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Etude comparée de l'arbitrage international dans l'OHADA et en Suisse

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par Cassius Jean SOSSOU BIADJA
Université de Genève - DEA 2006
  

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a-. LA VOLONTE DES PARTIES OU LE RATTACHEMENT SUBJECTIF

S'il est une similitude dans les dispositions des articles 15 AU.A et 187 LDIP, c'est l'accordance sur la liberté des parties à déterminer le droit que le tribunal arbitral devra appliquer au fond du litige. En effet, ces deux articles, conformément au principe de l'autonomie de la volonté en DIP, donnent aux parties le pouvoir de conclure une élection de droit sous forme d'une clause contractuelle qui peut être tacite ou expresse et dont la validité est indépendante du contrat principal dans lequel elle est insérée et même de la convention d'arbitrage.

Le principe de détermination de la lex causae, à titre principal par les parties et à titre subsidiaire par les arbitres, est un principe universellement accepté en droit de l'arbitrage international. Pour preuve, il est clairement énoncé à l'art. 7 de la Convention de Genève de 1961, à l'art. 42 de la Convention de Washington de 1965, à l'art 33 al. 3 du Règlement d'arbitrage de la CNDUCI ainsi qu'à l'art. 17 du Règlement d'arbitrage de la CCI: "les parties sont libres de choisir les règles de droit que le tribunal arbitral devra appliquer au fond du litige. A défaut de choix par les parties des règles de droit applicables, l'arbitre appliquera les règles de droit qu'il juge appropriées". Pour ne citer que ces textes.

Cependant, la question de la détermination de ce droit n'a tout son sens que lorsqu'il y a une situation empreinte d'éléments d'extranéité. En droit suisse, l'art. 187 al. 1 LDIP dispose que "le tribunal arbitral statue selon les règles de droit choisies par les parties". Si cette méthode de détermination ici ne pose aucun problème étant entendu que l'art. 176 LDIP circonscrit le champ d'application du chapitre 12 (nous sommes en matière d'arbitrage international et donc le problème de la détermination du droit applicable aux obligations contractuelles peut se poser au tribunal arbitral), il en va autrement dans le système OHADA. L'arbitrage OHADA, nous l'avions vu, est conçu dans la perspective de l'unité du régime juridique de l'arbitrage, il n'y a donc pas place pour une opposition du point de vue du régime juridique entre un arbitrage interne et un arbitrage international. Partant de ce constat, la question qui se pose est celle de savoir si la détermination par les parties du droit applicable, préconisée par les dispositions de l'art. 15 AU.A, est compatible à tous les litiges susceptibles d'être soumis à l'arbitrage OHADA quels qu'ils soient (internes ou internationaux).

En effet, en disposant que "les arbitres tranchent le fond du litige conformément aux règles de droit désignées par les parties", il parait évident, dans ce cas, que la détermination du droit applicable n'est admise que pour seulement certains litiges internationaux. Évidemment, nous ne nous faisons aucun doute sur le fait, qu'une situation purement interne à l'OHADA (les seize pays membres de cet espace) ne susciterait guère le problème de la détermination du droit applicable à la situation litigieuse en cause. C'est aussi à juste titre, le constat qu'a fait P. MEYER lorsqu'il fait observer que pour un rapport purement interne à l'OHADA, il ne saurait y avoir "ni choix du droit applicable par les parties, ni détermination du droit applicable par quelque moyen que ce soit. Il n'y a nul besoin de règles de conflit de lois puisqu'il n'y a pas, dans une situation interne, de conflit de lois"81(*). Il est donc clair que, même dans l'hypothèse où les parties, en vertu du principe d'autonomie, dans leur contrat interne choisissent de reprendre les dispositions d'une loi étrangère (suisse par exemple) qu'elles contractualisent, cela ne saurait être interprété comme une application de la loi étrangère. Évidemment dans le contexte interne à l'OHADA, cela devrait être vu comme une simple stipulation contractuelle ne nécessitant pas, que se pose le questionnement sur la détermination du droit applicable. En conclusion, sur cette question, il est important de noter que les dispositions de l'art. 15 AU.A en droit OHADA ne peuvent concerner que des situations privées internationales et non des situations privées internes à l'OHADA. Ce qui nous conforte dans notre interprétation de la nature unique du régime juridique arbitrale de l'AU.A en droit OHADA.

Sur cette question, il est fort intéressant de noter à titre de droit comparé que, la même observation a été faite à propos des législations unifiées sur l'arbitrage du Québec et des Pays-Bas82(*).

Dans le même ordre d'idée, il est important de souligner que, le choix du droit applicable au litige dans un arbitrage de DIP n'est que relatif. En effet, mêmes évoquées dans un litige international, certaines questions contractuelles à l'instar des questions de capacité et de représentation mais aussi, non contractuelles comme la responsabilité quasi-délictuelle ou la propriété industrielle ou les questions de concurrence échappent à la volonté des parties quant au choix du droit applicable.

Ainsi, un litige même international n'offre pas dans tous les cas, aux parties la possibilité de choisir le droit applicable, le choix du droit applicable par les parties n'a de sens qu'en matière d'obligations contractuelles générées par un contrat international. C'est ce que nous appellerons la théorie de la relativité du choix de la lex causae.

Pour en revenir à notre étude comparée, les alinéas 1ers des deux articles sus cités, suggèrent la possibilité qui est offerte aux parties d'élire un droit qui se doit d'être appliqué par le tribunal arbitral. Ils disposent comme suit : "les arbitres tranchent le fond du litige conformément aux règles de droit désignées par les parties ou à défaut choisies par eux comme les plus appropriées compte tenu le cas échéant des usages du commerce international (art. 15 AU.A), "le tribunal arbitral statue selon les règles de droit choisies par les parties ou, à défaut de choix, selon les règles de droit avec lesquelles la cause présente les liens les plus étroits (art. 187 LDIP). On infère de ces textes deux possibilités qui s'offrent aux parties.

a-.] Soit l'élection de droit est directe, dans ce cas leur choix portera sur l'application de n'importe quel droit matériel et non les règles de conflit de loi de l'Etat dont le droit est visé. Ce droit aura pour vocation de régir toutes les questions d'ordre contractuel à l'exclusion des questions non contractuelles83(*).

b-.] Soit l'élection est indirecte, auquel cas les parties choisiront non pas un droit matériel mais une règle de conflit de lois permettant au tribunal arbitral de déterminer ce droit matériel applicable. L'élection d'un droit indirect, peut se faire par le truchement d'un règlement d'arbitrage contenant les règles de rattachement. Ce choix indirect du règlement d'arbitrage aura bien évidemment pour conséquence une primauté sur la règle subsidiaire des articles 15 AU.A et 187 LDIP qui prévoient le rattachement objectif en l'absence d'élection de droit.

Toutefois, la portée de la liberté des parties dans la détermination du droit applicable dépend de la formulation du contenu de l'article relatif au droit applicable. L'étendue de cette liberté, nous ne pourrons la saisir qu'à la lumière des réponses que nous apporterons à certaines questions essentielles relativement aux lois d'arbitrage que nous avons en présence.

a1-. Les parties peuvent-elles choisir une loi sans lien avec leur contrat ?

Oui, en général les parties ne sont pas astreintes au choix d'une loi présentant des liens objectifs voire spatiaux avec le contrat principal. Aucun lien n'est exigé entre le droit élu par les parties et les éléments du contrat. Elles peuvent jeter leur dévolu sur une loi dite "neutre" simplement parce que le contenu de la loi choisie leur paraît adéquat. C'est la solution consacrée par la plupart de législations et règlements d'arbitrage et plus particulièrement, le droit OHADA sur l'arbitrage et le droit suisse de l'arbitrage international lorsqu'ils font référence tous deux aux "règles de droit choisies par les parties". Le seul embarras qui résulterait de cette option, lorsque les parties choisiront une loi sans lien avec le contrat, serait celui de fraude à la loi. Mais puisque la preuve de fraude à la loi est dans presque tous les cas impossible à rapporter, il est inconcevable que ce principe de la liberté des parties soit compatible avec le recours à la fraude de la loi.

a2-. Les parties peuvent-elles choisir plusieurs lois ?

Le choix par les parties de plusieurs lois ne pose en général pas de problèmes. Elles peuvent même opter pour un choix différencié de lois, chacune ayant pour objectif à ne s'appliquer qu'à une partie de leur contrat. En fait, il s'agit d'une technique connue en droit international privé des contrats sous le vocable de dépeçage du contrat qui, se trouve être aussi applicable en droit de l'arbitrage international. Ce qu'on peut retenir de cette technique est que, si le dépeçage peut porter sur un sous-ensemble de droits et obligations objectivement détachables, il n'est pas impossible en arbitrage. Par contre, s'il doit porter sur divers aspects du contrat, comme par exemple le consentement, la lésion ou la responsabilité contractuelle, il est difficile à admettre dans la pratique arbitrale, dans la mesure où il se révèlera inopportun et peut engendrer de graves incompatibilités. Même si les deux lois d'arbitrage ne font pas état de la possibilité de dépeçage du droit applicable, il est important de noter qu'il, n'est pas interdit dans les systèmes OHADA et helvétique de l'arbitrage international.

a3-. Les parties peuvent-elles porter leur choix sur un droit qui n'est l'expression d'aucun ordre juridique étatique ?

L'idée de permettre aux parties, de choisir un droit qui n'est l'expression d'aucun système juridique étatique pour régir le fond de leur litige, est de plus en plus ancrée dans la pratique de l'arbitrage international. On la retrouve aussi dans la majorité des systèmes juridiques comme ce fut le cas pour la loi type de la CNUDCI. Cette loi propose de faire référence à d'autres sources de droit mis à part les droits nationaux pour régir le fond du litige. Les termes dans lesquels la loi-type de la CNUDCI suggère, de recourir à un droit autre que celui d'un Etat, sont on ne peut plus clairs "le tribunal arbitral tranche le différend conformément aux règles de droit choisies par les parties comme étant applicables au fond du différend. Toute désignation de la loi ou du système juridique d'un Etat donné est considérée, sauf indication contraire expresse, comme désignant directement les règles juridiques de fond de cet Etat et non ses règles de conflit de lois" (art. 28 al. 1er). Quant aux lois d'arbitrage OHADA et helvétique, tout peut s'inférer du choix par chacun des deux législateurs de la terminologie appropriée utilisée pour formuler la problématique du droit applicable au fond du litige. Tous empruntent l'expression règles de droit choisies par les parties plutôt que lois choisies par les parties. Il est évident qu'il y a une différence notoire entre la loi choisie et la règle de droit choisie.

Du point de vue de la sémantique juridique, il y a lieu de faire remarquer que, si le législateur utilise le terme de loi cela s'entend comme une limitation du choix des parties en faveur des lois étatiques et des conventions internationales, réserve faite des usages auxquels ces normes peuvent renvoyer. Si par contre, le législateur utilise le terme de règle de droit, comme s'en est le cas dans les deux lois que nous étudions, c'est qu'il permet aux parties de porter aussi leur choix sur des règles anationales non étatiques en sus des lois nationales. Or, la remarque de la référence au terme de règles de droit par la plupart des législations et règlements d'arbitrage contemporains s'impose et mérite qu'on le souligne.

Les terminologies adoptées, pour désigner le recours aux sources autres que les lois nationales, visent tantôt la lex mercatoria, les principes généraux du droit en général et du droit de l'arbitrage en particulier, les usages du droit commercial, les règles anationales, ou encore le droit international public. Ces sources anationales peuvent être complémentaires ou même substitutives de règles nationales.

Nous ne rentrerons pas dans les détails sur les principes transnationaux auxquels les parties peuvent faire référence dans le choix de la norme applicable au fond du litige, mais simplement, tenterons de rappeler que les parties sont légitimées à les adopter lorsque la loi d'arbitrage utilise le terme de règles de droit.

Bref, en résumé, nous constatons que les parties en vertu de leur liberté peuvent élire directement ou indirectement un droit pour régir leurs obligations contractuelles. Les deux lois que nous étudions le consacrent expressément. Cependant, tout principe devant être nuancé, ce dernier est aussi tempéré. En effet, aussi vrai que les parties peuvent librement choisir le droit applicable, elles seront légitimées aussi longtemps qu'elles le fassent de bonne foi et sans contrevenir à l'ordre public. Ainsi, il est du devoir du tribunal arbitral de vérifier si, ce choix respecte les limites nécessaires à son application. D'où toute l'importance du respect des principes de la bonne foi et de l'ordre public que nous ne détaillerons pas ici.

Cependant, même lorsque les parties n'ont pas exprimé de choix exprès sur la question, le Tribunal arbitral avant toute recherche de la loi applicable, doit s'évertuer à déceler d'éventuels indices de volonté des parties permettant de déduire un choix implicite. Pour ce faire, il se doit d'analyser, avant toute autre recherche, les comportements des parties et essayant de déceler, dans les termes du contrat ou les circonstances de la cause, des éléments susceptibles de définir un accord tacite de celles-ci sur le droit applicable. Ce n'est que lorsqu'il est résolument impossible pour le tribunal arbitral de déduire du comportement des parties un quelconque choix implicite du droit applicable, qu'il aura à le rechercher selon les méthodes dites de rattachement.

Quid de la volonté des arbitres dans la détermination du droit applicable aux obligations contractuelles ?

* 81 P. Meyer, OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 192.

* 82 Ph. FOUCHARD, E. GAILLARD, B. GOLDMAN Traité de l'arbitrage commercial international P. 106.

* 83 Le droit élu, pour les questions contractuelles régira par exemple la formation et la validité du contrat, les droits et obligations des parties, l'exécution du contrat et les conséquences de son inexécution...etc. Par contre, le droit élu ne régira pas les questions non contractuelles comme celles relatives à la capacité civile, au transfert de propriété, aux sûretés immobilières...etc.

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