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L'homosexualité et sa mise en scène: la construction sociale d'une culture


par Estelle Couture
Université de Provence - Maà®trise Sociologie 2003
  

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1. Les enjeux d'une visibilité

C'est l'histoire de l'art qui est apparu en premier lieu comme vecteur privilégié de la visibilité du couple de femmes. Depuis la Renaissance, on dénombre plus de 300 tableaux et sculptures représentants une idylle saphique68(*), l'art étant un vecteur de la vie symbolique permettant à ce qui est caché ou non toléré d'apparaître tout en déjouant les mécanismes de refoulement à l'oeuvre dans tout système de domination.

Dans le second chapitre, nous évoquions les images que les homosexuels renvoient d'eux-mêmes à travers la presse spécialisée. Les images de l'homosexualité féminine se font plus rares et il faut les chercher ailleurs que dans la presse gay dite mixte. Même si elles restent toujours très discrètes par rapport à l'image de l'homosexualité masculine, à laquelle se consacre presque exclusivement le mensuel Têtu, on assiste depuis quelques années, à une circulation et une consommation croissante des images lesbiennes, autres que celles des films à caractère pornographique, dans l'espace public, notamment dans le cinéma ( de plus en plus, on voit se développer différents festivals de films lesbiens comme par exemple celui du collectif Cineffable « Quand les lesbiennes se font du cinéma » ).

Mais cette prolifération des images lesbiennes dans les médias, essentiellement depuis une dizaine d'année, va soulever un ensemble de questions quant aux conditions de visibilité des prétendues sexualités marginales69(*). La visibilité va se trouver au coeur même des enjeux liés à la reconnaissance des droits des minorités dans l'espace public. La visibilité est donc soumise tant par les groupes gays que par la majorité hétérosexuelle à un processus de négociation serré. Ce qui est en jeu, ce que l'on contrôle (pour reprendre les termes de Foucault) , régule, marque, forme, modèle, c'est une représentation des gays et des lesbiennes qui puissent s'inscrire dans un espace social et culturel imprégné par les valeurs hétérosexuelles ; les discours publics ayant droit à l'audience publique étant ceux qui promeuvent un ordre social déjà existant, c'est-à-dire celui du marché hétérosexuel, bien qu'il soit évident que sous la poussée des discours postmodernistes, postféministes et même queer70(*)s, le modèle hégémonique perd quelque peu sa valeur.

De plus en plus, les lesbiennes (et même les gays) produisent leur propre image dans les médias et le discours public. Dés lors, il ne s'agit plus uniquement d'être filmés par la caméra comme un objet de regard, mais aussi d'intervenir directement sur l'image de soi que les médias et les discours publics reproduisent et font circuler. Dans cette logique de marché, le droit d'être vu et entendu, d'être visible, devient un part essentielle d'une « économie identitaire dans laquelle la marchandisation du corps lesbien est une valeur à la hausse dans la mesure où sont respectés les préceptes capitalistes de la saine compétition pour le maintien de l'ordre social71(*) ». Il en découle des conséquences sur la façon de s'auto présenter comme lesbienne. Cette économie identitaire va avoir une influence sur la perception de l'identité lesbienne. Ce que l'on voit à l'écran va immanquablement se ressentir dans l'espace public. A partir du moment où les gays et les lesbiennes ont acquis des droits, les médias se sont emparés du phénomène, et le cinéma ne fut pas en reste.

Dans les années 90 on a assisté à une véritable prolifération cinématographique : When night is falling, Bound, Mullholland drive...Sans oublier toute la production dite parallèle de la vidéo et du court métrage. Il suffit de constater la création de festivals de films lesbiens et de voir à quel point les productions sont nombreuses et diversifiées. Ainsi, en marge du marché usuel de l'érotisme et de la pornographie hétérosexuels friands de pseudo-scénarios lesbiens, s'est imposée une production allant de la sexualité la plus explicite aux images ludiques et de plus en plus « intégrées » des amitiés particulières entre femmes. La représentation homosexuelle au cinéma est indissociable d'une approche qui rend compte des formes culturelles et sociales constitutives de l'identité sexuelle.

* 68 BONNET M. J. « Les deux amies. Essai sur le couple de femmes dans l'art », Ed. Blanche, Paris, 2000

* 69 NADEAU C. « Sexualité et espace public : visibilité lesbienne dans le cinéma récent » in Sociologie et sociétés, vol. XXIX, n°1, printemps 1997

* 70 Queer signifie bizarre et s'oppose à straight (normal). Nous reviendrons sur les théories queer qui abordent d'un nouveau point de vue les questions de genre et d'homosexualité.

* 71 NADEAU C. op.cit

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo