiches d'observation font partie de l'évaluation sur la cotation des items indiqués, le BAT1 est une autoévaluation faite par le patient : s'il trouve sa production belle (Beau), si il la trouve bien faite (Bien) et si il a envie de continuer (Bon). L'art-thérapeute recueille analyse ces cotations, apprécie leur cohérence en fonction de l'état de base du patient et les complète avec d'autres informations (BAT 2). Enfin le BAT3 est une synthèse des BAT. Le BAT3 permet de visualiser les résultats obtenus dans le temps. Ainsi, l'art-thérapeute peut se rendre compte des effets de la thérapie sur le patient et peut ajuster ses objectifs en fonction de l'évolution

Certains patients ne peuvent pas remplir le BAT1 soit qu'ils ne peuvent pas physiquement et l'art-thérapeute peut oraliser le bilan, soit qu'ils sont déconcertés et l'art thérapeute se repose essentiellement sur ses fiches d'observations. Pourtant, plusieurs modèles de BAT peuvent faire l'objet de modifications et d'adaptations selon les patients.

C. ETUDE DE DEUX CAS: MADAME C. ET MADAME L.

C.1 Madame C.

C.1.1 Anamnèse et état de base

Madame C. est une dame âgée de 75 ans, qui fréquente l'accueil du jour et présente le syndrome de Benson, variante de la maladie d'Alzheimer avec des troubles de la vue importants. Madame C. ne voit presque plus rien. Au début, c'était une cécité périphérique, bientôt devenue une cécité centrale. Madame C. souffre aussi de troubles psychomoteurs.

Le syndrome de Benson évolue vers un déficit de la motricité, en présentant une

rigidité musculaire accompagnée, souvent, par des mouvements involontaires :

gestes et mouvements saccadés et rapides. Présence également de troubles agnosiques. Madame C. présente des troubles de la perception des formes (agnosie aperceptive) et une difficulté dans l'association entre forme perçue et sa signification (agnosie associative). Elle a perdu aussi la fluidité du langage. Elle

perd souvent le fil de ce qu'elle raconte. Et elle se détériore de jour en jour.

A la différence des autres patients, ses facultés cognitives, comme le raisonnement, la mémoire à court et long terme sont préservées. A cause de cela, Madame C. vit sa situation en pleine conscience. L'anamnèse de Madame C m'a renseigné sur sa vie, son passé: avant le Syndrome de Benson, Madame C. a eu un cancer du sein traité par radiothérapie.

C.1.2 Le comportement général de madame C. a motivé son indication en art thérapie

Voici les raisons évoquées par l'équipe lors de la décision d'orientation de Madame C. vers une prise en charge d'art- thérapie :

1) Madame C., à cause de sa pathologie, a perdu son autonomie. Dans le petit fascicule écrit par elle-même avec l'aide de ses 2 orthophonistes, « Maladie d'Alzheimer, histoire d'une expérience », Madame C. exprime son vécu par rapport à la maladie : « j'aime et j'ai besoin de liberté ». La perte d'autonomie a provoqué en Madame C. une dévalorisation d'elle-même accompagnée par des épisodes dépressifs de plus en plus fréquents.

2) Son goût pour l'art en général, en particulier pour le chant et la danse, n'a pu s'exprimer à cause de sa maladie.

3) Madame C. a renoncé à ce plaisir et à ces moments agréables.

4) Son besoin de communication et de relation avec les autres, de partager avec eux des moments agréables est moins satisfait, car son côté dépressif et dévalorisant a provoqué un isolement et un repli sur elle-même : « j'aime le rapport avec les autres mais malheureusement je ne peux plus beaucoup communiquer » (Maladie d'Alzheimer : Histoire d'une expérience).

C.1.3 Les objectifs de l'équipe soignante visent à améliorer son état dépressif et à favoriser l'autonomie

Permettre à Madame C. de retrouver un élan vital, la soutenir dans ses moments de dévalorisation et de dépression, la stimuler, par les différentes activités proposées par l'équipe soignante, à reprendre goût à la vie, à se revaloriser et à renouer des liens avec les autres.

C.1.4 La confiance en soi et dans ses capacités est l'objectif général de la prise en charge art-thérapeutique

Au cours d'une discussion avec la psychologue, nous avons fixé un objectif

thérapeutique général. Nous avons pensé qu'il était nécessaire d'exploiter le potentiel thérapeutique de la danse et de l'expression corporelle avec Madame C. Suite à une première séance de rencontre, la prise en charge en art-thérapie a été axée autour d'un objectif principal: la reprise de « confiance en soi » et dans ses capacités malgré ses handicaps, en particulier son handicap sensoriel et les troubles du langage. À partir de cet objectif général les notions d'affirmation et d'estime de soi sont également impliquées.

Nous avons donc pensé qu'il était nécessaire de travailler sur la mise en valeur de son image et de raviver le regard positif de la personne sur elle-même, afin de lui donner du courage pour s'exprimer avec son corps, pour améliorer et enrichir les relations et

la communication avec les autres.

C.1.5 L'image de soi est à évaluer

L'image corporelle d'une personne qui perd la vue est fortement blessée. Madame C., montre une perte de l'estime d'elle-même, due à une perte de confiance dans ses capacités d'autonomie et de sa possibilité de jouissance des belles choses de la vie, avec une perte constante de son image, aussi bien dans son aspect extérieur, que comme personne.

Avec elle, on a travaillé beaucoup sur la possibilité de retrouver une bonne image d'elle-même. Se sentir inutile, se sentir comme un poids, voir son corps non comme une source puissante, mais plutôt comme une « vieille voiture que ne marche plus » influe négativement sur le côté psychologique de la personne.

La danse et l'expression corporelle, avec Madame C., ont été exploitées comme des moyens pour retrouver une bonne image d'elle par des gestes et des mouvements élégants, harmonieux et féminins et pour retrouver le goût de se sentir puissante et vivante.

C.1.6 Des objectifs intermédiaires sont fixés

Pour retrouver une confiance en soi, en passant par une remise en valeur de son image frustrée et par le désir d'agir, des objectifs intermédiaires de base ont été fixés.

- Retrouver l'élan et le plaisir d'agir

- Favoriser un progrès d'autonomie dans les mouvements grâce à l'élan corporel

- Favoriser les capacités imaginatives

- Améliorer et enrichir la communication avec les autres par l'expression corporelle

- Favoriser une maitrise gestuelle plus agréable et harmonieuse.

D'autres objectifs seront à cibler en cours de route.

C.1.7 Analyse de la dynamique des séances avec madame C.

Madame C. aime beaucoup danser et chanter. Elle fréquente l'accueil de jour. Le déroulement des séances avec elle était structuré selon ce cadre-ci: 2 jours par semaine, mercredi et jeudi après-midi, de 40-50 minutes. Notre parcours thérapeutique a été de 8 séances.

Séance « rencontre » : Notre première séance d'art thérapeutique a eu lieu le 10 juillet. Il faut préciser que j'ai commencé mes séances avec elle plus tard par rapport à mes autres prises en charge, mais nous nous étions déjà connues pendant ma première période de stage.

Cette séance fut plutôt une « séance de présentation et de connaissance ». Lors de cette rencontre, je lui fis la proposition de participer à des séances d'art thérapie, en lui expliquant ma position. Elle accepte avec enthousiasme et nous avons commencé notre connaissance et nous avons exprimé nos considérations et nos goûts par rapport à l'Art.

1° Séance : La musique classique nous a tenu compagnie pendant nos 40 minutes

de séance. Pendant les 15 premières minutes, nous avons effectué des exercices

d'échauffement, de respiration et de motricité afin de détendre nos corps et les

préparer à la danse.
2° Séance  Après les exercices de respiration, je lui ai proposé un jeu d'exploration : Nous marchons ensemble dans la salle au rythme de la musique. À un certain moment j'invite Madame C. à s'arrêter et nous faisons des petits gestes en dansant ensemble. Puis, nous recommençons à marcher et à explorer la salle, 3 fois de suite. J'ai pensé exploiter le sens du toucher pour bien connaître notre espace, mais aussi pour prendre contact avec nos différentes parties du corps et pour sentir le plaisir sensoriel.

ITEMS OBSERVÉS LORS DE LA SÉANCE :

1) Madame C. ne se déplace pas dans l'espace toute seule et en plus elle

montre souvent des mouvements involontaires rapides. Ça la gêne et bloque son envie de continuer à danser.

2) Elle ne danse pas si elle ne sent pas le contact corporel avec moi. Elle a peur de tomber et se bloque si je la laisse aller toute seule dans l'espace. Le contact corporel entre nous se fait pendant presque tout le temps de la séance. Le contact corporel donne du plaisir et de la gratification sensorielle, mais peut aussi devenir un obstacle à son désir d'autonomie et de liberté.

Nous avons donc un site d'action et deux obstacles inhibiteurs à cibler.

3°Séance : Le lieu de la séance est toujours le même : la chambre à coté de la salle de l'Accueil de jour.

Madame C. se souvient de moi et de notre séance et démontre un comportement actif envers notre travail. Elle a envie de « faire ». Après nos 15 minutes d'ouverture avec la respiration et l'échauffement corporel, nous avons continué le jeu d'exploration. Mon objectif intermédiaire de séance a été de surmonter la peur de se lancer dans l'espace et lui donner ainsi un sens de liberté, la laisser libre de bouger sur les notes de la musique. Voir son corps s'exprimer avec spontanéité et liberté.

Madame C. aimait beaucoup voyager. L'exploration, au début exploration spatiale, est devenue exploration imaginative. « Le corps-oeil gitan et vagabond » : voilà le titre de notre voyage.

Dans la 2° partie, j'ai proposé à Madame C. l'écoute d'un tango. De sa propre initiative, elle a commencé à danser en disant « c'est beau l'Argentine, dommage que je ne l'ai jamais visitée ». En dansant, petit à petit, avec l'imagination, nous sommes arrivés en Argentine! Pour atteindre l'objectif de cette séance, j'ai essayé d'alterner la danse en couple (contact corporel) à la danse libre et autonome dans l'espace.

FAIT APPARU LORS DE LA SEANCE : Quand elle ne sentait plus mon corps en contact avec le sien, elle se bloquait : « Ne me laissez pas, j'ai peur de tomber si j'ai mes gestes incontrôlés... »

Séance : Son état émotif et psychologique n'est pas aussi positif que les autres jours. Elle est nerveuse et de mauvaise humeur. Vu son intérêt pour le voyage, je lui propose de « voyager par le monde » en écoutant et en dansant chaque fois des musiques folkloriques différentes. Elle accepte mais elle est plutôt démotivée  « Vous savez, parfois j'ai des problèmes gestuels et de langage...il faut avoir de la patience ». Je lui explique que je connais bien sa situation et que je reste toujours vigilante et prête à l'aider. Je lui présente mon Pays et sa danse, la Tarentelle. Cette musique, à mon avis, marchait bien avec la situation de Madame C. :

· La Tarentelle est une danse où le corps se déplace rapidement sur une musique avec une mélodie toujours la même, mais à un rythme croissant. Les mouvements sont toujours plus frénétiques, désordonnés et non contrôlés. Ce type de danse, alors, permet à une personne de ne pas avoir de contrôle sur son corps, mais amène à se lâcher et évoluer dans l'espace et dans le plaisir entraînant de la musique

(élan corporel/ fonction de catharsis)

· C'est une danse qui peut être dansée, soit en couple, soit toute seule. Cela correspondait bien avec notre danse « approche-distance corporelle ».

FAITS APPARUS LORS DE LA SEANCE

1) Madame C. a dansé sur la musique, même si parfois elle avait des gestes et des mouvements corporels involontaires. Elle ne s'est pas bloquée. Elle accompagne ses gestes par des sons, qu'elle répète avec ses mouvements

2) Elle me questionnait aussi sur l'Italie : elle était curieuse de connaître un peu mieux mes traditions

3) Elle présente une évaluation de la séance et une autoévaluation : « C'est

très bien ce que vous faites avec moi ! » C'est le commentaire de Madame

C. à la fin de notre séance

4) Mais elle montre encore des difficultés à se déplacer toute seule dans l'espace en me cherchant très souvent

Donc, le premier objectif a été ciblé, c'est-à-dire le blocage causé par sa gestualité parfois non contrôlée et à son regard peu agréable, mais il reste le deuxième objectif.

5° Séance : Nous avons changé la salle de notre travail art-thérapeutique.

Nous avons utilisé la salle de gym, plus grande et plus spacieuse.

Notre jeu d'exploration spatiale et imaginative continue.

Nous écoutons la musique des pays Balkaniques. Madame C. exprime son intérêt pour cet autre pays étranger. Elle s'entraine particulièrement en écoutant la musique folklorique et populaire.

Cette fois, j'ai amené des tissus et des foulards avec lesquels on pouvait danser.

À la place du contact corporel, on a utilisé ces outils. Le sens de le toucher comme moyen de contact et communication avec l'extérieur a été encore une fois exploité.

Je lui ai dit que le foulard pouvait être soit un moyen de communication entre nous, soit un instrument pour créer de nouvelles formes corporelles. La danse avec le foulard nous a permis de retrouver encore une fois le contact corporel (approche-distance), en jouant sur le binôme « dépendance --autonomie ».

FAITS APPARUS LORS DE LA SEANCE

1) Madame C. a confiance en moi et suit « les règles du jeu ». Au début, elle a de la difficulté à s'éloigner de moi, mais petit à petit, elle découvre la sensation agréable de danser toute seule. Ses mouvements sont plus riches, plus fins, plus variés.

2) Sa sensation de liberté corporelle enrichit ainsi son côté créatif ; elle ose se lancer de plus en plus et exploite l'espace qui l'entoure. « Si les autres nous écoutent ils diraient qu'on est folles ! mais c'est bien, je suis contente »

6°-7° Séances: Nous continuons notre parcours sur le thème du voyage d'exploration. Musiques africaines, musiques arabes etc. Les danses africaines ont donné à Madame C. la possibilité de fondre ses réflexes involontaires gênants avec les mouvements archaïques et tribaux de la danse africaine. Elle est plus sûre dans l'espace qui l'entoure La musique arabe a aidé Madame C. à sentir son corps comme un corps vivant et féminin.

ITEMS « A SURPRISE » APPRECIES LORS DE LA SEANCE :

1. Son corps est plus détendu par rapport aux premières séances, nous n'avons plus besoin de 15 minutes d'échauffement et de détente, mais plutôt 5-10 minutes. Madame C. est plus détendue

2. Je remarque qu'ainsi ses gestes incontrôlables et involontaires ont diminué.

3. Madame C. se trouve à présent dans une ambiance agréable et détendue,

dans une bonne condition psychique et physique.

8° et dernière Séance : Madame C. vient à l'Accueil de jour, comme chaque mercredi, mais elle n'est pas de bonne humeur. Pendant le week-end passé, elle est tombée lors d'une promenade. Son visage montre des blessures légères mais évidentes, qui la gênent. Malgré cela, Madame C. ne refuse pas notre séance. Nous sommes allées dans la salle de gym. Avant de commencer notre travail, elle me raconte l'épisode de sa chute, en exprimant aussi son état émotif.

Elle-même m'a proposé de danser la tarentelle, car cela lui procure de joyeuses sensations. Nous avons utilisé un nouvel instrument : les castagnettes. En se rappelant les danseurs de flamenco, Madame C. n'a pas eu de difficulté à utiliser ce matériel. Elle n'aurait jamais compris ce qu'elle devait faire avec une simple explication verbale, à cause de ses troubles gnosiques.

ITEMS APPRECIÉS LORS DE LA SÉANCE :

1) Expression d'évaluation et autoévaluation : Madame C., lors que nous dansons sur les notes de la tarentelle : Qu'-est ce que c'est beau ce que vous faites pour moi ! Dommage que vous partiez, on s'entend bien ! ». Et encore : C'est bien qu'on ait les mêmes goûts pour la musique et la danse »

2) Elle a eu juste une fois ses mouvements involontaires.

C.1.8 Evaluation de Mme C. au cours de la prise en charge : les items sont évalués de façon objective et amènent à une découverte de ses potentialités

Dans les graphiques annexes et dans l'analyse des séances, on peut observer de façon objective l'évolution de Mme C. vers l'acquisition de l'autonomie dans l'espace et un relâchement du corps, qui devient toujours plus détendu et où les mouvements incontrôlés diminuent. L'harmonie corps/esprit se manifeste avec un épanouissement de l'activité imaginaire. L'autonomie dans l'espace et l'exploitation de l'imaginaire débloquent la richesse et l'harmonie dans la danse et l'expression corporelle. Son corps devient expressif, vivant et féminin, à bénéfice de son image.

C.1.9 L'Analyse et l'évaluation des observations des séances nous permet de tirer une synthèse et un bilan positif de la prise en charge

Un objectif prioritaire, favoriser l'autonomie de la personne, visant surtout à l'autonomie corporelle dans l'espace, a été atteint progressivement, grâce aussi à la relation de confiance entre la patiente et moi. Il a permis d'atteindre l'objectif général fixé et de faire éprouver à la patiente plus de confiance en elle et dans ses possibilités, au bénéfice de l'image de soi.

251666432251665408Si, d'abord, les craintes, causées par le déficit de la vue, inhibaient ses mouvements dans la salle de l'Atelier, après quelques séances, Mme C. est devenue réceptive et aussi plus participative et créative. Plus active dans le choix des musiques et des lieux à visiter, elle a réussi aussi à danser toute seule ainsi son corps, s'est détendu petit à petit. Sa relation avec moi, tout d'abord vue comme une syntonie corporelle est devenue une relation de confiance. Elle se déplaçait avec plus de sûreté dans l'atelier.

Plusieurs lieux ont été visités et vécus avec densité émotionnelle. La fantaisie, l'imagination ont été stimulées à travers la danse et la musique. Plusieurs émotions sont entrées en jeu et passées par le contact corporel et la jouissance de «visions imaginaires» grâce au «corps-oeil gitan et vagabond», suivies par des mouvements toujours nouveau et par des chants créés sur le moment par elle-même. Avec un intérêt progressif et une participation active aux séances, Madame C. a souvent exprimé son état de satisfaction pour les objectifs atteints.

INTENTION- ACTION- PRODUCTION : les fondements de l'activité artistique

sont ainsi remarqués, déterminant la fonction esthétique

Évaluation de la confiance en soi faite par une évaluation récapitulative des objectifs intermédiaires au regard du phénomène artistique

L'objectif général étant la revalorisation de la confiance en soi malgré ses déficits et son image blessée, la stratégie était de proposer à Mme C un projet lui permettant de révéler ses capacités oubliées et, encore, exploiter le corps pour améliorer et enrichir la relation et la communication avec les autres et raviver le regard positif sur elle-même. L'évaluation récapitulative des objectifs intermédiaires relatifs à l'exploitation de l'imaginaire (intention), la capacité d'autonomie dans l'espace (action), la richesse expressive et l'harmonie dans les mouvements (production), dans les graphiques qui suivent :

Graf.1

Légende :

Exploitation de l'imaginaire : 1. Nulle, comportement imitatif ; 2. Sous sollicitation ; 3. Bien exploitée, active Autonomie dans l'espace: 1. Nulle  ; 2. Suffisante ; 3. Bien exploitée Richesse et harmonie danse/exp.corporelle : 1. Basse ; 2. Suffisante ; 3. Bonne

LA MÉTHODE DU JEU A PERMIS « L' EXPLOITATION DE L'IMAGINAIRE »

Implication dans la participation au jeu, méthode proposée par l'art-thérapeute

Graf.2 Légende :

Implication jeu : 1Absente; 2.Sans intérêt; 3.Intéressé; 4. Imaginative; 5. Enthousiaste Dynamique contacts avec art-thérapeute : 1. Rejetés ; 2. Hésitants ; 3. Polis ; 4. Spontanés ; 5. Exubérants Expressions verbales accompagnées : 1. Expressions plaintives et d'échec ; 2. Absence d'expressions verbales ; 3. Expressions intentionnelles ; 4. Expressions de jouissance ; 5. Expressions amusées et de joyeuseté

La participation au jeu n'a jamais été absente

MME C A RETROUVÉ DU PLAISIR DANS LE PROJET : Entre les objectifs intermédiaires du projet, celui de lui permettre de retrouver plaisir et l'élan corporel à travers une activité gratifiante, une affirmation des goûts et des mouvements moins gênants.

1

2

3

4

5

6

7

8

15,30

14,25

14,10

14,43

14,43

9,05

6,20

5,33

TEMPS DE RÉCHAUFFEMENT ET DE RELAXATION DE MME C.

Graf.3

Légende :

1. Réticent ; 2. Sous sollicitation Corporelle ; 3. Envie de faire et affirmation des goûts ; 4. Active, prises d'initiative ; 5. Enthousiaste, Rayonnante

REMARQUONS LES REFLEX MOTEURS GÊNANTS - Graf. 4 Légende :

1. Un seul au cours de la séance ; 2. Plus rares et mouvements plus détendus ; 3. Fréquents et moins gênants ; 4. Fréquents et gênants

Les reflex moteurs gênants diminuent au fil des séances

MISE EN RELATION DU `PLAISIR ET ÉLAN CORPOREL' ET DES `REFLEX MOTEURS' GÊNANTS - Graf. 5

IMPLICATION DE MME C ANALYSÉE PAR L'INTERMÉDIAIRE LA FONCTION D'AIDE ATTRIBUÉE À LA RELATION, LA PARTICIPATION AU JEU ET LES EXPRESSIONS VERBALES SUR LA RELATION AVEC L'ART-THERAPEUTE

Graf. 6

Légende : Relation/art-th. d'aide :1. refuse ; 2. Réticente ; 3. Accepte passivement ; 4.Demande aide parfois ; 5. Réclame (dépendance) Participation au jeu : 1. Présence vide ; 2.Hésitante ; 3.Acteur passif ; 4. Acteur actif et intéressé Expressions verbales sur la relation : 1. Opposition ; 2. Intérêt ; 3. Confiance ; 4. Reconnaissance ; 5. Enthousiasme

AUTOEVALUATION ET SATISFACTION ( BAT)

Mme C est capable d'autoévaluation selon le modèle des 3 B de BAT1 : J'ai passé un moment...Le plaisir que j'ai eu..Je trouve que cela fait ...Mon envie de continuer est

Graf.7

Expressions recapitulatives d'Autoevaluation et Satisfaction de Mme C

Légende :

1.Dévalorisation; 2. Indifférence; 3. Dévalorisation/ Satisfaction ; 4. Auto- satisfaction ; 5 Fierté

C. 2 MADAME L.

C.2.1 Anamnèse et état de base

Madame L. est une femme de 81ans, qui présente une maladie D'Alzheimer maintenant sévère où les troubles mnésiques sont accentués, le discours est très appauvri et stéréotypé. Elle présente aussi des graves problèmes de compréhension et son orientation temporelle, spatiale est très affectée. De plus, elle présente une forme de rigidité musculaire de sa jambe gauche. Dans l'ensemble elle est plutôt apathique et passive et l'équipe médicale m'a conseillé sa prise en charge, pour essayer de la faire sortir de son apathie.

C.2.2 L'équipe soignante a orienté Mme L vers une prise en charge en raison de son état de passivité et apathie

Rappelons ici que la finalité prioritaire de la Maison est de favoriser des actions sur la qualité existentielle des personnes prises en charge, en facilitant ainsi l'intégration sociale; c'est à dire une bonne interaction entre eux et l'environnement dans lequel ils vivent, en donnant à ce public la possibilité d'améliorer sa qualité de vie, la confiance et la possibilité d'affirmation de soi. Cette finalité a tenu compte ainsi de l'état de base de Madame L.

C.2.3 L'objectif général art-thérapeutique fixé sur Madame L. est l'affirmation de ses capacités d'expression et de participation

J'ai mis en place un atelier art-thérapeutique de danse. Madame L. aime danser même si elle présente une difficulté à marcher et à bouger son corps. Étant donné que ses principaux troubles étaient la compréhension et la communication, j'ai utilisé le corps, accompagné par l'écoute de musique, pour créer un rapport avec elle et les ressentis pour donner la possibilité d'exprimer ses goûts et désirs, en enrichissant sa qualité de vie.

Nous pouvons, alors, fixer l'objectif général :

Améliorer sa qualité de vie à travers l'affirmation de ses capacités d'expression, de participation et de relation envers les autres.

C.2.4 La prise en charge a été justifiée par l'Art I, Art archaïque 

Avec Mme L., au contraire de Mme C., je n'ai pas réussi tout à fait à atteindre mes objectifs thérapeutiques, établis avec l'équipe soignante.

Une des limites de Madame L. est sa difficulté à apprendre et à raisonner. Sa forme

grave d'Alzheimer limite le bon fonctionnement cognitif. Elle présente d'importants troubles de mémoire, mais aussi de raisonnement et d'apprentissage. Ces graves défaillances limitent ainsi les capacités créatives. Etre créatif, en fait, implique l'utilisation de plusieurs fonctions cognitives, comme la mémoire et son élaboration, puis les capacités associatives avec leur fonction d'imagination. Ses déficits l'empêchent, ainsi, d'apprendre des techniques.

Avec elle on a donc utilisé l'ART I, qui se dirige vers le geste archaïque, la sensation recherchée par la gratification sensorielle, spontanée et immédiate. Dans ce cas, le corps est utilisé de façon globale, il ne suit pas de règles, de techniques ni de directives précises, mais il bouge librement en créant une action volontaire orientée vers le plaisir esthétique et sensoriel. En outre, on a privilégié la « Relation » qui est basée sur le ressenti, sur la  « Communication », basée sur l'échange des informations.

C.2.5 Des objectifs intermédiaires sont fixés

En raison de l'objectif général et de ces considérations, des objectifs intermédiaires

sont fixés :

- retrouver le goût et le plaisir à travers les activités

- retrouver le goût des relations avec les autres

C.2.6 Analyse de la dynamique des séances avec Madame L.

Les séances avec Mme L. étaient chaque mardi et vendredi après-midi.

D`une durée de 40-50 minutes. C'était un parcours art thérapeutique de 8 séances, y compris la séance de rencontre.

Après la séance de rencontre et 1° Séance nous avons effectué notre Séance :

Nous avons utilisé la salle de rééducation et notre séance a duré 45 minutes.

Après la phase d'échauffement corporel, avec des exercices pour les articulations et le stretching corporel, j'ai proposé à Madame L. l'écoute d'une musique en lui laissant choisir entre de la musique française de son époque et de la musique folklorique. Nous dansons sur la musique folklorique. Madame L. se laisse conduire totalement, car elle ne comprend pas ce qu'on lui dit et on lui propose. Elle ne répond que « oui ou/et non », ainsi la communication gestuelle n'est presque jamais comprise. Je lui ai proposé une danse libre, sans gestes précis, mais plutôt la spontanéité de bouger tout simplement et librement dans l'espace. Elle ne prend pas d'initiative. Elle imite seulement.

FAITS APPARUS LORS DE LA SEANCE

Madame L., à un moment donné, m'a exprimé son envie de s'asseoir, car elle était fatiguée. J'ai considéré que la fatigue pouvait être le signal d'un bon travail.

Au début, j'étais plutôt démotivée, car j'avais l'impression de ne pas atteindre mon objectif : retrouver le goût et le plaisir par les activités et dans l'activité pour sortir de la passivité et de son état d'ennui.

Exprimer un besoin particulier (« j'ai envie de m'asseoir, je suis fatiguée) m'a, quand même, donné la sensation qu'elle n'était pas tout à fait restée étrangère à notre travail.

Séance : Madame L. ne veut pas faire la séance. Elle me dit qu'elle a des douleurs à la jambe et du coup elle ne peut pas danser. Je lui propose quand même d'aller dans la salle de rééducation, d'écouter de la musique en restant assis. Elle accepte. Je lui montre des CD de musique française et de la musique classique. Je l'invite à choisir, mais elle ne me répond pas, elle me regarde simplement. Alors moi, je prends l'initiative et on écoute la musique d'Édith Piaf. On fait des petits mouvements avec nos bras, pour prendre contact avec nos corps. Nous sommes assises, elle est toujours dans le domaine de l'imitation. J'ai eu l'impression de « jouer au miroir ».

Objectif issu de la séance: Attendre qu'elle prenne l'initiative et montre un

comportement actif vers la séance.

STRATEGIE THERAPEUTIQUE : En utilisant le « jeu du miroir » j'ai essayé un changement de rôle : parfois c'est elle qui m'imite, parfois c'est moi qui l'imite.

On n'a pas réussi, elle se bloque chaque fois que je m'arrête de bouger.

4°-5°- Séances : Les séances se sont déroulées de la même façon, toujours à l'écoute de la musique, accompagnée par la danse et l'expression corporelle.

La difficulté avec Madame L. a été toujours la même: un tel manque de prise d'initiative. Elle choisit seulement de refuser ou de participer.

6°-7° Séances: En restant toujours dans la contemplation et l'imitation. Vu mon objectif général, en accord avec l'équipe soignante, j'ai dirigé plutôt mon travail vers l'animation artistique.

8° Séance : Cette fois j'ai proposé de jouer un instrument musical. Il y avait une guitare présente dans la structure, et je l'ai montrée à Madame L. Sans lui expliquer de quoi il s'agissait et comment l'utiliser, elle prend enfin l'initiative! Elle prend la guitare, puis elle touche les cordes qui provoquent des sons. De mon côté, lorsqu'elle s'approchait de la guitare, je faisais des mouvements en dansant. Puis elle m'a donné la guitare et j'ai commencé à en jouer. J'ai remarqué, qu'à un moment donné, elle suivait la musique, elle tapait du pied d'une façon rythmée.
Je lui ai proposé de trouver un rythme sur des notes de musique africaine. Je tape mes mains et elle ses pieds, en cherchant, petit à petit, un rythme.

ITEMS APPRECIÉS LORS DE LA SÉANCE :

1. prend un instrument

2. tape des pieds en écoutant de la musique

Madame L. finalement est sortie de l'imitation et de la contemplation. Le fait de prendre toute seule un instrument, de s'approcher de celui-ci avec curiosité, de taper les pieds en écoutant de la musique et en cherchant un rythme, me prouve qu'elle n'est pas du tout indifférente à nos travaux.

C.2.7 Evaluation de Mme L. au cours de la prise en charge

L'évolution est lente et les items à considérer plutôt rares. Il s'agit d'actions simples et pas trop compliquées.
Nous enregistrons (GRAPHIQUE ANNEXE ) que le regard est toujours présent (Maintient le regard) Seulement dans la dernière séance on peut observer des items significatifs  « à surprise » qui concernent la Prise d'initiative', donc, l'INTENTION et L'ACTION. Aux autres séances, il s'agit plus de la volonté de refuser ou d'accepter de participer, mais de façon imitative.

C.2.8 Synthèse et bilan de la prise en charge

La difficulté rencontrée avec Madame L. était plutôt l'absence de «prise d'initiative».

De toute façon, elle n'a jamais refusé de participer à nos séances. On a fait ensemble des mouvements corporels, des petites danses, des écoutes musicales, mais elle restait toujours dans la contemplation artistique ou plutôt dans

«l'imitation». On pourrait dire que l'on n'est pas vraiment passé à l'étape suivante l'action et la prise d'initiative. Le passage de la contemplation et l'imitation à l'action volontaire n'a pas été atteint. Ce fait s'est avéré durant la dernière séance mais, étant la dernière, il n'a pas été possible de vérifier la suite.

J'ai observé, quand même, que Madame L., par de simples expressions verbales «je suis fatiguée, je veux m'asseoir» et non verbales (des petits sourires, maintient le regard), a montré une participation pas tout à fait passive à nos séances, de vivre des moments agréables selon ses choix, propres à elle et à ses goûts pour entrer en relation avec les autres ; donc, une affirmation de soi.

Évaluation de l'objectif général, l'Affirmation de soi, faite par une évaluation récapitulative des objectifs intermédiaires au regard du phénomène artistique

L'objectif général étant la restauration de sa qualité existentielle par l'affirmation de ses capacités d'expression et de participation malgré sa pathologie démentielle, la stratégie était de proposer à Mme L. un projet lui permettant d'exploiter ses capacités restantes de jouissance, de participation active et d'implication relationnelle par l'opération artistique. L'évaluation des objectifs intermédiaires dans les graphiques qui suivent

Graf. 8

.

Légende 

Regard: 1. Regarde ailleurs; 2. Fuit le regard ; 3. Maintient le regard

Effort : 1. Pas de fatigue ; 2. Fatigue ; 3. Transpiration et fatigue

Attitude et prise d'initiative : 1. Comportement imitatif ; 2. Sous sollicitation; 3. Active

Graf. 9 - Le REGARD ET LES SOURIRES SONT AUSSI DES COMPORTEMENTS NON VERBAUX RÉVÉLATEURS DE SON IMPLICATION RELATIONNELLE ET SA SATISFACTION ( BAT 1)

Légende Sourires : 1. Aucun ; 2. Un ; 3. Rares ; 4 Quelques ; 5. Nombreux Regard : 1. Absent ; 2. Hésitant ; 3. Présent ; 4- Intéressé ; 5. Rayonnant

Graf. 10 - REMARQUONS LA COTATION DES ` PRISES D'INITIATIVES' ET SA MISE EN RELATION AVEC LE PLAISIR

Plaisir : 1. Déplaisir; 2. Indifférence; 3. Exprime son plaisir par le regard et des sourires ; 4. Expressions verbales de plaisir ; 5. Rayonnant Cotation prise d'initiative :1. Aucune ; 2. Une ; 3. Plus d'une; 4. Nombreuses

Graf.11

RÉCAPITULATIF ÉVALUATION DES ITEMS CONCERNANT L' AFFIRMATION DE SOI

Légende

1. Nulle; 2. Elle affirme sa volonté de se reposer quand fatiguée ; 3. Elle affirme ses goûts et ses intentions ; 4. Elle affirme ses goûts et ses intentions ; 5. Elle affirme ses goûts, ses intentions et prend l'initiative

TROISIEME PARTIE : DISCUSSION

A. L'EXPÉRIENCE PERMET DE CONFIRMER LES EFFETS BÉNÉFIQUES DU TRAVAIL D'ART-THÉRAPIE MALGRÉ LES LIMITES DANS LE DEROULEMENT DU STAGE

A. 1 Limites rencontrées dans le déroulement du stage : le stage peut présenter des limites qui vont influer sur le travail art-thérapeutique

A.1.1 La durée du stage et l'organisation du temps peuvent limiter le travail de l'art-thérapeute

La durée du stage et l'organisation du temps de travail ont été des limites, bien mises en évidence aussi par mon maître de stage. La durée du stage est un facteur qui va conditionner le nombre des séances avec les patients, compte tenu de la première période qui est consacrée à l'observation et à la connaissance du patient et vu que les séances doivent avoir une cadence bien précise de façon adaptée au cadre thérapeutique.

Le parcours psychothérapeutique nous enseigne qu'il est essentiel de définir un rythme de séances bien cadencé, tout comme pour l'Art-thérapie. Un stage bref peut n'être pas suffisant pour mener et apprécier une personne prise en charge vers une véritable évolution. Il existe des capacités sous-estimés chez la personne et la tâche de les découvrir, de les favoriser, requiert une patience et un engagement sincère et constant de la part de l'art-thérapeute. Pour le travail de l'art-thérapeute, la durée brève du stage souvent limite la possibilité de vérifier les items remarqués dans le suivi des séances, donc, l'acquisition des changements ; le plus souvent l'amorce des premiers changements visibles sont remarquables lors d'un cheminement déjà avancé. Par exemple, chez Mme L. l'item de la  « prise d'initiative » est apparu lors de la 8° et dernière séance. D'autres travails ont mis en évidence ces aspects liés au facteur `temps' ( Mémoire V. Cross, 2004)

A.1.2 Une intégration insuffisante du travail art-thérapeutique au sein de l'équipe soignante

Il y a aussi d'autres raisons pour lesquelles la durée a été une limite et qui sont relatives à l'intégration du rôle de l'art-thérapeute au sein de l'équipe soignante. La durée du stage a conditionné aussi l'intégration dans l'équipe.

- Comprendre et entrer dans les mécanismes de l'Institution (rôles, compétences, relations)

- Avoir le temps de mettre en évidence le rôle de l'art-thérapeute, son travail et lui donner une continuité afin d'être visible et clair à l'égard de l'Institution.

L'entrée dans un groupe est un processus graduel, surtout s'il s'agit d'une expérience nouvelle. Le rôle de l'art thérapeute était presque inconnu dans la Structure et, comme nous l'avons dit précédemment, il s'agit du premier atelier d'Art-thérapie à dominante danse, expression corporelle auprès de la Maison Tiers Temps Saint-Maur.

Contrairement à la conduction d'un groupe, où la présence d'un co-thérapeute est nécessaire, dans la prise en charge individuelle l'art-thérapeute travaille seul. S'il

est bien de laisser l'art-thérapeute libre d'agir, d'un autre côté, il m'a été très difficile de présenter et d'indiquer mon travail thérapeutique aux membres de l'équipe. Lors des réunions d'équipe, j'ai eu la possibilité de montrer et d'expliquer mon travail, mais, à cause de différentes opinions sur les aspects méthodologiques, je n'ai pas eu l'occasion d'échanger des idées sur les problèmes qui se présentaient lors des séances, comme la psychologue, mon maître de stage, l'a observé.
Le travail en équipe est fondamental. Une bonne coordination et communication avec les différents intervenants est la clé pour avoir accès aux informations importantes et favoriser la continuité du progrès dans la vie quotidienne de la personne car souvent les progrès des résidents dans l'atelier ne se manifestent pas par les progrès dans le quotidien.

A.1.3 La difficulté d'organiser la prise en charge d'un groupe peut limiter les effets bénéfiques des prises en charge individuelles

Un des objectifs était de raviver la qualité existentielle des patients suivis dans une maison de retraite médicalisée et dans son accueil de jour, en exploitant le potentiel relationnel.

Une expérience de prise en charge d'un groupe aurait été intéressante pour la prise en charge individuelle de certains patients d'un groupe et les réintégrer au groupe par la suite. En outre, pour amplifier les effets bénéfiques de la prise en charge individuelle

La prise en charge individuelle est utile à créer un lien exclusif entre thérapeute et patient. Le « binôme-relationnel », donc, donne au soignant la possibilité d'instaurer avec le patient une relation privilégiée, en permettant d'aboutir au traitement thérapeutique afin d'obtenir une amélioration de l'expression et de la communication. Par contre, si l'un des objectifs est bien de resocialiser, la prise en charge individuelle n'est pas suffisante pour établir un échange et un lien relationnel avec les autres résidents ou les autres de l'accueil de jour. Le « binôme relationnel » n'offre pas la possibilité d'utiliser l'Art comme moyen d'approche pour entrer en relation avec eux. Souvent, une bonne méthode pour bien développer l'aspect de communication et de relation du patient est une intégration des deux formes de prises en charge, par exemple débuter avec une approche art-thérapeutique individuelle, puis, continuer avec des séances de groupe.

L'art-thérapeute donne l'élan relationnel, en exploitant la poussée du plaisir esthétique et le pouvoir expressif et relationnel de l'Art. Il aide ainsi le patient à se socialiser, entrer en syntonie et communication avec les autres, à établir une relation continue avec eux grâce à la continuité et à la constance des séances art-thérapeutiques. Ce processus peut être utile car il donne au patient la possibilité de vivre la relation de groupe une fois qu'il n'y a plus la présence de l'art thérapeute.

A.2 Malgré les limites, les effets bénéfiques les plus significatifs du travail art-thérapeutique sont à mettre en évidence et ils permettent de nouvelles considérations

A.2.1 L'oeil intérieur peut stimuler l'énergie motrice et créative d'une personne non voyante grâce aux séances d'art-thérapie Nous allons considérer les effets les plus significatifs qui toutefois ont été remarqués dans la discussion autour des prises en charge individuelles.

Si nous reprenons le parcours de Mme C. et le jeu créé, appelé «le voyage», en

considération de son intérêt pour le chant et la danse, mais aussi à voyager, en art-thérapie le corps même est devenu «l'oeil gitan et vagabond» d'une non voyante ; pour l'harmonie corps/esprit, par la danse, le corps est devenu source de « visions imaginaires » ; les émotions, émanations des ressentis et des désirs, ont la possibilité de s'exprimer et les mouvements sont toujours plus sûrs dans l'espace. La mémoire, les connaissances, l'intelligence créative sont opérantes et assument les mécanismes de représentations imagées, qui permettent l'imaginaire. C'est la phase où se détermine l'intention (Phase 4 de l'Art Opératoire «  le traitement mental de l'information »). L'intention, pour l'interaction corps-esprit, produit une poussée naturelle à mouvoir le corps physique (phase 5), un élan qui permet de vaincre la peur de l'espace et permet de « voyager ».  Grace à l'élan corporel qui a accompagné l'imaginaire, la confiance dans l'espace qu'elle ne pouvait pas voir allait de pair avec l'acquisition d'une confiance majeure en soi et dans l'autre et son corps se laissait aller au rythme de la musique. « Les faces reflétaient ce que leurs corps leur manifestaient et petit à petit , elles changeaient expression » (Marie Fux)

L'expression artistique englobe la forme et le fond. La forme attire avec l'aspect agréable et séduisant de l'image. Le fond est le rayonnement ressenti de l'image, qui cependant est sujet au goût personnel et «l'individu adapte un fond et une forme correspondant à un ressenti intérieur »23(*).

A.2.2 La jouissance du jeu renforce la relation avec l'art-thérapeute

Le pouvoir du jeu dans une visée thérapeutique se manifeste à travers différentes théories psychologiques. La psychanalyste Mélanie Klein24(*) met en évidence le pouvoir du jeu comme puissance créative et comme moyen d'exploration du monde intérieur. Même Donald Winnicott, pédiatre et psychanalyste, décrit l'utilisation du petit jeu qui permet de découvr ir le monde imaginaire de l'enfant: les squiggles. D'abord l'éducateur trace une courbe libre sur une feuille et laisse l'enfant le compléter à sa guise pour en faire un petit dessin représentatif. Ensuite l'enfant réalise une autre courbe de son choix et l'éducateur la complète. À travers le jeu des squiggles, Winnicott va marquer les dessins réalisés par les enfants lors de consultations pour découvrir leur monde imaginaire. L'accès à l'imaginaire se fait de façon extrêmement simple et ludique25(*). Souvent, le patient ne sait pas ce qu'il veut, par le moyen artistique associé au jeu, il peut mieux comprendre soi -même et ce qu'il veut. L'art-thérapeute, donc, par la « relation de jeu », peut mieux stimuler la créativité et l'imaginaire, comprendre et accueillir les désirs, les peurs, les atteintes de la personne prise en charge et adresser son aide et ses stimulations.

Les jeux favorisent l'échange entre les personnes et entre patient et thérapeute, ils vont renforcer la syntonie entre eux. L'effet de ressentir le plaisir du jeu lors des séances (« qu'est ce qu'on est bien, on s'amuse ensemble, c'est bien ! », dit Madame C.) nous amène à une attitude positive envers notre travail et donc affine le parcours art-thérapeutique.

A.2.3 L'expérience du plaisir kinesthésique lié à la danse peut permettre également une affirmation de soi dans une personne atteinte de démence sévère

Le kinésithérapeute exalte l'image du corps. L'art-thérapeute engage la personne

malade de démence vers la recherche d'une bonne qualité existentielle, par

l'intermédiaire de l'art. Dans la danse, le mouvement, instrument et raison d'être du danseur, est ainsi un instrument du corps, pris comme une entité « psychocorporelle ». Emotion a la même racine que mouvoir. Le mouvement, qui procure du plaisir, procure ainsi de l'émotion.

L'état de base de Mme L. ne permettait pas une exploitation du potentiel créatif, ni de communiquer. Les fonctions cognitives, outil d'apprentissage, de communication et de l'épanouissement de l'activité imaginative, étaient déficitaires. L' apprentissage d'une maîtrise technique demande des savoirs, qui requièrent une bonne mémoire. Ce qui caractérise la maladie d'Alzheimer, au contraire, c'est l'atteinte de la mémoire épisodique et celle des événements récents. L'apprentissage par mimétisme n'est pas possible, pas plus qu'une réflexion, ni qu'une action créative qui demande des facultés de rappel, d'analyse et d'adaptabilité constantes. Alors la maîtrise technique semble impossible pour les personnes souffrant de la maladie d'Alzheimer. Il existe cependant une mémoire sensorielle et émotionnelle qui stocke les stimuli bruts, mais permet également à la personne âgée atteinte de la maladie d'Alzheimer d'utiliser son savoir-faire, fondé sur des ressentis. « L'artiste dément a accès ainsi aux savoirs par les saveurs ressenties. Il existe notamment un seuil émotionnel qui, une fois dépassé, les ressentis éprouvés sont suffisamment conséquents pour être mémorisés.»26(*). En danse primitive, l'utilisation de certains rituels se traduit par des gestes répétitifs croissant et de manière cathartique. Et la gratification d'un plaisir archaïque sensoriel, par un ressentir corporel vibrant au rythme donné par la musique, qui permet la synchronisation de mouvements croissants de danses primitives (en frappant un pied ou en tapant dans les mains), mènent à une gratification sensorielle kinesthésique et un entraînement émotionnel : à une harmonie corps/esprit. Par le plaisir ressenti par Mme L. et Mme C. leur goût de la danse a été renforcé. Le plaisir est une source de motivation et permet au patient pris en charge d'évoluer et de solliciter des prises d'initiative. « L'appréciation d'une gratification sensorielle va inciter le patient à chercher à nouveau cette sensation agréable »27(*). Mme L. a cherché à nouveau la situation agréable vécue avec une prise d'initiative surprenante: la recherche de l'instrument musical, la guitare.

A.2.4 Les patients atteints de démence ont des potentialités oubliées que l'art-thérapie aide à retrouver

L'entrée en institution et la dimension collective qu'elle impose pousse la personne âgée à rompre brutalement avec son passé, son quotidien et sa vie relationnelle ; elle perd une partie d'elle-même et de sa personnalité. Il s'agit, alors, de restaurer cet état de perte et de fragmentation, en activant le potentiel existentiel bloqué. La prise en charge en art-thérapie, orientée dès l'entrée en institution, peut aider le nouveau résident dans cette étape. L'art-thérapie peut lui permettre d'entretenir et de nourrir le maintien de l'identité28(*), en retrouvant ce qu'ont été toujours ses intérêts et aspirations et à partir de la réamorcer la possibilité de se projeter dans le futur ; «  faire redémarrer le temps en injectant du désir »29(*) , retrouvant soi-même avant chaque action dans la réalité quotidienne.

Dans le stage pratique qui s'est tenue à la Maison Tiers Temps Saint Maur, l'effet bénéfique de l'art-thérapie sur une continuité identitaire a été mis en évidence surtout par la prise en charge de Mme C. et de Mr. E., pour lesquels l'art-thérapie a réveillé de vieilles passions, connaissances et souvenirs : pour la première, qui n'était pas institutionnalisée mais dont la maladie même avait causé la perte de la propre estime, l'art-thérapie a donné l'occasion d'une affirmation de soi, en particulier par l'activité imaginaire, la passion pour les voyages et l'intérêt pour les autres cultures ; chez Mr E, on a pu apprécier une stimulation à l'engagement dans ses intérêts artistiques, comme la peinture et la création d'histoires fantastiques. Quant à Mme L. et Mme B la gravité de leur état de base causait déjà un changement de personnalité ; cependant, la possibilité de retrouver du plaisir à travers une activité épanouissante leur a donné la possibilité de s'affirmer. Madame B. cherchait à prolonger la durée des séances exprimant toujours un nouveau besoin à satisfaire (ANNEXE 4). Madame L. ne prenait aucune initiative, elle choisissait seulement d'accepter ou de refuser la participation aux activités artistiques, en restant dans l'imitation ou la contemplation. Mais la contemplation est déjà une intention. C'est la phase 5' de l'Art Opératoire, la phase du choix de contempler. Mme L. à la dernière séance réalise le passage de l'imitation-contemplation à la prise d'initiative, c'est-à-dire le passage à l'acte volontaire dirigé.

Ainsi, le refus est une affirmation d'identité. Par exemple Mr E., au début, avait refusé parfois les séances. Par la suite, le patient retrouve le goût et le sens de la vie par rapport aux autres, ainsi son amour-propre renforcé peut accueillir la rencontre. Mme C. montre à l'art-thérapeute la joie d'avoir réalisé une représentation qui lui plaît. Ils retrouvent leurs goûts, un style et une identité.

B. LA QUALITE DE LA RELATION AVEC L'ART-THÉRAPEUTE ET L'IMPLICATION DU PATIENT SONT LE FONDEMENT D'UN BON PROCESSUS

B 1. L'art-thérapeute doit répondre aux attentes du patient : accepter ses limites et modifier son travail par rapport à lui et à sa condition

L'art thérapeute, surtout dans ses premières expériences dans ce domaine, risque de diriger son travail d'une façon artistique selon ses propres goûts et plaisirs esthétiques. L'aspect thérapeutique, dans ce cas, est subordonné. Ici, l'art-thérapeute est d'abord un thérapeute et doit répondre tout d'abord aux exigences des patients. Ses compétences d'artiste sont subordonnées aux exigences et aux caractéristiques du patient. C'est bien d'être humble et pas prétentieux. Mettre à disposition son savoir artistique et technique au service de l'autre, qui présente des limites, des défaillances et des déficits. Dans le cas, par exemple, de Mr E., il s'agit ainsi de renoncer à utiliser l'art dominant pour adopter ceux associés. Dans la prise en charge de Mme L., il s'agit de tolérer la frustration de son propre narcissisme et d'accepter de limiter son travail en adoptant le temps et les capacités de la patiente.

B.2 Les stratégies et les moyens artistiques utilisés sont importants, mais le moyen le plus important est la relation et sa qualité

B.2.1 Une bonne relation renforce l'alliance thérapeutique

Il est important, dans un processus de soin avec des personnes Alzheimer, de

redonner au patient une confiance dans l'autre, dans ce cas vers son thérapeute. L'art-thérapeute a la responsabilité ainsi d'adopter une attitude empathique, d'écoute et de syntonisation avec les véritables intentions et moyens d'expression de la personne prise en charge. Dans la danse, la syntonisation corporelle et la confiance sont basiques pour un processus d'harmonisation corps/esprit entre les danseurs ; dans l'expression corporelle pour donner forme aux ressentis. Établir une relation de sympathie, de syntonie et ainsi donner une continuité à celle-ci, permet le passage d'une bonne relation à l'Alliance Thérapeutique, qui est une forme particulière de relation entre thérapeute et patient basée sur des éléments qui permettent à tous les deux d'améliorer la santé du patient-même, grâce à son engagement.

Voilà pourquoi la durée de la relation est importante: cette relation de confiance exige du temps ; elle grandit avec le bon épanouissement de la relation et des activités.

B.2.2. Une bonne relation renforce l'engagement du patient et lui permet de s'exprimer et d'exprimer ses émotions

Une bonne relation est importante aussi pour sa valeur: reconnaître au patient sa dignité comme être humain malgré ses conditions de fragilité et de dépendance. Un ressenti est d'abord un ressenti corporel, puis mental et spirituel. Un bon ressenti corporel et une agréable stimulation sensorielle sont déjà des aspects qui favorisent la participation aux séances. Mais, le besoin de répondre aux appels spirituels est le bon qui amène à s'engager à faire et à bien faire pour réaliser quelque chose qui lui plaît ( le beau) sous le regard de l'art-thérapeute. Chez le patient, un besoin satisfait de se sentir bien et à l'aise avec l'autre, renforce son estime, sa confiance en lui. L'importance de se sentir à l'aise, de se sentir apprécié et accueilli par l'autre, facilite la spontanéité de la personne et du coup lui fait exprimer ses propres émotions. Un regard et un contact empathique font sortir ainsi le non dit.

L'importance d'une bonne relation pour l'engagement du patient à faire a été mis en évidence aussi par des expériences d'ateliers collectifs à dominante arts plastiques pour des personnes âgées atteintes de démence de type Alzheimer et leurs proches, avec l'objectif de favoriser la relation et la capacité de communication, au-delà des mots, entre les patients et les autres personnes de sa famille; une forme de communication qui va s'instaurer entre l'auteur de l'oeuvre réalisée et les autres, fondé sur la qualité des échanges. Alors, grâce à ces gratifications extérieures, la personne malade continuera à produire. On donne, ainsi, la possibilité à la personne démente de s'exprimer dans son environnement quotidien, de réaliser seul ou ensemble des objets plaisants, ou, simplement, de choisir un objet jugé beau et éprouver jouissance de son rayonnement, en restaurant l'envie d'être et de faire et permettant de voir le malade et sa pathologie autrement ( Mémoire en ligne « Art Thérapie-Strasbourg »).

B.2.3 Une bonne relation peut aider à raviver le regard positif de la personne sur elle- même et à renforcer l'image de soi Une rencontre peut naître car la personne apporte des éléments personnels dans un

échange le plus souvent non verbal. Martha Graham, une des pionnières de la Modern Dance, fut une des premières danseuses à mettre en évidence la valeur et l'importance de la danse dans un cadre relationnel et humain. Le processus d'union entre art-thérapeute et patient, basé sur une estime et confiance réciproques, amène la personne atteinte de démence vers un processus de renforcement de l'image d'elle-même; ainsi l'effet d'être soutenu par le regard positif de son propre thérapeute donne de la valeur à ses expressions et du sens à ses ressentis. C'est la phase 8 de l'Art

Opératoire : « au regard du monde », un regard qui donne à la personne sa valeur et

ravive le regard positif sur elle-même.

B.3 Nécessaire continuité des expériences positives art-thérapeutiques dans la relation avec les autres et l'institution

Comme moyen potentiel pour raviver la relation aux autres et à soi-même, une expérience art-thérapeutique, surtout lorsqu'elle est réalisée par des prises en charge individuelles, a besoin de retrouver sa place dans la vie de l'institution.

Après un parcours thérapeutique, il faut que les parties saines activées ne tombent pas dans l'oubli. Le plaisir retrouvé et les capacités révélées, l'atmosphère agréable de l'atelier, la relation de confiance avec l'art thérapeute qui offre des possibilités de choix et de prise d'initiative, en contribuant ainsi à l'affirmation et à une revalorisation de l'estime de soi, restent inscrits dans la vie du patient comme des possibilités favorisant l'engagement en de nouvelles expériences de la vie collective de l'institution. Il faut éviter des régressions qui peuvent faire vivre les progrès comme illusions. L'art thérapeute maintient l'accent sur la visée qui s'adresse aux parties saines. Aussi d'autres formes de parcours thérapeutiques s'adressent aux parties saines, pour retrouver le goût de vivre et améliorer la relation avec soi-même et avec les autres ; par exemple les interventions psychologiques. L'art thérapie réalise ce but avec les moyens qui lui sont propres: le pouvoir entraînant de l'art et la capacité d'apprécier les belles choses. C'est bien, alors, que l'art thérapie trouve sa place dans un établissement pour personnes âgées, soutenue par une équipe organisée qui prend en charge la personne dans sa totalité .

C. RELATION ET COMMUNICATION PAR LES ARTS CORPORELS : COMPARAISON ENTRE L'ART-OPERATOIRE, LES NEUROSCIENCES, L'EMPATHIE PSYCHANALYTIQUE

Les considérations exposées sur l'exploitation des effets relationnels de la danse et les expressions artistiques corporelles nous ont amené à une discussion théorique de mise en relation de l'Art-thérapie avec d'autres domaines dans la communauté scientifique.

C.1 Relation/Communication par la danse : comparaison entre le modèle de l'Art-Opératoire et des Neurosciences

L'importance et la valeur de la danse comme processus de connaissance de soi-même et de l'autre, et finalement comme processus de relation/communication entre «moi et l'autre», est bien développée par différents auteurs et artistes de ce domaine artistique. Martha Graham, met en évidence l'aspect stimulant de la danse sur le contact profond entre  « moi et l'autre », entre le danseur et le spectateur. Une autre grande figure de la danse, Isadora Duncan, avait déclare « le public doit respirer avec moi ».

Dans la danse, l'élan corporel du danseur et ses mouvements au regard de l'autre, l'invitent à participer, en entrant en syntonie et synchronie de mouvements. Regarder quelqu'un danser au rythme d'une musique entraînante active le phénomène de la résonance, « vibration par sympathie ». La vibration par  « sympathie » a été mise en évidence par Pythagore avec ses études sur la musique. Elle s'active ici plus qu'en

d'autres activités artistiques. La résonance amène à favoriser la relation, basée sur un ressenti corporel immédiat, instinctif (phase 3 de l'Art-Opératoire, Traitement archaïque de l'information sensorielle) 30(*) ; il permet une relation de communion et d'intimité entre les personnes. Dans la visée des neurosciences, grâce à la connexion directe thalamus-amygdale, la Relation est un résonner et ressentir ensemble, au même moment . Selon les dernières découvertes des neurosciences, les neurones-miroir, qui simulent une action lorsqu'ils la voient dans un autre si le spectateur est impliqué, la contemplation est elle-même une action. Elle implique une  « poussée » : à contempler, à une réaction émotionnelle (je pleure), une poussée corporelle (phase 5) à s'exprimer lui- même artistiquement, par les mouvements de son propre corps (phase 6 e 7). Et si l'art-thérapeute est impliqué dans le plaisir du mouvement dansant, plus grande sera la résonance des neurones miroir du patient et son implication à faire (E. Cerruto, Danza e canto dei neuroni specchio...)

De plus, le rayonnement de l'autre nous donne la possibilité de capter par les gestes de sa danse l'état d'âme vécu par l'autre mais dans lequel nous nous retrouvons. Les gestes dans cette circonstance deviennent des mots. C'est la communication qui permet d'accéder à leur sens.

Dans la visée des neurosciences, le système miroir permet de simuler l'état émotionnel d'autrui dans notre cerveau par ses expressions corporelles et donc de mieux identifier les émotions éprouvées, en permettant d'accéder à leur sens : c'est la communication empathique.

« Je vois, je ressens, je comprends, je fais » ( M. Graham)

« Je vois, je ressens, je fais,  je comprends» ( système miroir).

Relation/communication > élan corporel à s'exprimer ( Art-thérapie)

C.2 Relation/Communication par les Arts Corporels et l'Alliance Thérapeutique: comparaison entre le modèle de l'art-opératoire et de l'empathie psychanalytique

C.2.1 L'empathie est un aspect favorisant de l'alliance thérapeutique

On a vu l'importance de l'acte dirigé volontaire comme moyen favorisant l'affirmation de soi dans un processus art-thérapeutique. Il est important, dans un processus de soin avec des personnes Alzheimer, de redonner au patient une confiance dans l'autre, dans ce cas vers son thérapeute, comme élément favorisant un lien particulier, l'Alliance Thérapeutique. On peut définir l'Alliance Thérapeutique comme une « forme de relation stable et positive entre thérapeute et patient qui lui permet de s'engager dans son processus de soin en manière collaborative et productive »31(*). L'Alliance Thérapeutique est une forme particulière de relation entre thérapeute et patient basée sur des éléments réalistes et rationnels qui permettent d'améliorer la santé du patient. L'Alliance est importante aussi pour sa valeur: reconnaître au patient sa dignité comme être humain malgré ses conditions de fragilité et de dépendance. Cette forme d'alliance se présente d'une façon mature, adulte et saine. Comment est-il possible, alors, d'établir cette

forme de relation avec un malade Alzheimer ?

Pour favoriser l'alliance thérapeutique avec un patient, il est nécessaire reconnaitre les

aspects sains et les aspects défaillants de sa personnalité. Il faut reconnaître et agir, en utilisant des termes psychologiques, soit sur son ego fonctionnel, soit sur son ego défaillant. Si le premier concerne les parties saines du patient, comme par exemple ses fonctions encore efficientes, le deuxième porte sur les handicaps de la personne, c'est-à-dire ses altérations cérébrales qui amènent des comportements bizarres et dysfonctionnels. La capacité de reconnaître, à un moment précis , si le patient agit par son ego défaillant ou par son ego fonctionnel donne au thérapeute la possibilité de mieux entrer en contact avec les besoins du patient, de reconnaître le sens de ses besoins et de soutenir ses crises, ses émotions. Reconnaître son « ego » utilisé à un moment donné, permet au thérapeute d'avoir la possibilité de faire reconnaître aussi au patient son ressenti, sa condition pathologique et de mieux la gérer, et ses capacités de l'exprimer. De lui donner la possibilité de mieux se connaitre et de mieux entrer en contact avec lui-même et ses potentialités.

Établir une alliance thérapeutique, c'est d'abord établir une relation d'empathie avec l'autre. Le thérapeute doit avoir une capacité empathique, c'est-à-dire une capacité d'entrer en syntonie avec le monde émotionnel du patient, de le comprendre et le ressentir, de comprendre et ressentir le sens de ses besoins et ses émotions : communication empathique. Le patient perçoit cette capacité, sent qu'il y a une possibilité de se donner à l'autre, de faire confiance à l'autre.

C.2.2 Ressenti corporel, activité réfléchie et confiance dans l'autre sont des aspects favorisants l'alliance thérapeutique en art-thérapie

Comment, par la danse et l'expression corporelle, peut-on entrer en contact avec l'autre, avoir confiance en lui et, donc, établir une alliance thérapeutique ?

Il y a une grande différence entre l'alliance thérapeutique en art-thérapie et d'autres formes de thérapie, par exemple la psychothérapie, qui va reprendre la différence entre psychothérapie et art-thérapie.

La « Psychothérapie à support artistique » va chercher pourquoi vous trouvez une chose belle. « L'Art-thérapie » aide à exprimer le goût esthétique, ce que la personne trouve beau. En art-thérapie, il s'agit simplement d'aider les patients à exprimer leur goût esthétique et leur style artistique.
La psychothérapie et la psychanalyse en particulier concernent l'acquisition de la capacité du patient de reconnaître son monde intérieur inconnu, les mécanismes du « Je sais que je sais » ; l'esthétique et l'art concernent les aspects relatifs «au plaisir du plaisir », avec la considération du plaisir esthétique comme manifestation fondamentale d'un ressenti corporel et de la recherche d'une gratification existentielle que l'opération artistique permet.

Dans l'empathie psychanalytique, le ressenti du thérapeute favorisant le lien thérapeutique est l'aptitude à éprouver et reconnaître ce que l'autre éprouve sans savoir ce qu'il vit et sans pouvoir le définir. Cette notion a fait l'objet de nombreuses réflexions en psychiatrie et en psychanalyse avec les théories de Heinz Kohut, Donald Winnicott, Wilfred Bion32(*) et de la part de théoriciens et praticiens de la relation, notamment Carl Rogers. À travers le jeu des squiggles, jeux créateurs établis entre le thérapeute et son patient, en Winnicott l'accès à l'imaginaire et au monde intérieur de l'enfant se fait de façon ludique et empathique.

Même la danse, utilisée à ces fins thérapeutiques : elle se base principalement sur

l'expression de l'état intérieur de la personne qui danse par ses mouvements et autres expressions corporelles. Pour l'harmonie corps/esprit, ces mouvements organiques, entendus comme mouvements archaïques instinctuels et intentionnels, révèlent les besoins du sujet, ce qu'il demande, ce qu'il sent, en invitant l'autre à le comprendre, à l'accueillir. L'aptitude à comprendre par ressenti, au -delà du mot, fait partie de chaque processus thérapeutique et est un élément sur lequel le

thérapeute travaille. Lui, avec sa capacité d'intuition et d'empathie, est capable d'entrer en relation avec le patient en favorisant une bonne pratique clinique. Mais, le ressenti corporel en art-thérapie, et en particulier à dominante danse-expression corporelle, se fonde aussi sur le sentiment du beau, sur une résonance esthétique, qui va renforcer le lien thérapeutique par un ressenti commun et incite à l'expression corporelle. Le psychanalyste Rudolph Schaffer, traitant de la relation mère-enfant, la pareille à une danse à deux, dans laquelle un rôle important est donné à l'activité réfléchie mutuelle, comme en art-thérapie33(*). Donc, l'art-thérapeute a une fonction réfléchie des goûts, émotions, aptitudes du patrimoine intérieur du patient et ce dernier est stimulé par la jouissance au contact du rayonnement de l'activité corporelle de l'art-thérapeute, et poussé à s'exprimer, en activant la fonction miroir, ainsi que les dernières découvertes neuroscientifiques l'ont montré.

Et si le produit des réalisations dans le cadre d'une thérapie à médiation artistique se confronte à la notion d'une relation transférentielle, en psychanalyse définie comme l'ensemble des réactions du patient en face de l'analyste, dans lesquelles il transpose ses fantasmes et ses conflits en les projetant sur l'analyste34(*), en art-thérapie.

« Art-thérapeute et patient sont impliqués conjointement dans un processus de création artistique. La production artistique n'est pas un support, elle est en elle-même le vecteur de transformation. Ce mot résume de façon satisfaisante l'idée que l'art (le processus de création artistique) est efficient, et donc ici thérapeutique, parce que c'est « par lui, en lui, avec lui » que le transfert opère».35(*)

Ce processus, grâce à ses mécanismes, donne, donc, une meilleure efficacité thérapeutique aux projets de soin de la personne en état de souffrance.

CONCLUSION

La personne atteinte de la maladie d'Alzheimer ou d'autres formes de démence avec des troubles associés est gravement pénalisée dans sa vie.

Ses déficits intellectuels, moteurs, et psychiques la rendent très dépendante de son entourage et affectent grandement ses capacités d'expression, de communication et de relation.

Améliorer sa qualité de vie suppose des interventions médicales, paramédicales et rééducatives tout au long de la vie fréquentes (soins de confort, soins médicaux, activités d'éveil et de stimulation, activités de socialisation..). La qualité de vie de ces personnes passe alors par une volonté de mieux-être, entendu comme la qualité existentielle (qualité de présence et élan existentiel), c'est à dire une qualité subjective difficile à évaluer et à cerner. La personne habituée, malgré elle, à se faire accompagner dans tous les gestes de la vie courante, à ne pas pouvoir communiquer de façon clairement compréhensible, à souffrir de douleurs chroniques, court hautement le risque de s'isoler, de s'enfermer et de s'enfoncer dans des attitudes mortifères et à tout le moins de perdre l'envie de communiquer ses intentions ou ses goûts; ou plus encore, l'élan existentiel ; c'est à dire le goût à la vie.

La difficulté d'évaluer sa souffrance, de la recevoir et d'en faire quelque chose, fait de l'Art-thérapie un moyen complémentaire de prévention et de traitement: l'Art-thérapie leur permet de trouver un lieu d'expression qui privilégie la personnalité et le goût de chacun et encourage la personne à prendre des initiatives et à faire des choix, avec un parcours où la plus petite unité de changement appréciable (l'item) est significative.

Nous avons tenté de montrer comment l'art-thérapie peut permettre à la personne âgée atteinte de troubles neurologiques, et donc en état d'extrême dépendance, de retrouver des possibilités d'autonomie et la capacité d'apprécier la vie et les belles choses, en lui donnant la possibilité de s'exprimer et d'exploiter de ses potentialités cachées, oubliées, mais encore vives et puissantes, à bénéfice de son image.

L'art-thérapie permet le développement d'une culture où la subjectivité du patient viendrait compléter les informations médicales. En Art-thérapie, on porte un autre regard sur la personne malade.

Elle commence à être considérée un sujet qui a des possibilités d'affirmer ses goûts, ses besoins, ses intentions ; elle existe, elle est capable d' aimer ce qu'elle fait, elle vit. Tout à long du mémoire sur mon expérience de stage chez la Maison Tiers Temps S.Maur, nous avons tenté de montrer qu'il y a dans les personnes des potentialités cachées d'exploiter le potentiel thérapeutique de l'Art, de retrouver un élan existentiel par l'élan corporel de la danse, d'apprécier la jouissance du jeu, de choisir et de s'engager à faire, même si atteinte de maladie sévère, non voyants et/ou déprimés.

La personne devient, ainsi, un sujet actif de son soin dès qu'elle est capable de ressentir, d'exprimer et de s'engager, de prendre du plaisir à le faire pendant les séances et d'être valorisée pour elle-même par l'implication artistique et la qualité de la relation avec l'art-thérapeute et avec l'entourage. Nous avons pu nous rendre compte que la relation est l'une des richesses du métier.

Comme nous l'avons souligné, nous savons par les neurosciences, que chez les patients atteints de démence la mémoire affective est préservée. Les expériences positives en Art-thérapie, alors, s'inscrivent dans leur mémoire comme la possibilité de retrouver des capacités qui semblaient perdues, au bénéfice de l'affirmation et de l'estime de soi, de la confiance en soi. Son intérieur (corps et esprit), son extérieur (son milieu et son entourage) et les liens entre les deux : le rétablissement de ce lien relationnel à son intérieur repose sur une amélioration de l'image et de la réalisation de soi, de la confiance en soi et dans l'entourage. Ce sont ces notions qui conditionnent le bien fondé du soin de la démence.

LISTE GRAFIQUES

Mme C ( p.46-49) Graf. 1-2-3-4-5-6-7 ;

Mme L ( p.53-55) Graf. 8-9-10-11

BIBLIOGRAPHIE

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ANNEXE I « Le Système de Neurones miroirs »

Dans l'aire F 5 du cortex prémoteur ventral du singe on a découvert, vers le milieu des années 1990, que certains neurones émettaient des potentiels d'action non seulement lorsque le singe faisait un mouvement de la main ou de la bouche, mais aussi lorsqu'il regardait simplement un autre animal ou un humain faire le même geste et quand il pense que ce dernier va effectuer cette action . On appelle ces neurones des « neurones miroir ». Les neurones-miroir ont d'abord été observés dans le cortex prémoteur ventral du singe macaque rhésus (aire F5) mais aussi ce type de neurones a également été trouvé chez certains oiseaux où ils sont activés à la fois lors du chant et lorsque l'animal écoute un congénère chantant (Wikipédia fr) : il existe également des neurones échos. Chez l'homme, il existe depuis avril 2010 une preuve directe de l'existence d'un « système de neurones miroirs » ; par imagerie cérébrale

fonctionnelle, il est possible d'observer ce système dans certaines régions du cortex cérébral, comme autour de l'aire de Broca, homologue à l'aire F5 du singe, au niveau du cortex pariétal inférieur et du cortex cinglé, dans les structures sous-corticales de la région limbique, précisément au niveau de l'amygdale et de l'insula. Pour plusieurs chercheurs ils constituent un élément central de la cognition sociale, depuis le langage jusqu'à l'art, en passant par les émotions et la compréhension d'autrui36(*). ] [][][]Ils jouent un rôle important dans l'empathie, c'est-à-dire dans la capacité à percevoir et reconnaître les émotions d'autrui, notamment sur la base du fait qu'un système miroir semble exister pour les émotions . Jean-Pierre Polydor, neurologue, dans son livre « Alzheimer mode d'emploi : le livre des aidants », consacre un chapitre aux neurones miroir. « La découverte des neurones miroirs par Rizzolatti sous-tend la méthode que je propose depuis longtemps pour mieux communiquer avec le patient : la gestuelle donne un supplément de sens aux paroles, et elle permet une contagion émotionnelle positive via l'empathie sous-tendue par ces neurones miroirs : par exemple faire attention au placement par rapport au patient, au ton de la voix, à la mimique et aux gestes qui accompagnent les paroles.» (Dr J.-P. Polydor, Extrait d'Interview pour Impact Santé. Source : www.impact-sante.fr, le 26 mai 2010)

Le Caravage,  « L'incrédulité de saint Thomas », exemple de résonance en cas de sensations tactiles

ANNEXE II - IPPOCAMPE ET AMYGDALE

L'hippocampe est une structure du cerveau des mammifères. Il appartient notamment au système limbique et joue un rôle central dans la mémoire et la navigation spatiale. Le système limbique inclut les structures qui composent les bords intérieurs du cortex (du latin `'limbus `' = bords) : l'hippocampe, le cortex cinglé, le cortex olfactif, l'amygdale. Il a longtemps été suggéré que ce système limbique constituait la base neuronale des émotions . Une des conséquences d'une lésion à l'hippocampe sur le comportement du rat est l'augmentation de l'activité (déplacement, exploration, etc.). Les psychologues et les neuroscientifiques sont généralement d'accord sur le rôle important de l'hippocampe dans la formation des nouveaux souvenirs des événement vécus (mémoire épisodique ou autobiographique)[. et serait responsable de la mémoire déclarative, la mémoire qui peut être verbalisée et qui comprend la mémoire des faits . L'hippocampe est une des premières structures atteintes dans la maladie d'Alzheimer, ce qui explique les problèmes de mémoire et de désorientation qui caractérisent l'apparition de cette pathologie neurodégénérative. Les personnes subissant de graves dommages à l'hippocampe sont susceptibles de souffrir de différents types d'amnésie.

L'amygdale est situé dans la région antéro-interne du lobe temporal, en avant de l'hippocampe. Elle est connecté avec l'hippocampe ; puis, avec le bulbe et le cortex olfactif, le cortex cérébral, en particulier avec les aires sensorielles associatives, le thalamus, l'hypothalamus, le striatum ventral et dorsal (noyau caudé). L'amygdale fait partie du système limbique et est impliquée dans la reconnaissance et l'évaluation de la valence émotionnelle des stimuli sensoriels, dans l'apprentissage associatif et dans les réponses comportementales et végétatives associées en particulier dans la peur et l'anxiété. La reconnaissance des émotions implique de multiples structures cérébrales faisant partie des structures limbiques ou paralimbiques. Ces voies sont idéalement appropriées pour générer des réponses du système endocrinien, du système nerveux autonome et des voies somatomotrices associées aux émotions. Elle semble aussi jouer le rôle de mise en éveil rapide du système cognitif. Ce système d'alerte peut aussi fonctionner de manière automatique, inconsciente. Si on présente très brièvement un visage effrayé, de façon subliminale, sans que le sujet ait le temps d'en prendre conscience, on observe pourtant une activation de son amygdale. L'amygdale joue principalement le rôle de détecteur de danger mais n'est pas limitée aux émotions négatives. Tous les stimuli émotionnels sont associés avec une plus grande probabilité d'activation de l'amygdale que les stimuli neutres. En ce qui concerne le traitement des mots, aussi les mots émotionnellement positifs ou négatifs activaient plus l'amygdale gauche que les mots neutres. Les mots émotionnellement positifs activent en outre les régions du striatum impliquées dans le système de récompense et auxquelles l'amygdale est connectée.

ANNEXE III - LA MALADIE D'ALZHEIMER EXPLIQUÉE AUX FAMILLES

Comment aider et communiquer : livret explicatif aux familles des patients atteints de la maladie d'Alzheimer- DOMUSVI « TIERS TEMPS SAINT MAUR » (EXTRAIT)

S'il n'existe pas vraiment de recette dans l'approche de ces personnes malades, quelques points de repère sont essentiels à garder en tête

· Se mettre face à la personne, à hauteur de son regard ; parler en la regardant dans les yeux

· Etablir un contact par le toucher en lui prenant délicatement la main ou en lui touchant l'épaule, pour capter son attention

· Expliquer par des mots simples et des phrases courtes ce que vous attendez de la personne

· Garder un ton calme et rassurant. Bien articuler, parler d'un ton audible sans crier. Privilégier l'invitation à faire, les propositions plutôt que les ordres

· Ne pas hésiter à utiliser les gestes, les expressions du visage pour illustrer votre propos (langage non-verbal)

Aussi, stimuler la personne, en évitant sa mise en échec, en lui demandant des actes ou des notions trop difficiles pour elle ; à l'inverse, tout faire à la place de la personne malade, lui parler comme à un enfant sont des comportements qui tendent à accentuer la perte d'autonomie. Lorsque l'aidant fait tout à sa place, la personne âgée n'a plus à faire fonctionner son cerveau pour entretenir les capacités restantes et l'oubli progresse d'autant plus vite. La participation est essentielle. En adoptant un ton infantilisant, on risque d'agacer la personne ou de l'installer dans une position qui majore la dépendance et épuise les proches. En étant attentifs à ces recommandations, l'entourage va limiter les troubles notamment les troubles du comportement, souvent déclenchés, comme l'on a déjà dit, par des échecs de la communication, des incompréhensions mutuelles.

ANNEXE IV- EVALUATION IMPLICATIONS RELATIONNELLES DE MR E. ET MME B.

A. IMPLICATION DE MR E., ATTEINT D'AVC ET COMPROMISSION DU LANGAGE, ANALYSÉE PAR L'INTERMÉDIAIRE DE SA PARTICIPATION AUX SÉANCES ET LA RICHESSE DE SON EXPRESSION VERBALE

Graf. 12

Participation aux séances :1. Absent à la séance ; 2. apathique et indifférent ; 3.Hésitant ; 4.Intéressé ; 5. Actif et engagé à faire

Expression verbale :1.Absent à la séance; 2. Rares expressions verbales; 3.Expression verbale hésitante; 4. Suffisamment riche, fluide et claire ; 5. incessante et élaborée

B. IMPLICATION DE MME B, ATTEINTE DE PARKINSON ET DEMENCE SEVERE, ANALYSÉE PAR L'INTERMÉDIAIRE DE LA DURÉE DES SÉANCES ET LE MODE DE RELATION À L'ART-THÉRAPEUTE, PRÉCISÉMENT LA QUALITÉ DES CONTACTS

Graf.13

Durée de la séance : 1. Absente à la séance ; 2. Finit la séance en avant sa durée fixée; 3. Respect de la durée avec de l'effort ; 4. Respect de la durée sans de l'effort ; Active et engagée à faire 

Rel/art-th., qualité contacts : 1. Agressifs ; 2. Polis ; 3.Cordiaux ; 4.Affectueux ; 5. Demande d'aide pour continuer la séance

FACULTE LIBRE DE MEDECINE

UNIVERSITE CATHOLIQUE DE LILLE

&

AFRATAPEM

Mémoire de fin d'étude du Diplôme Universitaire

d'Art-thérapie

Année 2013

Par FORTINO Isadora

UNE EXPÉRIENCE D'ART-THÉRAPIE À DOMINANTE DANSE/EXPRESSION CORPORELLE AUPRÈS DE PERSONNES ÂGÉES ATTEINTES DE LA MALADIE D'ALZHEIMER OU D'AUTRES TROUBLES APPARENTÉS

La vieillesse, surtout si accompagnée par des formes de pathologies, est souvent rude. Elle blesse l'autonomie ; fragiles les liens, cause une perte de valorisation de son propre image psychique et physique. Ses déficits intellectuels, moteurs et psychiques la rendent très dépendante de son entourage et affectent grandement ses capacités d'expression, de communication et de relation. Ce mémoire relate une expérience d'art-thérapie à dominante danse/expression corporelle avec des personnes âgées atteintes des différents troubles de démence chez la maison de retraite médicalisée Tiers Temps -Saint Maur, Lille. C'est notre hypothèse qu'il est possible d'améliorer la qualité existentielle de la personne âgée démente par l'exploitation du pouvoir expressif et relationnel de l'Art. Nous allons montrer, donc, comment l'art-thérapie peut permettre à la personne âgée atteinte en état d'extrême dépendance de retrouver et affirmer son goût pour la vie, en lui donnant la possibilité de s'exprimer et la poussée à faire sortir de l'oublie des potentialités encore fortes. L'Art-thérapie, ainsi, aide à retrouver la capacité d'apprécier la vie et les belles choses, à retrouver des possibilités d'autonomie et de liberté. Il est rendu compte aussi de deux études de cas prises en charge selon la rigueur méthodologique du modèle de l'Ecole de Tours.

Mots clefs : personne âgée ; démence ; art-thérapie ; danse et expression corporelle; élan corporel; communication-relation 

AN EXPERIENCE OF ART-THERAPY WITH OLDER PERSONS AFFECTED WITH ALZHEIMER'S PATHOLOGY OR OTHER SIMILAR DISORDERS

Old age, especially if accompanied by certain pathologies, is usually difficult. It can damage an individual's autonomy, weaken connections and diminish the very value of his or her psychological and physical image. Intellectual disorders, motor or psychological, bring the person to a state of dependence on his or her living context and debilitate the capacity of expression, communicational as well as within relationships. This dissertation recounts an experience of Art Therapy (dance- corporeal expression) with older persons affected with different disorders of dementia at a facilitated care home, Tiers Temps, Saint Maur, Lille. Our hypothesis is that it is possible to improve the quality of life for patients through the expressive and relational power of art. Therefore, we will show how Art Therapy can permit an elderly person with dementia to find and affirm the very joy of life. Art Therapy, additionally, helps boost some possibility of autonomy and of liberty. It is also held account according to the methodological rigor of the Tours' school model.

* 1 LA MALADIE D'ALZHEIMER EXPLIQUÉE AUX FAMILLES, DOMUSVI « TIERS TEMPS SAINT MAUR »

* 2 Justin M. Feinstein et DanTranel de l'université de l'Iowa

* 3 Constitution de l'OMS élaborée et adoptée lors des conférences internationales de la santé, 2005

* 4 Leplège, 2001 ; Rejesky et Mihalko, 2001, cités en Wikipédia fr.

* 5 R. FORESTIER, Tout savoir sur l'art occidental , 2004

* 6 R . FORESTIER, Tout savoir sur l'art-thérapie, 1999-2007

* 7 G. Rizzolatti-C.Senigaglia : Il cervello e i neuroni specchio. Raffaello Cortina Editore, Milano 2006

* 8 D. Freedberg, V.Gallese, en « Prometeo », 103/2008

* 9 Jean-Pierre Polydor, Alzheimer, mode d'emploi, le livre des aidants , 2009

* 10 R. FORESTIER, Tout savoir sur l'Art-thérapie, p.41

* 11 R.FORESTIER, Tout savoir sur l'art-thérapie , p.50

* 12 Supplément à V édition de Tout savoir sur l'Art-Thérapie, cité

* 13 R. Forestier, Tout Savoir sur l'Art-thérapie, cité

* 14 Claudio Gori, article dans la Revue de « Psicogeriatria», 2011, I

* 15 Danielle Quidonoz, relation tenue à Lion, janvier 2006

* 16 A.M. FASANARO et al., article dans la Revue de « Psicogeriatria», 2010, I

* 17 Anna Peruzzi, article dans la Revue de « Psicogeriatria », 2011, II.

* 18 Elena Cerruto, Danse et chant des neurones miroirs, en- ligne, ww.associazionesarabanda.it

* 19 V. Cros, 2004

* 20 R. Laban, « La maitrise du mouvement »

* 21 E. De Martino, 1961

* 22 R. FORESTIER, Tout Savoir sur l'art thérapie, cité

* 23 Mémoire Catherine PERRET, 2008, p.20

* 24 M. KLEIN,  La psychanalyse des enfants  (1932)

* 25 D. Winnicott, Therapeutic Consultation in Child Psychiatry,( 1971) 

* 26 Mémoire de C. PERRET cité, p. 22

* 27 Mémoire de C. PERRET cité, p 60.

* 28 Daisy JOUAUD, Mémoire DU Art-Thérapie, 2010

* 29 Mémoire cité, p. 71

* 30 Supplément à la 5 édition de Tout savoir de l'Art-Thérapie

* 31 E.R. Zetzel, W.W. Meissner, Basic concept of psychoanalytic psychiatry, New York: Basic Book 1973

* 32 Heinz Kohut, L'introspection, l'empathie et le détour de la santé , Revue française de psychanalyse, Vol. 49, n° 5, 1985 ; Wilfred Bion, Aux sources de l'expérience, 1962 ; L'Attention et l'Interprétation, 1970

* 33 R. Schafer, Mothering, Open Books Publishing Ltd, London 1977

* 34 Laplanche & Pontalis, 1967

* 35 Anne Pouchelle, p.10 « L'atelier d'art-thérapie », publication UFR TOURS 2000,citation de Valerie Cros

* Les neurones miroirs, G Rizzolatti et al. , Pour la Science, Janvier 2007, p 44-49






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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry