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Le micro-crédit en droit français et en droit cambodgien

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par Vannak NHEAN
Université Jean Moulin Lyon 3 - DEA de Droit des affaires 2006
  

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1. Les remarques préliminaires

123. - Deux remarques préliminaires. Deux remarques doivent être soumises à l'attention.

D'abord, il est important de rappeler que la réglementation prudentielle est basée essentiellement sur les fonds propres. L'objectif du ratio prudentiel est d'imposer le maintien du montant minimum de fonds propres207 auxquels s'ajoutent pour les opérateurs du micro-crédit en droit français les ressources assimilées. Ils permettent de calculer les différents ratios imposés par la réglementation prudentielle. C'est la raison pour laquelle le droit prend soin de définir et de préciser les éléments qui doivent être pris en compte pour le calcul des fonds propres et ressources assimilées. Quels sont les éléments des ressources assimilées et ceux à inclure dans les fonds propres ? L'article 4 de l'arrêté du 3 juillet 2002 précise que « les fonds propres et ressources assimilées, mentionnés au quatrième alinéa 7 du décret du 30 avril 2002 susvisé, englobent, outre le fonds de réserve, les fonds propres, les cotisations et droits d 'entrée, les subventions publiques et privées d 'investissement, les dons et legs ». Selon cette disposition, les ressources assimilées sont le fonds de réserve, les cotisations et droits d'entrée, les subventions publiques et privées d'investissement, les dons et legs. Toutefois, cet arrêté n'a pas précisé les éléments des fonds propres. On peut donc se demander si la notion de fonds propres appliquée aux établissements de crédit soit applicable de la même façon aux associations de micro-crédit. Les fonds propres applicables aux établissements de crédit comprennent principalement le capital, les

207 . C. DUFLOUX et M. KARLIN, La réglementation prudentielle des banques : les travaux récentes du Comité Cooke, Banque, n° 489, décembre 1988, p. 1246 et n° 490, janvier 1989, p. 77.

réserves, les provisions réglementaires208, le résultat d'exercice et les écarts de réévaluation. Ils constituent des ressources stables de l'établissement. Au vu de ces composants, on pourrait dire que la notion de fonds propres applicable aux établissements de crédit ne peut pas être entièrement applicable aux associations du micro-crédit.

Ensuite, certaines règles prudentielles sont rendues inutiles par l'encadrement des crédits : restriction quant au montant et quant aux bénéficiaires du micro-crédit. Cette règle concerne le ratio de division de risque qui est rendu, en droit français, inutile par les plafonds imposés par l'article 6 alinéa 5 du décret de 2002. Toutefois, cette règle est prévue par l'article 18 du Prakas de 2000. Ce ratio de division de risque est fixé à 10% des fonds propres, ce qui est suffisamment important puisque le montant du micro-crédit est faible. Bien que le droit cambodgien n'ait pas limité le montant du micro-crédit, il est probablement possible de dire que le montant doit être faible du fait qu'il est accordé, soit à une famille pauvre, une famille qui a des revenus modestes ou à une petite entreprise209. D'ailleurs, bien qu'il existe un encadrement de crédit, le coefficient de ressources et les encours du crédit210 est prévu. L'article 7 in fine prévoit que « à tout moment, les encours de crédit doivent être financés par des ressources de durée au moins égale à celle des prêts ». D'après l'arrêté pris en son application, l'association doit s'assurer, à tout moment, que la durée moyenne des ressources est supérieure ou égale à la durée moyenne des prêts accordés au titre du présent décret. La durée moyenne du prêt est calculée en divisant le montant total des prêts accordés, pondérés chacun par leur durée restant à courir, exprimés en nombre de jours, par le montant total des prêts accordés. La durée moyenne des ressources est calculée en divisant le montant total des ressources, pondérées chacune par leur durée restant à courir, exprimées en nombre de jours, par le montant total des ressources inscrites au passif du bilan de l'association. Les fonds propres et ressources sans limite sont considérés comme remboursables au bout de sept ans. Les subventions publiques sont considérées comme ayant une durée restant à courir de sept ans.

A part de ces règles, les autres règles imposées aux établissements de crédit pourraient ne pas être appliquées purement et simplement aux opérateurs du micro-crédit.

208 . Stéphane PIEDELIEVRE, Droit bancaire, préc., n° 1 01, p. 91.

209 . V. supra, n° 31.

210 . On comprend que ce coefficient correspond au coefficient de fonds propres et de ressources permanentes applicable aux établissements de crédit à partir de 1986 suite à la suppression de l'encadrement de crédit (le coefficient d'opération à moyen et long terme non réescomptable et le coefficient de distribution des crédits à moyen et long terme). Cette règle a pour objectif d'éviter que les emplois à longue durée soient financés des ressources de durée plus courte, par conséquent, d'éviter les conséquences trop brutales de la suppression de l'encadrement du crédit et le financement des prêts à long terme avec des ressources monétaires. V. Stéphane PIEDELIEVRE, Droit bancaire, préc., n° 103, p. 93.

Leur adaptation est envisageable.

2. L'adaptation des règles prudentielles aux opérateurs du micro-crédit

- L'analyse des textes juridiques applicables aux opérateurs du micro-crédit dans les deux systèmes permet de tracer quelles sont les règles qui ont été ajustées pour répondre aux besoins des opérateurs du micro-crédit.

124. - Le capital minimum. En droit cambodgien, le capital minimum est fixé à 50 milliards de Riels, soit 15 millions euros pour les établissements de crédit et à 25 milliards de Riels, soit 7,5 millions euros pour les institutions de microfinance211. Quelle observation peut-on émettre à propos de cette réglementation moins restrictive au niveau du capital minimum pour les IMF ? Le capital minimum peut être considéré comme un facteur de sécurité. Mais, certains théoriciens n'attachent pas une grande importance à l'imposition d'un niveau minimum de capital comme facteur de sécurité et y voient davantage un moyen de restreindre le nombre des institutions. Il est considéré comme outil de limitation du nombre des opérateurs agréés212. En effet, deux alternatives sont à l'opposée à propos de la réglementation du capital minimum des opérateurs de micro-crédit au moment de l'adoption de ce texte. La première consiste à dire qu'il est suffisamment important, pour des raisons sociales, d'encourager les activités de microfinancement, et par conséquent, d'appliquer aux opérateurs du micro-crédit des normes moins exigeantes en matière de capital minimum. Toutefois, cette doctrine se heurte à un problème important en pratique soulevé par une autre doctrine. En réalité, une réglementation moins restrictive au niveau du capital peut entraîner une prolifération des institutions de micro-finance, ce qui ne facilite pas la supervision prudentielle. Certaines institutions seront donc sous supervisées. Il faut donc trouver un juste milieu. Le moyen utilisé par le droit cambodgien consiste à fonder en partie la décision d'octroi d'agrément sur une évaluation qualitative de l'institution. Au regard de l'un des seuils imposés pour obliger les ONG, associations ou autres entités à se transformer en IMF agréées, ils conduisent à penser que l'autorité compétente n'accorde l'agrément qu'à des grandes IMF. Toutefois, la création d'une IMF nouvelle à partir de rien n'est pas interdite. Le montant minimum est pourtant

211 . L'article 4 du Prakas de 2000.

212 . Richard ROSENBERG, Directives concertées pour la microfinance, préc., p. 17-18.

suffisamment élevé pour cette IMF nouvellement créée car les IMF sont en pratique à l'origine des ONG, associations sans but lucratif qui ne sont pas en mesure de se procurer de liquidité pour un tel montant puisque le capital minimum doit être totalement libéré et un dépôt de garantie de 5% du montant du capital dans un compte ouvert auprès de la BNC est obligatoire213.

126. - La provision des prêts non garantis. L'article 16 du Prakas de 2000 prévoit que « Les établissements agréés doivent exercer leurs activités conformément à des dispositions relatives à la classification des crédits et à la limite des provisions pour perte ». Le taux de provision est prévu par le Prakas B 7-02-145/Prk du 07 juin 2002 sur la classification et la provision des mauvaises dettes et les dettes douteuses, y compris l'intérêt suspendu. Il est fixé en fonction du niveau de risque de recouvrement du crédit : soit 10% pour les dettes en dessous de standard, soit 30% pour les dettes douteuses, soit 100% pour les dettes perdues. La notion de dette sous standard n'est pas précisée. Ce Prakas n'est pas propre aux opérateurs de la micro-finance. Il est prévu pour les banques. On peut se demander s'il est applicable aux opérateurs de la micro-finance. Au travers de l'article 16 du Prakas de 2000, la règle relative à la provision pour perte appliquée aux banques est applicable de la même façon aux institutions de micro-finance.

En droit français, l'article 6 in fine du décret précise que « les prêts consentis par l 'association doivent bénéficier d 'une garantie apportée par un fonds de garantie ou du cautionnement agréé ou par un établissement de crédit ». Cette disposition nous conduit à penser que la règle relative à la provision des crédits non garantie est, tout de même comme le ratio de division des risques, rendue inutile. Or, l'article 7 alinéa 1 er impose une règle de provision de prêt contentieux à la hauteur des pertes probables. En effet, une garantie apportée peut ne qu'être partielle. C'est le cas notamment de la garantie apportée par le FCS. Ainsi, si le prêt est garanti totalement par un cautionnement agréé ou par établissement de crédit, l'association n'a pas à créer ni la provision ni le fonds de réserve. En revanche, si elle n'est que partielle, la fraction non provisionnée donne lieu à la création de fonds de réserve. C'est la raison pour laquelle l'alinéa suivant du même article prévoit que « la fraction des encours de prêts non provisionnés, qui n 'est pas couverte par les garanties mentionnées ci-dessus, doit donner lieu à la constitution d'un fonds de réserve ». A la lecture de ces deux alinéas de l'article 7 du décret de 2002, on peut en déduire que le

213 . L'article 12 du Prakas de 2000.

décret impose une provision automatique des prêts contentieux à hauteur de la perte probable. Toutefois, une nuance est admise par la création d'un fonds de réserve qui se substitue à la provision des prêts contentieux. Ainsi, deux alternatives sont prévues. Ou bien l'association de micro-crédit doit provisionner la fraction non garantie ou bien elle doit constituer un fonds de réserves. Il semble que la constitution de fonds de réserve est préférable pour deux raisons. D'abord, l'association de micro-crédit compétente ne devrait pas être tenue d'effectuer une provision automatique pour les créances douteuses pour un pourcentage important de leur micro-crédit dès l'octroi de ceux-ci. En effet, un suivi financier est obligatoire pendant la durée du prêt214. C'est ce suivi financier qui constitue l'une des conditions du succès du micro-crédit en France, plutôt que l'utilisation de caution solidaire. En raison de ce suivi financier, l'association peut intervenir rapidement en cas d'incident de paiement et prend les mesures nécessaires pour faciliter le remboursement notamment en accordant un nouveau délai de paiement. Ensuite, ce sont les modalités de fixation de taux de fonds de réserve applicable à la fraction non garantie qui se veulent et se montrent très souples. Ce taux est fixé à partir du taux de défaut observé en moyenne sur les crédits accordés par l'association dans le passé. Il est propre à chaque association. Il est fixé par l'article 2 de l'arrêté du 3 juillet 2002 à 30% en l'absence de données vérifiables sur le taux de défaut statistique moyen, constaté sur les prêts délivrés au cours des trois dernières années ; en cas de données statistiques, il est de 1,5 fois de taux de défaillance constaté sur l'exercice précédent. Ce taux ne peut être ni inférieur à 10% ni supérieur à 30%. Le comité d'habilitation des associations sans but lucratif peut, le cas échéant, majorer ce taux en fonction de la situation particulière de l'association concernée. Il est fixé en fonction d'un bon historique de remboursement des prêts accordés par l'association, c'est-à-dire qu'il est fondé sur la performance de l'association. Cette disposition est conforme à la recommandation internationale215.

127. - Le ratio d'adéquation des fonds propres ou le ratio de solvabilité. Le ratio de solvabilité vise à rapporter les risques de crédit pris par les établissements de crédit aux fonds propres dont ils disposent. L'article 7 alinéa 3 du décret de 2002 prévoit que « à tout moment, le montant total des fonds propres et ressources assimilées doit être au moins égal au produit de la fraction des encours mentionnée à l 'alinéa précédent (c 'est-à -dire la fraction non provisionnée qui n 'est pas garantie) par un pourcentage fixé par arrêté du

214 . L'article 6 alinéa 5 du décret de 2002.

215 . Richard ROSENBERG, Directives concertées pour la microfinance, préc., p. 27.

ministre chargé de l 'économie ».Ce ratio qui est fixé par le comité Cooke à 8% pour les établissements de crédit est mesuré à 12% par l'article 3 de l'arrêté du 3 juillet 2002. Il est fixé par l'article 15 du Prakas de 2000 à 20% (15% pour les banques commerciales) du rapport entre le capital éligible et le risque évalué. Deux remarques peuvent être faites. D'abord, ce Prakas utilise la terminologie de ratio d'adéquation de capital. Or, le capital ne constitue qu'un élément des fonds propres. Il s'agit d'une mauvaise utilisation de la terminologie. La loi utilise improprement comme synonyme le capital et les fonds propres. Le mot « fonds propres » est utilisé à la place du mot « capital » pour le calcul du ratio de division de risque216. Ensuite, pour quelle raison le ratio d'adéquation des fonds propres imposé aux opérateurs du micro-crédit est plus sévère que celui appliqué aux établissements de crédit ? Le portefeuille du micro-crédit est composé de prêts non garantis ou garantis par des actifs d'un montant insuffisant pour couvrir le solde du prêt si l'on prend en compte les coûts de recouvrement. Les opérateurs du micro-crédit supportent donc des risques plus importants que les banques. Or, le taux d'impayés du micro-crédit est en général inférieur à celui des banques commerciales, ce qui montre la performance des opérateurs du micro-crédit. Ce ratio aurait du être moins sévère que celui des établissements de crédit. Cependant, d'aucuns avancent que le fait d'imposer un niveau d'adéquation des fonds propres plus élevé pour les IMF, ou une obligation similaire reflétant le risque spécifique du portefeuille de micro-crédits d'une institution diversifiée, aura pour effet de diminuer le rendement des fonds propres, rendant ainsi l'activité de micro-crédit moins attractive.

128. - Le ratio de liquidité. Le ratio de liquidité, qui vise à ce que les établissements de crédit réalisent de façon normale un équilibre entre leurs liquidités et leurs exigibilités, n'a pas besoin d'être imposé en droit français. L'association de micro-crédit n'a pas donc à s'assurer de la possibilité de faire face à des retraits de fonds puisqu'il n'existe pas des dépôts du public. Toutefois, le ratio de liquidité doit être réglementé en droit cambodgien. En matière de ratio de liquidité, il n'existe pas de raison qui vise à obtenir une réglementation moins lourde que celle applicable aux banques. En effet, les actifs des opérateurs du micro-crédit se composent des prêts non garantis. Le risque est plus grand. Il serait donc légitime d'imposer aux IMF de ratio de liquidité assez élevé. L'article 16 du Prakas de 2001 impose un ratio de liquidité qui est égal au moins à 100% (50% pour les

216. V. supra, n° 123.

banques commerciales), c'est-à-dire le rapport entre les actifs liquides ou rapidement réalisables et le passif exigible à court terme doit être au moins de 1 00%217. Le même raisonnement est valable pour justifier l'absence de la réglementation de la réserve obligatoire en droit français puisque le montant de réserve obligatoire est calculé à partir des dépôts. En droit cambodgien, elle est fixée à 5% (8% pour les banques commerciales) du montant des dépôts du public218. Le montant de la réserve obligatoire est calculé en fonction du montant des dépôts inscrit dans le bilan de l'établissement. Pour ce calcul, le montant de l'épargne obligatoire, comme condition d'octroi du crédit, n'est pas pris en compte219. La réserve obligatoire constitue un moyen de régler ou contrôler indirectement le volume de crédits distribués. Si le micro-crédit vise à favoriser l'accès au crédit, il n'existe pas de raison qui justifie l'imposition du montant de réserve obligatoire plus forte aux opérateurs du micro-crédit. Il suffit de renforcer la règle de ratio de liquidité.

129. - Le contrôle des règles prudentielles. Pour pouvoir contrôler la conformité à ces règles, deux moyens sont créés : l'obligation de communiquer régulièrement les documents comptables à la BNC et l'obligation de créer un contrôle interne. Ces mesures sont prévues à l'article 5 du décret de 2002 et à l'article 43 de la loi sur les institutions bancaires et financières.

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