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Le Droit de Propager ses Croyances en Droit International des Droits de l'Homme, à la Lumière de la Jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme

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par Michael Mutzner
Institut Universitaire de Hautes Etudes Internationales (IUHEI) - Université de Genève - Diplôme d'études approfondies en relations internationales, spécialisation: droit international 2007
  

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1.1.2.2 Le lieu de la propagation des croyances

Le lieu où se déroule l'action est également un indicateur pertinent pour parvenir à déterminer si la propagation prend une tournure abusive. Le récepteur a-t-il volontairement choisi de venir entendre la source, ou bien a-t-il été confronté à ce message malgré lui?151 Est-il dans une situation d'auditeur « captif », forcé de réceptionner la propagation des croyances de la source?152

Dans les affaires Pitkevitch et Larissis (pour ce qui concerne les soldats), les activités de propagation religieuse incriminées se sont déroulées sur le lieu de travail, auprès de personnes, semble-t-il, qui n'avaient pas réellement d'autre choix que d'écouter les propos de ces croyants qui cherchaient à les convaincre. Le fait que les personnes réceptrices soient dans une situation où elles n'ont d'autre choix que d'être soumises à la propagation est assurément un élément à prendre en compte dans la détermination du prosélytisme abusif, sans que pour autant il ne suffise à lui seul pour déterminer que la liberté religieuse d'autrui a été violée.

Le lieu du déroulement de l'action impliquant Van Den Dungen aurait sans doute pu être déterminant pour établir si les droits des patientes de la clinique étaient menacés et justifier une ingérence à la liberté du requérant.153 En effet, le requérant se trouvait aux portes de la clinique, choquant et bouleversant des femmes déjà souvent marquées par le fait qu'elles s'apprêtaient à se soumettre à un traitement difficile à assumer sur le plan psychologique. Il faut toutefois aussi tenir compte du fait que pour le requérant, il n'y avait sans doute pas de meilleure alternative pour atteindre le public qu'il visait, que de se placer à cet endroit stratégique.

1.1.2.3 La relation source - récepteur

La relation, le rapport existant entre la source de la propagation religieuse et le récepteur a été le critère déterminant dans l'affaire Larissis. On peut regretter encore une fois que la Cour n'ait

n'a pas pu justifier la nécessité au regard de l'un quelconque des buts limitatifs énumérés aux articles 18 et 19, restreint la liberté d'expression et de manifestation de la conviction en fonction du critère discriminatoire qu'est l'opinion politique et viole par conséquent le paragraphe 1 de l'article 18 et le paragraphe 1 de l'article 19 lus conjointement avec l'article 26. »

151 STAHNKE, « The Right to Engage in Religious Persuasion », op. cit., pp. 644-645

152 Pour Lerner il s'agit d'une question décisive. C'est de lui que vient cette expression d'auditeur « captif » (en anglais « captive audience »). LERNER Nathan, Religion, Beliefs and International Human Rights, Orbis Book, Maryknenoll, New York, 2000, p. 83

153 Van Den Dungen c. Pays-Bas, n° 22838/93, décision du 22 février 1995, D. R. 80. Nous avons déjà vu précédemment que la Cour n'a pas poussé son raisonnement jusqu'à ce stade-là.

pas appliqué un tel raisonnement dans l'affaire Pitkevitch, où là aussi, la requérante, en tant que juge, avait une position lui donnant un pouvoir considérable sur les prévenus à qui elle adressait prétendument des appels à rejoindre son église.154

S'agissant de l'impact que peut avoir un enseignant sur ses élèves, nous avons abordé précédemment l'affaire Dahlab, où la Cour s'est appuyée sur l'effet prosélytique que le port du voile peut avoir sur les élèves, sachant que l'instituteur représente un modèle fort pour les élèves et que ceux-ci, de par leur jeune âge, sont plus influençables.155

Ce critère de la relation source-récepteur souligne la nécessité d'une vigilance particulière lorsqu'il existe un rapport déséquilibré - issu notamment de la situation professionnelle des protagonistes156 - et qui met la source en position de force face au récepteur.

Les relations parents-enfants représentent une situation tout à fait particulière, qu'il nous paraît important de mentionner brièvement ici. Il est en effet reconnu aux parents un droit d'assurer l'éducation et l'enseignement de leurs enfants conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques (Protocole n°1 article 2). Cette prérogative naturelle doit toutefois tenir compte du droit à la liberté de religion et de conviction des enfants. La Convention relative aux droits de l'enfant dispose à cet égard que les parents ont « le droit et le devoir (...) de guider [l'enfant] dans l'exercice du droit [à la liberté de pensée, de conscience et de religion] d'une manière qui corresponde au développement de ses capacités ».157 La question de savoir comment gérer un éventuel conflit entre le droit de l'enfant qui voudrait choisir une orientation religieuse différente de celle préconisée par ses parents, et le droit de ces derniers d'assumer leur rôle éducatif ne trouve pas de réponses faciles. Si l'autorité parentale et leur liberté de transmettre leurs valeurs et leurs croyances ne saurait être diminuée, le principe de la liberté religieuse voudrait que ce rôle éducatif

154 Pitkevitch v. Russia, n° 4793 6/99, decision, 8 February 2001, HUDOC

155 Dahlab c. Suisse, n° 42393/98, décision du 15 février 2001, CEDH 2001 -V, § 1

156 STAHNKE, « The Right to Engage in Religious Persuasion », op. cit.. La vigilance est également de mise lorsque la source est le fournisseur d'un service essentiel (par exemple dans le cas de l'aide humanitaire) ou lorsque la source dispose de moyens financiers importants, comparé au récepteur.

157 Convention relative aux droits de l'enfant, adoptée par l'Assemblée générale le 20 novembre 1989, entrée en vigueur en 1990, article 14. Cet article a toutefois fait l'objet de nombreuses réserves, de sorte que malgré le nombre élevé de ratification de la Convention, tous les Etats n'admettent pas qu'il existe un droit autonome de l'enfant en ce domaine. Voir BREMS Eva, A Commentary on the United Nations Convention on the Rights of the Child. Article 14. The Right to Freedom of Thought, Conscience and Religion, Martinus Nijhoff Publishers, Leiden, Boston, 2006, 39 pp.

Dans l'affaire Çiftçi c. Turquie, n° 71860/01, décision du 17 juin 2004, CEDH 2004-VI, examinée sous l'angle de l'article 2 du Protocole n° 1, la Cour a estimé que la législation turque qui interdit au garçons non titulaires d'un diplôme d'enseignement primaire (et qui consiste de fait une limite d'âge située à douze ans pour suivre lesdits cours) était justifiée parce qu'elle visait à protéger les mineurs contre un éventuel endoctrinement.

consiste aussi à préparer les enfants à effectuer leur propre choix, un choix responsable et informé.

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