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Discriminations et conflits, Contribution à l'étude de la « conscience de condition » de la population de Ngaba

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par Jean Pierre Mpiana Tshitenge wa Masengu
Université de Kinshasa - D.E.A en sociologie 2004
  

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1.2.2. Classes sociales et émancipation nationale

La deuxième va de 1970 à 1980. Cette période est marquée par les études qui rendent compte des réactions des populations locales contre l'Ordre colonial13(*).

Ces études, tel qu'il ressort de l'analyse, cherchent, pour paraphraser R. Aron, à déterminer dans les circonstances historiques particulières les groupes sociaux qui ont exercé une influence sur les événements politiques.

C'est dans cette optique que Georges Nzongola Ntalaja analysant la participation des différentes classes sociales à la lutte anticoloniale, conclut que la révolution anticoloniale au Congo fut une révolution bourgeoise. Pour lui, la petite bourgeoisie noire au Congo était la seule classe qui était préparée à tirer profit de la situation révolutionnaire en s'organisant comme représentant du peuple. Elle a été la classe qui a formulé de manière plus moins claire les idées révolutionnaires, c'est-à-dire qui a revendiqué l'indépendance immédiate, thème qui a mobilisé les autres classes sociales (paysannerie, prolétariat et lumpenprolétariat). Elle a exploité la révolte et la violence de la classe ouvrière et du lumpenprolétariat du 4 janvier 1959 (phase de la participation politique de la masse populaire), pour préparer les conditions de son avènement au pouvoir.

Faustin Mulambu Mvuluya établit une filiation entre cette révolution nationale bourgeoise déclenchée à Léopoldville avec le pré-nationalisme des masses rurales qui s'est manifesté par des mouvements de résistance et révolte contre l'occupation étrangère. Pour lui, la lutte anticoloniale déclenchée en milieu urbain de Léopoldville entre 1955 et 1960 est une maturation d'un long processus amorcé par les masses paysannes et ouvrières dès la pénétration coloniale au Congo*14(*). Elle est la continuité des comportements et des attitudes de refus des populations locales contre la colonisation.

En effet, écrit F. M. Mulambu, le pré-nationalisme paysan s'est d'abord manifesté comme mouvement de résistance à l'occupation étrangère. Ce mouvement a revêtu tantôt la forme pacifique (fuites individuelles, délocalisation des villages entiers) tantôt la forme violente (bataille rangée contre l'occupant). Avec l'installation effective de la colonisation, ce mouvement de résistance s'est mué en révolte paysanne. On a enregistré au cours de la période qui a suivi l'implantation de l'E.I.C et la reprise du Congo par la Belgique, plusieurs mouvements de révolte dûs notamment à l'exploitation des paysans par les sociétés commerciales et concessionnaires, aux exigences de l'Etat colonial (fiscalité, levée des miliciens, travaux obligatoires, etc.), ou à la menace de disparition ressentie par certains pouvoir traditionnels. Ces révoltes ont pris plusieurs formes : mouvements messianiques, envois de mauvaises récoltes, exécution incomplète des corvées prescrites par l'administration, violence à l'endroit des agents de l'administration, révolte armée, etc. Avec l'industrialisation, l'instruction et l'évangélisation, ces mouvements de révolte ont été transférés en milieu urbain où ils ont engendré des formes supérieures de résistance qui débouchèrent sur les premières associations claniques, embryons et précurseurs du nationalisme des années 1955 à 1960.

Dans cette étude comme dans celle qui lui a précédé, F.M. Mulambu s'inscrit en faux contre la thèse marxienne qui méconnaît le caractère révolutionnaire à la classe paysanne. Pour Marx, la paysannerie, qu'il compare à un sac de pommes de terre, n'est pas une force sociale autonome, capable de décider de l'évolution des formations sociales. Elle est donc une force passive, incapable même de devenir une classe politique constituée. Comme Lénine et Mao, F.M. Mulambu réhabilite la classe paysanne dans son rôle de sujet historique. Mais il reconnaît néanmoins que les révoltes paysannes ont presque connu un échec à cause, notamment de manque de formation politique, le faible niveau d'instruction, la dispersion démographique et le manque de lucidité de leurs leaders. Elle a aussi servi dans la plupart des cas de clientèle à laquelle recourt d'autres classes pour réaliser leurs intérêts.

A notre avis, l'échec des mouvements paysans est dû à l'absence d'intellectuels organiques, c'est-à-dire d'éléments capables, selon Gramsci, d'analyser leur situation en termes d'antagonismes des classes et de mettre sur pied des stratégies adéquates pour la changer. Notons, cependant, à l'actif de K. Marx, que la classe ouvrière a une conscience de classe plus aigue que celle des paysans et a plus de possibilité de vouloir des changements structurels que ces derniers par le fait que la pratique des rapports sociaux de production antagonistes dans le secteur industriel est plus propice à l'accès à une dimension structurelle que celle du travail plus parcellaire du monde rural.

* 13 Parmi ces études, on peut citer :

- MULAMBU, M. F. "Le pré-nationalisme au Zaïre. Révoltes paysannes avant la décolonisation", in Cahiers zaïrois de la recherche et du développement, n° 85 K, ONRD, spécial 1971.

- NZONGOLA, N. G., "Les classes sociales et révolution anticoloniale au Congo-Kinshasa : le rôle de la bourgeoisie.", in Cahiers Economiques et Sociaux, I.R.E.S., Vol.VIII, n°3, Septembre 1970.

- DEMUNTER, P., "Structure de classes et luttes de classes dans Congo colonial", in Contradictions, n°1, 1972.

* 14 * La révolte du Kitawala a été menée par les ouvriers et les paysans de Masisi-Lubutu durant la seconde guerre mondiale. Lire à ce sujet :

- LOVENS, M., « La révolte de Masisi-Lubutu (Congo Belge, janvier-mai 1944)  », in Cahiers du

CEDAF, n° 3-4, 1974, 154 p., cartes, annexes.

-MWENE BATENDE, Mouvements messianiques et protestation sociale, le cas du Kitawala chez les Kumu du Zaïre, Faculté de Théologique catholique, Kinshasa, 1982.

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