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Le micro-crédit en droit français et en droit cambodgien

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par Vannak NHEAN
Université Jean Moulin Lyon 3 - DEA de Droit des affaires 2006
  

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INTRODUCTION

« Micro credit, a macro idea1 »

1. - « Micro credit, a macro idea ». Le slogan énoncé à l'occasion du Sommet mondial du micro-crédit en février 1997 à Washington2, explique parfaitement l'importance et la reconnaissance du micro-crédit comme étant une nouvelle forme innovante dont l'objectif est de permettre à des personnes exclues du système bancaire d'accéder à un crédit afin d'entreprendre une activité génératrice de revenus et de réduire, par conséquent, la pauvreté. Cette reconnaissance est doublement remarquée, d'une part, par l'adoption de l'année 2005 comme l'Année internationale du micro-crédit et par le Sommet global du micro-crédit en 2006 à Halifax3, et d'autre part, par l'attribution du 13 octobre 2006 du prix Nobel de la paix au professeur Mohamad Yunus4 et à sa banque, la Grameen Bank. Cet engouement a suscité beaucoup de réflexions sur la réalité de l'efficacité du microcrédit quant au rôle qui lui est confié. Economiquement et socialement utiles et séduisants, les débats ne portent pas, par ailleurs, clairement sur ses aspects juridiques, de sorte qu'on pourrait douter de la place du micro-crédit en droit positif. Malgré cette observation, le micro-crédit, inventé par les économistes, a pénétré implicitement dans le domaine juridique. Cette recherche constitue donc une contribution au débat politique législatif concernant le micro-crédit dans un contexte comparé entre le droit français et le droit

1. Hillary ClINTON : littérairement « le micro-crédit, une macro-idée » : V. « Le microcrédit du tiers-monde aux Etats-Unis », in Le monde, 10 juin 1997.

2 . Ce sommet est organisé à l'initiative de M. le professeur Yunus. Il a permis à des milliers de personnes engagées dans leurs pays, du Sud, de l'Est et du Nord, de prendre conscience de l'importance de leur action et de décider d'éradiquer la pauvreté du monde au moyen de micro-crédit. - V. Micro-credit Summit International, Février 1997, Plan of action, Washington, p. 40.

3. Ce Sommet s'est tenu du 12 au 15 novembre 2006 à Halifax, Nouvelle-Écosse, au Canada.

4. Professeur d'économie à l'université Chittagong et fonctionnaire à la Banque Mondiale et au FMI. Il a fait ses études de doctorat et son PHD aux Etats-Unis et a commencé à enseigner l'économie à l'Université de Chittagong en 1972. Le prix Nobel de la paix lui a été attribué et à sa Banque, le 13 octobre 2006. Le président du comité Nobel, Ole Danbolt Mjoes, a déclaré que « une paix durable ne peut pas être obtenue sans qu 'une partie importante de la population trouve les moyens de sortir de la pauvreté ». Ce prix contribue à la reconnaissance internationale du micro-crédit comme outil de lutte contre la pauvreté.

cambodgien.

2. - Que signifie le micro-crédit ? A priori, bien qu'il soit mondialement connu, aucune définition exacte du micro-crédit n'a été unanimement adoptée. Une définition du microcrédit est ainsi proposée : « le micro-crédit désigne un prêt de faible montant garanti par une relation de proximité et dont l'objet est de permettre à une ou des personnes économiquement faible(s), normalement exclue(s) du cycle de financement formel, de créer ou de développer sa propre activité économique (micro-crédit professionnel) ou de réaliser un projet personnel en vue de son insertion professionnelle et sociale (microcrédit social) ». On peut, ensuite, se demander d'où vient le micro-crédit ? L'historique du micro-crédit peut être mieux conçue à la suite d'une brève explication du dualisme du système de financement5. Ce dualisme résulte de la constatation de l'objet du secteur financier consistant à mettre en relation les agents à excédents de capitaux avec les agents à besoin de capitaux6. Les banques et le marché financier jouent parfaitement ce rôle. Selon la logique marchande un certain nombre d'agents économiques sont exclus de facto du système qui ne s'intéresse pas à eux. Exclus du système de financement formel, ils recourent donc dans la majorité des cas à un autre système de financement coûteux7 dit « informel ». Dans ces deux systèmes de financement, les choses ne se passaient pas de la même façon.

3. - Le financement formel. Le secteur formel est normalement financé par les banques. Les banques, qui font commerce de l'argent et qui sont donc en quête de rentabilité, peuvent parfaitement refuser le crédit en raison de l'absence du droit au crédit. Les emprunteurs dont la situation financière est très modeste et qui ne peuvent pas répondre aux critères de sélection des banques, n'avaient pas d'accès au financement. Pendant ce temps, les populations locales manquent d'argent pour développer des activités qui sont souvent informelles, certes, mais qui sont génératrices de revenus. Exclues du financement

5. OULD NEMINE Ahmed, Le rôle du micro-crédit dans le financement du développement, thèse de l'Université de Nice, 15 décembre 2004, p. 27 et 60-80 : « Il a été énoncé que ce dualisme de secteur est la conséquence de la répression financière, et la libéralisation financière est la mesure qui permet d'éradiquer le secteur informel. Toutefois, d'autres approches (les néo-structuralistes) concluent que l'existence en parallèle des deux systèmes est nécessaire, d'autant plus que ces systèmes sont plus complémentaires que concurrents ».

6 . Lettre verninmen.net, l'actualité micro-finance, Décembre 2006, n°53 ; Laurence SCIALOM, Economie bancaire, Collection repère, 1999.

7. E. LITTLEFIELD et R. ROSENBERG, « Une démarcation de plus en plus réduite entre la microfinance et secteur financier formel », in Le Rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2006, p. 139-149.

classique, elles sont tributaires du secteur de financement informel.

4. - Le financement informel. Force est de constater le rôle limité des banques. Soit elles sont peu présentes dans les campagnes, soit elles sont peu sollicitées parce que leurs services ne sont pas adaptés aux besoins de populations locales. Le secteur informel facilite alors l'accès au crédit. Le secteur informel du financement ne fonctionne pas selon les normes et les mécanismes du secteur dit formel. A côté de l'usurier proprement dit, on peut emprunter à la famille ou à des amis. On peut aussi se regrouper pour se prêter et s'emprunter les uns aux autres. Le développement du secteur informel est dû à l'impossibilité des banques d'étendre leurs activités au segment de la clientèle visée par le secteur informel. Il s'agit bien d'un secteur de financement puisqu'il permet aux personnes exclues du système bancaire classique d'avoir d'accès au crédit. Il est informel du fait qu'il n'est pas soumis au cadre juridique du système formel. Ce secteur informel n'existe qu'en marge du secteur formel qu'il ne prétend pas de remplacer. Il est par ailleurs complémentaire à ce dernier. Malgré cette constatation, on trouve que dans des pays en voie de développement, tels que le Cambodge, le secteur informel de financement est plus étendu que celui classique des banques. Il a été très pratiqué parce qu'il s'inscrit naturellement dans la vie de tous les jours.

Dans le secteur informel, les relations entre les débiteurs et les créanciers sont des relations personnelles résultant du lien de proximité, ce qui conditionne sa plus grande efficacité. Comme les personnes se connaissent bien, l'information sur la solvabilité des unes et des autres est suffisante. Il y a peu de risque de non remboursement. Bien qu'il présente cet aspect positif, le secteur informel de financement comporte, par ailleurs, des inconvénients pour l'emprunteur qui doit payer des coûts de crédit très élevés. Conscients de ce problème, les gouvernements et les Organisation non gouvernementales (ONG) ont mis en place des programmes de crédit rural. Mais le résultat était décevant notamment en ce qui concerne l'offre très limitée de crédit aux pauvres. C'est dans cette optique que l'idée de micro-crédit a été accueillie avec enthousiasme. Il s'agit d'une innovation importante qui a transformé la manière d'envisager l'octroi du crédit.

5. - L'innovation du micro-crédit. La logique financière tient les personnes démunies à l'écart du circuit bancaire parce qu'elles sont fragiles. Les besoins de ces populations ne sont pas couverts par le circuit classique. Cette exclusion financière constitue un obstacle

important pour les personnes désireuses de créer leurs activités indépendantes et donc de trouver leurs citoyennetés économiques8. C'est précisément cet obstacle et le souhait de faire de ces personnes des acteurs économiques comme les autres que le micro-crédit se propose de surmonter. Ce nouveau concept s'adresse donc aux personnes n'ayant pas accès au système financier classique. La compréhension du développement du concept de microcrédit réside dans son histoire.

6. - La genèse du micro-crédit. On a l'impression que tout a commencé en février 1997 quand s'est tenu à Washington le premier Sommet mondial du micro-crédit, sous le patronage de l'ex-Président Bill Clinton, qui a pour objectif d'atteindre cent millions de familles parmi les plus pauvres de la terre d'ici 2005. En réalité, même si on ne parle du micro-crédit que depuis ces vingt dernières années, il s'inscrit, en revanche, dans une histoire un peu plus longue. L'histoire de micro-crédit remonte aux années 1 8409. Mais il fut redécouvert dans les années 1970, cent ans après la naissance de première coopérative d'épargne-crédit initiée par Raiffeisen. Il est donc difficile d'en accorder la paternité au professeur Yunus.

F. W. Raiffeisen lança en 184810, en Rhénanie, la première coopérative de crédit pour lutter contre l'usure qui surchargeait les paysans. Contrairement aux Monts-de-Piété11 remontant au Moyen-âge en 1462, les coopératives d'épargne et de crédit ne sont pas des entreprises de prêt sur gage mais de véritables intermédiaires financiers. La première raison de cette coopérative était la prise en compte des pratiques usuraires. Ici comme ailleurs, les paysans empruntent, en argent ou en nature, surtout dans les mois qui précèdent la récolte, à un commerçant, à un prêteur professionnel, à des taux exorbitants pouvant atteindre 50 à 100% pour une durée qui n'importe pas mais qui est toujours courte. La coopérative avait pour premier but d'offrir des cautions mutuelles aux banques afin que ses membres puissent évoluer vers la collecte de l'épargne pour pouvoir prêter directement

8.Semaine du microcrédit, Lancement du Fonds de cohésion sociale, Mardi 5 avril 2005 : www.cohesionsociale.gouv.fr.

9. Jaques ATTALI, « La micro-finance, aujourd'hui », in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2006, p. 153 ; Maria NOWAK, « Le micro-crédit en France et en Europe », in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2003-2004, p. 429 (cet auteur précise que le micro-crédit tel qu'il s'est développé en Asie et en Amérique latine, depuis les années 1970, n'est qu'une résurgence des mêmes idées existantes et développées par Raiffeisen au milieu du XIXème siècle).

10 . Laurent LHERIAU, Précis de réglementation de la micro-finance, tome I : le droit financier et la micro-finance, AFD, 2005, p. 19-22.

11. Pour une histoire des Monts-de-Piété et du Crédit Municipal, voir le site Internet du Crédit Municipal de Paris : http://www.creditmunicipal.fr/.

à leurs membres. Elles furent à l'origine de toutes les banques mutualistes d'Europe.

La conception du micro-crédit fut redécouverte et s'est manifestée avec la création de la Grameen Bank12, une banque rurale bénéficiant d'un statut spécial, au Bangladesh en 1976. Après une terrible famine, un professeur d'université, Mohamed Yunus, a l'idée d'accorder de petits crédits13 à quelques groupes de femmes pauvres pour les aider à développer une activité qui leur procure un mode ste revenu. Accordé pour un an au taux de 20%, il commence à être remboursé dès la deuxième semaine par celle qui a emprunté ou par ses comparses, car le groupe comprenant cinq personnes « comme les cinq doigts de la main » avec la caution solidaire de tous les membres. Si l'une des femmes ne remboursait pas à l'échéance, le groupe devait le faire à sa place. Sinon, il était privé de tout autre crédit postérieur. Lorsque le premier crédit sera remboursé, une autre femme pourra emprunter à son tour, et ainsi de suite. Quand toutes auront emprunté et remboursé, elles pourront emprunter un peu plus. Cette formule est basée sur un groupe dont les membres se connaissent bien. La méthode de Grameen Bank s'adaptait parfaitement à la situation des zones rurales du Bangladesh. Il montre donc que les pauvres et notamment les femmes de paysans sans terre sont « un bon risque bancaire », c'est-à-dire que les pauvres, n'ayant pas d'autres alternatives, font tout pour rembourser correctement leur crédit, si on sait s'adapter à leurs conditions (petits crédits avec des montants progressant régulièrement si le remboursement s'effectue intégralement, etc.). Cette façon de faire le crédit a été reprise aussi bien dans beaucoup de pays du Sud que dans des pays du Nord. Le micro-crédit se développe rapidement et constitue désormais l'une des préoccupations de la communauté internationale qui proclame la mise en place d'un « système financier ouvert à tous ». Il fait aussi partie de la politique de l'Union européenne qui a, à travers la Commission européenne, adopté des mesures politiques pour promouvoir l'utilisation du micro-crédit en Europe à des fins d'inclusion sociale14. En 2003, un réseau européen de micro-finance qui regroupe à ce jour 28 institutions les plus diverses s'intéresse particulièrement au micro-crédit.

7. - Le développement du concept du micro-crédit : de micro-crédit à la micro-finance.

12 . Le site officiel de la Grameen Bank (en anglais) : www.grameen-info.org.

13 . M. YUNUS a donc décidé de prêter « de sa poche » l'équivalent de 24 € (27 $) à un échantillon de 42 femmes parmi les plus pauvres, à la condition qu'elles rentrent dans un cycle économique générant un revenu quotidien. L'expérience fût un succès puisque la totalité des débitrices remboursèrent leur prêt grâce à leur activité.

14 . Commission européenne, Des mesures politiques pour promouvoir l'utilisation du micro-crédit en Europe à des fins d'inclusion sociale, Conclusions des études politiques, 2005.

Pour beaucoup de personnes et pour le grand public en particulier, la micro-finance se confond avec le micro-crédit. Si le micro-crédit demeure l'instrument de base, son succès entraîne de nouveaux besoins. C'est ici qu'entre en jeu la micro-finance. La micro-finance recouvre, désormais une gamme de services plus large, l'ensemble des services financiers offerts aux pauvres, aux populations mal desservies. Auparavant, les services de microfinancement étaient essentiellement axés sur l'octroi de prêts très modiques (le micro-crédit) aux pauvres pour les aider à entreprendre des activités productives. Mais au fil du temps, les services de microfinancement se sont étendus pour couvrir un large éventail de services financiers pour répondre aux besoins de personnes mal desservies. Les besoins de ceux qui empruntent ne sont pas seulement un besoin d'argent, à des conditions ou selon des modalités qui peuvent varier sensiblement. C'est un besoin d'autres services qui sont habituellement associés au crédit. Il en est trois qui accompagnent le micro-crédit et qui constituent avec lui la micro-finance15. Ce sont la micro-épargne, la microassurance16 et le transfert de l'argent. C'est l'ensemble de ces services qui définit la micro-finance. Elle signifie la distribution de services financiers notamment le crédit et les épargnes aux familles pauvres, familles ayant des revenus modestes et les petites entreprises17. Toutefois, la micro-finance se résume pratiquement dans les pays industriels, comme en France, à l'octroi du micro-crédit. Il s'agit d'un système financier hybride qui combine à la fois les caractéristiques du secteur formel et celles du secteur informel.

8. - La transposition du modèle Grameen Bank. Grâce à son immense succès, le modèle Grameen Bank a été imité par plusieurs pays. Aujourd'hui, l'idée de micro-crédit est une préoccupation internationale et s'est étendue dans d'autres pays en Europe notamment en France. Contrairement aux pays du sud, cette adoption a été très lente.

9. - Le contexte comparé du micro-crédit en France et au Cambodge. Le micro-crédit appliqué au Bangladesh a été reproduit aussi bien en France qu'au Cambodge. Il est très important de remarquer que reproduire la Grameen Bank ne consiste pas à reprendre in extenso le modèle, à tenir compte des caractéristiques du milieu et de l'adapter au contexte

15. M. LEPART, De la finance informelle à la microfinance, éd. Archives contemporaine, AUF, 2005, p. 53.

16 . Marie CADOUX, « l'assurance au service des microentrepreneurs », l'argus de l'assurance, n°7006, 22 décembre 2006.

17 . L'article 2 du Prakas (arrêté de la Banque Nationale du Cambodge) n°7-01-49 Prorkor du 25 février 2002 sur l'agrément et l'enregistrement des IMF, qui remplace le PraKas n° 700-06 Pror Kor du 11 janvier 2000 sur l'attribution de l'agrément aux établissements de micro-finance (J.O du 15 janvier 2000, n° 2, page 66).

du pays. Il s'agit tout simplement de revenir à son essence, à son objectif, à son formidable esprit d'initiative et d'innovation. Le micro-crédit est importé en France dans un contexte de chômage, d'exclusion financière, alors qu'il est importé au Cambodge dans un contexte de pauvreté et surtout dans le cadre du programme de développement.

10. - Le contexte du micro-crédit en France18. Si la France est un pays fortement bancarisé, 80% des ménages français ont recours pour tout paiement supérieur à 100 euros à des moyens de paiement, une partie de la population, estimée à près de cinq millions d'habitants19, reste en situation d'exclusion bancaire. Une partie importante de la population n'a pas accès au crédit. Or, l'accès au crédit est un moyen déterminant de la citoyenneté économique. Le marché français de micro-crédit est jugé sous-dimensionné par rapport aux besoins. Désormais, le micro-crédit piétine en France. La crise dans les banlieues de novembre 2005 a suscité l'implication du gouvernement dans le projet d'exclusion financière. En outre, le prix Nobel de la paix attribué au M. Yunus constitue un nouvel élan de lutte contre l'exclusion financière.

10-1. - La dynamique française du micro-crédit qui conjugue la mise à la disposition d'un financement et d'un accompagnement personnalisé a déjà prouvé son efficacité à travers des structures comme l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE)20, France Active, France Initiative Réseau et le Réseau Entreprendre21. En France, avant la création de l'Association pour le droit à l'initiative économique, il n'y avait aucune association de micro-crédit ou de lutte contre l'exclusion financière. Au début, l'ADIE travaillait en partenariat avec les établissements de crédit en partageant avec ces derniers les risques du crédit à hauteur de 70%. En cas de défaillance du débiteur, l'ADIE s'engage à racheter la part du risque supporté par les banques. Cette forme de partenariat est toujours encouragée du fait qu'il procure des avantages incontestables. De nouvelles

18 . Maria NOWAK, on ne prête pas (que) aux riches, JC Lattès, 2005, p. 142 et s.

19 . in Le monde du 10 juin 2004.

20 . L'Association pour le droit à l'initiative économique est une association qui a été créée suivant le modèle de la loi de 1901. Son rôle est exercé conformément à la disposition dérogatoire au monopole bancaire en matière d'opérations de crédit. Il s'agit d'un principal acteur du micro-crédit, créé en 1989 à l'initiative de madame Maria NOWAK. Elle a accordé 6 740 crédits en 2005, en hausse de 20% mais ne répondant qu'à environ 10% des demandes.

21 . Ces organismes sont des organismes de finance solidaire. La finance solidaire désigne l'ensemble des dispositifs de financement destinés à soutenir la création ou le développement d'activités socialement utiles, à partir des instruments de l'épargne et de l'investissement solidaires. Ces opérateurs de la finance solidaire mettent en fait à la disposition des créateurs des quasi-fonds propres destinés à servir de levier au crédit bancaire. V. Sylvain ALLEMAND, La microfinance n 'est plus une utopie !, édition Autrement, 2007, p.1 92.

formes de mécénat ont été mises en place22. Avec l'amendement de l'article 11 de la loi bancaire de 198423, elle peut désormais emprunter pour reprêter à ses clients directement. Cet amendement encourage le développement du micro-crédit.

10-2. - En raison de la montée en puissance du micro-crédit en France, le gouvernement veut bâtir une politique publique pour lutter contre l'exclusion financière et mobiliser les grandes banques. Le lancement du Fonds de cohésion sociale (FCS) créé par la loi Borloo du 18 janvier 200524 à l'occasion de la Semaine du micro-crédit montre bien cette politique. Cette loi crée une nouvelle typologie du micro-crédit, dite de micro-crédit social. La naissance en France du micro-crédit social, appelé par certains, des « prêts à la consommation sociaux25» est une avancée, modeste mais incontestable dans la lutte contre l'exclusion financière. Toutefois, le débat sur le surendettement des particuliers ne manque pas puisque les particuliers, bénéficiaires de ces crédits sociaux, sont déjà, par définition, en situation financière très difficile26. Cette invention suppose en plus de revoir la définition du micro-crédit. Le lancement de la Semaine du micro-crédit en avril 2005 constitue bien une promotion du micro-crédit en France.

11. - Le contexte du micro-crédit au Cambodge27 . Le système bancaire cambodgien a été réduit à néant à l'époque des Khmers rouges (1975-1979). 90% de la population n'a pas accès au prêt classique. Aucune banque de développement n'existait à la sortie du régime Khmer rouge. Ainsi, dans les années 90 après les Accords de Paris en 1991, les ONG ont commencé à proposer des services de micro-crédit aux populations démunies des zones rurales, dans le cadre du programme de développement. La plus importante ONG spécialisée dans le financement de proximité est l'Association des agences de développement économique local, mieux connue sous l'acronyme anglais ACLEDA28, qui a été créée en 1993 avec le soutien du PNUD (Programme des Nations Unies de

22 . Patrick SAPY, « Réseaux bancaires et micro-crédit : vers de nouvelles formes de mécénat », Banque, juin 2005, p. 27-28.

23 . L'article 19 de la loi n°2001 -420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques (NRE) modifiant l'article L.51 1-6 du Code monétaire et financier (J.O 16 mai 2001).

24 . L'article 80-III de la loi n°2005-32 du 18 janvier 2005 de Programmation pour la cohésion sociale (J.O du 19 janvier 2005, modifié par l'article 26 de la loi n°2006-339 du 23 mars 2006 (J.O 24 mars 2006).

25. Anne MICHEL, « Naissance en France des prêts à la consommation sociaux », in Le monde, 6 janvier 2006

26 . V. infra, n° 76-77.

27 . « Micro finance of Cambodia », National Bank of Cambodia, 2006.

28 . Pour en savoir plus : www.gdrc.orf/icm/country/acleda-base.html (page sur ACLEDA).

développement). Elle est devenue une banque spécialisée en 2000. Il est à noter que le micro-crédit mené par les ONG dans les années 90 n'était pas réglementé puisqu'il est appliqué avant l'adoption même de la loi sur les institutions bancaires et financières du 18 novembre 1999. Aujourd'hui, le micro-crédit est affiché comme une priorité du gouvernement et sa réglementation constitue une question d'actualité.

12. - Le micro-crédit doit-il être soumis au régime du droit commun du crédit ou faut-il adopter une réglementation spécifique ? L'ADIE ne pouvait que fonctionner en vertu du deuxième alinéa de l'article L. 511-6 du Code monétaire et financier. Elle ne pouvait donc pas emprunter pour prêter. Cette possibilité est reconnue par l'article 19 de la loi NRE du 15 mai 200129 qui ajoute un alinéa 5 à l'article L. 511-6 précité. Cette loi traduit la reconnaissance de l'importance du micro-crédit par le législateur. Toutefois, il n'a pas utilisé la terminologie du micro-crédit. Il en est de même en droit cambodgien. L'article 2 du Prakas n°7-01-49 Prorkor du 25 février 2002 « sur l'agrément et l'enregistrement des Institutions de la micro-finance (IMF) », qui dispose que « la micro-finance signifie la distribution des services financiers notamment le crédit et les épargnes aux familles pauvres, familles ayant des revenus modestes et aux petites entreprises », utilise simplement le mot « crédit ». De cette constatation on peut déduire que le législateur n'a pas voulu adopter une règle spécifique pour le micro-crédit. Ce dernier doit être intégralement soumis au droit commun. Cependant, il exerce une influence très importante dans le changement de la politique législative surtout en matière de taux d'usure. La libéralisation des taux d'intérêts des crédits aux entreprises individuelles constitue une mesure typiquement du micro-crédit30. Le législateur cambodgien comprend mal qu'il est très libéral sur ce point. En effet, l'interrogation sur l'applicabilité du Prakas du 15 mars 1995 sur la libéralisation des taux d'intérêts pour les banques commerciales aux opérateurs du micro-crédit permet de comprendre que le taux d'intérêt du micro-crédit est touj ours plafonné en droit cambodgien. Toutefois, la libéralisation de taux d'intérêt en matière de crédit constitue un atout principal pour les opérateurs du micro-crédit. En pratique, le taux d'intérêt du micro-crédit est beaucoup plus élevé que celui pratiqué par les banques classiques. On peut donc se demander pourquoi ce taux est si élevé si l'objectif du micro-

29 . Loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques (J.O n° 11 3 du 16 mai 2001 page 7776). Cet article est intégré dans l'article L. 511-6 du Code monétaire et financier. 30. Sénat - Séance du 13 juin 2005 et l'exposé des motifs de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises (J.O n° 179 du 3 août 2005 page 12639).

crédit est d'aider les personnes dont la situation financière est très modeste à sortir de la pauvreté ou du chômage. Toute la difficulté de la réglementation consiste donc à concilier deux objectifs qui sont apparemment contradictoires : l'objectif social et la recherche de la viabilité financière.

13. - D'ailleurs, une réglementation spécifique des opérateurs du micro-crédit semblait être une voie adoptée par le législateur des deux pays. Cette spécificité de la réglementation répond à la question soulevée : comment créer un cadre institutionnel et réglementaire favorable au développement du micro-crédit ? Il s'agit, en fait, d'une dérogation à des règles régissant la profession bancaire notamment en ce qui concerne le capital social minimum, les autres règles prudentielles. Cela montre que certaines spécificités sont accordées au micro-crédit. Bien que la réglementation spécifique soit une voie choisie par ces deux systèmes juridiques, le statut juridique des opérateurs du microcrédit différemment encadré par ces derniers montre leur différente perception de la notion du micro-finance ainsi que des risques liés au micro-crédit. Il faut reconnaître que la réglementation en droit cambodgien est à la fois souple et flexible. Mais, les conséquences sur le comportement des opérateurs du micro-crédit ne manquent pas. Ce changement du comportement en raison d'une obligation de se transformer en IMF peut être aussi bien un avantage qu'un désastre pour les bénéficiaires du micro-crédit. En revanche, il ne serait pas opportun ni en droit français, ni en droit cambodgien, d'imposer une réglementation prudentielle aux associations de micro-crédit qui ne peuvent jamais mobiliser les épargnes. Dès lors qu'elle est mise en place, la réglementation prudentielle applicable aux banques doit être ajustée pour répondre aux besoins du micro-crédit. Ainsi, il est important de remarquer que certaines règles prudentielles imposées aux établissements de crédit ne peuvent pas être appliquées purement et simplement aux opérateurs du micro-crédit en raison de la pondération de risques qui sont liés au produit du micro-crédit.

14. - Enfin, l'implication du législateur constitue un élan important du développement du micro-crédit. Cela n'est qu'un reflet de ses impacts positifs qui ne doivent pas être niés. On peut, en revanche, douter de la réalité des impacts du micro-crédit. Une littérature très abondante s'est développée ces dernières années. La recherche des indicateurs de l'évaluation des impacts du micro-crédit constitue un premier centre d'intérêt. Malgré certaines littératures niant la réalité des effets du micro-crédit, il faut reconnaître qu'il avait

et doit avoir un effet de levier sur la réduction de la pauvreté et du chômage notamment par la création d'emplois et de revenus, ce qui caractérise l'impact économique du microcrédit. Or, cet impact économique n'est pas significatif au Cambodge en raison du très faible montant des prêts qui ne permet pas un investissement important et du comportement même des emprunteurs. Il permet à des personnes normalement exclues du financement ou des systèmes financiers d'y avoir accès. L'impact financier n'est donc pas non plus négligeable dans un contexte où les banques commerciales ne s'implantent pas dans les zones rurales. Le micro-crédit peut également contribuer au renforcement de liens sociaux et au pouvoir des femmes. Or, le débat sur la prévention de surendettement est grand du fait que les bénéficiaires du micro-crédit sont par hypothèse des personnes dont la situation financière est très modeste. Ce débat est alimenté par l'innovation du micro-crédit social, qualifié de micro-crédit à la consommation par opposition au micro-crédit professionnel.

15. - L'énoncé du plan. L'importance de l'étude de l'aspect juridique du micro-crédit consiste à expliquer juridiquement de quoi il s'agit parmi les catégories juridiques existantes de crédit. S'il n'est pas autre chose que le prêt qui a une affectation spéciale déterminée par la loi, comme indiqué dans les textes légaux, le micro-crédit doit être distingué du prêt d'honneur ou du prêt à la création d'entreprise (PCE). Ainsi, la connaissance de la notion de micro-crédit est un préalable indispensable avant de procéder à la recherche des règles qui lui sont applicables. Cet énoncé permet de conduire l'étude du micro-crédit sous deux angles qui sont consacrés, d'une part, à l'analyse de la notion de

micro-crédit (Première Partie) avant d'envisager, d'autre part, sa
réglementation (Seconde Partie).

Partie I :

La notion de micro-crédit

16. - Une nouvelle conception de distribution du crédit. Le micro-crédit est une notion purement économique. Il faut remarquer qu'aucune définition exacte du micro-crédit n'a été donnée. En plus, il n'a pas acquis une reconnaissance juridique. En accord avec le sens étymologique du mot, le crédit vient de credere, croire. Il se fonde sur la confiance dans les capacités des emprunteurs de créer de la richesse. Mais faire acte de confiance dans l'homme et d'espoir dans l'avenir est difficile lorsqu'on a pris l'habitude de lier les décisions de prêt aux résultats comptables et aux garanties. Les banquiers, qui passent leur temps à prévoir les tendances du marché, à déplacer des millions d'euros et à inventer de nouveaux produits, ne manquent pas d'imagination quant au micro-crédit. Mais en raison de leur habitude d'octroi du crédit, spéculer sur la réussite future d'un petit marchand ambulant dépasse leur capacité. Face à la carence du marché, une nouvelle conception - le micro-crédit - a été créée afin de prouver que ces populations ne sont pas trop risquées si on peut adapter des méthodes d'octroi de crédit. Les méthodes d'octroi du micro-crédit privilégient les critères humains qui se ratt achent moins à l'aspect patrimonial de l'emprunteur. Le développent du micro-crédit est très rapide aussi bien en France qu'au Cambodge. Une nouvelle31 typologie du micro-crédit - celle du micro-crédit social ou du micro-crédit à la consommation contrairement à la conception classique du micro-crédit professionnel - a été inventée en France. C'est une avancée rapide, mais incontestable dans le contexte actuel du pays. Ce développement rapide du micro-crédit n'est qu'un reflet des

études sur les impacts du micro-crédit (Chapitre II). Les études sur ces impacts sont tout aussi importantes, dans la mesure où ils permettent de comprendre le rôle joué par le micro-crédit dans la société contemporaine, que les études sur la typologie du micro-crédit

(Chapitre I)

31 . Toutefois, on peut se demander s'il s'agit vraiment d'une nouvelle typologie si on remonte un petit peu à l'histoire du Crédit municipal. Certains affirment que le crédit accordé par le Crédit municipal de Paris selon ses méthodes traditionnelles est celui que l'on appelle aujourd'hui le micro-crédit social. Cette démonstration est vraie. V. infra, n° 50.

Chapitre I : La typologie du micro-crédit

17. - Le micro-crédit, notion qui n'est pas reconnue juridiquement. Bien que le microcrédit ne soit pas dans le langage juridique et n'ait pas explicitement gagné le terrain juridique, à la lecture des dispositions légales, on peut en déduire que la loi laisse une place au micro-crédit. Ce n'est qu'à partir de l'analyse des caractéristiques du micro-crédit qu'on peut logiquement dire que certaines dispositions du droit français sont consacrées au micro-crédit. Ce sont notamment les articles L. 511-6 in fine du Code monétaire et financier et 80-III de la loi du 18 janvier 2005. Ce dernier article constitue une innovation

majeure. Il s'agit de la création d'une nouvelle typologie (Section II) du micro-crédit que ne connaissaient pas les pays du Sud. Il faut rappeler que le micro-cédit a été inventé en vue de permettre aux personnes exclues du financement classique d'avoir accès au crédit tout en sachant que le recours au financement informel leur est très désavantageux puisqu'elles doivent payer des taux usuriers très élevés. Malgré sa création, la place du secteur informel demeure très grande. Le micro-crédit ne peut pas l'éliminer totalement. C'est la raison pour laquelle le micro-crédit, plus largement la micro-finance, ne peut qu'être un secteur intermédiaire entre le secteur financier formel et le secteur informel.

Toutes les caractéristiques (Section I) du microcrédit reprennent donc une grande partie des caractéristiques du financement formel, et celles du financement informel.

Section I : Les caractéristiques du micro-crédit

18. - Contenu de la section. Toutes les caractéristiques du micro-crédit permettent d'expliquer les raisons pour lesquelles les banques classiques ne s'intéressaient pas au marché du micro-crédit. Une question essentielle qui se pose est de savoir comment le micro-crédit peut surmonter les obstacles à la distribution du crédit aux personnes à qui les banques classiques n'avaient pas fait confiance. Ainsi, une étude préliminaire sur les motifs qui conduisent à une réticence des banques dans le marché du micro-crédit (§1) est indispensable afin mieux comprendre les caractéristiques du micro-crédit (§2)

§ 1. - La réticence bancaire en matière de micro-crédit

19. - La terminologie. Bien que la France soit un pays dont le niveau de bancarisation des populations est très fort, un nombre important de ces populations, cinq à six millions de personnes, soit 10% de la population, reste à l'écart du système bancaire. Elles sont exclues de la sphère bancaire. L'appellation d'exclusion bancaire du crédit est sujette à caution puisqu'il n'existe pas de « droit au crédit ». Il vaut mieux parler de l'absence ou de difficulté d'accès au crédit bancaire32. La lutte contre cette exclusion s'inscrit depuis des années dans la politique du gouvernement français. Plusieurs mesures ont été adoptées notamment le droit pour chaque individu de posséder un compte bancaire créé par la loi Aubry de 1998 et l'instauration en 1999 d'un service bancaire de base pour les plus démunis. Malgré ces efforts, l'accès au crédit des ces populations n'est pas reconnu. Un doute sur la reconnaissance du droit au crédit pourrait être émis à la lecture de l'article L. 511-10 du Code monétaire et financier qui fait référence au droit au crédit. Toutefois, la formule légale n'a vocation qu'à encourager la création des établissements de crédit à vocation sociale. Le droit au crédit n'a pas encore et ne doit pas avoir son existence juridique. Ainsi, les banques peuvent parfaitement refuser d'accorder le crédit demandé par des personnes qui ne répondent pas à leurs exigences. L'accès au crédit bancaire pour les plus démunis demeure touj ours un obstacle essentiel.

20. - Les facteurs de la réticence bancaire du micro-crédit. Comme les banques perçoivent souvent le micro-crédit comme une activité comportant un risque élevé et un faible rendement en raison de la probabilité importante de défaillance et du coût de traitement élevé des petits prêts, il existe une carence du marché. Cette carence démontre que l'accès au financement est perçu par les petites entreprises comme une contrainte majeure pour leur création et développement. Plusieurs facteurs expliquent la réticence des banques. Les obstacles qui caractérisent l'imperfection du marché sont dus à l'asymétrie d'information qui constitue une difficulté réelle pour les banques dans la sélection de leurs clients, au coût d'opération, au manque de garanties saisissables et à l'existence d'un aléa moral.

32 . Emmanuel CONSTANS, « L'exclusion bancaire et financière : outils de mesure et actions nouvelles », in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2006, p. 364.

21. - La sélection de la clientèle33. Le crédit fait intervenir un facteur de temps, le décalage entre l'octroi de crédit et son remboursement. Or, ce décalage temporel est une source d'insécurité, de toutes les difficultés pour les établissements de crédit. Pendant ce laps de temps, un certain nombre d'événements peut survenir. Des risques peuvent résulter de ce rapport de temps. En matière de crédit, il s'agit du risque d'insolvabilité de l'emprunteur et d'immobilisation de crédit auxquels les banques doivent faire face quotidiennement. Ainsi, évaluer la dignité de crédit34 d'une personne est une nécessité pour un banquier35. Cette notion désigne la confiance qui peut être accordée à un individu emprunteur ou demandeur de crédit. Il faut rappeler que l'activité de distribution du crédit est une activité commerciale. Le corollaire d'un tel trait caractéristique est la réalisation de bénéfices. Pour pouvoir faire des bénéfices au moyen de crédit, le banquier doit procéder à une analyse de la dignité de crédit avant de prendre une décision d'octroi ou de refus de crédit. Cette analyse du risque de crédit conduit la banque à ne pas contracter avec un emprunteur qui n'assumerait pas ses obligations de remboursement et donc à exclure certaines catégories de personnes jugées insolvables et trop risquées de sa sphère commerciale. Le banquier est obligé d'être rationnel en matière de distribution de crédit. En plus, face à une forte concurrence, les établissements de crédit s'efforcent de trouver des techniques qui viennent renforcer, à moindre coût, rigoureusement la sélection des candidats à l'emprunt. Depuis plus de 20 ans, en France comme dans le monde, est apparue une méthode statistique qui, à partir des caractéristiques de chaque client, établit la probabilité de sa défaillance. C'est une méthode dite « de score ou scoring ». Le crédit scoring est une méthode automatisée de sélection de la clientèle généralement fondée sur l'analyse statistique. Ce procédé permet d'informatiser l'étude des demandes de crédit, ce qui en diminue le coût36. Par sa forte capacité de traitement d'informations objectives, via l'outil informatique, il permet une sélection fine du risque de crédit. Dès lors la population qui ne satisfait pas à cette forme de sélection se verra automatiquement exclue du crédit. Cette technique est donc un facteur aggravant l'exclusion financière du micro-crédit.

Il est essentiel de préciser que la méthode de scoring est une méthode statistique qui se base sur le traitement des informations. Elle permet une appréciation objective. Le facteur d'appréciation humain a assez largement disparu. La prise en compte de l'individu

33. Nicola EBER, Sélection de clientèle et exclusion bancaire, Rev. Eco. Fin, 2000, p. 79-96.

34. Notion d'origine allemande, kredit würdugkeit.

35. A. SALGUEIRO, Les modes d 'évaluation de la dignité de crédit d 'un emprunteur, thèse Université d 'Auvergne, Clermont-Ferrand I, 2004.

36. Dominique MONERA, « le crédit scoring et le risque client », Banque, 1991, p. 801.

lui-même s'efface derrière les critères retenus. L'indisponibilité des informations est donc incompatible avec cette méthode. Le manque d'information peut conduire facilement les établissements de crédit à écarter un client potentiel ou non.

22. - 1. L 'asymétrie d'informations. Le scoring ne peut pas être effectué en l'absence d'informations sur le client. Avant d'accorder le crédit, le banquier a besoin de s'informer sur un client potentiel et sur son projet d'investissement afin d'éviter d'accorder son capital à des personnes peu sérieuses ou aux projets peu rentables. Les informations sont disponibles sans trop de coûts pour des clients avec des activités formelles et organisées, inscrites au registre du commerce et des sociétés ou payant régulièrement des impôts. En revanche, la plupart des entrepreneurs du secteur informel ainsi que de nombreux agriculteurs dans les pays en voie de développement ne se trouvent pas dans cette situation, et il est presque impossible pour le banquier de s'informer sans beaucoup de frais. Cela exclut d'office certaines catégories de population d'un accès au crédit.

Selon la théorie de l'asymétrie d'informations, le rationnement du crédit est forcément lié au problème d'accès inégal à l'information tant par le créditeur que par le débiteur. Au Cambodge où le secteur agricole est dominant, les risques auxquels les agriculteurs doivent faire face sont souvent très importants. Il est assez coûteux pour les banquiers de trouver des informations qu'il lui faut pour consentir un prêt à l'agriculteur. Le coût élevé de l'opération est un deuxième obstacle qui est étroitement lié au problème d'asymétrie d'informations. En effet, les frais fixés sont les mêmes pour la banque, quel que soit le montant du prêt demandé. Les petits prêts représentent donc des projets peu rentables pour la banque.

23. - L'atout principal du secteur informel. D'ailleurs, il est intéressant ici d'observer que les opérateurs de crédits informels arrivent mieux à contourner le problème d'informations et de risques que les acteurs formels. L'activité des usuriers se trouve souvent dans les zones géographiquement bien localisées où l'information sur le client potentiel est facile à obtenir grâce à la proximité. Il ne s'agit pas d'un banquier éloigné du terrain, mais plutôt de quelqu'un qui vit dans le milieu, connaissant parfaitement les clients, et devant lequel il est difficile de cacher des informations. Ils peuvent donc évaluer les risques et fixer le taux d'intérêt en fonction de ces risques.

On peut dire finalement que l'asymétrie d'informations conduit souvent les

banquiers à surestimer le risque lié au crédit. Par conséquent, les banquiers sont souvent amenés à exiger une garantie. L'accès au financement devient alors plus compliqué pour les créateurs n'ayant pas de garanties à fournir.

24. - 2. L 'absence de garanties. Les méthodes utilisées par les banquiers sont nécessaires, mais elles demeurent insuffisantes. Sachant que le crédit est un acte de confiance et fait intervenir un rapport de temps, un certain nombre d'événements peuvent se produire et venir fausser l'analyse au départ. Ainsi, les banquiers exigent souvent les garanties de l'emprunteur, garanties qui peuvent prendre plusieurs formes. Il est évident qu'il peut y avoir des crédits en blanc à condition que la proximité existant entre le banquier et son client soit déterminante pour construire la confiance. À défaut d'une telle relation de proximité relationnelle s'alimentant de la proximité géographique, sociale et mentale, le banquier doit être rationnel en exigeant des garanties afin d'éviter que la confiance ne dégénère en confiance aveugle, ne bascule vers la crédulité. Le crédit est donc inégalitaire puisqu'il met en balance le risque et la garantie. Plus le risque est grand, plus les garanties doivent être importantes. Les personnes modestes auxquelles l'octroi d'un crédit est considéré comme risqué ne peuvent pas, par définition, offrir de garantie et se trouvent donc exclues de l'accès au crédit. Ainsi, les entrepreneurs informels sont défavorisés puisqu'ils n'ont souvent pas de local fixe ou des équipements de valeurs importantes saisissables en cas de défaillance. Sur ce point, l'usurier peut parfaitement assurer le recouvrement de ses créances en liant le prêt à des paiements en nature, telle que la culture de rente. Le secteur bancaire formel aurait du mal à avoir recours à cette technique de garantie. L'absence de garantie saisissable est donc une cause d'exclusion du crédit. Elle peut, en plus, aggraver l'aléa moral que les banquiers ont sur les demandeurs de crédit.

25. - L'aléa moral37. Le problème de fond se trouve dans les conditions de l'aléa moral qui caractérise les rapports économiques entre les agents économiques. Les intérêts des agents économiques pourraient ne pas être dans le même sens. Le prêteur a intérêt à ce que le prêt soit remboursé, alors qu'il est de l'intérêt de l'emprunteur de ne pas rembourser le crédit dans certains cas. Cette tentation, appelée l'aléa moral, explique la réticence du banquier à prêter de l'argent à un entrepreneur sans garanties saisissables ou à quelqu'un qui habite loin de la banque. L'implantation des banques peut également constituer une

37. David LEEGE, Dans quelle mesure la microfinance et la formation agricole peuvent-elles contribuer à la réduction de la pauvreté dans une région défavorisée du Cambodge, thèse université de Montpellier I, 2003.

cause d'exclusion indirecte. Il s'agit d'une sélection indirecte, ce qui défavorise encore les populations qui habitent dans le milieu rural.

26. - L'environnement juridique. Enfin, la réticence bancaire du micro-crédit peut trouver également sa cause dans l'environnement juridique existant. Pour les banquiers, un certain nombre d'obligations leur est imposé notamment l'obligation de respecter le ratio de solvabilité de 8%. Cette obligation est indiscutable mais elle conduit à décourager les banquiers de s'impliquer dans le domaine du micro-crédit. Ainsi, l'évaluation du risque de crédit a une incidence directe sur le ratio bancaire. Plus le risque est élevé, plus ils doivent veiller à augmenter les fonds propres afin de respecter le ratio de solvabilité, ce qui n'est pas sans incidence sur la rentabilité des établissements de crédit. En plus, il faut noter que les procédures de rétablissement personnel qui viennent d'être récemment définies, peuvent aussi amener les banques à se montrer plus restrictives dans la distribution de crédit en renforçant leurs critères de sélection. On y gagnera dans la prévention et le traitement du surendettement, mais l'accès au crédit pour les populations à risque élevé sera encore plus difficile, même pour celles d'entre elles qui peuvent faire preuve d'une certaine solvabilité. En effet, l'inscription au fichier des incidents de remboursements des crédits aux particuliers (FICP) en est également une source. En principe, les personnes inscrites au FICP ne sont exclues du crédit que de facto car, juridiquement, cette inscription ne vaut pas interdiction de leur prêter et les établissements de crédit n'ont, par ailleurs, pas d'obligation de consulter le FICP avant d'accorder un crédit38. La réticence de la banque en matière d'accès au crédit tient donc aussi au risque de surendettement qui tend souvent à être surestimé39.

27. - L'enjeu du micro-crédit. Ces observations permettent de mieux appréhender la situation des populations les plus défavorisées face au crédit et à comprendre leur exclusion de tout recours à des financements formels. Une telle exclusion liée à l'impossibilité de satisfaire les critères de stabilité et d'ancienneté requis de plus en plus dans le système de sélection. Il faut noter qu'actuellement en France, moins du quart des créateurs d'entreprise bénéficient d'un concours bancaire. Toutefois, les populations écartées expriment les besoins qu'il n'est pas illégitime de financer des projets valorisant la personne humaine, favorisant le confort familial ou améliorant la vie quotidienne et qui

38. Emmanuel CONSTAN, préc., p. 364.

39. Emanuel CONSTAN, préc., p. 370.

méritent d'être anticipés. En outre, cette situation d'exclusion n'est pas acceptable en terme d'équité sociale40. L'accès au crédit est une source de production, de consommation, voire de constitution de patrimoine. A ce titre, le problème n'est pas seulement humain, il y a aussi un enjeu économique. Ainsi, trouver des solutions de financement pour tous ceux qui n'y ont pas accès, et en même temps les adapter pour tenir compte de la spécificité de leur situation doit s'inscrire désormais comme un objectif prioritaire. Pour faire face à ce problème et débloquer la situation d'exclusion de l'accès au crédit, un nouveau concept de crédit - le micro-crédit - a été créé. Il s'agit donc de comprendre les caractéristiques de cette nouvelle conception de la distribution de crédit. Celles-ci permettent de comprendre pourquoi le micro-crédit peut lever les obstacles relatifs à l'accès au crédit des personnes défavorisées, obstacles sur lesquels les banques traditionnelles se fondent pour justifier le rejet du crédit demandé.

§ 2. - Les caractéristiques du micro-crédit

28. - Les caractéristiques communes. Il existe deux modèles de micro-crédit : l'un vaut pour les pays industrialisés et est centré sur la création d'entreprise, avec des prêts individuels à taux d'intérêt bas, voire bonifié par l'Etat compris entre 2000 et 15.000 euros ; l'autre, en vigueur dans les pays du Sud, met en place des crédits de moindre montant, plus courts et plus chers, souvent collectifs et servant la plupart de temps à financer des activités existantes. Même si les méthodes doivent être adaptées chaque fois au contexte local, les principes restent toujours les mêmes. Les caractéristiques principales du micro-crédit sont donc communes. Monsieur Jean-Michel SERVET a retenu trois critères. Le micro-crédit est caractérisé aussi bien par une relation de proximité, sa population cible que par le montant du crédit. Toutefois, le droit cambodgien met l'accent principalement sur la population cible et la destination du crédit. À la différence du droit français, il n'a pas plafonné le montant et la durée du micro-crédit. Il faut comprendre que c'est la technique de proximité qui montre l'originalité du micro-crédit.

29. - La clientèle. Le micro-crédit est né dans la problématique de l'absence d'accès au crédit des personnes défavorisées qui sont normalement exclues de la sphère commerciale

40 . Michel LECOMTE, « Perspective nouvelle pour les exclus du crédit », in Le Rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2005, p. 419-426.

des banques classiques. Il ne s'agit donc pas de viser une clientèle qui peut normalement avoir accès aux banques, ni celle qui, à un moment donné, se trouve dans une situation de détresse qui ne lui permet pas de s'engager dans des activités économiques. Au Cambodge, et généralement dans les pays en développement, le micro-crédit est ciblé sur « les pauvres41 actifs », alors qu'en France, comme les autres pays industriels, il est ciblé sur les chômeurs, les Rmistes, qui souhaitent se réinsérer dans l'économie.

29-1. - La clientèle du micro-crédit en droit français. L'article L.51 1-6 alinéa 5 du Code monétaire et financier traite des « associations sans but lucratif faisant des prêts pour la création et le développement d'entreprises par des chômeurs ou titulaires des minima sociaux... ». Cette disposition consacre l'utilité du micro-crédit par le droit français. Les populations visées par les produits de micro-crédit sont donc les bénéficiaires des minima sociaux, les demandeurs d'emploi42. Cette reconnaissance résulte de la constatation suivante. La montée de chômage encourage le recours à des micro-initiatives pour créer sa propre activité. La question du financement des activités se pose alors. La lutte contre la précarité économique passe de nos jours par l'octroi de crédits à des petites entreprises en création. Il s'agit de considérer le chômeur non plus comme « un inutile du monde43 », mais comme une personne susceptible de posséder un projet professionnel, projet de vie pouvant être mis en oeuvre par la création de son entreprise. De nombreuses initiatives à instrumenter le crédit pour lutter contre le chômage voient le jour. Le micro-crédit vise donc à promouvoir l'esprit d'entreprise et permet à ces clients de sortir d'une trappe d'inactivité, conséquence de l'Etat providence. Ainsi, pour ces personnes, le micro-crédit leur permet de retrouver sa citoyenneté économique. Partant de cette idée, l'ex-président de la République a récemment, lors d'une table ronde en février 2006, souligné le rôle du micro-crédit « qui constitue une voie prometteuse, et un instrument essentiel pour permettre aux personnes sans emploi de prendre en main leur destin, en se réinsérant sur le marché du travail ou en créant leur propre activité ». Le micro-crédit fait donc partie de la

41 . Mais comment définir la pauvreté ? Quels sont les indicateurs de la pauvreté ? Ce point dépasse notre connaissance. On peut tout simplement dire un mot que la pauvreté est généralement définie par rapport aux critères de revenus. La Banque mondiale retient le seuil de 30% de PIB.

42 . La clientèle de l'ADIE composée aux trois quarts de chômeurs de longue durée et d'allocataires du revenu minimum d'insertion, se distingue par une volonté de s'en sortir. Près de 15% sont quasiment illettrés ou savent à peine lire et écrire, mais 21% ont fait des études universitaires. Source : Maria NOWAK, « Le micro-crédit en France et en Europe », in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2003-2004, p. 430.

43. David VALLAT, « La finance solidaire : un champ d'application varié », in Le Rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 1998, p. 499-519.

politique de lutte contre le chômage. Désormais, il s'inscrit dans la politique d'insertion sociale. La clientèle visée n'est plus simplement des porteurs de petits projets professionnels, mais également ceux de projets personnels d'insertion sociale. C'est une avancée de la loi Borloo du 18 janvier 2005 qui a créé le fameux FCS. Il a été créé par l'article 80-III de cette loi afin de « garantir, à des fins sociales, des prêts à des personnes physiques ou morales et des prêts à des chômeurs ou titulaires de minima sociaux créant leur entreprise ». L'explication de cet article sera postérieurement reprise44.

29-2. - La clientèle du micro-crédit en droit cambodgien. Revenons à la clientèle du micro-crédit en droit cambodgien. L'article 74 alinéa 3 de la loi bancaire de 1999 prévoit que « les entités qui pratiquent les opérations de banque en vue notamment de promouvoir l'intermédiation bancaire dans les secteurs de l'agriculture, de l'artisanat, du petit commerce et des services aux particuliers... » Toutefois, l'article 2 du Prakas (règlement) n°7-01-49 Prorkror du 25 février 2002 sur l'agrément et l'enregistrement des institutions de micro-finance, pris en son application, dispose que « la microfinance signifie la distribution des services financiers notamment le crédit et les épargnes aux familles pauvres, familles ayant des revenus modestes et aux petites entreprises ». Deux remarques peuvent être faites. D'abord, l'article de base vise uniquement les particuliers, alors que le texte d'application vise également des petites entreprises. On peut donc s'interroger sur la légalité de ce Prakas. Mais jusqu'alors, personne n'en parlait. Toutefois, conformément à des explications énoncées à propos de la clientèle du micro-crédit en droit français, il est souhaitable de retenir la disposition de ce Prarkas. L'article 74 alinéa 3 de cette loi devra être modifiée pour rendre légitime ce Prarkas. Ensuite, les clients du microcrédit sont, selon ces dispositions, les pauvres. Certains contestent l'opportunité de prêter à des pauvres qui ne répondent pas aux critères ordinaires de solvabilité. Le coeur du débat porte sur la capacité des plus pauvres à rembourser leurs prêts pour éviter de nouveaux cycles de paupérisation. C'est la raison pour laquelle des opérateurs du micro-crédit ne s'intéressent pas aux pauvres les plus pauvres, ce qui n'est pas sans incidence sur l'effet de levier du micro-crédit45. Les critiques sur les clients cibles résultent des constatations suivant lesquelles les pauvres ne peuvent pas échapper à la pauvreté par l'emprunt et cela risque même d'aggraver leur sort. Ce sont les services sociaux qui sont les mieux placés pour répondre aux besoins réels de cette population. Mais, aucun service social n'avait été

44. V. infra, n° 52.

45. V. infra, n° 70-71.

mis en place. En plus, les études montrent que le taux de remboursement des pauvres est aussi bon ou meilleur que celui des emprunteurs plus prospères. Les tenants de cette thèse veulent invoquer que le niveau de revenus des bénéficiaires n'est pas une garantie de solvabilité, ce qui rejoint l'idée des tenants de la thèse contraire que c'est le critère de compétence qui doit être privilégié et non pas nécessairement le critère de pauvreté. Il faut rappeler que la clientèle du micro-crédit est dans la majorité des femmes.

30. - La destination du crédit. Il s'agit de crédit de dépannage ou de projet. Originairement, le micro-crédit est accordé, dans les pays en développement, aux pauvres qui veulent entreprendre « une activité génératrice de revenus ». Tandis qu'en France, les bénéficiaires du micro-crédit créent des entreprises nouvelles, ce qui nécessite un minimum de fonds propres et un service d'appui pour pénétrer dans un univers particulièrement complexe. C'est la raison pour laquelle la politique de renforcement des Fonds qui contribuent à l'octroi des fonds propres aux créateurs d'entreprise a été renforcée. Cette tentation va être abordée plus précisément plus loin quand on aborde l'étude sur le micro-crédit professionnel. La finalité du prêt est donc bien précisée par la loi. Celle-ci constitue un critère permettant de retenir une qualification du crédit affecté. C'est une affectation prévue par la loi. Il s'agit de prêt ayant pour finalité de créer ou développer une entreprise (L.51 1-6 al. 5 C. monét. fin.) ou à des fins sociaux (art. 80-III de la loi du 18 janvier 2005). Le micro-crédit peut donc être, soit un crédit professionnel, soit un crédit à la consommation. Si l'on peut retenir facilement le caractère professionnel du prêt accordé selon l'article L. 511-6 alinéa 5 du Code monétaire et financier, quelle est la qualification du prêt accordé conformément à l'article 80-III qui prévoit que « garantir, à des fins sociales, des prêts à des personnes physiques ou morales et des prêts à des chômeurs ou titulaires de minima sociaux créant leur entreprise » ?

30-1. - Certains pensent qu'il s'agit d'un crédit à la consommation. Cette qualification a été retenue pour refuser le droit à la Banque postale de distribuer le micro-crédit social prévu par l'article 80-III. Celle-ci ne pose pas de difficulté lorsqu'il s'agit de micro-crédit social accordé à des personnes physiques. En revanche, on peut se demander s'il est touj ours convenable de retenir cette qualification lorsque le micro-crédit social est accordé à des personnes morales qui sont en effet des associations ou sociétés financières qui interviennent dans le domaine du micro-crédit. C'est une question qui a été très

controversée en doctrine et en jurisprudence et soulevée à propos de la détermination du champ d'application du Code de la consommation. L'article 3, alinéa 3 de loi du 10 janvier 1978, devenu l'article L. 311-3-3° du Code de la consommation exclut du champ d'application de cette loi les prêts « destinés à financer les besoins d'une activité professionnelle ». Selon cette disposition, la qualification du crédit professionnel ou à la consommation dépend de la destination du crédit46. La jurisprudence s'est positionnée à plusieurs reprises en faveur de cette interprétation. La qualification est déduite du but poursuivi. Le caractère professionnel d'une opération de crédit ne dépend pas de la qualité de l'emprunteur mais de la destination de cette opération47. Ainsi, le problème s'articule autour de la question de savoir ce que recouvre une activité professionnelle ou si l'association à but non lucratif peut exercer une activité professionnelle48. Le débat est controversé du fait de l'absence de définition légale de la profession. Deux thèses s'affrontent. La première thèse pense que l'activité professionnelle est entendue comme une activité lucrative49, ce qui exclut en principe celle d'une association. L'activité professionnelle suppose donc un but intéressé c'est-à-dire une rémunération. Certaines décisions des juges du fond ont été prononcées en ce sens50. Une autre thèse estime que le but lucratif ou non ne doit pas être pris en compte pour définir une activité professionnelle51. Selon cette thèse, l'association à but non lucratif peut parfaitement exercer une activité professionnelle. Pour lever cette ambiguïté, la Cour de cassation a décidé qu'une association est exclue du bénéfice des dispositions du droit de la consommation non parce qu'elle est personne morale, mais parce qu'elle exerce une activité professionnelle52. Cette jurisprudence va dans le sens de la dernière thèse. Les

46 . Civ 1er, 4 mai 1999 : CCC, 1999, comm. n° 165, obs. G. RAYMOND ; Civ 1er, 18 décembre 2001 : CCC, 2002, n° 100, obs. G. RAYMOND ; Civ 1er, 22 mai 2002 : CCC, 2002, comm. n° 147, obs. G. RAYMOND. 47. Yannick DAGORNE-LABBE, « La détermination du caractère professionnel du crédit à la consommation », Petites Affiches, 2004, n° 126, p. 20 ; Civ 1er, 8 juillet 1997 : RD bancaire et financier, n° 62, p. 163.

48 . Janick ROCHE-DAHAN, « Le domaine d'application des lois Scrivener », RTD Com. 1996, n° 49, p. 20- 21.

49. En ce sens : Yves GUYON, Droit des affaires, Economica, 12e édition, 2003, n° 72, p. 67 ; Barthélemy MERCADAL, Droit commercial, Francis Lefebvre, 15e édition, 2006, n° 11200, p. 223 ; G. Riper et R. Roblot, Traité de droit commercial, sous la direction de Michel GERMIN, LGDJ, 1 8e édition, 2001, n° 118, p.1 05.

50 . CA Paris, 22 octobre 1991 : CCC, 1992, n° 63, note G. RAYMOND (à propos d'une activité politique) ; CA Paris, 5 juillet 1991, CCC, 1992, n° 950, note G. RAYMOND.

51. En ce sens : J. CALAIS-AULOY et F. STENINMETZ, Droit de la consommation, Dalloz, 2006, 7e édition, n° 4.

52 . Civ 1er , 23 mars 1999 : CCC, 1999, comm. 166, obs. G. RAYMOND ; D. 2000, somm. n° 4, p. 39, note JP Pizzio. Dans le même sens V. Civ 1er, 10 juin 1997 : CCC, 1997, n° 157, note G. RAYMONDE « attendu, cependant, que sont exclus des dispositions applicables en matière de crédit à la consommation, les prêts qui sont destinés à financier les besoins d'une activité professionnelle ; qu'en s'abstenant de préciser en quoi consistait l'activité de l'association, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son

juges du fond ne peuvent donc pas s'en tenir uniquement à l'absence de but lucratif de l'association pour en conclure que l'activité qu'elle exerce n'est pas de nature professionnelle. Cette décision mérite d'être félicitée puisqu'elle est conforme à la finalité recherchée par le droit de la consommation. En plus, l'activité professionnelle n'a pas besoin d'être intéressée. La question qui se pose ensuite est de savoir à partir de quel moment, l'activité d'une association peut être qualifiée d'activité professionnelle. La Cour de cassation a décidé dans la même décision du 23 mars 1999 que l'association dont le statut prévoit la rémunération de ses activités doit être considérée comme un professionnel au regard des règles du crédit à la consommation. Elle retient uniquement le critère de la rémunération. On peut se demander s'il existe d'autres critères. En effet, une profession implique seulement une certaine organisation et une certaine expérience. Elle implique donc une habitude.

30-2. - Cette analyse permet de comprendre que le micro-crédit social accordé à des personnes morales visées ne peut pas être qualifié de crédit à la consommation. En effet, les personnes morales prévues par l'article 80-III sont des associations ou des sociétés financières53 qui interviennent dans le domaine du micro-crédit. Il vise donc les personnes morales dont l'objet est de permettre l'insertion de personnes en situation d'exclusion financière. Selon cette disposition, le législateur français veut développer le micro-crédit au travers du partenariat entre les banques et ces opérateurs du micro-crédit. Cette disposition renforce donc la volonté du législateur inscrite dans l'article 19 de la loi NRE du 15 mai 2001 qui permet à l'association du micro-crédit de pouvoir emprunter pour reprêter à ses clients. Il vise donc à encourager les banques à accorder les prêts à ces associations. Ces prêts leur permettent de développer leur activité dans le domaine de l'insertion des exclus financiers. Elles sont des professionnels du micro-crédit puisque leur activité est organisée et habituelle. En plus, elle est rémunérée par l'intérêt du crédit. Ainsi, on peut dire avec clarté que le micro-crédit social a une double nature juridique : un crédit à des fins professionnels lorsqu'il est accordé à une personne morale ou un crédit à la consommation dès lors qu'il est accordé à une personne physique. Cet article constitue un exemple qui montre l'importance de la qualité de l'emprunteur dans la qualification du crédit bien qu'en droit positif elle n'ait pas été prise en compte.

contrôle ».

53. Le Fonds France Active et La Nouvelle Economie Fraternelle et La Caisse solidaire du Nord-Pas-deCalais sont des sociétés financières qui exercent des activités de micro-crédit.

31. - Le montant et la durée de crédit. Le montant constitue également l'une des caractéristiques du micro-crédit. Il s'agit d'un crédit d'un petit montant. Ce petit montant de crédit54 est une cause de non implication de la banque classique. L'importance est de déterminer ce qu'est un « petit montant ». Si dans les pays en développement, il s'agit d'un prêt d'une vingtaine d'euros, dans les pays industriels, le montant de prêt peut s'élever à des milliers euros. A la différence du droit français, le droit cambodgien n'a pas plafonné le montant du micro-crédit qui peut être accordé. L'article 6 alinéa 5 du décret n° 2002-652 du 30 avril 2002 portant application du 5° de l'article L.51 1-6 du Code monétaire et financier relatif aux associations habilitées à faire certaines opérations de prêts plafonne le montant de prêt à 6 000 euros par participant à un projet, sans pouvoir excéder 10 000 euros pour une même entreprise. En droit cambodgien, malgré l'absence de plafond, on peut dire facilement que le montant du prêt est petit puisqu'il est accordé à une famille pauvre, de revenu modeste ou à une petite entreprise. Il est clair qu'au Cambodge, les sommes prêtées sont très faibles55, à l'image des revenus des habitants, tandis qu'en France le montant du prêt, en pratique, de 2.500 euros, est plus élevé, mais le rapport avec les produits intérieurs bruts (PIB) par tête de 22.000 euros est du même ordre56. En ce qui concerne le délai du prêt, il est fixé à cinq ans maximum (prêt de l'article L.51 1-6 al. 5 C. monét. fin) et entre deux à quatre ans pour le prêt de l'article 80-III. Aucun délai n'est prévu en droit cambodgien. L'absence de plafonnement du montant et du délai ne facilite pas la distinction entre le micro-crédit et les prêts bancaires.

Il ne fait aucun doute que le montant du crédit est l'une des caractéristiques du micro-crédit. Toutefois, il ne s'agit pas de critère décisif puisque personne ne pourrait contester que les banques classiques puissent accorder des crédits, également d'un très petit montant, à leurs clients. En effet, ce qui fait que le micro-crédit a connu depuis des années un succès considérable à tel point qu'on ne peut nier ou ignorer son rôle très grand dans l'économie, ce sont des techniques de crédit entreprises par les opérateurs du microcrédit, techniques qui jouent plutôt sur la mentalité, la capacité des clients, que de privilégier des critères statistiques que pratiquaient les banques traditionnelles.

32. - Les techniques de garantie du micro-crédit. C'est finalement sur ce point que

54. Le prêt accordé par la Grameen Bank est mesuré d'un montant de 100 dollars en moyenne et il peut aller jusqu'à 10 dollars. V. Jaques ATTALI, préc., p. 155.

55. Le montant de prêt accordé au groupe d'emprunteurs par l'ACLEDA peut atteindre un plafond de 400 dollars sur une période de 3 à 12 mois.

56. Les chiffres sont cités par Maria NOWAK dans son manuel de « on ne prête pas que (aux) riches ».

l'étude du micro-crédit paraît plus importante puisqu'il permet de mieux comprendre la réponse à la question précédemment posée, question qui vise à savoir pourquoi le microcrédit peut surmonter avec succès les obstacles liées à la décision d'octroi de crédit. En effet, l'opérateur de micro-crédit gère le risque de crédit non par la pratique de sûreté réelle mais par la création de groupe solidaire. Il s'agit d'une technique de « crédit de groupe solidaire ». Le critère de proximité est pris en compte pour l'évaluation de crédit. Enfin, le succès du micro-crédit est lié à la technique qui donne des motivations à l'emprunteur de rembourser les crédits, ce qui montre que la probabilité de remboursement de crédit par les clients des opérateurs du micro-crédit est beaucoup plus grande que celle des clients de banques classiques. C'est une technique dite de « crédit progressif ».

33. - 1. La technique de crédit de groupe solidaire. Cette technique propose de substituer des garanties morales à des garanties matérielles. La caractéristique principale et la plus importante du crédit de groupe solidaire est la caution solidaire. C'est une technique de « peer monitoring ». Pour pouvoir emprunter, les emprunteurs doivent se constituer en groupe. Au Bengladesh, les femmes doivent se constituer en groupe de cinq personnes, représentatif des cinq doigts de la maine. Ce groupe solidaire présente trois avantages incontestables.

Il s'agit, tout d'abord, de permettre de réduire le problème de l'asymétrie d'information pour les prêteurs. Pour remédier à ce problème d'asymétrie d'information, le secteur bancaire exige un bon antécédent en matière de crédit, un revenu régulier souvent avec une clause de domiciliation de revenus et une caution ou une sûreté réelle. Mais, ces conditions ne peuvent pas être utilisées avec les emprunteurs visés par le micro-crédit. Ainsi, par le biais de groupe, on parvient à surmonter les difficultés liées à l'information puisque les membres du groupe se connaissent bien, et souvent ils ont tendance à exclure du groupe la personne qui ne se trouve pas dans leur milieu. Une préférence est donnée aux gens dans la communauté57.

Ensuite, le groupe solidaire permet de réduire les coûts d'opération en remplaçant les petits crédits par un crédit unique à un groupe plus large. Il permet d'assurer le suivi plus rapproché qui ne serait pas possible en cas de prêt individuel. Ce suivi est assuré par les membres de groupe eux-mêmes puisque la défaillance de chacun d'entre eux entraîne

57. Hervé ERNARD, Philippe DUQUAIRE, « L'impact des opérations de microcrédit développées par Action Nord Sud (ANS) à Battambang, Cambodge », in Exclusion et liens financiers/Rapport du Centre Walras 1999-2000, Economica, 1999, p. 116.

leur solidarité. En plus, ils vont perdre l'avantage de technique de crédit progressif.

Enfin, elle permet de réduire l'obstacle de la garantie classique pour les petits emprunteurs qui n'ont pas d'actifs et donc de leur permettre de prendre part dans les services financiers. C'est la pression exercée par les membres du groupe qui sert de garantie et de mécanisme de contrôle des comportements opportunistes des membres du groupe. On peut citer l'expérience de la Grameen Bank pour servir de référence. Dans le crédit de groupe solidaire pratiqué par cette dernière, l'emprunt d'un membre doit être approuvé par les autres qui se portent solidairement caution. Le groupe constitue une pression sociale très importante. Un emprunteur défaillant va être interdit par exemple de participer à une fête religieuse. C'est une forme de sanction religieuse qui se montre efficace dans un pays où la religion est très importante. Le crédit de groupe solidaire propose donc de substituer des garanties morales à des garanties matérielles.

33-1. - La transposition de technique du crédit de groupe solidaire : Le modèle du micro-crédit. Il est à noter que ce modèle de crédit de groupe solidaire a été importé dans les autres pays. Au Cambodge, cette technique est pratiquée par l'ensemble des opérateurs de micro-crédit. On peut dire facilement que dans les pays en voies de développement, cette méthode de solidarité de groupe est tout à fait possible. L'ACLEDA pratique le prêt solidaire en utilisant la méthodologie de la garantie du groupe de 3 à 10 personnes. Mais, il faut reconnaître que le sentiment d'appartenance en milieu urbain commence à se détériorer fortement, de sorte que la pratique de groupe solidaire s'avère de plus en plus difficile. D'ailleurs, elle est difficile à appliquer dans les sociétés industrielles à cause de la dispersion de la clientèle et de la rupture des solidarités traditionnelles. C'est la raison pour laquelle le droit positif admet deux formes du micro-crédit : le micro-crédit solidaire et le micro-crédit individuel. En France, la densité des clients est faible, la solidarité avait été irrémédiablement perdue avec l'urbanisation et il n'était guère possible, à l'exception, selon Madame Maria NOWAK, des communautés de femmes africaines ou des gens de voyages, qui avaient préservé le lien social, d'utiliser la méthode de groupe. Devant l'impossibilité de créer des groupes solidaires, l'ADIE pratique l'approche individuelle avec la caution de l'entourage pour la moitié au moins du montant du crédit solidaire. Cette caution pratiquée par l'ADIE a un double rôle incontestable58. D'une part, elle permet de vérifier que les emprunteurs sont honorablement connus dans leur milieu et que des amis

58. Maria NOWAK, On ne prête pas (que) aux riches, préc., p. 147.

ou voisins sont prêts, le cas échéant, à les aider dans la réalisation de leur projet. D'autre part, elle sert de moyen de pression en cas de non remboursement de crédit. En effet, en cas de défaillance, les procédures de recouvrement sont très rares puisque du fait des faibles montants des prêts, chercher à se faire rembourser peut occasionner des coûts équivalents à la somme due59. C'est la raison pour laquelle l'ADIE pratique également une sorte de mutualité entre les emprunteurs puisqu'elle prélève un montant de 5% du montant de chaque prêt pour la mutualité des clients60. C'est une cotisation au Fonds de solidarité de l'ADIE. Cette pratique est également exercée par l'ACLEDA. On pourrait imaginer que cela illustre bien la possibilité de solidarité de emprunteurs. Toutefois, cela n'est pas une approche qui a été pratiquée au Bengladesh. Bien que la mutualité soit possible, l'approche exercée en France demeure touj ours une approche individuelle. Tout ceci nous conduit à penser logiquement que l'idée du micro-crédit est universelle, mais aucun modèle du micro-crédit n'est universel. Le modèle du micro-crédit doit s'adapter au contexte du pays. C'est la raison pour laquelle on peut se prononcer clairement que reproduire la Grameen Bank ne consiste pas à imiter le modèle, mais de pouvoir l'adapter à l'environnement social et culturel du pays. Un exemple intéressant est le modèle du micro-crédit en Europe. Bien que l'approche sociale et culturelle des pays européens ne soit pas très loin l'une de l'autre, il n'y a pas de modèle européen unique de micro-crédit61. La seule chose qui est la même c'est la pratique de l'accompagnement du micro-crédit.

33-2. - Les critiques de la pratique du groupe solidaire. Malgré ces avantages considérables, la pratique du groupe solidaire n'est pas à l'abri de toutes les critiques62. L'idée de groupe solidaire est idéale, mais la pratique montre que la chose n'est pas aussi simple. Dès lors que le groupe est constitué de manière artificielle, la pression sociale ne peut plus jouer son rôle. Les risques sont généralement plus marqués en milieu urbain. Il faut donc nécessairement différencier les approches selon que l'on est en milieu urbain ou rural. C'est la pratique au Cambodge où les opérateurs ont été amenés à adopter des démarches différentes. En milieu urbain, il n'y a pas suffisamment de sentiment

59. David VALLAT, « La finance solidaire : un champ d'application varié », in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 1998, p. 510.

60 . Ce montant de 5% constitue une contribution symbolique des emprunteurs au Fonds de garantie pour les structures d'insertion par l'économique. Ce fonds est destiné à garantir les micro-prêts accordés.

61 . Maria NOWAK, « Le modèle européen de micro-crédit », in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2006, p. 417-421.

62 . I. GUERIN, « Microfinance dans les pays du Sud : quelle comptabilité entre solidarité et pérennité ? », Rev. Eco. Fin, 2001, p. 148-149.

d'appartenance et de solidarité locale. Les opérateurs ont du mal à impliquer les emprunteurs dans la gestion du dispositif, ceux-ci évoluent plutôt vers une logique bancaire. En revanche, en milieu rural, l'approche mutualiste reste pour l'instant privilégiée. La cohésion sociale est très forte. S'il y a place pour l'honneur et le souci de préserver la dignité, s'appuyer sur la pression sociale est possible. Toutefois, en l'absence de sentiment d'appartenance à une communauté, il est difficile de s'appuyer sur cette pression sociale. C'est également l'interprétation des notions de « solidarité » et « de caution solidaire » qui provoque des malentendus. Il arrive que les membres qui se portent caution comprennent mal leur rôle. Il pourrait arriver qu'ils comprennent que le remboursement des défaillants incombe uniquement au chef du groupe.

Malgré ces critiques, les études montrent que le succès du micro-crédit est très grand. Pour éviter le risque de l'absence d'appartenance à une communauté, une autre technique qui peut également expliquer le succès du micro-crédit est la technique de garantie de crédit qui se base sur la proximité.

33-3. - La relation de proximité : substitution à la garantie matérielle. Cette technique s'inspire de celle utilisée dans le secteur du financement informel. C'est pour cela que la formule est souple et qu'elle peut être adaptée aux besoins. La principale caractéristique du micro-crédit est la proximité. En pratique, l'absence de garantie est le principal facteur qui freine l'accès des ménages pauvres et des micro-entrepreneurs au financement par le secteur formel. La proximité63, l'un des piliers du micro-crédit, fait naître une confiance qui remplace le manque de garantie réelle. La proximité est une notion qui est fondée sur les relations qui sont déterminées par l'appartenance à un même espace qui peut être non seulement géographique, mais aussi éthique, religieux ou professionnel. Elle peut être définie socialement comme la confiance, la réputation, la crédibilité, la garantie64. On sait très bien que la confiance est une notion même du crédit. Elle est essentielle dans les rapports des acteurs de crédit. Elle joue également un très grand rôle dans le rapport entre les acteurs du micro-crédit. Elle entretient une relation dialectique avec la proximité65.

Dans ce rapport de proximité, la personnalité de l'emprunteur est très importante. L'évaluation du crédit dans le système de micro-crédit est basée sur la personnalité par

63 . Pour une étude d'ensemble : V. OULD NEMINE Ahmed, Le rôle des micro-crédits dans le financement du développement, thèse de l'Université de Nice, 15 décembre 2004.

64. P. HUGON, « incertitude et financement de proximité », Communication en colloque de Lyon, décembre 1993, p. 17.

65. J-M SERVET, « le financement de proximité », Communication au colloque de Lyon, décembre 1993.

opposition à celle dans le cadre d'activité bancaire qui s'accompagne d'une analyse financière de demandeur et des garanties. Cette caractéristique de proximité est empruntée au système informel qui repose essentiellement sur la proximité entre le prêteur et l'emprunteur. C'est une proximité relationnelle qui est alimentée par la proximité géographique et sociale66.

Au plan géographique, la proximité est liée au processus de décentralisation des activités. Chaque organisme de micro-crédit met à la disposition des clients des agences ou des antennes locales67. L'ACLEDA a mis en place ses agences dans toutes les provinces du pays. Ils connaissent les demandeurs et ils peuvent donc être à l'écoute et à la disposition des clients. C'est ce qu'a réclamé Diderot dans son Jacques Le FATALISTE « c 'est un man que d'écoute, d'attention qui est essentiel le plus durement comme une injustice, comme une atteinte à la dignité68 ». C'est l'instauration d'un dialogue avec l'emprunteur qui permettra de déterminer la cause de ses difficultés, l'ampleur de son insolvabilité et le caractère provisoire ou définitif de celle-ci afin de prendre les mesures les plus rapides et les plus appropriées69. Pour les membres du groupe solidaire, cette proximité est un critère de choix des membres. Ils ont tendance à exclure les gens qui ne se trouvent pas dans leur communauté. Cette relation personnelle de voisinage des membres de groupe solidaire constitue une garantie morale très importante.

Au plan social, la proximité renvoie à la subjectivité des acteurs. C'est une proximité qui procède d'une approche fondée sur des comportements d'apprentissage défini comme le processus d'accumulation, de mémorisation. Cet apprentissage fournit un savoir sur le milieu social et permet d'évaluer un degré de confiance.

Au plan relationnel, la proximité est basée sur la confiance. Celle-ci est à la fois la source et la conséquence des relations de proximités. Cette confiance est importante. Lorsqu'un agent de crédit d'une institution de micro-crédit prête de l'argent à un client ou un groupe de clients sans aucune garantie matérielle, c'est parce qu'une certaine confiance existe entre eux. Ainsi, par exemple, l'inspection directe du milieu par les agents de crédit et le contact personnel avec les clients permettent de développer un espace de proximité

66 . Alain BERNARD, « Le Fataliste et le Candide : éradiquer l'exclusion financière, une utopie réaliste ? », In Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2006, p. 4O8 ; David VALLAT, « Très petites entreprises et exclusion bancaire en France : les partenaires associations-banques », Rev. Eco. Fin, 2000, p. 155.

67 . En 2005, l'Adie comptait 110 antennes et 380 permanences en France. Plus de 1000 bénévoles offrent leurs services de conseil dans divers domaines (gestion, comptabilité, droit...).

68. Alain BERNARD, préc., p. 410.

69. Michel LECOMTE, préc., p. 420.

relationnelle. Elle permet un apprentissage sur le comportement de l'emprunteur et sur son environnement. C'est la pratique qu'exerce l'agent de crédit de l'ACLEDA avant la décision d'octroi de crédit.

34. - 2. La technique du crédit progressif. Le succès du micro-crédit est enfin lié à la technique qui donne aux emprunteurs une motivation de rembourser le crédit. C'est une simple procédure d'approbation et de renouvellement de crédit. Cette caractéristique a été considérée comme l'élément-clé qui explique le succès du programme du micro-crédit dans la mesure où les emprunteurs estiment qu'ils ont intérêt à rembourser les prêts afin d'obtenir de nouveaux crédits. C'est une technique dite « de crédit progressif » suivant laquelle les prêts successifs plus important sont fournis si le prêt initial a été dûment remboursé. Le remboursement de crédit doit être régulier. Toutefois, la pratique de crédit progressif n'est pas toujours possible en France dans le cas de la création d'entreprise qui exige souvent un investissement initial70.

35. - L'étude sur les caractéristiques du micro-crédit permet de voir la situation des bénéficiaires et le succès du micro-crédit. Bien que le terme micro-crédit n'ait pas acquis une reconnaissance juridique, ce dernier ne manque pas d'attirer l'attention du législateur. La place du micro-crédit en droit peut être expliquée précisément à travers l'étude cette fois de la typologie du micro-crédit.

Section II : La typologie du micro-crédit

36. - Une variété du micro-crédit. Il serait difficile d'imaginer une différente typologie du micro-crédit puisqu'en pratique lorsqu'on parle de micro-crédit on se réfère directement au micro-crédit de type Grameen Bank. Toutefois, plusieurs types de micro-crédit existent. Monsieur Yunus ne nie pas l'existence d'une variété de micro-crédit. Il peut aller jusqu'à dire qu'il faut bien comprendre de quel micro-crédit on parle pour pouvoir mener un débat compréhensible71. De ce premier constat on voit très bien qu'en pratique on a une vision très restrictive de cette nouvelle conception de la distribution de crédit. Cette habitude doit,

70. ADIE, Document de travail, Novembre 1999, p. 9.

71 . Muhamed YUNUS, what is microcrédit ?, Janvier 2003.

au moins en France, être changée du fait que récemment le législateur français a adopté un nouvel article 80-III de la loi du 18 janvier 2005, disposition consacrée au micro-crédit social. Ainsi, la conception restrictive du micro-crédit (§1) doit être abandonnée au profit d'une conception plus large qui permet d'envisager à la fois le micro-crédit professionnel et le micro-crédit social dont l'apparition est peut-être nouvelle en France (§2). Or, cette tendance demeure inopérante au Cambodge où cette nouvelle typologie du micro-crédit est très loin à l'esprit tant des professionnels que de la BNC, autorité habilitée à réglementer les opérateurs de la micro-finance.

§ 1. - La conception restrictive du micro-crédit : le micro-crédit professionnel

37. - Plan. Il est ici intéressant de tracer brièvement l'origine (A) du micro-crédit professionnel avant d'évoquer l'implantation de cette conception en France et au Cambodge. Cette histoire permet de comprendre le micro-crédit mis en place dans ces deux pays. Il faut ensuite noter que le développement du micro-crédit professionnel est encouragé par la création de Fonds de Cohésion sociale (B)

A. L'origine du micro-crédit professionnel

38. - La naissance du micro-crédit professionnel. Beaucoup de personnes ont mal compris que le micro-crédit est né, en première fois, au Bangladesh en même temps que la Grameen Bank. En effet, le micro-crédit est né en 1971 en Colombie à travers l'Organisation à but non lucratif Opportunity International, et au Brésil en 1973 avec l'ONG Accion International. Il a vu ensuite le jour au Bangladesh en 1976 et s'est rapidement étendu partout dans le monde grâce aux effets positifs72 qui ont été engendrés par le micro-crédit de type Grameen Bank. La méthode de micro-crédit développée par la Grameen Bank est originale puisque pour pouvoir emprunter les demandeurs de crédit doivent constituer un groupe de cinq personnes qui s'épaulent dans les remboursements. Aucune autre garantie n'est demandée. Cette originalité permet de comprendre le discours du professeur YUNUS qui dit que « ce n 'est pas l 'argent qui sauve, mais la confiance, la solidarité et la fraternité ». La destination des crédits empruntés doit obligatoirement

72 . V. infra, n° 62-75.

permettre la création d'une activité économique génératrice de revenus et donc de permettre aux emprunteurs de subvenir leur famille. Par exemple, un prêt peut être accordé afin d'acheter une ou plusieurs poule(s). En vendant les oeufs, l'emprunteur rentre dans un cycle économique et génère ainsi des revenus, grâce auxquels il va rembourser le prêt. Cette idée d'octroi de crédit aux pauvres, modestes ont été rapidement transposée dans les autres pays en développement, le Cambodge notamment, et même industriel, c'est la cas par exemple de la France.

39. - Le micro-crédit professionnel en France et au Cambodge. L'idée répandue en France est que la création d'entreprise est une affaire d'élite et que la vaste majorité des citoyens ne pense qu'à la sécurité d'un emploi salarié appartenant, si possible, à la fonction publique. Cette idée ignore la réalité. En effet, la vérité est qu'il existe en France un vrai désir de « se mettre à son compte73 ». En plus, la montée du chômage depuis le début des années quatre-vingt encourage le recours à des micro-initiatives pour créer son propre emploi. Mais la question de financement de ces activités se pose. C'est bien dans ce contexte que l'ADIE a été créée pour promouvoir « l 'esprit d'entreprise qui est la chose du monde la mieux partagée74 » en mettant en place le produit de micro-crédit inspiré des expériences du micro-crédit de la Grameen Bank.

Il s'agit du micro-crédit professionnel puisqu'il permet, aux pauvres, aux chômeurs ou aux Rmistes de se lancer dans l'économie ou de se retrouver leur citoyenneté économique au moyen de la création de leur propre emploi. La finalité de crédit doit être de créer ou de développer une entreprise ou d'entreprendre une activité génératrice de revenus. L'article 74 al. 3 de la loi sur les institutions bancaires et financières prévoit que « les entités qui pratiquent les opérations de banque en vue notamment de promouvoir l'intermédiation bancaire dans les secteurs de l 'agriculture, de l 'artisanat, du petit commerce et des services aux particuliers... » Il peut donc concerner divers secteurs d'activités : l'agriculture, l'artisanat, le petit commerce et les services. Le domaine d'intervention du micro-crédit en droit cambodgien est aussi large que celui du droit français. L'alinéa 5 de l'article L. 511-6 du Code monétaire et financier est ainsi compris que l'interdiction d'exercer des opérations de crédit à titre de profession habituelle ne s'applique pas « aux associations sans but lucratif faisant des prêts pour la création et le

73. Maria NOWAK, « Le crédit solidaire : une voie nouvelle vers l'association du travail et du capital », in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 1998, p. 483-487.

74. Idem. p. 484.

développement d'entreprises par des chômeurs ou titulaires des minima sociaux sur ressources propres et sur emprunts contractés auprès d'établissements de crédit ou des institutions ou services mentionnés à l'article L. 518-1, habilitées et contrôlées dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat ». Il concerne aussi bien la création que le développement d'entreprises, quel que soit leur objet social. Il s'agit en pratique des entreprises individuelles qui interviennent surtout dans le domaine de petits commerces et de services75. En effet, la création de son propre emploi exige un minimum de fonds propres et l'accès au crédit. C'est exactement sur ce point que le micro-crédit imaginé en France est différent de celui pratiqué dans les pays en développement notamment le Cambodge. Le micro-crédit est accordé dans ce dernier pays en vue d'entreprendre des activités génératrices de revenus. Il s'agit des activités traditionnelles qui n'exigent pas un minimum de fonds propres. Pour financer les fonds propres ou quasi-fonds propres d'autres dispositifs ont été mis en place : le prêt d'honneur, le prêt à la création d'entreprise.

40. - Le micro-crédit, le prêt d'honneur et le prêt à la création d'entreprise. En France, l'intervention des pouvoirs publics à la création ou développement d'entreprises par les chômeurs, les Rmistes sous forme de fonds propres qui correspondent à une prime de démarrage est indispensable et aurait dû être pleinement justifiée sans qu'on puisse dire que cette intervention contrevient à la libre concurrence. Le dispositif d'ACCRE (Aide aux Chômeurs Créateurs et Repreneurs d'Entreprise) mise en place montait un rôle précurseur de la France dans le domaine des fonds propres. L'ACCRE comprenait une prime et l'exonération des charges sociales pendant un an. Cette prime a été malheureusement supprimée en 1996 à la faveur des économies budgétaires et sous la pression des artisans et commerçants établis, qui considéraient qu'elle leur créait une concurrence déloyale.

D'autres inventions des collectivités locales dans le soutien de financement à la création d'entreprise peuvent être revêtues sous forme de prêt d'honneur qui permet de former un quasi-fonds propre. Ce prêt d'honneur doit être distingué du micro-crédit qui est couramment appelé en France le crédit solidaire. Ce dernier doit aussi être distingué du prêt à la création d'entreprise. Certes, ces formes de financement visent les mêmes bénéficiaires et ont la même finalité. Toutefois, l'une doit être clairement distinguée de l'autre. La confusion entraîne une mauvaise compréhension du concept de micro-crédit

75. Maria NOWAK, « Pour un droit à l'initiative économique », in La micro-finance n'est plus une utopie !, Autrement, 2007, p. 80.

professionnel. Il faut remarquer que l'ADIE offre à ces clients non seulement du crédit mais un financement complet de leur projet comprenant prêt et fonds propres ou quasi-fonds propre. Le premier prêt, sous forme de micro-crédit, accordé par l'ADIE constitue un capital de départ.

41. - Le micro-crédit et le prêt d'honneur. Bien que le prêt d'honneur et le micro-crédit soient gérés par les organismes d'insertion notamment l'ADIE, tous les deux ne doivent pas se confondre. Un auteur, Sylvain ALLEMAND, a écrit que le prêt d'honneur est le micro-crédit lorsqu'il est accordé à titre gratuit. Toutefois, Madame Maria NOWAK affirme que cela entretient une certaine confusion dans les esprits. Selon elle, « ce n'est pas du micro-crédit au sens strict, même si certains appellent cela ainsi76 ». Le système de prêt d'honneur, sans intérêt et sans garantie prise sur les biens du porteur des projets, développé par des associations locales et octroyé au créateur d'entreprise, constitue une réponse efficace à la constitution des quasi-fonds propres de la future entreprise. Il s'agit d'une autre forme d'intervention plus simple du pouvoir public, des collectivités locales. La Caisse des Dépôts a investi, aux côtés des collectivités territoriales, de l'Etat et des acteurs économiques, 44 millions d'euros dans plus de 260 fonds locaux de prêts d'honneur qui, en 2003, ont financé plus de 8000 entreprises et permis de créer 15 000 nouveaux emplois77. Il permet un effet de levier financier et s'inscrit bien dans le développement économique local. Selon un exemple expliqué par Monsieur Francis MAYER, pour 1 euro de prêt d'honneur accordé, les créateurs obtiennent en moyenne 4,75 euros de prêts bancaires78. Il doit être complémentaire et subordonné par rapport au prêt bancaire. Il est important que ces deux conditions soient remplies pour que le prêt d'honneur ne soit pas en concurrence avec le prêt bancaire. Cette concurrence n'est pas finalement avantageuse pour le créateur qui a besoin non seulement de quasi-fonds propres, mais aussi d'accès permanent au crédit. Elle augmente en plus inutilement les dépenses publiques si le crédit peut être assuré par les banques. Le financement du prêt d'honneur peut intervenir sous forme de prêt participatif dont les intérêts et les modalités de remboursement seront déterminés en fonction des résultats de l'entreprise. Il s'agit en effet d'une forme hybride entre le prêt et la subvention.

76 . Sylvain ALLEMAND, préc., p. 82.

77. Francis MAYER, préc., p. 385-386.

78. Francis MAYER, préc., p. 385.

42. - Le micro-crédit et le prêt à la création d'entreprise. Le micro-crédit professionnel doit également être distingué d'une autre forme de financement à la création d'entreprise qui est le prêt à la création d'entreprise. Le dispositif du PCE a été mis en place en 2000. Le prêt à la création d'entreprise constitue une forme de partenariat public-privé dans le domaine du financement. Comme le prêt d'honneur, le prêt mis en place par la Banque du développement des petites et moyennes entreprises (BDPME), pour lequel la Caisse des Dépôts assume une partie du risque, est obligatoirement accompagné d'un prêt bancaire. Il a bénéficié à plus de 50 000 entreprises à ce jour. Il s'agit en fait d'une forme de garantie apportée par le pouvoir public, mais c'est une garantie sous forme d'un partage de l'encours de crédit79.

43. - Contrairement au prêt d'honneur et au PCE, le micro-crédit peut être accordé par l'ADIE sans qu'il soit subordonné au prêt bancaire. Mais, il peut être aussi directement financé par les banques dans le cadre du partenariat banques-ADIE. Ce financement direct par les banques, mais subordonné à l'accompagnement du projet, est encouragé par la création de Fonds de garantie dit de Fonds de cohésion sociale. Ce dernier, ayant pour but de garantir le micro-crédit professionnel, constitue un nouvel instrument du développement du micro-crédit professionnel.

B. Le Fonds de cohésion sociale : Un instrument pour le développement du micro-crédit professionnel

44. - Un exemple de fonds de garantie (le FGIF). L'idée de micro-crédit professionnel, qui existait à la fin des années quatre-vingt dix et menée pour la première en France par l'ADIE, est encouragée et développée par la loi Borloo du 18 janvier 2005 de programmation de cohésion sociale. Le FCS a été créé par l'article 80-III de cette loi afin de « garantir, à des fins sociales, des prêts à des personnes physiques ou morales et des prêts à des chômeurs ou titulaires de minima sociaux créant leur entreprise ». En effet, pour faciliter l'accès au crédit, plusieurs fonds de garantie ont été constitués à cet effet pour garantir les prêts accordés par les banques. Les fonds de garanties sont souvent subventionnés par l'Etat, les collectives locales. Ils peuvent être constitués dans le cadre de partenariat Banque-Organisme du micro-crédit notamment entre les banques et l'ADIE. Il

79. Francis MAYER, préc., p. 386.

s'agit d'une forme de réduction des risques de crédit par le montage de dispositifs de garantie. Pour mieux comprendre le rôle des fonds de garantie, on peut évoquer à titre d'exemple le Fonds de garantie pour la création, la reprise ou le développement d'entreprise à l'initiative des femmes (FGIF). Il peut être attribué à toutes les femmes qui veulent créer, développer ou reprendre une entreprise pour la garantie des prêts bancaires destinés à financer le besoin en fond de roulement ou des investissement. L'entreprise doit être créée ou reprise depuis moins de 5 ans. La responsabilité de l'entreprise doit être assumée par la femme, candidate à la demande de garantie de FGIF. Le FGIF garantit au maximum 70% du prêt dont le montant maximum est de 5 000 euros. L'établissement prêteur doit dans tous les cas assumer au moins 30% du risque.

45. - La vocation de Fonds de Cohésion sociale. La vocation principale du FCS est de soutenir les dispositifs de garantie préexistants qui interviennent dans l'appui aux chômeurs créateurs d'entreprise. Il intervient comme un « fonds de fonds80 » de garantie auprès de France Active. Cela montre bien que l'emploi est une nouvelle priorité absolue du gouvernement français. Il a précisé dans l'exposé des motifs de la loi du 18 janvier 2005 que « il faut cesser de penser que le chômage est une anomalie marginale, une exception malheureuse. Il faut cesser de croire que la puissance publique doit seulement en atténuer les conséquences douloureuses et attendre avec fatalisme un retour à la normale. Cette conception dépassée n 'aide pas à appréhender la situation comme elle se doit ». On peut constater qu'aujourd'hui, seuls 22% des créateurs d'entreprises ont accès au crédit bancaire, et les fonds de garantie existants gérés par les grandes associations d'insertion (ADIE, France Active, France Initiative réseau) n'ont pas toujours les moyens de répondre à la demande de plus en plus importante de prêt bancaire à la création d'entreprise81. Le FCS82 intervient donc pour augmenter les fonds existants afin d'augmenter leur capacité de garantir les prêts, que ce soit pour financier la création ou reprise d'entreprise. Il augmente les fonds gérés par France Active Garantie83. En 2005, 1,7

80 . Michèle HARDRE-SCHILI, préc., p. 55.

81 . Marie-Anne BARBAT-LAYANI, préc., p. 382.

82 . Le Fonds de Cohésion sociale garantit les micro-crédits accordés par les banques jusqu'à 50%. Le Fonds est doté par l'Etat, via des crédits ouverts par les lois de finance des années 2005 à 2009 (2005 : 4 millions, 2006 : 12 millions, 2007 à 2009 : 19 millions) (article 80-III).

83 . France Active est une association de loi de 1901 dont l'objet est l'insertion par l'activité économique. L'association France Active a été créée en 1988 sous l'égide de la Fondation de France par la Caisse des Dépôts, l'Agence Nationale pour la création d'entreprise, le Crédit Coopératif, la Fondation MACIF et des organisations caritatives. Elle propose des garanties d'emprunts bancaires via France Active Garantie et des apports en fonds propres via le Fonds Commun de Placement Insertion Emploi (FCP IE), la Société d'Investissement France Active (SIFA) et les contrats d'apports associatifs.

millions d'euros pour le fonds de garantie pour la création, la reprise ou le développement d'entreprise à l'initiative des femmes et 1,1 millions d'euros pour le Fonds de garantie pour l'insertion économique.

A côté du micro-crédit professionnel, le Fonds de cohésion sociale a également pour vocation de garantir de la même manière le micro-crédit social accordé par les banques dont la naissance n'est pas forcément nouvelle en France.

§ 2 - L'innovation du micro-crédit social

46. - L'aspect novateur de la loi du 18 janvier 2005. L'un des aspects novateurs de la loi de programmation de cohésion social est qu'elle crée une nouvelle catégorie de microcrédit dit de « micro-crédit social84 ». Par opposition au micro-crédit classique qui est destiné au financement de la création de micro-entreprise par des chômeurs ou les Rmiste, le micro-crédit social a un objet plus vaste : il s'agit de prêt permettant à des personnes en situation d'exclusion de financer des projets personnels ou des achats nécessaires à leur insertion. Vu que le micro-crédit professionnel fonctionne déjà grâce à des dispositifs existants, c'est cette catégorie du micro-crédit social qui attire davantage l'attention. Cette innovation s'inspire assez largement d'une expérimentation menée par le Secours Catholique. Le FCS est donc un outil de lutte contre l'exclusion financière des ménages pauvres. Une démarche novatrice du micro-crédit social (A) n'est pas, par ailleurs, sans incidence sur les définitions proposées par les chercheurs ou les praticiens du micro-crédit (B).

A. Le Fonds de Cohésion sociale : une démarche novatrice pour le micro-crédi social

47. - Il faut reconnaître que le micro-crédit est non seulement la réponse à un besoin crucial de développement d'activités indépendantes, mais il peut également contribuer à la réinsertion sociale ou professionnelle de certaines personnes en difficulté. Aujourd'hui, les ménages, qui ne peuvent pas recourir à des crédits distribués par les banques ou les établissements spécialisés en raison de la modestie de leur ressources, expriment qu'il n'est pas illégitime de financer par crédit certains de leurs besoins. Il existe bien des projets

84 . Marie-Anne BARBAT-LAYANI, préc., p. 383 ; Michel LECOMTE, préc., p. 423.

valorisant la personne humaine, favorisant le confort familial ou améliorant la vie quotidienne, qui méritent d'être anticipés. Trouver des solutions de financement pour ces ménages est, selon Monsieur Michel LECOMTE, socialement équitable85. Cet auteur précise qu' « il ne faut plus avoir une mauvaise vision sur leur capacité de remboursement des échéances de prêt. Pour pouvoir assurer leur capacité de remboursement, l'importance est de savoir adapter le crédit à la spécificité de la situation de ces personnes ». L'innovation du micro-crédit sociale exprime donc la reconnaissance par le pouvoir public de ce rôle incontestable du micro-crédit et de la réclamation socialement et équitablement justifiée de ces ménages en difficulté. Il nous convient ici de tracer l'origine (1) du microcrédit social pour savoir s'il s'agit vraiment ou non d'une innovation de la loi de programmation de cohésion sociale avant d'évoquer les conditions de la distribution (2) du micro-crédit social.

1. L'origine du micro-crédit social

48. - Le micro-crédit et le crédit social. En effet, il faut savoir que le micro-crédit social n'est qu'une variété des crédits sociaux. Certains auteurs parlent indistinctement de crédit social ou de micro-crédit social. Monsieur Francis MAYER parle expressément de crédits sociaux86, tandis que Monsieur Michel LECOMTE parle de micro-crédit social. Selon lui, « il s'agit bien d'aboutir à un nouveau concept de crédit s'adressant aux ménages qui pourraient être appelé micro-crédit social par opposition au micro-crédit que l'on connaît déjà et qui ne vise plus à créer une activité économique87 ». En revanche, Monsieur Alain BERNARD préfère parler de prêt projet personnel88.

49. - L'expérience du Secours Catholique. S'agissant de prêt de dépannage ou de projets permettant de renforcer la cohésion familiale89, le micro-crédit social consacré par la loi de programmation de cohésion sociale s'inspire de l'expérimentation effectuée par le Secours Catholique90. Dans l'objectif d'accompagner des personnes les plus vulnérables pour qu'elles puissent retrouver leur propre voie de développement dans le domaine de

85 . Michel LECOMTE, préc., p.420.

86 . Francis MAYER, préc., p. 381.

87 . Michel LECOMTE, préc., p. 423.

88 . Alain BERNARD, préc., p.415.

89. Semaine du micro-crédit, Lancement du Fonds de Cohésion sociale, Mardi 5 avril 2005.

90. Le Secours Catholique est une association régie par la loi du 1er juillet 1901.

l'insertion par l'économie, le Secours Catholique a mis en place un groupe de travail composé d'experts bancaires et de responsables de l'association afin de réfléchir à de nouveaux moyens de lutte contre l'exclusion financière. Les conclusions de ce groupe de travail ont été de recommander l'organisation d'expérimentations afin d'identifier de nouveaux outils de prêt permettant de soutenir les projets personnels des hommes et des femmes en situation de difficulté91. Concrètement, il s'agit de proposer des petits prêts personnels accompagnés de 500 à 2000 euros à un taux compris entre 4 et 8%, sur une durée idéale inférieure ou égale à 24 mois, offrant une mensualité ne dépassant pas 100 euros et consentis à des travailleurs pauvres, des demandeurs d'emplois ou Rmistes avec ou sans revenus, des personnes bancarisées ou non, mais sans accès au crédit. L'accompagnement de l'emprunteur est une des conditions nécessaires de l'octroi de ces prêts. Ces prêts sont garantis à hauteur de 50% par le Secours Catholique qui, pour ce faire, a créé un outil spécifique, le Fonds social de garantie. Une partie du risque reste à la charge de la banque qui aura mis en place le crédit.

Le micro-crédit social consacré dans le cadre de la garantie apportée par le FCS s'inspire largement de ces expériences menées par le Secours Catholique et s'inscrit, donc, dans un objectif de valorisation de la situation des ménages pauvres mais qui peuvent s'intégrer dans la vie sociale et économique grâce au crédit. L'idée n'est pas de mettre en place une ou des banques des pauvres, mais d'aider et d'inciter l'ensemble des banques à s'impliquer directement dans ce nouveau domaine. Des appels à des projets ont été lancés auprès des établissements de crédit. Il est beaucoup trop tôt pour dresser un bilan de ces opérations qui débutent. Des accords ont été conclus avec des établissements de crédit notamment le Crédit mutuel, le Crédit coopératif. Un accord a été conclu entre l'Etat, la Caisse des Dépôts et le Secours Catholique, afin de permettre à ce dernier de poursuivre le pilotage d'une expérimentation d'octroi de micro-crédit social pour définir les critères d'évaluation et de reporting qui seront établis et seront susceptibles, après leur validation par le Comité d'orientation et de suivi de l'emploi des fonds du FCS (COSEF), d'être repris pour l'ensemble des expérimentations similaires ultérieurement engagées moyennant l'intervention du FCS92.

50. - Le micro-crédit social est-il vraiment nouveau en France? Un auteur a pu

91 . Alian BERNAUD, « Le Fataliste et le Candide : éradiquer l'exclusion financière, une utopie réaliste ? », in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2006, p.405. 92. Semaine du micro-crédit, Lancement du Fonds de Cohésion sociale, Mardi 5 avril 2005.

nettement affirmer que le prêt sur objet distribué par le Crédit municipal de Paris (CMP), l'un des héritiers des Monts-de-piété italiens, est une forme originale de micro-crédit social93. Il se distingue du micro-crédit, que l'actualité met en avant, en ce qu'il n'est pas uniquement destiné à permettre une création d'entreprise ou d'emploi. Pour comprendre cette démonstration, il faut regarder le mécanisme et l'objectif du prêt sur gage accordé par cet établissement public administratif94.

S'agissant du mécanisme, en échange du dépôt d'un objet, le client se voit proposer un prêt d'un montant égal à 50%, voire 70%, de la valeur de l'objet estimée par des commissaires-priseurs en référence au marché des enchères publiques, pour une durée d'un an maximum. A l'échéance, le prêt peut être remboursé ou soldé par la mise en vente de l'objet aux enchères publiques. Dans ce cas, la vente éteint la dette : si le prix de vente est inférieur au montant de la dette, le CMP assume la perte et ne réclame pas le complément au client ; dans le cas inverse, la différence positive ou « le boni » est restituée au client. Il s'agit bien d'un système de micro-prêt de dépannage et non d'un système de vente.

S'agissant de son objectif, le prêt sur gage a pour objectif de commettre l'usure. C'est sur ce point, il nous semble, qui permet à cet auteur de dire que le CMP est un premier organisme de micro-crédit social en France. On peut le comprendre puisque l'un des objectifs du micro-crédit est de combattre l'usure. Le micro-crédit repris et développé par Monsieur Muhamud YUNUS n'est, selon Madame Maria NOWAK, qu'une résurgence de l'idée inventée et développée par Raiffeisen95 au milieu de XIXème siècle. Dans l'impossibilité de recourir au prêt bancaire, les paysans pauvres empruntent auprès de prêteurs privés, l'usurier proprement dit, qui impose des taux d'intérêt trop élevé. Les paysans sont souvent condamnés à vendre leur patrimoine mobilier à des conditions défavorables. Ainsi, le prêt sur gage constitue un mode de financement pour les populations peu ou mal bancarisées. Il est destiné à favoriser l'accès des particuliers au crédit. Il constitue le moyen de lever la contrainte de liquidité sur leur patrimoine mobilier.

Si on ne peut pas contester cette idée, force est de constater que le micro-crédit social inventé par la loi de programmation de cohésion sociale poursuit un nouvel objectif

93. Luc MATRAY, « Prêts sur gages et banque d'utilité sociale : l'expérience du crédit municipal de Paris », in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2006, p. 424.

94. Le Crédit municipal de Paris se développe autour de deux pôles : le prêt sur objet, qui représente moins de 25% de son activité, et l'activité bancaire. Ces deux pôles ont été, fin 2004, séparés dans deux entités distinctes : le CMP, établissement public administratif, a conservé le prêt sur objet, monopole légal, et CMPBanque, société anonyme à conseil de surveillance et directoire, sa filiale à 100%, a reçu l'apport de l'activité bancaire de « droit commun ».

95. Maria NOWAK, « Le micro-crédit en France et en Europe », in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2003-2004, p. 429.

bien distinct de l'idée de micro-crédit social fondé sur l'objectif de prêt sur gage accordé par le CMP. Il s'agit de favoriser l'insertion sociale ou professionnelle des personnes en difficulté par voie de crédit. A l'heure actuelle, l'importance est de savoir dans quelle mesure une personne en difficulté peut-elle recourir au micro-crédit social.

2. Les conditions de l'octroi du micro-crédit social

51. - Les conditions d'obtention du micro-crédit social. Le FCS a pour double vocation de « garantir à des fins sociales des prêts à des personnes physiques ou morale et des prêts à des chômeurs ou titulaires de minima sociaux créant leur entreprise96 ». Au vu de cette disposition, deux conditions sont posées : la première concerne la clientèle visée et la deuxième est relative à la finalité des prêts accordés. Toutefois, s'inspirant de l'expérience menée par le Secours Catholique, une autre condition y est ajoutée. Il s'agit de l'accompagnement de l'emprunteur.

52. - 1. La clientèle visée. La loi vise aussi bien les personnes physiques que les personnes morales. D'une part, les bénéficiaires du micro-crédit social sont des personnes physiques exclues du système économique et financier et qui pourraient y revenir grâce au crédit. Sont ainsi concernés les bénéficiaires des minima sociaux, les demandeurs d'emploi, les travailleurs pauvres, et plus généralement, les personnes ayant une difficulté à accéder au système bancaire. Cependant, le FCS n'a pas vocation à garantir des crédits octroyés à des publics en très grande détresse qui ne disposerait d'aucune capacité de remboursement. D'autre part, elle vise les personnes morales dont l'objet est de permettre l'insertion de personnes en situation d'exclusion. Il importe donc peu que les bénéficiaires soient des personnes physiques ou morales. Ce qui compte c'est la finalité de prêts qui leur sont accordés.

53. - 2. La finalité des crédits. Il s'agit de crédits de dépannage ou de projet. Le crédit social pourra donc servir à couvrir des dépenses relatives à l'acquisition ou à l'entretien d'un véhicule nécessaire à l'accès au travail, à l'équipement ménager, à l'accès au logement, à des projets de cohésion familiale. Le prêt ne se fait qu'à partir de l'énoncé et de la validation d'un projet. L'élaboration du financement doit se faire entre le porteur de

96. L'article 80-III de la loi du 18 janvier 2005 de programmation sur la cohésion sociale.

projet et l'accompagnateur et la banque. Ces projets peuvent être classés en plusieurs grandes catégories : logement, emploi et mobilité, équipement, projet de cohésion familiale et divers (formation professionnelle, caution pour entrée dans un nouveau logement, équipement électroménager...).

54. - Le micro-crédit social et le 1% logement. Le problème du logement constitue l'un des objectifs prioritaires du Plan de cohésion sociale. Le micro-crédit social peut donc être accordé en vue de faciliter l'accès des jeunes ou des personnes démunies au premier logement locatif. Les prêts garantis par le FCS peuvent concerner le financement du dépôt de garantie, les petits travaux d'amélioration du logement, le chauffage etc. Le FCS assure donc la moitié du risque sur les dispositifs mis en oeuvre par les opérateurs, les banques et les compagnies d'assurances, en matière de caution locative et de garantie impayée de loyers pour les étudiants, les apprentis ou jeunes travailleurs. Le micro-crédit social constitue donc parmi les autres dispositifs d'aides au logement un outil essentiel pour faciliter l'accès au premier logement locatif. On peut donc rapprocher le micro-crédit aux autres dispositifs notamment le Fonds solidarité logement, le Locapass mis en oeuvre par les collecteurs du « 1% logement97 ». Ces derniers dispositifs semblent aujourd'hui inadaptés face à l'ampleur des problèmes rencontrés. Le dispositif Locapass peut bénéficier à une clientèle très large : salariés, jeunes en recherche ou situation d'emploi, étudiants salariés, travailleurs saisonniers. Il a connu une très forte progression depuis sa création en 1999. Il intervient sous forme d'avance du dépôt de garantie98 et de garantie de loyer sur une période de 18 mois. Toutefois, il faut reconnaître qu'il est rarement appliqué par les bailleurs privés, soit par méconnaissance de son existence, soit parce qu'il exige conjointement avec la garantie Locapass, une caution de personne physique, voire une assurance de loyers et dégradation. Le 1% logement entretient donc un objectif identique à l'un des objectifs du micro-crédit social. En plus, en raison de l'ampleur du terme « personnes physiques ou morales », les bénéficiaires du micro-crédit social peuvent être aussi large que ceux du 1% logement.

55. - 3. La mise en oeuvre des prêts. Un accompagnement individualisé de l'emprunteur

97. Patrick BAQUIN, « L'accès au logement pour les exclus bancaires et financiers », in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2006, p. 387-390.

98. 311 000 avances et 165 000 garanties de loyers accordées en 2004 : Source, Partick BANQUIN, préc., p. 388.

est obligatoire. Cet accompagnement est nécessaire puisqu'il permet d'instaurer un dialogue avec l'emprunteur, de déterminer la cause de ses difficultés, l'ampleur de son insolvabilité et le caractère provisoire ou définitif de celle-ci afin de prendre des mesures le plus rapidement possible99. L'accompagnement doit être assuré en amont et en aval de la distribution du crédit. Il peut être assuré soit par un professionnel du secteur social, soit éventuellement par l'établissement de crédit. Le Secours Catholique a pris en charge cet accompagnement. L'association a pour mission d'effectuer une étude préalable du projet de l'emprunteur et de sa capacité d'emprunt. Elle accompagne ensuite l'emprunteur durant la vie du prêt afin de pouvoir intervenir en cas d'incident. L'accompagnement engage moralement auprès des banques et des demandeurs de prêts. Il peut être pris en charge par d'autres organismes sociaux. Par exemple, les CCAS (Centres communaux d'action sociale) ont marqué leur intérêt pour expérimenter la démarche. Leur force réside dans une bonne connaissance des demandeurs potentiels qu'ils côtoient quotidiennement100. Les avantages de cet accompagnement seront ultérieurement abordés101. Mais à qui incombe la prise en charge réelle du coût financier de cet accompagnement ? Monsieur Michel Camdessus a rappelé que le principal obstacle au développement du micro-crédit est l'insuffisance d'accompagnement. Pour lever cet obstacle, le gouvernement a tout récemment élargi le champ d'action du FCS pour lui permettre de financer l'accompagnement des porteurs de projets, dans la loi dite « retour à l'emploi » du 23 mars 2006102 dans son article 26 selon lequel « Ce fonds peut également prendre en charge des dépenses d'accompagnement des bénéficiaires, liées à la mise en oeuvre des projets financés par les prêts qu 'il garantit ». Les dépenses prises en charges par le FCS doivent être liées au prêt garanti par ce Fonds. Enfin, cet accompagnement permet de ne pas détourner l'objectif du FCS. Il s'agit donc d'éviter le transfert de risques relatifs à la clientèle existant vers le FCS.

56. - Les formes d'intervention du Fonds de Cohésion sociale. L'intervention du Fonds se fera soit sous forme de dotation de fonds de garantie existants, soit par engagements par signature sur des portefeuilles de prêts. La gestion du Fonds est confiée à la Caisse des

99. Maria NOWAK, Le rapport moral 2003-2004, préc., p. 424.

100 . Andréane FULCONIS-TIELEN, « crédit social : Le microcrédit doit entrer dans la gamme de produits des banques », Banque, juin 2006, n°68 1, p. 55.

101. V. infra, n° 130-134.

102 . Loi n°2006-339 du 23 mars 2006 pour le retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux (J.O du 24 mars 2006).

Dépôts et de Consignations. L'action de la Caisse des Dépôts s'articule autour des principes suivants : « insertion dès l'origine des porteurs de projets dans une relation bancaire, accompagnement par des réseaux associatifs spécialisés, réduction des risques par le montage de dispositifs de garantie, recherche d'un effet de levier, mesure de l'efficacité103 ». Tout ceci montre la reconnaissance rapide du micro-crédit en France. L'objectif du micro-crédit social dépasse celui du micro-crédit pratiqué au Bangladesh et puis importé en France et au Cambodge. On pourrait se demander si ce nouveau dispositif peut être mis en place au Cambodge. La question suscite moins de débat en raison de niveau de la richesse du pays. L'Etat n'aurait pas les moyens de mettre en place ce genre de fonds de garantie. En plus, la notion de micro-crédit social est loin de l'esprit des praticiens sur le terrain. L'innovation du micro-crédit social avec un objectif différent de celui du micro-crédit social appelé par le praticien du prêt sur gage accordé par le CMP est une avancée rapide, mais incontestable dans le contexte du pays. Toutefois, elle pourrait avoir une incidence sur la définition du micro-crédit.

B. L'incidence sur la définition du micro-crédit

57. - L'absence de définition exacte du micro-crédit. La définition du micro-crédit n'existe pas encore ni dans le lexique financier, ni dans les dictionnaires classiques. Il est en cours de formation104. Bien qu'il soit mondialement connu, la définition du micro-crédit n'a pas été unanimement donnée. Chaque programme de micro-crédit véhicule ses propres objectifs et s'exerce dans les contextes différents. Il ne peut donc que se prêter largement au débat, ce qui ne facilite pas la tâche consistant à définir le micro-crédit. Chaque chercheur et chaque institution se sont dotés de définitions spécifiques en fonction des objectifs de recherche105. A première vue, le micro-crédit n'est pas autre chose que le crédit. Pourrait-il être défini à partir de la définition du crédit tout en tenant compte tout simplement de sa dimension financière106 ? Mais, qu'est-ce qu'il faut entendre par crédit ?

58. - Un auteur a pu définir le crédit comme étant « une opération qui permet à une

103 . Francis MAYER, « Cohésion sociale : faciliter l'accès au crédit », in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2005, p. 381-388.

104 . CE, Microcrédit pour la petite entreprise et sa création : combler une lacune du marché, Direction générale entreprise, Octobre 2003.

105 . Pierre VERBEEREN, Ira LARDINOIS, Guide pratique sur le micro-crédit : l'expérience du prêt solidaire, Septembre 2003, p. 11 (cet ouvrage peut être téléchargé gratuitement sur le site www.kbs-frb.be).

106 . Micro : un préf. qui, placé devant une unité, la multiplie par 10-6 : Le Petit Larousse, 1993, p. 655.

personne d'obtenir immédiatement une prestation dont elle paiera la valeur plus tard107 ». Il est incontestable que le crédit constitue une avance de fonds. Mais, c'est trop large pour le micro-crédit qui ne peut que concerner le prêt. En plus, selon l'article L.3 13-1 du Code monétaire et financier « constitue une opération de crédit tout acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la disposition d'une personne ou prend, dans l'intérêt de celle-ci, un engagement par signature tel qu'un aval, un cautionnement, ou une garantie ». Cet article ne définit pas le crédit. Il ne fait qu'énumérer les opérations de crédits. En plus, cette énumération ne comprend pas toutes les opérations de crédit. Elle exclut expressément les crédits inter-entreprises. Tout cela montre qu'il n'existe pas de définition légale du crédit. Ainsi, on peut dire avec clarté que le microcrédit ne peut pas être défini uniquement en fonction de sa taille. Il faut encore prendre en considération d'autres caractéristiques108. Toutefois, il faut reconnaître que, bien que ces caractéristiques permettent de définir le micro-crédit, mais la totalité du micro-crédit ne tient pas dans ces caractéristiques puisque certaines de ces caractéristiques ne peuvent pas être appliquées de la même façon dans tous les pays du monde109. En tout cas, on peut remarquer que les définitions données par les opérateurs du micro-crédit apparaissent très restrictives, mais elles correspondent à des objectifs véhiculés par ces opérateurs (1). Définir le micro-crédit à partir des caractéristiques communes devrait permettre d'y inclure le micro-crédit social. L'apparition du micro-crédit social en France devrait aboutir à la remise en cause de définitions données par les opérateurs sur le terrain (2).

1. La diversité de la définition du micro-crédit

59. - Les définitions du micro-crédit données par les opérateurs sur le terrain. On peut citer quelques définitions du micro-crédit pour montrer qu'aucune unanimité n'a été trouvée. Pour un professeur de géographie de l'Université de Montréal « le micro-crédit consiste à prêter de petites sommes d'argent à des personnes extrêmement pauvres. Les sommes prêtées doivent servir à acheter des outils de production ou à financier les activités de production110 ». Nous sommes d'accord sur le montant. Mais, cette définition est trop restrictive puisque le micro-crédit ne peut être accordé, selon cet auteur, que pour financer

107 . Jean CALAIS-AULOY, Droit de la consommation, Dalloz, 2006, n° 327, p. 393.

108 . V. supra, n° 28-34.

109. Michel LELART, préc., p. 50.

110 . Définition citée par OULD NEMINE Ahmed.

l'activité de production. Or, le domaine d'intervention du micro-crédit est beaucoup plus large. En plus, les bénéficiaires du micro-crédit sont des « personnes extrêmement pauvres ». Comment dire qu'une personne est extrêmement pauvre ? Il y a, certes, des degrés de pauvreté. Mais à partir de quel degré une personne peut-elle être considérée comme extrêmement pauvre ? Un autre auteur a pu écrire qu'« il s'agit de prêt de petit montant d'argent à des clients considérés comme trop risqué par les banques111 ». Définir le micro-crédit de telle manière est simple mais largement insuffisante. Une autre définition a été proposée par la Fondation Roi Baudouin et proposée aujourd'hui par la Fondation de Participation. La réflexion sur la construction de la définition du micro-crédit est le fruit de la définition ainsi rédigée « le micro-crédit est un outil financier destiné aux micro-entrepreneurs présentant des lacunes d'adaptation au marché et proposé par des partenariat d'opérateurs, partenariat permettant de prendre en charge les dimensions sociale, économique et financière de l 'entrepreneuriat ». Il est évident que le micro-crédit est un outil financier puisqu'il s'agit d'un prêt. Les opérateurs visés peuvent être aussi bien les banques que les IMF. Elle favorise les partenariats entre les opérateurs : les banques, les acteurs sociaux. En plus, cette définition attire beaucoup l'attention du fait qu'elle montre que l'importance du micro-crédit ne réside pas nécessairement et uniquement dans son aspect financier. Le micro-crédit est une conception à deux dimensions qui conjuguent à la fois l'aspect financier et l'aspect social. Il propose non seulement le service financier mais aussi le service d'accompagnement permettant de tenir compte de la proximité et de la fiabilité du projet financé. Les avantages de cet accompagnement sont grands, et nous allons en parler plus loin112. Mais, on peut se demander si l'accompagnement est toujours mis en place dans tous les pays. Selon Madame Maria NOWAK, « le micro-crédit correspond à des prêts de faible montant destinés à des personnes à bas revenus, généralement exclues des ban ques parce que leur solvabilité est considérée comme insuffisante et / ou parce que les coûts de gestion de tels prêts sont jugés trop élevés. Ces prêts doivent leur permettre de créer ou de développer des microentreprises ou des activités génératrices de revenus113 ». Cette définition est très satisfaisante puisqu'elle permet de rendre compte toutes les caractéristiques du micro-crédit. Elle tient compte également à la fois de micro-crédit pratiqué dans les pays en développement et de celui

111. OULD NEMINE Ahmed, Le rôle des micro-crédits dans le financement du développement, thèse de l'Université de Nice, 15 décembre 2004.

112 . V. infra, n° 130-134.

113 . Définition tirée de l'article croissance et cohésion sociale, le Microcrédit et l'Union Européenne, issu de Finance and the common good/biens communs, automne 2006, n° 25.

dans les pays industriels. Mais, il s'agit en fait d'une définition du micro-crédit professionnel. Or, cela correspond à l'objectif de l'activité véhiculée par l'ADIE dont Madame Maria NOWAK est la présidente.

Dans toutes ces définitions, on peut remarquer que les auteurs ont mis l'accent uniquement sur les micro-entreprises. Le prêt doit être accordé en vue de la création d'une micro-entreprise ou d'entreprendre une activité génératrice de revenus. Il ne faut pas parler sèchement du micro-crédit, mais de dire expressément qu'il s'agit de micro-crédit professionnel. Un autre auteur, Monsieur Michel LELART, semble avoir une vision assez large du micro-crédit, mais sa définition est plutôt une description détaillée des caractéristiques du micro-crédit qu'une définition à proprement parler. Il a pu ainsi rédiger « il s 'agit d 'un petit crédit, d 'un montant peu élevé, sensiblement inférieur au crédit qu 'une entreprise ou un ménage peut sollicité d'une banque. Ce crédit est demandé par des personnes qui disposent d 'un revenu relativement base ; il est le plus souvent sollicité pour développer une activité génératrice de revenu, qu 'il s 'agisse d 'une ancienne activité que l'on voudrait étendre ou d'une nouvelle que l'on voudrait créer. Enfin, l'emprunteur ne dispose d'aucune garantie à offrir car il possède peu de chose et n 'est pas sans doute propriétaire ni du logement qu 'il occupe, ni la terre qu 'il cultive. La seule garantie qu 'il peut offrir est de nature sociale. Il peut constituer un petit groupe dont tous les membres se connaissent et peuvent s 'engager solidairement114 ». D'après la formule, « il est le plus souvent sollicité pour développer une activité génératrice de revenu ». Cette définition laisse penser que l'auteur donne une place très ouverte pour le micro-crédit social. Cependant, le groupe solidaire n'est pas toujours aisé à mettre en place dans le contexte des pays industriels. Il nous semble qu'il ne doit pas entrer dans la définition du microcrédit. Il serait suffisant de dire que le micro-crédit dispose d'une garantie de nature sociale, c'est-à-dire par d'une relation de proximité : la proximité entre les emprunteurs et/ou la proximité entre les emprunteurs et le prêteur. Une autre définition dont nous nous inspirons beaucoup est la suivante : « le micro-crédit est le crédit qui permet à des personnes porteuses de projets, mais en situation d'exclusion ou de quasi-exclusion par rapport aux circuits économiques, de bénéficier de prêts d'un montant très modeste, souvent confortés non par des garanties mais par des cercles de solidarité115 ».

114 . Michel LELART, De la finance informelle à la microfinance, Ed. Archives contemporaines, AUF, 2005, p. 49.

115. Jean-Claude DETILLEUX, Microcrédit et banque solidaire, in Exclusion et liens financiers/Rapport du Centre Walras 1999-2000, éd. Economica, 1999, p. 161-162.

60. - Deux définitions possibles du micro-crédit. Finalement, on pourrait dire qu'il y a au moins deux définitions du micro-crédit : l'une appliquée au pays en voie de développement et l'autre est définie dans le contexte des pays industriels. Certains auteurs favorisent le partenariat et l'accompagnement de l'emprunteur et les autres ne niant pas la nécessité de cet accompagnement préconise plutôt la méthode originale du groupe solidaire. Nous voulons donc proposer une définition qui nous semple assez neutre.

2. La définition du micro-crédit proposée

61. - La définition proposée. Bien qu'il ne soit pas possible, à l'heure actuelle, de mettre en place le micro-crédit social au Cambodge, cela ne voudrait pas dire qu'il serait impossible pour l'avenir. Tout dépend de la richesse du pays et de la politique incitative du gouvernement. S'il est impossible pour l'Etat de le faire lui-même, il ne serait pas en revanche impossible pour les bailleurs de fonds. Ainsi, pour ouvrir une place au microcrédit social non seulement pour le Cambodge mais pour l'ensemble des opérateurs du micro-crédit, une définition proposée consiste à reprendre toutes les caractéristiques communes du micro-crédit en laissant une place assez large à la spécificité du contexte de chaque pays.

Selon nous, « le micro-crédit désigne un prêt de faible montant garanti par une relation de proximité et dont l'objet est de permettre à une ou des personnes économiquement faible(s), normalement exclue(s) du cycle de financement formel, de créer ou de développer sa propre activité économique ou de réaliser un projet personnel en vue de son insertion professionnelle et sociale ». Cette définition correspond à tous les raisonnements déjà évoqués et qui ne méritent plus d'être repris ici. Il faut tout simplement préciser la signification de chaque terme employé. On peut comprendre que le bénéficiaire du micro-crédit est normalement exclu du financement formel en raison de sa situation économique. Mais, cela ne veut pas dire qu'elle ne serait pas financée par le secteur formel du financement dans le cadre du micro-crédit. Il peut s'agir de chômeur créateur d'entreprise ou simplement des pauvres. Dire une personne économiquement faible est plus claire que de dire les pauvres. L'appréciation de cette situation doit être faite in abstracto par rapport au PIB par tête. Elle doit être faite en fonction d'un critère objectif. Normalement, cet homme ne bénéficie pas de financement accordé par la banque. C'est

l'un des objectifs du micro-crédit qui vise à faciliter l'accès au crédit de ce genre de personne. En plus, la définition, ne tenant pas compte de la qualité des prêteurs, permet de prendre en considération que les banques peuvent parfaitement s'impliquer dans le marché du micro-crédit. Tous les opérateurs sont concernés s'ils le souhaitent. Il s'agit en plus d'un prêt d'un faible montant qui est garanti par une relation de proximité. Cette proximité peut être, soit une proximité entre les emprunteurs (groupe solidaire), soit une proximité entre l'emprunteur et le prêteur. Cet élément est emprunté au secteur de financement informel. Elle laisse donc aux opérateurs de micro-crédit le choix de la méthode la plus appropriée pour la garantie du prêt en fonction du contexte social. Enfin, l'objet du microcrédit peut être de réaliser une activité économique ou un projet personnel qui permet au bénéficiaire du micro-crédit de se réintégrer. L'activité économique envisagée peut être de toute nature. Il peut s'agir d'une activité agricole, artisanale, petit commerce ou de service. La notion d'activité économique apparaît déjà dans un certain nombre de textes de droit français, en droit de la concurrence, en droit des entreprises en difficultés et en droit fiscal. Les activités économiques définies par l'article 256 A du Code général des impôts comme « toutes activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est notamment considérée comme une activité économique une opération comportant l'exploitation d'un bien corporel ou incorporel en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence ». En somme, on ne peut pas imposer un talent à une personne. C'est à lui de choisir lui-même l'activité qu'il peut exercer en fonction de sa capacité, son talent. Le micro-crédit peut aussi être accordé pour un projet personnel, mais ce projet doit permettre à son porteur de se réintégrer économiquement ou socialement. Enfin, le microcrédit doit être un prêt « un micro-prêt ». Il ne peut pas prendre d'autres formes. Si le droit cambodgien utilise seulement le terme « crédit » pour désigner l'une des activités de la micro-finance, le droit français utilise expressément dans tous les cas le terme « prêt ». On pourrait se demander si le micro-découvert ou la tolérance qui existe en pratique est un micro-crédit. La réponse est forcément négative puisque le micro-crédit est accordé à une ou plusieurs personnes qui sont normalement exclues du financement par les banques traditionnelles. Or, le micro-découvert suppose l'existence d'une relation avec le banquier. Il est accordé par les banques à des personnes qui en ont besoin pour faire face à des problèmes de trésorerie et qui peuvent facilement avoir accès au crédit bancaire. En revanche, les bénéficiaires du micro-crédit sont des personnes exclues du financement par

les banques. Ce seul critère de bénéficiaire suffit à montrer que le micro-découvert n'est pas un micro-crédit. Mais on peut ajouter un autre argument qui tient à la finalité de deux types de financement. Le micro-crédit a forcément une destination bien différente du micro-découvert116.

Tout cela laisse aux opérateurs du micro-crédit le choix des méthodes en fonction des objectifs recherchés. Il est normalement compris que le micro-crédit a pour objectif de réduire la pauvreté ou de lutte contre le chômage par voie d'une insertion économique. L'évaluation des impacts du micro-crédit constitue un autre problème qui mérite d'être développé.

116 . V. supra, n° 28-34.

Chapitre II : Les impacts du micro-crédit

62. - Le contenu du chapitre. Le développement rapide du micro-crédit partout dans le monde est un reflet des impacts positifs de cette nouvelle conception d'octroi de crédit. Toutefois, les études sur les analyses des impacts du micro-crédit restent relativement peu nombreuses. Dans ce cadre, ces études qui visent à mesurer les impacts du micro-crédit sont réalisées soit à la demande d'organismes de financement, soit dans le cadre des études universitaires, ou encore dans le but de mieux cibler l'utilité du micro-crédit. Il n'existe pas encore d'étude globale. Malgré des difficultés qui peuvent apparaître en raison de la fongibilité des crédits, et des divergences de méthodologies117, les résultats obtenus permettent de montrer les effets positifs des programmes du micro-crédit. Les impacts

socio-économiques et financiers (Section I) du micro-crédit ont été mis en évidence. Toutefois, un chercheur affirme que les espoirs qu'on fonde sur le micro-crédit sont excessifs118. En raison de la fongibilité de l'argent, si le micro-crédit permet non plus la création d'une micro-entreprise, mais de faire face à des besoins de consommation, un

débat sur l'impact de celui-ci sur le surendettement des particuliers (Section II) peut être envisagé du fait que les bénéficiaires de ce nouveau produit sont, par hypothèse, financièrement modestes. L'apparition du micro-crédit social en France alimente fortement ce débat. En plus, il faut remarquer que certaines études montrent que le micro-crédit ne contribue pas réellement à la réalisation des objectifs fixés.

Section I : Les impacts socio-économiques et financiers

63. - Distinction entre les impacts économiques et financiers et les impacts sociaux. Le succès du micro-crédit en France peut paraître curieux dans la mesure où ce pays est un des

117 . Sur ce point, nous préférons ne pas nous prononcer puisqu'il s'agit d'une question purement économique. Cependant, nous pouvons citer brièvement les indicateurs utilisés à cet effet. Pour mesurer ces effets, on emploie différents indicateurs. Le plus couramment utilisé est la variation du revenu des ménages emprunteurs. Les autres indicateurs importants sont les variations des actifs, de la valeur nette du patrimoine et de travail employé. Les raisons pour lesquelles on a retenu ces indicateurs sont évidentes : objectif essentiel du micro-crédit est d'aider les gens à échapper à la pauvreté par la création d'emploi, des activités génératrices de revenus. Un autre indicateur couramment utilisé est la consommation des ménages qui est lié étroitement avec les revenus. Enfin, on mesure aussi des indicateurs du degré d'autonomisation des femmes.

118 . Isabelle GUERIN, « Microfinance : des risques et des potentialités », in La microfinance n 'est plus une utopie !, préc., p. 156.

pays développés et industrialisés. Il faut rappeler que le micro-crédit est importé en France dans un contexte différent de celui du Cambodge. De manière générale, on pourrait dire que le micro-crédit n'a pas exactement la même finalité dans ces deux pays. Au Cambodge, comme dans les pays du Sud, le but du micro-crédit est de sortir les paysans de la misère et de la pauvreté. Tandis qu'en France, comme dans les pays développés, il vise un public spécifique qui ne représente pas la majorité de la population. Il a surtout pour vocation de permettre à ces personnes, les chômeurs et les Rmistes, de créer leur entreprise, ce qui permet de relancer l'emploi afin d'améliorer l'économie. En plus, en fonction de la méthodologie du crédit utilisée, le micro-crédit produit des impacts sociaux non négligeables. L'aspect économique et financier (§1) des impacts du micro-crédit doit donc être traité différemment de ses impacts sociaux (§ 2).

§ 1. - Les impacts économiques et financiers du micro-crédit

64. - Plan. L'objet du micro-crédit est avant tout socio-économique. C'est un outil efficace au service de la petite production marchande. Il favorise et renforce l'exploitation individuelle ou familiale, le recours au salariat étant limité. Les diverses études montrent que au-delà du simple aspect financier, les programmes de micro-crédit ont un impact positif sur le développement économique. En effet, ils touchent des secteurs variés notamment l'agriculture, l'artisanat, l'élevage. Globalement, il apparaît comme un élément important de la croissance économique.

A. L'impact financier du micro-crédit

65. - La réintégration des exclus financiers dans le système bancaire. S'agissant d'abord de l'impact financier du micro-crédit, ce dernier permet la fourniture des services financiers de proximité comparables aux services bancaires classiques aux populations pauvres. Dans un pays où l'exclusion est la règle, on peut considérer que le micro-crédit permet de satisfaire une fraction importante de la population. Il leur permet d'avoir accès au crédit. En plus, avec le développement de micro-crédit en micro-finance, d'autres services financiers notamment l'épargne, le transfert des fonds, leur sont proposés. Beaucoup de programmes de micro-crédit ont intégré des plans d'épargne, soit comme condition pour obtenir le micro-crédit, soit une obligation pendant la durée du prêt. On

peut noter qu'en France la micro-finance constitue simplement une activité subsidiaire qui existe en marge des activités bancaires. L'aspect financier le plus important du microcrédit est donc de permettre aux exclus financiers d'avoir accès au crédit. Il s'agit d'intégrer ces personnes dans le marché bancaire au moyen du micro-crédit. On peut constater à plusieurs reprises que la politique nouvelle est d'encourager l'intégration de ces personnes dès le début dans le système bancaire. Il s'agit d'encourager l'octroi du microcrédit directement par les banques sans passer par l'intermédiaire d'un client institutionnel. En revanche, la micro-finance joue un rôle primordial au Cambodge où les services bancaires ne se trouvent pas dans les zones rurales. Les banques s'implantent seulement dans les grandes villes. Cela justifie la croissance rapide de nombres des institutions de la micro-fianance dans les zones rurales. Enfin, l'un des objectifs du micro-crédit est de permettre la sortie des pauvres de la dépendance financière vis-à-vis des tiers (les usuriers, les commerçants...) en leur permettant d'accéder à moyens financiers moins contraignants. A côté des impacts financiers, l'impact économique est peu significatif dans le contexte du Cambodge.

B. L'impact économique du micro-crédit

66. - Deux points essentiels. S'agissant ensuite de l'impact économique du micro-crédit, deux points essentiels sont évoqués : l'impact sur la création d'emploi, l'impact sur les revenus et, par conséquent, sur la consommation et sur la réduction de la pauvreté.

1. La création d'emplois

67. - L'impact significatif sur emplois. La place importante du secteur informel et la montée du chômage grandissant constituent des facteurs en faveur du développement du micro-crédit. Tout d'abord, il faut reconnaître qu'il existe en marge de l'économie « classique », une économie souterraine composée d'une multitude de petites activités informelles génératrices de revenus. En effet, cette économie informelle a été créée en majeure partie à cause du poids excessif des charges qui pèsent sur les entreprises aussi bien quant à leur création que durant leur existence. Ainsi, plutôt que de créer légalement une activité et ne pas réussir à générer des revenus convenables pour vivre, certains préfèrent la clandestinité, ce qui ne facilite jamais les études d'évaluation. Cette tendance

empêchait la création de nombreux emplois. Pour favoriser la croissance, il serait important d'intégrer ces activités dans l'économie afin de leur permettre de se développer. Pour cela en dehors du micro-crédit, des mesures fiscales encourageantes, l'exonération sociale pendant un certain temps, sont indispensables. Ensuite, un autre facteur en faveur du micro-crédit est celui du problème du chômage et de l'exclusion qui ne cesse pas d'augmenter. En France, 5 millions de personnes sont concernées. En 2004, il y avait en France 1 084 060 allocataires du RMI, contre 998 845 fin 2003119. Ces chiffres sont importants car ils sont liés à la croissance économique de la France. Ces chômeurs sont à l'origine de la création de plus de 30 % des petites entreprises. De cette constatation, l'évaluation de l'impact du micro-crédit sur l'emploi est une tâche considérable. Les programmes du micro-crédit sont considérés comme bien souvent un moyen de contribuer à la réduction des pauvretés au moyen de la création des activités génératrices de revenus. L'impact de micro-crédit sur l'emploi n'est donc pas négligeable. Il contribue aussi bien à la création des emplois indépendants que des emplois salariés. Les institutions de microcrédit qui traitent essentiellement avec des petites et micro-entreprises, sont des sources d'emplois, soit en permettant de rémunérer une main-d'oeuvre familiale jusqu'alors nonpayés, soit en offrant un salaire à leurs employés. Même s'il contribue à la création d'une faible portion d'emplois, une multiplication des emplois créés à l'aide de micro-crédits fait que l'impact du micro-crédit sur l'emploi est quand même significatif. Plus de 30% d'entreprises créées dans tous les domaines confondus sont le fait de chômeurs ou titulaires des minima sociaux. Madame Maria NOWAK a affirmé que « l'ADIE finance et accompagne 6 000 chômeurs par an, dans la création de leur entreprise et ce nombre croit tout les ans. Le financement de près de 25 000 entreprises nous permet de tirer des enseignements significatifs pour le développement du micro-crédit dans les pays industriels120 ». En 2006121, 7570 micro-crédits ont été attribués, ce qui permet de créer 6508 nouvelles entreprises et 7810 emplois. Il y a une croissance de l'activité de l'ADIE de 12.3 % entre 2005 et 2006. Ainsi, la lutte contre le chômage et la tendance en faveur de la création d'entreprise sont intimement liés, c'est pourquoi la demande de micro-crédit dans ce domaine est très forte. Pour Monsieur Romano Prodi « l'attribution de micro-prêts aux chômeurs et aux marginaux peut en faire des acteurs économiquement indépendants,

119 Ces chiffres proviennent d'un rapport intitulé « le micro-crédit dans le monde : un outil financier au service de la lutte contre la pauvreté », émis par l'ADIE pendant la semaine du micro-crédit qui s'est tenue en France du 28 mars au 01 avril 2006.

120 . Maria NOWAK, On ne prête pas (que) aux riches, préc., p. 150.

121 Ces chiffres sont extraits d'un communiqué de presse de l'ADIE du 26 janvier 2007.

capables de participer pleinement à une société plus cohésive122 ». Au Cambodge, en raison de l'ampleur des activités informelles dans les zones rurales, il est difficile de donner des chiffres concrets. En plus, dans ce pays, les chercheurs et acteurs s'accordent sur le fait que l'impact économique induit par les structures de micro-crédit est un micro-impact, tant au niveau de la communauté que de l'individu. Mais cela ne signifie pas échec économique. Le micro-crédit a permis à un bon nombre de bénéficiaires d'entreprendre ou d'accroître leurs activités productives ou commerciales, et indirectement leur bénéfices, mais cet accroissement reste faible pour deux raisons. La première tient au fait que le montant du crédit est faible et ne permet pas l'entreprise d'activités capitalistiques à grande échelle. La seconde résulte d'une simple constatation: le surplus dégagé de l'activité financé par le micro-crédit, après remboursement, est rarement réinvesti dans l'activité. Il est souvent alloué principalement à la consommation, ainsi que dans une moindre mesure au désendettement et à l'épargne par exemple sous forme animale.

68. - Le micro-crédit et le développement local. La création de nouveaux emplois stimule également le développement local et allège le fardeau de l'Etat qui doit prendre en charge ces démunis. On pourrait difficilement imaginer l'impact du micro-crédit sur le développement local en raison de difficulté de chiffrer précisément les résultats obtenus. Toutefois, il est évident qu'au Cambodge le développement local fait partie de l'effet positif du micro-crédit. Le micro-crédit permet de financer et de développer les activités de l'économie locale, comme la transformation des produits agricole, la vente de produits alimentaires, la réparation et la location des matériels, le tourisme, les prestations de services. Ces transformations créent des emplois nouveaux et différents tant pour les emprunteurs que pour les autres membres de la communauté. L'achat des biens fabriqués localement peut avoir des retombées positives sur la communauté, surtout s'il se substitue à des biens importés. Cependant, il ne faut pas surestimer cet aspect positif. Il améliore non seulement la qualité de vie des populations mais il provoque également un effet multiplicateur pour l'achat de matériaux locaux et l'utilisation de la main d'oeuvre locale. Il rend donc possible le développement des infrastructures locales. Le gouvernement a amélioré ce développement pour faciliter des activités des opérateurs du micro-crédit et améliorer les conditions de vie des habitants. Cela constitue l'une des stratégies du gouvernement qui encourage le développement du micro-crédit123.

122 Discours prononcé pendant la Conférence Européenne sur le Microcrédit du 22 septembre 2004.

123 . National Bank of Cambodia, The micro finance in Cambodia, 2006.

2. L'impact sur les revenus

69. - L'accroissement de revenus. Le but essentiel des programmes de micro-crédit est de lutter contre la pauvreté en accroissant les revenus des emprunteurs pauvres. Il est important de noter que les programmes de micro-crédit permettent de diversifier leurs revenus. En effet, la possibilité de diversifier les revenus est importante, en particulier pour les ruraux pauvres, qui sont tributaires de l'agriculture et exposés aux variations climatiques et aux cycles agricoles. La diversification des revenus peut provenir de l'introduction de nouvelles activités agricoles ou de l'introduction ou du développement d'activités non agricoles.

Ce processus peut avoir aussi des effets secondaires notamment sur la scolarisation et la planification familiale. Toutefois, il est difficile de déterminer avec précision les effets du micro-crédit en raison de la fongibilité des prêts. Il faut noter qu'une partie de microprêt sert directement à accroître la consommation. Les effets sur la consommation peuvent être immédiats, tandis que les autres effets ne se manifestent parfois qu'à long terme. Comme les clients de micro-crédit sont pauvres, ils emploient souvent leurs revenus additionnels pour améliorer leur alimentation et leur logement et se procurer d'autres biens essentiels, ce qui montre le détournement de la destination des fonds prêtés et donc l'échec de programme du micro-crédit pour une partie des emprunteurs du micro-crédit au Cambodge et le risque du surendettement124. En plus, dans les cas des pauvres urbains et ruraux en particulier, on peut difficilement faire la part des dépenses de consommation et des dépenses de production, car le travail est le principal facteur de production et celui qui ne mange pas à sa faim ne peut pas travailler efficacement. Les études montrent donc que les effets ne seront durables que si le micro-crédit est ciblé sur des zones où les activités économiques sont à fort potentiel de croissance puisque les pauvres ont tendance à employer les crédits essentiellement pour financer leur consommation, ce qui à terme devrait entraîner une évolution de la production et des revenus. En raison de ces difficultés constatées, on peut se demander si le micro-crédit est vraiment un outil de lutte contre la pauvreté. C'est une question qui est au coeur des discussions actuelles125 sur le rôle du micro-crédit.

124 . V. infra, n° 76-77.

125 . Une présentation complète sur toutes les discussions relatives à l'effet de micro-crédit sur la réduction de pauvreté : V. Norman Macisaac, Société asiatique des partenaires, Le rôle du micro-crédit pour réduire la pauvreté et favoriser l'égalité des sexes, Document de travail, le 12 juin 1997 ; Adrien de TROCORNOT, « Le micro-crédit fait-il baisser la pauvreté ? », in Le monde, Mardi, 14 Novembre 2006.

70. - Le micro-crédit, outil de lutte contre la pauvreté ? La plupart des études, qui ont été faites ces dernières années sur les effets du micro-crédit, ont mis en exergue son impact positif126 sur les revenus, l'emploi, la productivité, la capacité d'organisation et la formation des pauvres. Des programmes de micro-crédit ont eu des résultats positifs, plus précisément pour un grand nombre de pauvres et surtout pour les femmes. Les résultats obtenus avec le micro-crédit traduisent une mutation profonde dans le domaine du microfinancement qui va à l'encontre de l'idée que les personnes défavorisées sur le plan économique représentent un mauvais risque et qu'elles ne soient pas solvables. Mais d'autres études ont contesté l'effet de levier de la réduction de la pauvreté du micro-crédit. Il y a une forte croissance de la micro-finance au Cambodge, en raison de l'absence d'autres alternatives puisque les banques ne s'implantent pas dans les zones rurales. Malgré cette croissance très considérable, certains l'accusent d'appauvrir encore plus des ménages par manque de capacité d'investir des prêts de manière productive. Les institutions de micro-finance sont trop centrées sur les simples services financiers. Une étude sur la situation des ménages sans terre commandée en 2000 par une ONG britannique OXFAM s'installant au Cambodge a montré que 20% des familles avaient vendu leurs terres pour rembourser les prêts. Presque la moitié de ces ménages ont affirmé qu'ils n'auraient pas vendu leurs terres s'ils n'avaient pas été obligés de rembourser les crédits127. On se demande souvent si le crédit est vraiment une méthode appropriée à la réduction de la pauvreté ou s'il aboutit ainsi à accroître la vulnérabilité des populations. Toutefois, force est de constater que les critiques n'ont pas spécifié quelle forme de crédit était responsable de ce phénomène (Banques, IMF ou usuriers) puisque malgré la forte croissance de la micro-finance, le secteur informel occupe touj ours une place importante en raison de la proximité plus forte qui existe entre le prêteur et l'emprunteur. Pour pouvoir identifier quel crédit est la cause de ce phénomène, il est recommandé à la BNC de plafonner précisément le montant et la durée maximums du micro-crédit.

71. - Le micro-crédit n'est pas en soi un outil de réduction de la pauvreté. Se posant la même question, Monsieur Jean-Michel SERVET128 a soulevé un point intéressant relatif aux bénéficiaires du micro-crédit dans les pays du Sud129. Il explique que dans ces pays il

126 . OULD NEMINE Ahmed, préc., p. 127.

127 . David LEEGE, thèse préc., p. 344.

128 Anthropologue et économiste, fondateur du programme de recherche sur la microfinance à l'institut français de Pondichéry (Inde).

129. J-M SERVET, « Les limites du microcrédit », in Alternatives économiques, Décembre 2006, n°253, p.

existe trois types de population : une minorité aisée, une classe moyenne regroupant les petits producteurs, commerçants et salariés modestes, et les populations les plus pauvres. Pour lui, le micro-crédit ne bénéficie pas aux populations les plus pauvres, comme ce devrait être le cas, mais plutôt à la classe moyenne qui est exclue du système bancaire classique, et il ne s'adresse qu'exceptionnellement aux plus pauvres. Dans le bilan tiré dans le cadre de ses recherches, monsieur J.M SERVET a relevé que « 25% des clients en profitent vraiment car ils en ont la capacité entrepreneuriale. 50% améliorent simplement par cet outil la gestion du budget familial. Pour les 25% restants, la situation s'aggrave car ils échouent130 ». De par cette constatation, cela explique que le micro-crédit est très faiblement implanté dans les zones rurales et ne finance que très peu de paysans. Ainsi, les hommes et les femmes qui vivent dans la pauvreté n'en retirent pas automatiquement des avantages. Dans certains cas, les incidences sur les plus pauvres peuvent même être néfastes. De nombreuses études en sont venues à la conclusion que la plupart des emprunteurs et les emprunteuses n'obtiennent que des gains marginaux et que par ailleurs seul un faible pourcentage d'emprunteurs et d'emprunteuses suscite un accroissement de revenus. Les emprunteurs et les emprunteuses les plus pauvres sont ceux qui retirent le moins d'avantages. Il est constaté que « plus la personne qui emprunte était riche, plus grande était l 'amélioration de son revenu grâce au crédit ». Toutefois, les emprunteurs qui se situaient sous le seuil de pauvreté se retrouvaient avec un revenu inférieur à ce qu'il était avant d'adhérer au programme. C'est donc dire que concrètement le micro-crédit les appauvrissait. Les raisons sont qu'il se peut que les pauvres utilisent les prêts différemment en les consacrant notamment à des biens de consommation ou à des activités à faible risque qui sont habituellement moins rentables, ce qui justifie l'importance du rôle de l'accompagnement.

Il importe donc de reconnaître que le micro-crédit ne constitue pas forcément une intervention adéquate dans toutes les circonstances. S'il est vrai que très peu de programmes ont vraiment aidé les plus pauvres, il y a lieu de se demander si c'est parce que le programme est un échec ou parce que le crédit ne constitue pas toujours l'instrument le plus convenable pour soutenir les efforts des pauvres. Un chercheur peut jusqu'à dire que « l 'incapacité apparente des institutions de micro-financement de venir en aide aux pauvres n 'est peut-être pas du tout révélatrice d'un échec, mais plutôt une confirmation

70-71.

130 . Adrien de TRICORNOT, « Développement : Le microcrédit fait-il baisser la pauvreté ? », in Le monde, Mardi, 14 novembre 2006.

que le microcrédit ne constitue pas pour tous les pauvres le moyen de s 'en sortir131 ».

Enfin, il faut souligner que cet instrument n'est pas une panacée, et certaines études montrent qu'il ne peut pas à lui seul prétendre éliminer la pauvreté. Il est tout à fait évident puisqu' « on ne tombe pas dans la trappe de la pauvreté seulement pour des raisons financières, mais aussi liées à l'éducation, la santé, l'accès au marché, les infrastructures, etc132 ». Le micro-crédit ne peut donner de meilleurs résultats que lorsqu'il est combiné à d'autres interventions. Les emprunteurs ont besoin d'aides complémentaires sur d'autres plans notamment la formation, la commercialisation, l'alphabétisation, la mobilisation sociale et les autres types de services financiers. En vérité, il est difficile de dissocier les incidences du micro-crédit de celles des autres interventions. Le micro-crédit donne de meilleurs résultats lorsqu'il est combiné à d'autres interventions. Il faut remarquer que 20% des bénéficiaires du micro-crédit de l'ADIE savent à peine lire. Les aides supplémentaires de montage du projet, de suivi régulier du projet doivent être accomplis avec une très grande prudence. Tout cela pour montrer que le micro-crédit tout seul ne constitue pas un outil efficace quant à l'accomplissement du rôle qui lui est confié. Cependant, on ne peut pas nier les effets positifs du micro-crédit. Il permet de renforcer les liens sociaux entre les emprunteurs. S'il est originellement un outil de développement économique, le micro-crédit est aussi un facteur de socialisation. Ces effets peuvent être montrés à travers l'étude sur les impacts sociaux du micro-crédit.

§2. - Les impacts sociaux du micro-crédit

72. - L'autonomisation des femmes. Si certains peuvent contester le rôle du micro-crédit quant à la question de la réduction de la pauvreté, ils ne contestent pas, en revanche, un impact social notable des programmes du micro-crédit qui concernent les femmes. Il s'agit de l'autonomisation des femmes « woman empowerment ». Effectivement, un grand nombre des institutions de micro-crédit privilégient considérablement l'octroi de crédit aux femmes, surtout si on les compare aux autres créanciers. Différents raisons peuvent être invoquées. Leur taux de remboursement est plus élevé et on considère qu'elles sont plus fiables, plus disciplinées et plus enclines à utiliser le revenu qu'elles contrôlent pour améliorer l'alimentation et l'éducation de leurs enfants et que leur esprit d'entreprise est

131 . Cité par OULD NEMINE Ahmed, l'auteur de la thèse sur le rôle du micro-crédit dans le financement du développement.

132 . François DOLIGEZ, in Le monde précité du 14 novembre 2006.

plus promoteur. Il se peut que certains programmes de micro-crédit souhaitent tout simplement accroître le pouvoir économique des femmes afin tout simplement d'assurer l'égalité de sexes en termes d'accès aux services financiers. En plus, l'existence de groupes de femmes a aussi une incidence sociale évidente. Monsieur YUNUS a pu invoquer que « ces femmes qui, avant ne sortaient jamais de chez elles, n 'avaient jamais eu d'argent à elles et n 'osaient pas prendre la parole en public, assistent désormais à des réunions où elles parlent licitement, gèrent un budget et assument des responsabilités financières, elles deviennent plus sûres d'elles-mêmes133 ». Toutefois, les programmes de micro-crédit géré par l'ADIE ne privilégient point les femmes. C'est le principe d'égalité entre l'homme et femme. Ce qui compte, c'est le talent, le projet. Le sexe de l'emprunteur n'est pas privilégié par l'ADIE. Désormais, le nombre des emprunteurs du micro-crédit au Cambodge augmenté à 371 000 dont 292 000 sont les femmes134.

73. - Le renforcement du lien social. Il s'agit également d'un outil de renforcement du lien social entre les emprunteurs. Le programme de micro-crédit permet de mobiliser les communautés et de promouvoir la participation. La méthode utilisée consiste à demander la participation des emprunteurs. Les emprunteurs doivent se réunir en groupe pour pouvoir emprunter. Cette action commune permet de renforcer le lien social entre les emprunteurs. C'est un impact, dit par les économistes, de l'impact sur le capital social. Ce dernier est défini par un économiste, J. Charmes, comme étant « l 'ensemble des relations sociales de réseaux, normes et valeurs qui conduisent à la cohésion sociale, à la coopération et à la réalisation d'objectifs d'intérêts communs135 ». Les études soulignent que le micro-crédit a un impact positif sur le « capital social ». La réunion hebdomadaire leur permet de se rencontrer et discuter des problèmes. Elle crée ainsi des liens de solidarités communautaires. En plus, le micro-crédit est devenu un outil qui permet l'intégration sociale de l'emprunteur. Il dépasse la stricte logique économique pour recentrer sur un enjeu social important.

74. - Le micro-crédit et la fécondité. Enfin, certaines études montrent que les programmes de micro-crédit pourraient contribuer à réduire le taux de fécondité. Cela n'est

133 . M. YUNUS, Vers un monde sans pauvreté, éd. JC Lattès, 1997, p. 115.

134 . Agence française du développement, « The key role of donor agencies in improving effectiveness, Conférence sur la micro-finance au Cambodge », Université Royale de Droit et des Sciences économiques, 16 Février 2006.

135 . OULD NEMINE Ahmed, thèse préc., p. 138.

pas étonnant puisque le coût d'opportunité de la maternité est plus élevé pour une femme micro-entrepreneur qui réus sit que pour une femme qui n'a que des activités domestiques ou agricoles et pour laquelle un enfant peut constituer une source de main-d'oeuvre plus utile. Il se peut également que l'accroissement du pouvoir économique, l'amélioration de l'information ou la mise en place de nouveaux mécanismes d'appui aident les femmes à avoir davantage d'influence sur les décisions de procréation. En outre, lorsque le revenu des femmes augmentent, le taux de mortalité infantile a tendance à diminuer, et les femmes ont donc moins besoin ou envie d'avoir des enfants supplémentaires.

75. - Bien qu'il ait été démontré que le micro-crédit contribue à la création de l'emploi, des revenus, le problème de surendettement des ménages ne manque pas. Le débat sur le surendettement des particuliers est beaucoup plus grand en raison de l'apparition de la notion du micro-crédit social.

Section II : le micro-crédit et le surendettement des particuliers

76. - Le risque de surendettement moins significatif. Un autre problème important lié au micro-crédit est celui du surendettement. La constatation doit porter sur le fait que la situation financière de l'emprunteur est déjà modeste. En plus, il ne dispose pas souvent des revenus réguliers. De deux choses l'une. Ou bien, est-il probable d'imaginer le risque de non remboursement de crédit ? Ou bien, le micro-crédit peut-il être une cause de surendettement ?

S'agissant du risque de non remboursement, le faible taux d'impayé des institutions de micro-crédit (1% pour l'ACLEDA et 3% pour l'ADIE) est le meilleur argument pour démontrer que ce risque est bien maîtrisé. Si on le compare au taux de recouvrement des banques, il est, en règle générale, meilleur. Toutefois, il peut arriver que le projet financé puisse échouer, ce qui rend difficilement le remboursement du crédit. La plupart des entreprises créées à l'aide de micro-crédit sont en faillite au bout de deux ans.

S'agissant du surendettement, pour pouvoir y répondre avec précision, il faut comprendre quelles sont les causes possibles du surendettement ? Un auteur a pu dire qu'« il ne faut pas perdre de vue que la principale cause du surendettement est d'abord l'endettement. S'endetter, c'est faire un pari sur l'avenir ; et comme l'on ne sait jamais de

quoi l'avenir sera fait, s'endetter, c'est, par nature, prendre le risque du surendettement. Il est certes exact de relever que les causes profondes du surendettement ont évolué. Le surendettement actif résulte du fait d 'endettement, alors que le surendettement passif est lié à la stabilité des capacités financières des personnes endettées et l 'accent est mis sur les accidents de vie. On peut comprendre donc désormais que le surendettement est lié à la persistance d'un chômage de masse et la précarité des situation professionnelles et donc la situation patrimoniale136 ». Parmi les cas relevé dans le rapport de la Banque de France, on peut dire que le profil du débiteur surendetté est le suivant : des revenus modestes, presque intégralement absorbés pour répondre à des besoins immédiats, d'où l'absence d'épargne, le recours au crédit comme mode normal de gestion du budget du ménage. L'étude de la Banque de France a donc montré que le surendettement est dû, dans 73% des cas137, à des événements postérieurs à la souscription de crédit (chômage, divorce, maladie, décès). Ainsi, seul 19,6% des ménages surendettés trouve sa cause dans un « excès de crédit ». En effet, il faut reconnaître que le surendettement touche proportionnellement moins les plus défavorisé puisqu'ils font l'objet de l'exclusion financière138. On peut noter qu'en France il y a une sous-utilisation du crédit à la consommation si on le compare aux autres pays en Europe. Toutefois, la réglementation du surendettement des particuliers est très contraignante. Cet arbitrage politique a pour objectif de lutter contre le surendettement pour redonner confiance aux emprunteurs potentiels139. On peut donc se demander si les emprunteurs du micro-crédit sont des emprunteurs potentiels. Certes, la réponse doit être affirmative puisque les emprunteurs de micro-crédit professionnel sont les porteurs de projet de création d'entreprise. En effet, même s'il a pour but de créer l'activité économique afin de permettre à une famille de subvenir à ses besoins, dans la réalité, les faits sont quelques peu différents. Dans beaucoup de cas, il a été démontré que l'argent prêté est dépensé pour la santé, l'alimentation ou le logement. De ce fait, aucune activité n'étant créée, cela ne génère aucun revenu permettant de rembourser le capital du prêt et ses intérêts ainsi que de faire vivre la famille. Cela démontre qu'en réalité, le micro-crédit ne permet pas d'améliorer la situation des plus pauvres. Une étude menée en 1996 avait démontré que 55 % des emprunteuses au Bangladesh n'arrivaient touj ours pas, au bout de huit ans d'emprunts, à satisfaire l'alimentation de base de leur famille. Ainsi le micro-

136 . Xavier LAGARDE, « D'un surendettement à l'autre », Petites affiches, 17 décembre 2002, n° 251, p. 4-9.

137 . Source : étude de la Banque de France de 2004 publiée en septembre 2005.

138 . Michel LECOMTE, préc., p. 422.

139 . Gérard JOUVE, « Accès au crédit et prévention du surendettement », in Le rapport morale sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2006, p. 373-379.

crédit peut, pour certains, conduire à des situations de surendettement, du fait que leur crédit ne leur permet de créer aucune source de revenus. Monsieur Jean-Michel Servet prend l'exemple de l'Inde qui, en une décennie, a subi plus de 100 000 suicides parmi les plus démunis à cause du surendettement140.

77. - Qu'en est-il les emprunteurs du micro-crédit social ? Le débat sur le surendettement des particuliers devient de plus en plus important en France en raison de l'apparition du micro-crédit social. Une attention particulière doit être portée aux interventions qui porteraient sur l'acquisition de biens d'équipement courant (électroménager ou audiovisuel) ou bien encore sur le financement de loisirs ou de cérémonies familiales. Monsieur Michel LECOMTE a pu constater qu' « elles doivent être appréciées dans le cadre du projet qui les accompagne et ne pas simplement ressortir d'un besoin de consommation141 ». Mais la décision peut être également prise en fonction d'autres facteurs comme la diminution des tensions au sein d'un foyer, l'amélioration de la santé morale d'un ménage, la reconstitution de liens familiaux etc. En effet, « il ne s'agit donc pas d'ajouter l'endettement à la pauvreté, mais de favoriser la réalisation de projets permettant la promotion personnelle, l'amélioration des conditions d'existence. C'est également de montrer que les foyers défavorisés peuvent faire preuve de responsabilité et de rigueur142 ». C'est un crédit de dépannage. Il ne s'agit donc pas de favoriser le surendettement, mais plutôt de sortir ces personnes de surendettement qui pourrait arriver en raison de leur recours au système de financement informel qui est beaucoup plus coûteux. On pourrait dire qu'en fonction des objectifs recherchés par le micro-crédit, qu'il soit professionnel ou social, le risque de surendettement n'est pas assez grand. Mais cela ne veut pas dire qu'il n'en existe aucun. Pour ne pas déboucher sur le surendettement, il faut adopter des critères précis, après la phase d'expérimentation, du micro-crédit social. Ces critères tiendront évidemment à des caractéristiques du micro-crédit exposées dans le chapitre précédent. Il ne s'agit pas de viser une clientèle qui peut normalement avoir accès aux banques, ni celles qui, à un moment donné, se trouve dans une situation de détresse physique ou morale qui ne lui permet pas de s'endetter et de s'engager dans des activités économiques. Enfin, une réglementation du micro-crédit qui exige l'accompagnement des porteurs de projets en est également une solution. En assurant un accompagnement, le

140 . Adrien de TRICORTE, in Le monde précité, 14 novembre 2006.

141 . Michel LECOMTE, préc., p. 424. 142 . Michel LECOMTE, préc., p. 426.

micro-crédit social limite ce risque de surendettement.

Partie II :

La réglementation du micro-crédit

78. - Difficultés de la réglementation du micro-crédit. Le micro-crédit est une conception fondamentale à deux dimensions143. La première est la justice sociale qui se traduit par le choix de la population ciblée, et la seconde est la viabilité de l'institution de micro-crédit. On peut ainsi dire qu'il s'agit d'une combinaison entre un besoin social et une logique de viabilité financière. Toute la difficulté et toute la beauté du concept du micro-crédit sont de conjuguer les deux dimensions, sociale et financière, considérées plutôt comme contradictoires que comme réciproquement complémentaires. Toute réglementation du micro-crédit doit donc tenir compte de cette spécificité. S'il n'est pas anormal que toute institution de crédit recherche la viabilité financière, l'opérateur de micro-crédit dispose d'un objectif particulier qui est le volet social (favoriser l'accès au crédit) du produit de micro-crédit. Ce volet social du micro-crédit conduit-il à l'adoption de règles spécifiques ? En d'autres termes, le micro-crédit est-il soumis purement et simplement au droit commun du crédit ou faut-il une adaptation de ce dernier au produit du micro-crédit ? La réglementation de l'opération du micro-crédit constitue une première part importante. Mais sur ce point, l'accent est mis spécifiquement sur la réglementation

des taux d'intérêt du micro-crédit (Chapitre I). On saurait envisager de revoir le droit au remboursement anticipé de crédit afin de se conformer à la politique incitative du législateur français qui vise à encourager l'implication directe des banques dans le domaine du micro-crédit. Toutefois, aucune volonté politique législative n'a voulu atténuer la protection des consommateurs (bénéficiaires du micro-crédit social). En plus, il n'a fait jamais l'objet de réclamation de la part des opérateurs du micro-crédit en place. C'est la raison pour laquelle l'accent est mis uniquement sur la réglementation des taux d'intérêt du micro-crédit qui est une question d'actualité dans le contexte du droit cambodgien et qui préoccupe les pouvoirs publics dans tous les pays où s'implante le micro-crédit. En outre, il faut avoir à l'esprit que le micro-crédit, encore plus largement la micro-finance, est considéré désormais dans l'esprit du législateur français comme un service subsidiaire aux banques, tandis que le législateur cambodgien considère qu'il constitue un service financier à part, ce qui nécessite donc une réglementation spécifique des opérateurs du micro-crédit. L'article 74 alinéa 3 de la loi sur les institutions bancaires et financières144 prévoit expressément cette tendance. Cependant, la réglementation française des opérateurs du micro-crédit ne serait donc qu'accessoire. La politique consistant à favoriser le partenariat

143 . Maria NOWAK, On ne prête pas (que) aux riches, préc., p. 91.

144. La loi sur les institutions bancaires et financières du 18 novembre 1999 accessible sur http:// www.bigpond.com.kh/Council of Juriste/ Banque/sombkg.htm.

banques-opérateurs de micro-crédit doit être encouragée. Cela ne veut pas dire que la

réglementation des opérateurs du micro-crédit (Chapitre II) doit être ignorée. En effet, cette réglementation est autant importante en droit cambodgien qu'en droit français. En plus, en l'absence des opérateurs du micro-crédit, il ne saurait pas y avoir de micro-crédit puisque les banques commerciales actuelles au Cambodge ne s'intéressent pas au microcrédit.

Chapitre I : La réglementation des taux d'intérêt du micro-crédit

79. - L'approche de la problématique des taux d'intérêt du micro-crédit. Le problème d'accès au crédit des exclus bancaires pouvait être résolu, le grand pas restant le problème de taux d'intérêt. Ce dernier préoccupe non seulement les exclus mais aussi les responsables politiques dans le monde. On s'aperçoit que les taux d'intérêt pratiqués par les opérateurs du micro-crédit sont beaucoup plus élevés que ceux demandés par les banques classiques. Pourquoi les opérateurs du micro-crédit, qui s'implantent au Cambodge et généralement dans les pays en développement, imposent-ils des taux d'intérêt aussi élevés s'ils ont pour vocation d'aider les pauvres ? Faut-il admettre la pratique des taux d'intérêt très élevés pour le micro-crédit145 ? Pourquoi l'ADIE peut-elle pratiquer le taux du marché ? Il s'agit là d'un vieux débat touj ours d'actualité qui mérite d'être analysé profondément dans le cadre de cette étude.

On peut remarquer que le problème de taux d'intérêt relève des constatations suivantes. Suite aux faillites successives qu'ont connues certaines institutions de microcrédit, les opérateurs du micro-crédit ont pris conscience de la nécessité de donner la priorité à l'équilibre financier pour prétendre à des systèmes durables. Toutefois, cette tentative conduit à éloigner peu à peu le système de sa volonté initiale de se rapprocher des populations défavorisées pour s'adresser à des clientèles aisées et rentables. On assiste donc à deux logiques difficilement conciliables: la logique de type « bancaire » et les logiques de type « développementaliste ». La première est celle où le souci de viabilité financière exclut progressivement les petits clients. La seconde est celle où le crédit est un instrument pour atteindre d'autres objectifs146. Comment associer ces deux logiques ? Quelle est la position du droit positif en ce qui concerne le taux d'intérêt du micro-crédit ? L'analyse des arguments généraux favorables ou défavorables à la libéralisation des taux d'intérêt du micro-crédit constitue une première étape importante (Section I) avant de traiter de la politique législative en droit positif en matière de taux d'intérêt du micro-crédit (Section II). C'est sur ce point que l'on peut voir que le micro-crédit, notion inconnue en droit, exerce, en revanche, une influence incontestable sur le changement du droit français

145. Brigit HELMS et Xavier REILLE, « Le plafonnement des taux d'intérêt et la microfinance : qu'en est-il à présent ? », CGAP, Etude spéciale, n°9, septembre 2004 ; CGAP, l'explication raisonnée des taux d'intérêt utilisés pour le microcrédit, n°6.

146 . OULD NEMINE Ahmed, préc., p. 14.

en matière de taux d'usure.

Section I : La libéralisation ou la répression du taux d'usure

80. - L'obstacle à la recherche de la pérennité financière et institutionnelle. La recherche de la pérennité financière et institutionnelle conduit les opérateurs du microcrédit à appliquer des taux d'intérêt très élevés. Toutefois, la pratique des taux d'intérêt élevés n'est pas toujours possible dans tous les pays. En droit cambodgien, tout le monde croyait que l'atout principal des projets expérimentaux était de pouvoir se développer rapidement en raison de la libéralisation des taux d'intérêts. Toutefois, l'interrogation sur l'applicabilité du Prakas libéralisant le taux d'intérêt des crédits accordés par les banques commerciales aux opérateurs du micro-crédit sera ultérieurement développée. En revanche, le taux d'intérêt pratiqué par l'association du micro-crédit en droit français ne pouvait pas être très élevé pour des raisons diverses qui tiennent surtout à la réglementation des taux d'usure qui fixe le plafond dont le dépassement est civilement et pénalement répréhensible147. Néanmoins, en matière de micro-crédit, il est important de s'assurer que le taux d'intérêt pratiqué corresponde au moins au taux du marché pour permettre aux opérateurs du micro-crédit de devenir financièrement viables sur la durée et donc sortir de la nécessité d'obtenir des subvention. L'obstacle à la pérennité des institutions du microcrédit reste alors le taux d'usure, qui plafonnait les taux d'intérêt sur les prêts aux entreprises individuelles et qui rend impossible la couverture des coûts.

81. - L'objectif du plafonnement des taux d'intérêt. Il est incontestable que le plafonnement du taux d'intérêt a pour finalité la protection des emprunteurs. Or, en matière de micro-crédit, on se demande si ce plafonnement constitue un moyen efficace de protection de ces derniers. Quels sont en effet les impacts du plafonnement des taux d'intérêt sur la situation des pauvres, des exclus bancaires du crédit ? Il est donc indispensable d'évoquer les impacts du plafonnement des taux d'intérêt (§1) avant de répondre à la question de savoir s'il faut libéraliser ou non les taux d'intérêt du microcrédit dont les bénéficiaires ne sont pas forcément des consommateurs (§2).

147. La loi du 28 décembre 1966 relative à l'usure, aux prêts d'argent et à certaines opérations de démarchage et de publicité modifiée par la loi n°2003-721 relative à l'initiative économique du 1er août 2003 et puis par la loi de 2005 sur les petites et moyennes entreprises.

§1. - Les impacts du plafonnement des taux d'usure

82. - Trois types de taux d'intérêt. Généralement, trois types de taux d'intérêt peuvent être appliqués par les opérateurs du micro-crédit conformément au contexte réglementaire du pays dans lequel ils sont lancés. Il peut s'agir, soit de taux d'intérêt qui correspondent aux taux du marché, soit de taux qui sont relativement bas par rapport au taux du marché, soit enfin de taux qui sont généralement très élevés en comparaison avec le taux du marché. Cette dernière hypothèse est le plus souvent pratiquée dans les pays en voie de développement. En revanche, les deux premiers cas s'inscrivent dans le contexte de pays dont le taux d'intérêt est très réglementé. Il faut rappeler que la réglementation de plafonnement des taux d'intérêt a pour objectif de protéger les parties faibles qui n'ont pas le pouvoir de négocier le prix. La législation sur le taux d'usure a donc pour but de protéger les bénéficiaires du crédit contre les pratiques abusives des prêteurs malhonnêtes. Toutefois, cette réglementation produit des effets pervers sur la situation d'une tranche de la population qui devrait se voir systématiquement exclue du financement accordé par le système classique. Cela veut dire que le plafonnement du taux d'intérêt a été instauré pratiquement au détriment des personnes dont la situation financière est très modeste puisqu'il conduit, d'une part, à décourager les banques commerciales d'étendre leurs activités au marché du micro-crédit et constitue une restriction fondamentale d'accès de ces personnes au crédit (A), et d'autre part, à l'absence de transparence (B).

A. La restriction de l' accès au micro-crédit

83. - Le taux d'usure, cause de la restriction d'accès au crédit. En dépit de la bonne intention que constitue la volonté de protéger les bénéficiaires du crédit, le plafonnement des taux d'intérêt nuit en général aux pauvres, aux exclus bancaires car il présente un obstacle à l'extension des activités des banques au marché du micro-crédit, à la création de nouvelles institutions de micro-crédit, ainsi qu'à la suivie des institutions existantes. On s'aperçoit qu'en pratique, bien que les taux d'intérêt pratiqués par les opérateurs du microcrédit soient très élevés par rapport aux taux du marché, peu de IMC sont rentables et peuvent continuer d'exercer leurs activités. La faillite des IMC a amené les opérateurs à revoir leurs politiques pour pouvoir assurer leur pérennité.

Il faut reconnaître que l'interdiction de fixer le taux d'intérêt au-delà de certains

seuils réduit la satisfaction du prêteur, mais aussi de l'emprunteur qui est prêt à payer le taux élevé et qui se voit interdire de contracter un emprunte usuraire, sans pour autant qu'un autre prêt, à un meilleur prix, ne lui soit fourni. Le taux d'usure peut donc constituer une barrière pour les banques classiques à l'entrée sur la frange de la population risquée du marché. En effet, le prêteur est capable de discriminer entre les emprunteurs en fonction de leur niveau de risques. Il prête à ceux présentant peu de risques avec un taux d'intérêt débiteur plus attractif car ceux-ci n'accepteraient pas non plus un taux élevé. Il faut accepter que plus le crédit est risqué, plus le taux d'intérêt est élevé. En plus des risques du crédit accordé aux populations dont la modestie financière est grande, le coût d'opération est aussi élevé par rapport au montant du prêt148. En effet, il faut segmenter le taux d'intérêt selon le montant du crédit qui influe sur le coût d'opération. Le crédit d'un petit montant engendre des coûts de gestion proportionnellement aussi élevés que ceux du crédit d'un montant élevé. Le taux d'usure constitue donc parmi les causes que l'on a évoquées dans la première partie149 une hypothèse qui peut expliquer la réticence de banques classiques en matière de micro-crédit. De par cette constatation, on peut comprendre pourquoi il y a peu d'institutions du micro-crédit en France.

84. - Conséquence d'une telle restriction d'accès au crédit formel. Face à la réticence des banques classiques dans le marché de micro-crédit, à la cessation des activités des opérateurs du micro-crédit ou à l'absence de création de nouvelles IMC, les clients se retrouvent privés de l'accès au crédit, aux services financiers, ce qui les poussent à se retourner à nouveau vers le marché informel qui est beaucoup plus coûteux et où la protection des clients est quasiment inexistante. Les taux d'intérêts facturés par les prêteurs privés sont infiniment plus élevés que ceux pratiqués par les opérateurs formels du microcrédit. Au Cambodge, le taux d'intérêt imposé par les prêteurs privés, les usuriers à proprement parler, est de l'ordre de 10% par mois. En revanche, si la demande de crédit est acceptée, le problème de l'absence de transparence est une autre chose considérée comme une conséquence négative du taux d'usure.

B. L'absence de transparence

85. - Le taux d'usure, cause de l'absence de transparence. La restriction de l'accès au

148 . V. infra, n° 89.

149. V. supra, n° 19-27.

crédit n'est pas une seule et unique conséquence de l'effet pervers de la législation sur le plafonnement des taux d'intérêts, l'absence de transparence en est également une. Le plafonnement des taux d'intérêt permet de réduire le coût de crédit pour les bénéficiaires. Il permet ainsi de diminuer leur charge financière. En revanche, il réduit les bénéfices des prêteurs. Ceux-ci cherchent donc à trouver des moyens pour pouvoir augmenter le coût total du crédit notamment en imposant l'assurance du crédit, diversifiant les frais d'opération. Ils détournent le plafonnement des taux d'intérêts au moyen notamment de l'introduction d'une assurance-décès liée au crédit et/ou d'autres frais150. Cette situation serait difficilement imaginable en France puisque un minimum de transparence semble être assurée par la législation française sur l'exigence d'une publication du taux effectif global (TEG) dont les assiettes sont définies par la loi. L'article L.313-1 alinéa premier du Code de la consommation prévoit que « Dans tous les cas, pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l 'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels ». La formule est à l'origine de certaines difficultés quant à la détermination des éléments participant à l'assiette du TEG151. Mais, la Cour de cassation a décidé que « le taux effectif global inclut toutes les sommes de toute nature qui, sans constituer un intérêt, sont nécessairement attachés au prêt et constituent, à ce titre, une charge obligatoire pour l'emprunteur152 ». Ainsi, les établissements de crédit ne sont pas à l'abri de tout détournement, d'erreur, mais surtout les clients ne sont pas efficacement protégés par les incertitudes liées au calcul du TEG. La caractérisation de l'usure est donc parfois délicate153.

Cependant, cette absence de transparence est beaucoup plus grande en droit cambodgien. Selon le droit commun, l'article 59 du décret-loi de 1988 prévoit que « le prêt à intérêt n 'est admis que s 'il a été accepté dans un écrit constatant le consentement des parties. Le taux d'intérêt est fixé à 5% par an, sauf si une disposition légale contraire prévoit autrement154 ». La loi fixe le plafond de 5% par an. Mais aucune base de calcul n'a

150 . CGAP, L'impact du plafonnement des taux d'intérêt sur la microfinance, Note sur la microfinance, Mai 2004, n°18.

151. Thierry BONNEAU, Droit Bancaire, Montchrestien, 6e éd. 2005, n° 69, p. 52.

152 . Cass. crim. 10 septembre 2003, inédit.

153 . Anne-Valérie Le Fur, « Faut-il modifier la législation sur l'usure ? », Droit bancaire et financier, in Mélanges AEDBF-France, sous la dir. Jean-Jacque Diagre, Banque édition, 2004, p. 190.

154 . Décret-loi n° 38/Kch du 28 octobre 1988 sur le contrat et la responsabilité extra-contractuelle.

été prévue. Ainsi, le calcul de l'intérêt constitue une difficulté en droit cambodgien. Ce calcul peut avoir une influence sur le montant de l'intérêt. Pour pallier à cette difficulté, la BNC a adopté un Prakas sur le calcul de l'intérêt du crédit accordé par l'institution de la micro-finance155. L'article 2 prévoit que « le taux d'intérêt du crédit accordé conformément à l 'article 1 de ce Prakas est calculé sur la base du montant de crédit accordé après déduction du montant de capital remboursé, et par conséquent, l 'intérêt pour un crédit à durée déterminée (semaine, mois, trimestre, année selon le cas) doit être calculé en fonction du solde créditeur pendant cette période ». La base de calcul est le montant du solde créditeur. Cette méthode de calcul signifie que le crédit accordé doit être systématiquement un crédit amortissable. Dans le crédit amortissable, le montant du remboursement doit comprendre à la fois le montant du capital remboursé et le montant de l'intérêt pour la période déjà passée. Si cet article prévoit que le solde créditeur est le résultat de déduction du montant de crédit accordé par le montant du capital remboursé, cela signifie que la capitalisation de taux d'intérêt est implicitement admise. Si la base de calcul est précisée, l'absence de transparence demeure grande. L'emprunteur ne peut pas savoir à l'avance le coût total d'un prêt. Les opérateurs du micro-crédit peuvent toujours chercher des moyens afin d'argumenter le montant total du crédit.

86. - les avantages des pratiques de taux élevé. En revanche, la pratique des taux d'intérêt élevés présente des avantages pour les bénéficiaires du micro-crédit. Ils permettent de faire face au problème d'accès au crédit et à la transparence. En plus, ils conduisent les prêteurs informels à réduire les taux d'intérêt imposés à leurs clients. Il est donc souhaitable d'admettre la pratique des taux d'intérêts élevés du micro-crédit. Mais, cette admission doit-elle conduire à la libéralisation complète des taux d'intérêt ou simplement à un aménagement de la réglementation relative à l'usure existante dans un sens plus favorable aux opérateurs du micro-crédit tout en maintenant la prohibition du dépassement d'un certain seuil déjà modifié? D'une autre manière, faut-il supprimer la répression des taux d'usure pour le micro-crédit ?

§ II. - Plaidoyer pour la libéralisation complète des taux d'intérêt

87. - Les arguments pour la libéralisation complète des taux d'intérêt du micro-

155. Prakas n° B- 7-01-115 prk du 14 août 2001 sur le calcul de l'intérêt du crédit accordé par l'institution de la micro-finance.

crédit. Plusieurs raisons peuvent être invoquées pour expliquer le choix d'une voie vers la libéralisation complète des taux d'intérêt du micro-crédit. Ces raisons tiennent aussi bien aux opérateurs qu'aux bénéficiaires du micro-crédit. À ces raisons, il faut ajouter la constatation des inconvénients des pratiques de taux bonifié du micro-crédit.

88. - Les inconvénients de la pratique des taux bonifiés du micro-crédit. Il faut noter que l'ADIE ne peut pas appliquer le taux d'intérêt élevé, puisque le taux est bonifié et que le coût des opérations est pris en charge par les collectivités locales et la Banque européenne d'investissement. Certes, tous les opérateurs du micro-crédit ont démarré leurs activités avec des subventions, publiques ou privés, le temps de faire connaissance avec le marché, d'expérimenter les méthodes et les conditions de crédit les mieux adaptées, et d'atteindre un volume d'opérations suffisant pour couvrir les coûts.

En effet, les subventions permettent de maintenir les taux d'intérêt artificiellement relativement bas puisque le micro-crédit accordé par les institutions du micro-crédit subventionnées est généralement accordé à des taux d'intérêt bonifiés. Mais cette méthode de prêt à taux bonifié comporte des inconvénients réels incontestables. D'une part, le taux de remboursement est généralement faible puisque les bénéficiaires ne se sentent pas responsables et pensent qu'il s'agit d'une forme de charité. Il en résulte qu'ils n'ont pas besoin nécessairement de rembourser les prêts. D'autre part, le crédit accordé au moyen de subvention est en général du crédit ciblé. Or, il est préférable que l'emprunteur décide luimême ce qu'il va faire avec son prêt. Il est mieux à même de savoir quelle activité sera la plus rentable pour assurer le remboursement. Enfin, la pratique de taux bonifié bride la possibilité pour les opérateurs du micro-crédit de devenir rentables et donc indépendants de toute subvention publique. Le taux subventionné ne profite en général qu'à un petit nombre d'emprunteurs et seulement pendant une brève période. Les IMC qui sont tributaires des subventions ne pourront probablement poursuivre leurs activités que jusqu'à l'épuisement de ces subventions. Ainsi, au lieu de monter des projets subventionnés sur une période de temps limité, on cherche plutôt à créer des institutions financières viables et pérennes qui peuvent assurer l'intermédiation financière et offrir des services de façon durables. C'est la raison pour laquelle l'autonomie financière devient ensuite la règle de base car elle permet d'assurer la pérennité des services financiers à la clientèle choisie156.

156 . Maria NOWAK, On ne prête pas que) aux riches, préc., p. 204.

89. - Les raisons tenant aux opérateurs du micro-crédit : Le taux élevé du micro-crédit peut être expliqué de la manière suivante. Premièrement, il s'agit de la viabilité de l'institution. Le taux d'intérêt doit être établi de façon à permettre aux opérateurs du microcrédit d'offrir des services financiers durables. Pour cette raison, le taux d'intérêt doit permettre de couvrir le coût de l'opération157 : le coût d'un prêt de petite taille est proportionnellement plus élevé que celui d'un prêt important. Le coût proportionnel d'administration (identification et évaluation des clients, traitement des demandes de remboursement, décaissement des prêts, collecte des remboursements et suivi des activités en cas de non remboursement...) des micro-prêts est élevé, car ils s'adressent à une clientèle sans historique de crédit, ni garantie et souvent illettrée et située dans des régions isolées. Parmi les coûts de financement, les salaires constituent un poste important en raison du fait que la gestion du micro-crédit est une activité faisant appel à beaucoup de main-oeuvre. Selon l'ADIE, pour un prêt de 2500 euros, le coût de l'opération s'élève à 2000 euros par projet. En effet, le coût élevé du micro-crédit n'est pas parce que les risques inhérents sont plus grands puisque l'étude montre que le risque de non remboursement que courent les bons programmes de micro-crédit est souvent plus faible que celui des banques commerciales traditionnelles. Malgré des taux d'intérêt relativement élevés, peu d'IMC sont rentables. Cela tombe bien, la plupart des organismes de micro-crédit sont à but non lucratif et ceci explique cela. Deuxièmement, il permet de jouer sur la mentalité des emprunteurs. Ces derniers sont obligés de prendre le crédit au sérieux et ne verront plus le crédit accordé comme une aide. Le micro-crédit n'est pas une forme de charité. Le taux d'intérêt responsabilise les emprunteurs qui doivent rembourser le crédit à l'échéance du terme. Toutefois, on peut s'interroger comment des taux d'intérêt aussi élevés peuvent-ils être abordables pour les pauvres ?

90. - Les raisons tenant aux bénéficiaires du micro-crédit. Il faut reconnaître que la question essentielle pour les créateurs d'entreprise et les petits entrepreneurs existants reste l'accès au financement, et non le taux d'intérêt. Pour les pauvres, l'accès constant au crédit est plus important que le niveau réel de l'intérêt. Il rembourse pour pouvoir ensuite contracter de nouveaux emprunts. En effet, pour un micro-entrepreneur, le coût d'un micro-prêt ne représente qu'une petite part de ses coûts d'activité. Le surcoût n'a quasiment aucun impact sur le compte d'exploitation de l'entreprise. En revanche, il

157 . CGAP, La course à la réglementation : établissement de cadres juridiques pour la microfinance, étude spéciale, n° 4 - Mais 2000, p. 7-9.

change tout pour l'IMC. Bien que l'accompagnement soit aujourd'hui financé par l'Union européenne, l'Etat, la Caisse des dépôts et consignations, les collectivités locales et quelques partenaires privés, il n'en reste pas moins que la principale difficulté pour l'ADIE reste le financement du coût de l'accompagnement qui s'élève à environ 2.000 euros par projet financé et qui vient couvrir les frais liés au suivi d'un projet pendant une à deux années158. En plus, la durée de remboursement est courte. Le taux d'usure est moins justifié puisque, sur des prêts de faible montant et de courte durée, la différence en valeur absolue est relativement faible pour l'emprunteur, alors qu'elle est fondamentale pour l'équilibre financier de l'institution. A titre d'exemple, sur un prêt de 2 500 euros sur 18 mois, la différence est inférieure à 7 euros par échéance, suivant que le taux est de 6% ou de 12%. Enfin, les taux d'intérêts facturés par les prêteurs privés sont infiniment plus élevés que ceux pratiqués par les IMC. Le taux d'intérêt réclamé par les usuriers est de l'ordre de 10% par mois. Le recours au financement accordé par les opérateurs du micro-crédit qui peuvent fixer le taux d'intérêt permettant de couvrir tous les coût d'opération est donc absolument plus avantageux pour le micro-entrepreneur que s'il emprunte à un usurier proprement dit. Toutefois, la libéralisation complète du taux d'intérêt ne veut pas dire qu'il faut ignorer la protection des emprunteurs. En effet, l'autre moyen de protection est plus efficace que celui du taux d'usure.

91. - L'autre moyen de protection de l'emprunteur. Sachant que la réglementation du taux d'usure a pour but de protéger l'emprunteur contre la pratique abusive de prêteurs qui fixent un taux excédant le juste prix, la protection de l'emprunteur peut être assurée par d'autre moyen tout en supprimant des effets négatifs du plafonnement des taux d'intérêts. Le moyen efficace est de faire en sorte que le client ait été bien informé du coût total du financement. L'information des emprunteurs sur le TEG semble être une protection suffisante contre les abus. Il faut donc accepter de modifier la réglementation de l'usure. Mais, la suppression des taux d'usure pour les entreprises individuelles ne veut pas dire que l'institution prêteuse ne doit pas chercher à réduire ses coûts et à baisser ses taux d'intérêt. Il faut laisser la place au marché et donc faire jouer la force du marché. La libéralisation complète de taux peut entraîner des abus. Le taux excessif peut être pratiqué par des IMC en situation de monopole. Toutefois, la concurrence croissante est une sortie de cette situation monopolistique. La concurrence constitue le moyen efficace de réduire à

158 . Patrick SAPY, préc., p. 28.

la fois le coût du micro-crédit et le taux d'intérêt. Elle est le meilleur moyen d'abaisser les taux d'intérêt. L'intensification de la concurrence pousse les opérateurs de micro-crédit à s'efforcer de perfectionner les stratégies de crédit, de rationaliser des processus, d'améliorer les techniques contribuant à la réduction des coûts et à l'amélioration de la productivité pour pouvoir se positionner dans un marché concurrentiel qui tient principalement au prix. L'Etat doit adopter une politique qui vise à stimuler la concurrence entre les prestataires de micro-crédit. Pour stimuler la concurrence, il est important qu'il existe un cadre juridique et réglementaire adapté qui offrent à tous les opérateurs du microcrédit les mêmes chances de pénétrer sur le marché et d'opérer dans des conditions de concurrence loyale. Il doit faire en sorte que les opérateurs du micro-crédit aient une bonne connaissance de marché du micro-crédit et que l'emprunteur puisse comparer le coût total du micro-crédit proposé par chaque opérateur. Cette connaissance contribue à l'amélioration des résultats car elle force les opérateurs du micro-crédit à se comparer avec leurs pairs et à trouver des moyens pour améliorer leur efficacité. Le marché du microcrédit au Cambodge illustre bien cet argument. L'importation du micro-crédit dans ce pays est assez récente mais le marché est très concurrentiel. Le taux pratiqué au début est de l'ordre de 5% par mois et est diminué à hauteur de 3 à 4%.

92. - L'insuffisance de l'argument contre la pratique des taux d'intérêt élevés. Malgré ces arguments, certains contestent touj ours le taux élevé du micro-crédit accordé aux pauvres. Pour permettre de comprendre que les arguments évoqués contre le taux élevé sont une excellence remarque mais qui ne résout pas le problème à long terme, ils méritent d'être évoqués ici. Face au niveau des taux d'intérêt demandés par des opérateurs du micro-crédit, certains s'opposent à la pratique des taux d'intérêt élevés du micro-crédit en invoquant qu'ils ont du mal à accepter le fait que les prêts de faible montant accordés aux pauvres soient en général plus coûteux que les prêts commerciaux consentis à taux normaux. Cette contestation n'est pas sans arguments.

92-1. - D'une part, il a été justifié que puisque les emprunteurs sont pauvres, il n'est pas question de leur appliquer des taux plus élevés que ceux du marché officiel, même si la distribution du petit crédit coûte plus cher. En plus, comment les opérateurs du microcrédit doivent-ils imposer des taux d'intérêt beaucoup plus élevés que ceux du marché, alors qu'ils ont vocation à sortir ces bénéficiaires de la pauvreté ? C'est une très bonne remarque, comme l'a indiqué Madame Maria NOWAK « il n 'est pas moral de prêter aux

pauvres à un taux plus élevé qu 'aux riches est une phrase pleine d'excellente intention mais qui n 'engage à rien. Elle donne une très bonne conscience, mais elle ne résout pas le problème d'accès au crédit qui, dans une économie de marché, a forcément un prix159 ». Tout le monde sait que l'ajustement de l'offre et de la demande se fait essentiellement à travers le prix. Si le taux d'intérêt est soumis à un plafond légal, l'offre officielle du crédit diminue et l'offre informelle explose à des taux véritablement usuraire de l'ordre de 10% par mois, par semaine et même parfois par jour. En raison de cette usure, certains porteurs de projet sont de facto exclus du financement classique. Le manque d'accès au crédit pénalise les petites entreprises en création.

92-2. - D'autre part, la rentabilité du micro-crédit permet, certes, de répondre de façon continue aux besoins de la population. Or, elle conduit également à la recherche de la clientèle plus rentable, notamment plus urbaine, et donc d'accorder des prêts d'un montant moyen plus élevé, ce qui exclurait de nouveau une tranche de la population la plus pauvre d'un accès au financement. C'est une approche qui semble être adoptée par les organismes de micro-crédit au Cambodge où dans une grande partie des programmes de micro-crédit, on ne prête pas aux très pauvres, ni même parfois aux moyennement pauvres, car les prêteurs veulent être sûrs que les clients sont en mesure de rembourser, ce qui exclut beaucoup de gens. Pour être viable, le micro-crédit doit servir uniquement « aux pauvres actifs », c'est-à-dire aux plus pauvres des pauvres qui ont l'esprit d'entreprise. En plus, il est à noter que, malgré le développement du concept du micro-crédit allant jusqu'à la micro-finance, l'avenir de la micro-finance n'est pas de rejoindre les systèmes financiers et de s'y fondre160. Elle permet, en revanche, de réinsérer progressivement ses bénéficiaires dans le circuit bancaire.

Cette remarque est intéressante, mais elle doit être nuancée. Il faut noter que la clientèle desservie par le prêteur du micro-crédit doit être toujours celle qui n'a pas pu avoir un accès au crédit de banque classique. En plus, la recherche de la clientèle plus rentable ne veut pas dire forcément qu'il revient à exclure à nouveau la clientèle peu rentable puisque l'emprunteur doit être porteur de projet. Il est difficile d'imaginer que le micro-crédit est accordé à des pauvres qui n'ont pas d'esprit d'entreprise. Il faut rappeler que le programme du micro-crédit n'est pas un programme de charité. Il aide les pauvres mais seulement les pauvres actifs qui peuvent retrouver leur voie de développement grâce

159. Maria NOWAK, On ne prête pas que (aux) riches, préc., p. 204.

160. La lettre vernimmen.net, l'actualité micro-finance, Décembre 2006.

au crédit. Le financement doit donc être accordé au projet rentable et aider le porteur de se réinsérer dans le circuit économique, de retrouver sa citoyenneté économique. Le microcrédit est accordé aux pauvres mais qui peuvent se réintégrer au moyen du crédit. L'importance est donc de mettre l'accent sur le projet d'insertion économique du porteur et sur sa situation d'exclusion financière et non pas simplement sur le degré de pauvreté.

93. - En raison de l'insuffisance de ces arguments contre la pratique des taux d'intérêt élevés du micro-crédit, le législateur français, sous l'influence des opérateurs du microcrédit, a procédé à un changement législatif en libéralisant complètement le taux d'intérêt des crédits accordés aux entreprises individuelles, sous réserve de découvert en compte. Ce comportement peut être expliqué à travers l'étude de la politique législative de taux d'intérêt du micro-crédit.

Section II : La politique législative des taux d'intérêt du microcrédit

94. - L'application du droit commun au micro-crédit. Les analyses précédemment évoquées permettent de comprendre clairement la politique législative en matière de taux d'intérêt. Il faut rappeler que le micro-crédit est une notion purement économique qui n'avait pas d'acception juridique. La loi ne parle que du prêt (droit français) ou de crédit (droit cambodgien). Ainsi, la législation des taux d'intérêt du droit positif doit être purement et simplement appliquée au micro-crédit. Aucune volonté d'adopter une réglementation spéciale propre pour ce type de financement n'a été trouvée dans les deux systèmes juridiques. Il faut donc, en premier lieu, s'interroger sur l'applicabilité du Prakas libéralisant le taux d'intérêt pour les crédits accordés par les banques commerciales aux opérateurs du micro-crédit en droit cambodgien (§1) avant de regarder, en second lieu, une influence décisive du micro-crédit sur le changement du droit positif français dans ce domaine (§2).

§1. - L'inapplicabilité du Prakas du 16 mars 1995 au micro-crédit accordé par les IMF

95. - Inapplicabiité du Prakas du 16 mars 1995. En droit cambodgien, on croyait que la fixation de taux d'intérêt par les opérateurs du micro-crédit est libre. La plupart des opérateurs de micro-crédit pouvaient pratiquer dès le début des taux d'intérêt de 5% par mois, permettant d'envisager à terme leur viabilité. Le taux d'intérêt pouvait atteindre 60% par an. De ce fait, près de 90 ONG offrant du micro-crédit existent aujourd'hui. Aucune instance gouvernementale, même informelle, n'a discuté ou remis en cause la libre fixation des taux ou mis en place précocement une réglementation contraignante. Toutefois, on peut s'interroger sur la légitimité de cette liberté de fixation de taux d'intérêt du micro-crédit. En droit commun, l'article 59 du décret-loi de 1988 prévoit que « le prêt à intérêt n 'est admis que s 'il a été accepté dans un écrit constatant le consentement des parties. Le taux d'intérêt est fixé à 5% par an, sauf si une disposition contraire prévoit autrement161 ». Selon cette disposition, le taux d'intérêt conventionnel est plafonné à 5% par an. Les prêteurs doivent respecter le plafond de 5% par an. En cas de non respect, une sanction civile et pénale est prévue. Civilement, le prêteur doit imputer les intérêts perçus en dépassement du taux légal sur le montant du capital, et les sommes trop perçues après cette imputation produisent les intérêts à compter de la date de son remboursement et doivent être restituées à l'emprunteur. En plus, le prêteur peut être condamné pénalement. Mais quelle infraction pénale ? Aucune précision n'a été donnée162. On pourrait penser à la condamnation pour le délit d'usure. Toutefois, une exception est admise. Une loi ou un texte réglementaire spécial peut admettre un taux plus élevé. Conformément à cette disposition, l'article 2 du Prakas du 16 mars 1995 sur la libéralisation de la fixation de taux d'intérêt prévoit que « toutes les ban ques commerciales ont droit de fixer librement

l 'intérêt des dépôts et des prêts à intérêt qu 'elles accordent163 ». La liberté de fixation de l'intérêt de prêt est uniquement réservée aux banques commerciales. Il a été adopté avant l'adoption des Prakas réglementant des institutions de microfinance (IMF). On peut alors s'interroger sur l'applicabilité de ce texte au micro-crédit accordé par les institutions de micro-finance.

161 . Décret-loi n° 38/Kch du 28 octobre 1988 sur le contrat et la responsabilité extra-contractuelle.

162 . L'article 60 du même décret-loi de 1988.

163 . Prakas n° B - 595 - 47/PrK du 16 mars 1995 sur la libération de la fixation de taux d'intérêt.

95-1. - A la lecture de deux dispositions, l'article 2 du Prakas de 2002 et l'article 74 alinéa 3 de la loi sur les institutions bancaires et financières, on saurait confirmer cette applicabilité. L'article 2 du Prakas de 2002 définissant la micro-finance prévoit que « la micro-finance signifie la fourniture des services financiers tels que le crédit, et les dépôts aux familles pauvres, familles qui ont des revenus modestes et aux petites entreprises ». Cette disposition illustre clairement que le micro-crédit n'est pas autre chose que le crédit en droit commun. Le micro-crédit n'est pas une terminologie juridique prévue par le texte. Le droit positif utilise simplement le mot « crédit » pour désigner l'une des composantes de la micro-finance. Ainsi, toute disposition applicable au crédit l'est également au microcrédit. En plus, l'article 74 alinéa 3 de la loi bancaire précise limitativement des règles applicables aux institutions de micro-finance qui sont dérogatoires à la loi bancaire. Selon cet article, « les entités qui pratiquent les opérations de banque en vue notamment de promouvoir l'intermédiation bancaire dans les secteurs de l'agriculture, de l'artisanat, du petit commerce et des services aux particuliers, pourront exercer leur activité dans des conditions dérogatoires à la présente loi (loi sur les institutions bancaires et financières), fixées par une réglementation spécifique édictée par la Banque Nationale du Cambodge et concernant : leur capital minimum, leur agrément et les modalités pratiques de celui-ci, les règles prudentielles qui leur sont applicables, les conditions de leur implantation ». La fixation de taux d'intérêt n'y est pas incluse. Aucune dérogation en la matière n'est donc possible. A part des règles dérogatoires fixées par la BNC, les IMF sont soumises à la loi sur les institutions bancaires et financières. Ainsi, elles sont soumises à toutes les dispositions applicables aux banques au sens de l'article 1 de la présente loi.

95-2. - Toutefois, cette confirmation est renversée par la lecture des autres dispositions. Le système bancaire du Cambodge se compose des banques commerciales, des banques spécialisées et les IMF164. L'article 1er de la loi sur les institutions bancaires et financières du 18 novembre 1999 prévoit que les banques sont des personnes morales spécialement habilitées à pratiquer, à titre de profession habituelle, des opérations de banque. L'alinéa 3 de l'article 2 de la même loi dispose qu'une entité qui ne pratique qu'une seule de ces trois

164. A la fin de 2005, le système bancaire du Cambodge est composé de

- 15 banques commerciales dont 12 sont des banques locales et 3 sont des filiales des banques étrangères

- 4 banques spécialisées dont une appartient à l'Etat

- 16 IMF agrées et 24 opérateurs du micro-crédit enregistrées qui exercent des opérations dans les zones rurales. (Source : National Bank of Cambodia, Micro finance of Cambodia, 2005)

activités de base est qualifiée de banque spécialisée. En revanche, les institutions de micro-finance constituent une autre catégorie de banques puisqu'elles peuvent exercer, à l'exception de la mise à la disposition de la clientèle et le traitement des moyens de paiement en monnaie nationale ou en devises (art. 2 al. 2 b du Prakas du 11 janvier 2000), des opérations de banques165. Si l'article 1 er du Prakas du 16 mars 1995 limite la libre fixation de taux d'intérêt aux crédits accordés par les banques commerciales, on peut se demander si les IMF sont des banques commerciales. Selon le droit positif, les banques commerciales sont les banques qui peuvent exercer pleinement toutes les opérations de banque. Or, les IMF n'ont pas un objectif purement commercial. Leur vocation principale est de pouvoir fournir les services financiers dans les zones rurales. En plus, leur activité est limitativement encadrée par la loi. Elles ne sont pas des banques commerciales au sens du Prakas de 1995. En plus, sachant que le taux d'intérêt demandé par les IMF est plus élevé que celui des banques commerciales, l'autorité de tutelle cherche des mesures afin de pouvoir réduire le taux d'intérêt demandé par les IMF. Au lieu de fixer un plafonnement de taux d'intérêt, la BNC a adopté un Prakas du 14 août 2001 sur le calcul de taux d'intérêt du micro-crédit. Ce Prakas est propre, selon son article premier, aux IMF, banques spécialisées du crédit rural et ONG et associations assujetties à la loi sur les institutions bancaires et financières. Il ne concerne pas les banques commerciales puisque le taux d'intérêt est libre pour ces dernières, ce qui ne nécessite pas de leur imposer une méthode de calcul de taux d'intérêt. En plus, comme on a vu précédemment, la méthode de calcul prévue par ce Prakas conduit à conclure que le crédit accordé doit être un crédit amortissable. Il ne serait pas possible d'imposer aux banques commerciales uniquement cette méthode de crédit amortissable. Le Prakas de 1995 ne peut donc pas être étendu au micro-crédit.

96. - Les raisons de l'absence d'action en justice contre la pratique de taux d'intérêt illégal. Cette analyse du droit cambodgien sur l'applicabilité du Prakas du 16 mars 1995 au micro-crédit permet d'avertir les professionnels du micro-crédit sur l'illégalité de leur pratique. Si la pratique des taux d'intérêt actuellement de l'ordre de 40,90% en moyenne

165 . L'article 2 de la loi sur les institutions bancaires et financières prévoit que « les opérations constitutives de l'activité bancaire comprennent :

1. L'octroi de crédits, de toute nature, accordés à titre onéreux au profit du public, y compris le crédit-bail et les engagements par signature,

2. La réception de dépôts non affectés en provenance du public,

3. la mise à la disposition de la clientèle et le traitement des moyens de paiement en monnaie nationale ou en devises.

par an est illégale, pourquoi il n'existait pas d'action en justice introduite par l'emprunteur afin de contester cette pratique et de condamner civilement et pénalement le prêteur ? Trois raisons peuvent expliquer cette situation. D'abord, c'est en raison de l'habitude des praticiens. On croyait depuis longtemps que le Prakas de 1995 est applicable aux microcrédits, et l'autorité de tutelle ne veut pas remettre en cause cette pratique puisqu'elle ne voulait pas que les opérateurs se retirent du marché. Ensuite, les populations qui habitent dans les zones rurales ont des connaissances limitées. Enfin, la justice est difficilement accessible. On a toujours une hésitation pour introduire une action en justice. Les frais de justices sont en pratique largement élevés, ce qui ne permet pas aux pauvres d'y avoir accès librement. En plus, en raison du faible montant de prêt et donc de taux d'intérêt, le fait d'introduire une action en justice peut générer des frais plus importants que le montant de taux d'intérêt. Ce contexte n'existe pas en droit français qui est changé au fur et à mesure en faveur du développement du micro-crédit professionnel.

§2. - L'influence du micro-crédit sur le droit français en matière de taux d'intérêt

- Plan. La suppression du taux d'usure pour favoriser le développement du microcrédit, plus précisément du micro-crédit professionnel est évidente. Toutefois, on peut s'interroger sur l'opportunité de la même mesure en cas de micro-crédit social. Le même clivage entre micro-crédit professionnel (A) et micro-crédit social (B) est donc retrouvé ici.

A. Le cas du micro-crédit professionnel

97. - Le champ d'application de plus en plus réduit de la réglementation d'usure. En droit français, la réglementation de l'usure devient désormais une disposition exceptionnelle. Le taux d'usure a été supprimé pour les personnes morales166 et personnes physiques167 se livrant à activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale. Ce changement permet d'expliquer que le législateur a pris en considération des données de l'ordre économique168. Selon Madame Maria

166 . L'article 32 de la loi du 1er août 2003 sur l'initiative économique.

167 . L'article 7 de la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises.

168 . Bernard BOULOC, « La réforme de l'usure », RD bancaire et financier, n° 6 - Novembre/décembre 2003, p. 387.

NOWAK, seul 20% des créateurs d'entreprises bénéficiait d'un prêt professionnel169. Ce faible accès des créateurs d'entreprise à l'emprunt est l'un des principaux obstacles à la création d'entreprise en France. Les règles sur l'usure étaient la cause de ce faible recours à l'emprunt car elles empêcheraient les banques de proposer aux entreprises en création des solutions de financement à des taux qui tiendraient compte du risque pris170. Mieux vaudrait donc leur accorder des prêts à des taux élevés plutôt que de les exclure de l'accès au crédit. Ainsi, afin de faciliter le financement171 des activités économiques nouvelles, l'article 32 de la loi du 1 er août 2003 a exclu, en principe, les personnes morales se livrant à des activités commerciales, industrielles du champ de l'usure. Malgré des critiques selon lesquelles il n'est pas certain que le nouveau dispositif facilite les distributions des crédits destinés à accompagner les projets des jeunes entrepreneurs172, cette loi est diversement appréciée, et cette mesure est prolongée par la loi de 2005 qui supprime l'usure pour les entreprises individuelles.

99. - Les difficultés de l'association du micro-crédit face à la législation relative aux taux d'usure. L'article L. 313-3 du Code de la consommation prévoyait que « les dispositions du présent article et celles des articles L. 313-4 à L. 313-6 ne sont pas applicable aux prêts accordés à une personne morale se livrant à une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale ». Le domaine d'application de ce texte est imprécis173. On peut donc se demander si toutes les associations, peu importe l'objectif qui les anime, n'exercent pas une activité professionnelle, ce qui conduirait à les exclure systématiquement du champ d'application de la législation sur l'usure. De même, lorsqu'une association exerce occasionnellement l'une des activités mentionnées, les prêts qui lui sont accordés devraient échapper à la prohibition de l'usure. Quelle était la difficulté pour les opérateurs du micro-crédit, l'entreprise individuelle ?

On pouvait imaginer une hypothèse suivante. L'ADIE était le client institutionnel du prêt bancaire destiné finalement à financer le chômeur créateur d'entreprise. Elle est

169 . Maria NOWAK, « Taux d'usure et création d'entreprise », in La Tribune, 10 février 2003.

170 . Philipe POTIER, « Réforme du régime de l'usure », RD bancaire et Financier, n°2 - Mars/avril 2003, p. 113.

171 . Philipe POTIER, « Aménagement du régime de l'usure pour les personnes morales », RD bancaire et financier, n°2 - mars/avril 2004, p. 126.

172 . Stéphane PIEDELIEVRE, « Le déplafonnement de certains taux d'intérêts », JCP E 2003, n° 42, p. 1658. 173 . Anne-Valérie Le Fur, « Faut-il modifier la législation sur l'usure ? », Droit bancaire et financier, in Mélanges AEDBF-France, sous la dir. Jean-Jacque Diagre, Rev. Banque édition, 2004, p. 118.

bien sûre un professionnel du micro-crédit. Il importe peu qu'elle soit professionnelle commerciale ou non commerciale. La loi prévoit que dès lors qu'elle est un professionnel se livrant à une activité professionnelle non commerciale, elle ne peut plus se prévaloir des dispositions sur l'usure. Dans ce cas, la banque pouvait lui accorder un prêt qui n'est plus soumis à l'usure, alors qu'elle prêtait à sa clientèle, personne physique (entrepreneur individuelle), avec la prohibition de l'usure. Ainsi, la Banque, exerçant une activité purement spéculative, n'est pas assujettie au délit d'usure, alors que l'ADIE, association à but non lucratif, doit respecter les dispositions punissant l'usure. Si dans une hypothèse où la banque lui prête avec un taux assez élevé qui dépasse normalement le taux usuraire, l'ADIE doit supporter les pertes puisqu'elle ne peut pas accorder le prêt à sa clientèle avec un taux usuraire.

Une autre difficulté que l'on a pu exposer précédemment est que l'accès au financement est bloqué par le taux d'usure appliqué aux entreprises individuelles. C'est une des causes principales de la frilosité des banques sur les petits prêts à la création d'entreprise174. On s'est donc interrogé sur l'opportunité de maintenir l'usure pour l'entrepreneur individuel. Pourquoi le législateur n'a-t-il pas fait bénéficier les entrepreneurs individuels, les commerçants, les artisans de la suppression de l'usure ?

100. - La réforme de 2005 en faveur du développement du micro-crédit. Pour prolonger l'idée de faciliter l'accès aux crédits des jeunes entrepreneurs, le législateur a accepté un nouvel assouplissement à la prohibition de l'usure. L'article 7 de la loi qui modifie l'article L. 3 13-3 du Code de la consommation prévoit que « les prêts consentis aux personnes physiques agissant pour leurs besoins professionnels ne relèvent plus de la législation sur les taux usuraires ». Toutes les entreprises sont concernées, quelle que soit la structure individuelle ou sociétaire adoptée. Suite à des réformes successives, les établissements de crédit sont prêts à accorder des financements à des chômeurs créateurs d'entreprises à la condition de pouvoir fixer un taux qui correspond au risque élevé. Ce nouvel assouplissement est énoncé comme étant un outil qui favorise la création d'entreprise et le développement du micro-crédit175. C'est grâce à cette loi que l'on peut expliquer facilement l'influence décisive du micro-crédit sur le changement du droit

174 . Cécile JOLY, entretien avec Maria NOWAK « Le micro-crédit : un gisement d'activité encore peu exploité », Rev. Banque Magazine, Décembre 2004, n° 664, p. 13-15.

175 . Exposé des motifs de la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises ; Dominique LEGEAIS, Usure (loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises), RTD.com, Octobre/Décembre 2005, p. 815.

positif. En effet, au cours des débats parlementaires sur l'adoption de ce texte, un député a critiqué que cette mesure consistant à la suppression de la législation sur l'usure aux prêts consentis pour leur seule activité professionnelle, aux entrepreneurs individuels, peut être dangereuse en terme de surendettement. En plus, l'augmentation des coûts - les charges de la dette - pèsera aussi sur le bilan de l'entreprise et accroîtra les risques de faillites des nouvelles entreprises. Lorsque l'on sait que la majorité d'entre elles ne réussissent pas à passer le cap des trois ans, on peut légitimement douter de l'efficacité d'une telle mesure. Toutes ces critiques ne persistaient pas longtemps grâce à l'argument du Monsieur Renaud Dutreil qui a expliqué que « aujourd'hui nous vous proposons de franchir un pas de plus dans cette simplification, à la demande des associations très engagées dans le financement de l'économie sociale notamment l'ADIE.... C'est une mesure typiquement du microcrédit. Nous souhaitons développer ce type de financement pour des créateurs à l'heure actuelle exclus du système bancaire176 ». Le micro-crédit, qui s'incorpore dans les dispositions applicables au crédit en général, exerce une influence très forte sur le cadre juridique du crédit surtout en matière de taux d'intérêt.

101. - En résumé, la suppression du taux d'usure pour les sociétés élargies aux entrepreneurs individuels facilite, d'une part, l'accès aux crédits des jeunes, des chômeurs créateurs d'entreprise, et d'autre part, le développement du micro-crédit professionnel. En plus, elle évitera à certains entrepreneurs d'avoir recours aux crédits à la consommation, lesquels sont plus onéreux177, pour financer leurs besoins professionnels. Ainsi, l'interdiction de l'usure qui est un principe longtemps incontournable en droit bancaire est devenu une règle résiduelle. L'objectif de la protection de l'emprunteur est passé au second plan. L'idée de faciliter le crédit à des jeunes entreprises est privilégiée à l'époque contemporaine. Le législateur a pris en considération des données économiques en admettant que l'intérêt peut être fixé en fonction du risque pris par l'établissement de crédit. Plus le risque est important, plus le taux doit être élevé. Si un emprunteur dont la situation financière est précaire veut avoir accès au crédit, il doit également accepter d'en payer le prix élevé. En raison du niveau élevé des taux d'intérêt, on pourrait considérer que les opérateurs du micro-crédit sont des « usuriers des temps modernes ». Enfin, s'il paraît acceptable de libérer le taux d'intérêt pour le micro-crédit accordé à des porteurs de projet économique, qu'en est-il pour le micro-crédit social ?

176 . Séance du lundi 13 juin 2005.

177 . Bernad BOULOC, préc., p. 388.

B. Le cas du micro-crédit social

102. - Les arguments en faveurs du maintien du taux d'usure pour le micro-crédit social. Si le bien-fondé du principe même de prohibition de l'usure a souvent été remise en cause s'agissant des entreprises dans la mesure où celles-ci auraient moins besoin d'être protégées que d'avoir accès à des financements adaptés à leur situation, il est rarement contesté lorsqu'il concerne les particuliers. En se fondant sur les mêmes arguments notamment le risque élevé, le coût de l'opération et la viabilité, la naissance du microcrédit social nous conduit à se demander s'il faudrait supprimer l'usure pour ce dernier type de financement. En effet, les mêmes constats résultant de la réglementation de l'usure peuvent être retrouvés ici. Toutefois, plusieurs raisons permettent de maintenir la législation de l'usure pour le micro-crédit social, étant qualifié de micro-crédit à la consommation.

102-1. - La première raison est relative à la volonté même du législateur qui veut encourager la distribution du micro-crédit social à un taux d'intérêt bas afin de permettre à des personnes en situation de difficulté de réaliser leur projet d'insertion sociale, professionnelle, de cohésion familiale. Leur situation financière est très modeste, mais il leur serait possible d'emprunter à des conditions de prêt qui seront adaptées à la spécificité de leur situation. Une hausse des seuils actuellement fixés autoriserait sans aucun doute une distribution plus large du crédit et permettrait de toucher des foyers d'une solvabilité moindre que celle entrant aujourd'hui dans la cible des établissements de crédit. Cette mesure serait alors conforme à la politique incitative du législateur. Toutefois, les taux élevés qui devraient être appliqués représenteraient une charges supplémentaire pour les populations dont les ressources financières sont déjà très modestes. De même, un crédit trop onéreux serait ressenti comme inacceptable par l'opinion publique comme par ces emprunteurs eux-mêmes. Ils augmentent les dettes, ce qui risque de déboucher sur le surendettement. Sachant que la première critique qui est adressée au micro-crédit social est le problème du surendettement. Le gouvernement doit donc faire en sorte que le microcrédit social ne soit pas une cause de surendettement. C'est la raison pour laquelle le taux d'intérêt doit être bas. Le C0SEF a fixé le taux à 8%. Ainsi, il n'en demeure pas moins que l'usure constitue un instrument privilégié de lutte contre le surendettement. C'est là le principal argument invoqué pour justifier sa prohibition. L'Etat préfère prévenir les

situations de surendettement, en fixant un taux d'usure qui permet d'éliminer du marché les emprunteurs dont la couverture du risque excède le taux d'usure. Il s'agit d'un moyen d'exclure les individus dont le risque de surendettement est élevé. Ainsi, afin de lutter efficacement contre le surendettement et de protéger les plus faibles, la réglementation d'usure doit être maintenue.

102-2. - La deuxième raison tient au fait que la création de FCS qui garantit jusqu'à 50% du prêt accordé, diminue le risque de crédit. Plus le risque est élevé, plus le taux doit être élevé. Or, le risque du crédit accordé aux bénéficiaires du micro-crédit social est partiellement couvert par le Fonds de garantie. Il n'y a donc pas de raison d'imposer un taux d'intérêt élevé.

102-3. - La troisième raison tient à l'accompagnement obligatoire. Le coût de l'opération est élevé par rapport au montant des prêts qui sont accordés. Le taux d'intérêt doit permettre de couvrir ce coût d'opération. Toutefois, cet argument peut être facilement tenu en échec puisque l'accompagnement de l'emprunteur diminue forcément le coût de l'opération restant à la charge des banques. L'évaluation du projet et le suivi de l'emprunteur après l'octroi du crédit sont pris en charge par l'organisme d'accompagnement, les banques qui acceptent d'accorder directement le prêt ne font que décaisser le prêt.

103. - Conclusion. A la différence du micro-crédit professionnel, la destination du microcrédit social n'est pas de créer ou développer une entreprise. Il ne crée donc pas de revenus qui permet au bénéficiaire de payer le taux élevé de micro-crédit. En outre, il ne s'agit plus de question de la pérennité financière ou institutionnelle de l'organisme du micro-crédit puisqu'il est accordé directement par l'établissement de crédit. Ainsi, la protection des bénéficiaires du micro-crédit social, qui sont des consommateurs, doit être touj ours au premier plan, même si l'interdiction de l'usure est levée pour les crédits accordés aux entreprises. Cette mesure de suppression du taux d'usure s'inscrit dans une politique qui se préoccupe plutôt de la création d'entreprise, des emplois que de la protection des emprunteurs qui ne sont pas des consommateurs, car la création et la pérennité des entreprises concourent à la croissance de l'emploi et au dynamisme de l'économie. Renforcer le potentiel de croissance de l'économie française afin d'augmenter le taux

d'emploi et ainsi réduire le chômage implique de trouver la possibilité de financement qui est indispensable à la création et au développement de l'entreprise. Elle permet également de faciliter le développement du micro-crédit professionnel. Le gouvernement a pris conscience des demandes des organismes de financement de l'économie sociale. Cela traduit une volonté d'accorder implicitement une place importante au micro-crédit dans le droit positif, bien que la terminologie du micro-crédit ne soit pas reconnue juridiquement. Cette tendance en droit français est moins évidente que celle en droit cambodgien, s'agissant de la réglementation des opérateurs du micro-crédit, cela étant dit, puisque le micro-crédit ou plus largement la micro-finance constitue dans l'esprit du législateur français une activité subsidiaire des banques qui devront à terme s'impliquer activement dans ce nouveau créneau.

Chapitre II : La réglementation des opérateurs du micro-crédit

104. - La nécessité de la réglementation des opérateurs du micro-crédit178. L'opération du micro-crédit avait été initialement transposée au Cambodge dans les années 90 par les ONG dans le cadre de leur programme de développement rural, c'est-à-dire avant même l'adoption de la loi sur les institutions bancaires et financières en 1999. Grâce à leur succès, de nombreuses ONG qui offrent des services de micro-crédit, et plus largement de la micro-finance, sont présentes dans ce pays. Bien que certains puissent se demander si on n'a pas tendance à se précipiter un peu trop dans la mise en place de cadre réglementaire du micro-crédit179, la rapide croissance du secteur rend de plus en plus nécessaire l'élaboration d'une réglementation précise. L'objectif premier de la réglementation de ces institutions est de rendre légitime leur activité du micro-crédit. La nécessité de la mise en place de la réglementation dans ce secteur est également souhaitée par les grands opérateurs en place qui veulent mobiliser les ressources commerciales, les épargnes180 afin de pouvoir satisfaire les besoins attendus par les populations en toute indépendance des subventions des bailleurs de fonds. Cette volonté de mobiliser les dépôts du public impose à l'autorité de tutelle de prendre des mesures de supervision afin de protéger l'image du système financier du pays et de protéger des épargnants individuels. En plus, un auteur a pu invoquer qu'il ne faut pas sous-estimer les risques encourus par la diversification des opérateurs de la micro-finance notamment l'instrumentalisation de ces institutions aux fins de blanchiment d'argent ou de financement d'activité terroriste181. Il faut donc une réglementation précise pour les opérateurs du micro-crédit. La question principale est de savoir comment réglementer ces opérateurs du micro-crédit ?

105. - L'adoption d'une réglementation spécifique pour les opérateurs du microcrédit. Deux approches opposées de la réglementation sont possibles182 : une approche qui

178. C. ROBERT, Regulation and supervision of microfinance: A conceptual Framework, November 2000.

179. Anne-CLAUDE, La question de la réglementation des IMF, BIM n° 41, 19 octobre 1999. 180. ACLEDA a voulu se transformer en banque spécialisée afin de pouvoir mobiliser des ressources commerciales.

181.Georges CARDON, « La micro-finance peut-elle être un vecteur pour l'argent criminel ? », Banque,. Novembre 2006, n° 685, p. 46-50.

182 . Dorothée PIERRET et Lyrille ROLLINDE, « Le contexte réglementaire du micro-crédit en France », in Exclusion et liens financiers/Rapport du Centre Walras, Economica, 2002, p. 403-407 « selon ces auteurs, la réglementation repose un clivage de deux structures qui se distinguent. La première constitue une structure qui vise à favoriser la médiation bancaire et donc à impliquer davantage les banques classiques dans le

vise l'entrée dans le secteur des institutions financières réglementées traditionnelles (les banques, les sociétés financières, etc.) et celle d'institutionnalisation des opérateurs du micro-crédit existants. Dans cette dernière approche, il consiste à adopter une réglementation spécifique les opérateurs du micro-crédit. C'est une voie adoptée par les deux systèmes juridiques. L'article 74 alinéa 3 de la loi bancaire cambodgienne de 1999 habilite la BNC à adopter des règles spécifiques pour les IMF, dérogeant à la loi bancaire. De même, jusqu'en 2005, une approche d'institutionnalisation paraissait avoir été adoptée par le législateur français. Ce constat peut être justifié par l'adoption de l'article 1 er du décret du 30 avril 2002 portant l'application du 5° de l'article L.51 1-6 du Code monétaire et financier, issu de l'article 19 de la loi NRE du 15 mai 2001. Cet article premier confie le pouvoir d'habilitation des associations de micro-crédit à un comité placé sous l'autorité du ministre chargé de l'économie. Par contre, une bancarisation du micro-crédit semble désormais être une voie choisie par le droit français. Toutefois, cette démonstration doit être relativisée. En effet, les deux tendances se conjuguent en France. La volonté de développer le micro-crédit social à travers des banques et celle de maintenir le développement du micro-crédit professionnel à travers des dispositifs existants dans le cadre de crédit accordé par les associations sans but lucratif, spécialement l'ADIE. En réalité, le droit français privilégie plutôt un partenariat entre les banques et les organismes de micro-crédit qu'une totale bancarisation du micro-crédit. Il serait souhaitable de mesurer la réglementation favorisant ce partenariat (Section II). La tendance vers une réglementation spécifique des opérateurs du micro-crédit suscite beaucoup de difficultés qui sont liées à la spécificité du micro-crédit. Cela veut dire qu'il y a à prendre en considération des caractéristiques qui distinguent le micro-crédit du crédit du secteur bancaire commercial. L'adoption du cadre institutionnel et réglementaire des opérateurs du micro-crédit (Section I) doit tenir compte de la spécificité du micro-crédit. Le choix d'une réglementation spécifique des opérateurs du micro-crédit traduit la reconnaissance de la spécificité du micro-crédit par les deux systèmes juridiques.

financement des micro-crédits. La seconde suppose une reconnaissance d'un statut juridique particulier pour les structures du micro-crédit à la lumière de la Grameen Bank »; Karin BARLET, Microfinance et « commercialization » : de quoi parle-t-on ?, BIM n° 74 - 13 juin 2000, p. 1 ; Laurent LHERIAU, Tome I, précité., n° 38-41, p. 47-49 « Toutefois, selon Laurent LHERIAU, trois approches de réglementation sont disponibles. Toutefois, la dernière approche visant une auto-réglementation a été écartée à l'heure actuelle ».

Section I : Le cadre institutionnel et réglementaire des opérateurs du micro-crédit

106. - La définition des opérateurs du micro-crédit. Le cadre institutionnel et réglementaire des opérateurs du micro-crédit n'est pas le même pour tous les opérateurs du micro-crédit. Cela veut dire que tous les opérateurs du micro-crédit ne peuvent pas être traités de la même manière. La définition des opérateurs du micro-crédit constitue donc un préalable indispensable. En effet, on parle couramment en pratique d'Institution de micro-finance et non d'Institution de micro-crédit. Mais, il faut comprendre qu'il existe deux acceptions183 de la micro-finance. Dans les pays en voies de développement, comme le Cambodge, elle désigne l'ensemble des services financiers. D'abord, axée principalement sur l'offre de micro-crédit, la gamme des services proposée par les institutions de microcrédit s'est élargie et diversifiée vers la micro-épargne, la micro-assurance qui couvre les risques de maladie, de décès et de catastrophes naturelles. Il serait donc plus juste de parler d'IMF que d'IMC. En revanche, dans les pays industriels où la bancarisation des populations est très forte notamment en France, la micro-finance se résume pratiquement à l'octroi du micro-crédit par les associations de micro-crédit. Ainsi, même si l'on parle d'IMF en France, on vise en effet seulement les associations qui offrent uniquement des produits de micro-crédit à des personnes non-bancables bien identifiées. Il est donc mieux de parler d'opérateur du micro-crédit que de l'association de micro-crédit ou de l'institution de micro-finance pour permettre de tenir compte de la spécificité en droit français. L'IMF et l'association de micro-crédit peuvent être également utilisés selon le contexte dans le cadre de cette étude. Toute cela montre qu'il existe des IMF qui ne sont pas autorisées à mobiliser les épargnes et à offrir d'autres services financiers que le crédit. Une réglementation prudentielle (§2) doit être obligatoire dès lors que l'épargne est autorisée, ce qui n'est pas un seul critère adopté par les deux systèmes juridiques. Il est important de préciser que cette recherche n'a pas vocation à étudier de manière détaillée cette réglementation prudentielle. Elle vise tout simplement à donner des raisonnements qui justifient l'adaptation des règles prudentielles normalement applicables aux établissements de crédit. En effet, la réglementation doit être faite en fonction des activités exercées par les opérateurs du micro-crédit. Il serait donc souhaitable de privilégier la réglementation par activité, plutôt que celle par le statut puisque les IMF peuvent prendre

183 . Laurent LHERIAU, Tome I, préc., n° 7-19, p. 19-35.

des formes diverses. Toutefois, le choix de statut juridique (§1) est une stratégie importante du fait qu'il permet aux opérateurs du micro-crédit de bénéficier d'avantages divers.

§1. - Le statut juridique des opérateurs du micro-crédit

107. - Une approche différente de la réglementation relative au statut juridique des opérateurs du micro-crédit dans les deux systèmes juridiques. Les opérateurs du microcrédit ont de statuts ou des formes de reconnaissance diverses184 : les mutuels, les coopératives, les ONG, les associations etc. Le choix de statut juridique est encadré par loi. Quels sont les statuts juridiques des opérateurs du micro-crédit admis par ces deux systèmes juridiques ?

Bien qu'ils adoptent tous les deux une réglementation spécifique, le statut juridique des opérateurs du micro-crédit dans les deux droits n'est pas le même185. L'un prône l'unique statut juridique d'association de la loi de 1901, et l'autre préfère admettre une grande souplesse du choix des formes juridiques. Ce choix de politique législative de forme juridique des opérateurs du micro-crédit suscite deux remarques. La première concerne une différente perception de la notion de la micro-finance par ces deux droits, et la seconde montre la stratégie du choix de forme juridique qui peut offrir des avantages non négligeables. Cela nous conduit à étudier le statut juridique des opérateurs du microcrédit en droit cambodgien (A) différemment de celui en droit français (B).

A. Le statut juridique des opérateurs du micro-crédit en droit cambodgien

108. - Une distinction entre les IMF supervisées et les IMF reconnues. En droit cambodgien, la loi articule de manière pragmatique la réglementation bancaire et des textes

184 . Jaques ATTALI, préc., p. 154.

185 . Laurent LHERIAU, Tome I, préc., n° 43-88, p. 50-92 : Selon cet auteur, il existe quatre catégories des pays du monde qui réglementent différemment les statuts juridiques des IMF. Ces pays peuvent être regroupés en quatre groupes. Le premier groupe adopte une approche mutualiste et décentralisée des réglementations intégrées des coopératives d'épargne et de crédit. Les pays du premier groupe se sont concentrés sur le développement de réseaux financiers mutualistes. Le deuxième groupe retient une approche sectorielle de l'activité de micro-finance. Dans ce groupe, les pays conçoivent la micro-finance comme un secteur à part entière et ont élaboré une réglementation ayant vocation à englober l'ensemble des IMF, mutualistes ou non. Le troisième groupe dont fait parti le Cambodge adopte une approche mixte articulant loi bancaire et réglementation dérogatoire. Enfin, le dernier groupe préconise une approche de réglementation qui considère la micro-finance comme une activité bancaire résiduelle. Ce groupe 4 limite la micro-finance à des associations de micro-crédit spécialisées. La France adopte cette dernière approche.

spécifiques des IMF dérogatoires à la loi bancaire. La réglementation des IMF est confiée à la BNC qui adopte des règles sous forme de Prakas « règlement ». La BNC a pris la responsabilité de la supervision du secteur au travers son Bureau de supervision des systèmes bancaires décentralisées (BSSBD), créé en 1997 au sein du département de la supervision bancaire. Le BSSBD a contribué activement à la mise en place d'une réglementation spécifique aux IMF. Selon les Prakas pris par la BNC, on peut trouver une dichotomie de statuts juridiques des IMF : les IMF supervisée qui doivent se faire agréer auprès de la BNC et les IMF reconnues qui doivent se faire simplement enregistrer auprès de la même autorité. Les critères de distinction sont imposés par le Prakas de 2002 qui vient remplacer celui de 2000. L'article 1er du Prakas de 2000 prévoyait que « La Banque Nationale du Cambodge est habilitée à accorder l 'agrément pour exercer des opérations de la micro-finance à des institutions de micro-finance, ci-après dénommées établissements, qui remplissent les conditions posées par les dispositions de ce Prakas. Les autres ONG, associations, entités ou établissements qui ne remplissent pas les conditions d 'octroi de l 'agrément mais qui continuent à offrir des services de crédit individuel ou solidaire, doivent se faire enregistrer auprès de la Banque nationale du Cambodge». Ainsi, toutes les IMF qui ne sont pas agréées sont des IMF reconnues à condition qu'il y ait un enregistrement auprès de la BNC. Malgré une bonne intention de ce Prakas qui voulait simplifier la distinction entre les deux catégories d'IMF, les critères d'octroi d'agrément qui caractérisaient évidemment une telle distinction n'étaient pas posées par les autres dispositions du même Prakas, de telle sorte que l'on ne savait pas dans quels cas les opérateurs en place devaient se faire agréer. En revanche, les établissements qui devaient se faire enregistrer étaient ceux qui offrent des services de crédit. Pour combler ce vide juridique, un nouvel Prakas de 2002 a été pris et est venu supprimer l'article 1er du Prakas de 2000. Ce nouvel Prakas précise expressément les cas où les IMF doivent se faire agréer et les cas où les IMF doivent se faire tout simplement enregistrer auprès de la BNC.

109. - Le cas où les IMF doivent se faire agréer. Les IMF dont le niveau d'activité atteint un des seuils déterminés par le Prakas de 2002 sont obligées de se faire agréer. Cela veut dire que les ONG, les associations ou toutes autres entités en place doivent se transformer en IMF agréées dès lors que l'une des conditions imposées est respectée. L'article 8 du Prakas prévoit que « la demande d'agrément est une obligation pour les institutions de micro-finance qui remplissent l'une des conditions suivantes :

1. Pour les institutions offrant des crédits

- Le portefeuille de crédit s'élève à un montant au moins égal à 1 000 millions riels - Ou le nombre des emprunteurs s'élève au moins à 1 000 personnes

2. Pour les institutions collectant des épargnes

- Le montant d'épargne volontaire du public s'élève au moins à 100 millions riels - Ou le nombre des déposants s'élève au moins à 1 000 personnes

Deux remarques peuvent être tirées de cette disposition.

109-1. - D'abord, le droit cambodgien subdivise les IMF supervisées en deux sous catégories distinctes : les IMF offrant des crédits et les IMF mobilisant des épargnes. Cette subdivision est conforme à la disposition de l'article 2 du Prakas de 2000 prévoit que « les IMF agréées doivent exercer les opérations de banque prévues par l'article 2 de la loi sur les institutions bancaires et financières. Les services de crédit et d'épargne sont autorisés s'ils ne sont pas interdits par ce Prakas ou dans l'agrément ». Toutes les opérations de banques peuvent être exercées par les IMF agréées. La micro-finance est ainsi considérée dans son acception large comme les activités de banques classiques. Toutefois, il existe une double limite à l'exercice de leur activité. La première limite concerne les services de crédit et d'épargnes. L'article 2 alinéa 1 prévoit que les services de crédit ou d'épargne peuvent être autorisés s'ils ne sont pas interdits par les dispositions de ce Prakas ou dans l'acte d'agrément. Cette disposition paraît assez générale. Or, l'interdiction de mobiliser les épargnes ne doit concerner que les IMF offrant les crédits. En plus, l'interdiction aux IMF recueillant des épargnes de faire du crédit est irréaliste puisque leur activité principale est l'octroi des micro-crédits. En effet, il vaut mieux dire que les IMF agréées en raison du volume de crédit peuvent être autorisées à faire des épargnes. En effet, la subdivision entre les IMF offrant des crédits et celles collectant des épargnes est en elle-même irréaliste. S'il existe évidemment des IMF qui n'offrent que des services de micro-crédit (les ONG, les associations etc.), il est difficile d'imaginer l'existence des IMF qui n'offrent que des services d'épargne sans activité de crédit. Théoriquement, les IMF recueillent les épargnes et les dépôts du public en vue d'assurer leur financement, de les transformer en prêts. Si elles ne mobilisent pas cet argent, comment peuvent-elles gérer de façon suffisamment rentables pour rémunérer ces épargnes et dépôts ? Il serait donc souhaitable de supprimer la subdivision entre les IMF offrant des crédits et les IMF collectant des épargnes, mais de

distinguer les IMF offrant uniquement des crédits des IMF qui offrent la totalité des services de la micro-finance dans son acception large. Une autre limite concerne notamment l'interdiction des opérations sur instrument financier, le négoce au comptant ou à terme des pierres et des métaux précieux, des matières premières ou marchandises.

109-2. - Ensuite, la BNC a retenu trois critères : le volume du crédit, le volume des épargnes et le nombre des déposants. Ce dernier critère est tout à fait convenable du fait que l'un des objectifs de la réglementation prudentielle des IMF agréées est de protéger les déposants186. La lecture des dispositions de l'article 8 du Prakas de 2002 nous donne l'impression que le droit cambodgien se veut pragmatique. L'explication approfondie de ce pragmatisme sera ultérieurement abordée à propos de l'étude sur le champ d'application de la réglementation prudentielle. Il est simplement nécessaire de remarquer ici que la loi n'impose l'agrément qu'à des IMF de taille importante. Les petites IMF qui mobilisent les épargnes ou les dépôts du public ne sont pas obligées à demander l'agrément et donc à se soumettre à des règles prudentielles résultant de l'agrément. Elles peuvent continuer à exercer leur activité à condition que le volume de l'activité ne doive pas dépasser l'un des seuils fixés et qu'elles se fassent enregistrer. Au regard de ces seuils, on se demande si une IMF agréée peut être créée à partir de rien. La loi oblige les ONG, associations ou autres entités à se transformer si l'un des trois seuils est franchi. Cela veut dire que l'agrément est facultatif dans les autres cas. Or, lorsqu'elles décident de se faire agréer, elles doivent respecter les règles imposées pour les IMF agréées notamment le capital minimum, la forme juridique et les autres règles prudentielles. Rien n'empêche donc qu'une IMF nouvelle puisse demander l'agrément. En effet, cette possibilité est indirectement prévue par l'article 5 alinéa 10 du Prakas de 2000 qui prévoit que « si une personne morale qui demande l 'agrément est une entité déjà créée, elle doit fournir des informations sur leur activité ainsi que le bilan d'activité des trois dernières années certifié par le commissaire aux comptes ».

Ainsi, une nouvelle IMF agréée peut être effectivement créée à partir de rien, et les petites IMF existantes peuvent continuer à exercer leur activité à condition qu'il y ait l'enregistrement. Cette possibilité est prévue expressément par l'article 9 du même Prakas. Les établissements qui n'ont pas demandé l'agrément doivent réduire le volume de leur activité à la limite exigée pour l'obligation d'enregistrement prévue par l'article 3 du

186 . V. infra, n° 117-120.

même Prakas.

110. - Les cas où les IMF doivent se faire enregistrer. L'article 3 du Prakas de 2002 prévoit que « l'enregistrement est une obligation pour les opérateurs de la micro-fiance qui sont les ONG, les associations et toutes entités, exerçant des opérations de la micro-finance et qui remplissent l'une des conditions suivantes :

1. Pour les établissements offrant des crédits

- le portefeuille de crédit atteint un montant d'au moins de 100 millions riels

2. Pour les établissements mobilisant des épargnes

- l'épargne volontaire du public atteint un montant d'au moins de 1 million riels - ou 100 déposants ou plus »

La même remarque concernant la subdivision des IMF agréées est retrouvée pour les IMF enregistrées, ce qui ne mérite donc pas plus de développement. La suggestion énoncée précédemment demeure valable pour cette catégorie d'IMF qui sont simplement reconnues au moyen de leur enregistrement auprès de la BNC. Le problème important est relatif à l'évolution des dispositions du Prakas de la BNC. L'article 1er du Prakas de 2000 prévoyait que les ONG, les associations et les autres entités qui ne remplissent pas les conditions pour demander l'agrément doivent se faire enregistrer. Aucun seuil n'était pas fixé pour obliger ces institutions à demander leur enregistrement. Cependant, des seuils minimums sont fixés par le Prakas de 2002. Vu que l'enregistrement constitue une condition de reconnaissance de ces opérateurs, on peut donc se demander si les opérateurs dont le volume d'activité ne dépassent pas l'un des seuils fixés par ce Prakas pour la demande d'enregistrement peuvent continuer à exercer légalement leur activité.

La lecture du seul article 3 et l'évolution des dispositions des deux Prakas permettraient de donner une réponse affirmative. L'enregistrement est une obligation dès lors l'un des seuils fixé est dépassé. Cela veut dire que l'enregistrement est facultatif pour les autres opérateurs dont le volume d'activité reste en dessous de l'un de ces seuils. C'est une interprétation donnée par la BNC187. Les très petites IMF peuvent exercer librement leur activité en dehors de la réglementation et supervision de l'autorité de tutelle. Cette tendance résulte de la constatation de coût élevé des mesures de réglementation et supervision. Toutefois, il faut comprendre que l'objectif premier de la mise en place de la

187 . National Bank of Cambodia, «Micro finance of Cambodia», 2006, p. 14.

réglementation des IMF en droit cambodgien est de rendre légitime les activités des opérateurs du micro-crédit. Il ne serait donc plus possible de laisser les IMF qui ne se sont pas enregistrées de continuer d'exercer leur activité hors du cadre légal. En plus, la lecture combinée des deux dispositions des articles 5 et 6 du même Prakas nous amène à affirmer que ces opérateurs doivent cesser leur activité. L'article 5 prévoit que « la Banque Nationale du Cambodge donne un certificat d'enregistrement à un opérateur de la micro-finance qui remplit le standard et les critères en se munissant des documents et informations exigés. Ce certificat peut être retiré, et l 'enregistrement est supprimé si l 'opérateur ne respecte pas les conditions imposées par la Banque National du Cambodge». Prolongeant cette disposition, l'article 6 prévoit que « l'opérateur de la micro-finance dont l 'enregistrement est refusé ou supprimé par la BNC doit cesser ses activités pendant un délai de trois mois à compter de la notification de la décision de la Banque Nationale du Cambodge ». Ainsi, si les opérateurs dont l'enregistrement est refusé ou supprimé doivent mettre fin à leur activité, il n'est pas logique de laisser les opérateurs qui ne remplissent pas l'un des seuils imposés pour une obligation d'enregistrement de continuer leur activité en dehors du cadre légal. Vu le nombre déjà important des opérateurs enregistrés, cette évolution illustre la volonté de la BNC de réduire des coûts liés à l'exercice de contrôle non prudentiel des très petites IMF et donc de restreindre la création de nouvelles IMF. La BNC, sous l'influence des bailleurs de fonds, veut renforcer le contrôle des opérateurs de la micro-finance et pousser les IMF existantes à s'efforcer d'améliorer la qualité de leur service.

111. - Les formes légales prévues pour les IMF agréées. Il faut enfin rappeler que les IMF agréées doivent exercer les opérations de banque prévues par l'article 2 de la loi bancaire de 1999. Elles sont donc considérées comme une catégorie de banques qui bénéficient d'un régime dérogatoire à la loi bancaire. Cette articulation entre la réglementation bancaire et les textes spécifiques permet de comprendre le choix des formes juridiques admises pour les IMF agréées. Elles doivent prendre l'une des deux formes juridiques : la coopérative ou la société par action. Bien qu'il existe des IMF qui prennent la forme d'une société par action188, la forme coopérative est la plus répandue. Le droit cambodgien laisse donc une place ouverte au choix des formes juridiques. Toutefois, cette possibilité semble être strictement restreinte par le droit français qui privilégie le statut

188 . EMT est une société à responsabilité limitée. Elle est devenue AMRET.

d'une association de la loi de 1901. Ce choix politique législatif traduit une vision restrictive qu'a le droit français de la notion de micro-finance. Cela peut être illustrée au travers de l'étude du statut juridique des opérateurs du micro-crédit en droit français.

B. Le statut juridique des opérateurs du micro-crédit en droit français

112. - Le statut spécifique des opérateurs du micro-crédit par rapport à la loi bancaire. L'impulsion du micro-crédit en droit français se traduit par l'adoption de l'article 19 de la loi du 15 mai 2001 modifiant l'article L.51 1-6 du Code monétaire et financier. Une interrogation sur le statut juridique des opérateurs du micro-crédit s'est faite jour à la suite de l'adoption de cet article189. En effet, avant cette loi, on avait le sentiment que le micro-crédit s'intégrait dans la réglementation bancaire au travers de l'article L.5 11- 1 du même Code qui prévoit que l'interdiction ne s'applique pas aux « organismes sans but lucratif qui, dans le cadre de leur mission et pour des motifs d'ordre social, accordent, sur leur ressources propres, des prêts à conditions préférentielles à certains de leurs ressortissants ». Le micro-crédit constitue bien une action sociale de lutte contre le chômage et l'exclusion financière. Toutefois, la notion de motif social du crédit semble restrictive par rapport à la notion du micro-crédit à des fins productives. En plus, la possibilité de prêter uniquement sur les ressources propres restreint fortement le développement du micro-crédit. C'est la raison pour laquelle le législateur français préfère, selon l'article 19 de la loi du 15 mai 2001, accorder un statut spécifique à l'association de micro-crédit. Ce choix d'un statut spécifique se traduit par la mise en place d'une forme d'habilitation spéciale qui sera développée ultérieurement. Il peut entraîner une difficulté d'intégration des institutions financières existantes dans le domaine du micro-crédit. Pour éviter cette situation, un autre article 7 de la même loi modifiant l'article 15 de la loi bancaire du 24 janvier 1984 a été adopté. Selon cette disposition « pour fixer les conditions de son agrément, le comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement peut prendre en compte la spécificité de certains établissements de crédit appartenant au secteur de l 'économie sociale et solidaire. Il apprécie notamment l 'intérêt de leur action au regard des missions d'intérêt général relevant de lutte contre les exclusions ou de la reconnaissance effective d'un droit au crédit ». On peut plaider que le micro-crédit, en tant

189 . Jean-Michel SERVET, « La microfinance et la lutte contre l'exclusion financière en France », in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2001, p. 5-12.

qu'outil privilégié de lutte contre le chômage, l'exclusion financière, remplit une mission d'intérêt général qui entre bien dans le champ d'activité de cet article. Un auteur évoque que l'opération de micro-crédit n'est pas seulement une opération de nature financière, c'est aussi une action sociale dont l'objectif est la réinsertion de l'emprunteur dans le circuit économique normal190. Bien que d'autres alternatives soient possibles, on observe que la majorité des actions du crédit social se fait dans le cadre d'exception au monopole bancaire. Plusieurs facteurs favorisent le choix de la forme associative par les opérateurs du micro-crédit191.

113. - Le choix de statut d'association de la loi de 1901. Le choix du statut d'association traduit deux volontés du législateur français : la manière du législateur de percevoir la notion du concept de micro-finance et les raisons du choix de statut d'association par les opérateurs du micro-crédit.

D'abord, il s'agit de la volonté du législateur de limiter la micro-finance à des associations de micro-crédit spécialisées. La micro-finance se résume pratiquement au micro-crédit pour les montants, les activités que la banque classique ne veut pas ou ne peut pas assurer. Ces associations ne peuvent jamais collecter d'épargne du public et ne peuvent consentir que certains crédits à certaines catégories socioprofessionnelles restrictivement définies (art. L.51 1-6 al. 5 C. monét. fin). Les autres services, composant la notion large de la micro-finance, ne peuvent qu'être offerts par les banques classiques. Cela n'est pas étonnant du fait qu'il existe un droit aux comptes et aux services bancaires de base. L'adoption de l'article 19 de la loi du 15 mai 2001 traduit également la volonté du législateur de favoriser l'action de l'association en place, spécialement l'ADIE. Ainsi, l'offre du micro-crédit ne remplace pas un service bancaire mais prépare les bénéficiaires potentiels au financement bancaire.

Ensuite, le législateur français reconnaît la vocation sociale du micro-crédit. Il en fait d'une action sociale de lutte contre le chômage et l'exclusion financière. Ainsi, le choix du statut d'association permet aux opérateurs du micro-crédit de bénéficier des divers avantages qui en résultent. Sachant qu'en France les opérateurs du micro-crédit ne peuvent pas fonctionner en toute indépendance sans aides publiques. Le coût

190. Maurie BENHUSILO, « Comment créer un cadre institutionnel et réglementaire favorable au développement du microcrédit ? », Colloque, microcrédit, microentreprise, éd. Bercy, Paris 2001, p. 8 5-89. 191 . Cyrill FERRATON, « Les opérations de finance solidaire et la loi du 1er juillet 1901 au contrat d'association », in Exclusion et liens financiers/Rapport du Centre Walras 2001 sous la direction de J-M SERVET, Economica, 2001, p. 299-3 08.

d'accompagnement rend l'autonomie financière difficilement envisageable, sinon impossible. Le statut d'association leur permet donc de bénéficier légitimement192 des subventions publiques de manière permanente afin de pouvoir lutter efficacement contre la paupérisation de certaines classes sociales. En outre, le caractère non lucratif de l'association permet de ne pas concurrencer le secteur bancaire193. En plus, les associations peuvent bénéficier d'un statut fiscal favorable. Si on fait une comparaison avec le statut fiscal des sociétés de capitaux, il semble qu'il n'existe pas de disposition fiscale spécifique aux opérateurs constituées sous forme de sociétés de capitaux qui sont en principe soumises au droit commun. En revanche, la fiscalité des associations du micro-crédit peut être considéré comme faible dans la mesure où ces opérateurs du micro-crédit ne sont pas soumises à la TVA (art. 261 C 1° a du CGI), ni à l'impôt sur les bénéfices si elles ne réalisent pas d'activités lucratives sur un secteur concurrentiel. Pour pouvoir exercer ses activités et bénéficier de ces avantages, l'association de micro-crédit doit être légitimement habilitée.

114. - L'habilitation de l'association de micro-crédit. L'habilitation de l'association est confiée à un comité placé sous l'autorité du ministre de l'économie. La composition de ce comité est déterminée par l'article 1 er du décret et son arrêté d'application du 3 juillet 2002 portant nomination au comité d'habilitation des associations sans but lucratif mentionnées au cinquième alinéa de l'article L. 511-6 du Code monétaire et financier194. L'habilitation sera admise à condition que l'association remplisse les conditions imposées par l'article 4 du décret. Ces conditions sont les suivantes :

- Une ancienneté d'au moins trois ans dans l'activité d'accompagnement de projets financés par des prêts d'honneur consentis par elles ou par des crédits bancaire ;

- Le traitement, à ce titre, d'un nombre minimum de dossiers par an, fixé par arrêté du ministre chargé de l'économie. Il est fixé à 50 par l'article premier de l'arrêté pris en application du décret n° 2002-652 du 3 juillet 2002 relatif à l'habilitation des associations sans but lucratif mentionnées au cinquième alinéa de l'article L. 511-6 du Code monétaire et financier195.

192 . Isabelle GUERIN, Bernd BALKENHOL, « Microfinance : quelle intervention publique », in Le rapport moral morale sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2002, p. 397.

193 . Pour le détail ce gens de médiation et les conséquences indésirables de concurrence entre les banques et les opérateurs du micro-crédit. V. infra, n° 1 30-131.

194 . J.O numéro 161 du 12 juillet 2002 (NOR : ECOT02142541).

195 . J.O numéro 161 du 12 juillet 2002 (NOR : ECOT0214255A).

- La compétence requise appréciée par le comité au vu, notamment, des réalisations passées, des résultats de l'activité d'accompagnement, du taux de remboursement des crédits et de l'aptitude à contrôler les risques et la gestion ;

- L'adhésion à la charte de qualité du Conseil national de la création d'entreprise et l'engagement d'adopter les indicateurs de performance définis par le comité ;

- La signature d'une convention de garantie appropriée des emprunts contractés par l'association. Les dirigeants de l'association doivent posséder l'honorabilité, la compétence et l'expérience nécessaires à l'exercice de leurs fonctions.

Toutes ces conditions permettent de vérifier la capacité de l'association à intervenir dans ce domaine. La procédure de la demande d'habilitation est prévue à l'article 3 du décret de 2002. Elle doit être faite auprès du secrétariat du comité. La demande donne lieu à la délivrance d'un récépissé dès la réception de l'ensemble des documents nécessaires à l'instruction de la demande. Le comité doit décider dans un délai maximal de quatre mois suivant la date de délivrance du récépissé. Le silence pendant ce délai vaut l'acceptation. L'habilitation est valable pour trois ans196. Elle peut être retirée pendant ce délai ou renouvelée à son expiration.

115. - Quelle que soit la forme juridique des opérateurs du micro-crédit, l'essentiel est que les deux systèmes juridiques privilégient une réglementation spécifique de ces opérateurs. Le coeur du problème est de savoir quel est le contenu d'une telle réglementation. L'accent est mis plutôt sur la réglementation de nature prudentielle que sur celle non prudentielle.

§ 2. - La réglementation prudentielle des opérateurs du micro-crédit

116. - Distinction entre la réglementation prudentielle et non prudentielle. Il est évident que certains grands opérateurs réalisent en général plus 75% de l'activité du microcrédit du pays197. Toutefois, une multitude de petites structures existe. Il serait donc impossible de réaliser une supervision classique de ces multiples petites IMF. C'est la raison pour laquelle la réglementation et supervision non prudentielle, par opposition à celle prudentielle, a été créée. La dichotomie entre les IMF agréées et les IMF enregistrées

196 . Comme en droit cambodgien : l'article 9 du Prakas de 2000 prévoit que l'agrément est accordé pour un délai de 3 ans.

197 . Certaines grandes IMF seulement ont des branches d'activité dans la quasi-totalité du territoire du Cambodge. Elles sont notamment l'EMT (crédit rural), l'ACLEDA (bien qu'elle soit devenue une banque spécialisée, le micro-crédit demeure une de ses principales activités).

en droit cambodgien illustre bien la volonté de la BNC de se conformer à la doctrine internationale visant à distinguer ces deux types de réglementation. La question qui demeure principale est de savoir pourquoi les IMF doivent être soumises à une telle mesure de réglementation et supervision prudentielle. Ensuite, quel devrait être le contenu de cette réglementation prudentielle ? Ainsi, il est envisageable d'aborder, en premier lieu, la question de la détermination du champ d'application de la réglementation prudentielle (A), avant de traiter, en second lieu, du contenu des règles prudentielles qui doit être adapté à la spécificité du micro-crédit (B).

A. Le champ d'application de la réglementation prudentielle des opérateurs du micro-crédit

117. - Les objectifs de la réglementation prudentielle. Pour pouvoir dire quels sont les opérateurs du micro-crédit qui doivent être soumis à une réglementation prudentielle, il est nécessaire de rappeler brièvement ses objectifs. Théoriquement, les règles prudentielles ont été imposées aux établissements de crédit en vue d'assurer la stabilité du système financier du pays ainsi que d'assurer la protection des épargnants198. Elles imposent à l'autorité monétaire de garantir la bonne santé financière des établissements contrôlés puisque leur faillite peut provoquer une mauvaise image de l'ensemble du système financier et, par conséquent, un mouvement de retrait de masse. De cette constatation on peut se demander pour quels objectifs la réglementation prudentielle des opérateurs du micro-crédit se révèle importante.

S'il n'est pas étonnant que les mêmes objectifs de réglementation prudentielle des établissements de crédit puissent être spontanément abordables, il faut reconnaître qu'en raison du volume moins important des portefeuilles des opérateurs du micro-crédit, il ne représente pas une part suffisamment large des actifs financiers d'un pays pour mettre en péril le système financier dans son ensemble. Le plus souvent, l'argument principalement évoqué est la protection des épargnants. Il serait donc aisé de dire que la réglementation et supervision prudentielle est nécessaire dès lors que les opérateurs en place sont autorisés à mobiliser les épargnes. Cela veut dire qu'il ne faut pas imposer des règles prudentielles à des opérateurs qui ne peuvent qu'offrir des produits de micro-crédit. Toutefois, cette pure

198 . Thierry BONNEAU, Droit bancaire, Montchrestien, éd. 6e, n° 35, p. 30-31 ; C. GAVALDA et J. STOUFFLET, Droit bancaire, Litec, éd. 6e, n° 128-134, p. 85-89 ; Stéphane PIEDEKIEVRE, Droit bancaire, Puf, éd. 1e, 2003, n° 100-105, p. 90-95.

théorie ne correspond pas à la réalité pratique et n'est pas une voie adoptée ni par le droit français, ni par le droit cambodgien. La réalité est qu'il existe peu de grands opérateurs qui sont prêtes à se voir imposer des mesures prudentielles. L'article 8 du Prakas de 2002 impose aux IMF existantes de se faire agréer dès lors que l'un des seuils fixés est dépassé. Il opère une pragmatique distinction entre les grandes et les petites IMF. Toutefois, le droit français préfère imposer des règles prudentielles aux associations de micro-crédit bien qu'elles ne soient pas autorisées à mobiliser les épargnes et sans aucune distinction au niveau de la taille. L'interaction des deux systèmes conduit à distinguer deux situations.

1. Le cas des opérateurs du micro-crédit opérant à la fois les
activités de crédit et d'épargne.

118. - Le pragmatisme du droit cambodgien. Sur ce point, le droit cambodgien (Prakas de 2002) se veut très pragmatique. En pratique, une multitude de petites IMF existent et ne sont pas en mesure de se conformer à de telles mesures prudentielles en raison du coût important qui y est inhérent199. En plus, l'autorité de contrôle n'a pas de moyens humains et financiers suffisants pour contrôler ces petites IMF qui sont normalement très dispersées et se situent dans des zones isolées. La réglementation conçue avec le plus grand soin n'aurait pas vraiment d'utilité si l'on ne dispose pas de moyens effectifs pour la faire respecter. Ainsi, vu le coût de la réglementation et supervision prudentielle, la capacité limitée de l'autorité de tutelle, et la multitude de ces petites IMF, la question qui se pose est de savoir s'il faut réglementer ces petites IMF qui mobilisent les épargnes. Une minorité de doctrine pense qu'il faut imposer des normes prudentielles dès lors qu'il existe des risques et des épargnants volontaires à protéger. Toutefois, cette doctrine ne prend pas en compte la réalité pratique. En pratique, il est difficile, pour ne pas dire impossible, de réaliser une supervision prudentielle de cette multitude de petites IMF pour deux raisons. D'une part, une telle supervision demande un travail excessif à l'autorité de supervision. D'autre part, elle se heurterait probablement à l'incapacité de ces IMF à y répondre de façon satisfaisante. Ainsi, deux solutions alternatives sont possibles. Ou bien, on oblige ces

199. Le contrôle des IMF est plus coûteux que le contrôle des banques puisque ces institutions ont une base d'actifs généralement plus limitée mais répartie entre un nombre de comptes bien plus élevé et qu'elles sont extrêmement décentralisées. En plus, il ne s'agit pas seulement des coûts de l'autorité de supervision. Il est également pour l'institution contrôlée. A titre d'exemple, on peut citer l'expérience d'une IMF en Bolivie. Un responsable de Bancosol, en Bolivie, estime que dans les premières années de mise en conformité de l'institution vis-à-vis de la loi, ce coût s'est élevé à 5% de l'encours de crédit. Ce coût est descendu à 1% après plusieurs années.

IMF à fermer leur porte. Ou bien, on les autorise à continuer leur activité sans subir les contraintes des règles prudentielles. L'importance est de se demander quelles seraient les conséquences néfastes de leur fermeture pour les pauvres-épargnants ? En réalité, il faut reconnaître que les pauvres peuvent épargner, et ils les font concrètement. Toutefois, en l'absence de compte formel, ils recourent à des épargnes traditionnelles notamment les épargnes à domicile ou investies dans les matériels de construction ou à des épargnes informelles telles que la tontine qui est très pratique au Cambodge. Ces formes d'épargnes n'offrent pas de sécurité et présentent des risques plus élevés. La fermeture de ces IMF peut donc ne pas améliorer la sécurité des déposant. Ainsi, si l'argument général invoqué pour justifier la nécessité de réglementation prudentielle est de protéger les épargnants, il faut laisser ces petites IMF servir les pauvres puisqu'elles protégent mieux leur épargne. Dès lors qu'un certain seuil n'est pas franchi, une réglementation prudentielle ne doit pas être imposée. Il suffit simplement de les assujettir à la réglementation non prudentielle. La difficulté tient à la détermination de ce seuil qui caractérise en effet la distinction entre les grandes et les petites IMF. Plusieurs critères peuvent être adoptés. Il peut s'agir notamment de critère qui est lié au nombre des épargnants ou celui de volume du montant des épargnes ou de ces deux critères cumulativement. Le droit cambodgien utilise trois critères alternatifs : le critère du nombre des déposants ou celui du volume des épargnes et le critère du volume des crédits.

Il est cependant critiquable de retenir le critère relatif au volume du montant de crédit accordé comme condition imposant l'agrément puisqu'il ne faut pas soumettre les IMF, qui n'offrent que des services de micro-crédit, à un agrément et donc à des règles prudentielles. Il suffit des les soumettre à des mesures non prudentielles en leur imposant de se faire enregistrer.

2. Le cas des opérateurs du micro-crédit offrant uniquement
les produits du micro-crédit

119. - La soumission de cette catégorie d'opérateurs du micro-crédit à une réglementation prudentielle par les deux systèmes juridiques. Dans ce cas, il est plus juste de parler d'Institution de micro-crédit (IMC). Ces IMC fonctionnent uniquement avec des capitaux provenant de bailleurs de fonds ou rarement avec des prêts commerciaux. Dans cette hypothèse, il n'existe pas de raison qui justifie la mise en place des règles

prudentielles. En effet, il suffit d'assujettir ces IMC à une supervision non prudentielle. Cette supervision non prudentielle impose à l'autorité compétente d'observer l'évolution de cette partie du secteur en exerçant un contrôle minimal sur l'état financier simplifié de ces IMC200. Elles ne doivent pas être astreintes au respect de normes prudentielles contraignantes. Il serait donc souhaitable de leur imposer à se faire enregistrer auprès de l'autorité compétente et de se conformer aux dispositions légales dictées pour la catégorie des IMF enregistrées. Tel n'est pas le cas adopté ni en droit français, ni en droit cambodgien201 qui retient le volume de crédit comme l'un des seuils dont le dépassement oblige les opérateurs à se transformer en IMF agréées. L'article 7 du décret du 30 avril 2002 portant l'application du 5° de l'article L.51 1-6 du Code monétaire et financier soumet les associations de micro-crédit à certaines règles prudentielles dont le contenu sera abordé ultérieurement. On peut tout simplement s'interroger sur l'utilité de normes prudentielles pour les associations dont l'activité se limite à l'octroi des micro-crédits à une certaine catégorie socioprofessionnelle restrictivement définie pour des montants et des durées limitées202. En effet, ce choix a pour objectif exclusivement de préserver la solvabilité des associations203. Or, l'insolvabilité de ces associations est difficilement imaginable du fait qu'elles sont subventionnées, qu'elles travaillent étroitement avec les établissements de crédit partenaires et au vu des conditions d'habilitation. Ces conditions suffissent de vérifier la capacité de ces associations à gérer de manière efficace leur activité. En plus, les prêts accordés doivent bénéficier d'une garantie apportée par un fonds de garantie ou d'un cautionnement agréé ou par un établissement de crédit204. Donc, la faillite de ces associations, si elle existait une, n'entraînerait que la perte pour les fonds de garantie, les banques donc les professionnels qui sont aptes à gérer leurs risques. Enfin, l'attribution du contrôle de ces associations du micro-crédit au comité placé sous l'autorité du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, témoigne de la vision qu'a le droit de ces associations, à savoir des structures ne présentant aucun risque pour le système financier et l'épargne publique. A vrai dire, il n'existe pas d'épargnants à protéger. Ainsi, aucun argument juridique pertinent ne peut justifier une telle politique réglementaire. D'ailleurs, dans le contexte du Cambodge où le coût de l'opération est compensé par le niveau élevé

200 . L'article 2 du Prakas, B 7-02-47/Prk du 25 février 2002 sur l'exigence de rapport d'information pour les opérateurs de microfinance agréés et enregistrés.

201 . V. supra, n° 108-111.

202 . V. supra, n° 28-3 1.

203 . Laurent LHERIAU, Tome II, préc., n° 46-47, p. 59-60.

204 . L'article 6 alinéa 5 du décret n° 2002-652 du 30 avril 2002.

de taux d'intérêt, le choix d'imposer aux IMF qui ne font que des crédits de se soumettre aux règles prudentielles produit des conséquences plutôt négatives que positives pour les populations. En effet, dès lors qu'elles y sont obligées, elles doivent s'efforcer à devenir plus professionnelles et donc à améliorer la qualité de leur service, ce qui est une bonne chose d'un côté pour les populations pauvres. En revanche, il conduit ces opérateurs à changer leur population cible. Pour être suffisamment rentables afin de faire face au coût lié à la mise en conformité avec des normes prudentielles, ils doivent cibler un nouveau créneau de populations plus rentables, plus urbaines, ce qui conduit à exclure à nouveau les plus pauvres qui pourront bénéficier de micro-crédit si les opérateurs ne sont pas obligées de se transformer.

120. - À cette catégorie d'opérateurs du micro-crédit il faut rattacher ceux qui exigent des épargnes obligatoires comme condition d'octroi de crédit. En pratique, les opérateurs du micro-crédit demandent à leur emprunteur des épargnes prélevées a priori sur une quote-part du montant de prêt (environ de 3% à 5%). Bien que ce montant soit couramment appelé « l'épargne obligatoire », il constitue une forme de dépôt de garantie. Il constitue une garantie du prêt accordé. Les opérateurs de cette catégorie ne doivent pas non plus être soumises à une réglementation et supervision prudentielle dès lors qu'elles ne mobilisent pas ces épargnes pour le financement de leur activité de prêt. En effet, les épargnants sont en position débitrice la plupart du temps. Ils courent donc un risque relativement faible en cas de faillite des opérateurs du micro-crédit. S'ils ne peuvent pas procéder aux retraits de leur épargne, il leur suffit d'arrêter le remboursement de prêt. Ainsi, ils peuvent se prévenir efficacement contre la faillite des opérateurs du micro-crédit sans intervention des pouvoirs publics205.

Cette vision un peu restrictive du champ d'application de la réglementation prudentielle est liée à la spécificité du micro-crédit. Cette spécificité influe également sur le contenu des règles prudentielles qui devront être adaptées aux opérateurs du microcrédit. Cette adaptation peut aller dans deux sens : plus lourde ou moins sévère selon l'objectif de chacune de ces règles.

205 . CGAP, La course à la réglementation : établissement de cadres juridiques pour la microfinance, Etude spéciale, n° 4 - Mai 2000, p. 11.

B. Le contenu des règles prudentielles adaptées aux opérateurs du micro-crédit

121. - Deux approches différentes de l'adoption du contenu des règles prudentielles. Les deux systèmes privilégient tous les deux la mise en place d'une réglementation spécifique des opérateurs du micro-crédit. Cette voie de réglementation correspond à une autre question qui s'impose fortement. Doit-elle passer par une modification des lois et règlements existants dans le secteur bancaire ou faut-il proposer une législation ou réglementation séparée, conçue spécialement comme une nouvelle réglementation du micro-crédit ? Le droit cambodgien a choisi la mise en place d'une réglementation par voie de dérogation à la loi bancaire existante206. Le fait d'incorporer cette réglementation à l'intérieur du cadre existant peut être techniquement plus aisé d'ajuster le cadre en place. En revanche, cette tendance n'a pas été prévue expressément par le droit français. Ce dernier choisit plutôt une nouvelle réglementation séparée. Cette affirmation résulte des analyses du décret de 2002 et ses arrêtés d'application du 3 juillet 2002. En effet, quelle que soit la solution adoptée, le plus important problème concerne le contenu de la réglementation. Toutefois, les conséquences d'une interaction entre les deux voies d'adoption du contenu de la réglementation des opérateurs du micro-crédit ne doivent pas être négligées. Il se peut que si les règles nouvelles apparaissent moins lourdes et plus favorables, elles peuvent inciter un grand nombre d'institutions existantes et de nouveaux entrants à remplir les conditions leur permettant de se définir comme opérateurs du microcrédit agréés, ce qui pourrait conduire évidemment à laisser un certain nombre d'institutions sous supervisées. Malgré cette remarque, les règles prudentielles doivent forcément s'adapter à la spécificité du micro-crédit.

122. - Les règles prudentielles adaptées aux micro-crédits. De manière générale, il faut reconnaître que l'intégration dans la réglementation bancaire ne peut pas être pure et simple. Les opérateurs du micro-crédit doivent être traités différemment des banques normales du fait que leurs actifs se composent de nombreux petits prêts sans garantie. Théoriquement, le cadre réglementaire de supervision prudentielle est basé sur l'analyse de risque. Les risques du micro-crédit sont de même nature que ceux des autres prêts bancaires, mais leur pondération est différente. Ainsi, en raison de cette pondération des

206 . L'article 74 alinéa 3 de la loi bancaire de 1999.

risques liés au micro-crédit, ce dernier serait parfois rendu impossible si les opérateurs sont obligés de respecter les règles prudentielles normales imposées aux banques classiques. Certaines règles devront être adaptées. Il est maintenant question de savoir quelles sont les règles qui doivent être adaptées aux micro-crédits. Les domaines de ces règles concernent notamment le taux minimum de capital, le ratio d'adéquation des fonds propres, les règles concernant les provisions des crédits non garantis. Pour pouvoir tracer ces règles il est nécessaire d'analyser l'éventail des règles prudentielles imposées (2) par les deux systèmes aux opérateurs du micro-crédit. Mais, avant d'étudier ces règles, quelques remarques préliminaires s'imposent (1).

1. Les remarques préliminaires

123. - Deux remarques préliminaires. Deux remarques doivent être soumises à l'attention.

D'abord, il est important de rappeler que la réglementation prudentielle est basée essentiellement sur les fonds propres. L'objectif du ratio prudentiel est d'imposer le maintien du montant minimum de fonds propres207 auxquels s'ajoutent pour les opérateurs du micro-crédit en droit français les ressources assimilées. Ils permettent de calculer les différents ratios imposés par la réglementation prudentielle. C'est la raison pour laquelle le droit prend soin de définir et de préciser les éléments qui doivent être pris en compte pour le calcul des fonds propres et ressources assimilées. Quels sont les éléments des ressources assimilées et ceux à inclure dans les fonds propres ? L'article 4 de l'arrêté du 3 juillet 2002 précise que « les fonds propres et ressources assimilées, mentionnés au quatrième alinéa 7 du décret du 30 avril 2002 susvisé, englobent, outre le fonds de réserve, les fonds propres, les cotisations et droits d 'entrée, les subventions publiques et privées d 'investissement, les dons et legs ». Selon cette disposition, les ressources assimilées sont le fonds de réserve, les cotisations et droits d'entrée, les subventions publiques et privées d'investissement, les dons et legs. Toutefois, cet arrêté n'a pas précisé les éléments des fonds propres. On peut donc se demander si la notion de fonds propres appliquée aux établissements de crédit soit applicable de la même façon aux associations de micro-crédit. Les fonds propres applicables aux établissements de crédit comprennent principalement le capital, les

207 . C. DUFLOUX et M. KARLIN, La réglementation prudentielle des banques : les travaux récentes du Comité Cooke, Banque, n° 489, décembre 1988, p. 1246 et n° 490, janvier 1989, p. 77.

réserves, les provisions réglementaires208, le résultat d'exercice et les écarts de réévaluation. Ils constituent des ressources stables de l'établissement. Au vu de ces composants, on pourrait dire que la notion de fonds propres applicable aux établissements de crédit ne peut pas être entièrement applicable aux associations du micro-crédit.

Ensuite, certaines règles prudentielles sont rendues inutiles par l'encadrement des crédits : restriction quant au montant et quant aux bénéficiaires du micro-crédit. Cette règle concerne le ratio de division de risque qui est rendu, en droit français, inutile par les plafonds imposés par l'article 6 alinéa 5 du décret de 2002. Toutefois, cette règle est prévue par l'article 18 du Prakas de 2000. Ce ratio de division de risque est fixé à 10% des fonds propres, ce qui est suffisamment important puisque le montant du micro-crédit est faible. Bien que le droit cambodgien n'ait pas limité le montant du micro-crédit, il est probablement possible de dire que le montant doit être faible du fait qu'il est accordé, soit à une famille pauvre, une famille qui a des revenus modestes ou à une petite entreprise209. D'ailleurs, bien qu'il existe un encadrement de crédit, le coefficient de ressources et les encours du crédit210 est prévu. L'article 7 in fine prévoit que « à tout moment, les encours de crédit doivent être financés par des ressources de durée au moins égale à celle des prêts ». D'après l'arrêté pris en son application, l'association doit s'assurer, à tout moment, que la durée moyenne des ressources est supérieure ou égale à la durée moyenne des prêts accordés au titre du présent décret. La durée moyenne du prêt est calculée en divisant le montant total des prêts accordés, pondérés chacun par leur durée restant à courir, exprimés en nombre de jours, par le montant total des prêts accordés. La durée moyenne des ressources est calculée en divisant le montant total des ressources, pondérées chacune par leur durée restant à courir, exprimées en nombre de jours, par le montant total des ressources inscrites au passif du bilan de l'association. Les fonds propres et ressources sans limite sont considérés comme remboursables au bout de sept ans. Les subventions publiques sont considérées comme ayant une durée restant à courir de sept ans.

A part de ces règles, les autres règles imposées aux établissements de crédit pourraient ne pas être appliquées purement et simplement aux opérateurs du micro-crédit.

208 . Stéphane PIEDELIEVRE, Droit bancaire, préc., n° 1 01, p. 91.

209 . V. supra, n° 31.

210 . On comprend que ce coefficient correspond au coefficient de fonds propres et de ressources permanentes applicable aux établissements de crédit à partir de 1986 suite à la suppression de l'encadrement de crédit (le coefficient d'opération à moyen et long terme non réescomptable et le coefficient de distribution des crédits à moyen et long terme). Cette règle a pour objectif d'éviter que les emplois à longue durée soient financés des ressources de durée plus courte, par conséquent, d'éviter les conséquences trop brutales de la suppression de l'encadrement du crédit et le financement des prêts à long terme avec des ressources monétaires. V. Stéphane PIEDELIEVRE, Droit bancaire, préc., n° 103, p. 93.

Leur adaptation est envisageable.

2. L'adaptation des règles prudentielles aux opérateurs du micro-crédit

- L'analyse des textes juridiques applicables aux opérateurs du micro-crédit dans les deux systèmes permet de tracer quelles sont les règles qui ont été ajustées pour répondre aux besoins des opérateurs du micro-crédit.

124. - Le capital minimum. En droit cambodgien, le capital minimum est fixé à 50 milliards de Riels, soit 15 millions euros pour les établissements de crédit et à 25 milliards de Riels, soit 7,5 millions euros pour les institutions de microfinance211. Quelle observation peut-on émettre à propos de cette réglementation moins restrictive au niveau du capital minimum pour les IMF ? Le capital minimum peut être considéré comme un facteur de sécurité. Mais, certains théoriciens n'attachent pas une grande importance à l'imposition d'un niveau minimum de capital comme facteur de sécurité et y voient davantage un moyen de restreindre le nombre des institutions. Il est considéré comme outil de limitation du nombre des opérateurs agréés212. En effet, deux alternatives sont à l'opposée à propos de la réglementation du capital minimum des opérateurs de micro-crédit au moment de l'adoption de ce texte. La première consiste à dire qu'il est suffisamment important, pour des raisons sociales, d'encourager les activités de microfinancement, et par conséquent, d'appliquer aux opérateurs du micro-crédit des normes moins exigeantes en matière de capital minimum. Toutefois, cette doctrine se heurte à un problème important en pratique soulevé par une autre doctrine. En réalité, une réglementation moins restrictive au niveau du capital peut entraîner une prolifération des institutions de micro-finance, ce qui ne facilite pas la supervision prudentielle. Certaines institutions seront donc sous supervisées. Il faut donc trouver un juste milieu. Le moyen utilisé par le droit cambodgien consiste à fonder en partie la décision d'octroi d'agrément sur une évaluation qualitative de l'institution. Au regard de l'un des seuils imposés pour obliger les ONG, associations ou autres entités à se transformer en IMF agréées, ils conduisent à penser que l'autorité compétente n'accorde l'agrément qu'à des grandes IMF. Toutefois, la création d'une IMF nouvelle à partir de rien n'est pas interdite. Le montant minimum est pourtant

211 . L'article 4 du Prakas de 2000.

212 . Richard ROSENBERG, Directives concertées pour la microfinance, préc., p. 17-18.

suffisamment élevé pour cette IMF nouvellement créée car les IMF sont en pratique à l'origine des ONG, associations sans but lucratif qui ne sont pas en mesure de se procurer de liquidité pour un tel montant puisque le capital minimum doit être totalement libéré et un dépôt de garantie de 5% du montant du capital dans un compte ouvert auprès de la BNC est obligatoire213.

126. - La provision des prêts non garantis. L'article 16 du Prakas de 2000 prévoit que « Les établissements agréés doivent exercer leurs activités conformément à des dispositions relatives à la classification des crédits et à la limite des provisions pour perte ». Le taux de provision est prévu par le Prakas B 7-02-145/Prk du 07 juin 2002 sur la classification et la provision des mauvaises dettes et les dettes douteuses, y compris l'intérêt suspendu. Il est fixé en fonction du niveau de risque de recouvrement du crédit : soit 10% pour les dettes en dessous de standard, soit 30% pour les dettes douteuses, soit 100% pour les dettes perdues. La notion de dette sous standard n'est pas précisée. Ce Prakas n'est pas propre aux opérateurs de la micro-finance. Il est prévu pour les banques. On peut se demander s'il est applicable aux opérateurs de la micro-finance. Au travers de l'article 16 du Prakas de 2000, la règle relative à la provision pour perte appliquée aux banques est applicable de la même façon aux institutions de micro-finance.

En droit français, l'article 6 in fine du décret précise que « les prêts consentis par l 'association doivent bénéficier d 'une garantie apportée par un fonds de garantie ou du cautionnement agréé ou par un établissement de crédit ». Cette disposition nous conduit à penser que la règle relative à la provision des crédits non garantie est, tout de même comme le ratio de division des risques, rendue inutile. Or, l'article 7 alinéa 1 er impose une règle de provision de prêt contentieux à la hauteur des pertes probables. En effet, une garantie apportée peut ne qu'être partielle. C'est le cas notamment de la garantie apportée par le FCS. Ainsi, si le prêt est garanti totalement par un cautionnement agréé ou par établissement de crédit, l'association n'a pas à créer ni la provision ni le fonds de réserve. En revanche, si elle n'est que partielle, la fraction non provisionnée donne lieu à la création de fonds de réserve. C'est la raison pour laquelle l'alinéa suivant du même article prévoit que « la fraction des encours de prêts non provisionnés, qui n 'est pas couverte par les garanties mentionnées ci-dessus, doit donner lieu à la constitution d'un fonds de réserve ». A la lecture de ces deux alinéas de l'article 7 du décret de 2002, on peut en déduire que le

213 . L'article 12 du Prakas de 2000.

décret impose une provision automatique des prêts contentieux à hauteur de la perte probable. Toutefois, une nuance est admise par la création d'un fonds de réserve qui se substitue à la provision des prêts contentieux. Ainsi, deux alternatives sont prévues. Ou bien l'association de micro-crédit doit provisionner la fraction non garantie ou bien elle doit constituer un fonds de réserves. Il semble que la constitution de fonds de réserve est préférable pour deux raisons. D'abord, l'association de micro-crédit compétente ne devrait pas être tenue d'effectuer une provision automatique pour les créances douteuses pour un pourcentage important de leur micro-crédit dès l'octroi de ceux-ci. En effet, un suivi financier est obligatoire pendant la durée du prêt214. C'est ce suivi financier qui constitue l'une des conditions du succès du micro-crédit en France, plutôt que l'utilisation de caution solidaire. En raison de ce suivi financier, l'association peut intervenir rapidement en cas d'incident de paiement et prend les mesures nécessaires pour faciliter le remboursement notamment en accordant un nouveau délai de paiement. Ensuite, ce sont les modalités de fixation de taux de fonds de réserve applicable à la fraction non garantie qui se veulent et se montrent très souples. Ce taux est fixé à partir du taux de défaut observé en moyenne sur les crédits accordés par l'association dans le passé. Il est propre à chaque association. Il est fixé par l'article 2 de l'arrêté du 3 juillet 2002 à 30% en l'absence de données vérifiables sur le taux de défaut statistique moyen, constaté sur les prêts délivrés au cours des trois dernières années ; en cas de données statistiques, il est de 1,5 fois de taux de défaillance constaté sur l'exercice précédent. Ce taux ne peut être ni inférieur à 10% ni supérieur à 30%. Le comité d'habilitation des associations sans but lucratif peut, le cas échéant, majorer ce taux en fonction de la situation particulière de l'association concernée. Il est fixé en fonction d'un bon historique de remboursement des prêts accordés par l'association, c'est-à-dire qu'il est fondé sur la performance de l'association. Cette disposition est conforme à la recommandation internationale215.

127. - Le ratio d'adéquation des fonds propres ou le ratio de solvabilité. Le ratio de solvabilité vise à rapporter les risques de crédit pris par les établissements de crédit aux fonds propres dont ils disposent. L'article 7 alinéa 3 du décret de 2002 prévoit que « à tout moment, le montant total des fonds propres et ressources assimilées doit être au moins égal au produit de la fraction des encours mentionnée à l 'alinéa précédent (c 'est-à -dire la fraction non provisionnée qui n 'est pas garantie) par un pourcentage fixé par arrêté du

214 . L'article 6 alinéa 5 du décret de 2002.

215 . Richard ROSENBERG, Directives concertées pour la microfinance, préc., p. 27.

ministre chargé de l 'économie ».Ce ratio qui est fixé par le comité Cooke à 8% pour les établissements de crédit est mesuré à 12% par l'article 3 de l'arrêté du 3 juillet 2002. Il est fixé par l'article 15 du Prakas de 2000 à 20% (15% pour les banques commerciales) du rapport entre le capital éligible et le risque évalué. Deux remarques peuvent être faites. D'abord, ce Prakas utilise la terminologie de ratio d'adéquation de capital. Or, le capital ne constitue qu'un élément des fonds propres. Il s'agit d'une mauvaise utilisation de la terminologie. La loi utilise improprement comme synonyme le capital et les fonds propres. Le mot « fonds propres » est utilisé à la place du mot « capital » pour le calcul du ratio de division de risque216. Ensuite, pour quelle raison le ratio d'adéquation des fonds propres imposé aux opérateurs du micro-crédit est plus sévère que celui appliqué aux établissements de crédit ? Le portefeuille du micro-crédit est composé de prêts non garantis ou garantis par des actifs d'un montant insuffisant pour couvrir le solde du prêt si l'on prend en compte les coûts de recouvrement. Les opérateurs du micro-crédit supportent donc des risques plus importants que les banques. Or, le taux d'impayés du micro-crédit est en général inférieur à celui des banques commerciales, ce qui montre la performance des opérateurs du micro-crédit. Ce ratio aurait du être moins sévère que celui des établissements de crédit. Cependant, d'aucuns avancent que le fait d'imposer un niveau d'adéquation des fonds propres plus élevé pour les IMF, ou une obligation similaire reflétant le risque spécifique du portefeuille de micro-crédits d'une institution diversifiée, aura pour effet de diminuer le rendement des fonds propres, rendant ainsi l'activité de micro-crédit moins attractive.

128. - Le ratio de liquidité. Le ratio de liquidité, qui vise à ce que les établissements de crédit réalisent de façon normale un équilibre entre leurs liquidités et leurs exigibilités, n'a pas besoin d'être imposé en droit français. L'association de micro-crédit n'a pas donc à s'assurer de la possibilité de faire face à des retraits de fonds puisqu'il n'existe pas des dépôts du public. Toutefois, le ratio de liquidité doit être réglementé en droit cambodgien. En matière de ratio de liquidité, il n'existe pas de raison qui vise à obtenir une réglementation moins lourde que celle applicable aux banques. En effet, les actifs des opérateurs du micro-crédit se composent des prêts non garantis. Le risque est plus grand. Il serait donc légitime d'imposer aux IMF de ratio de liquidité assez élevé. L'article 16 du Prakas de 2001 impose un ratio de liquidité qui est égal au moins à 100% (50% pour les

216. V. supra, n° 123.

banques commerciales), c'est-à-dire le rapport entre les actifs liquides ou rapidement réalisables et le passif exigible à court terme doit être au moins de 1 00%217. Le même raisonnement est valable pour justifier l'absence de la réglementation de la réserve obligatoire en droit français puisque le montant de réserve obligatoire est calculé à partir des dépôts. En droit cambodgien, elle est fixée à 5% (8% pour les banques commerciales) du montant des dépôts du public218. Le montant de la réserve obligatoire est calculé en fonction du montant des dépôts inscrit dans le bilan de l'établissement. Pour ce calcul, le montant de l'épargne obligatoire, comme condition d'octroi du crédit, n'est pas pris en compte219. La réserve obligatoire constitue un moyen de régler ou contrôler indirectement le volume de crédits distribués. Si le micro-crédit vise à favoriser l'accès au crédit, il n'existe pas de raison qui justifie l'imposition du montant de réserve obligatoire plus forte aux opérateurs du micro-crédit. Il suffit de renforcer la règle de ratio de liquidité.

129. - Le contrôle des règles prudentielles. Pour pouvoir contrôler la conformité à ces règles, deux moyens sont créés : l'obligation de communiquer régulièrement les documents comptables à la BNC et l'obligation de créer un contrôle interne. Ces mesures sont prévues à l'article 5 du décret de 2002 et à l'article 43 de la loi sur les institutions bancaires et financières.

Section II : Une réglementation favorisant le partenariat BanqueOrganismes du micro-crédit

130. - La typologie du partenariat. On a précédemment évoqué qu'une opération de micro-crédit n'est pas seulement une opération de nature financière, c'est aussi une action sociale dont l'objectif est la réinsertion de l'emprunteur dans le circuit économique normal220. Ce volet social ne peut pas être supporté tout seul par les réseaux bancaires qui

217 . Le ratio de liquidité comporte en numérateur le solde de l'institution en trésorerie et des prêts avec échéance de moins d'un mois, et en dénominateur les épargnes des déposants valorisées à des pourcentages divers (entre 50 et 80% : Prakas n°B 00-38/PrK du 9 février 2000 sur le ratio de liquidité des banques et des IMF) en fonction de leur catégorie et de leur durée avant échéance. Le ratio entre le numérateur et le dénominateur doit être maintenu impérativement à 100% (article 16 du Prakas de 2000).

218 . L'article 14 du Prakas de 2000.

219 . L'article 2 du Prakas B 7-02-45 /PrK du 25 février 2002 sur le maintien de la réserve obligatoire des institutions de microfinance.

220 . Maurie BENHUSILO, comment créer un cadre institutionnel et réglementaire favorable au

sont en quête de rentabilité. Ainsi, la mise en place de partenariats larges entre les opérateurs du micro-crédit et les organismes bancaires est souhaitable. Plusieurs types de partenariats sont disponibles en fonction du rôle plus ou moins central des organismes de micro-crédit. Dans certains cas, ils ne s'occupent que de l'accompagnement, et les réseaux bancaires décaissent directement le crédit aux emprunteurs. Dans ce cas, seuls l'emprunteur et la banque sont liés par le contrat de crédit. L'organisme du micro-crédit est exclu du rapport de crédit. Dans d'autres cas, ils jouent un véritable rôle d'intermédiation financière, le lien entre la banque et les emprunteurs n'étant ainsi qu'indirect. Dans ces deux cas, le micro-crédit a une nature de contrat réel puisqu'il s'agit d'un prêt accordé par un établissement de crédit ou par un professionnel. Bien qu'ils agissent en tant qu'un vrai intermédiaire financier, il faut comprendre que les organismes du micro-crédit offrent de services autres que le crédit. C'est un service d'accompagnement. On a déjà vu précédemment221 que l'exclusion du micro-crédit est aussi liée au profil des emprunteurs qui sont, dans la majorité des cas, des anciens chômeurs, des bénéficiaires de minima sociaux. Leur profil professionnel est de niveau bac et rarement plus. C'est la raison pour laquelle une mesure d'accompagnement de ces personnes dans leur parcours professionnel est indispensable. C'est un accompagnement du projet professionnel et du suivie de l'activité financée. Cette mesure d'accompagnement présente des avantages incontestables. C'est en fonction des ces avantages que le droit positif français encourage, d'une part, l'implication directe des banques, et d'autre part, la coopération entre les banques et les associations du micro-crédit.

131. - Les inconvénients et avantages du partenariat. La reconnaissance par le droit positif de mesures favorisant ce partenariat n'est que le reflet des avantages qu'il procure222. Tout d'abord, du fait de la proximité entre l'organisme et l'emprunteur ou le groupe d'emprunteurs, ce type de partenariat limite les risques de gestion. L'expérience montre que le taux de recouvrement de prêt est largement supérieur lorsque l'organisme de proximité intervient dans le processus d'intermédiation financière. Ensuite, le partenariat est un moyen de partager le risque, notamment à travers un fonds de garantie mis en place, soit par l'organisme de proximité lui-même avec la contribution des banques partenaires,

développement du micro-crédit ?, Colloque sur micro-crédit, micro-entreprise, éd. Bercy, Paris, 2001, p. 85- 89.

221 . V. supra, n° 28-29.

222 . I. GUERIN, in Exclusion et liens financiers : le rapport du centre Walras, 1999-2000, préc., p. 148.

soit par l'Etat. Dans ce dernier cas, il s'agit d'une forme de partenariat tripartite : banques/associations/pouvoirs publics. Cette solution présente le mérite de confier aux professionnels (les banques) l'acte de crédit tout en s'appuyant sur les compétences des associations pour l'accompagnement des porteurs de projets et sur les pouvoirs publics pour la prise en charge partielle du risque au travers de dispositif de garantie223. Ce genre de partenariat tripartite est vivement encouragé par la création de FCS. Le partenariat entraîne également la réduction des coûts d'opération224. L'organisme du micro-crédit prend en charge de la sélection préalable des emprunteurs et de leur formation. Ce rôle évite aux banques, d'une part, d'avoir à capter la clientèle, et d'autre part, d'avoir à rechercher l'information fiable sur cette clientèle. En effet, l'accompagnement constitue un coût pour les banques dès lors qu'elles l'assument seul. Ainsi, le partenariat est une réduction de coût pour les banques. Mais, on peut remarquer qu'il s'agit également d'une diminution des coûts pour la clientèle, en terme de frais de déplacement, de frais de dossiers, et de coût d'opportunité du temps à négocier le crédit. En raison de ce partenariat les banques commerciales peuvent tester la solvabilité de cette clientèle qui pourrait à terme s'intégrer directement dans le système bancaire. Il est fréquent que les emprunteurs soient à terme capables d'accéder au système bancaire.

A côté des avantages, un inconvénient que l'on peut relever de cette mesure de partenariat est la duplication des tâches de gestion et les délais relativement long de décaissement des prêts. Toutefois, cet inconvénient reste en marge des avantages qu'elle peut procurer. En plus, l'adoption de la loi du 15 mai 2001 permettant à l'association, comme ADIE, de pouvoir emprunter auprès des banques pour reprêter directement à ces clients simplifie notablement le système. Un autre problème concerne la limite de cette mesure d'accompagnement en aval du décaissement du crédit. S'il n'existe pas précisément de limite, les organismes de micro-crédit ne risquent-ils pas d'être reprochés pour immixtion dans les affaires de l'emprunteur ou gestion de fait en cas de défaillance de remboursement de crédit ? En effet, même s'il n'existait pas de limite, cette situation pourrait être une utopie pour deux raisons. D'abord, lorsque la banque décaisse directement le micro-crédit à l'emprunteur, L'ADIE s'engage à racheter le crédit en cas de défaillance de trois échéances successives. Ensuite, l'action en remboursement en cas de défaillance est rare puisque l'emprunteur a payé une contribution obligatoire d'un montant

223 . Francis MAYER, préc., p. 383.

224 . Georges GLOUKOVIEZOFF, « Le microcrédit social contre l'exclusion bancaire », in La microfinance n 'est plus une utopie !, préc., p. 164.

de 5% du prêt au Fonds de solidarité de l'ADIE afin d'assurer la mutualité entre les emprunteurs. En plus, l'action en justice est rare du fait que les frais de justice pourraient être plus élevés que le montant de dette. Ainsi, si aucune action en remboursement de crédit n'a été introduite contre lui, l'emprunteur n'a pas besoin d'évoquer la faute du prêteur ou de l'ADIE. De même, cette situation ne peut pas non plus être invoquée par le représentant des créanciers de l'emprunteur en cas d'ouverture d'une procédure collective contre ce dernier puisque l'accompagnement en aval du prêt ne constitue qu'un simple suivi financier225 pour que l'ADIE puisse intervenir rapidement en cas de difficulté rencontrée par l'emprunteur notamment en lui accordant le délai de paiement. C'est là la limite de la mesure d'accompagnement après la décision d'octroi de crédit.

132. - Les banques partenaires. De toute façon, beaucoup s'accordent à dire qu'une coopération entre les banques et les opérateurs du micro-crédit serait la clé du succès du micro-crédit. À travers cette coopération, chacun des acteurs apporterait son savoir-faire et ses connaissances afin de dispenser un service efficace. Mais la question est de savoir de quelles banques parle-t-on. En effet, lors du dernier Sommet Global du micro-crédit qui s'est tenu à Halifax en septembre 2006, cette question était à l'ordre du jour. Dans le rapport de la Campagne, Pierre-Marie Boisson, président de Sogesol en Haïti, s'est exprimé au sujet de la volonté des banques locales de travailler avec les IMF « les ban ques commerciales internationales peuvent certainement aider les IMF à profiter des marchés mondiaux et de leur énorme pool de ressources financières, ce qui va certainement leur permettre de réduire les coûts financiers de l 'exploitation. Malgré cela, je crois que les succursales locales des ban ques commerciales sont mieux préparées que les ban ques commerciales internationales à intervenir dans le secteur de la micro-finance avec succès, car elles sont généralement davantage en mesure d'adapter leurs systèmes aux conditions locales, particulièrement celles du secteur informel. Les ban ques locales des marchés émergents souffrent souvent d'un excès de liquidité non utilisé qui pourrait être avantageusement prêté aux microentreprises, ce qui leur permettrait d'augmenter leurs bénéfices et de diminuer leurs risques grâce à une diversification de leurs actifs ». L'arrivé des banques commerciales dans ce domaine pourrait renforcer la concurrence, améliorer l'efficacité, réduire les coûts et augmenter la couverture de services et le financement pour desservir ceux qui ne bénéficient pas de services bancaires. L'intervention des banques

225 . L'alinéa 5 de l'article 6 du décret de 2002 prévoit que les prêts accordés doivent faire l'objet d'un suivi financier pendant leur durée.

commerciales est donc vivement encouragée. Pour favoriser l'implication directe des banques commerciales, le FCS a été mis en place dans le cadre de la loi du 18 janvier 2005 sur la programmation de cohésion sociale. Toutefois, une attention particulière doit être portée à l'introduction des banques commerciales dans le micro-crédit. Elle doit être limitée puisque les banques commerciales ne savent pas en effet comment servir les plus pauvres. Ce serait donc un désastre si elles décideraient de se lancer seules dans le microcrédit. C'est pourquoi il est important de nouer le partenariat entre les banques et les organismes de proximité. Le porteur de projet doit être accompagné par un organisme de proximité pour pouvoir bénéficier les prêts sociaux garantis à hauteur de 50% par le FCS. Une volonté politique favorisant le partenariat est donc évidente. Cette coopération entre les banques et les IMF a une autre conséquence importante. Il s'agit de ne pas permettre aux banques qui s'intéressent au micro-crédit de concurrencer les IMF dans l'octroi du micro-crédit. Il est souhaitable que la concurrence se fasse, ou bien entre les banques commerciales, ou bien entre les IMF, mais non pas entre les banques et les IMF dans la mesure où ces banques ont une structure ayant un coût beaucoup plus élevé que celle des IMF. Dans ce cas, lorsque les bénéfices générés ne correspondent pas à leurs attentes, les banques décident de s'en aller tout en ayant causé auparavant à la performance des IMF. En effet, elles peuvent dégager des bénéfices en raison de la réduction de coût des opérations, de risques, qui est l'effet positif du partenariat entre les banques et les IMF. Lorsque les banques commencent à concurrencer les IMF, elles doivent supporter tout seules le coût des opérations, ses risques. Les bénéfices réels pourraient ne pas être ceux par elles attendus. L'intervention massive des banques serait donc un aspect positif en terme de l'efficacité et de réduction des coûts pour les bénéficiaires des emprunteurs, mais elle serait un désastre si cette intervention se faisait spontanément sans coopération avec les IMF. Il serait souhaitable au moins d'externaliser le coût d'accompagnement des porteurs de projet. Seul l'organisme de proximité peut en prendre en charge.

133. - L'exemple typique du partenariat en droit français. Pour illustrer cette démonstration, on peut citer à titre d'exemple, la pratique de partenariat entreprise par l'ADIE. Plusieurs réseaux bancaires travaillent avec l'ADIE. Il s'agit notamment du Crédit mutuel, des Banques populaires, du Crédit agricole et plus récemment en 2006 du groupe BNP Paribas. Ce type de partenariat a évolué dans le temps. Le premier accord a été conclu, en 1998, avec le Crédit mutuel de Bretagne. Cet accord consistait, pour la banque,

à prêter au créateur d'entreprise (les décisions étant prise au sein des comités de crédit de l'association) et à prendre en charge une partie du risque à hauteur de 30%. L'ADIE prenait à sa charge le solde du risque (avec la contre-garantie de l'Etat et du Fonds européen d'investissement), l'instruction du dossier, le recouvrement et l'accompagnement du créateur. En cas d'impayé de plus de trois échéances, l'ADIE s'engage à racheter les risques encourus par la banque. Selon ce schéma, la banque restait proche de son métier traditionnel de prêteur, mettait à la disposition de l'association des cadres pour évaluer les projets en comité. La participation au risque très faible mais le taux de remboursement très élevé allant jusqu'à 94% n'était pas un obstacle financier à leur engagement. Cette forme de partenariat s'est progressivement développée à partir du moment où l'ADIE a été habilité à pouvoir emprunter pour reprêter directement à ses clients.

134. - L'interrogation sur l'importation de ce modèle de partenariat en droit cambodgien. Enfin, on peut remarquer que cette mesure d'accompagnement est un modèle commun pour les pays européens qui ne se trouve pas forcément dans les pays en voie de développement. Au Cambodge, la pratique montre que les agences de micro-crédit ne donnent pas cette mesure d'accompagnement. Les explications sur l'utilisation de fonds prêtés doivent être données avant l'octroi de crédit, mais rien d'autres. Toutefois, cette situation est normale du fait que l'activité exercée par les emprunteurs est le plus souvent des activités traditionnelles génératrices de revenus. En plus, l'accompagnement et le suivi de prêt se font automatiquement entre les emprunteurs du groupe solidaire. Toutefois, en raison des avantages du partenariat, on peut se demander si ce type de partenariat pratiqué en droit français peut être transposé en droit cambodgien. Cette transposition est difficilement imaginable dans la situation actuelle. Une réflexion première sur cette transposition porte sur la question de savoir qui va s'occuper des dépenses de cette mesure d'accompagnement. A l'époque contemporaine, le pouvoir public est incapable de mettre en place un fonds prenant en charge des dépenses d'accompagnement. En plus, la réglementation actuelle privilégie les IMF au détriment des banques commerciales. Ainsi, une politique favorisant le partenariat entre les banques et les IMF est loin d'être à l'esprit du gouvernement cambodgien. Mais, les bailleurs de fonds seraient-ils aussi incapables de subventionner l'accompagnement des porteurs de projet ? Ce serait possible s'il y a une politique claire encourageant cette me sure.

Conclusion

135. - L'interrogation sur l'aspect nouveau du micro-crédit. En conclusion, on peut observer que le micro-crédit est né de la problématique de l'absence d'accès au crédit. Ce nouveau créneau n'intéressait pas les réseaux financiers traditionnels parce que les populations cibles ne correspondaient pas aux profils de la clientèle recherchée. La nouvelle conception de la distribution de crédit suppose une sélection rigoureuse des clients et une pratique de taux d'intérêt qui permet de couvrir le coût de l'opération. Ce propos nous permet de nous demander ce qu 'il y a de fondamentalement nouveau avec le micro-crédit s 'il est toujours fondé sur l 'évaluation de la capacité du client et de la faisabilité du projet, sur la réduction des risques et des coûts de gestion. On peut répondre à cette question que la différence principale par rapport au crédit classique est qu'il est orienté sur une nouvelle cible : les pauvres (pour les pays en voie de développement comme le Cambodge) et les exclus (dans le contexte des pays industriels notamment la France). Il reconnaît leurs talents, leurs besoins et leurs capacités de rembourser les crédits. Au lieu de les éliminer par avance de la clientèle du crédit parce que les méthodes, les critères, les garanties ne sont pas adaptés à leur situation, l'opérateur du micro-crédit invente des méthodes et des garanties qui leur conviennent. La personnalité des emprunteurs est un critère beaucoup plus important que le critère matériel. L'aspect humain est pris en compte à la place du critère patrimonial. Le micro-crédit n'est donc ni une utopie, ni un phénomène de mode mais une réalité de l'économie moderne, à part entière.

136. - La perspective du micro-crédit. D 'ailleurs, il faut se demander quel est l 'avenir du micro-crédit ? L'évaluation des perspectives futures du micro-crédit dépend de trois critères variables : la demande, le financement et l'environnement institutionnel. Notons que de plus en plus les établissements de crédit vont investir ce marché du micro-crédit,

non pas uniquement pour des préoccupations d'entreprise socialement responsable, mais également parce qu'il est désormais prouvé que ce marché peut être rentable. Il est devenu progressivement la gamme de produits des banques. Enfin, excepté l'adaptation des règles juridiques permettant aux opérateurs du micro-crédit de pouvoir entreprendre leurs activités avec une très grande facilité et une viabilité institutionnelle et financière, il est également nécessaire d'adapter des règles qui ont pour objectif de réduire au maximum les obstacles administratifs et fiscaux à la création de petites entreprises. L'esprit d'entreprise stimulé par le micro-crédit peut être timide en raison de ces obstacles. C'est une voie empruntée par le législateur français. La loi Dutreil du 1 er août 2003 a adopté notamment une voie de simplification administrative de la création d'entreprise, d'encouragement au financement de l'initiative économique. Cette tendance est prolongée par la loi du 2 août 2005 sur les Petites et moyennes entreprises. Elle propose encore des simplifications administratives pour la création d'entreprise, des faveurs comptables et fiscales. L'obstacle relatif au taux d'usure est levé successivement par ces deux dernières lois, ce qui permet aux banques qui veulent s'impliquer directement dans ce nouveau marché de couvrir les coûts d'opérations avec suffisamment de rentabilité. Le micro-crédit, plus largement la micro-finance constituera, dans l'avenir, un formidable marché pour les banques commerciales. Telle est la perspective que peut nous laisser entrevoir l'évolution actuelle de cette nouvelle conception d'octroi de crédit.

137. - Telle est également la perspective du micro-crédit en droit cambodgien. Les grandes IMF agréées se transforment progressivement en banques spécialisées puis en véritables banques commerciales mais qui continuent à privilégier leur activité de micro-crédit. Ce serait donc une ère de marchandisation du micro-crédit. Or, le micro-crédit ne doit pas être amputé de son volet social. Pour éviter ce risque de marchandisation du micro-crédit, il serait donc souhaitable que le gouvernement cambodgien change un petit peu d'orientation en s'inspirant des pratiques mises en place en droit français. Mais cela ne veut pas dire qu'il doit créer un fonds de garantie des prêts, mais il doit encourager la mise en place des organismes sociaux dont le fonctionnement serait partiellement subventionné par les bailleurs de fonds afin d'accompagner les emprunteurs potentiels ou obliger les opérateurs du micro-crédit à s'occuper de cette mesure d'accompagnement comme condition d'habilitation. Cela permettrait de parvenir à un résultat plus satisfaisant.

ANNEXE

KINGDOM OF CAMBODIA NATION RELIGION KING

National Bank of Cambodia

B 7.91- 115 ProrKor

PRAKAS

ON THE CALCULATION OF INTEREST

RATE ON MICRO-FINANCE LOANS

The Governor of the National Bank of Cambodia

- With reference to the constitution of the Kingdom of Cambodia

- With reference to the Royal Kram NS/RKM/ 0196/13 of January 26, 1996 promulgating the Law on Organization and Functioning of the National Bank of Cambodia,

- With reference to the Royal Kram NS/RKM/ 1199/13 of November 18, 1999 promulgating the Law on Banking and Financial Institutions,

- With reference to the Royal Degree Chor Sor/RKT/0398/85 of March 10, 1998 on the appointment of His Excellency Chea Chanto as Gorvernor General of the National Bank of Cambodia,

- With reference to the Prakas No. B700- 05 Pror Kor of January 11, 2000 on Licensing of Rural Credit Specialized Banks,

- With reference to the PRAKAS No. B700- 06 Pror Kor of January 11, 2000 on Licensing of Micro-financing Institutions,

- Pursuant to the request of the General Director of the National Bank of Cambodia

Decides as follows:

Article 1 :Royal credit specialized banks, Micro Finance Institutions registered and licensed from the National Bank of Cambodia, Non-governmental organizations (NGOs), associations, under the law on Banking and Financial Institutions shall calculate interest rate to comply with the provision of this Prakas with regard to their credit operations.

Article 2: Interest charged on any loan granted by an entity mentioned in Article 1, must be calculated taking into account the payments of principal already made on that loan. Consequently, interest charged on a loan for a given period (week, month, quarter, year as the case may be) shall be calculated on the loan outstanding balance at the end of that period.

Article 3: Loan agreement between Micro Financial Institutions and customers shall have credit amortization table.

Article 4: Covered entities that contravene to the provisions of this Prakas will be subject the disciplinary sanctions mentioned in Article 52 of the Law on the Banking and Financial Institutions.

Article 5: All provisions contrary to those of the Prakas are hereby repealed.

Article 6: The General Direction, the General Secreteriat, the General Inspection, the General Casier, all Department of the National Bank of Cambodia and all Banking and Financial Institutions under the National Bank of Cambodia supervisory authority shall strictly implement this Prakas.

Article 7: This Prakas shall have effect from the signing date.

Phnom Penh, August 14, 2001
Governor
Signed and sealed: CHEA CHANTO

B 7.01- 136 Pror Kor

PRAKAS
ON BANK'S CAPITAL GURRANTEE

The Governor of the National Bank of Cambodia,

- With reference to the constitution of the Kingdom of Cambodia;

- With reference to the Royal Kram NS/RKM/0 1199/27 of January 26. 1996 promulgating the Law on the Organization and Functionning of the National Bank of Cambodia;

- With reference to the Royal Kram NS/RKM/1 199/13 of November 18. 1999 promulgating the Law on Banking and Financial Institutions;

- With reference to the Royal Degree Chor Kor/ RKT/0398/85 of March 10. 1998 on the appointment of His Excellency Chea Chanto as Governor of National Bank of Cambodia;

Decides as following:

Article 1: The percentage of minimum capital that shall be permanently deposited with the National Bank of Cambodia, as set by article 16 of the Law on Banking and Financial Institutions, amounts to 10 °/°.

Article 2: Existing deposits as of 31st December 2000 will have to be completed up to the minimum level of 5 billions Riels by 31st December 2001.

Article 3: Banks who were granted a delay to increase their capital up to the minimum level of 51 billions Riels during the year 2001 will make this deposit prorata the installments shareholders are committed to pay. In case the capital increase is made out of retained earnings, the deposit will be made as soon as shareholders authorize the capital increase.

Article 4: The deposit can be made either in Riels or in US dollars. There shall be no possibility to change this option after the deposit has been made. The rate of exchange used for calculation of the deposit, if required, will be the official rates on the day funds are credited into the account with NBC.

Article 5: Deposit in Riels will bear interest at 1/2, six-month period of refinancing rate set by the

National Bank of Cambodia.

Deposit in USD dollars will bear interest at the annual rate of 3/8 six-month period SIBOR. The National Bank of Cambodia will notify the banks of the rate applicable for the relevant periods.

Article 6: The deposit can be repaid only in case of liquidation and according to the priority order set by article 64 of the Law on Banking and Financial Institutions.

Article 7: All provisions contrary to those of this Prakas are hereby repealed.

Article 8: The General Direction, the General Secretariat, the General Casier, the General Inspection, all Departments of the National Bank of Cambodia, and all Banking and Financial Institutions under the NBC's supervisory authority shall implement this Prakas.

Article 9: This Prakas will have effect from the signing date.

Phnom Penh, October 15, 2001
The Governor
Signed and sealed: CHEA CHANTO

B 7.02-45 Pror Kor

PRAKAS
ON THE MAINTENANCE OF RESERVE REQUIREMENT
FOR MICROFINANCE INSTITUTIONS

The Governor of the National Bank of Cambodia

- With reference to the constitution of the kingdom of Cambodia

- With reference to the Royal Kram NS/RKM/ 0 196//27 of January 26, 1996 promulgating on the Law on the Organization and Functioning of the National Bank of Cambodia.

- With reference to the Royal Kram NS/ RKM/1 199/13 of November 18, 1999 promulgating on the Law on Banking and Financial Institutions,

- With reference to the Royal Degree Chor Sor/RKT/03/98 of March 10, 1998 on the appointment of His Excellency Chea Chanto as Governor General of the National Bank of Cambodia.

- With reference to the Prakas No. B 700-06 Pror Kor of January 11, 2000 on licensing of Micro-finance Institutions.

- Pursuant to the agreement of the leader meeting of the National Bank of Cambodia on January 23, 2002.

Decides as following:

Article 1: Licensed Micro-finance Institution shall deposit 5 per cent of their deposits into an account maintained with the National Bank of Cambodia.

Article 2: The reserve requirement on the deposit will be calculated on the basis of deposit outstanding at the end of each month, as reported in the institution's balance sheet and in the prescribed reporting on the breakdown of deposits mobilized by the institutions.

For the purpose of calculating the reserve requirement, compulsory savings, which any saving required as condition to participate in a credit scheme, shall be excluded.

Article 3: The reserve requirement as calculated under Article 2 shall be maintained a deposit in the institution's account with the National Bank of Cambodia from the 15 day of the month following the end of the month reported, until the 14th day of the next month. At the time the new reserve requirement will be calculated and will become applicable.

Article 4: Licensed Micro-finance Institutions shall promptly remedy any reserve deficiency as soon as they are notified of such deficiency by the National Bank of Cambodia.

Article 5: Violation to the provisions of this Prakas may give rise to disciplinary sanctions as set forth in Article 52 of the law on Banking and Financial Institutions.

Article 6: All provisions contrary to this Prakas are hereby repealed.

Article 7: The General Direction, the General Secreteriat, the General inspection, the General Casier and all departments of the National Bank of Cambodia supervisory authority shall strictly implement this Prakas.

Article 8: This Prakas shall have effect from the signing date.

Phnom Penh, February 25, 2002
Governor
Signed and sealed: CHEA CHANTO

B 7.02-47 Pror Kor

PRAKAS

ON REPORTING REQUIREMENT

FOR REGISTERED NGOs AND LICENSED MICROFINANCE INSTITUTIONS
The Governor of the National Bank of Cambodia

- With reference to the Constitution of the Kingdom of Cambodia,

- With reference to the Royal Kram NS/RKM/0196/13 of January 26, 1996 promulgating the Law on the Organization and Functioning of the National Bank of Cambodia,

- With reference to the Royal Kram NS/RKM/ 1199/13 of November 18, 1999 promulgating the Law on Banking and Financial Institutions,

- With reference to the Royal Degree Chor Sor/RKT/0398/85 of March 10, 1998 on the appointment of His Excellency Chea Chanto as Governor General of the National Bank of Cambodia,

- With reference to the PRAKAS No. B 700-06 Pror Kor of January 11, 2000 on licensing of Micro-finance Institution,

- Pursuant to the agreement of the leader meeting of the National Bank of Cambodia on January 31, 2002

Decides as following:

Article 1: Registered micro-finance operators and licensed micro-finance institutions shall submit regular reports to the National Bank of Cambodia with regard to their financial results, their loan portfolio, the deposits they mobilize and their network of branches and offices.

Article 2: Every quarter, registered micro-finance operators shall be required to prepare the following reports to be submitted the National Bank of Cambodia within one month of the end of

each quarter:

- Statement of assets and liabilities

- Statement of profit and loss

- Breakdown of deposits by category

- Breakdown of deposits by currency

- Loan breakdown by category

- Loan breakdown by currency

- Loan classification and delinquency ratio

- Network of branches and offices.

Article 3: Every month, Licensed Micro-finance Institutions shall be required to prepare the

following reports to be submitted to the National Bank of Cambodia within 15 days of the end of

each month:

- Statement of assets and liabilities

- Statement of profit and loss

- Off balance sheet

- Breakdown of deposits by category

- Breakdown of deposits by currency

- Loan breakdown by category

- Loan classification, loan loss provisions and delinquency ratio

- List of loan to related parties

- List of large exposures

- Calculation of capital adequacy ratio

- Calculation of liquidity ratio.

Article 4: At the end of each quarter, Licensed Micro-finance Institutions shall be required to submit reports on evolutions of their branches and offices network to the National Bank of Cambodia.

Article 5: Every year, Micro-finance Institutions shall be required to prepare the following reports to be submitted to the National Bank of Cambodia by the 30th of April of the following year:

- Audited financial statements

- Board of Directors' Annual Report

- Statistics of staff and salaries

- Up-dated organization chart with names and titles of incumbents.

Article 6: All the reports shall be prepared according to the format prescribed by the National Bank of Cambodia.

Article 7: Violation to the provisions of this Prakas may give rise to disciplinary sanctions as set forth in Article 52 of the law on Banking and Financial Institutions.

Article 8: All provisions contrary to this Prakas are hereby repealed.

Article 9: The General Direction, the General Secretariat, the General Casier, the General inspection all departments of the National Bank of Cambodia supervisory authority shall strictly implement this Prakas.

Article 10: This Prakas shall have effect from the signing date.

Phnom Penh, February 25, 2002
Governor
Signed and sealed: CHEA CHANTO

B 7.02-48 Pror Kor

PRAKAS

ON LIQUIDITY RATIO APPLICABLE

TO LICENSED MICROFINANCE INSTITUTIONS

The Governor of the National Bank of Cambodia

- With reference to the Constitution of the Kingdom of Cambodia,

- With reference to the Royal Kram NS/RKM/0196/27 of January 26, 1996 promulgating the law on the Organization and Functioning of the National Bank of Cambodia,

- With reference to the Royal Kram NS/RKM/ 1199/13 of November 18, 1999 promulgating the law on Banking and Financial Institutions,

- With reference to the Royal Degree Chor Sor/RKT/0398/85 of March 10, 1998 on the appointment of His Excellency Chea Chanto as Governor General of the National Bank of Cambodia,

- With reference to the PRAKAS No. B 700-06 Pror Kor of January 11, 2000 on Licensing of Micro-finance Institutions,

- Pursuant to the agreement of the leader meeting of the National Bank of Cambodia on January 23, 2002.

Decides as following:

Article 1: Licensed Micro-finance Institutions shall at all times maintain a liquidity ratio of at least 100°/°.

Article 2: The liquidity ratio will be calculated as follows:

- numerator: cash on hand, plus deposits with the National Bank of Cambodia, plus deposits

with banks, minus the amount owed to the National Bank of Cambodia and banks ( net

liquidity ), plus the portion of loans outstanding maturing in less than one month - denominator: 25°/°of voluntary savings, excluding compulsory savings.

Article 3: Licensed Micro-finance Institutions shall file monthly calculations of their liquidity ratio in accordance with the reporting format prepared by the National Bank of Cambodia.

Article 4: Violations to the provisions of this Prakas may give rise to disciplinary sanctions as set

forth in Article 52 of the law on Banking and Financial Institutions.

Article 5: All provisions contrary to this Prakas are hereby repealed.

Article 6: The General Direction, the General Secretariat, the General inspection, the General Cashier and all Departments of the National Bank of Cambodia, and all Micro Financial Institutions under of the National Bank of Cambodia supervisory authority shall strictly implement this Prakas.

Article 7: This Prakas shall have effect from the signing date.

Phnom Penh, February 25, 2002
Governor
Signed and sealed: CHEA CHANTO

B 7.02-49 Pror Kor

PRAKAS

ON REGULATION AND LICENSING OF MICROFINANCE INSTITUTIONS
The Governor of the National Bank of Cambodia

- With reference to the Constitution of the Kingdom of Cambodia,

- With reference to the Royal Kram NS/RKM/ 0 196/27 of January 26, 1996 promulgating the law on the Organization and Functioning of the National Bank of Cambodia,

- With reference to the Royal Kram NS/RKM/ 1199/13 of November 18, 1999 promulgating the law on Banking and Financial Institutions,

- With reference to the Royal Degree Chor Sor/RKT/0398/85 of March 10, 1998 on the appointment of His Excellency Chea Chanto as Governor General of the National Bank of Cambodia,

- With reference to the PRAKAS No. B 700-06 Pror Kor of January 11, 2000 on Licensing of Micro-finance Institutions,

- Pursuant to the agreement of the leader meeting of the National Bank of Cambodia on January 31, 2002

Decides as following:

Article 1: Article 1 of Prakas No B 7-00-06 Pror Kor of January 11, 2000 on Licensing Micro-finance Institution, is hereby repealed and replaced by the present Prakas.

Micro-finance is defined as follows:

Article 2: The microfinance means «the delivery of financial services such as loans and deposits, to the poor and low-income households, and to micro-enterprises»

Article 3: Registration with the National Bank of Cambodia is compulsory for the all non-government organizations (NGOs), associations and others entities engaged in micro-finance, if

they meet one of the conditions:

a) For those engaged in credit:

- Their loan portfolio outstanding is equal to or greater than KHR 100 millions

b) For those engaged in savings mobilization

- The savings mobilized from the general public amount to KHR 1 million or more, OR

- The number of their depositors is 100 or more.

Article 4: Registered finance operators must comply with existing law and regulations and meet the standard and criteria set by the National Bank of Cambodia in the term of good governance, transparency, and competence and honest management.

Article 5: The National Bank of Cambodia shall deliver the certificate of registration to micro finance operators that present official request for registration, meets the set standard and criteria, and submit the required information and documents. This certificate can be withdrawn and the registration cancelled if the operators do not comply with conditions set by the National Bank of Cambodia.

Article 6: Micro finance operators that is denied registration by the National Bank of Cambodia, or whose registration is cancelled by the National Bank of Cambodia, shall cease micro finance activity within three months of being informed of the National Bank of Cambodia's decision.

Article 7: Registered micro finance operators shall provide regular reports on their activities and organization, as and when required by the National Bank of Cambodia.

Article 8: Licensing is compulsory for all micro-finance institutions, if they meet one of the following conditions:

a) For those engaged in credit:

- Their loan portfolio outstanding is equal to or greater than KHR 1,000 million, OR

- They have 1,000 borrowers or more

c) For those engaged in savings saving mobilization:

- The savings mobilized from the general public amount to KHR 100 million or more, OR

- The number of their depositors is 1,000 or more.

Article 9: Micro finance institutions are subject to compulsory licensing shall prepare an application for a license to be submitted to the National Bank of Cambodia have until December, 31 2002. Otherwise they will have to scale down their volume of activity and operate as a registered micro-finance institution, as provided for in Article 3 to 7 above.

Article 10: Violations to the provisions of this Prakas may give rise to disciplinary sanctions as set forth in Article 52 of the Law on Banking and Financial Institutions.

Article 11: The General Direction, the General Secretariat, the General inspection, the General Cashier and all Departments of the National Bank of Cambodia and all Micro Financial Institutions under of the National Bank of Cambodia supervisory authority shall strictly implement this Prakas.

Article 12: This Prakas shall have effect from the signing date.

Phnom Penh, February 25, 2002
Governor
Signed and sealed: CHEA CHANTO

B 7.02-49 Pror Kor

PRAKAS

On

Amendment on Prakas No B 7-00-51

THE CLASSIFICATION AND PROVISIONING FOR BAD AND DOUBTFUL DEBTS,
INCLUDING INTEREST IN SUSPENSE

The Governor of the National Bank of Cambodia

- With reference to the Constitution of the Kingdom of Cambodia,

- With reference to the Royal Kram NS/RKM/ 0 196/27 of January 26, 1996 promulgating the law on the Organization and Functioning of the National Bank of Cambodia,

- With reference to the Royal Kram NS/RKM/ 1199/13 of November 18, 1999 promulgating the law on Banking and Financial Institutions,

- With reference to the Royal Degree Chor Sor/RKT/0202/039 of February 16, 2002 on the reappointment of His Excellency Chea Chanto as Governor General of the National Bank of Cambodia;

- With reference to the PRAKAS No. B 7-00-51 on the classification and provisions for Bad and Doubtful Debts, including Interest in Suspense;

- Pursuant to the opinion of working group of banking and financial service with private sector on 5 February 2002.

Decides as following:

Article 1: Article 4 of Prakas No B 7-00-51 on the classification and provisioning for bad and doubtful debts, including interest in suspense, is amended and has the following content: The mandatory minimum level of specific provisioning, depending on the classification concerned,

shall be the following:

- Substandard : 10 °/°, regardless of collateral value except cash,

- Doubtful : 30 °/° , regardless of collateral value except cash,

- Loss: 100 °/° , if the banks can prove the actual market value of collateral on the case by case basis, acceptable to the National Bank of Cambodia, only part of loan uncovered will be provisioned.

Article 2: The General Direction, the General Secretariat, the General inspection, the General

Cashier and all Departments of the National Bank of Cambodia, and all Micro Financial Institutions under of the National Bank of Cambodia's supervisory authority shall strictly implement this Prakas.

Article 3: This Prakas shall have effect from the signing date.

Phnom Penh, June 7, 2002
Governor
Signed and sealed: CHEA CHANTO

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Roche-Dahan (J.), Le domaine d'application des lois Scrivener, RTD Com. 1996,n° 49, p.1.

Servet (J-M.), La microfinance et la lutte contre l'exclusion financière en France, in Le rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 2001, p. 207.

Servet (J.M), « Les limites du microcrédit », in Alternatives économiques, Décembre

2006, n°253, p. 70-71.

Sapy (P.), Réseaux bancaire et microcrédit : Vers de nouvelles formes de mécénat, Rev. Banque Magazine, 2005, p. 27-28.

Tremollière (N.), La microfinance au service des économiques émergents, Banque Magazine, n° 654, Janvier 2004, p. 17.

VALLAT (D.), Très petites entreprises et exclusion bancaire en France : les partenaires associations-banques, Rev. Eco. Fin, 2000, p. 155.

VALLAT (D.), La finance solidaire : un champ d'application varié, in Le Rapport moral sur l'argent dans le monde, éd. Association d'économie financière, 1998, p.

499-5 19.

Verbeeren (P.), Lardinois (I.), Guide pratique sur le micro-crédit : expérience du prêt solidaire, septembre 2003.

Les articles des journaux

Green (C.), Cambodge : Microcrédit ou maxi-usure ?, in Le Phnom Penh Post, 18 juillet 2002.

TROCORNOT (A.), Le micro-crédit fait-il baisser la pauvreté ?, in Le monde, Mardi, 14 Novembre 2006.

La naissance en France des prêts à la consommation, in Le monde, 6 janvier 2006.

Pour lutter contre l'exclusion, Jaque Chirac mise sur le microcrédit, in Le monde, 4 février 2006.

La Poste sollicite de l'Etat le droit de distribuer des microcrédits, in Le monde, 17 mai 2006.

M. Borloo au chevet de l'exclusion bancaire, in Le monde, 29 juin 2004.

Cinq millions de personnes en France sont des exclus bancaires, in Le monde, 10 juin 2004.

IV. Les textes légaux

1. En droit français

· Code monétaire et financier : L.51 1-1, L.51 1-6 alinéa 5.

· Code général des impôts : L'article 261 C 1° A.

· Loi n°2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques (NOR:ECOX0000021L, J.O. du 16 mai 2001) : Les articles 17 et 19 de la loi du 15 mai 2001 sur La Nouvelle régulation économique.

· Décret n° 2002-652 du 30 avril 2002 portant application du 5° de l'article L. 511-6 du Code monétaire et financier relatif aux associations habilitées à faire certaines opérations de prêts (NOR : ECOT0214241D, J.O. du 2 mai 2002).

· Arrêté du 3 juillet 2002 pris en application du décret n° 2002-652 du 30 avril 2002 relatif

à l'habilitation des associations sans but lucratif mentionnées au cinquième alinéa de

l'article L. 511-6 du Code monétaire et financier (NOR : ECOT0214255A, J.O. Numéro 161 du

12 Juillet 2002).

· Arrêté du 3 juillet 2002 portant nomination au comité d'habilitation des associations sans but lucratif mentionnées au cinquième alinéa de l'article L. 511-6 du code monétaire et financier (NOR : ECOT0214254A, J.O. Numéro 161 du 12 Juillet 2002 ).

2. En droit cambodgien

· Loi portant réglementation des banques et des institutions financières du 19 octobre 1999.

· Prakas (règlement) n° B 00-006/PrK du 11 janvier 2000 de la Banque centrale du Cambodge sur l'agrément des Institutions de microfinance.

· Prakas n° B 7-02-49/PrK du 25 février 2002 de la Banque centrale du Cambodge sur la reconnaissance et l'agrément des IMF, modifiant le Prakas du 11 janvier 2000.

· Prakas n° B 7-02-45/PrK du 25 février 2002 sur la réserve obligatoire des institutions de microfinance.

· Prakas n° B 7-02-48/PrK sur le ratio de liquidité des institutions de microfinance.

· Prakas n° B 7-02-47/PrK sur l'exigence de rapport d'information pour les institutions enregistrées et agréées.

· Prakas n° B- 7-01-115 prk du 14 août 2001 sur le calcul de l'intérêt du crédit accordé par l'institution de la micro-finance.

· Prakas n° B - 595 - 47 PK du 16 mars 1995 sur la libération de taux d'intérêt.

· Décret-loi n° 3 8/Kch du 28 octobre 1988 sur le contrat et la responsabilité extracontractuelle.

VI. Les sites Internets

- www.légisfranc.com

- www.moc.gov.kh et www.nbc.gov.kh (pour tous les textes légaux en droit cambodgien)

- www.cgap.org

- www.afd.fr

- www.microcréditsummit.org

- www.MicroSave.org

- www.grameen.com

- www.soc.titech.ac.jp/icm/icm.html (La bibliothèque Virtuelle du micro-crédit) - www.globenet.org/finansil/ (L'association pour le financement solidaire)

INDEX

(Les chiffres renvoient aux numéros des paragraphes)

Association de micro-crédit, 10-1, 13, 30-2, 80, 89, 105,106, 113-2, 114, 119.

Assurance, 54, 85 (V. aussi Micro-assurance)

- A -

Accès au crédit, 4, 10, 19, 22, 24, 26, 27, 29, 39, 44, 45, 49, 61, 65, 79, 84, 98, 101. Accords de Paris, 11.

- B -

Accompagnement, 10-1, 33-1, 43, 49, 51, 55, 56, 59, 60, 71, 77, 90, 102-3, 113, 113- 2, 114, 134.

Banque,

- européenne d'investissement,
88.

- Commerciale, 12, 14, 78, 80,
82, 89, 94, 95 et s., 132, 134.

- du développement rural, 11.

- Grammen Bank, 1, 6, 8, 9, 33,
36, 38, 39.

- Nationale du Cambodge, 95 et
s., 105.

- Mutualiste, 6.

- Spécialisée, 11, 95-2.
Blanchiment de l'argent, 104. Bon risque de crédit, 6, 83.

Acte du commerce, 21.

Activité

- commerciale, 21, 98.

- économique, 2, 29, 38, 40, 48, 61, 76, 77, 98.

- génératrice de revenus, 1, 30, 39, 59, 67, 134.

- professionnelle, 30-1, 100.

Action en justice, 96.

Affectation de crédit, 15 (V. aussi Destination du crédit)

Agrément, 108, 109-1, 109-2, 112,118. Aléa moral, 20, 24.

Année Internationale du micro-crédit, 1. Asymétrie d'information, 20, 22, 23, 33

- C - - D -

Caisse des dépôts et consignations (CDC), 41, 49, 90.

Capital social, 13, 73.

Capitalisation des intérêts, 85.

Caution solidaire, 6, 33-1, 33-2,126 (V. aussi Groupe solidaire)

Citoyenneté économique, 5, 10, 29-1, 39, 92.

Clientèle du micro-crédit, 29, 51, 52. Comité d'habilitation des associations de l'article L.51 1-6 alinéa 5 du CMF, 114. Comité d'orientation et de suivi de l'emploi des fonds de FCS (COSEF), 102-1. Compte bancaire, 19.

Concurrence, 21, 40, 41, 91.

Concours bancaire, 27.

Consommateur, 81, 103.

Coopérative d'épargne-crédit, 6.

Crédit

- Affecté, V. Destination de crédit

- A la consommation, 30, 30-1, 30-2, 76, 101,

- Amortissable, 85, 95-2.

- Solidaire, 33-1, 40 (V. aussi Groupe solidaire)

- A des fins professionnelles, 30, 30- 2.

- Progressif, 32, 33, 34,

- Sociaux, 10-2, 48, 112.

- Municipal de Paris (CMP),

Découvert, 93.

Destination de crédit, 28, 30, 38, 53, 69, 98, 102-1,

Dépôt, 104, 109-1,

Dépôt de garantie, 54, 120, Distribution de crédit, 16, 18, 21, 26, 27, 36, 55, 98.

Dignité du crédit, 21.

Droit au crédit, 3, 19.

- E -

Exclusion financière, 5, 9, 10, 10-1, 10-2, 21, 30-2, 46, 49, 76, 92-2, 102,

103, 112, 113.

Exclusion bancaire, 10, 112, 119. Epargne, 6, 12, 13, 29-2, 65, 67, 76,

104, 106, 109 et s., 117, 118, 120, 129.

Esprit d'entreprise, 29-1, 39, 72, 92- 2.

Etablissement de crédit, 13, 21, 26, 55.

- F -

Fichier des incidents de paiement (FICP), 26.

Finalité de prêt (V. Destination de crédit)

Financement, 3, 10-1, 11, 14, 20, 27, 29, 33-3, 39, 40, 41, 42, 53, 77, 89, 92-2, 94, 120, 132, 136.

- le dualisme de -, 2.

- formel, 2, 3, 17, 27, 61.

- informel, 2, 4, 17, 77.

Fonds de garantie, 43, 44 et s., 102-2, 126.

- Fonds de garantie pour la création, la reprise ou le développement d'entreprise à l'initiative des femmes (FGIF), 44.

- Fonds de garantie pour l'insertion économique, 45.

- Fonds solidarité logement, 54.

- Fonds de cohésion sociale (FCS),

10-2, 29-1, 102-2, 126, 131, 132. Forme juridique, 107, 111, 114, (V. aussi Statut juridique des opérateurs du microcrédit)

Fonds de roulement, 40, 44.

Fonds de réserve, 123, 126.

Fonds propres, 26, 30, 39, 40,123, 127. - quasi fonds propres, 39, 41. Fongibilité de l'argent, 62.

Groupe solidaire, 32, 33, 33-1, 33-2, 59.

- I -

Intérêt

- calcul d'-, 85, 95-2.

- capitalisation des -, 85.

- taux d'-, 23, 78 et s.
Insolvabilité, 119, 33-2 (V. Risque d 'insolvabilité)

Institution du micro-crédit (IMC), 72, 76, 78, 79, 80, 83, 84, 88, 89, 106. Institution de la micro-finance (IMF), 12, 12, 95 et s., 106, 118.

- IMF agréée, 108, 109, 109-1,
109-2.

- IMF reconnue, 108, 110.
Intermédiaire financier, 6.

- L -

Locapass, 54.

1% logement (V. Locapass)

Garantie, 16, 20, 23, 24, 25, 33-1, 42, 44, 89.

- morale, 33, 33-2.

- matérielle, 33, 33-2.

- technique de -, 32, 33-2.

- d'impayé de loyer, 54.

Marché financier, 2. Micro-assurance, 7, 106. Micro-crédit,

- caractéristiques du -, 17, 18, 28 et s., 58.

- définition du -, 2, 10-2, 16,

- G - - M -

56, 57 et s., 106 et s.

- modèle du -, 28, 33-1.

- impacts du-, 14, 16, 62, 63 et s.

- nature juridique du -, 3 0-2.

- spécificité du -, 105, 116, 120, 121.
Micro-découvert, 61.

Micro-épargne, 7, 106.

Micro-finance, 7, 78, 92-2, 95-1, 104, 106. Monopole bancaire, 91, 112.

- O -

Opération de banque, 39, 95-1, 95-2,109-1, 101,111.

Opération de crédit, 23, 30-1, 39, 58. Opérateur du micro-crédit, 12, 13, 29-2, 30- 2, 31, 32, 68, 33, 78, 79, 83, 84, 88 et s., 103 et s., 110 et s.

- statut juridique des -, 13, 106, 107
et s.

- habilitation des -, 114.

- P -

Partenariat, 10-1, 30-2, 42, 43, 49, 50, 60, 78, 90, 105, 130 et s.,

Pauvre actif, 29, 92-2.

Prêt,

- à la consommation, (V. crédit à la
consommation)

- à la création d'entreprise (PCE), 15,
39, 40, 42.

- affectation du -, (V. Destination du

crédit)

- collectif, (Vi. Crédit
solidaire)

- d'honneur, 15, 39, 40, 41.

- participatif, 41.

- sur gage, 6, 50, 56.
Profession, 13, 39, 95-2, (V. aussi Activité professionnelle)

Protection des emprunteurs, 81, 91, 103.

Proximité, 2, 4, 23, 24, 28, 32, 33-3, 59, 61, 70.

Provision des crédits non garantis, 126.

- R -

Ratio bancaire, 26.

- de division des risques, 123,
127.

- de liquidité, 9, 128.

- de solvabilité, 26, 127,

- provision des crédits non
garantis, 126.

Réglementation prudentielle, 13, 106, 115, 116 et s., (V. aussi Ration bancaire)

- champ d'application, 190-2,
116, 117 et s.

- contenu, 116, 120, 121.
Réglementation spécifique, 13, 107, 105, 107, 108, 115.

Répression financière, 80.

Réserve obligatoire, 128.

Risque de crédit, 10, 21, 32, 83, 122.

- d'immobilisation, 21.

- d'insolvabilité, 21.

- Pondération de -, 13, 122.
Risque de remboursement, 4, 76, 89.

- S -

Secours Catholique, 46, 49, 51.

Semaine du micro-crédit, 10-2.

Service bancaire de base, 19, 113.

Service financier, 7, 12, 29-2, 33, 59, 65, 70, 71, 72, 78, 84, 88, 89, 95-1, 95-2, 106, 117.

Scoring, 21, 22.

Société financière, 30-1, 30-2, 105. Sommet Global du micro-crédit, 1, 6. Solvabilité, 4, 26, 29-2, 118, 131.

Statut juridique des opérateurs du microcrédit, 106, 107 et s.

- en droit cambodgien, 107, 108 et s.

- en droit français, 107, 112.
Subvention, 41, 69, 80, 88, 104, 123. Surendettement, 10-2, 14, 16, 26, 62, 63, 75, 76 et s., 100, 102-1.

Système bancaire du Cambodge, 11. Système financier, 5, 6, 14, 92-2, 117.

- T -

Taux bonifié, 87, 88.

Taux d'intérêt, 12, 23, 50, 78, 79 et s., 135.

- libéralisation des -, 12, 79, 80, 86.

- plafonnement des -, 81, 82 et s., 85, 91, 95-2.

- taux d'usure, 12, 79, 80, 83, 91, 96.

Taux de remboursement, 29-2, 72, 88.

Taux effectif global (TEG), 85, 91. Tolérance, 61.

Tontine, 118.

Transparence, 82, 84, 85, 86. Transfert de fonds, 7, 65.

Typologie du micro-crédit, 10-2, 16, 17, 35, 36 et s., 101, 105.

- micro-crédit social, 2, 10-2, 14, 16, 30-2, 36, 45, 46 et s., 77, 97, 105.

- micro-crédit professionnel, 2, 14, 16, 30, 36, 37 et s., 43, 96, 97, 101, 103, 105.

- U -

Usure, 6, 12, 50, 85, 92-1, 95, 98, 99, 100, 102.

Usurier, 4, 23, 24, 50, 65, 84, 90, 101.

- V -

Viabilité financière, 12, 78, 79

TABLE DES MATIÈRE

Remerciement i

Sommaire iii

Introduction 1

Première Partie :
LA NOTION DE MICRO-CREDIT

Chapitre I : La typologie du micro-crédit 14

Section I : Les caractéristiques du micro-crédit 14

§ 1. - La réticence bancaire en matière du micro-crédit 15

§ 2. - Les caractéristiques du micro-crédit 20

Section II : La typologie du micro-crédit 32

§ 1. - La conception restrictive du micro-crédit : le micro-crédit professionnel 33

A. L'origine du micro-crédit professionnel 33

B. Le Fonds de cohésion sociale : l'instrument du développement du micro-crédit

professionnel 37

§ 2. - L'innovation du micro-cédit social 39

A. Le Fonds de cohésion sociale : une démarche novatrice du micro-crédit social--

40

1. L'origine du micro-crédit social 40

2. Les conditions de l'octroi du micro-crédit social 43

B. L'incidence sur la définition du micro-crédit 46

1. La diversité de la définition du micro-crédit crédit 48

2. La définition du micro-crédit proposée 50

Chapitre II : Les impacts du micro-crédit 53

Section I : Les impacts socio-économique et financier du micro-crédit 53

§ 1. - Les impacts économiques et financiers 54

A. L'impact financier du micro-crédit 54

B. L'impact économique du micro-crédit 55

1. La création d'emplois 55

2. L'impact sur les revenus 58

§ 2. - Les impacts sociaux du micro-crédit 62

Section II : Le micro-crédit et le surendettement des particuliers 63

Seconde Partie :
LA REGLEMENTATION DU MICRO-CREDIT

Chapitre I : La réglementation des taux d'intérêt du micro-crédit 70
Section I : La libéralisation ou la répression des taux d'usure du micro-crédit 71

§ 1. - Les impacts du plafonnement des taux d'usure 72

A. La restriction de l'accès au micro-crédit 72

B. L'absence de transparence 74

§ 2. - Plaidoyer pour la libéralisation des taux d'usure du micro-crédit 76

Section II : La politique législative des taux d'intérêt 81

§ 1. - L'inapplicabilité du Prakas du 16 mars 1995 au micro-crédit accordé par les IMF -82

§ 2. - L'influence du micro-crédit sur le droit français en matière de taux d'intérêt 85

A. Le cas du micro-crédit professionnel 86

B. Le cas du micro-crédit social 89

Chapitre II : La réglementation des opérateurs du micro-crédit 92
Section I : Le cadre institutionnel et réglementaire des opérateurs du micro-

crédit 94

§ 1. - Le statut juridique des opérateurs du micro-crédit 95

A. Le statut juridique des opérateurs du micro-crédit en droit cambodgien ---- 96

B. Le statut juridique des opérateurs du micro-crédit en droit français 101

§ 2. - La réglementation prudentielle des opérateurs du micro-crédit 105

A. Le champ d'application de la réglementation prudentielle 105

1. Le cas des opérateurs du micro-crédit opérant à la fois les activités de crédit et d'épargne 106

2. Le cas des opérateurs du micro-crédit offrant uniquement les produits du micro-crédit 108

B. Le contenu des règles prudentielles adaptées aux opérateurs du micro-crédit---- 110

1. Les remarques préliminaires 111

2. L'adaptation des règles prudentielles aux opérateurs du micro-crédit 113

Section II : La réglementation favorisant le partenariat Banques-Organimses du

micro-crédit 118

Conclusion 124

Annexe 126

Bibliographies 140

Indexe alphabétique 148

Table des matières 153






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