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Le réalisme dans Mission Terminée

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par Andry RANDRIAMANGA
Université de Tuléar, MADAGASCAR - Maîtrise 2007
  

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2- L'influence de l'être hybride sur les individus

L'être hybride, c'est-à-dire le Noir est celui qui est issu de l'école européenne, comme notre héros, Medza. Il est appelé ainsi car il n'est ni

profondément dans le sol ». p.14, Mission Terminée

13 A. Hampaté Bâ, Aspect de la civilisation africaine, éditions Présence Africaine, 1972, p.27

africain, ni européen étant donné qu'il a perdu sa propre culture et ne fait que suivre approximativement et bêtement celle des Blancs bon gré mal gré.

L'être hybride issu de l'éducation européenne est en effet une des causes de l'acculturation. G'est un système indépendant où les Blancs sont absents et n'interviennent plus directement aux objectifs qu'ils ont fixés car ils ont déjà cette machine à leur service qui, va réussir là où ils ont pu échouer, qui s'infiltrera sans peine là où ils ont eu beaucoup du mal à passer, dans les arrières pays qui leurs sont difficiles d'accès comme Kala. Aux yeux des Noirs, Medza est vu comme l'école, c'est-à-dire comme étant une nouvelle et la meilleure chose qui leur est donnée dans leur misérable vie car il est très rare de voir tous les jours un jeune Noir éduqué à l'européenne. G'est pourquoi, dans le roman, il est dit : « En fait de garçon instruit et habitant la ville pardessus le marché, [...], devait être une marchandise rare sur le marché de Kala » (p.73) pour montrer la valeur importante d'une personne qui a suivi les enseignements des européens. Medza est qualifié de « marchandise rare » car les garçons comme lui ne sont pas nombreux dans le pays. G'est vrai car ce n'est pas tout le monde qui peut se permettre ce luxe, le fait d'envoyer son enfant à l'école des Blanc. En plus, cela n'est pas gratuit et nécessite beaucoup d'argent durant toutes leurs études, or tous les parents veulent et rêvent que leurs enfants entrent dans une telle école. Get estime des Noirs face à un être Noir éduqué à l'européenne est un signe de réussite pour les Blancs, mais aussi pour les Noirs car si Medza était alors comme tous les jeunes de son âge qui ne fréquentaient pas l'école, il ne serait qu'une personne banale à leurs yeux et ne représentera aucun intérêt pour eux, mais aussi et surtout pour les Blancs. G'est cette spécificité d'avoir pu fréquenter l'école et les Blancs alors qui seront les potions magiques qui vont permettre de changer, transformer la vie de toute communauté où passera Medza car il est toujours considéré comme étant une perle rare, et surtout, un brin de nouveauté qui vient apporter la modernité aux membres de la société traditionnelle comme ceux de son village natal mais aussi ceux de Kala où il effectuera sa Mission.

Il a donc en lui toutes les faveurs et tous les bagages nécessaires pour enculturer14 ses proches par le biais de ses nouvelles connaissances acquises, ses points de vue différents de ceux des autres, sa nouvelle façon de raisonner qui sont très convoités.

La venue, la vue de Medza à Kala et son contact avec ces habitants vont changer le cours de leur vie. Tout le monde est émerveillé par lui dès seulement le premier coup d'oeil, un jeune «gars de la ville» qui est de passage et que l'on ne trouve pas tous les jours à Kala ; tous veulent le voir, l'admirer, le consulter à tout prix que ce soit les grandes personnes ou les jeunes, et chacun y trouve son compte. Les jeunes garçons souhaitent apprendre à lire et écrire comme à l'école, les vieux et adolescents veulent s'informer sur les villes et les progrès, que ces villes soient africaines ou occidentales, et les jeunes filles et femmes, elles, en sont tout simplement fascinées, amoureuses qu'elles sont là dans le seul but de l'admirer et le contempler de plus près. Nous assistons donc au début de l'acculturation à Kala, et si nous entrons dans les détails, nous trouverons que cette transformation de Kala qui semble passagère est bel et bien le commencement d'une acculturation puisque toutes les habitudes coutumières ont été modifiées par l'arrivée de Medza.

Tout Kala est fasciné par la modernité. La venue de Medza, par exemple pour les petits garçons, est une occasion rare dans leur vie de pouvoir apprendre les mathématiques et de sortir de l'analphabétisme en tentant d'apprendre à lire et écrire le français (mais non pas leur langue maternelle) car ils veulent devenir des intellectuels comme Medza. Cependant leurs parents n'ont pas les moyens financiers de les envoyer à l'école, et l'apprentissage traditionnel ne leur fournit pas ces nouvelles connaissances qui les fascinent tant et qu'ils veulent acquérir. C'est comme un rêve qui , brusquement peut devenir réalité pour eux que, même Medza n'a plus de temps libre dans le village étant donné que dès la matinée, il est déjà pris d'assaut par ces jeunes élèves qui ne s'intéressent plus à présent qu'aux connaissances modernes. Le fait de prendre Medza en assaut est déjà un signe de détermination et d'un

14 Processus de socialisation de l'individu qui, par l'éducation, l'instruction, les disciplines du groupe en général, transmettent à chacun des membres du groupe les modèles, les normes, les systèmes de valeurs caractérisant la culture dominante.

désir violent de vouloir apprendre. Ils ne viennent même pas les mains vides et se donnent la peine d'amener avec eux des livres et des ardoises (p.129) pour que cela soit plus sérieux. Si les jeunes garçons sont avides de connaissances et veulent être intellectuels comme Medza, les adolescents eux voudront tout simplement avoir la chance qu'a le « gars de la vile », c'est-à-dire Medza, qui fait un malheur sur les filles de Kala sans même le savoir. Toutes les filles ou jeunes femmes du village sont folles de lui et toutes veulent l'avoir à leurs cotés que ce soit pour une simple aventure ou en vue d'un mariage car il est exceptionnel et très différent des garçons du village qu'elles ont fréquentés qui ne sont que des paysans comme elles- mêmes. Aux yeux de tout Kala, il n'est pas issu de la classe paysanne et n'est pas aussi considéré comme campagnard ; lui ne cultive pas la terre, ne garde pas les bétails, n'est pas pauvre ... mais va à l'école des Blancs pour devenir riche et puissant comme ces derniers. Les amis de Medza l'envient à cause de cette chance qu'il a sur les filles, que ce soit Yohannès le Palmipède, Petrus Fils-de-Dieu, Abraham le Désossé ou tout simplement son célèbre cousin Zambo qui lui déclare : « [...] tu

en as une chance toi : je voudrais être à ta place. », et, « Ce qu'elle doit en pincer pour toi ! [...]. Aions donc, tu le sais bien, que tu plais à toutes les toutes femmes. Pourquoi feindre de l'ignorer ? Tu devrais en être heureux. » (pp.80-

82). Etant ignoré ou négligé périodiquement par le sexe féminin, la seule solution pour eux d'avoir une chance de se faire à nouveau des petites copines face à cet adversaire de taille est d'essayer de côtoyer le plus que possible le héros. Fréquenter Medza est une nécessité pour pouvoir attirer l'attention des filles et pour se faire remarquer, mais c'est aussi un honneur et un atout d'être ses amis car il est toujours à leur disposition pour discuter et se défouler à tout moment . Un grand avantage que les autres adolescents qui veulent l'inviter afin de lier amitié avec lui n'ont pas puisque dans la société traditionnelle, « il

était essentiel d'être marié pour avoir droit aux honneurs et à la considération »

(p.141) or eux ne le sont guère. Donc normalement, ils n'ont pas droit comme les autres adolescents d'avoir le privilège d'inviter Medza qui est un signe d'honneur et que seuls les grands devraient avoir droit avant eux.

Si les adolescents se préoccupent surtout de leur conquête des filles et de leur amitié pour Medza, les adultes eux voient en notre héros une ressource inépuisable de connaissances modernes qu'ils veulent connaître. Avides de nouveauté comme tous, les vieux eux, plus précisément les pères de famille, ne sont pas indifférents à l'arrivée de Medza à Kala ; tous veulent tour à tour inviter notre héros dans leur foyer respectif que dès son quatrième jour passé à Kala, il reçut déjà sa première invitation de dîner- conférence dans une famille. Cela consistait à manger et à répondre aux questions posées par l'assistance. Pendant toutes ces veillées, les questions tournaient toujours autour des nouvelles technologies, le rapport entre les Blancs et les Noirs, mais surtout sur l'école. Toutes les habitudes à Kala ont vu une transformation depuis l'arrivée de Medza car il est de coutume maintenant d'inviter Medza chez soi pour soutirer des renseignements et s'informer. Il est devenu tellement admiré que maintenant on ne jure plus que par son nom (p.74).

Si l'arrivée de Medza à Kala a apporté des transformations au niveau des individus et du groupe même, dans son village natal on assiste aussi à une acculturation du groupe due à son influence que l'on constate à travers et à partir du discours de Bikokolo, le patriarche du village. Si au début, l'idée du patriarche Bikokolo pour convaincre Medza d'aller à Kala était tout simplement

«d'aller se montrer là-bas, d'aller faire peur à ces péquenots [...] » (p.28) , et

quand le héros répliqua à son tour et ne comprit pas pourquoi on l'avait choisi pour une telle mission qu'il croit ne pas pouvoir mener à bout car il n'a pas les critères requis et juge que c'est un problème qu'entre les vieux, non pas les jeunes,15le discours de Bikokolo se précisait, se détaillait de plus en plus et à la fin, pour ne plus mettre Medza dans l'embarras et afin qu'il accepte, le patriarche décide de tout lui expliquer :

« Fils, termina le patriarche, cette histoire-là, lorsqu'on la contera plus tard, après ma mort, c'est toi qui en seras le héros. Mais tu es un homme terrible ! Et tu parles toi aussi avec la voix du tonnerre. Et tu ne soupçonnes même pas ta puissance ! Ta voix du tonnerre, sais-tu ce que c'est ? Tes diplômes, ton instruction, ta

15 « pourquoi moi [...] Quel pouvoir ai-je, moi ?... » p.29, Mission Terminée

connaissance des choses des Blancs. Sais-tu ce que s'imaginent sérieusement ces bushmen de l'arrière-pays ? Qu'il te suffirait d'adresser une lettre écrite en français, de parler en français au chef de la subdivision la plus proche, pour faire mettre en prison qui tu voudrais ou pour lui faire obtenir n'importe quelle faveur ... Voilà ce que s'imaginent ces péquenots chez lesquels nous t'envoyons... » (p.31).

A travers ces paroles, nous voyons déjà l'importance, l'intérêt que suscite un individu ayant suivi l'éducation à l'européenne non seulement aux yeux du patriarche, mais aussi de toute la communauté Noire. Ici l'être hybride, c'est-àdire Medza, est devenu comme une arme de persuasion très efficace et qui devrait faire terreur à Kala. Tellement l'école et ses éléments comme l'être hybride avec ses diplômes et ses nouvelles connaissances, représentent des traits valeureux qu'ils sont devenus une nouvelle force de manipulation, aussi bien chez les Blancs que chez les Noirs. Ces éléments permettent en effet d'imposer et de s'imposer partout sans l'intervention directe des Blancs, et peuvent, sans aucune aide extérieure, vaincre et convaincre une tribu toute entière et faire modifier les règles traditionnelles instaurées depuis toujours qui assurent l'ordre dans la communauté comme la hiérarchie (le fait d'envoyer Medza, un enfant, à la place d'un adulte pour une mission inadéquate), la philosophie16 (le fait de mêler le modernisme du traditionnel dans le discours de Bikokolo). Face à n'importe quelle forme de modernité, le traditionnel ne peut faire que de se transformer à son tour. Et en parlant de modernité, la dernière cause de l'acculturation que nous allons traiter est l'attrait de la ville qui est à la fois signe de modernisme et cause d'acculturation.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld