WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les rapports entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif en Côte d'Ivoire


par Boubacar GUISSE
Université Alassane Ouattara de Bouaké - Master 2 Recherche 2014
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

II. DÉTERMINATION DU PROBLÈME DE DROIT

Mais le régime présidentiel suppose alors qu'entre le Président ivoirien et l'Assemblée nationale, détentrice du pouvoir législatif, s'établissent séparation (spécialisation fonctionnelle et indépendance organique) et équilibre30. Dans la théorie générale même du régime présidentiel, la séparation peut n'être guère absolue31. On peut ainsi noter un certain empiètement des différents organes sur leurs fonctions réciproques : l'Assemblée nationale ivoirienne peut influer sur la fonction exécutive par les prérogatives qu'elle détient en matière budgétaire et diplomatique (art. 71) et le président de la République intervient dans la

27 Il ne saurait en effet être question, dans le cadre du régime présidentiel ivoirien, de rapports entre le Gouvernement -stricto sensu- et l'Assemblée nationale.

28 Stricto sensu, un Gouvernement n'existe que dans un régime parlementaire ou semi-parlementaire (semi-présidentiel). Il suggère l'idée d'un organe collégial solidairement responsable devant l'organe législatif et distinct du Président, chef de l'État. Ainsi dans les Constitutions africaines établissant un régime semi-présidentiel soit un titre est consacré au Gouvernement (titre IV des Constitutions du Mali et du Sénégal) soit sous un même titre, différentes sections sont consacrées au président de la République et au Gouvernement (titre III intitulé : « Du pouvoir exécutif » et sections 1 et 2 respectivement consacrées au président de la République et au Gouvernement dans la Constitution nigérienne). Au contraire, la Constitution ivoirienne ne consacre pas un titre spécifique au Premier ministre ou au Gouvernement ; le titre III consacré est ainsi intitulé : « Du président de la République et du Gouvernement » tandis que le titre IV est intitulé : « Du Parlement » ; ce qui démontre que le « Gouvernement » est simplement un outil chargé de mettre en oeuvre la politique présidentielle.

29 Le Président des États-Unis recueille simplement l'avis de ses secrétaires d'État : mais c'est lui qui décide, et pas toujours suivant l'opinion de ceux-ci. Rappelons le mot célèbre de Lincoln, seul de son opinion du Cabinet : « sept non, un oui : les oui l'emportent ».

30 Francis HAMON et Michel TROPER, Droit constitutionnel, 33e éd., Paris, L.G.D.J., 2012, p. 120 ; Carl SHMITT, Théorie de la Constitution (traduit de l'allemand Verfassungslehre par Lilyane Deroche), Paris, P.U.F., 1993, p. 321-336.

31 Maurice DUVERGER, op.cit., p. 179 ; Pierre PACTET et Ferdinand MELIN-SOUCRAMANIEN, op.cit., p. 153.

8

fonction législative par le pouvoir réglementaire, c'est-à-dire le pouvoir de faire des actes de portée générale et impersonnelle pour compléter et préciser les lois adoptées par l'Assemblée nationale (art. 41.1, 44, 72). On peut même voir apparaître certains moyens d'action des organes l'un sur l'autre, qui sont autant d'atteintes à leur indépendance : il s'agit de moyens structurels permettant à un organe d'agir sur l'autre32. On peut ainsi partir de l'initiative des lois reconnue au président de la République, de son droit de veto suspensif33 jusque, dans certains régimes politiques étrangers, à un droit de dissolution de l'Assemblée34 ou à une procédure de destitution du Président (impeachment, en droit constitutionnel étatsunien)35. Ces assouplissements s'avèrent nécessaires car des difficultés institutionnelles et politiques graves résulteraient d'une conception intransigeante de la séparation des pouvoirs : paralysie politique, coup d'État, etc.36.

Mais le régime présidentiel -contrairement à ce que l'on pourrait être amené à croire-exige toujours qu'une égalité existe et qu'un équilibre soit maintenu entre les organes exécutif et législatif. Aucune atténuation ne peut être apportée à cette formule sans, du même coup, conduire à une déformation : si l'équilibre des pouvoirs est rompu au profit du seul Président, on aboutirait de fait à une semi-dictature, à ce régime que d'aucuns ont qualifié de présidentialiste37. Ainsi l'autorité immense détenue par le Président devrait être nécessairement contrebalancée et freinée par de véritables pouvoirs aux mains de l'Assemblée

32 Il faut donc mettre à part l'action d'un organe sur un autre par l'exercice de sa propre fonction : par une loi, l'Assemblée nationale peut orienter l'autorité de l'exécutif et par un acte de portée individuelle ou un acte matériel, le Président peut avoir une influence sur l'Assemblée.

33 Le président de la République dispose de l'initiative des lois (art. 42.1) et du veto suspensif (art. 42.3).

34 Certaines Constitutions africaines établissant un régime présidentiel reconnaissent cependant un droit de dissolution de l'Assemblée nationale au président de la République : Constitution du Burkina-Faso (art. 50), de la Guinée (art. 43), etc. On peut alors se demander si un tel régime est encore réellement présidentiel car il crée un déséquilibre entre les organes.

35 L'article II, section 4 de la Constitution des États-Unis dispose : « Le président, le vice-président et tous les fonctionnaires civils des États-Unis seront destitués de leurs charges sur mise en accusation et condamnation pour trahison, corruption ou autres crimes et délits majeurs ».

36 Georges BURDEAU, op.cit., p. 181 ; Pierre PACTET et Ferdinand MELIN-SOUCRAMANIEN, op.cit., p. 153 ; Obou OURAGA, op.cit., p.66.

37 Martin Djézou BLÉOU, « Le système constitutionnel ivoirien », in Common law et Constitutions d'Afrique et d'Haïti, Université de Moncton, Canada, 1996, p. 114 ; Jean BUCHMANN, L'Afrique noire indépendante (c'est lui qui inventa le terme de « présidentialisme ») ; Mamadi KOUROUMA, Etude du présidentialisme en Afrique noire francophone à partir des exemples guinéen et ivoirien, Thèse droit public, Paris, Université de Droit, d'économie et de sciences sociales (Paris 2), 1978, p. 16 ; Dimitri-Georges LAVROFF et Gustave PEISER, Les Constitutions africaines : l'Afrique occidentale, Paris, Pédone, 1961, p. 24 ; Obou OURAGA, op.cit., p. 67 ; Francisco MÉLÈDJE DJÉDJRO, « Faire et défaire la Constitution en Côte d'Ivoire, un exemple d'instabilité chronique », Draft paper presented at African Network of Constitutionnal Law Conference on Fostering Constitutionnalism in Africa, Nairobi, avril 2007, p. 10 ; Maurice-Pierre ROY, Les régimes politiques du Tiers-monde, Paris, L.G.D.J., 1977, p. 110.

9

nationale38. Cette exigence d'égalité et d'équilibre dans les rapports entre le président de la République et l'Assemblée nationale est-elle respectée dans le cadre des institutions établies par la Constitution de 2000 ? Et, au-delà de la question limitée des rapports entre organes exécutif et législatif, le régime politique ivoirien est-il réellement présidentiel ?

La réponse à de telles interrogations exige, certes, de s'en référer au texte de la Constitution de 2000 mais également, au-delà du texte constitutionnel, de jeter un regard sur la pratique vécue.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire