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L'égalité des armes dans le cadre de l'arbitrage investisseur-état.

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par Michael Farchakh
Université Paris 1 : Panthéon-Sorbonne - Master 2 - Droit International et Organisations Internationales 2015
  

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ii) Le phénomène des demandes de masse

Il est assez commun dans un arbitrage d'investissement d'avoir un litige comportant plusieurs investisseurs face à l'État hôte. Les scénarios classiques sont ceux des partenaires d'affaires agissant en tant que codemandeurs, des actionnaires d'une société agissant en leurs propre noms, ou encore celuid'une demande présentée par une société et ses actionnaires conjointement. La présence de deux, trois voir cinq ou six investisseurs face à l'État n'a jamais posé problème. Des premières difficultés se sont cependant dessinées avec des cas tels que Bayview c. Mexique83(*) et Anderson c. Costa Rica84(*) qui comportaient respectivement 46 et 137 demandeurs, compliquant ainsi beaucoup plus les données. Mais le bouleversement réel a lieu avec l'affaire Abaclat c. Argentine, dans laquelle plus de soixante mille demandeurs italiens, obligataires de la dette souveraine argentine, ont initié un recours collectif suite à la crise financière de 2001.

Cette affaire a été comparée aux class actions et mass actions connues essentiellement du droit américain. Ces procédures permettent d'unir les demandes d'un grand nombre victimes en une seule action contre un même demandeur. Le règlement CIRDI est complètement silencieux sur l'admissibilité de telles demandes, le Tribunal arbitral a donc décidé de trancher cette question par application de l'article 44 de la Convention de Washington85(*). Le 4 aout 2011, le tribunal se reconnait compétent par une majorité de deux contre un86(*). Le professeur Georges Abi-Saab dans son opinion dissidente argue la contrariété de la décision aux garanties du procès équitable:«handling mass claims in a single arbitral case or proceeding, or as one arbitral suit or action, necessarily undermines the due process rights of the Respondent and would be unmanageable»87(*). Face à un nombre tellement massif de requérants, il est difficile de concevoir comment l'État répondeur pourrait exercer son droit de défense de manière satisfaisante, une rupture de l'égalité des armes est presque assurée.  «Where due process in traditional judicial proceedings applies equally to both sides, mass claims procedural rules usually favor claimants»88(*). Les contentieux de masse prévus dans les procédures domestiques, ainsi que dans certains contextes internationaux, sont conçus de façon à respecter les exigences d'une bonne administration de la justice, mais les architectes du système CIRDI n'ont pas adapté sa structure à de tels scénarios. Rien dans la Convention de Washington ou dans les règles d'arbitrage CIRDI ne prohibe explicitement les demandes de masse, mais une telle interprétation extensive ne va-t-elle pas à l'encontre du consentement de l'État ? En l'absence de toute disposition à cet effet, l'Argentine n'avait aucun moyen de prévoir la possibilité d'un tel recours contre elle, on pourrait donc arguer qu'un consentement spécial aurait été requis pour permettre ce processus89(*)Consent to jurisdiction is the exception, not the default rule.Thus, when the Convention is silent as to whether the parties consented to jurisdiction, the tribunal should have found there was no consent and therefore no jurisdiction»90(*).

Toutes ces imprécisions dans la détermination de la qualité d'investisseur contribuent donc de différentes manières à l'érosion de l'égalité des armes dans le cadre de l'arbitrage d'investissement. Sans possibilité de prévoir contre qui et de quelle manière il pourrait être attrait devant les tribunaux, l'État n'a aucun moyen de se défendre adéquatement.

* 83 CIRDI, Bayview Irrigation District et autres c. États-Unis du Mexique, Sentence du 19 juin 2007

* 84 CIRDI, Alasdair Ross Anderson et autres c. Costa Rica, Sentence du 19 mai 2010

* 85 Donovan (D.), «Abaclat and others v Argentine Republic As a Collective Claims Proceeding», in ICSID Review, Vol. 27 No. 2, 2012, p. 261

* 86 Wiessner (S.), Democratizing International Arbitration? Mass Claims Proceedings in ABACLAT v ARGENTINA, St. Thomas University School of Law Legal Studies Research Papers, 2014, p. 60

* 87 CIRDI, Abaclat et autresc. Argentine, Opinion dissidente de Georges Abi-Saab, Para. 120

* 88 Van Houtte (H.) & Yi (I.), «Due Process in International Mass Claims», in Erasmus Law Review, Vol. 1 No. 2, 2008, p. 70

* 89 Demirkol (B.), «Does an Investment Treaty Tribunal Need Special Consent for Mass Claims?», in Cambridge Journal of International and Comparative Law, Vol. 2 No. 3, 2013, p. 613

* 90 Raviv (A.), «ITA-ASIL 2014: Mass and Class Claims in Arbitration», in Kluwer Arbitration Blog, at: http://kluwerarbitrationblog.com/2014/04/22/ita-asil-conference-mass-and-class-claims-in-arbitration/ (10 décembre 2015)

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