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Le processus décisionnel dans la politique étrangère du cameroun: le cas du recours au règlement judiciaire dans le conflit de Bakassi


par Zoulica RANE MKPOUWOUPIEKO
Institut des Relations Internationales du Cameroun/Université de Yaoundé II - Master en Relations Internationales 2011
  

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Section 1 : Les risques du recours au règlement judiciaire

Le choix du règlement judiciaire revêtait essentiellement deux inconvénients : d'une part, l'incertitude sur l'issue et l'exécution du jugement par le Nigeria (Paragraphe 1) et d'autre part, le souvenir de la première expérience malheureuse du Cameroun devant la C.I.J., à l'occasion de l'affaire de Cameroun septentrional (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L'incertitude sur l'issue et l'exécution du jugement

L'impossibilité d'avoir une connaissance assurée sur l'issue du jugement de la C.I.J. (dont les résultats sont obligatoires) (A) et sur son exécution par la partie nigériane, dans un environnement dominé selon le courant réaliste des relations internationales par l'anarchie177 (B), fait partie des raisons qui auraient pu expliquer l'éloignement du Cameroun de la solution judiciaire. En effet, jaloux de leur souveraineté, les Etats rebutent parfois à déclencher une procédure dont ils ne savent pas quel sera le résultat, et si le défendeur s'y pliera.

176 Photini PAZARTZIS, 1992, op. cit., p. 66.

177 Lire à ce propos Pierre de SENARCLENS et Yohan ARIFFIN, 2006, op. cit., p. 14.

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A. Un choix à l'issue incertaine

L'incertitude sur l'issue du jugement revêtait deux aspects pour la partie camerounaise : d'une part, les risques de détérioration des relations avec le « grand voisin » nigérian et d'autre part, l'absence de garantie de victoire.

En ce qui concerne le premier aspect, tous les Etats éprouvent une crainte devant l'inconnu que représente une décision de justice obligatoire. Aller devant la C.I.J., revenait pour le Cameroun à s'opposer publiquement au Nigeria ; ce qui aurait pu être considéré par ce dernier comme un « acte inamical ». En effet, le recours à la Cour, qui ne pouvait se faire que de manière unilatérale, risquait de compromettre davantage les relations entre ces deux pays qui étaient déjà opposés dans une confrontation militaire (quoique de basse intensité). A titre illustratif, le Nigeria a soutenu devant la C.I.J. que le Cameroun avait fait preuve de mauvaise foi en continuant à entretenir avec lui des contacts bilatéraux sur les questions de frontières, alors qu'il s'apprêtait à s'adresser à la Cour178. Qui plus est, les autorités de Yaoundé étaient conscientes du coup psychologique qu'avait porté le contentieux camerouno-britannique, à propos de l'affaire du Cameroun Septentrional, sur les relations avec Londres, qui demeurent encore aujourd'hui « assez timides »179.

Par le recours à la C.I.J., le Cameroun prenait également le risque de perdre le procès engagé ; ce qui aurait été ressenti comme un second échec difficilement acceptable après celui de l'affaire du Cameroun septentrional. Dans ce contexte, les autorités Camerounaises auraient pu être moins enclines à recourir au règlement judiciaire. Qui plus est, l'absence de garantie de victoire découlait principalement du fait que les juges de l'instance judiciaire (en l'occurrence la C.I.J.) appliquaient un droit international dont les sources étaient variables et sur lesquelles les parties n'avaient quasiment aucune maîtrise. Le Statut de la C.I.J. affirmait à cet effet que « la Cour dont la mission est de régler conformément au droit international les différends qui lui sont soumis applique les conventions internationales, soit générales, soit spéciales établissant des règles expressément reconnues par les Etats en litige ,
· la coutume internationale comme preuve d'une pratique générale, acceptée comme étant le droit ,
· les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées ,
· sous réserve de la disposition de l'article 59180, les décisions judiciaires et la doctrine des publicistes les plus qualifiés des différentes nations, comme moyen auxiliaire de

178 Lire à ce propos Guy Roger EBA'A, 2008, op. cit., p. 50.

179 Comme il est analysé plus loin, le Royaume-Uni et le Cameroun ont entamé leurs relations d'Etats souverains avec un litige devant la C.I.J. MOUELLE KOMBI, relève à ce propos que « l'impact psychologique du contentieux camerouno-britannique à propos du Cameroun septentrional » figure parmi les raisons qui expliquent la timidité des relations politiques et diplomatiques entre les deux pays. Voir Narcisse MOUELLE KOMBI, 1996, op. cit., p. 134.

180 L'article 59 du Statut de la C.I.J. stipule que : « la décision de la Cour n'est obligatoire que pour les parties en litige et dans le cas qui a été décidé ».

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détermination des règles de droit »181. Ainsi, les parties au litige ne pouvaient pas forcément savoir quelle source ou alors quel raisonnement l'instance de jugement allait adopter pour rendre sa décision ; d'où l'incertitude. Cela aurait pu justifier la crainte par le Cameroun qu'une interprétation par la C.I.J. aille à l'encontre de son point de vue (et ainsi de ses intérêts). L'incertitude qui entoure le recours au règlement judiciaire a par exemple amené la Colombie et le Venezuela à privilégier, malgré l'existence d'engagements de règlement judiciaire182, l'institution d'une commission de conciliation pour le règlement du différend relatif au tracé de la frontière maritime entre les deux pays dans le golfe du Venezuela.

Par ailleurs, quelle que soit l'issue du jugement, avant la saisine d'une juridiction internationale, il est nécessaire de s'interroger sur les garanties de son exécution. Là encore, des incertitudes demeurent.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery