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Assurance de responsabilite des aéronefs immatricules en République Démocratique du Congo


par Patient Ibrahim SUMAÏLI
Université de Kisangani - Droit Économique et Social 2018
  

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§2. Etat des lieux des compagnies aériennes immatriculées en RDC et assurées à l'étranger.

A l'exception de CONGO AIRWAYS qui a une police d'assurance avec la SONAS, toutes les autres compagnies immatriculées en RDC exercent soit sans police d'assurance soit avec une assurance conclue à l'étranger46(*). C'est le cas par exemple de FLYCAA ou de HEWA BORA.

Le tragique accident d'avion survenu à Kisangani le 8 juillet 2011 est en train de donner lieu à une polémique qui est étonnante, en ceci qu'elle ne devait pas avoir d'objet. Les pratiques ordinaires, en vigueur dans le monde entier en matière d'assurances devraient rendre impossible la situation dans laquelle on semble pourtant bien se trouver.

Cette situation, découverte avec une certaine indignation par la presse congolaise, est que la compagnie Hewa Bora Airlines, propriétaire de l'avion sinistré, ne l'avait pas assuré auprès de la SONAS, compagnie d'assurance congolaise47(*). Celle-ci a d'ailleurs confirmé ce fait : «Une compagnie aérienne de la trempe de HEWA BORA n'a pas un contrat d'assurances avec la SONAS pour le moment. La SONAS a tout fait pour approcher le patron de HEWA BORA. Toutes les démarches visant à lui faire comprendre que toutes les compagnies d'assurances à travers le monde travaillent toujours avec des partenaires extérieurs sont restées vaines» dixit Richard KAPENA Ditholo, sous-directeur de la SONAS à la direction des transports maritimes et aviation48(*).

Le journal kinois L'Avenir rapporte que « le patron de Hewa Bora, le Greco-congolais Stavros Papaioanou a indiqué que Hewa Bora détient une police d'assurance de Price Forbes and Partners, une entreprise de courtage basée à Londres. La raison est que l'assureur national, la SONAS, jusqu'au crash de Goma en 2008, n'avait pas réussi à indemniser les victimes du crash dans cette province »49(*).

Il est de pratique universelle que les Etats imposent aux véhicules Immatriculés chez eux de s'assurer aussi chez eux. Lorsque le pays ne compte, pour un risque donné, qu'une seule compagnie d'assurances (ce qui est le cas tout aussi bien de la RDC que... du Grand-duché de Luxembourg), cela aboutit, de fait, à une sorte de monopole.

Les véhicules et engins posent un problème particulier en ceci qu'il faut être capable de les assurer non seulement quant à leur valeur de remplacement, assez aisée à calculer, mais quant à la RC (responsabilité civile) de leur propriétaire en cas de sinistre.

Or, en RC, on peut aisément imaginer des scénarii de « course à la mort ». Un cycliste provoque un accident de la route. A la suite de celui-ci, un camion-citerne quitte la route et se renverse. Son chargement, hautement volatil et explosif, prend feu et explose, allumant un incendie qui ravage tout un quartier... C'est bel et bien l'assureur RC du cycliste qui, en fin de compte, devra régler la note50(*)... La taille des sinistres possibles excédera très vite et ce que l'on peut prévoir et -ce qui est nettement pire pour les victimes - ce qu'une compagnie d'assurance est en mesure de payer.

C'est tellement évident qu'on a inventé la réassurance. Celle-ci consiste, si l'on passe les détails techniques abscons, en une assurance prise par le premier assureur (qui serait, en l'espèce, la SONAS) contre la survenance de sinistres d'un coût excédant une certaine somme. Cette réassurance, elle, n'est liée à aucune notion de territorialité. On la souscrit auprès de n'importe quelle compagnie présente sur le marché mondial. Bien que la réassurance soit une activité généralement répandue dans le monde, ce marché particulier a son centre à Londres.

Bien que cette façon de faire soit universellement répandue et, si l'on y réfléchit, très raisonnable et parfaitement honnête, elle fait néanmoins partie de cette « cuisine interne » dont les assureurs ne font pas volontiers étalage devant la clientèle. On n'y fait en général allusion que de façon voilée. Les propos de la SONAS comme « toutes les compagnies d'assurances à travers le monde travaillent toujours avec des partenaires extérieurs » pourraient bien appartenir à cette catégorie. Sans doute craint-on que l'assuré voie dans la réassurance l'aveu de « petits moyens ».

En réalité, c'est l'inverse : cela doit en principe permettre à une petite compagnie, ou à une compagnie nationale du Tiers-monde, de couvrir même les risques les plus considérables..., à condition, bien sûr, d'être en mesure de payer les primes que lui demanderont les réassureurs.

La décision que les responsables d'une compagnie d'assurances doivent prendre dans ce cas d'espèce ressemble à celle que dit prendre n'importe quel automobiliste assurant sa bagnole : veut-on une couverture maximum, « omnium valeur à neuf » qui sera bien rassurante mais aussi très chère, ou se contentera-t-on d'un minimum, au risque de connaître « des lendemains qui déchantent » ? En effet, dans les deux cas, il faut trouver le « juste milieu » entre deux réalités contradictoires : d'une part, l'argent que l'on dépensera à s'assurer, on ne l'aura plus, mais d'autre part, l'argent qu'en cas de sinistre il faudra décaisser pour faire face à des dégâts non-couverts par une assurance, on risque fort de ne pas l'avoir.

Or, les compagnies d'assurance sont des sociétés commerciales, comme telles elles sont supposées faire des bénéfices et disparaitraient purement et simplement si elles n'en faisaient pas. Les compagnies purement commerciales doivent des comptes à leurs actionnaires et ceux-ci attendent des dividendes. Les compagnies d'Etat, ou à monopole d'Etat ne sont pas forcément mieux loties.

D'abord parce que l'Etat n'est pas forcément un actionnaire moins rapace que les autres. Ensuite, parce que l'Etat attend d'elles qu'elles encaissent le plus possible (et dans le cas du Tiers-monde, qu'elles encaissent si possible en devises fortes) et dépensent le moins possible (et la réassurance non seulement se paie, mais se paie bien sûr en devises). Compte tenu de ce que la RDC a connu de difficiles batailles, sur le marché des changes, pour le maintien de sa monnaie face au dollar, on imagine facilement les pressions qui ont dû s'exercer sur un secteur où les décaissements pour les primes de réassurance représentent des millions de dollars.

La HEWA BORA AIRLINES détiendrait une police d'assurance de Price Forbes and Partners, une entreprise de courtage basée à Londres. Il serait donc dans l'illégalité quant au respect de la loi , mais se sentirait donc « moralement en règle » puisqu'il était bien couvert par une assurance, susceptible d'indemniser les victimes.

Car, au moins implicitement, HBA justifie sa décision par la carence de la SONAS dans des sinistres antérieurs. L'assureur national, dit Mr. Papaioanou n'a pas réussi à indemniser les victimes du crash de Goma en 2008.

Il n'a cité là qu'un sinistre concernant également HBA, mais on sait que les victimes du crash de l'aéroport de Ndolo survenu en janvier 1996 n'ont toujours pas été indemnisées. Tout comme celles de l'Antonov fou de la compagnie El SAM survenu au quartier Kingasani en 2007, celles de l'Antonov dans les environs de la localité de Walikale en 2006, etc51(*).

Tout ceci soulève deux séries de questions.

La première concerne les vols sans assurance. Il est établi que les compagnies aériennes ne souscrivent pas une assurance alors que c'est obligatoire, et que, la SONAS étant légalement la seule compagnie autorisée à offrir ce genre de contrat, cela représente une perte sèche conséquente pour elle et pour la RDC. Des spécialistes en aéronautique civile se demandent par quelle magie HBA s'est procuré le CDN ou certificat de navigabilité que l'Autorité de l'Aviation Civile ne délivre que sur présentation de la police d'assurances. Or, sans ce document, aucun aéronef ne peut voler dans le ciel congolais, ajoutent-ils. A qui la faute ? Aux compagnies aériennes ou aux autorités de la Direction de l'Aviation Civile, dès lors qu'il est établi qu'aucune compagnie aérienne congolaise ne souscrit à aucune police d'assurances et cela depuis belle lurette ?

La seconde, qui pourrait bien être la plus cruciale et la plus urgente parce qu'elle met en cause les victimes, c à d. souvent de bien pauvres gens, concerne la non-indemnisation de celles-ci. Si Mr. Papaioannou dit vrai à propos des victimes de Goma en 2008, s'il en va de même pour d'autres sinistres qui auraient dû être couverts par la SONAS, celle-ci apparaît dès lors comme une compagnie bidon qui encaisse bien les primes mais ne décaisse jamais les indemnités. Agir ainsi est de l'escroquerie pure et simple et, dans a situation de monopole qui est celle de la SONAS, il s'agirait alors d'une escroquerie avec la complicité de l'état.

Le Congo a la réputation d'être un pays où, entre la caisse et la poche du bénéficiaire, les sommes d'argent sont sujettes à d'étranges phénomènes d'évaporation. Et il est d'usage de mettre en case les grappillages des intermédiaires, tout en leur fournissant aussitôt les circonstances atténuantes de leur propre pauvreté. Mais, même pour la RDC, que des sommes, représentant l'indemnisation de centaines de victimes pour des dommages comprenant de nombreux morts et la destruction de maisons entières, aient pu s'évaporer jusqu'au dernier centime, est difficile à croire.

Il est beaucoup plus probable que, placée dans la situation décrite ci-dessus, la SONAS a omis de se couvrir et qu'elle n'est tout simplement pas en mesure de faire face à ses obligations et à ses engagements et qu'elle ne passe pas à une réassurance. Cette situation a un nom. Ça s'appelle la faillite !

* 46 Le Phare du 5 mai 2018, consulté sur www.lephareonline.com le 15 juin 2018.

* 47http://fsddc.wordpress.com/2011/07/13/un-haut-cadre-de-la-sonas-revele-que-hewa-bora-nest-pas-assuree-en-rdc/

* 48 Ibidem, page 33.

* 49 Radio Okapi

* 50 l'accident de Ghislenghien

* 51 Lephareonline.com consulté le 7 mai 2018.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius