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Problématique du foncier rural et développement local dans la commune de Klouekanmey.

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par Adrien S. A. ALOFA
Université d'Abomey-calavi (Bénin) - Maitrise 2014
  

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2.2. Modes d'accès au foncier rural dans la Commune de Klouékanmè

2.2.1 Historique de l'occupation des terres dans la Commune de Klouékanmè

L'occupation primitive du sol (principe d'antériorité de l'installation) dans la Commune de Klouékanmè confère aux acteurs (groupes socioculturels premièrement installés), des droits fonciers coutumiers (droit de feu et de hache) qu'on peut qualifier de droits de "propriété de fait". L'occupation se faisait donc

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par libre installation où l'on défriche l'espace libre jusqu'à la lisière du champ voisin, où que l'on s'arrête après épuisement total de la force de travail. Les droits de propriété foncière s'enracinent définitivement avec le temps lorsque le même espace est cultivé par le même groupe durant un temps relativement long. Les stratégies liées à ce mode d'appropriation de l'espace sont l'organisation de certaines cérémonies qui permettent à l'occupant de s'assurer que l'endroit qu'il a choisi est propice à son installation.

Elles varient d'un groupe socioculturel à un autre et d'un lignage à l'autre. Des pratiques d'occupation primitive du sol, découlent d'autres modes d'appropriation collective des terres que sont la donation coutumière au sein des lignages. Le don est fait pour récompenser un bienfaiteur, soit pour témoigner sa générosité envers un ami, un frère ou un voisin, soit encore pour éviter d'être exposé aux attaques. Les transactions foncières s'opéraient donc entre groupes parentaux et amis contre échange symbolique de biens tels que : le tabac, l'alcool, les animaux (petits ruminants, coq).

Ces biens servaient à l'organisation d'une cérémonie coutumière appelée « botonou» en adja, la langue principale de la Commune. La cérémonie de « botonou » constitue en fait un pacte entre les parties, autrement dit un acte officiel de vente et de publicité restreinte à laquelle sont conviés parents, amis et limitrophes de la parcelle concernée et qui tiennent lieu de stratégies de sécurisation. Ces domaines coutumiers, lignagers ont disparu du paysage coutumier dans la Commune, sauf les reliques forestières sacrées tenant lieu de culte endogène, au profit des domaines individuels.

L'occupation primitive du sol et le droit de propriété lignagère ont donné lieu à des modes secondaires d'accès individuel (ou groupes d'individus) à la terre encore appelés modes dérivés.

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2.2.2. Modes d'accès au foncier rural dans la commune

Plusieurs modes permettent d'accéder à la terre dans la Commune. Au nombre des modes d'accès à la terre, on peut citer : l'héritage, l'achat, le métayage, la location, le don, l'emprunt et le fermage. De nos jours, tandis que des modes sont émergents, d'autres sont tombés en désuétude. Ainsi, le contrat palmier, le don et l'emprunt sont moins en vogue dans la Commune. Quant à l'achat, il est de plus en plus pratiqué avec le développement du marché de terre.

? Héritage : (égou doudou / tchinon gnigban)

C'est le mode le plus dominant dans la Commune de Klouékanmè. L'héritage est par excellence le mode d'accès par lequel les enfants jouissent des biens de leur parent défunt. A Klouékanmè comme chez la majorité des Adja, seuls les enfants du sexe masculin ont droit à l'héritage foncier.

En effet, une terre héritée confère à l'héritier, tous les droits de propriété, c'est-à-dire les droits d'administration et les droits opérationnels. Les femmes sont exclues de l'héritage foncier car chez les Adja, la terre selon la tradition est patrilinéaire et virilocale parce qu'une terre héritée par une femme deviendra la propriété des enfants du lignage de son mari, ce dernier appartenant à un autre lignage. Cependant, des mutations sont intervenues car de plus en plus, elles peuvent bénéficier de certains principes très peu pratiqués. Il s'agit de la possibilité de legs de terre d'un père à sa fille, de la possibilité d'héritage si les descendants ne sont que des filles uniques ou de la possibilité pour la famille ou les frères de récompenser une fille ayant fortement investi dans les funérailles de son père en lieu et place des garçons (Biaou, 1998)

? Achat (gnigban hlouéhloué)

L'achat vient en deuxième position après l'héritage. Il consiste à obtenir définitivement et à titre onéreux, une portion de terre d'un individu appelé vendeur. Ainsi le nouveau propriétaire c'est-à-dire l'acheteur détient tous les droits de propriété (l'usus, le fructus et l'abusus) sur le patrimoine foncier. L'achat de terre, apparu dans un passé récent, est aujourd'hui fréquent à

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Klouékanmè. Il arrive que des cas d'achat soient remis en cause pour défaut d'authenticité des actes de transaction ou par escroquerie organisée par les vendeurs eux-mêmes. Les cas de remise en cause d'acte de cession définitive de parcelle, portent souvent sur les héritages non-partagés.

? Don (gnigban nanan gbidji- gbidji)

Mode d'accès à la terre depuis les temps anciens jusqu'à un passé récent, le don est en voie de disparition. Il consiste à céder définitivement un patrimoine foncier à un tiers descendants, (neveux, oncle, ami, etc.) à titre gratuit et sans exigence de contre partie en espèce ou en nature. Les donateurs sont souvent de `grands' propriétaires terriens, et l'acte de donation traduit généralement la volonté de récompenser le donataire pour un service spécifique rendu ou un comportement exemplaire ou encore selon les liens d'amitié ou de parenté. C'est ce mode qui favorise plus les femmes en générale dans le Couffo et en particulier celles de Klouékanmè (Biaou, 1998)

? Location (gnigban haya-haya)

La location, apparue dans un passé récent (il y a 20 à 30 ans) a connu d'évolution. Au départ, elle consistait à louer une parcelle à un exploitant pendant une longue durée variant entre 10 et 20 ans. Le prix de la location est négocié et fixé en fonction de la superficie. Ce prix est versé au début de la conclusion du contrat et demeure toujours oral. Le locataire n'a de droit que sur les cultures saisonnières. Il lui est interdit d'exploiter les cultures pérennes et d'entreprendre certains aménagements sur la portion de terre (plantation d'arbres, etc.).

Actuellement, la durée de la location varie entre 1 à 3 ans. Le prix du contrat est négocié par unité de superficie, suivant le degré de fertilité des sols (1500 à 2000 F/ bowo équivalent 400 m2 par an).

C'est le mode qui permet surtout aux femmes et aux autochtones sans-terres, d'accéder à la terre dans la Commune de Klouékanmè et ceci surtout dans le Sud de la Commune. Si de plus en plus, les propriétaires terriens optent pour la

location, c'est dans l'objectif de ne pas partager les risques liés aux mauvaises récoltes (comme dans le cas de métayage) et aussi de disposer de l'argent en espèce pour résoudre les problèmes courants de la vie du ménage (MCA-Bénin, 2008)

? Emprunt (gnigban wéwé)

Il consiste à mettre la terre gratuitement à la disposition d'un individu pendant un certain nombre d'années. Ce mode existait entre propriétaire et ami(s) ou autres membres de la famille, dans un passé récent. Sous le mode emprunt, l'exploitant jouit du droit d'exploitation des cultures non pérennes. Il n'a pas le droit sur les arbres et fruitiers mais peut les entretenir. Par exemple, élaguer les branches des palmiers afin de permettre la croissance des cultures. Lorsque le champ est colonisé par les palmiers, ce dernier (l'exploitant) quitte et cesse de mettre en valeur la terre. Ce sont le plus souvent, les femmes et les jeunes sans terre qui ont accès à la terre par le mode emprunt. Ce mode a évolué où il s'effectue entre les membres d'une même famille surtout la famille restreinte : on parle de l'affectation (MCA-Bénin, 2008)

? Métayage (déma)

Le métayage encore désigné par le terme "Déma" en Adja, ce qui signifie littéralement "partage des cultures mises en valeur", est l'un des modes d'accès à la terre à Klouékanmè. Si au départ, il consistait à partager les palmiers entre le propriétaire terrien et l'exploitant, ce contrat est maintenant basé sur le partage des récoltes depuis plus de 20 ans. C'est-à-dire que le propriétaire terrien laisse sa parcelle au métayer pour exploitation et à la fin de chaque saison agricole, le fruit de la récolte est partagé suivant une clé de partage définie au début de la saison. En règle générale, le partage se fait dans une proportion de 50 % pour chacun des bénéficiaires ou de 30 % pour le propriétaire contre 70 % pour l'exploitant. Bon nombre d'exploitants ont recours à ce mode dans la Commune de Klouékanmè parce que ne possédant par de terre propre à exploiter. Ce sont

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surtout les jeunes agricoles, les femmes et les autochtones sans-terres (MCA-Bénin, 2008)

? Fermage

Contrat de louer un espace rural sur une longue durée (20 à 30 ans) à un paysan pour des activités de production animale comme végétale.

La figure6 illustre les différents modes d'accès à la terre en milieu rural dans la Commune de Klouékanmè.

Héritage Achat Métayage Location Emprunt Fermage Don

Figure 6: Montrant les différents modes d'accès à la terre en milieu rural dans la Commune Source : Enquête de terrain, Octobre 2013

De l'analyse de la figure 6, il ressort que sur les 276 personnes enquêtées, 44 % sont des héritiers ; 24 % sont devenus propriétaires par achat ; 17 % par métayage ; 6 % par location; 4 % par emprunt; 3 % par fermage et 2 % par don. Donc l'accès à la terre dans la Commune de Klouékanmè se fait prioritairement soit par héritage ; par achat et par métayage.

En dehors de ces modes principaux d'accès à la terre, les acteurs du foncier rural combinent des différents modes pour bénéficier plus de terre. La figure 7 présente les différentes combinaisons.

80 70 60 50 40 30 20 10

0

Héritage-Achat

Héritage-Mét ... Héritage-Locat Héritage-Emp15 Héritage-Ferma

Héritage-Don Achat-Met Achat-Locat Achat-Empr Achat-Ferm Achat-Don

Métayage-loc ... Métayage-Emp Métayage-Fer Métayage-Don

Loc-Emp Loc-Fer Loc-Don

Emp-FER Emp-Don Fer-Don

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Figure 7: différentes combinaisons de l'accès à la terre dans la Commune de Klouékanmè Source : Travaux, octobre 2013

D'après les différents acteurs, ce sont : l'héritage, la donation, et l'achat conférant le droit de propriété ; l'emprunt, la location, le métayage et le fermage qui confèrent l'usufruit des stratégies liées à ces différents modes et celles de leur sécurisation ont varié suivant le temps dans la Commune.

Avec la poussée démographique, d'autres changements sont intervenus dans les modes d'acquisition à la terre. Ainsi sont apparus l'emprunt, la location et l'achat. De nos enquêtes, à Klouékanmè centre par exemple, le prix d'achat de parcelle à cultiver varie entre (3.000.000) F.CFA à (3.500.000) F.CFA l'hectare contre 1.000.000 à 1.500.000 francs l'hectare à Sawamè hossouhoué. (Enquête de terrain Alofa, octobre 2013) ce qui fait que la terre n'est plus disponible sans argent dans la commune.

La location varie entre deux mille cinq cents francs (2500 F) et trois mille francs (3000 F) le Kantin (400m2) donc entre soixante-deux mille cinq cents francs (62500 F) et soixante quinze mille francs (75000 F) l'hectare par an. C'est-à-dire les deux saisons culturales (xwé et zo en Adja). Quant au métayage, le propriétaire terrien prend le tiers (1/3) de la récolte.

Les stratégies de sécurisation foncière quant à elles varient aussi suivant les modes d'accès. En effet, de nos jours, le recours aux bornes végétales (Jatrofa

cacus « gbododoui », Dracaena arbora « agnan » et erythrina senegalensis « ahwici») devient le premier réflexe de sécurisation des limites. Cette pratique ancestrale est toujours d'actualité dans la Commune de Klouékanmè parce qu'elle est relativement efficace. En effet, ces plantes résistent à la sécheresse à cause de leur forte teneur en eau et leur forte capacité de régénérescence.

D'autres ont recours à des cultures spécifiques pour marquer les délimitations; c'est le cas des boutures de manioc, de l'ananas, des pieds d'oranger, de teck ou encore de palmier à huile qu'on plante sur les limites des domaines. Par ailleurs la figure présente les différents types de plantes et les propitiations

La planche1 montre quelques espèces utilisées pour la délimitation des terres en milieu rural de façon traditionnelle.

P1a: montrant Dracaena P1b: montrant l'Erythrina senegalensis

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Planche1: montrant quelques espèces de délimitation des terres en milieu rural dans la Commune de Klouékanmè

Prise de vue : Alofa, octobre 2013

La figure 8 suivante trace quelques proportions de certaines espèces dans la Commune de Klouékanmè.

Effectifs

150

100

50

0

Espèces

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Figure 8 : Type des plantes et leur proportion pour la sécurisation foncière Source : Travaux de terrain, octobre 2013

De l'analyse de la figure 8, il est constaté que les pratiques traditionnelles utilisées pour sécuriser les terres constituent l'implantation d'arbres sur les limites.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote