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conflits de compétence judiciaire et arbitrale

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par Sana Soltani
Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis - Mastére en droit privé 2005
  

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Paragraphe I : Première hypothèse : Le tribunal arbitral est saisi

En droit Tunisien, la solution pour l'arbitrage interne résulte de l'article 19(A).(35(*)) L'article 52 du code de l'arbitrage admet largement l'incompétence des tribunaux étatiques lorsque le litige est pendant devant le tribunal arbitral. Plus précisément, ces dispositions comportent une règle équivalente à celle de l'article 19 alinéa1, qui sont un texte du droit international de l'arbitrage (B)(36(*)) .

A) Droit interne : l'article 19 alinéa 1 du code de l'arbitrage

L'article 19 alinéa 1 dispose que  « lorsqu'un litige pendant devant un tribunal arbitral, en vertu d'une convention d'arbitrage, est porté devant une juridiction, celle-ci doit ,.., se déclarer incompétente ». L'interprétation de cet alinéa ne pose guère de difficultés. Si c'est le fond du litige qui est porté devant le tribunal étatique le principe du dessaisissement s'applique purement et simplement. L'exception tirée de l'existence de la convention d'arbitrage constitue une exception de procédure qui produit dans cette hypothèse un effet absolu. Elle oblige le tribunal étatique à constater son incompétence. La cour de cassation tunisienne s'est également penchée sur la question, dans l'arrêt Bouslama c/ Karkach. La cour suprême a cassé l'arrêt d'appel qui avait fait abstraction d'une clause insérée dans un contrat et s'était déclarée par conséquent compétente pour trancher le litige. Cet arrêt fait une exacte application de l'article 19 du code qui impose le dessaisissement des juridictions de droit commun en présence d'une convention d'arbitrage(37(*)).

Cependant des difficultés d'interprétation peuvent surgir :

Il est certain, tout d'abord, au juge étatique de s'abstenir d'apprécier la validité de la convention d'arbitrage. Il appartient alors à la partie la plus diligente de saisir le tribunal arbitral, et éventuellement à son adversaire de provoquer devant les arbitres l'examen de la compétence du tribunal arbitral. Cependant doit-on au moins admettre que le juge étatique vérifie préalablement l'existence de la convention d'arbitrage? Le texte énonce que le tribunal arbitral doit avoir été saisi en vertu d'une convention d'arbitrage pour que le tribunal étatique se déclare incompétent. Ce qui peut impliquer l'obligation pour ce dernier de constater l'existence de celle ci. En particulier, le juge étatique est-il habilité à vérifier la réalité du consentement des parties à l'arbitrage ? Doit-il au contraire se satisfaire de l'existence purement formelle de la convention d'arbitrage et laisser aux arbitres le soin d'apprécier la réalité du consentement des parties à celle-ci ? Le contrôle du juge étatique dans cette dernière hypothèse, ne porterait que sur «l'apparence » de la convention d'arbitrage. En ce sens, il suffirait conformément à l'article 6 du code de l'arbitrage(38(*)) que la convention l'arbitrage soit stipulée dans un écrit pour que le tribunal étatique se déclare incompétent.

M. Emmanuel Blanc(39(*)) n'a jamais mis en doute qu'une convention d'arbitrage retirait à la juridiction normalement compétente la connaissance du litige et l'obligeait à dessaisir. La cour de cassation française s'est ralliée à cette solution dans un arrêt du 13 février 2002. La cour admet que «la clause d'arbitrage entraînait d'office l'incompétence du juge vu l'article 1458 N.C.P.C »(40(*)) .

Dans cet ordre d'idées, deux décisions rendues le même jour par la première et la deuxième chambres de la cour de cassation. Suivant l'une (41(*)) «l'article 1458 N.C.P.C. ne doit recevoir application que dans le cas où une juridiction étatique est saisie du fond du litige, malgré l'existence d'une convention d'arbitrage »; il s'ensuit que seule la saisine, du tribunal arbitral fait obstacle à la compétence du juge étatique(42(*)).

Curieusement, le nouveau code de procédure civile libanais ne comporte aucun texte similaire à l'article 19 alinéa 1 du code de l'arbitrage Tunisien. De plus, bien que s'inspirant largement de la législation française de 1980, le législateur libanais de 1983 a omis d'insérer un texte semblable à l'article 1458 N.C.P.C. Cette lacune soulève maintes interrogations. En l'absence d'un texte exprès, les juridictions étatiques doivent-elles se déclarer incompétentes en présence d'une convention d'arbitrage ? En réalité, la réponse à cette question ne semble guère faire de doute. L'incompétence des juridictions étatiques découle en effet de l'esprit même de la législation libanaise en la matière, des principes généraux relatifs à la liberté contractuelle ainsi que de la force obligatoire des contrats. D'ailleurs même en l'absence d'un texte identique à l'article1458 N.C.P.C et 19 C.A « plusieurs arguments tirés des dispositions du nouveau code de procédure civile libanais relatives à l'arbitrage militent dans ce sens » (43(*)).

Une question fort délicate a suscité la jurisprudence et la doctrine tunisienne à savoir : Est-ce que la saisine du tribunal arbitral d'un litige demeure valable lorsque le même litige est pendant devant une juridiction étatique ?

A juste titre également, dans son arrêt Mokthar c/ Mokdad, la cour d'appel de Tunis le 18 juillet 1994 a considéré que la saisine du tribunal arbitral pour un litige pendant devant la cour d'appel demeure non valable. Cependant l'annotateur (44(*)) estime que la position de la cour est injustifiée vu que le législateur Tunisien, dans l'article 4 du code de l'arbitrage, a autorisé de conclure un compromis d'arbitrage même au cours d'une affaire pendant devant une juridiction étatique. Aussi, il n'a réglementé «la saisine du tribunal arbitral » que dans le côté de la preuve et des effets, dans l'article 11C.A.. Le commentateur a, d'ailleurs, ajouté que la position de la cour ne peut pas être justifiée même en application de l'exception de litispendance inapplicable à la relation liant l'arbitrage, procédé privé, et la juridiction étatique.

Quoi qu'il en soit, l'insertion d'une convention d'arbitrage entraîne nécessairement le dessaisissement des juridictions étatiques de leur compétence si un tribunal arbitral a été saisi du litige. La question qui peut surgir en vue de l'application de ces dispositions est de déterminer à quel moment le tribunal arbitral peut être considéré comme saisi ? Ou plus précisément à quel moment le litige est considéré comme «pendant» devant un tribunal arbitral ? Pour répondre en application, par analogie, des dispositions de l'article 11 et 24 du code (45(*)) l'acceptation de sa mission par le tribunal arbitral est nécessaire pour que l'article 19 al.1 soit mis en oeuvre. On peut même se demander si cette acceptation est vraiment suffisante pour qu'on considère qu'un tribunal arbitral est effectivement saisi du litige ? Un arrêt de la cour d'appel de Tunis a jugé que le tribunal arbitral ne pouvait être considéré comme saisi qu'au jour de l'acceptation par les arbitres de leur mission, cette acceptation étant accompli au moment de la signature de l'acte de mission aussi elle peut se réaliser de différentes manières. Elle est importante dans la mesure où elle détermine le point de départ du délai d'arbitrage(46(*)).

Cette solution est critiquable. En effet selon M. Antonias Dimolitsa (47(*)) l'acceptation par les arbitres de leur mission est matérialisée dans le cadre d'un arbitrage CCI, le jour où les arbitres soumettent au secrétariat le formulaire de la déclaration d'acception et d'indépendance signé par eux, qui est évidemment bien antérieur non seulement à l'acte de mission mais aussi à leur saisine effective. Il est pourtant fort douteux que cette déclaration d'acceptation par les membres du tribunal arbitral soit vraiment suffisante, puisque le tribunal est en fait constitué à la suite seulement de celle-ci et qu'il n'est pas exclu que la remise du dossier de l'affaire au tribunal arbitral ait lieu bien après sa constitution ou même n'ait jamais lieu pour la simple raison, que la provision réclamée à ce stade de la procédure, n'a pas été versée (article 13 de règlement CCI 1998 ). C'est plutôt la remise du dossier entant que telle aux arbitres, ou moins dans un arbitrage CCI, qui devrait être considérée comme le moment de leur saisine, aux fin d'application de l'article 1458 N.C.P.C.

Un auteur avait considéré curieusement que l'expression «saisine du tribunal arbitral » est équivalente à sa constitution, ce qui pourrait retarder démesurément l'octroi de la provision. La constitution du tribunal peut , en effet, n'être en rien concomitante à la saisine ; en outre, cette dernière reste très en deçà de la liaison d'instance (48(*)).

Si en droit interne, il est admis dans tous les pays qu'une convention arbitrale valable a pour effet de rendre incompétents les tribunaux ordinaires. Ce principe subiste-t-il lorsque l'arbitrage convenu n'est pas national mais «étranger » ou «international » ?

* 35 En droit Français la solution résulte de l'article 1458 N.C.P.C « lorsque un litige dont un tribunal arbitral est saisi en vertu d'une convention d'arbitrage est portée devant une juridiction de l'État , celle-ci doit se déclarer incompétente ».

* 36 Quant au droit Français, la cour de Cassation , dans l'arrêt Eurodif c/ République Islamique d'Iran , le 28 juin 1989, Rev. arb 1989, p.653, note PH. FOUCHARD, a eu l'occasion d'affirmer que les dispositions de l'art.1458 N.C.P.C relatif à l'arbitrage interne était applicable aux arbitrages internationaux.

* 37 V. arrêt cité, supra note n° 29

* 38 V. L'article 1443 N.C.P.C relatif à la clause compromissoire.

L'article 1449 N.C.P.C  relatif au compromis.

* 39 BLANC EMMANUEL, « Nouveau code de Procédure civile commenté dans l'ordre des articles » , avec le concours de Viatte (J.) : Librairie du journal des notaires et des avocats, p. 788

* 40 C. Cass. Fr., 13 février 2002, cassation d'un arrêt rendu le 3 novembre 1999 par la cour d'appel de Paris.

* 41 C. Cass. 1re civ., 20 mars 1989, Bull. I, n° 139, p.92

C. Cass. 2e civ., 20 mars 1989, Bull. II, n° 84, p.40, note Guinchard et T. Moussa

* 42 Civ. 1er, 13 février 1990, D. Bull. I,p.593, note G. Peyrad.

* 43 SFEIR - SLIM (M.), «  Le nouveau droit libanais de l'arbitrage a dix ans », Rev . arb. 1993, p. 554.

* 44 C. Appel de Tunis, n° 15465, le 18 juillet 1994, RTD 1994, p. 317, note Gara Nourddine.

* 45 Le texte a été rappellé par une jurisprudence constante, C. Cass. 1er civ., n°55988, Société Get c/ sté. Hedia, 14 mai 1998, RJL mai 1999, p.147; C.Cass.5éme ch., Société Albania c/ Sogit , le 9 juin 1999 (inédit).

* 46 C.A.Tunis n°20, 5 mars 1997 (inédit).

* 47DIMOLITSA ANTONIAS,«  Autonomie et Kompetenz - Kompetenz », Rev. arb. 1989, p.305.

* 48NAJJAR IBRAHIM,  « Référé - provision et clause d'arbitrage », note sous cass. com., 29juin1999, Recueil Dalloz 1999 n°41, p. 650.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams