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La renovation d'un tissu urbain au moyen d'eco-structures: application du bambou structurel au quartier de la gare ferroviaire de Nkongsamba


par Lucien Kevin ENDANTE ESSONO
Institut des beaux arts de l'université de Douala à  Nkongsamba - Diplome d'études en Architecture et Urbanisme 2020
  

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CHAPITRE III : ETUDE DU BAMBOU, MATERIAU ECOLOGIQUE POUR LE

DEVELOPPEMENT DE L'ECO-ARCHITECTURE.

Le bambou est présent naturellement sur tous les continents (Amériques, Asie, Afrique et Océanie) et survit au gel dans le nord de l'Europe. Plante aux particularités uniques dans le monde végétal, le bambou ne présente pas pour autant un aspect uniforme. Suivant l'endroit où il pousse, la nature du terrain, le climat, l'altitude, il peut être très différent de taille, de forme, voire de couleur. Nous allons nous atteler dans ce chapitre à présenter cette plante aux caractéristiques insoupçonnées surtout dans le domaine de la construction, en tant que matériau écologique et innovant pour la revitalisation d'un tissu urbain, comme celui de la gare à Nkongsamba. Dans cette partie de notre travail, nous présenterons premièrement les caractéristiques du bambou, en tant que plante puis, ses propriétés et méthodes d'utilisation comme matériau de construction. Suite à cette étape, nous donnerons un aperçu sur l'état de l'art de la filière sylviculture du bambou au Cameroun, en Afrique et dans le monde, passant par la culture, le traitement et l'avenir de ce matériau dans les diverses parties du globe énoncées. Toutefois, nous allons vérifier que cette plante autrefois considérée comme bois des pauvres, peut avoir d'autres aspects suivant son utilisation, surtout dans le domaine de la construction via l'éco architecture, que nous avons choisi pour moteur de développement urbain dit « durable ».

A) PRESENTATION DU BAMBOU, MATERIAU ECOLOGIQUE ET INNO-

VANT

GENERALITES

Le bambou fait partie des plantes à fleurs et plus particulièrement des monocotylédones. Il appartient à la sous-famille des bambousoïdées (Bambusiadeae). C'est une graminée, au même titre que le blé, le riz, les palmiers ou le roseau, d'où son appellation d'« herbe géante ». Il est classifié parmi les produits forestiers non ligneux, bien que sur le plan technologique il possède des caractéristiques très proches de celles du bois. Aussi, Le bambou est une plante à tige parfaitement cylindrique et lisse de la famille des Poacées. Il en existe plus de 1 500 espèces appartenant à environ 80 genres. Le bambou n'est donc pas considéré comme un arbre, malgré des espèces dont la taille peut dépasser une quarantaine de mètres. Deux de ses caractéristiques botaniques sont particulièrement intéressantes pour son utilisation comme bois de construction.

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Figure 19:Tige de bambou38

CULTURE DU BAMBOU

Le bambou pousse principalement dans les zones chaudes et humides d'Asie, d'Amé-rique, d'Afrique et d'Océanie. Il peut aussi pousser dans les zones tempérées, comme en Europe où il a été importé, voire dans des zones froides et à des altitudes très élevées, comme en Équateur ou dans l'Himalaya (jusqu'à 4 000 mètres d'altitude et à une température atteignant -25 °C l'hiver). Certaines espèces supportent de fortes sécheresses, d'autres encore les inondations et quelques-unes résistent même au gel. La plupart des bambous récoltés pour être commercialisés proviennent de forêts naturelles, même si les plantations ont beaucoup progressé durant ces dernières années.

On estime qu'au niveau mondial, les forêts naturelles représentent plus de 75 % des forêts de bambou. En Asie, environ 30 % de la surface de bambou est plantée. Durant les quinze dernières années, la surface de bambou a augmenté de 10 % dans cette partie du monde, principalement du fait des plantations à grande échelle en Chine et, dans une moindre mesure, en Inde (25 % de la surface de bambou y est plantée, soit près de trois millions d'hectares).

38 TRUMEL, M. & BOUDASSOU B. (1999)

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Figure 20: Aire naturelle des répartitions des bambous,39

Les forêts de bambou s'étendent dans le monde entier sur près de 37 millions d'hectares, ce qui représente 3,2 % des surfaces mondiales en forêt, dont 65 % en Asie (principalement en Inde, avec 11,4 millions d'hectares, et en Chine avec 5,4 millions), 28 % en Amérique et 7 % en Afrique. Les surfaces de bambou sont supérieures à un million d'hectares au Brésil, en Indonésie, au Laos et au Nigéria. Elles dépassent les 800 000 ha au Myanmar, au Chili, en Éthiopie et au Vietnam.

VARIETES ET DIFFERENTES ESPECES DE BAMBOU

Les premières pousses de bambou sont apparues il y a 200 millions d'années, et ont survécu aux événements biologiques, notamment dans les pays d'Asie centrale et du Sud. Des études sur le terrain ont ainsi montré la présence de plusieurs de ces espèces il y a 3 millions d'années, qui n'auraient pas survécu à la dernière période glaciaire. Au cours des derniers siècles, la présence de bambou a été particulièrement influencée par sa culture et son acclimatation. Un exemple historique est l'utilisation du bambou par les colons portugais dans leur colonie comme le Brésil. L'auteur français E. Verdier-Latour, dans son livre paru en 1853, insiste également sur la présence majoritaire de bambou dans les pays d'Asie Centrale (Chine...) ou d'Asie du Sud (Iles Philippines...)

Tout d'abord, sa tige formée d'un chaume (ou canne) est dite ligneuse. Les cellules la constituant fabriquent des lignines en importante quantité. La présence de fibres cellulosiques,

39 FAL, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=129361

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extrêmement serrées notamment sur la couche externe du chaume, offre également une grande souplesse. La tige du bambou est creuse entre deux diaphragmes, ce qui donne au bois une grande légèreté. Elle contient un exsudat riche en silice, déjà utilisé en médecine pour aider à la guérison de fractures. Il existe plus de 90 genres de bambou, et entre 1 200 et 1 400 espèces différentes en termes de tailles, de formes et de couleurs, dont 40 à 50 sont communément cultivées. Contrairement aux autres plantes, l'identification de l'espèce ne se fait pas en observant les fleurs, car la floraison est un phénomène irrégulier dont la dynamique reste encore mal comprise. On identifie les bambous à partir de la forme de leurs tiges, de leurs feuilles et des gaines qui protègent les jeunes pousses. Les genres les plus répandus peuvent se regrouper en :

- Bambusa : une centaine d'espèces, poussant sous des températures supérieures à 10 °C - Sasa : originaires du Japon, de petite taille et rustiques (bonne résistance au froid) ; - Chusquea : 180 espèces, originaires d'Amérique latine ;

- Fargesia : 100 espèces, majoritairement originaires de Chine, souvent trouvées en

altitude ;

- Phyllostachys : 80 espèces, les plus répandues en Europe car adaptées au climat assez froid ; comme l'espèce Phyllostachys pubescens ou Moso, cultivée en Chine du centre-est ;

- Dendrocalamus : bambous géants tropicaux, appréciés pour leur utilisation indus-

trielle.

- Phyllostachys pubescens (plus connu sous le nom de Moso en Chine) ;

- Dendrocalamus hamiltonii, ou le Dendrocalamus barbatus (Luông en vietnamien) ; - Bambusa arundinacea, Bambusa vulgaris ou bambou commun.

La question sous-jacente porte donc sur les conditions géographiques favorables à la culture de bambou, et par conséquent : serait-il possible de cultiver aujourd'hui du bambou au Cameroun et particulièrement à Nkongsamba ? Pour croître dans de bonnes conditions, le bambou tolère une grande variété de sols (des sols pauvres en matière organique jusqu'aux sols riches en minéraux), ce qui explique leur présence étendue dans le monde. De plus, plusieurs espèces sont particulièrement résistantes aux grandes variations de température. Ainsi, en Chine, des plantations survivent à des hivers rudes à -24°C associés à des températures estivales dépassant les 30°C. Cette grande adaptabilité vis-à-vis des conditions climatiques est un atout majeur pour l'introduction et la culture du bambou.

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Les pays comportant le plus grand nombre d'espèces sont la Chine (625), le Vietnam (140-150), le Brésil (134), l'Inde (100), le Japon (84) et le Myanmar. Le Yunnan, province du centre-sud de la Chine, présente la plus grande biodiversité, avec 250 espèces appartenant à 28 genres. On y recense une zone de 900 km2 où se trouvent en moyenne 142 espèces de bambou par km2. Classification en fonction de la taille et du calibre La longueur et le calibre des tiges varient fortement d'une espèce à l'autre. On distingue quatre catégories de bambou : - géants (9 à 40 m de haut), genres Dendrocalamus, Gigantochloa, Guadua, etc. - moyens (3 à 9 m) ; - petits (1,5 à 3 m) ; - nains (< 1,5 m).

METHODES DE CONSERVATION ET TRAITEMENT POST-RECOLTE DU BAMBOU

Les méthodes de conservation et traitement post-récolte du bambou sont destinées à réduire la quantité d'amidon dans le chaume et / ou pour rendre le matériau peu attrayant pour les insectes et les champignons. Parmi ces opérations de traitement et protection du bambou, on distingue des méthodes traditionnelles ou naturelles telles que :

LE TREMPAGE DANS L'EAU : Le trempage dans de l'eau, une méthode traditionnelle de préservation du bambou, utilise de l'eau pour diluer et faire partir l'amidon du bambou au lavage. Cette technique simple et peu coûteuse consiste à submerger le bambou dans un étang ou une rivière pendant 1 à 3 mois, puis à l'enlever et à le laisser sécher. Puisque le bambou a tendance à flotter, on devra le rendre pesant pour le faire descendre sous l'eau. Pour réduire la flottabilité, vous pouvez également percer un trou dans chaque entre noeud pour libérer l'air emprisonné. Cette méthode est peu susceptible d'éliminer tout l'amidon présent dans le bambou. L'eau courante propre d'un ruisseau ou d'une rivière serait probablement plus performante que l'eau sale et stagnante d'un étang, mais ce qui est le plus facilement accessible est probablement le plus approprié.

LE SECHAGE INTRA-MASSIF: Le séchage intra-massif est une autre méthode traditionnelle pour réduire la teneur en amidon dans un chaume de bambou. Avec cette méthode, coupez la base du chaume, placez-le sur une pierre, et laissez-le debout dans le massif avec les branches et les feuilles intactes. Tant que les feuilles sont vertes, le chaume consommera l'énergie stockée, diminuant ainsi la teneur en amidon.

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LE SECHAGE : Après l'avoir récolté et conservé, laissez le bambou sécher complètement avant de l'utiliser comme matériau de construction. Vous pourriez être tenté de l'utiliser lorsqu'il est encore vert pour éviter d'attendre, et aussi parce qu'il est plus facile à couper lorsqu'il est mouillé. Mais le bambou rétrécit au fur et à mesure qu'il sèche; s'il est joint ensemble alors qu'il est encore vert, le rétrécissement provoquera l'étirement ou la rupture des joints. Le temps de séchage varie selon la taille du bambou, la méthode de séchage et les conditions ambiantes, mais en général, vous pouvez vous attendre à ce qu'il prenne environ deux mois. Le bambou peut être séché horizontalement à l'ombre ou verticalement à l'air libre. Cette dernière option est plus rapide et occupe moins de terrain, mais chaque chaume doit être assez fréquemment retourné pour éviter des fissures. Le séchage horizontal à l'ombre prendra plus de temps, et les chaumes devraient être empilés de manière à optimiser la circulation de l'air. Les supports de séchage horizontaux peuvent également servir d'entrepôt à long terme pour le bambou.

LE TRAITEMENT CHIMIQUE : D'autre part, on retrouve aussi des moyens de traitement d'ordre chimique, du bambou après sa récolte. Ces divers traitements chimiques peuvent dissuader les ravageurs de consommer l'amidon présent dans le bambou. Un mélange de borax et d'acide borique est un choix courant, en raison de sa disponibilité, de son faible coût et de sa faible toxicité. Le sulfate de cuivre est un peu plus puissant que le borax, mais nécessite plus de précautions lors de la manipulation. Les solutions chimiques contenant de la créosote ou du chrome sont de puissants agents de dissuasion contre les ravageurs et sont plus stables que le sulfate de cuivre ou le borax, mais les risques qu'elles présentent pour le l'utilisateur et l'envi-ronnement en font des options moins viables40.

Figure 21: Chaumes de bambou récoltés récemment en cours de conservation par trempage dans un réservoir
de solution chimique. Source: Craig Bielema

40 https://www.agriculture-afrique.com/conservation-et-traitement-post-recolte-du-bambou/ consultée le 12 mars 2020

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À la ferme de ECHO dans le sud-ouest de la Floride, nous avons découvert qu'un mélange de 80% de borax et de 20% d'acide borique, mélangé à raison de 1 livre par gallon d'eau, pouvait être un produit chimique suffisamment répulsif. Lors du mélange de la solution, il est utile de chauffer l'eau afin de dissoudre complètement tout le borax et l'acide borique. Un moyen simple d'appliquer la solution chimique est d'utiliser la méthode de séchage intra-massif mentionnée plus haut, mais placez l'extrémité coupée de la chaume dans un seau de solution chimique, plutôt que de simplement la mettre sur une pierre. Le chaume aspirera la solution du seau à mesure que les feuilles continuent à transpirer et à réclamer plus d'eau. Laissez le chaume dans le seau pendant quelques semaines avant de l'enlever et de l'utiliser. Bien que simple en théorie, ce processus peut être difficile à contrôler; le vent peut renverser la disposition, la puissance de la solution variera en fonction de l'évaporation et de la pluie, et le massif peut devenir plutôt encombrée si vous essayez de récolter une grande quantité de chaumes.

Figure 22:Le système de boucherie à ECHO.

Une version plus contrôlée de la même méthode est de récolter le bambou, le couper en parties de 2 mètres, et les placer toutes verticalement dans un tonneau avec suffisamment de solution de sorte que la partie inférieure du bambou soit complètement submergée. La solution pénètre dans le chaume par capillarité (effet de mèche). Laissez le bambou dans le tonneau pendant 3 semaines, puis retournez les longueurs et laissez-les tremper pendant 3 semaines supplémentaires. Ce processus est plus contrôlé car il peut être installé dans un endroit protégé où le renversement, la dilution par la pluie, l'évaporation ou l'altération sont peu probables.

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L'option la plus efficace pour la préservation du bambou permettrait à la fois de réduire l'ami-don et de le remplacer par un produit chimique qui repousse les parasites. La méthode de conservation par le remplacement de la sève ne fait que cela, mais elle est plus coûteuse et demande beaucoup plus de travail que le traitement chimique mentionné précédemment.

Une variante de la méthode de remplacement de la sève consiste à tremper le bambou dans un grand réservoir de solution chimique; cette méthode nécessite de lourds investissements, à la fois en termes d'infrastructures (construction d'un réservoir pour contenir le bambou et la solution) et de la grande quantité de solution chimique nécessaire.

Le remplacement de la sève peut également se faire en appliquant une solution chimique sous pression à une extrémité d'un chaume de bambou jusqu'à ce que la solution vienne s'égoutter par l'autre extrémité ; on appelle communément cela la méthode de boucherie. Pour ce faire, un tuyau flexible en caoutchouc est installé sur l'extrémité fraîchement coupée d'un chaume de bambou récemment récolté et fixé avec un collier de serrage en acier.

L'autre extrémité du tuyau en caoutchouc est attachée aux raccords de tuyauterie en plomberie le reliant à une source de solution chimique pressurisée (la solution peut être pressurisée avec une pression d'air, avec une pompe mécanique ou simplement par gravité en plaçant le réservoir à une altitude plus élevée que le bambou à traiter)41. La solution sous pression va se frayer un chemin à travers les tubes vasculaires qui composent le bambou, forçant la sève sucrée à s'infiltrer partout où la couche externe du bambou a été coupée. Pour s'assurer que le plus de sève possible soit éliminée et remplacée par la solution chimique, vous pouvez ajouter une teinture ou un colorant à la solution chimique; quand le liquide qui suinte du bambou change de couleur, vous saurez que c'est la solution chimique qui sort au lieu de la sève.

Figure 23:Traitement des tiges à l'huile de lin. Patrice Lamballe, Gret.

41 https://www.agriculture-afrique.com/conservation-et-traitement-post-recolte-du-bambou/ consultée le 12 mars 2020.

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Si le bambou est fraîchement coupé (c'est-à-dire que les tubes vasculaires ne sont pas bloqués), le temps requis pour traiter un chaume complet dépendra uniquement de la pression du liquide et de la longueur du chaume. Une pression plus élevée augmentera la vitesse à laquelle le liquide est poussé à travers le chaume, mais cela peut également causer une fuite au niveau de la jonction entre le tuyau en caoutchouc et le bambou, ce qui peut la détacher. Une pression de 10 pascals semble être assez faible pour éviter la plupart des fuites, mais suffisamment élevée pour un temps de traitement relativement rapide (environ 1 heure pour un chaume de 20 pieds).

Des tuyaux en caoutchouc bien ajustés et des colliers de serrage robustes minimiseront la probabilité de fuites et de glissements au niveau du raccordement au bambou. Immédiatement avant de faire le raccordement avec le tuyau en caoutchouc, utilisez une machette pour couper l'extrémité du bambou à un angle tout autour, en le faisant en forme de cône, pour faciliter le raccordement d'un tuyau en caoutchouc très serré au bambou. Si possible, faites cette coupe juste avant un noeud; la légère protubérance du noeud agira comme une barbe, empêchant le collier de serrage et le tuyau en caoutchouc de se détacher du bambou.

LE TRAITEMENT THERMIQUE : La chaleur peut être appliquée au bambou comme autre méthode de conservation. Placer le bambou au-dessus d'une flamme nue et le faire tourner uniformément détruira l'amidon dans le bambou. Le traitement thermique convient le mieux aux bambous à parois minces, car la chaleur ne pénètre pas facilement l'intérieur des bambous à parois épaisses. De plus, en raison de la main-d'oeuvre et du combustible (bois de chauffe) requis, il convient souvent mieux aux meubles et instruments de musique qu'aux grandes structures. Un avantage secondaire du traitement thermique est que vous pouvez modifier la couleur du bambou à presque n'importe quelle teinte de brun.

Figure 24:Un foyer ouvert (gauche) et un feu basé sur trois pierres (droite) à l'intérieur d'une maison tradition-
nelle en bambou dans le nord de la Thaïlande. Source: Craig Bielema

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Beaucoup de maisons indigènes construites principalement avec du bambou présentent peu de preuves de dégâts causés par des insectes ou des champignons, même si le bambou n'a pas été préservé. Certaines espèces de bambou sont moins sensibles aux ravageurs que d'autres espèces. Cependant, le bambou pourrait également être préservé quotidiennement par la fumée et la chaleur générées par le fourneau traditionnel à feu ouvert dans la maison; la même fumée et la même chaleur dissuadent les parasites de consommer le bambou. Réalisant cet avantage, beaucoup de gens placent du bambou sur un support au-dessus de l'âtre pendant un certain temps avant de l'utiliser à d'autres fins.

Malheureusement, la fumée des feux de cuisson a d'autres effets moins bénéfiques sur les personnes vivant dans la maison. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS 2016), la pollution de l'air intérieur générée par les feux ouverts et les poêles qui fuient est responsable de plus de 4 millions de décès prématurés par an. La mise en place de foyers de cuisson propres et efficaces dans la maison améliorera la santé pulmonaire et préviendra d'autres problèmes de santé; cependant, cela peut également entraîner des problèmes dus à la perte de la préservation du bambou.

Figure 25:Tiges thermo-traitées. Patrice Lamballe, Gret.

B) CARACTERISTIQUES ET PROPRIETES DU BAMBOU STRUCTUREL

1- CARACTERISTIQUES DU BAMBOU

Une caractéristique majeure du bambou est la vitesse de croissance de ses tiges : selon les espèces, celles-ci gagnent en moyenne entre 10 et 50 cm de hauteur par jour pendant la période de forte croissance, qui dure environ deux mois sur la totalité du cycle, et atteignent leur taille définitive au bout de deux à quatre mois. Au plus fort de leur croissance, certains

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bambous s'allongent de près d'un mètre en une journée. L'épuisement des ressources naturelles posera un problème grave d'existence avant les prochaines générations. Les chercheurs travaillent au remplacement des matériaux conventionnels de la construction et des bâtiments par des matériaux écologiques.

? Croissance du Bambou

Le bambou est réputé pour sa croissance rapide, avec une taille finale pouvant atteindre plus d'une quarantaine de mètres dans certaines régions. Cette plante, extrêmement résistante, est insensible à de fortes variations de température. Elle n'a pas besoin d'un apport d'engrais, ni de produits phytosanitaires pour grandir convenablement. C'est donc une potentielle solution économique et écologique future en devenant, par son utilisation comme bois de construction, une alternative à la déforestation. Les espèces de bambou intéressantes pour les filières du Génie Civil atteignent leur maturité après quatre ou cinq années de pousse. Après la première coupe, les suivantes peuvent s'enchaîner tous les deux ans, voire même plus régulièrement pour certaines espèces. Il est ainsi estimé qu'un bambou peut produire jusqu'à 15 km de perche utilisable en 35 ans. Le bambou se régénère seul et peut être employé comme matériau dès l'âge de quatre ans.

Cette croissance se fait par élongation successive des entre-noeuds, dont la longueur varie selon les espèces. En revanche, le bambou ne se développe pas en largeur : les jeunes pousses émergent du sol avec un diamètre qui sera définitif car le bambou, comme les autres monocotylédones, ne possède pas de réserve pour croître en épaisseur. Une fois qu'il a atteint sa hauteur maximale, le bambou cesse de pousser, bien qu'il ne soit pas encore pleinement mature, et reste en constante évolution : les cellules de la paroi se modifient, ses fibres s'épais-sissent.

? Les différentes parties et typologies du bambou

Le bambou se compose de trois parties : les tiges (partie aérienne), le collet des tiges (partie proximale, au niveau du sol) et le rhizome (partie souterraine d'où partent les racines). La tige, appelée chaume ou canne, est toujours cylindrique et creuse (sauf pour quelques espèces dont le chaume est plein). Elle est composée de noeuds (correspondant à une cloison rigide) et d'entre-noeuds (les parties creuses), dont la longueur diffère selon les espèces. À la base de la tige, le diamètre est plus élevé qu'au sommet, la paroi est plus épaisse et les entre-noeuds

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sont plus courts. Plus on se rapproche du sommet de la tige, plus son diamètre est réduit, sa paroi fine et ses entre-noeuds longs.

Figure 26:Structure d'une canne de bambou42

On distingue deux grands types de bambous, selon leur système souterrain (rhizomes) et leur occupation de l'espace :

- les bambous à rhizomes sympodiaux (ou pachymorphes), qui poussent surtout dans les régions tropicales et subtropicales (genres Bambusa, Guadua, Dendrocalamus). Les rhizomes sont courts et épais, avec une sortie prévisible près du pied-mère. Ces bambous sont plus facilement contrôlables car ils poussent en touffes compactes et ne sont pas invasifs ;

- les bambous à rhizomes monopodiaux (ou leptomorphes) poussent habituellement dans les régions tempérées (genres Phyllostachys et Pleioblastus). Leurs rhizomes courent horizontalement (d'où le nom de bambous traçants ou invasifs), avec des tiges isolées assez éloig0nées du pied-mère. Les bambous sympodiaux sont dominants au niveau mondial, mais la part des espèces monopodiales serait passée à 30 % durant les quinze dernières années, du fait du développement des plantations de Moso en Chine.

? Le Bambou, Fixateur écologique de carbone

Sa croissance rapide exige que l'herbe (car le bambou est bien une herbe) absorbe de grandes quantités de CO2, ce qui signifie que sa culture en tant que matériau de construction aiderait à réduire le taux de changement climatique. Ces facteurs incitent à eux seuls à s'investir dans le développement du bambou comme nouveau matériau. Cependant, parce qu'il croît particulièrement vite, il peut être récolté régulièrement. Cela signifie que le bambou peut créer un grand

42 http://www.voiles-alternatives.com/

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nombre de produits durables qui stockent le carbone sur plusieurs années. Des recherches récentes montrent que sur une période de 30 ans, un hectare de plantes et de produits de bambou peut stocker jusqu'à 600 tonnes de carbone 43, soit plus que certaines espèces d'arbres. Remplacer les matériaux traditionnels par du bambou pourrait être un moyen important de mettre en place des initiatives d'infrastructures « vertes ». Le secret du succès du bambou réside aussi dans le revêtement de sol, de meubles et de logements, comme l'a montré un jeune designer qui a récemment remporté un prix d'architecture

? Le Bambou en construction, choix du matériau

Le bambou est un excellent choix de matériau pour une grande variété de projets de construction. Il est souvent fendu pour tisser des paniers, des cages, des nattes, etc. Il est également couramment utilisé pour fabriquer des meubles, des clôtures, des treillis, des ponts et des maisons. Il est même utilisé dans la fabrication d'instruments de musique et de bicyclettes! Cette section explique comment travailler avec le bambou et comment il interagit avec d'autres matériaux de construction.

Le bambou est un matériau non uniforme et chaque chaume est différent, donc chaque morceau doit être choisi avec précaution. Les caractéristiques les plus manifestes et les plus élémentaires à rechercher sont le diamètre et la longueur du chaume. Le diamètre du bambou dépend de l'espèce, de l'âge de la plante et des conditions de croissance. Choisissez les tailles de diamètre en fonction du type de bambou disponible, les exigences de résistance pour l'utili-sation prévue, et l'esthétique. Notez que le diamètre d'un seul chaume de bambou varie le long de sa longueur. La portion de plus grand diamètre de tout chaume est située à l'extrémité de base. Le diamètre du chaume se rétrécit irrégulièrement du bas vers le haut.

L'épaisseur de la paroi du bambou est une autre caractéristique à évaluer lors du choix de votre matériau. Comme le diamètre, l'épaisseur de la paroi est déterminée en fonction de l'espèce, elle est directement liée à la force du chaume et elle diminue à un rythme variable sur toute la longueur du chaume. Prenez également en considération la distance entre les noeuds (appelée longueur des entre-noeuds), qui est déterminée par les espèces et qui change à un taux variable sur toute la longueur du chaume, et qui affectera les emplacements et la résistance des joints. Un noeud est la partie la plus forte d'un chaume; Les morceaux doivent être raccordés

43 Le bambou : un matériau biosourcé en devenir pour l'éco-construction | Build Green, 12 mars 2020.

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non pas directement au niveau du noeud, mais plutôt juste à côté, pour éviter un fractionnement indésirable.

Un chaume complet de bambou peut être divisé en trois sections, de longueur variable. La section la plus basse a le diamètre le plus grand, la paroi la plus épaisse et l'espacement des noeuds le plus rapproché. Cette section est très vigoureuse, mais elle est si lourde et les noeuds sont si proches qu'il est difficile de travailler avec et elle n'est pas idéale pour la construction. La partie inférieure a également tendance à avoir des courbes serrées, car le bambou semble émerger du sol à un angle, puis se redirige pour se redresser.

La section centrale d'un chaume de bambou est la plus uniforme en termes d'épaisseur de la paroi, de diamètre et d'espacement des noeuds. C'est la partie du bambou que vous devez récolter et conserver. Vous devriez être en mesure de voir une transition de la partie inférieure, avec son tronc énorme et sinueux et ses noeuds rapprochés, à la partie du milieu avec son tube droit et uniforme et ses noeuds presqu'uniformément espacés. Les noeuds dans cette partie centrale sont espacés d'une manière qui permet une menuiserie facile. Le bambou a tendance à être à la fois léger et solide.

La partie supérieure d'un chaume de bambou est marquée par une diminution soudaine du diamètre et de l'épaisseur de la paroi, et par une distance allongée entre les noeuds. Cette partie est assez faible et indésirable pour la construction. Cependant, elle a généralement beaucoup plus de branches et de feuilles, et peut être utilisée comme fourrage pour les animaux.

Après avoir récolté la partie centrale du bambou, puis l'avoir conservé et la séché, il faut encore faire des choix. Lors du choix de chaque morceau pour la construction, vous devez déterminer à quel point chaque morceau doit être droit ou courbe pour votre projet. Certains chaumes auront une longue courbe oscillante résultant de leurs conditions de croissance; la courbe est facile à voir en regardant la longueur du chaume. Le bambou aura également une courbure de type zigzag dans un plan. En regardant la longueur d'un morceau de bambou avec les branches intactes, vous remarquerez que des branches émergent des côtés opposés des noeuds consécutifs. Le motif en zigzag dans un chaume semble suivre les habitudes de ramification; tout se passera comme si le chaume pousse vers la branche d'un côté, puis change de direction pour croître vers la branche suivante du côté opposé.

Sans branches présentes, le zigzag sera moins évident, mais vous devriez pouvoir le voir en observant la longueur du chaume. Ce zigzag caractéristique sera assez prononcé chez certaines espèces et presque indétectable chez d'autres.

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? Le bambou lutte contre l'érosion des sols

Grâce au réseau de rhizomes44 très dense, le bambou limite l'érosion des sols, notamment sur les rives des fleuves ou les pentes des collines (un plant de bambou peut fixer 6 m3 de sol). Le feuillage touffu des bambous freine le déferlement des pluies sur la couche superficielle du sol. Les feuilles tombées qui forment un tapis d'environ 10 cm d'épaisseur par an, amortissent l'impact de la pluie sur le sol et facilitent l'absorption et la rétention d'eau de la terre. Le bambou est une plante pionnière, et peut être plantée sur des sols endommagés préalablement par une surexploitation. Sa récolte, réalisée de façon raisonnée ne porte aucune atteinte au système de la bambouseraie (pas d'érosion des sols et conservation de l'écosystème).

? Le bambou consomme peu d'énergie

La culture du bambou ne nécessite peu ou pas d'engrais, ni de produits phytosanitaires. L'étude de la balance énergétique (en unités d'énergie pour leur capacité à supporter une charge) des matériaux de construction traditionnels est largement favorable au bambou (ciment : 240 unités, acier : 1500 unités, bois : 80 unités, bambou : 30 unités). L'analyse du cycle de vie du bambou montre qu'il s'agit d'un matériau hautement écologique. Son rendement en termes de fixation de carbone, son rôle contre l'érosion des sols et le peu d'énergie nécessaire à sa croissance militent pour la démocratisation de son utilisation dans la construction.

2- LES PROPRIETES PHYSIQUES, CHIMIQUES ET MECANIQUES DU BAMBOU

Le bambou est un matériau solide, résistant et flexible, qui peut se substituer à de nombreux produits de construction. Soumis à des forces de compression ou de tension, il montre une résistance équivalente, voire supérieure, aux bois de construction ordinaires. Sa résistance à la traction est supérieure à celle de l'acier et le rapport entre sa masse volumique et sa résistance le classe devant l'acier, le béton et le bois de construction traditionnel. Les fibres de la tige, longitudinales et serrées, confèrent au bambou sa souplesse, sa flexibilité, son élasticité et sa grande résistance à la traction. L'épaisse paroi secondaire des fibres, alternant lamelles larges et étroites, renforce sa solidité qui s'explique également par le fort taux de silice contenu dans les cellules de la tige.

44 Une même racine peut donner jusqu'à 100 pousses de bambous d'où un maillage très efficace pour solidifier les sols

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En Europe et dans le monde, le pionnier de la recherche structurelle en bambou se nomme Jules Janssen. Celui-ci commence sa carrière d'enseignant en septembre 1967 à la faculté d'architecture et construction de l'université technique d'Eindhoven, où il enseigne la conception structurelle et la mécanique appliquée. En 2004, après quarante années de travail, notamment en collaboration avec l'INBAR, l'incontournable réseau international du bambou, les normes sur la détermination des propriétés physiques et mécaniques (ISO-22157) et la conception de structures en bambou (ISO-22156) sont approuvées par l'Organisation internationale de Normalisation .C'est un accomplissement incroyable dans l'acceptation du bambou comme alternative légitime au bois de construction traditionnel, qui ouvre de nombreuses portes pour l'utilisation du bambou dans les pays développés. Par conséquent, construire avec le bambou épargne du temps et évidemment de l'argent. De par sa facilité d'utilisation et d'implémentation, le bambou peut être utilisé pour des constructions définitives comme provisoires. Dans chacun de ses noeuds, le bambou a une division ou une paroi transversale qui maintient sa force et le laisse plier pour empêcher de ce fait la rupture.

a. Propriétés mécaniques

Le bambou, quel que soit son diamètre, est facile à couper, manipuler, réparer, remplacer et conserve ses avantages comme matériau de construction, sans besoin d'outils ou d'équipement sophistiques. En raison de ses caractéristiques physiques extraordinaires, le bambou convient à tous les types de structure et de construction. Le bambou est non polluant et n'a pas de croutes ou de parties qui peuvent être considérées comme rebut. Au lieu de s'ajouter aux problèmes de pollution dans des décharges comme les déchets conventionnels du bâtiment, n'importe quelle partie du bambou qui n'est pas employée peut être réutilisée de nouveau dans la terre comme engrais ou peut être traitée en tant que charbon de bois. Sa forme circulaire et ses sections creuses font du bambou un matériau de construction léger, il est facile à manipuler, à transporter et à stocker

En raison de cette caractéristique, une construction en bambou offre une solidité supérieure. La composition des fibres dans les parois du bambou lui permet d'être coupé dans le sens de la longueur en utilisant des outils courants et simples. La surface naturelle du bambou est lisse, propre, avec une couleur attrayante qui n'exige pas de peinture, éraflant ou polissant. Sans compter que, s'il peut être employé comme élément structurel, le bambou peut également remplir d'autres fonctions, comme les planchers, le panneautage de mur, conduites d'eau, drainage, et meubles.

L'autre avantage du bâtiment avec le bambou est qu'il peut être employé en combinaison avec d'autres types de matériaux de construction, comme par exemple renforcer des matériaux pour des bases existantes. Abondant, durable et extrêmement résistant, le bambou a un réel potentiel pour devenir un remplacement idéal à l `acier. Les essais de résistance à la traction prouvent que le bambou surpasse la plupart des autres matériaux, l'acier de renforcement inclus. Il atteint cette force grâce à sa structure tubulaire creuse, évoluée au cours des millénaires pour résister aux forces du vent dans son habitat naturel. Cette structure légère facilite également la récolte et le transport.

1- Essai de traction

Au cours d'un essai de traction, le bois de bambou est sollicité par un effort dont la direction est parallèle aux fibres. Deux grandeurs sont mesurées en particulier : le MORT (contrainte ultime en traction axiale) et le MOET (module d'Young axial). La rupture observée est systématiquement de type fragile, la plage plastique étant réduit. Les premières expériences permettent de mettre en évidence plusieurs causes de variabilité des propriétés mécaniques au sein d'un matériau : ? la présence de points de faiblesse facilite une rupture locale bien avant la rupture finale ; ? l'épaisseur du bois influe également sur les propriétés mécaniques.

Position de l'éprouvette dans l'épaisseur de la paroi

MORT [MPa] moyenne et coefficient de variation

MOET [MPa] moyenne et coefficient de variation

Intérieur

79 - 0,25

5311 - 0,15

Milieu

140 - 0,12

7660 - 0,16

Extérieur

213 - 0,09

13460 - 0,05

 

Tableau 1 : Variabilité des propriétés mécaniques en fonction de l'épaisseur de la paroi 45

2- Essai de compression

Lorsqu'il est comprimé en grandes déformations, le bambou présente un important palier plastique, à la manière des autres bois de construction. Le MORC (contrainte ultime en compression axiale) est nettement moins important, ce qui est lié à un phénomène de flambement et donc de décohésion des fibres au niveau du plan de cisaillement. Les éprouvettes de bambou choisies sont prises avec des diamètres différents, avec la contrainte cependant d'être

45 Bambou Science et Innovation, Caractéristiques mécaniques du Bambou, 2018, http://www.bambous-cience.fr/2011/06/24/caracteristiques-mecaniques-du-bambou/

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une portion de la tige entre deux noeuds afin de ne pas prendre en compte la discontinuité dans les fibres. Les résultats sont présentés dans le tableau ci-dessous :

Diamètre des tiges [mm]

MORC [MPa]

Coefficient de variation

40

80

Non évalué

60

50

Non évalué

Tableau 2 : Variabilité des propriétés mécaniques en fonction du diamètre des tiges46

3- Essai de flexion

Les essais réalisés sont des essais de flexion 3 points. Les expérimentations révèlent aussi la forte influence du diamètre des tiges sur le comportement en flexion des tiges de bambou. Une autre cause de variabilité, d'après les expériences menées, viendrait de la hauteur de l'échantil-lon dans le pied de bambou.

Diamètre des tiges [mm]

MORF [MPa]

MOEF [MPa]

40

100

13500

60

50

6500

Tableau 3 : Variabilité des propriétés mécaniques en fonction du diamètre des tiges, source47

Ainsi, plus l'échantillon est pris haut, plus le module élastique MOEF augmente. On peut donc « sélectionner » les propriétés mécaniques du matériau en fonction de l'utilisation désirée.

Le bambou est vulnérable aux attaques d'insectes et de champignons. Il est également sensible à l'humidité. Les produits non traités, destinés à un usage en extérieur, ont une durée de vie limitée entre trois et cinq ans. Cette difficulté peut être réduite par des traitements préalables (thermo-traitement, vernis, etc.) et un entretien régulier, les produits pouvant alors se conserver une trentaine d'années. Les propriétés mécaniques du bambou dépendent de l'espèce et de l'âge des tiges. Plus celles-ci s'approchent de leur maturité (entre 3 et 4 ans pour le Luông), plus le bambou est sec (taux d'humidité optimal de 20 %) et meilleures sont ses propriétés. Au-delà, les tiges continuent de sécher jusqu'à devenir cassantes. On peut comparer les performances du bambou avec celles d'autres matériaux de construction comme le chêne, le pin et le béton.

46 Bambou Science et Innovation, Caractéristique mécaniques du Bambou, 2018, http://www.bambous-cience.fr/2011/06/24/caracteristiques-mecaniques-du-bambou/

47: // www.bambouscience.fr/2011/06/24/caracteristiques-mecaniques-du-bambou/

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La densité d'un matériau, calculée en masse volumique (kg/m3), est liée à la résistance de ce matériau au poids. Le bambou est plus dense que le pin et aussi dense que le chêne.

La contrainte ultime en traction axiale mesure la résistance des matériaux à l'élonga-tion. Le bambou est le matériau le plus résistant à l'élongation. Il est trois fois plus résistant que le chêne.

La contrainte ultime en compression axiale sert à prévoir le comportement des zones comprimées qui devront supporter des efforts. Le bambou est plus résistant à la compression que les trois autres matériaux.

Performances mécaniques comparées

Caractéristiques

Bam- bou

Chêne

Pin

Béton

Masse volumique [kg.m-3]

580-

700

530

2400

 

700

 
 
 

Contrainte ultime en traction axiale [MPa]

240

90

100

2

Contrainte ultime en compression axiale [MPa]

80

58

50

25

Module de Young en flexion [MPa]

14000

13000

12000

24000

Energie de production [MJ.m-3]

30

80

80

240

Coefficient de Fail Safe48

50

20

20

10

Tableau 4 : Comparaison des performances mécaniques du bambou avec d'autres matériaux de construction49

La comparaison ci-dessus montre les nombreuses performances mécaniques du bambou face à des chargements en traction - compression - flexion, et ce, avec une masse volumique relativement faible. Deux facteurs sont également à prendre en compte : une faible énergie de production alliée à une grande capacité à supporter des accidents extérieurs de type séisme. Cependant, seules les performances à court terme des produits sont globalement connues. Les performances à long terme, comme la prise en compte du fluage, sont à considérer dans le cadre d'habitats appelés à tenir plusieurs dizaines d'années.

b. Propriétés Chimiques

Le bambou est une herbe dont le nom scientifique est Gramineae (Poaceae). Il fait partie dela sous-famille des Bambusoideae et de la branche des Bambuseae. Les bambous sont très

48 Exprime la capacité à supporter des contraintes accidentelles extérieures très forte : limite élastique/contrainte

49 Bambou Science et Innovation, Caractéristique mécaniques du Bambou, 2018, http://www.bambous-cience.fr/2011/06/24/caracteristiques-mecaniques-du-bambou/

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faciles à cultiver, très appropriés pour les régions tropicales et subtropicales, ils poussent en touffes, ont une reproduction unisexuée et une durée de vie de 5 à 20 ans. Le bambou est l'espèce la plus ancienne et il fait partie des plantes les plus répandues et les plus utilisées dans le monde.

Sa croissance est parmi les plus rapides : 20 à 60 cm par jour et 1 - 6 m en 1 an. Il est mûr en 4 ans, et utilisable après une année de croissance. La croissance naturellement rapide du bambou est un avantage pour sa culture et son utilisation sans influence négative sur l'écosys-tème.

L'étude des interactions entre les fibres de bambou et les composites nécessite de connaître la structure et la composition chimique des fibres. La composition chimique du bambou est similaire à celle du bois. Les principaux constituants des tiges de bambou sont la cellulose, l'hémicellulose et la lignine, qui représentent plus de 90% de la masse totale. Une étude de la composition chimique de bambous âgés d'un, deux et trois ans indique que la teneur en holo-cellulose ne varie pas beaucoup avec l'âge du bambou. Le bambou contient d'autres composants organiques, en plus de la cellulose, l'hémicellulose et la lignine. Il contient environ 2 à 6% d'amidon, 2% de saccharide désoxydé, 2 à 4% de matières grasses, et 0,8 à 6% de protéines.

Le bambou contient également des composants mineurs comme des résines, des cires, des tanins et des sels inorganiques. Le bambou est connu pour être sensible aux attaques de champignons et d'insectes mais la résistance du bambou à la moisissure, aux champignons et aux insectes est fortement associée à sa composition chimique.

c. Techniques d'assemblage et de liaison du bambou dans la construction

Outre les difficultés liées à sa forte orthotropie, le bambou utilisé dans sa forme tubulaire présente d'autres difficultés pour son assemblage. La première contrainte est liée à sa forme. En effet, les connections pour des matériaux circulaires et creux ne sont pas fréquentes. De plus, le bambou est une plante naturelle qui présente donc des irrégularités: sa section est plus souvent elliptique que circulaire, sa section diminue du bas vers le haut du chaume et son épaisseur n'est pas forcément constante le long de la section et de la longueur de la plante. Les noeuds sont des discontinuités le long de la tige qu'il faut prendre en compte. Lors de son séchage, le bambou subit des contraintes assez importantes qui conduisent le plus souvent à l'apparition de fentes. Ce phénomène de fendage est à prendre en compte dès que ce matériau est utilisé en construction.

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De plus, l'épiderme du bambou produisant de la cire, il est difficile de coller le chaume à partir de sa surface extérieure. Enfin, sa surface extérieure est dure ce qui rend le clouage et le perçage difficiles. Janssen (JAN 2000) définit sept groupes d'assemblages pour le bambou dans sa forme tubulaire:

Groupe 1: la liaison entre les deux tiges de bambou se fait par contact de toute la section. Groupe 2 : la liaison se fait par l'intérieur du chaume parallèlement aux fibres. Groupe 3: la liaison se fait par l'intérieur du chaume perpendiculairement aux fibres. Groupe 4: la liaison se fait par la section du chaume parallèlement aux fibres. Groupe 5: la liaison se fait par la section du chaume perpendiculairement aux fibres. Groupe 6:la liaison se fait par l'extérieur du chaume parallèlement aux fibres. Groupe 7: la liaison se fait par l'extérieur du chaume perpendiculairement aux fibres.

Les groupes 3 et 7 sont théoriques et n'ont aucune réalité pratique; les autres groupes sont représentés sur les figures ci-après.

Figure 27:Principes de fonctionnement des différents groupes d'assemblages distingués, source Janssen 2000

Le fait de solliciter le chaume de bambou sur toute sa section (groupe 1) impose la plupart du temps d'insérer des tiges dans le chaume qui est alors sollicité parallèlement ou perpendiculairement à la direction des fibres. De plus, le fait de faire transiter les efforts parallèlement ou perpendiculairement à la direction du chaume impose d'utiliser en outre la section du chaume du fait de la faible résistance en cisaillement du bambou. Aussi, les groupes 1, 4 et 5 peuvent être alors regroupés en une famille d'assemblage. Trois familles d'assemblage sont donc distinguées dans la suite du paragraphe : la famille I où la liaison se fait par la section du

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chaume du bambou, la famille II où la liaison se fait par l'extérieur du chaume et la famille III où la liaison se fait par l'intérieur du chaume. Pour les deux dernières familles, seuls les cas où les efforts sont parallèles aux fibres sont réalistes.

? ASSEMBLAGES FAMILLE I

Cette famille d'assemblages est utilisée traditionnellement par les pays producteurs de bambou, elle est donc la plus répandue à travers le monde. Elle se caractérise par le contact de toute la section d'un chaume de bambou sur un autre. Pour un bon fonctionnement de ce type d'assemblage, il est nécessaire de lier les deux chaumes de bambou. Cette liaison s'effectue souvent en introduisant des efforts perpendiculairement ou parallèlement aux fibres (ce qui explique pourquoi les assemblages des groupes 1, 4 et 5 ont été rassemblés)

Une application directe de ce type d'assemblage est de lier deux chaumes par un joint de colle. Dans ce cas, il s'agit d'assemblages appartenant uniquement au groupe 1 défini par Janssen. Ce procédé est peu utilisé en pratique car le collage est rendu difficile à cause de la cire produite par les cellules épidermiques. Ce procédé permet de reprendre des efforts de compression et de cisaillement mais est incapable de reprendre des efforts de traction.

Figure 28 : Assemblages liés par l'intermédiaire d'un joint de colle d'après [JAN 2000]

Une autre manière de lier les deux tiges de bambou consiste à utiliser une cheville qui peut être en bambou, en bois ou en acier. Cette liaison, présentée sur la prochaine figure, peut être classée dans les groupes 1 et 5 définis par Janssen. L'exemple 2 de la figure ci-dessous présente une cheville plus sophistiquée que celle de l'exemple 1 et permet de mieux résister à l'arrachement.

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Figure 29:Assemblages liés par l'intermédiaire d'une cheville [JAN 2000]

La liaison entre les deux chaumes peut se faire également par des lanières qui peuvent être en rotin, bambou, fibre de palmier, fil de fer galvanisé, nylon ou tout autre matériau?durable et résistant50. Ce type de liaison, présenté sur la figure 4 peut être classé dans les groupes 1 et 6. L'assemblage (b) de la figure envoie par le bambou vertical (tige 3) un effort de compression qui permet de maintenir la tige 1 qui reprend des efforts de traction.

Figure 30:Assemblages liés par des lanières d'après Janssen et pignon d'une façade d'une maison à Bali utili-
sant ce type d'assemblage (Langlais 2002)

Les assemblages de la figure 3et de la figure 4 consistent donc à tailler une tige de bambou en biseau (tige 1) pour qu'elle épouse la forme de l'autre tige (tige 2) et de lier ces deux

50 LANGLAIS, G. 2002

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tiges. Ce type de liaison est utilisé entre autre pour la liaison entre un arbalétrier et l'entrait des fermes traditionnelles. Une autre façon d'utiliser les cordages est présentée sur la figure 5. Dans ce cas, l'assemblage n'est pas capable de reprendre un effort de cisaillement et il est souvent utilisé pour réaliser des clôtures ou contreventer des maisons.

Figure 31:Assemblages liés par des lanières: (a) Principe de l'assemblage, Janssen. (b)Application pour une
clôture ROTTKE,E. (c)Application pour contreventer une maison à Bali, Langlais.

Il est possible d'utiliser à la fois des chevilles et du cordage comme le montre la figure 6. Dans ce cas, l'assemblage est constitué de trois éléments: les deux encoches A et B qui reprennent les efforts de cisaillement, la zone de contact qui reprend les efforts de compression et la cheville C avec le cordage qui reprennent les efforts de traction. Ce type d'assemblage appartient à la fois aux groupes 1, 4 et 5 définis par Janssen.

Figure 32: Assemblage lié à la fois par des chevilles et du cordage (JANSSEN 2000) et une application concrète

ROTTKE, E. (2009)

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Une autre manière pour lier les tiges de bambou entre elles et d'utiliser le bambou lui-même. L'assemblage de la figure 6 est très utilisé en Asie traditionnelle. Dans ce cas, le bambou vertical, (tige 1) possède une « languette » qui permet de fixer le chaume situé à l'horizontal (tige 2) ce qui améliore la stabilité de l'assemblage. Ce type d'assemblage peut être classé dans les groupes 1 et 6 définis par Janssen.

Figure 33:Assemblage du groupe 1 lié par le bambou lui-même (JANSSEN 2000)

Des moyens plus modernes existent également pour lier les deux chaumes de bambou. Ainsi, une version plus moderne de l'assemblage de la figure 5 est présentée sur la figure 7: cet assemblage utilise deux vis et un crochet.

Figure 34:Assemblage lié par l'intermédiaire d'un crochet et de vis (ROTTKE, E. 2009)

La plupart des assemblages présentés ci-dessus utilisent les noeuds comme point de solidité du matériau à l'effondrement et utilisent toute la section du bambou pour reprendre les efforts de cisaillement. Il existe des assemblages où l'effort transite directement parallèlement et/ou perpendiculairement aux fibres (assemblages du groupe 4 et/ou 5 définis par Janssen). Ces assemblages ont pour la plupart été développés plus récemment.

Par exemple, la figure 8 présente un assemblage utilisé pour réaliser des fermes en bambou utilisant soit des tiges en acier soit des chevilles en bambou cet assemblage est peu coûteux mais semble peu efficace. Les efforts passent directement entre chaumes par l'intermédiaire de la tige placée au niveau d'un noeud qui est un point de résistance du chaume.

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Figure 35:Assemblage utilisant une tige pour le passage des efforts entre plusieurs chaumes (JANSSEN 2000)

Shoei Yoh a réalisé un assemblage en 1989 permettant le transfert des efforts entre plusieurs chaumes de bambou grâce à des tubes d'acier placés à l'intérieur des tiges. Les tubes sont alors boulonnés sur chacun des chaumes par plusieurs boulons (Figure 9).

Figure 36:Assemblage imaginé par Yoh (ROTTKE E. 2009)

Il est également possible d'utiliser des plaques métalliques, des panneaux de particules ou de bambous pour lier les chaumes (Figure 10). Différentes possibilités existent pour lier les bambous aux plaques mais les plus fréquentes sont les boulons ou la colle.

Figure 37:Assemblage du groupe 5 utilisant des plaques métalliques :(a)et(b) (JANSSEN 2000) (c)Assemblage
imaginé par Renzo Piano (ROT 2009).

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Les noeuds présents sur le chaume sont donc utilisés dans la plupart des cas pour lier les bambous. Ils sont utilisés soit comme point de solidité pour la transmission des efforts de cisaillement soit pour éviter la rupture par aplatissement des tiges sur elles même. Pour ce dernier point, il est possible d'utiliser d'autres méthodes pour renforcer le bambou. Ainsi, sur le site Internet de « Deboer Architects » [DEB 2009], une version moderne de l'assemblage de la Figure est présentée: il s'agit du «Fish Mouth joint» (Figure). Cet assemblage, développé par Simon Vélèz renforce le bambou à l'écrasement par l'intermédiaire de mortier.

Figure 38:Le Fish Mouth joint: assemblage lié par l'intermédiaire d'une tige filetée et de mortier [DEB 2009]

Cette technique de renforcement est également utilisée pour lier plusieurs tiges de bambou entre elles pour la réalisation de structures importantes. Vélèz lors de la réalisation du pavillon Zéri (Figure (f)) a utilisé cette technique particulière pour lier les chaumes et réaliser des poteaux. Les chaumes sont percés et des tiges filetées sont passées dans ces trous pour les lier entre eux. L'entre noeud où sont placées les tiges est rempli de ciment (un trou est réservé pour cette opération) pour éviter la rupture par aplatissement des chaumes sur eux-mêmes. Cette technique est présentée sur la figure 42. Cet assemblage appartient uniquement au groupe 4 de Janssen car la section du bambou n'est pas utilisée.

Figure 39:Détail du pavillon Zéri [ROT 2009]

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Les assemblages de la famille I permettent de réaliser la grande majorité des structures traditionnelles et une partie des structures modernes. Ils peuvent transmettre des efforts de compression axiale en utilisant toute la section du chaume. La transmission des efforts de traction axiale se fait par l'intermédiaire d'efforts de cisaillement (comme pour les assemblages brochés bois) uniquement en utilisant les renforts naturels de la plante (les noeuds).La forme tubulaire du bambou le rendant vulnérable aux efforts de compression transversale (risque d'effondre-ment par aplatissement du chaume), le passage de ces derniers est permis par l'utilisation des renforts naturels de la plante (les noeuds) et/ou en renforçant artificiellement la tige par l'inter-médiaire de mortier. Aucun des assemblages de la famille I ne permet d'utiliser toute la capacité résistante du matériau en traction longitudinale.

? ASSEMBLAGES FAMILLE II

Pour les assemblages appartenant à cette famille, les efforts sont repris de l'extérieur de la paroi parallèlement au sens du fil ce qui correspond aux assemblages du groupe 6 défini par Janssen (JAN 2000). Les assemblages de la figure montrent des solutions traditionnelles utilisant ce principe: les efforts passent de l'extérieur de la paroi par l'intermédiaire de cordages. Les cordages sont traditionnellement en fibre de cocotier ou en bande de bambou. Pour ce dernier procédé, les bandes sont posées vertes et lorsqu'elles sèchent, elles rétrécissent et resserrent les bambous à lier entre eux. Aujourd'hui, des matériaux plus modernes sont utilisés (liens d'acier ou bandes de plastique). Une autre application traditionnelle de cette famille d'assem-blage est rencontrée pour renforcer des poteaux de bambou. Ces deniers sont liés par des cordages entre eux pour former des poteaux d'inertie plus importante.

Figure 40:Assemblage traditionnel utilisant les cordages pour transmettre les efforts entre chaume par l'inter-médiaire de leur paroi extérieur : (a) principe de fonctionnement (JAN 2000) (b) applications concrètes (ROT

2009)

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Brusnowitz (BRU 1989) a déposé un brevet sur un procédé proche de ceux décrits précédemment (Figure)

Figure 41:Assemblage de Brusnowitz (BRU 1989)

Albermanu et al. (ALB 2006) ont réalisé un assemblage léger pour les tiges de bambou. Ce dernier est en PVC et prend la forme indiquée sur la figure : les efforts passent de l'extérieur de la tige de bambou vers l'embout par l'intermédiaire d'une colle. Les auteurs soulignent que pour optimiser l'assemblage, il est nécessaire de faire des entailles à l'extrémité des bambous. Le test en traction montre que ce type d'assemblage peut monter jusqu'à 19 kN pour des bambous de 50 à 65 mm de diamètre extérieur. A partir de cet assemblage, un treillis a été réalisé.

Figure 42:Assemblage développé par Alberman et al (ALB 2006)

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Le système Bambutec reprend les efforts à la fois de l'intérieur et de l'extérieur de la tige de bambou. En effet, à partir de bois de résineux usinés pour recevoir les tiges de bambou, ces dernières sont collées et orientées pour réaliser des structures en treillis comme l'indique la Figure

Figure 43:Description du système Bambutec (BAM 2009)

Peu d'assemblages permettent le passage des efforts par l'extérieur de la tige. Les assemblages les plus performants utilisant cette technique nécessitent l'utilisation de colle mais ne permettent pas l'utilisation de 100% de la capacité résistante du bambou en traction.

? ASSEMBLAGES FAMILLE III

Pour les assemblages de cette famille, les efforts sont repris à l'intérieur du chaume parallèlement aux fibres par l'intermédiaire d'un élément linéaire (une tige filetée ou autre). Les efforts à l'intérieur du bambou peuvent être repris par différents types de liant. Cette famille d'assemblages, correspondant au groupe 2 défini par Janssen, est peu utilisée dans les assemblages traditionnels et permet d'imposer au bambou des efforts de traction et de compression parallèles aux fibres. Le premier liant permettant le transfert des efforts du chaume vers un élément linéaire est la colle. Par exemple, les efforts peuvent être transmis de l'intérieur du chaume par l'intermédiaire d'une cale de bois cylindrique. Dans ce cas, le bois est collé sur la

paroi intérieure de la tige. Une plaque de métal peut alors être collée dans une fente préalablement réalisée dans la calle de bois. Différentes géométries de plaques métalliques peuvent être utilisées; quelques-unes sont présentées sur la figure ci-après.

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Figure 44:Connexion par une calle de bois [ROT 2009]

Pour les bambous de petit diamètre, le système Pan peut être utilisé. Dans ce cas, une tige métallique est collée dans le chaume. Ce système permettrait de reprendre 50% de la capacité résistante du bambou (Figure ).

Figure 45:Assemblage utilisant le système Pan (ROT 2009)

Un autre liant possible est le béton. Janssen (JAN 1981) cite des travaux russes qui n'ont pas pu être retrouvés et qui rapporteraient que l'assemblage serait aussi fort que le bambou lui-même.

Figure 46:Assemblage permettant le transfert des efforts de l'intérieur du chaume

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Pour les bambous de gros diamètres, des assemblages spéciaux peuvent être utilisés. Dans ce cas, un profilé métallique particulier est ancré dans la tige de bambou préalablement remplie de ciment. Cet assemblage, présenté sur la figure 50, a été développé par l'entreprise Mero.

Figure 47:Assemblage Mero (ROT 2009)

En 2001, Rabot-Querci (RAB 2001) décrit deux assemblages utilisant le scellement d'une tige filetée dans le chaume par l'intermédiaire d'un mortier de scellement fluide. Le premier de ces assemblages est un assemblage sur le noeud, c'est à dire que le bambou est coupé avec un noeud à son extrémité et que ce dernier est percé en son milieu d'un diamètre supérieur d'un millimètre à celui de la tige. L'entre noeud es alors rempli de mortier et la tige est insérée dedans. La même opération est réalisée à l'autre extrémité du bambou pour pouvoir le tester en traction après séchage du mortier. Certaines de ces éprouvettes sont ligaturées avant de les tester, c'est-à-dire que leur extrémité est entourée de fil polyamide ou de fibre de verre collée sur le chaume. Le fait de ligaturer permet de limiter la fissuration du chaume et d'augmenter la résistance de l'assemblage. Le mode de rupture le plus souvent observé est l'arrachement de la cloison au niveau du noeud ce qui correspond à une contrainte de 52,3MPa: cet assemblage ne permet donc pas d'utiliser toutes les capacités du bambou en traction longitudinale. Le deuxième assemblage est un assemblage en cône : des entailles sont réalisées à l'extrémité du chaume qui est resserré en cône. Cette manipulation permet d'augmenter l'adhérence entre le mortier et le bambou. Avant que le mortier ne soit coulé dans l'entre noeud, le chaume est maintenu fermé par le même principe de ligature décrit précédemment. Après séchage du mortier, l'assemblage est testé en traction. Le mode de rupture le plus observé est le relâchement de la ligature entraînant une sortie du bloc. Malgré cela, la ruine des éprouvettes apparaît plus tard que pour l'assemblage précédent mais avec un déplacement plus important. L'auteur souligne que lors du séchage du mortier, ce dernier subit une phase d'expansion exerçant une poussée

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sur les parois du chaume. Le bambou n'ayant pas une résistance en traction transversale importante, cette poussée conduit parfois à la ruine des éprouvettes avant même de les tester.

Le fait de donner une forme conique au bambou a été imaginé dès 1941 par Duff. Cette référence n'a pas été trouvée et est citée par Janssen [JAN 1981]51. L'assemblage de Duff est constitué d'un « bouchon» de bois en forme de cône tronqué lié à un boulon qui permet le passage des efforts du boulon au chaume (Figure). Pour éviter l'ouverture du chaume, ce dernier est entouré d'un anneau en aluminium ou en acier.

Figure 48:Assemblage imaginé par Duff en 1941(JAN 1981)

En 2005, Londono et Cheyne [LON 2005] posent un brevet sur un assemblage très semblable à celui de Duff. Dans cet assemblage, l'effort transite dans le bambou par l'intérieur du chaume par l'intermédiaire d'un «bouchon» constitué 0,5 litres d'un mélange de sable, de résine phénolique et d'un catalyseur. Pour que ce bouchon passe les efforts vers le chaume, l 'extrémité de ce dernier est usinée en cône grâce à des entailles (Figure 52). Pour empêcher l'ouver-ture de la tige de bambou, cette dernière est maintenue fermée par un câble en acier. Ce type d'assemblage permet d'utiliser 100% de la capacité résistante du bambou lors d'un test en traction.

Figure 49:Principe d'attache GUADUATECH - www.guaduatech.com

51 Duff C.H. (1941), Bamboo and its structural use, Institution of Civil Engineers, Shanghai, pp.2, 27.

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Figure 50:Assemblage de Londono et Cheyne (LON 2005)

Dans les derniers assemblages décrits, 100% de la capacité résistante du bambou en traction longitudinale est utilisée. Ceci st permis par la forme de la zone d'assemblage (Figure): les efforts de traction (F) sont transférés dans le chaume de bambou par l'intermédiaire du cône intérieur qui envoie dans le bambou un effort de traction longitudinale (Ft) et un effort perpendiculaire (Fc) repris par le cône extérieur (anneau métallique ou câble en acier). Le bambou est donc sollicité en traction longitudinale par l'effort Ft et en compression transversale par l'effort Fc. Cette dernière sollicitation est permise (contrairement au bois) grâce à la forte limite élastique du bambou en compression transversale.

Figure 51:Passage des efforts du cône intérieur vers le bambou (une moitié de l'assemblage est représenté)
dans le cas des assemblages Duff (1941) [JAN 1981] et [LON 2005]

Ainsi les assemblages coniques pour le bambou mettent en jeu à la fois de la compression transversale et de la traction longitudinale tout comme les assemblages métalliques précontraints. Cependant les efforts transitent peu ou pas par frottement, l'effort n'est pas garanti et les glissements initiaux sont importants.

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CHAPITRE IV : ETUDE DES CAS (QUELQUES PROJETS ARCHITECTURAUX
EN BAMBOU DANS LE MONDE)

L'objectif majeur de notre étude de cas est de réussir à faire une lecture d'ensemble de quelques projets de construction et aménagements ayant un trait de similarité avec notre proposition. Le bambou étant un matériau novateur dans la construction surtout au niveau de l'aspect structurel, nous avons élaboré une étude de quelques cas nationaux et internationaux, dont les critères de choix sont, les caractéristiques de la construction ou de l'aménagement, l'idée générale de l'approche développée, les considérations écologiques et environnementales, les besoins sociaux de ces espaces et l'impact du projet dans la considération du matériau bambou. Ces quelques points évoqués sont les principaux outils d'analyse de ces projets, afin de mieux appréhender une contextualisation de l'architecture de bambou dans nos milieux urbains.

A) ETUDE DE CAS QUELQUES PROJETS EN AFRIQUE ET AU CAMEROUN

En Afrique, nous n'avons pas trouvé beaucoup de références dans le domaine de la conception et construction architecturale en bambou. Cela s'explique par le fait que, le bambou n'était pas encore considéré comme véritable matériau aux multiples propriétés et applicable dans le développement des activités génératrices de revenus d'un territoire précis. C'est à la lumière des multiples conventions et accords de partenariats entre les pays africains et l'INBAR que la prise en conscience a été effective. Toutefois, certains architectes se sont démarqués par leur utilisation de cette ressource naturelle, abondante et riche en potentiel. Des architectes ayant réalisés des ouvrages architecturaux en bambou en Afrique et au Cameroun, nous nous sommes principalement attardés sur Guillaume KOFFI, Issa DIABATE et Lionel TSAGUE.

1- LE PAVILLON DE BAMBOU DU CABINET KOFFI ET DIABATE ARCHITECTS

Les architectes ivoiriens Guillaume Koffi et Issa Diabaté s'inspirent de l'architecture traditionnelle africaine pour concevoir des bâtiments de plus en plus passifs, mais résolument modernes. "On ne vend pas des mètres carrés mais un concept, un mode de vie", affirment les architectes stars de la lagune Ébrié Guillaume Koffi et Issa Diabaté. Connus pour leurs réalisations futuristes comme les sièges de la Bridge Bank et la Versus Bank à Abidjan ou les hôtels Onomo à Abidjan et Libreville, les deux compères, diplômés respectivement de l'École spéciale d'architecture de Paris et de l'université Yale, créent des bâtiments de plus en plus passifs.

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Les pavillons conçus dans le cadre d'une éco-cité durable qu'ils développent à Assinie (station balnéaire à 80 km d'Abidjan) comprennent un lieu de culte, un jardin public, des zones pédestres, en recourant aux matériaux locaux, comme le bambou ou le framiré.

Avec de grands espaces ouverts protégés du soleil et de la chaleur par des panneaux de bois et un large double toit, des ventilations naturelles transversales , un système de récupération des eaux de pluie... leurs réalisations proposent des produits haut de gamme entre 150 et 300 millions de F CFA, respectueux de l'environnement, résolument modernes tout en s'inspi-rant des habitats traditionnels.

Figure 52: Vue sur le mur de bambou du pavillon Koffi et Diabaté ARCHITECTS

2- LE PROJET DU RESTAURANT BOUKAROU LOUNGE EN BAMBOU A YAOUNDE

En ce qui concerne Lionel TSAGUE, autre architecte ayant réussi à se faire connaitre par le biais de l'utilisation du matériau bambou dans un projet d'architecture, soulignons le fait que, c'est lors du lancement du bureau régional de l'INBAR à Yaoundé au Cameroun qui a marqué une nouvelle période de coopération entre l'Organisation internationale pour le bambou et le rotin (INBAR) et l'Afrique de l'Ouest, que cet architecte de tout juste 25 ans s'est fait connaitre du grand public. Sur l'internet il a trouvé de l'information concernant les bénéfices du bambou, l'herbe géante qui est super renouvelable et une efficace stockeuse du carbone. Inspiré par plusieurs architectes contemporaines comme Simon Velez et Vo Trong Nghia, il a été convaincu qu'il pourra créer une carrière comme architecte utilisant le bambou qui pousse en Cameroun. Il y a des espèces locales et introduit qui se trouve dans les forêts, au bord des rues et de plus en plus dans les plantations qui sont encore en train de développer pour cette industrie naissante. Pour le projet, « Boukarou Lounge » un nouveau restaurant qui se trouve en centre-ville de Yaoundé, il a voulu utiliser le bambou pour la structure du bâtiment, mais malheureusement la compagnie d'assurance n'a pas pu accepter à cause des régulations. Alors, il avait utilisé du bois local pour la majeure partie des structures et du bambou pour l'extérieur

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et le décor, résultant en un endroit qui mélange le traditionnel et le moderne. Le restaurant est devenu populaire et est fréquenté par beaucoup des clients. L'effet final n'est pas totalement manquant de bambou mais il espère que la prochaine fois il aura l'opportunité pour réaliser son rêve de construire quelque chose totalement en bambou. D'autre part il est aussi l'auteur d'un projet virtuel d'une gare associée à un espace public, ce qui a été son projet de fin d'études.

Figure 53: Restaurants en Bambou. L'un à Nkongsamba, l'autre à Yaoundé- Cameroun. Source Lucien ESSONO

B) ETUDE DE QUELQUES PROJETS EN BAMBOU A L'INTERNATIONAL

1- DES GRATTE-CIEL EN BAMBOU, PAR L'AGENCE D'ARCHITECTURE AMERI-CAINE CRG ARCHITECTS.

Construire à partir de déchets de fibres et d'herbe signifie utiliser moins d'arbres et plus de plantes. Le bambou est une herbe géante qui est plus dure que le bois de chêne Pourquoi ne pas exploiter cette ressource naturelle capable de se renouveler en seulement cinq ans pour construire des projets entiers ?

Telle est la proposition de l'agence d'architecture américaine « CRG Architect » qui, tout en se basant sur les diverses qualités du bambou, a imaginé un quartier entier utilisant ce matériau. Pour développer leur concept, les architectes ont longtemps étudié d'une part le comportement des hommes vis-à-vis de la nature et d'autre part le temps que met le bambou pour sa prolifération, sans parler de ses caractéristiques utiles pour l'acte de bâtir. Une idée qui se base sur le renforcement et l'amélioration des qualités structurelles du bambou ainsi que son intérêt durab0le pour encourager les usagers à appliquer le concept sur les immeubles de grande hauteur. Une avancée au haut potentiel surtout quand cela touche le développement des villes.

« Un quartier entier construit en bambou où les constructions suivent la forme de la parcelle et la hauteur des édifices guide leur orientation, où les bâtiments disposent du rayonnement du

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soleil et profitent des meilleures vues. Cette distribution nous donne un sentiment d'enrichisse-ment. Le projet cherche à concevoir un village entier de gratte-ciel où le bambou serait la source d'inspiration, que ce soit pour la hauteur ou pour sa qualité durable. C'est un exemple de faisabilité urbaine pour la ville de Singapour. »

Figure 54: DES GRATTE-CIEL EN BAMBOU, CRG ARCHITECTS.

Le Bambou : Souple, résistant, durable et local

Etant donné qu'un village urbain a besoin de planification et de conception, l'existence d'un matériau aussi génial soit-il n'occulte point les principes fondamentaux de n'importe quel projet de ville. Est-ce que « CRG Architect » a abordé le sujet ? La réponse est rapide et les explications plus approfondies. Les architectes expliquent que dès le départ leur objectif était de parvenir à une méthode qui allie plusieurs variétés de bambous formant des assemblages utiles à grande précision et qui puisse s'intégrer à toute autre forme de système structurel. L'acier inoxyd0able serait l'une des meilleures solutions en raison de sa résistance dans l'assemblage des poteaux dans les bâtiments où l'utilisation des cordes serait tout simplement dangereuse.

Figure 55:Modelisation de la structure, CRG ARCHITECTS.

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Les architectes, se basent sur les mêmes principes utilisées dans la construction de la German-Chinese House de l'exposition universelle de Shanghai 2010, et insistent sur l'utilisation de l'ETFE (éthylène tétrafluoroéthylène) comme matière principale qui offre une résistance élevée à la corrosion et à la hausse des températures tout en étant un matériau autonettoyant et recyclable. De même, vu la grande élasticité du bambou, son utilisation dans des zones menacées par les séismes serait un avantage pour l'humanité. Que des vertus qui peuvent probablement changer notre manière de penser.

Figure 56: Organisation spatiale et vue aérienne, CRG ARCHITECTS.

2- LA SALLE DE SPORT CONSTRUITE EN BAMBOU DE LA PANYADEN SCHOOL SIGNEE CHIANGMAI LIFE CONSTRUCTION

La Panyaden School est une école verte à Chiang Mai entièrement construite en bambou et en terre. Cette école a été fondée dans le but d'offrir une atmosphère paisible et proche de la nature. Elle vise à démontrer comment vivre une vie respectant l'environnement grâce à une faible empreinte carbone. La salle de sport est un espace qui devrait fournir de l'espace pour le futsal, le volleyball, le basketball et le badminton. De plus, elle est également prévue pour faire place aux cours de pratique des plus petits. La construction globale de l'Indoor Sports hall est directement inspirée de la fleur de lotus. En effet, étant donné que l'école de Panyaden enseigne principalement les principes éducatifs bouddhistes, leurs structures architecturales se devaient d'être en ligne avec leur thématique d'enseignement.

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Figure 57: Structure en bambou, Payaden School.

L'architecture de ce projet est unique, utilisant les pratiques d'ingénierie du 21ème siècle. En effet, la salle de sport est dotée de fermes en pur bambou utilisées pour créer une travée de 15 mètres de hauteur. Elles ont été au préalable construites à même le sol, préparées pour ensuite être assemblées. Les arches, quant à elles également en bambou, créent un vaste espace confortable. Aucun renforcement en acier n'a été placé. Deux ingénieurs ont travaillé sur les charges, les tensions ainsi que sur les forces de cisaillement an de les peser et les déterminer de la manière la plus précise. Enfin, la ventilation est assurée par d'éparses ouvertures dans le toit à trois couches qui apportent également de la lumière. En aval du processus de construction, lors de la conception, une maquette a été réalisée à base de petits bâtons de bambou. Elle a permis la démonstration du projet au client, mas surtout de répondre aux questions structurelles.

Figure 58:Gymnase de la Payaden School entièrement en bambou

3- LA MERVEILLEUSE MAISON EN BAMBOU D'ELORA HARDY A BALI

Lors de la conférence Ted 2015, Elora Hardy 52présente de superbes maisons de bambou construites par son équipe à Bali et partage le potentiel du bambou, tellement énigmatique. Il

52 ( http://ibuku.com/)

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n'y a pas deux poteaux de bambou identiques, ils se déforment, se courbent et surprennent à chaque tournant.

Le village se situe le long des pentes en terrasses de la Rivière d'Ayung à Bali, le « Green village » est un ensemble de dix-huit maisons magiquement uniques, construites à la main par l'équipe d'Ibuku. Chaque maison est faite sur-mesure et vise à incarner à la perfection les forces et la polyvalence du bambou. Situé à quelques pas de l'École Verte, le « Green Village » est un bel exemple de la combinaison de l'innovation architecturale, des principes de développement durable et de l'artisanat.

Figure 59: Vues extérieures et aperçu sur le pont d'accès à la maison six étages d'Elora Hardy, Bali.

Après avoir quitté une brillante carrière dans la mode à New York, Elora Hardy a rejoint ses parents à Bali en 2010, où elle a grandi. Son projet inspiré par l'école fondée par son père, elle souhaite étudier la faisabilité des maisons en bambou. «La première fois que j'ai observé ces structures en construction à la Green School il y a six ans, j'ai trouvé ça parfaitement sensé. Le bambou pousse tout autour de nous, il est fort, il est élégant et résiste aux séismes. Pourquoi n'est-ce pas arrivé plus tôt, et que pouvons-nous en faire pour la suite ?» se demande-t-elle. Pourquoi ne pas y avoir pensé plus tôt? Aisément transportable, souple mais résistant, léger, facile à trouver sur place et surtout très écologique, le matériau semble avoir toutes les qualités. Problème: les constructions en bambou sont éphémères, car les insectes l'adorent et le dévorent. Après une longue étude, Elora finit par trouver la solution: traiter le bambou avec sel de bore, ce qui le rend indigeste pour nos amis à six pattes.

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Figure 60: Vues sur la cuisine et plancher haut, Bali.

4- LE PAVILLON ZCB BAMBOU, UNIVERSITE CHINOISE DE HONG KONG

Le ZCB Bamboo Pavilion conçu par un groupe de recherche de l'Ecole d'Architecture de l'Université de Hong Kong, coordonné par le Pr Kristof Crolla, a été récompensé par l'attribution du titre The Small Project of the Year 2016 à l'occasion du World Architecture Festival (WAF) qui a eu lieu à Berlin du 16 au 18 novembre 2016. Le pavillon, utilisé pour la présentation de spectacles, l'organisation d'expositions et d'événements, est une grille en bambou. Il exploite les caractéristiques structurelles de la coque et des structures réticulaires pour obtenir une construction légère et résistante à double courbure, qui a une surface utile d'environ 350 m2 et une capacité de 200 personnes. Le pavillon est constitué de 473 pieux de bambou cintrés sur place.

Figure 61: Structure du Pavillon, ZCB BAMBOU, UNIVERSITE CHINOISE DE HONG KONG

La grille est revêtue d'un tissu blanc ouvert dans la partie inférieure pour dévoiler la structure en bambou. La réalisation de cette architecture est une heureuse combinaison de techniques basées sur la tradition artisanale cantonaise et la fabrication de maquettes et la simulation numériques. Le projet met en outre en lumière les propriétés intrinsèques du bambou comme

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matériau pour l'architecture, un matériau à faible impact environnemental et largement disponible dans cette zone géographique, où il est utilisé principalement pour des installations temporaires ou comme matériau alternatif au bois ou à l'acier.

Figure 62: Ambiances du pavillon dans la journée.

5- LE BAMBOU EN APPLICATION STRUCTURELLE A L'ECOLE METI AU BANGLA-DESH

L'école du METI (Modern Education and Training Institute) a été couronnée de nombreux prix (Aga Khan award en 2007 ; International Bamboo Building Design Competition ; AR Awards for emerging architecture) pour sa beauté, sa simplicité et son côté humain. Son architecte, Anna Heringer a su démontrer la modernité de la bauge et du bambou à travers ce projet, construite dans un village du nord Bangladesh. Il est la preuve vivante de l'efficacité des procédés constructifs traditionnels.

L'architecture de l'école est la transcription de la philosophie du METI, «apprendre dans la joie» : des espaces flexibles, diversifiés dans leurs tailles et les ambiances proposées afin de répondre à des formes pédagogiques variées. Au rez de- chaussée, trois classes entre des murs en boules de terre empilées de 50 cm d'épaisseur sont reliées chacune par des ouvertures rondes à deux « grottes » aux surfaces douces destinées à un travail concentré, seul ou en petit groupe, ou à des réflexions créatives dans une atmosphère protectrice. Léger et ouvert vers l'extérieur, l'étage en bambou offre un espace vaste dédié au rassemblement et au mouvement.

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Figure 63:Plan de masse et Façade de L'ECOLE METI, BANGLADESH.

L'école de Rudapur, déjà plusieurs fois primée, soulève l'enthousiasme dans les revues internationales. Un étudiant en architecture de Dhaka, capital du Bangladesh, a écrit à Anna : "Je n'avais jamais imaginé qu'il était possible de créer une architecture aussi extraordinaire avec nos matériaux indigènes". Le projet illustre le potentiel offert par une conception judicieuse, du choix de l'implantation jusqu'aux détails de construction. Les multiples feedbacks sur l'école du METI ont pourtant montré que ce ne sont pas les avantages écologiques, ni même l'économie du projet, qui ont convaincu usagers et professionnels, mais les facteurs émotionnels : les couleurs, l'atmosphère, le confort, l'esthétique.

Figure 64: Charpente et Fenêtres en Bambou, école METI.

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6- LA GREEN SCHOOL, Ecole 100% verte à BALI en INDONESIE

L'école est située dans un cadre naturel, sur un campus de 8 hectares près du village de Sibang Kaja, à Bali (Indonésie) divisé par la rivière Ayung53.

Figure 65: Vue sur la cour de l'école et le pont sur la rivière, Green School Bali.

Deux entrées donnent accès aux 8 hectares de cet immense campus. Les élèves qui rentrent à l'est parcourent un paysage de rizières, de jardins potagers biologiques, de forêts. Puis ils traversent un spectaculaire pont de bambou coiffé de toit en paillote, enjambant la rivière Ayung. Sur l'autre berge, ils atteignent leurs six salles de classe : laboratoires, gymnase, et le « Hearth of school » qui regroupe la bibliothèque, la salle informatique, l'administration et des salles d'exposition. Tous ces bâtiments ont une structure en bambou, des toits en paillote, des murs en pisé et sont ouverts à la brise ambiante. Dans les salles de classe, tables, chaises, étagères tableaux : tout est bambou54.

C'est la société PT bambu qui conçoit et construit les meubles et les bâtiments en bambou ; et la Merangi Foundation qui s'assure du réapprovisionnement de la matière première. A Bali, 90% du bambou cultivé correspond à des espèces aux diamètres trop petits pour servir à la construction alors qu'à Java, l'île voisine, sa culture est davantage soutenue et plus diversifiée. Parmi les 7-8 espèces qui y poussent, le Géant Bétung (Dendrocalamus Asper) est particulièrement adapté à la construction puisque ses cannes peuvent atteindre 60 m de haut et leur diamètre de 10 à 14 cm.55

53 Sibangkaja, Bali en indonesie, mainguyen.nhaan.free.fr/wiki/index.php, 3/12/2020

54 Source : grazia.fr

55 Revue Ecologik n°15 (juin/juillet 2010 )- p. 76

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Figure 66: Chantier de construction et outils de travail du bambou, Bali

Le bambou tali est, lui, plus approprié pour les meubles avec son diamètre de 3 à 9 cm. PT bambu conçoit son architecture sur le terrain, avec l'aide des aînés de la communauté locale, qui ont montré aux bâtisseurs comment couper la plante pour fabriquer les joints, sélectionner la bonne canne pour chaque position, ... Des plateformes sont érigées ensuite, à hauteur des futurs étages, pour juger les panoramas et construire autour de ces points de vue. Avant le dessin de tout plan, des maquettes sont construites au 1/50è ou 1/100è pour expérimenter la forme et structure du futur bâtiment. Les maquettes sont vitales à la communication avec des aînés des villages qui n'ont jamais utilisé de plans.

Figure 67: Vue sur le hall en Rez de chaussée et sur le plancher supérieur, Green School.

Fondée par John et Cynthia Hardy (pionniers en matière de commerce équitable), subventionnée par l'association Sustainable Educational Trust, et faisant également appel aux dons privés, l'école est une organisation à but non lucratif qui se donne pour mission de former des éco-citoyens du monde, responsables et conscients du lien étroit qui unit l'homme à son écosystème, à même de relever les défis encore inconnus du futur. La Green School est une initiative encore inédite, mais elle prend place dans un contexte favorable à l'innovation et à

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une réforme de l'enseignement qui prenne en compte des préoccupations écologiques toujours plus pressantes.

Figure 68: Vues intérieures et plan de masse de l'école.Bali.

7- LES PROUESSES DU BAMBOU DANS LES OEUVRES DE SIMON VELEZ 1) Pavillon de la Colombie - Hanovre - Allemagne :

Le réseau « Global ZERI » participait à l'expo universelle de Hanovre, Allemagne, en 2000, avec une structure en bambou qui est devenue référence de l'architecture durable. Le pavillon ZERI de Simon Velez a été soumis à une série de tests scientifiques en collaboration avec plusieurs institutions universitaires. Il est témoin d'un effort remarquable pour changer l'image de bambou dans la construction ; souvent on le considère comme un matériau de pauvreté. Le but de ce projet est de créer une structure qui susciterait la fierté et stimuler l'utilisation de cette abondante production. Après sa remarquable présence à l'Expo de Hanovre, le pavillon a été reconstruit à Manizales, en Colombie.56

Figure 69: Pavillon Zéri lors de l'expo universelle de Hanovre, Allemagne, en 2000

56 ACIER VEGETAL, Le guadua pour des constructions écologiques, Septembre 2016.

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2) Pont Nankun - Chine :

Au sud de la Chine, à moins d'une heure de route de la rivière des Perles et de Guangzhou (Canton), capitale de la province du Guangdong, les montagnes du Nankun figurent une exubérante oasis tropicale. Un itinéraire sinueux conduit à travers une gorge jusqu'à l'emplacement du Crosswaters Ecolodge qui, comme son nom l'indique, a essaimé ses pavillons au confluent de deux rivières.

Figure 70: Pont Nankun, chine.

La récolte de l'espèce principale, le «Phyllostachys pubescens », utilisée pour les échafaudages de Hong Kong, fait vivre la communauté locale des Keija, soit cinq mille personnes. Si le pont couvert réalisé par l'un des meilleurs spécialistes de ce matériau, l'architecte colombien Simón Vélez, constitue une prouesse technique, il n'en existe que deux autres semblables dans le monde. Le pont couvert en bambou est une innovation technique. Son concepteur a fait couler du mortier dans les tiges avant de les assembler avec des boulons. L'ambition étant de rester fidèle à l'esprit des lieux et aux pratiques traditionnelles de ses habitants.

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Figure 71: Structure du Pont (béton, acier, bambou)

C) L'ECONOMIE CIRCULAIRE DU BAMBOU DANS LA REVITALISATION URBAINE

Léger, résistant, facile à mettre en oeuvre, à la croissance rapide et au charme visuel délicat, le bambou est essentiel à la vie quotidienne de bien des personnes dans le monde. Il est parmi les plantes celle qui offre les plus grand nombre de possibilités d'utilisations. Il sert à l'homme pour fabriquer des outils de travail, des jouets, des armes, des instruments de musique, du papier, des médicaments, des aliments, pour le génie civil et, enfin, pour les maisons : un milliard d'êtres humains habite une maison partiellement ou entièrement en bambou.

L'émergence du bambou comme substitut du bois a bénéficié des limites de l'approvi-sionnement en bois (notamment en bois certifié) face à une demande croissante en produits ligneux. Les produits de transformation du bambou les plus récents, développés au cours des quinze dernières années, tels que parquets, panneaux, meubles en lamellé-collé, produits pour menuiserie et charpente, charbon et charbon actif, représentent aujourd'hui 30 % des volumes de produits à base de bambou commercialisés, mais moins de 2 % du marché total des produits ligneux bois/ bambou. Ils possèdent un fort potentiel de développement s'ils se montrent économiquement compétitifs avec le bois à qualité équivalente. L'aspect extérieur du bambou, sa résistance et sa dureté (comparable au chêne), combinés à son cycle de croissance rapide et à son mode de récolte durable, en font un potentiel substitut au bois. C'est un produit de plus en plus attractif, en particulier sur les marchés des pays développés. Les perspectives de croissance de ces marchés sont élevées, bien que l'on observe ces dernières années un tassement, lié à la crise économique mondiale.

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Différents produits dérivés en bois peuvent parfaitement être fabriqués en bambou. Les chaumes peuvent être coupés en fines lamelles qui sont ensuite collées les unes aux autres et pressées ensemble pour former des panneaux de bois. Ces panneaux sont souvent plus solides qu'un bois dur classique. Il existe donc du bambou triplex ou multiplex : il s'agit de plaques de bois formées d'un nombre impair de couches de placage (très fines couches) qui sont collées entre elles en les entrecroisant.

1- DOMAINE DE L'ALIMENTATION

Le bambou sert d'aliment : les jeunes pousses subissent un traitement de fermentation (avec des bactéries qui produisent de l'acide) ; les feuilles sont utilisées pour nourrir le bétail. Les jeunes racines sont utilisées pour la nourriture; on les extrait dès leur formation, sinon elles deviennent vite fibreuses, on enlève les gaines protectrices, on les coupe en petits morceaux et on les fait bouillir pendant une demi-heure environ. Les rhizomes sont ensuite mangés principalement en salades57. En Extrême-Orient, le bambou n'est pas uniquement utilisé pour fabriquer l'assiette et les couverts, mais aussi pour ce qu'on y dépose. Les pousses de bambou sont de savoureuses sources de minéraux (potassium, calcium, manganèse, zinc, chrome, cuivre, fer, phosphore et sélénium) et de fibres, et elles contiennent même les huit acides aminés que l'homme peut trouver dans sa nourriture. Les pousses de bambou fraîches sont de plus une source de vitamines A, B1, B3, B6 et E. Elles contiennent par ailleurs ce que l'on appelle les phytostérols, qui font baisser le taux de cholestérol. Selon certains, le bambou serait également un `nutraceutique' (un aliment aux effets bénéfiques pour la santé). En raison des glycosides cyanogènes présents dans les pousses (auxquels les hommes sont particulièrement sensibles),

57 M. NÈGRE, Ingénieur Agronome. Domaine de PraFrance par Générargues (Gard).

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nous devons toutefois d'abord les faire bouillir, car la chaleur de cette cuisson décompose ces molécules en résidus sûrs. Les plus vieilles pousses contiennent quant à elles trop de lignine.

Loempia Photo: Joi Ito

2-DOMAINE DE L'ARTISANAT

Les bambous sont également utilisés pour la fabrication d'articles de vannerie et de bimbeloterie; pour la confection des stores, des pergolas. Qui peut s'imaginer les nombreux paniers tissés à partir de bandelettes de bambou puis abondamment peints dans des couleurs vives ? Ou l'une des mille autres sortes d'objets usuels qui sont fabriqués à partir de la plante : assiettes, cuillères, paniers de cuisson à la vapeur, mannes, coffres, lits, sièges, tapis, coussins, théières, armoires, tiroirs, bouliers, règles graduées, lanternes et torches, balais, rideaux, vases, rien qu'avec le bambou, il est possible de mener une vie convenable.

Le chaume de bambou est un matériau qui permet de réaliser plusieurs objets du quotidien. Il est employé dans la réalisation de divers objets tels que plateaux, canne à pêche, pinceaux à calligraphie, louche, arc.... Aujourd'hui de nouvelles techniques de traitement du bambou permettent de l'utiliser pour la construction de produits finis à haute valeur ajoutée tels que les ordinateurs portables. Une grande marque a récemment sorti un portable écologique dont la coque est faite en bambou !

OEuvres d'art , Photo: Mikael Restoux

3- DOMAINE DE L'ORNEMENTATION

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Dans ce domaine le bambou est aussi utilisé comme revêtement décoratif, au travers des panneaux tissés. Ces panneaux de bambou tressé sont traditionnellement utilisés au Japon pour habiller murs et plafonds. Ils servent également de charte graphique à de nombreuses autres applications en décoration, textile, et sont souvent revisités par les créateurs contemporains.

Hana Ajiro Yotsume Kuzushi Renzoku Ajiro

Mutsume Koire Asanoha Tobi Gozame Matsuba Ami

Le terminal 4 (T4), dessiné par l'agence Richard Rogers est inauguré en 2006, il a été construit pour faire face à la croissance du trafic aérien sur Madrid, qui voit doubler sa fréquentation et atteindre les 70 million passagers, devenant le premier aéroport européen. La maîtrise d'ou-vrage avait demandé à ce qu'il soit ouvert au maximum sur le paysage et l'extérieur, et minimalise les consommations énergétiques. Le choix s'est finalement porté sur le bambou, pour des raisons environnementales. Les bambouseraies étant contrôlées, et par désir d'expérimenter un matériau jamais utilisé.

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Figure 72: Aéroport de Madrid - arch. Richard Rogers, Estudio Lamela

4- INDUSTRIE DE PAPETERIE

Les bambous servent, en Extrême-Orient, à la fabrication d'un très bon papier de Chine. Toutes les parties de la tige riches en cellulose s'emploient pour la fabrication de la pâte que Ton obtient par la macération et la trituration des tiges, préalablement divisée en lanières. Lessivé à la chaux, le bambou donne une pâte très résistante servant à la fabrication des papiers de pliage : le bambou sec donne un rendement de 75 %. Lessivé à la soude et blanchi entièrement, le bambou sec donne un rendement de 35 à 40 %. En France, il faudrait évidemment développer la culture du bambou, car, pour pouvoir alimenter une papeterie de façon permanente, il faudrait lui fournir au minimum 40 mètres cubes de bambou par semaine.

Une dernière application du bambou repose sur les fibres que nous pouvons extraire des chaumes. Traditionnellement, ces fibres ne sont rien d'autre que de longues cellules individuelles du chaume, enveloppées d'une paroi cellulaire lignifiée solide. De cette manière, nous obtenons une fibre de bambou raisonnablement courte (plus courte que 3 millimètres). Ces fibres peuvent être utilisées pour la production de papier, ce qui se passait déjà il y a plus de 2000 ans en Chine.

C'est en chine, en 105 après J-C, qu'est codifié l'art de créer du papier. Les fibres naturelles telles que le bambou, le in ou le chanvre sont à l'époque préconisées. Au XIXème siècle, la fabrication du papier passe d'une production artisanale à une production industrielle avec l'ar-rivée de la machine à fabriquer le papier « à grande étendue » de Nicolas Robert. La pâte à papier autrefois réalisée à partir de fibres végétales naturelles, est maintenant réalisée en grande quantité grâce à l'utilisation du bois. Des procédés chimiques sont mis au point pour obtenir des fibres à partir du bois.

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Ils permettent d'augmenter considérablement la solidité des papiers et par la même, leur vitesse de production. Toutes les cellules végétales contiennent une substance blanche et fibreuse, chimiquement identique au coton des chiffons : la cellulose, nommée ainsi car constituant l'essentiel des cellules. Les procédés chimiques consistent donc à extraire du bois les fibres cellulosiques à partir desquelles on fabrique du papier.

Aujourd'hui, l'Inde est leader mondial en matière de production de fibres de bambou pour l'industrie du papier. En traitant aussi chimiquement ce matériau, nous obtenons de plus longues fibres, appelées fibres de viscose. Celles-ci sont plus utiles que la version plus courte dans l'industrie du textile en orient et en occident. Rien d'étonnant donc à ce qu'on trouve sur le marché de plus en plus de serviettes, chaussettes et T-shirts en viscose de bambou.

5- LE BAMBOU EN CONSTRUCTION ET DESIGN ARCHITECTURAL

Le bambou représente aussi la tradition orientale. Il est la matière première servant à la production d'un grand nombre d'objets traditionnels, surtout dans les cultures orientales, où les tiges lignifiées de la plante sont utilisées pour la fabrication de paniers, meubles, embarcations, huttes, ponts, canaux d'irrigation - et même jusqu'aux immenses échafaudages autour des gratte-ciels en Chine et en Corée. Tout bien considéré, il n'y a pas de grosse différence entre le bambou et les autres types de bois. Les principaux éléments sont la cellulose (40-50%), l'hémi-cellulose (20%) et la lignine (25%), auxquelles s'ajoutent un peu moins souvent des substances éventuelles comme les tanins, les résines et les minéraux, par exemple le dioxyde de silicium.

Par ailleurs, les chaumes de bambou contiennent une réserve de substances facilement digestibles comme 2 à 6% d'amidon, 2 à 4% de graisse et 1 à 6% de protéines - assurément une délicieuse collation pour les nombreuses moisissures et les insectes qui sont à l'affût pour dévorer ces substances de réserve riches en énergie. Les principaux insectes sont les coléoptères des bambous, les termites et les cynips des bambous. Dans des circonstances humides et chaudes, le bambou est principalement attaqué par la rouille foliaire. Sans protection supplémentaire, un chaume de bambou tient au maximum 36 mois avant sa décomposition.

Une des meilleures façons de protéger le chaume de bambou coupé est de la faire sécher le plus rapidement possible. Cette étape est indispensable avant de réaliser toute sorte de travaux de construction avec le bambou : des chaumes verts, pas séchés se contractent encore pendant leur séchage et peuvent littéralement remettre en question toute une construction. Guadua an-gustifolia, pour citer cette variété en exemple, présente un temps de séchage de six à douze

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semaines. À titre d'alternative, il est possible de placer les bois un certain temps dans de l'eau qui s'écoule (par exemple un ruisseau), de manière à ce que les sucres et les protéines soient entraînés par le courant hors du chaume. Si on souhaite conserver le bois sur une longue période, un traitement avec des produits chimiques toxiques est nécessaire.

Figure 73: Maisons et mobilier en bambou

Le projet du Great Bamboo (wall) House (Pékin, Chine) s'inscrit dans un programme plus vaste auquel les architectes asiatiques les plus célèbres dont Yung-Ho Chang, Shigeru Ban et Gary Chang ont pris part en 2002 avec la réalisation d'un complexe touristique constitué de douze habitations et d'un club house. À propos de cet ouvrage, Kengo Kuma raconte de s'être basé sur la forme de la Grande Muraille. Il explique avoir été attiré par son parcours, par sa course infinie le long des lignes des reliefs avec lesquels elle crée un lien indestructible. Le bambou, le papier de riz, l'ardoise et le verre sont les matériaux avec lesquels la maison se lie au lieu. Le bambou, le matériau de la tradition locale en matière de construction, recouvre en particulier l'habitation avec les tiges placées à une distance variable l'une de l'autre. L'intérieur se trouve ainsi tour à tour plus protégé, ouvert par endroits comme « tamisé » ou s'offre complètement au paysage en un jeu de lumières et d'ombres.

Figure 74: Intérieur, séparations et cloisons

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DOMAINE MEDICINAL

Tant dans la médecine ayurvédique58, unani ou chinoise, le bambou est considéré comme une plante médicinale. Il est bon pour pratiquement tout : du simple rhume à la tuberculose. Ainsi, le `tabasheer' est une des composantes de base d'une série de médicaments ayurvédiques et tibétains. Il se compose essentiellement de jus de bambou déshydraté (surtout celui du Bam-busa arundinacea) mélangé à du dioxyde de silicium, de l'eau et des spores de calcaire et de potasse (carbonate de potassium).59 Le bambou, tout particulièrement le tabasheer, substance siliceuse extraite de la plante est utilisée pour calmer l'asthme et les rhumatismes. En phytothérapie, le bambousil soulage les maux de dos grâce à ses13 propriétés reminéralisantes. Le bambou est aussi utilisé, par de nombreuses marques, dans la fabrication de produits cosmétiques.

7- ENVIRONNEMENT ET ENERGIE

« Sur le plan environnemental, le bambou a l'avantage de pousser très vite. Il peut atteindre sa maturité après trois ou quatre ans. Ce qui le rend très compétitif par rapport au bois. Et il a aussi une grande capacité de séquestration du carbone. Aujourd'hui, nous parlons de changement climatique, de réchauffement de la planète. Avec les plantations de bambou, nous avons la capacité de séquestrer le carbone en grande quantité » a souligné René Kaam, directeur et chef du bureau régional d'Afrique centrale d'INBAR.60

En dépit des possibilités commerciales qui s'offrent à elles, les personnes désireuses de vendre des produits en bambou peuvent se heurter à certains manques en matière de recherche, d'innovation et de marketing. Il faut en outre que les productions de bambous soient adaptées aux normes commerciales et forestières internationales. « Le secteur du bambou est prometteur mais pâtit de son image», estime Gary Quince, ambassadeur de l'Union européenne auprès de

58 Médecine traditionnelle hindoue

59 www.dehlvi.com

60 https://www.afrik21.africa/afrique-centrale-inbar-vante-le-bambou-et-le-rotin-comme-alternative-au-bois/

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l'Union africaine. « Nombre d'agriculteurs considèrent le bambou comme une nuisance parce qu'il pousse vite alors que c'est là son véritable avantage.»61

Il existe différentes manières de produire avec cette énergie de bois. La plus simple consiste à le brûler. Avec la chaleur qui s'en dégage, une grande quantité d'eau peut être chauffée. La vapeur qui est alors produite peut soit activer une turbine (qui génère de l'électricité), soit répandre la chaleur via un système de chauffage central d'une maison, une serre, une rue ou un quartier... La valeur calorifique du bambou est semblable à celle du bois (18,3 MJ/kg de matière sèche). Tant des pellets que des briquettes peuvent être fabriqués à partir du bambou. Tous deux se composent de chutes de bois compressées. La seule différence entre les pellets et les briquettes est que les pellets sont plus petits. Une variante de cette méthode consiste à gazéifier tout d'abord le bois en méthane, puis à brûler ce gaz. Par ailleurs, le méthane peut servir de matière première au niveau de certaines synthèses industrielles.

D) LIMITES D'UTILISATION ET CONTRAINTES DES CONSTRUCTIONS EN BAMBOU.

En plus du fait que le bambou soit un matériau de construction, il peut aussi revêtir plusieurs autres casquettes. Ce faisant, il est souvent confronté à des ennemis suivant le domaine au sein duquel il est employé. De nos recherches et analyses, il en ressort que les ennemis du bambou ne sont pas très nombreux. Avant de traiter le bambou ou le bois, il est important de savoir pourquoi le traitement est nécessaire et de quoi il s'agit. Pour cela il est important de mieux connaître les «ennemis» du bambou, pour mieux engager le «combat» ou plus exactement trouver le meilleur moyen pour vivre avec eux en bonne intelligence.

1- TRAITEMENT PHYSIQUE, RISQUES D'INCENDIES ET INSECTES

-Traitement : Le bambou ayant une tige creuse, il est difficile de le courber, surtout dès que la canne devient large. Aussi, il est rare de trouver des meubles en bambou tressé. De plus, le bambou est très difficile à teinter et les possibilités de personnalisation d'un meuble en bambou sont donc limitées. Il est donc surtout proposé dans sa couleur naturelle. C'est d'ailleurs pour cette raison que le bambou est souvent utilisé uniquement pour la structure des meubles. D' autre part, le bambou est un matériau remarquable pour la construction des maisons, des infrastructures et des moyens de transport. Il sert à faire des poutres, des parquets, des toits, des ponts, ou encore des bateaux. Pourtant, dans les parquets produits à bas prix en Chine, on trouve de

61 https://www.un.org/africarenewal/fr/magazine/avril-2016/le-bambou-ressource-inexploitée

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l'acide acétique, un produit corrosif. Ces planchers peuvent émettre des composés organiques volatiles, mauvais pour la santé et l'environnement. Mais en acheteur averti, tournez-vous vers des fournisseurs qui garantissent l'origine du bambou et optent pour des procédés de transformation écologiques. Cette observation vaut aussi pour les meubles.

-Risques d'incendie : Le bambou entretient une longue histoire avec le feu. Pendant une réaction de combustion du bambou, on observe un éclatement des entre-noeuds du bambou. Cette réaction d'éclatement est en fait due à l'air bloquée dans les entre-noeuds, qui sous l'effet de la chaleur se trouve sous pression comme dans une cocotte-minute. Les fissures transversales qui se forment alors diminuent significativement les caractéristiques mécaniques du chaume. Pour l'éviter il est impératif de percer l'opercule des noeuds, en leur centre par un petit trou. Ce qui permet de laisser circuler l'air et d'éviter le phénomène. Une fois ce problème maîtrisé, le Bambou est très résistant au feu. Du fait de sa concentration élevée en acide silicique dans l'écorce et de sa haute densité, le bambou est classifié, selon le DIN 4102 (classification du comportement au feu des matériaux de construction), comme inflammable mais peu combustible. Sa capacité d'allumage dépend en particulier de la position du chaume. Ainsi les chaumes horizontaux sont moins susceptibles de brûler que ceux placés dans une position oblique ou encore verticale. Sur un chaume horizontal, la flamme se déplace le long de l'entre-noeud jusqu'au prochain noeud. Là, le feu meurt car la flamme passe difficilement l'opercule, très peu combustible. Il s'étouffe avant d'atteindre la prochaine poche d'air formé par l'entre-noeud suivant. Toutefois, l'utilisation qui est faite du bambou peut nécessiter une protection supplémentaire. On peut envisager un traitement au sel de Bohr qui est un retardant de flamme mais aussi un traitement efficace contre les nuisibles ; Un enduit au plâtre, qui a depuis longtemps fait ces preuves face au feu ; Tout autre technique utilisé pour le bois peut aussi intervenir.

-Insectes et Climat : En ce qui concerne les insectes, ils sont attirés par la cellulose et l'amidon. Le bambou en contient comme le bois, mais il contient également de la silice (du sable, c'est d'ailleurs cela qui le rend si résistant) et, heureusement pour le bambou, les termites ne le digèrent pas facilement. Ils préféreront donc un morceau de bois tendre à un chaume de bambou. Toutefois par mesure de précaution, des actions préventives simples dans la conception de l'ha-bitation sont à respecter (nettement au niveau des fondations pour limiter l'accessibilité du bambou par le sol). Actuellement, alors qu'en France on ne connaît aucune maladie, il est signalé aux Antilles un coléoptère, le « Dinoderus minutus » qui creuse des tunnels dans les bambous coupés. On lutte contre ce coléoptère par poudrage de D.D.T.

? Sécheresse:

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Nous avons déjà signalé les besoins en eau du bambou et la nécessité absolue d'arroser ou d'irriguer les bambous principalement au moment de la transplantation et pendant l'été.

? Froid:

Le bambou est en général très résistant au froid, toutefois, de basses températures peuvent arrêter le développement du chaume, nous l'avons constaté sur des variétés tardives (Phyllosta-chys Quadrangularis par exemple). A Prafrance, les bambous adultes ont très bien supporté des températures entre -1o° et -150°. En février 1956, seulement 25 % des bambous n'ont pas résisté à la température -160°. Si le bambou résiste bien au froid, il craint énormément la neige qui lui fait beaucoup de mal par son poids; en effet, la neige se collant aux feuilles, oblige les tiges à se courber et celles-ci sont cassées; si la neige est abondante, cela entraîne un enchevêtrement inextricable de tiges de bambous cassés. Les méfaits les plus importants dus à la neige ont été constatés à PraFrance, en février 1929, mars 1935 et janvier 1951.

-Les moisissures(Champignons) : Elles ont la particularité de se développer pour un taux d'hu-midité du bambou (ou du bois) supérieur à 20 %. Dans les climats tropicaux, ces moisissures sont responsables de nombreux problèmes, mais sous nos climats européens, ces conditions d'humidités sont rarement atteintes. Par exemple, pour une humidité de l'air à 60 % pour 20°C, l'humidité du bambou ne sera que de 18%. Certaines zones particulièrement humides resteront donc à surveiller comme la salle de bain, la cuisine et les fondations (dans le cas de remontées capillaires).

2- CONTRAINTES ENVIRONNEMENTALES

L'utilisation de plus en plus massive du bambou entraîne une production excessive, qui peut poser problème. L'exploitation intensive donne naissance à d'immenses plantations, ce qui entraîne la destruction d'autres espèces végétales. La surproduction de bambou planté hors de son milieu naturel est susceptible d'affecter les écosystèmes environnants. De plus, la transformation du matériau nécessite des produits chimiques, comme la soude ou le sulfure d'hydrogène. Le bilan écologique du bambou est donc mitigé. Tout dépend de son utilisation, mais aussi de sa provenance. Autre bémol, le bambou est classé comme plante invasive. Cela est surtout dû à ses racines, qui sont en fait des rhizomes et envahissent les terrains à grande allure. C'est le revers de la médaille d'une plante facile à cultiver.

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Les plantes invasives peuvent endommager des écosystèmes entiers, comme c'est le cas en Europe où il a été importé. Là où les bambous prennent du terrain, d'autres plantes vitales à l'écosystème ne peuvent plus pousser, au détriment de l'ensemble de la faune et de la flore. L'écosystème est donc modifié. Dans certains cas, l'écosystème peut s'accommoder relativement aisément de l'introduction d'une plante non-native. Dans d'autres cas la plante importée prend le dessus et éradique l'écosystème originel, laissant place à une monoculture appauvrissant l'environnement. C'est le cas du bambou.

3- CONTRAINTES SOCIO-ECONOMIQUES

Les noeuds proéminents peuvent également être désagréables, c'est pourquoi on l'utilise peut pour les assises. Enfin, le prix parfois élevé du bambou en fait également un produit à choisir avec attention. Aussi, en Chine, où son emploi est connu depuis le néolithique, les utilisations du bambou sont innombrables. Au XIX° siècle, les marins utilisent les chaumes pour les vergues des voiles, les charpentiers pour les étais des maisons, la charpente, les murs et les échafaudages. Les scribes font leurs pinceaux et leur papier avec le bambou ; les paysans les manches de leurs outils ou les perches pour porter les fardeaux. On tresse des paniers avec les jeunes tiges. Sauf que l'inconvénient est qu'il n'existe à l'heure actuelle en Europe et aux Etats-Unis (sauf à Hawaii) aucune plantation commerciale de bambous de construction. La plus grande partie vient de Chine, d'Inde, du Vietnam et d'Amérique latine. La nécessité d'expédier le bambou et ses produits dérivés partout dans le monde en fait donc un matériau beaucoup moins respectueux de l'environnement qu'on ne pourrait le croire. Enfin, le bambou pendant plusieurs siècles a été considéré comme matériau des pauvres, pourtant à l'heure actuelle, il se présente comme matériau de luxe, exotique et de contemplation esthétique.

Cette partie de notre travail consistait à présenter et étudier le bambou, premièrement comme plante puis, comme matériau de construction biosourcé contribuant ainsi à l'écologie. Au long de notre analyse, nous avons étudié les caractéristiques et propriétés du bambou, son importance dans la construction au regard de ses prouesses et sa matérialisation dans une étude de quelques projets architecturaux de par le monde. Résultants de la conception propre à chaque architecte, la nature et situation du site, et le type de bambou utilisé, les projets que nous avons parcourus nous présentent ce matériau sous son grand jour, tout en nous mettant en garde contre ses éventuels ennemis (le feu, les produits de transformation du bambou, le climat et les insectes). Dès lors en appliquant les méthodes de préventions adéquates, il est possible traiter efficacement le bambou, le rendant ainsi plus écologique et durable sur un plus long terme.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery