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Foncier et stratégies d'accès et de contrôle dans les anciennes plantations coloniales au Cameroun. L'exemple de la compagnie ouest Cameroun.

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par Jonas Aubert Nchoundoungam
Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne - Master 2016
  

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Ière PARTIE : HISTOIRE DE LA PLANTATION ET DE SON ACCAPAREMENT FONCIER SUR L'ESPACE ENVIRONNANT

Pour comprendre davantage les stratégies paysannes d'accès et de contrôle de la terre tout autour et dans les plantations de la C.O.C., il est important de marquer un temps d'arrêt sur l'histoire de la plantation de la C.O.C et de l'accaparement foncier dont elle a fait et continue encore de faire preuve de nos jours, il nous semble donc logique d'analyser notamment la situation foncière du pays Bamoun en général et les circonstances de l'implantations des plantations coloniales en particulier la C.O.C, et enfin tenter une clarification même des titres de propriété de cette plantation.

I. SITUATION FONCIERE PASSEE ET ACTUELLE DU PAYS BAMOUN

1. Hiérarchisation du pays Bamoun et stratification de la tenure du sol

Situé entre 4°26'- 6°15'50'' N et 10°15' et 11°30' E, en contrebas de la dorsale camerounaise composée de sommets imminents (Manengoumba - 2411m, Bamboutos - 2740m, Oku - 3011m), le pays Bamoun18 fort de ses 7687 km2 se déroule en une série de collines convexo-concaves que surmontent les unités topographiques que sont le Mbetpit, le Nkogham et le Mbam ; celles-ci recouvertes en partie par des cuirasses d'accumulation héritées des variations climatiques du quaternaire. La région ayant été affectée par une forte activité volcanique, les collines et les espaces environnants se sont recouverts de cendres et des cratères et des lacs s'y sont formés (S. Morin, 1989, 118p.). L'on y observe une organisation de type pyramidale, doté d'institutions fortes. À la tête du royaume : le roi (Mfon), assisté de trois adjoints (Nji Ngbetnyi) et de sept conseillers du royaume (Komngu) et à la base les paysans. Le royaume Bamoun est comme un Etat dans 1'Etat. C'est un « grand finage » au sens propre du terme, c'est-à-dire, un territoire sur lequel les populations installées, exercent leurs droits agraires. Traditionnellement, la terre est le bien collectif de tous les habitants. Chaque individu peut recevoir en jouissance, une parcelle du patrimoine communautaire.

18 Confère annexe 2 : carte de localisation du pays Bamoun (Noun)

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Parlant de la stratification de la tenure du sol en pays Bamoun, le roi, en sa qualité de possesseur de toutes les terres, découpe le territoire de la chefferie en sous-chefferies ou en quartiers, à la tête desquels il place des chefs, auxiliaires. Ces derniers ont, entre autres, la charge d'installer les ressortissants qui désirent exploiter une parcelle de terre sur les portions du territoire qui leurs sont confiées.

Le paysan était à la base, il avait le droit d'usage et en aucun cas celui de propriété et par conséquent, il ne pouvait aliéner la terre. La descendance pouvait dans une certaine mesure continuer à l'exploiter mais disposait des mêmes droits que ses ancêtres. Il fallut attendre les reformes du Fon Njoya de son retour de Victoria en 1905, lorsqu'il déclare : « l'arbre qui est planté par un homme devient la propriété de cet homme »19

L'ensemble des terres était divisé en domaines sur lesquels étaient installés les chefs de lignages (Nji Ngwen), les princes (Njimonfon), les intendants (Mutnjü Ngwen), les colons (Noufà) et les serviteurs (Kpèn). Chaque catégorie sociale a ses attributions qu'elle n'outrepasse point sous peine de sévères sanctions.

La cour royale est complétée par un aréopage composé d'une noblesse palatine dont Njifonfon, Titafon, Komshushut, Titangu, Tupanka, Manshut, Shushut. La reine mère (Sheitfon) a joué un rôle important dans la vie de la nation. Les reines (Ne gbiéfon) et les princes (Njimonfon) occupent une place de choix dans la société. Un hommage particulier fut rendu à l'oncle du roi Njoya.

La population est composée de dignitaires et de serviteurs (Kpèn). Chaque unité élémentaire a à sa tête un «Ngâjü» qui se réfère à un «Nji» qui est soit son père, soit son maitre. Les hommes libres étaient inexistants, le statut de la noblesse pouvant disparaitre du jour au lendemain. Le serviteur est inaliénable ; un service mal rendu était un motif pour être vendu. Une femme soupçonnée de maléfice était vendue.

Nji et Monji sont des nobles qui entretenaient le roi du fait de leur importance économique. Une personne d'origine servile pouvait devenir Nji pour sa bravoure.

L'instance suprême est le `Mutngu», organe de police, de justice et même de gouvernement qui peut déposer le roi en cas de nécessité. Il est composé de notable appartenant le plus souvent à la génération du défunt roi ou ayant servi sous lui.

19André, op. cit

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Sources : M. MOUPOU, 1991 ; WARNIER (J.P), 1984

Encadré 1 : Instances juridictionnelles du pays Bamoun

a) le roi gardien des terres

Le roi a le droit de disposition sur toutes les terres de son royaume. Il exerce ce droit en qualité de garant et gardien des terres pour la nation. Exception des terres appartenant aux Kom, il avait le pouvoir de procéder à une redistribution des terres non mises en valeur, de disperser des terres des njü (concessions) dont les habitants n'avaient pas respecté la politique agraire du royaume. Aucune procédure ou démarche foncière ne peut s'effectuer sans l'approbation du roi ; NJOYA20 est très clair dessus. Personne ne peut vendre une parcelle de terrain sans autorisation du roi. Le roi donne une notification de vente au vendeur, ainsi qu'à l'acheteur et inscrit la vente dans son livre».

Etant le Mfon Pamom, toutes personnes installées sur le territoire Bamoun devait verser des tributs au roi. Les taxes ainsi recueillies contribuaient au financement des projets du royaume et permettant ainsi le fonctionnement de cette dernière. Or avec l'arrivée des colons français, et plus tard la titrisation des domaines qui s'en ait suivi, l'équilibre se trouve bouleverser car il y a une suppression des tributs à verser à la chefferie, mais encore la main d'oeuvre qui pouvait encore servir à la réalisation de certains grandes infrastructures du royaume se retrouvent enrôler parfois même de force c'est-à-dire contre leur gré, dans les grandes plantations coloniales.

De plus les migrants non autochtones qui arrivent ne sont plus sous l'autorité du roi mais plutôt des maitres des domaines, ce qui veut dire qu'ils sont non seulement exemptés de payer des tributs sur la taxe foncière au sultanat, mais en plus ne sont pas tenus d'apporter des présents en culture lors de la fête du Ngouon21.Cette situation ainsi décrite contribue à fragiliser l'autorité et le rôle du pouvoir coutumier Bamoun dans la gestion foncière de son territoire. La terre en pays Bamoun n'étant pas à vendre, mais pouvant tout au plus être louée, et le roi en qualité de gardien des terres et garant de la distribution auprès des paysans et des allochtones qui en font la demande, y veille personnellement, car il en va de l'intérêt de la

20 TARDITS, 1980, p.381

21 Fête traditionnelle du peuple Bamoun, autrefois elle désignait la fête de récolte, mais avec le temps celle-ci est devenue l'identité même de ce peuple de vaillant guerrier.

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communauté. Il faudra attendre l'arrivée des Français en 1916 pour voir apparaitre les premières ventes de terres (Moupou, 1991).

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