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Dynamique des Associations paysannes en Haïti et le Développement local (cas de l'Arrondissement de Belle-Anse)

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par Antony JEAN-BAPTISTE
Université Catholique de Louvain & Faculté des sciences Agronomiques de Gembloux - Master Complémentaire en Développement, environnement et Sociétés 2008
  

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CHAPITRE IV-

ACTEURS, ACTIONS ET DÉVELOPPEMENT LOCAL DANS LES SECTIONS COMMUNALES DE 3ème THIOTTE ET DE 2ème BOIS D'ORMES

Ce chapitre du mémoire est consacré à la présentation de la situation générale de développement territorial de la zone étudiée. Dans un premier temps, l'accent est mis sur la présentation de tous les acteurs majeurs qui ont influencé ou qui sont impliqués à ce processus de développement. Dans un deuxième temps, il s'agit de présenter la Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse (CODAB), considérée comme un acteur important dans la mise en place du processus de développement local. En troisième lieu, il est question de décrire deux types d'activités économiques prises en charge par les organisations paysannes au niveau des Sections Communales de 3ème Thiotte et de 2ème Bois d'Ormes.

Pour y arriver, les données utilisées proviennent d'entretiens documentaires et exploratoires. Avant même de venir en Belgique pour les études, il a fallu collecter des données de manière descriptive auprès des acteurs locaux actifs et engagés au développement endogène. Aussi, la littérature grise a été explorée via des rapports d'activités préparés par des acteurs de développement local dans la zone.

4.1- PRINCIPAUX ACTEURS ACTIFS OU ENGAGÉS AU PROCESSUS DE DÉVELOPPEMENT TERRITORIAL

Les informations obtenues par les entretiens ont permis de catégoriser les acteurs en deux groupes : l'acteur public et l'acteur privé. L'acteur public est particulièrement représenté par les élus des Collectivités Territoriales. L'acteur privé est surtout représenté par des groupes organisés de la société civile.

4.1.1- Présentation et participation des acteurs publics

Les élus locaux dont le Conseil d'Administration de la Section Communale (CASEC) et l'Assemblée de la Section Communale (ASEC) constituent des acteurs publics très impliqués dans le processus de développement local des Sections Communales de 3ème Thiotte et de 2ème Bois d'Ormes. Les bureaux des services déconcentrés de l'État représentent aussi des actifs qui apportent faiblement leur contribution. L'implication du Conseil Municipal est tout aussi effective au niveau communal. D'après les informations obtenues auprès de ces élus locaux, leur intégration effective au processus de développement local dans

leur collectivité a débuté avec le Projet National de Développement Communautaire Participatif et le Programme de Développement Local. Cette nouvelle approche de développement en Haïti a commencé vers les années 2004-2005. Depuis cette période, le Conseil d'Administration de la Section Communale (CASEC), l'Assemblée de la Section Communale (ASEC) et le Conseil Municipal ont eu la possibilité de participer à tous les programmes ou projets de développement au profit de leur communauté respective.

En effet, l'ASEC et le CASEC de la 3ème Section Communale Thiotte et celle de 2ème Bois d'Ormes ont coopéré à toutes les étapes de préparation des plans de développement de ces unités territoriales administratives d'Haïti. Chacune de ces Sections Communales, dispose d'un Plan de Développement de Section Communale (PDSC), élaboré à partir de 2005 dans le cadre du Programme de Développement Local initié par l'État central. Le PDSC élaboré constitue un outil de développement stratégique territorial, incluant les besoins de toutes les localités qui forment la Section Communale. Par contre, le Projet National de Développement Communautaire Participatif repose ses stratégies sur l'identification des projets progressivement dans chaque localité avec l'implication de tous les secteurs locaux. Dans les deux cas, le CASEC et l'ASEC parlent de leur implication de manière formelle et participative dans l'identification, la priorisation, l'exécution et le suivi-évaluation des projets. Ils ont témoigné de leur possibilité de rechercher la complémentarité entre ces deux programmes financés par l'État central. En outre, ces deux programmes ont favorisé la création des structures pérennes de développement qui pourraient être considérées comme des actifs pour la réussite du développement local.

D'une part, chacune des Sections Communales bénéficie d'un Comité de Développement présidé par le premier représentant (le président) du Conseil d'Administration de la Section33 y inclut les deux autres membres, de 3 membres de l'ASEC et d'autres personnalités de la Société civile. Initié par le Programme de Development Local, ce comité est composé de 15 personnes : 40 % d'élus locaux, 20 % de représentants d'organisations paysannes, 20 % des représentants des religieux et 20 % des notables de la zone. D'autre part, un conseil de gestion se forme à travers le Projet National de Développement Communautaire Participatif. Appelé, Conseil de Projet National de Développement Communautaire Participatif (COPRODEP), il est chargé de gérer les activités dudit projet et se forme au niveau communal selon les informations fournies par ses membres. Il est formé de 9

personnes dont environ 67 % de représentants d'organisations paysannes et d'environ 33 % d'élus locaux dont 2 membres du CASEC par Section Communale et d'un membre du Conseil Municipal34. Ces deux programmes encouragent à environ 33 % la participation des femmes au comité de gestion des projets.

Pendant la réalisation des expériences professionnelles en 2007 et 2008, j'ai apporté ma contribution au renforcement du Comité de Développement de la 3ème Section Communale de Bois d'Ormes. En ma qualité d'exécutant d'un projet d'élevage de poulets au profit de 600 familles dont les plus pauvres, j'ai été exigé par l'État haïtien de planifier les activités avec le Comité de Développement de ladite section, de l'intégrer au suivi-évaluation du projet et de lui fournir des rapports d'avancement des activités. Ce projet est issu du processus de diagnostic participatif réalisé avec les acteurs locaux et est inclus dans le Plan de Développement de cette Section Communale comme le problème prioritaire à résoudre.

Durant la période de 2006 à 2008, les projets de développement financés par l'État au niveau de la 3ème Section Communale Thiotte et celle de 2ème Bois d'Ormes ont touché les secteurs du social, de l'économie paysanne et de l'environnement. Les fonds de financement proviennent de prêts octroyés par la Banque Interaméricaine de Développement35 (BID) et de la Banque Mondiale36. D'après des données fournies par des acteurs locaux rencontrés tels les élus locaux, un représentant de la Fondation Panaméricaine de Développement (PADF) et un responsable du FAES, 11 projets sont déjà exécutés et 6 autres sont en perspectives d'exécution comme l'indiquent respectivement les Tableaux 2 et 3.

34 Pour chaque commune, les informations ont été fournies par le CASEC et le Conseil municipal

35 Pour le financement du Programme de Développement Local

36 Pour le financement du Projet National de Développement Communautaire Participatif (PRODEP)

Tableau 2 : Présentation des projets réalisés par l'acteur public de 2006 à 2008 dans les Sections Communales de 3ème T hiotte et 2ème Bois d'Ormes

#

Types

Lieux

Bénéficiaires directs et indirects

Exécutants

Durée

1

Élevage de poulets

S.C. B.O

600

Consultant

1 an

2

Élevage de caprins

S.C. B.O

400

O.N.G loc.

1 an

3

Caféiculture et construction d'un

centre de traitement café

S.C. B.O

1 000

O.N.G loc.

1 an

4

Réhabilitation d'une école publique

S.C. B.O

Population rurale

O.N.G loc.

1 an

5

Conservation des sols et reforestation

S.C. B.O

Population rurale

3 O.C.B.

3 mois

6

Centre de stockage des grains

S.C. B.O

300 et pop. rurale

2 O.C.B.

6 mois

7

Réhabilitation de routes agricoles

S.C. B.O

Population rurale

5 O.C.B.

3 mois

8

Programme de formation sur gestion de projets

S.C. B.O

30, CASEC et ASEC

Consultant

2 semaines

9

Deux systèmes d'adduction d'eau

potable

S.C.T

Population rurale

4 O.C.B

6 mois

10

Construction d'un centre

professionnel

S.C.T

Population rurale

2 O.C.B

6 mois

11

Construction d'une boutique

d'intrants agricoles

S.C.T

Population rurale

1 O.C.B

3 mois

Total

11 projets

 
 
 
 

S.C. B.O : Section Communale Bois d'Ormes

S.C. T : Section communale Thiotte

O.C.B : Organisation communautaire de base

O.N.G loc. : Organisation non gouvernementale locale

Source : Enquête de l'auteur, 2008

Tableau 3 : Projets en perspectives de réalisation par l'acteur public dans les Sections Communales de 3ème Thiotte et 2ème Bois d'Ormes pour 2009 et 2010

# Domaines Lieux Bénéficiaires directs Exécutants Durée

et indirects

1 2 Centres de stockage et

de commercialisation des grains

2 Magasin de produits

alimentaires

3 3 citernes communautaires

d'eau potable

Total 6 projets

S.C.B.O et 450 et population 4 O.C.B. 6 mois

S.C. T. rurale

S.C. T. Population rurale 2 O.C.B. 6 mois

S.C. T. Population rurale 6 O.C.B. 6 mois

S.C. B.O : Section Communale Bois d'Ormes S.C. T : Section communale Thiotte

O.C.B : Organisation communautaire de base

Source : Enquête de l'auteur, 2008

À travers ces deux Tableaux, l'exécution des projets identifiés dans le cadre du Programme de Développement Local (PDL) est assurée par des consultants individuels ou par des ONG locales. Les activités dudit programme sont exclusivement réalisées dans la 2ème Section Communale de Bois d'Ormes. Le Fonds d'Assistance Économique et Social (FAES) continue de jouer son rôle dans la coordination, le suivi-évaluation des projets et la formation des bénéficiaires.

Par ailleurs, ce sont des organisations communautaires paysannes qui réalisent elles- mêmes l'exécution des projets dans le cadre du Projet National de Développement Communautaire Participatif (PROD EP). L 'ONG internationale, la Fondation Panaméricaine de Développement (PADF) joue le rôle d'accompagnateur technique des organisations bénéficiaires et exécutantes des projets. Les activités de ce programme sont plus concentrées dans la 3ème Section Communale Thiotte.

Les informations présentées au Tableau 2 concernent 6 projets non encore exécutés en 2008, sont fournies par les responsables de la PADF. Leur phase d'exécution devrait être réalisée en 2009 et 2010 par des organisations communautaires paysannes en fonction des stratégies générales du PRODEP. Le budget maximal agréé par le FAES pour un projet est d'environ 2 millions de gourdes, tandis que la PADF via le PRODEP conçoit des microprojets d'environ 700 milles gourdes37. D'une manière générale, la durée de la phase d'exécution d'un projet est de 3 mois à 1 an.

En fonction des informations obtenues auprès de la population enquêtée, les activités de développement économique et productif induisent une amélioration de revenus des bénéficiaires directs. Les projets à caractères sociaux sont exécutés au profit de toute la communauté locale qui en tire beaucoup de bénéfices. L'unique projet environnemental déjà réalisé contribue à la protection contre l'érosion d'environ 75 ha de terres dans la zone et 15 milles arbres fruitiers et forestiers ont été plantés.

De plus, grâce aux séances de formation fournies pendant l'exécution des projets, les élus de la collectivité, les membres d'organisations communautaires paysannes ont mentionné l'amélioration de leur niveau de connaissances, particulièrement dans la gestion de projet et le renforcement organisationnel. Les organisations communautaires paysannes bénéficiaires des activités du PRODEP profitent au mieux des séminaires de formation fournies en raison de leur rôle d'exécutant des projets. Ces deux programmes incitent progressivement la

population à mieux s'organiser pour participer au développement durable de leur
communauté. Mise à part, un programme de formation intensive de 60 heures réalisé au profit
des membres du Comité de Développement de la Section Communale, tous les acteurs cités

précédemment ont bénéficié d'au moins 15 heures de formation sur des thèmes spécifiques à

chaque projet réalisé.

Pour les bénéficiaires directs, les élus locaux et les responsables des deux programmes rencontrés, l'exécution des projets de développement a permis la valorisation des matériels locaux et des petits jobs temporaires sont crées au profit de la population locale. L'utilisation des matériaux locaux est surtout réalisée dans le cadre des projets d'élevage38 et de conservation des sols. La main-d'oeuvre paysanne est quasi-totalement utilisée pour la réalisation de tous les projets sociaux.

Globalement, ces représentants du pouvoir central (CASEC et ASEC) jouent leur rôle dans le processus de développement local en raison de leur implication obligatoire à

n'importe quels types de projets de développement dans leur collectivité. Ils participent aux
prises de décision communautaire. Il s'agit d'un grand effort réalisé par l'État central pour

intégrer ces représentants du pouvoir décentralisé aux activités de développement local. Leur forme de participation identifiée est de type interactive (Jules Pretty et al., s. d.) car ils participent à la fois dans la mise en place des activités c'est-à-dire depuis l'identification des problèmes, leur priorisation, l'exécution et le suivi-évaluation des projets (UNESCO, 1982 ; A. Dumas, 1983). Pour l'exécution des activités, la main-d'oeuvre locale est prise en compte et les ressources locales sont très valorisées. Cette initiative de valorisation de ressources locales dans le processus de développement local est signalée par les auteurs comme B. Pecqueur (2000), G. Logié (2001) et A. Dumas (1983). Après la phase d'exécution des projets, les élus locaux devraient être capables de poursuivre les activités de développement local grâce aux séances de formation reçues. La participation populaire est utilisée comme un PRyen, ce qKi aKgPente l'efficacitfi des piRAets ifialisfis (B. Gueye, 1999 in A. Jones, 2006). Certains projets productifs et économiques réalisés contribuent à une rentabilité économique et d'autres projets sociaux prennent en compte une certaine dimension de la viabilité écologique de la zone (B. Pecqueur, 2000).

Cependant, cette présentation a permis de révéler les gros défis qui se présentent face aux représentants du pouvoir central décentralisé pour garantir leur autonomie. Leurs plus

38 Dans la construction d'abris pour les animaux d'élevage

grandes infirmités sont jointes au manque de ressources techniques et financières pour réaliser leur propre projet. Ils demeurent dépendre des sources de financement extérieur comme l'a soulevé P. Prévost (2003). La part du budget national qui leur devrait être attribué tarde encore à venir. L'État ne garantit pas suffisamment, la formation globale des élus locaux qui pourra leur permettre d'être plus efficace dans l'accomplissement de leurs fonctions. Les études de diagnostic participatif réalisées à partir de l'année 2005 par le Fonds d'Assistance Économique et Social (FAES) ont identifié de graves problèmes à tous les niveaux de la vie sociale et économique de la population. Le secteur éducatif et de la santé souffrent de la carence des ressources techniques et financières pour répondre correctement aux besoins de la population. Les appuis du Ministère de l'Agriculture aux secteurs de l'agriculture et de l'élevage restent inadéquats par rapport aux besoins des habitants. Cette situation contribue à un déficit de participation populaire comme dans UNESCO (1982). D'autres études réalisées par des auteurs tels (A. Coq, 2006 ; V. Lamothe, 2007 ; F. Dorvilier, 2007 & Y. Sainsiné, 2007), ont déjà soulevé l'insuffisance de certains services de base disponible partout en milieu rural. Il est vrai que les projets sont identifiés par la population locale, la dimension culturelle du développement n'est pas suffisamment prise en compte.

Pour conclure, des observations personnelles réalisées permettent d'annoncer que les montants (14 000- 40 000 euros) requis pour un projet demeurent insuffisants. Quoique les activités issues des deux programmes de développement local de l'État central prennent en compte tous les coins des Sections Communales, les projets réalisés sont trop fractionnés. Dans le futur, l'État devrait penser à augmenter le budget de financement des projets pour favoriser au mieux leur pérennité. Malgré tout, ils sont suffisamment bien appropriés par la population locale pour induire un niveau de développement territorial.

4.1.2- Présentation et participation des acteurs privés

La société civile, regroupant les autorités religieuses, les associations professionnelles, les coopératives et les groupements ou organisations communautaires paysannes représentent les acteurs privés qui contribuent au développement des Sections Communales de 3ème Thiotte et 2ème Bois d'Ormes ; les ONG locales et internationales représentent aussi d'autres acteurs importants. Hormis les ONG, tous les autres acteurs regroupent des femmes, d'agriculteurs et des jeunes de la zone.

Selon des informations obtenues lors de la réalisation des entretiens, 4-5 autorités religieuses39 et quelques 10 notables par Section Communale ont été des pionniers du processus de développement communautaire. Leur appui a été surtout remarquable aux secteurs de l'éducation et de la santé. Durant les décennies 1970-1990, des démarches ont été effectuées de leur part et avec le soutien de la population locale, pour exiger de l'État la disponibilité des services de base au profit de la population rurale comme l'exige la constitution haïtienne. Pour la réalisation du Plan de Développement de Section Communale (PDSC), les informations disponibles dans ce document ont mentionné leur participation active à toutes les phases d'élaboration (FA ES, 2005)40. Ce groupe d'acteurs font aussi partie des membres du Comité de Développement de Section Communale (rappel à 40 %). D'une manière générale, ils demeurent des acteurs utiles quant à leur implication dans toutes les rencontres et/ou les débats orientés dans le sens du développement de leur localité. Les entretiens réalisés avec une partie d'entre' eux ont permis d'identifier que l'indifférence dans l'idéologie politique constitue le principal handicap à leur unification de toujours. Leur implication au processus de développement endogène est vivement encouragée par l'État central comme le recommandent les grands bailleurs de fonds internationaux tels que la Banque Mondiale, le FMI et l'UNESCO.

a. ONG locales et internationales

Les ONG locales et internationales font partie d'un groupe d'acteurs participant au développement local de la zone. Vu l'incapacité de l'État à soutenir de manière adéquate ces Collectivités Territoriales financièrement et économiquement, ce sont elles qui financent en grande partie les programmes et projets de développement avec un faible appui de la population locale bénéficiaire. En général, elles financent les projets de développement à hauteur de 85-90 % ; la part restante est fournie par la population en ressources locales. Cet état de fait, renforce leurs liens à la fois avec la population locale et les élus locaux.

Les interventions de ces institutions se font soit directement dans le milieu soit sous la demande de la population. Dans le premier cas, les projets sont amenés de l'extérieur sans que la population ne participe point à la fixation des objectifs et au processus de leur décision. Cette participation populaire est de type consultatif comme indiqué par Jules Pretty et al. (s.

d.) - parfois, elles établissent certaines relations avec les autorités locales. Dans le second cas,
souvent une partie de la population locale identifie leurs projets sans ou avec les membres de

39 Pasteurs des églises protestantes et des prêtes de l'église catholique

40 FAES (2005). Rapports de Diagnostic Participatif des Sections Communales de 3ème Thiotte et de 2ème Bois d'Ormes, commune des Anse-À-Pitres, Département du Sud-est.

leur association communautaire pour soumettre aux ONG pour le financement -- ou parfois certaines associations oisives profitent de la disponibilité des fonds offerts par les ONG pour réaliser des projets. Ces formes d'organisations disparaissent généralement après l'exécution des projets, c'est ce que Jules Pretty et al. (s. d.) ont qualifié de participation fonctionnelle.

Malgré des faiblesses constatées dans le type de participation populaire et dans les modes d'interventions des ONG, il est important de souligner leur place au développement des Sections Communales de 3ème Thiotte et de 2ème Bois d'Ormes. Des bénéficiaires rencontrés ont affirmé une certaine amélioration de leurs revenus grâce à ces activités. Néanmoins, en raison des changements opérés par l'État pour la réussite du développement des Collectivités Territoriales depuis en 2005, les élus locaux disposent le pouvoir de contrôler les actions des ONG. Les places de ce groupe d'acteurs au développement local en Haïti ont été déjà signalées à travers les recherches produites par P. Prévost (2003), A. Coq (2006), V. Lamothe (2007), F. Dorvilier (2007) et Y. Sainsiné (2007). Il est souhaitable que des corrections soient initiées en encourageant, entre autres, une meilleure participation populaire ce qui favoriseraient la durabilité des projets réalisés. L'État central via les élus locaux, doit mieux remplir son rôle en obligeant les ONG à financer des projets qui rentrent dans le Plan de Développement de Section Communale pré-élaboré.

Toutefois, d'autres formes de coopération établissent entre des associations communautaires paysannes, l'État et des ONG locales et internationales produisent des effets au niveau local. La description de cette situation fait l'objet des lignes qui vont suivre.

b. Associations communautaires paysannes

Le regroupement des paysans sous la forme associative constitue le dernier groupe d'acteurs de développement local des Sections Communales. Selon des informations fournies par les acteurs de la société civile et des élus locaux, les premières tentatives de regroupement des paysans dans ces zones rurales haïtiennes avaient débutées avec la fin de la dictature, le

07 février 1986. La création d'association fut ensuite encouragée par la Constitution du 29 mars 1987 qui stipulait dr difMLg 0lrEERFirtiRn Mt 0M réuniRn ErnE rIP ME à 0ME 7iAE SRditiquME, économiques, sociales, culturelles ou toutes autres fins pacifiques est garantie (art. 31). Cette décision est cohérente aux souhaits faits par B. Husson (2001) « dl? trt r SRXr obligation de

IrvRriEML d'éP MriM1FM 01rEERFirtiRnE FRddMFTivME ru nivMrY dRFrd » . Malgré tout, le
mouvement associatif dans cette région a été très controversé de manière périodique. D'abord

par certains militaires du régime de facto41 de la période 1991-1994, ensuite par l'émergence des Organisations Populaires (OP) du parti politique dénommé « Lavalas » surtout pour la période de 2000-2004. Les diverses formes de bouleversements crées par ces groupes, n'ont pas empêché au mouvement associatif de connaître sa croissance dans la zone. Le processus de développement local de ces deux Sections Communales est passé du contrôle des acteurs individuels à des acteurs collectifs.

Au mois de mars 1989, a eu lieu le premier regroupement de diverses associations de base en la Coordination des Paysans de l'Arrondissement de Belle-Anse (COPAB). « Sa mission était de porter les principales revendications de la masse paysanne au plus haut niveau vers les responsables de l'État ». Grâce au dynamisme développé par les responsables et avec l'appui, la compréhension, la participation de la population tant assoiffée du développement pour la communauté, l'organisation a exécuté de petits projets sociaux et environnementaux dont la réhabilitation des routes agricoles et la conservation des sols. L'exécution de ces projets a permis à l'association de créer un certain nombre d'emplois provisoires au profit de la population locale. La COPAB a aussi donné son appui au secteur éducatif en appuyant l'établissement des premières écoles secondaires publiques conjointement avec les notables de la zone.

Au cours de la courte période 1998-1999, toujours dans le souci de satisfaire au mieux les revendications paysannes, les responsables de la COPAB ont eu le soutien des organisations de base et des planteurs de la zone pour créer à la fois la Fédération des Organisations des Planteurs de l'Arrondissement de Belle-Anse (FOPLAB) et la Coopérative des Planteurs de Café de l'Arrondissement de Belle-Anse (COOPCAB). Pendant les 3 premières années de leur existence (1998-2001), ces deux unités de regroupement d'organisations de base de tout l'Arrondissement de Belle-Anse ont reçu le soutien technique et financier de 3 ONG pour la réalisation des projets agricoles et environnementaux dont 1 projet agro-écologique et 1 projet sur le caféiculture. Ces projets ont impliqué un niveau de participation de la population, entre autres, les bénéficiaires directs dont les agriculteurs et les caféiculteurs.

Pendant cette même période, le système dynamique mis en place par ces 2 regroupements de paysans leur a permis de bénéficier un programme d'intervention dénommé Programme de Développement Rural Intégré de Belle-Anse (PDRI/BA). Ce programme a été

41Il s'agit d'un pouvoir militarisé issu d'un coup d'état opéré contre un président élu constitutionnellement en 1991 avec beaucoup de répressions provoquées par un groupe dénommé : Front pour l'Avancement et le Progrès d'Haïti (FRAPH).

financé par deux ONG internationales : la Fédération Luthérienne Mondiale (FLM) et Action
Aid pour la période de 2001-2004 et une ONG locale, la Coordination Régionale des
Organisations du Sud-est (CROSE). Il « vise la contribution à la mise en place dans

eg$ LLRQ3kkIPIQt-1d1-19efill-$Qke-1uQe-1FRRLdiQEURQ-1LéIIRQEle-1dgRLIEQisations communautaires

mixtes, de femmes et de jeunes participant activement à la gestion de leurs entreprises économiques et aux prises de décisions sociopolitiques locales au bénéfice de leur communauté ». La Fédération des Organisations des Planteurs de l'Arrondissement de Belle- Anse (FOPLAB) et la Coopérative des Planteurs de Café de l'Arrondissement de Belle-Anse (COOPCAB) ont été deux partenaires importants et utiles pour l'exécution de programme. La première a été utilisée pour la filière économique du café et la deuxième pour les aspects socio-économiques. Ces informations sont obtenues via les bases de données de la Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse (CODAB).

À la recherche de synergie et en qualité de nouvelles orientations fournies par les 3 partenaires techniques et financiers vus plus haut, les trois structures de regroupement d'organisations présentées précédemment ont paraphé un protocole de rapprochement qui a permis la création de la structure actuelle nommée Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse (CODA B).

4.2- PRÉSENTATION DE LA COORDINATION DES ORGANISATIONS POUR LE DÉVELOPPEMENT DE L'ARRONDISSEMENT DE BELLE-ANSE (CODAB)

La Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse est un regroupement d'organisations paysannes qui couvre totalement l'Arrondissement de Belle-Anse, l'une des régions administratives du Département du Sud-est d'Haïti. Elle étend ses activités au niveau de 4 Communes : Belle-Anse, Grand-Gosier, Anses-à-Pitres et Thiotte ; douze Sections Communales y compris les deux Sections Communales étudiées. Ses activités couvrent une superficie totale de 765,33 km2 et une population d'environ 150 000 habitants est touchée (IHSI, 2008). Elle est reconnue par l'État haïtien depuis 2005 comme une institution d'utilité privée à caractère social et est localisée dans la Commune de Thiotte.

La dynamique associative a pris une recrudescence d'intérêt collectif en Haïti et les acteurs locaux de la zone de Belle-Anse sont bien concernés. Cette stratégie semble devenir un vrai moyen utilisé par ces paysans eux-mêmes autour d'associations pour apporter

certaines améliorations au niveau de quelques services sociocommunautaires. Cette présentation est faite à partir de 4 principaux points :

(1) la présentation de la mission et des objectifs de la CODAB pour mieux comprendre son existence ;

(2) la présentation du mode de fonctionnement et les structures mises en place pour mieux appréhender ses stratégies d'intervention ;

(3) la présentation du mode de création des ressources, les stratégies d'acteurs et leurs logiques d'intervention de l'institution ;

(4) cette dernière partie illustre les secteurs d'activités prises en charge par l'organisation par une présentation des projets/programmes de développement réalisés y compris le niveau de participation des acteurs bénéficiaires.

4.2.1- Mission et objectifs de la CODAB

Depuis sa création en 2005, la Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse a eu comme mission « de travailler à l'aboutissement d'une société unitaire, solidaire, plus juste et plus équitable dans le respect mutuel et la valorisation de la culture haïtienne au niveau local ».

Ses objectifs principaux consistent à :

- Construire une organisation représentative et légitime couvrant tout l'Arrondissement de Belle-Anse ;

- Défendre et protéger les intérêts de l'Arrondissement de Belle-Anse ;

- Charrier les revendications de la population en vue de la recherche de solutions allant dans l'intérêt de la majorité ;

- Organiser l'espace de l'Arrondissement et encadrer la population;

- Participer dans l'effort de reconstruction de l'Arrondissement de Belle-Anse ;

- Elaborer un plan de développement régional qui tienne compte de l'intérêt du secteur populaire ;

- Combattre la corruption, l'impunité et l'injustice et faire promotion de valeurs morales, culturelles et des droits fondamentaux du peuple Haïtien ;

- Rechercher et apporter la solidarité sur le plan communal, départemental et national.

4.2.2- Fonctionnement et structure de la CODAB

La Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse fonctionne comme étant une institution bien décentralisée. Son fonctionnement s'appui sur un ensemble d'unités présentes dans toutes les Communes couvertes à la fois en milieu urbain qu'en milieu rural. Au niveau administratif, sa structure détient :

V' Un Congrès ou une Assemblée Générale, le nombre de membres reste à déterminer, il se réunit tous les 3 ans et ayant pour tâches de définir les grandes lignes d'orientation de la coordination ;

V' Un Comité de Coordination, comme le congrès le nombre de ces membres reste à déterminer ; il a pour rôle de suivre et de sanctionner le travail du comité exécutif dans l'intervalle de deux congrès ;

V' Un Comité Exécutif, il est composé de neuf personnes élues par le congrès pour une durée de 3 ans et a pour rôle de faire appliquer les grandes lignes d'orientations définies par le congrès et de représenter la coordination ;

V' Le secrétariat exécutif, une branche du comité exécutif et est composé de 3 personnes travaillant conjointement avec ce comité ;

V' Une Assemblée des Délégués, composée de 60 personnes, elle est formée à partir des délégués mandatés par les organisations membres de la CODAB dans tout l'Arrondissement. Au besoin, les membres de l'assemblée se réunissent tous les 6 mois et ils ont comme principales attributions de s'informer et d'informer les organisations membres à propos des activités entreprises par la coordination régionale.

En outre, la technique d'appropriation du territoire par la CODAB consiste à la mise en place d'un ensemble de comités à tous les niveaux territoriaux (niveau urbain et rural). Il s'agit d'une coordination par Commune qui regroupe une fédération par section communale et une plate-forme par ville où sont réalisées ses activités. Donc, ce sont 4 coordinations communales, 12 fédérations Sections Communales et 4 plates-formes villes qui forment la base de son existence. Par ailleurs, les organisations de base sont membres des Fédérations de Sections Communales ou des plates-formes ville et la population est liée à ces structures et non directement à la CODAB. Sa structure générale de représentation est bâtie à partir de la Figure 3.

Congrès ou Assemblée générale

Comité de coordination

Secrétariat exécutif

 
 

Comité exécutif

 
 
 
 
 
 
 

Assemblée des délégués

Coordinations communales

Fédérations sections communales

 
 
 

Plates-formes ville

 
 

Organisations de base

Membres

Figure 3 : Structure de représentation de la CODAB Source : Enquête de l'auteur, août 2008

Les membres de la CODAB font partie d'environ 400 organisations communautaires de base et de 3 catégories distinctes. Il s'agit du Mouvement des Paysans de l'Arrondissement de Belle-Anse (MOPAB) regroupant diverses catégories d'organisations d'agricultures des deux sexes, du Mouvement des Femmes de l'Arrondissement de Belle-Anse (MOFAB) formées uniquement à partir d'organisations de femmes, enfin du Mouvement des Jeunes de l'Arrondissement de Belle-Anse qui regroupe des jeunes de 15-25 ans. Cette forme de regroupements de paysans-agriculteurs est en marche depuis l'existence de la CODAB en 2005, mais les 2 autres mouvements (femmes et jeunes) n'existent qu'en 2007. Le mouvement des paysans et celui des femmes représentent de vrais outils utilisés par les habitants liés aux fédérations de Section Communale pour faire passer leurs souhaits, mais le mouvement des jeunes n'est pas suffisamment structuré. Toutefois, le dernier Recensement Général de la Population et de l'Habitat a considéré la population haïtienne comme étant jeune avec plus de 50 % âgée de moins de 21 ans (IHSI, 2003). Cette caractéristique, étant reflétée la situation générale d'Haïti, ce qui a permis à l'organisation de porter une certaine considération vis-à-vis de cette couche de la population.

D'après les déclarations faites par le comité exécutif de la CODAB et celui des fédérations de Section Communale, la coordination communale se forme à partir de l'union de toutes les fédérations des Sections Communales qui la composent et d'une plate-forme

ville en milieu urbain. Chacune des Communes étudiées (Thiotte et Anses-à-Pitres) possèdent 2 Sections Communales, leurs coordinations communales comprennent trois unités de base. Le nombre d'organisations communautaires membres d'une fédération de Section Communale ou d'une plate-forme ville varie avec la population de la zone et la quantité de personnes par organisation communautaire est aussi variable. Environ 100 organisations communautaires de 30-100 personnes sont membres des 2 fédérations de Sections Communales étudiées. Le comité exécutif d'une Fédération de Section Communale est formé de 7-9 personnes dépendamment du nombre d'associations communautaires paysannes qui s'y trouvent. Les membres dudit comité sont élus démocratiquement par la population membre faisant partie des organisations communautaires qui se trouvent dans une Section Communale. La durée du mandat d'un comité exécutif est de 3 ans et son 1/3 est renouvelé annuellement. La CODAB encourage la participation des femmes dans le comité exécutif d'une fédération de Section Communale à hauteur de 30 %.

4.2.3- Ressources, stratégies d'acteurs et logiques d'intervention de la CODAB

L'existence de la CODAB est reliée à des stratégies mises en place pour la mobilisation et la création de biens communautaires dans ses zones d'activités. Ce processus créatif de ces acteurs locaux s'inscrit dans la logique de F. Debuyst (2001 : 118) qui conçoit la stratégie d'acteurs comme « une démarche impliquant la conception et le mode C11113Zli4IRRÇPCh4Pt.h44R3t.Fh4PFRFElÇéh4PSR3t.PEtteindre un but ». Cette institution de

développement tient à valoriser les acquis disponibles au niveau local en appliquant « des stratégies de types relationnelles » répondant aux attentes des bénéficiaires tout en impliquant ces derniers dans la conduite de sa mission.

Les ressources et les stratégies de la CODA B reposent sur 3 grandes filières :

i. La caféiculture

Elle représente la plus importante source de revenus des habitants de la zone. La CODAB s'engage dans cette filière à travers la Coopérative des Planteurs de Café de l'Arrondissement de Belle-Anse (COOPCAB) qui possède un réseau de plusieurs coopératives localisées dans 3, parmi les 4 communes couvertes par les activités de la CODAB. Les détails concernant cette filière économique se présente ultérieurement dans l'étude.

ii. Le système crédit

L'Association des Banques Communautaires de l'Arrondissement de Belle-Anse (ABCAB)42 est l'une des filières de la CODAB qui offre des services particuliers, entre autres, aux organisations qui lui sont affiliées. Elle est considérée comme l'une des plus grandes banques communautaires de la zone par la disponibilité de ses services d'épargne et de crédit à une couche importante de la population. Composée de 78 Banques Communautaires dans tout l'Arrondissement, son système de crédit couvre 95 % de femmes et 5 % des hommes. L'ABCAB met des fonds disponibles au profit de chacune de ces banques communautaires qui sont utilisés pour aider les femmes. Ces dernières sont bénéficiaires d'un système de crédit43 pour encourager le petit commerce, l'élevage et l'agriculture.

En 2008, environ 3 milles personnes des 2 sexes sont bénéficiaires de ces formes de crédit fournies par cette banque communautaire. Sous l'initiative de la CODAB, l'ABCAB a mis sur pied depuis en 2006 un système de « crédit-élevage » en impliquant 100 éleveurs pour l'achat des petits animaux d'élevage domestiques (porc et caprins). Un montant de l'ordre de 5000 gourdes est accordé aux éleveurs pour l'achat de petits animaux au renforcement de leur système d'élevage.

Les femmes membres d'associations affiliées à la banque obtiennent leur crédit sous forme d'un système dénommé « groupe solidaire ». Selon les informations fournies par certaines femmes rencontrées, cette stratégie les oblige à s'unir en un groupe de 5 personnes pour avoir accès à un crédit remboursé au taux de 3 % par mois. La banque garantie à chaque femme un dépôt mensuel de 1 % du montant remboursé sur un compte d'épargne et le montant octroyé à une femme bénéficiaire varie de 3000 à 50 000 gourdes44. Le montant est attribué en fonction d'une évaluation individuelle sur la capacité d'absorption des bénéficiaires pour garantir le remboursement. Cependant, au cas où une femme bénéficiaire dans un groupe ne rembourse plus son prêt, les autres membres de ce groupe perdent intégralement leur montant disponible sur le compte d'épargne. Parfois, cette situation débouche sur des conflits non seulement au sein du groupe concerné mais aussi au niveau des organisations auxquelles les femmes sont représentées. Lors de la réalisation des entretiens, certaines femmes se plaignent de cette situation qui n'est pas toujours à leur faveur ; c'est

42 Quoique localisée dans la commune de Thiotte, l'ABCAB dispose ses services au profit de toute la population de l'Arrondissement de Belle-Anse.

43 Crédit-commerçant, crédit-éleveur et crédit-agricole

44 Un euro est égal à 50 gourdes

pourquoi, l'ABCAB possède comme perspectives de poursuivre les prêts totalement de manière individuelle.

Mise à part ce système de crédit qui est à la portée des femmes, elles se réjouissent de pouvoir bénéficier des séances de formation sur des thèmes comme l'équité de genre, les techniques d'animation et de leadership. Annuellement, 2 à 3 séances de formation sont organisées en leur faveur sous l'initiative de la CODAB.

iii. La transformation agro-alimentaire

La petite industrie agro-alimentaire est encouragée par la CODAB à travers des minilaiteries de transformation du lait de vache. Il s'agit des unités de transformation du lait, mises en place « pour mieux valoriser la production laitière dans la zone en encourageant particulièrement l'élevage de bovin, la gestion et la protection des ressources naturelles ». Avant même l'existence de la CODAB, une première industrie locale de ce type s'est déjà mise en place par d'autres regroupements d'organisations paysannes dans la 3ème Section Communale de Thiotte ; sa présentation est faite à la partie 4.3.2.

Deux autres mini-laiteries de la CODAB sont en cours de fonctionnement dans la 6ème Section Communale de Pichon et dans la localité de Marre-Joffrey, respectivement des communes de Belle-Anse et de Grand-Gosier. Les lieux d'implantation de ces unités de transformation du lait de vache se fait en fonction de l'importance particulière accordée à leurs habitants à pratiquer l'élevage de bovins laitiers. Elles ont été référées par un système de diagnostic d'élevage réalisé par la CODAB avec la population locale pour étudier la faisabilité et la viabilité des projets avec une forte participation des femmes à en croire les déclarations recueillies auprès des responsables du Mouvement des Femmes. Les travaux de construction de la mini-laiterie localisée dans la 6ème Section Communale de Pichon sont achevés depuis la fin de l'année 2008. Sa gestion est attribuée par la CODAB au Mouvement des Femmes de l'Arrondissement de Belle-Anse (MOFAB), sous le contrôle particulier de l'Association des Femmes de Pichon.

Avec le financement d'Action Aid, de la Fédération Luthérienne Mondiale, de l'OXFAM (3 ONG internationales) et de la Coordination Régionale des Organisations du Sud-est (1 ONG locale), la CODAB a déjà distribué à 75 femmes une vache de race laitière. L'animal est donné à titre de dons à chaque bénéficiaire45 qui s'engage à vendre exclusivement la production laitière à la laiterie pour son prochain fonctionnement. Selon les

45 Les femmes bénéficiaires s'engagent aussi à remettre le premier descendant de l'élevage à une future bénéficiaire

informations recueillies auprès des responsables du Mouvement des femmes, les premières bénéficiaires du projet sont choisies suivant des critères définies avec les organisations féminines et sans aucune influence de la CODAB. Le nombre de femmes bénéficiaires d'une vache représente 60 % des premiers bénéficiaires directs de la laiterie.

Ces trois grands pivots d'intervention et des logiques d'existence de la Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse (CODAB) permettent la création d'emplois permanents ou temporaires partout dans la zone. Son appui est donné au petit commerce, au secteur agricole et à l'élevage des caprins et surtout de bovins laitiers. L'appui à la création des mini-laiteries de transformation peut être qualifié comme la mise en place des PME par la valorisation des ressources locales.

4.2.4- Projets et/ou programmes accomplis par la CODAB et participation des acteurs

Depuis environ 4 années d'existence (2005-2009), la CODAB a toujours priorisé la prise d'initiatives communautaires dans divers domaines et dans toutes les unités territoriales couvertes. D'après les informations fournies par les responsables de la CODAB et les habitants des Sections Communales, présentées au Tableau 4, les activités de développement concernent les domaines du social, de l'environnement et de l'économie paysanne.

Tableau 4 : Activités réalisées par la CODAB dans la 3ème Section Communale Thiotte et la 2ème Section Communale Bois d'Ormes de 2005 à 2008

# Types Lieux Bénéficiaires Exécutants

directs et indirects

1 7 Projets de réhabilitation de S.C.B.O (4) et Population rurale ONG, CODAB,

routes agricoles S.C.T (3) F.S.C et O.C.B

2 2 Constructions d'écoles S.C.T 600 écoliers et ONG, CODAB et

communautaires population rurale O.C.B

3 8 Projets de conservation des

sols

5 Projet de distribution d'outils et

semences agricoles

S.C.B.O (4) et S.C.T (4)

S.C.B.O et

S.C.T

Population rurale CODAB, F.S.C et

O.C.B

Population rurale CODAB, F.S.C et

O.C.B

500 planteurs CODAB, F.S.C et

O.C.B

4 5 Projets de reforestation S.C.B.O (1) et

S.C.T (4)

6 1 Projet de crédit-élevage S.C.B.O et 100 éleveurs ABCAB et O.C.B

S.C.T

Total 24 projets

F.S.C : Fédération de Section Communale O.C.B : Organisation communautaire de base

S.C.B.O : Section Communale Bois d'Ormes S.C.T : Section Communale Thiotte

Source : Enquête de l'auteur, août 2008

Ce Tableau regroupe 24 petits projets réalisés dans la zone étudiée sous la direction de la CODAB depuis son existence. Ils sont repartis en 9 projets sociaux, 13 projets environnementaux et 2 petits projets pour l'amélioration de l'économie paysanne. D'après les déclarations des responsables des fédérations de Sections Communales et des bénéficiaires directs rencontrés, ces projets exécutés sont toujours identifiés à partir d'un système de diagnostic local avec l'implication de la population via les organisations de base. Après l'identification des problèmes, la direction de la CODAB se charge de l'élaboration des projets et de leur validation avec la population locale puis les soumettre à des ONG pour le financement. Parfois, une organisation de base peut soumettre sa demande à la CODAB qui elle-même se charge de rechercher le financement. Dans les deux cas, l'exécution des projets est assurée par les organisations communautaires paysannes sous la supervision de la CODAB. En raison des exigences pour l'exécution des projets sociaux, des cadres techniques externes sont soumis par les financeurs pour accompagner les organisations paysannes. Les principaux partenaires financiers et techniques de la CODAB sont : Action Aid International, la Coordination Régionale des Organisation du Sud-est (CROSE), la Fédération Luthérienne Mondiale (FLM), la Coopération de Suisse-Haïti et l'ONG allemande GTZ.

Le budget de financement des activités est d'environ 11 000 euros pour les projets de reforestation et de 25 000 euros pour les projets de conservation des sols et de réhabilitation de routes agricoles. Leur durée d'exécution varie de 3-6 mois. Généralement, la contribution de la population en ressources locales est autour de1 0 %.

V' Sur le plan social

Selon des données fournies par la direction de la CODAB, quelques 61 kms de routes agricoles sont déjà réhabilitées. D'une manière générale, la réalisation de ses activités dans la zone engendre des effets directs ou indirects sur la population bénéficiaire. Selon les déclarations faites par les bénéficiaires, ses activités créent un désenclavement de certaines localités, ce qui permet aux agricultures de disposer une meilleure facilité pour l'écoulement de leurs denrées agricoles vers les marchés régionaux.

L'implication de la CODAB est aussi remarquable dans l'appui au secteur éducatif et à des projets d'adduction d'eau potable dans d'autres zones de son intervention. Sous son initiative, pas moins de deux écoles primaires ont débuté leur fonctionnement en septembre 2007 dans la 3ème Section Communale de Thiotte. L'achat des terrains pour la construction de ces écoles, où les enfants bénéficient de l'éducation gratuite était assuré par la CODAB.

Dans un autre sens, la CODAB se charge d'appuyer certaines familles monoparentales dont les plus pauvres à partir d'un programme appelé « lien solidaire ». Ce programme vise à

aider un enfant par famille pour le paiement d'une partie de l'écolage scolaire. Depuis 2006, quelques 10 000 familles membres d'organisations communautaires reçoivent annuellement une modique somme de 2500 gourdes avec le financement de ses principaux partenaires cités plus haut.

Enfin, à partir de l'année 2008, la CODAB participe à la gestion d'un programme de cantine scolaire dans tout l'Arrondissement de Belle-Anse. Quelques de 30 écoles de la zone sont bénéficiaires de ce programme, financé par l'État haïtien et le Programme Alimentaire Mondiale (PAM). Le rôle de la CODAB se situe dans la distribution de l'aliment aux écoles concernées et de la supervision de la qualité de nourriture distribué quotidiennement aux écoliers.

Les vacances d'été 2009 coïncident au premier « camp d'été régional » réalisé par la CODAB avec le soutien de la CROSE et du PAM. Cette activité culturelle devrait réunir environ 500 élèves dont 75 proviennent des 2 unités territoriales étudiées. Elle devrait permettre l'augmentation du niveau de connaissances des bénéficiaires sur l'environnement et l'action civique. Cette information est obtenue grâce aux communications établies avec la direction de l'institution pendant le séjour en Belgique.

V' Sur le plan environnemental

Pour les responsables de la CODAB rencontrés, les projets exécutés dans ce secteur ont déjà contribué à la protection contre l'érosion hydrique d'environ 127 ha de terres. Les projets de reforestation sont concernés par la plantation d'arbres fruitiers et forestiers (bambou, cèdre, manguier et ananas, ...). De plus, la CODAB et ses organisations communautaires membres, contribuent périodiquement à des campagnes de sensibilisation pour la protection de l'environnement, d'une part et d'autre part, elle participe aux campagnes de formation et de sensibilisation pour une meilleure protection des populations les plus vulnérables aux catastrophes naturelles. À travers cette dernière activité, elle réalise conjointement avec ses partenaires un programme d'éducation environnementale au profit des écoliers une fois par an.

Selon les bénéficiaires rencontrés, ces activités produisent des effets positifs sur l'environnement de la zone. Les projets de conservation des sols, entre autres, permettent la diminution des pertes des sols et entraîne une certaine amélioration des parcelles de terres cultivées. Ils contribuent au mieux à la protection de la vie et des biens de la population vis-à- vis des catastrophes naturelles.

> Sur le plan économique

Le secteur économique est soutenu par la CODAB à travers plusieurs formes de programmes en intégrant diverses catégories de personnes. En référence au Tableau 4, l'organisation a déjà mis réalisé un projet visant l'amélioration de revenus des agriculteurs par la distribution des semences, des outils agricoles et la prise en charge de la caféiculture la plus importante source de revenus pour les agriculteurs. Les activités de l'élevage sont également appuyées par la CODAB à travers des programmes de distributions d'animaux vivants comme caprins et bovins aux habitants. Les bénéficiaires ont déclaré de l'augmentation de leurs revenus grâce à ces activités.

Enfin, toujours dans le souci d'aider toutes les couches de la population à améliorer leurs revenus, la CODAB a comme perspectives d'appuyer le secteur de pêche marine et l'artisanat à partir de la fin de l'année 2009. Ce dernier secteur d'activités va contribuer à la valorisation de la culture locale.

À travers certains programmes comme la réhabilitation des routes et la conservation des sols, la CODAB utilise la main-d'oeuvre locale ce qui est bénéfique pour des chefs de ménages ou des chômeurs par la création de petits emplois temporaires pour subvenir à certains besoins primaires. Pendant l'exécution d'un projet environnemental, généralement l'organisation utilise en moyenne 18 équipes de 20 personnes à raison de 125 gourdes par jour et par personne. Une seule personne peut travailler pendant 15-20 jours.

À un certain niveau, toute cette dynamique d'actions développée par la CODAB autour de ces secteurs d'activités, lui a permis de suppléer aux actions de l'État dans la zone. Cette situation semble appropriée à l'idéologie soutenue par B. Husson (2001) autour de la pratique des initiatives de développement local par des acteurs individuels ou collectifs par la prise en compte des secteurs économique, social, environnemental et culturel.

D'une manière traditionnelle, le choix des bénéficiaires d'une activité de la CODAB se fait par les représentants de la fédération de Section Communale ou de la plate-forme ville conjointement avec les responsables des organisations de base. La priorité est toujours accordée aux familles ou leur situation est plus difficile. À travers ces projets exécutés ensembles avec les membres des associations communautaires, la participation populaire est utilisée comme moyen puisque cette démarche influe sur l'efficacité des projets (A. Jones, 2006). Cette stratégie d'intervention de ces acteurs locaux, favorise l'intégration de toutes les catégories de personnes dans la société (hommes, femmes et jeunes). Actuellement, le Mouvement des femmes et celui des paysans de la zone en sont les meilleurs bénéficiaires. La

population membre de ces deux mouvements affiliés aux organisations qui forment la CODAB estiment adéquats leur niveau de participation aux activités réalisées à leur profit. Toutefois, les débats réalisés avec les bénéficiaires ont permis de révéler certains points faibles lors de la phase d'exécution des projets de conservation des sols, entre autres. Les organisations se plaignent de ne pas suffisamment participer à cette étape. Cette stratégie d'unification des organisations communautaires de l'Arrondissement de Belle-Anse leur ont permis de construire un territoire unique autour de toute la zone. Lors de la réalisation des entretiens, il était important de s'informer que les habitants associent leur fédération de Section Communale à une « petite CODAB », c'est une manière de témoigner leur implication à toutes les prises d'initiatives de l'institution. Sa présence dans la « région » depuis en 2005, a permis l'arrivée de beaucoup plus de partenaires techniques et financiers pour secourir aux besoins de la population locale et a augmenté la diversité des actions de développement de la paysannerie locale.

4.3- ÉTUDE DE CAS DE DEUX SECTEURS D'ACTIVITÉS DES ORGANISATIONS PAYSANNES DE L'ARRONDISSEMENT DE BELLE-ANSE

Dans cette partie de l'étude, sont présentées deux filières d'activités importantes prises en charge par la CODAB et par les organisations communautaires qui lui sont membres. Le premier cas est lié à la présentation de la Coopérative des Planteurs de Café de l'Arrondissement de Belle-Anse (COOPCAB), localisée dans la 2ème Section Communale de Bois d'Ormes et la seconde présentation concerne une mini-laiterie, localisée dans la 3ème Section Communale de Thiotte.

4.3.1- Présentation de la Coopérative des Planteurs de Café de l'Arrondissement de Belle-Anse (COOPCAB)

La Coopérative des Planteurs de Café de l'Arrondissement de Belle-Anse (COOPCAB) ou « Koperativ Plantè Cafe nan Awondisman Bèlans (KOPCAB) »46 rassemble un réseau de coopératives situé dans la région administrative de Belle-Anse d'Haïti. Fondée en juillet 1999, sous l'initiative de 6 regroupements de producteurs de café et comprenait près de 3000 membres, la COOPCAB possède en 2008, 4000 producteurs de café dont 800 femmes, regroupés sous forme de 10 coopératives. Ses stratégies d'intervention reposent sur 9 centres de traitement primaires gérés par les coopératives de base et un centre de traitement final sous le contrôle de la coopérative centrale qui en assure la liaison. Son siège social se

46 C'est son appellation dans la langue créole haïtienne.

trouve dans la Section Communale de Bois d'Ormes mais les coopératives sont réparties dans 3 parmi les 4 Communes couvertes par les activités de la CODA B.

La coopérative, étant l'une des filières stratégiques et économiques de la Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse (CODAB), cette dernière lui apporte un appui institutionnel et organisationnel et s'en charge aussi de lui soutenir financièrement. Le nombre de caféiculteurs membres des coopératives de base ne cesse d'augmenter en raison des avantages fournis par la COOPCAB. Lors des entretiens, ces producteurs se sont déclarés bénéficiaires de l'encadrement technique par des séminaires de formation pouvant leur permettre d'augmenter leur productivité. Chaque année, les caféiculteurs reçoivent 3-4 séances de formation sur de nouvelles techniques de plantation, sur la lutte contre les insectes nuisibles, sur le traitement de café, etc. Selon leurs déclarations, ces séances de formation sont réalisées grâce au financement de la CODA B avec l'utilisation des coopératives de base.

La COOPCAB fournit certains supports logistiques et matériels aux coopératives de base. Elle joue un rôle majeur dans l'organisation de la filière en assurant le traitement final, le marketing et la commercialisation du café. Des fonds de roulement sont mis à la disposition de chacune des coopératives de base pour permettre aux producteurs de vendre leur production au niveau de leur localité. Les coopératives sont chargées de donner un premier traitement au café à un taux d'humidité de 12 % avant de l'acheminer vers le centre de traitement final. Une partie des fonds mis à la disponibilité des unités de base proviennent de la Coopérative d'Épargne et de Crédit (ABCAB) (une autre filière d'activité de la CODAB). En 2007 et 2008, la CODAB a effectué des prêts à un taux de remboursement d'environ 18 % l'an au niveau de la Banque de Crédit Agricole (BCA) pour secourir aux coopératives de café. Toute cette dynamique certifie la volonté de ces acteurs pour apporter leur support aux producteurs de cette culture d'exportation qualifiée de l'or noir47 par Alter Presse d'Haïti dans un article publié en 2008 autour de ce sujet. Les coopératives de base ont eu leur reconnaissance légale auprès du Conseil National des Coopératives (CNC) en 2008, grâce aux démarches conduites par les responsables de la COOPCAB en appui avec la CODAB.

+ Commercialisation du café par la COOPCAB

Le café est commercialisé sous la forme lavée. En 2009, la CODAB a trouvé un fonds pour permettre à la disposition de la COOPCAB pour la commercialisation du café torréfié. Ce fonds provient d'une organisation hollandaise du nom de Fun De Progresso qui a octroyé

des prêts à la coopérative au taux de 8 % par mois. Cette perspective de commercialisation du café torréfié, a permis à la COOPCAB de bénéficier de nouveaux partenaires techniques et financiers comme la BI D, la Banque Mondiale, la Coopération de la Grande Bretagne et Agronomes et Vétérinaires sans Frontières (AVSF).

Depuis son existence, la coopérative a eu « comme mission de regrouper les planteurs

de café qui se trouvent dlLe/Ctl$trondissement de Belle-$ gh/ChI/Cd'RLIlLnKshi/CllL/CfKlKgh /Chn /C trouvant un marché pour les producteurs ». Elle s'occupe de la commercialisation du café de ses membres vers les marchés du Japon, de l'Italie, de la France, des Etats-Unis et du Canada sous les noms : BLUE PINE FOREST et café du Morne la Selle. De 2004 à 2008, le prix de la livre de café est passé de 1.30 -- 4.00 US $ en raison d'importantes négociations régulières réalisées par les responsables de la COOPCAB avec des acheteurs attentifs de café gourmet dans plusieurs marchés internationaux. En 2008, les producteurs membres de la COOPCAB ont réjouit de l'augmentation du prix de la livre de café et en ont profité pour remercier tous les partenaires48 financiers et techniques de la coopérative. Le café torréfié sera commercialisé au prix de 2.50 -- 3 US $ par 500 grammes de produit. Ces informations ont été fournies par les responsables de la COOPCAB.

Le réseau de la COOPCAB est inscrit au registre de FairTrade Labelling Organizations (FLO)49, ce qui l'autorise à vendre également sur le marché équitable. La période de traitement final et d'exportation du café s'étend sur la période de décembre-août. En 2008, l'exportation du café par la COOPCAB est estimée à 7 containers de 250 sacs/ 60 kg. Initialement, la coopérative de base achète la livre de café entre 30-40 gourdes au près des producteurs. S'il y a excédent après l'exportation, le surplus est retourné à chaque producteur par la COOPCAB. À priori, un producteur peur gagner quelques 30 000 gourdes pour une saison sur un hectare de terres cultivées en café. Selon les données fournies par les producteurs rencontrés, ce montant a été au minimum doublé en 2008 à cause d'une ristourne équivalente à 39 gourdes par livre de café qu'ils ont bénéficié après l'exportation.

Avant le renforcement des coopératives de base et l'organisation du marché par la COOPCAB, le café était commercialisé de manière informelle à la frontière haitianodominicaine. Pendant cette période, les Dominicains achètent la livre de café autour de 18 gourdes et sans aucune possibilité de bénéficier des ristournes.

48 Ces principaux partenaires sont : la Banque de Crédit Agricole (BCA), la Fédération Luthérienne Mondiale et Action Aid deux ONG internationales, la Coordination Régionale des Organisations du Sud-est (CROSE) une ONG locale et l'Ambassade du Japon en Haïti.

49 Fai rtrade Labelling Organizations International (FLO), basé à Bonn en Allemagne, il regroupe des Initiatives de commerce équitable labellisé en Europe, au Japon, aux Etats-Unis, en Australie et Nouvelle Zélande, ainsi que des réseaux de producteurs d'Amérique Centrale et Latine, d'Afrique et d'Asie.

L'État haïtien représente un autre acteur intervenant dans la filière du café dans la zone de Belle-Anse. Ses interventions sont opérées par le Ministère de L'Agriculture des Ressources Naturelles et du Développement Rural via l'Institut National du Café d'Haïti (INCA H)50 qui a la mission principale de travailler au développement dudit secteur. Depuis sa création en 2003, l'INCAH a déjà réalisé plusieurs programmes ou projets dans la région de Belle-Anse axés, entre autres, sur la lutte contre les scolytes51 de la cerise du café et un programme52 d'appui à la compétitivité du café d'Haïti. L'exécution de ses activités par l'État a impliqué une certaine participation des réseaux de coopératives qui charpentent la COOPCAB.

Bien que 60 % des coopératives de base existent avant la Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse (CODAB), cette dernière joue un rôle primordial quant aux supports fournis à la coopérative centrale pour répondre aux exigences de la filière. Elle favorise aussi l'arrivée de nouveaux acteurs qui se chargent de supporter financièrement le secteur. Le projet de commercialisation du café sous la forme torréfiée est l'oeuvre de la CODAB et il va permettre au mieux l'amélioration des revenus agricoles des producteurs. Elle favorise aussi l'organisation de la filière au bénéfice des producteurs locaux de cette culture de rente.

4.3.2- Présentation de la mini-laiterie de la Forêt-des-Pins

La mini-laiterie de la Forêt-des-Pins est une unité de transformation du lait de vache, localisée dans la 3ème Section Communale de Thiotte dans l'Arrondissement de Belle-Anse d'Haïti. Les premières tentatives pour la réalisation de ce projet ont commencé en 2004 et les travaux de construction ont été débutés en 2005.

Dans un rapport « d'étude sur le diagnostic de l'élevage de bovins laitiers », réalisé en 2007 par le bureau régional du Ministère de l'Agriculture, le projet a eu comme objectifs « d'apporter sa contribution à la disponibilité de fourrages pour les herbivores pour une

50 L'Institut National du Café d'Haïti (INCAH) est un organisme public, autonome à but non lucratif, créé par arrêté présidentiel du 7 février 2003 suite à une campagne de mobilisation lancée en 2001 par les différents opérateurs de la filière, principalement les associations de planteurs et les ON G oeuvrant dans le secteur café en Haïti. Il est placé sous la tutelle du Ministère de l'Agriculture des Ressources Naturelles et du Développement Rural.

51 Le projet de « renforcement de la stratégie de lutte contre le scolyte du café » est un projet qui a été financé par l'UE à hauteur de 14 510 675 gourdes. Il visait le contrôle intégré du scolyte du café par l'introduction de la lutte biologique et la systématisation de l'utilisation des pièges. Le Ministère de l'Agriculture des Ressources Naturelles et du Développement Rural a été l'un des exécutants de ce projet en partenariat avec les réseaux des réseaux de coopératives.

52 L'Union Européenne représente l'un des partenaires importants pour le financement de ces programmes en Haïti.

amélioration de leur productivité et la diminution de la coupe anarchique des arbres par une meilleure valorisation de l'élevage de bovins » (A. Jean-Baptiste, 2007 : 14).

Créée au mois de novembre 2006, ce sont des organisations communautaires de base de la zone qui ont pensé à l'implantation d'un système Agro-Sylvo-Pastorale. La Laiterie de la Forêt des Pins SA est la propriété d'une instance surnommée : SOCIÉTÉ ALLIANCE LAITERIE PRODUCTIVE qui est affilié à la Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse (CODAB). Elle est dirigée par un conseil d'Administration de 9 personnes dont un membre du conseil exécutif de la CODA B en est le responsable financier. Un directorat composé de 2 personnes est issu dudit conseil et dirige la laiterie.

Les organisations communautaires qui ont introduit ce projet étaient affiliées à la Fédération des Planteurs de l'Arrondissement de Belle-Anse (FOPLAB)53 qui elle-même a fournit le terrain pour son implantation. Après la création de la CODAB en 2005, l'institution a contribué à hauteur de 15 % dans les actions pour le fonctionnement de l'unité de transformation54, d'après les déclarations faites par les membres de son comité exécutif.

Au regard de ces objectifs, la zone environnante de la Laiterie dispose d'environ 60 hectares d'herbes cultivées55 pour l'alimentation du bétail en association avec d'autres espèces fruitières et forestières56. Exceptionnellement, l'arrivée de la laiterie dans la zone a permis une meilleure valorisation du lait de vache puisqu'avant, il était pratiquement laissé au profit des géniteurs. Avec cette unité de transformation, le lait de vache est devenu un outil économique pour les éleveurs. De plus, ces derniers bénéficient des encadrements techniques par l'intermédiaire de plusieurs séances de formation et ils sont regroupés au sein de l'Association des Éleveurs du Morne des Commissaires (ASEM). Cette association fut créée sous l'initiative de la laiterie pour favoriser des échanges entre les éleveurs et comporte environ 100 éleveurs (A. Jean-Baptiste, 2007 : 14 & 15).

Les travaux de construction de la laiterie, le support en matériels techniques et logistiques sont fournis par des ONG nationales et internationales et l'État haïtien. L'ONG Veterimed, la Fondation groupe 73 et la Fédération Nationale des Travailleurs Paysans Haïtiens (FENATAPA) sont les principaux partenaires financiers et techniques de la laiterie. L'État haïtien via le bureau régional du Ministère de l'Agriculture a joué son rôle en mettant à la disposition des responsables de la laiterie 10 génotypes de races améliorées depuis 2007

53 L'une des anciennes structures de regroupement d'organisations qui a donné naissance à la CODAB

54 Les 15 % d'actions de la CODAB sont équivalents à 60 000 gourdes

55 Les espèces cultivées sont : l'herbe Guatemala, l'herbe Éléphant

56 Les espèces fruitières et forestières sont l'avocatier, le pin et le bambou

pour favoriser la disponibilité en lait au profit de la laiterie. Ces acteurs ont aussi assurés la formation des cadres techniques pour le fonctionnement de la laiterie et pour les éleveurs qui lui sont affiliés (A. Jean-Baptiste, 2007).

De part les stratégies générales de la Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse (CODAB) d'encadrer les organisations communautaires de base, elle participe au renforcement SOCIÉTÉ ALLIANCE LAITERIE PRODUCTIVE (organisation de gestion de la laiterie) et apporte sa contribution à la formation des éleveurs.

+ Production de la laiterie

Dans le rapport préparé en 2007 par le bureau régional du Ministère de l'Agriculture sur l'existence de la laiterie, celle-ci est spécialisée dans la production de lait stérilisé et de lait pasteurisé. De 2006-2008, la quantité de lait transformée par jour est passée de 25 gallons57 à 60 gallons. Le lait stérilisé fabriqué est vendu exclusivement au niveau local dans des bouteilles d'une capacité de 10 oz au prix de 17 gourdes58 et sa production a commencé depuis en novembre 2006. Par contre, il est vendu à 25 gourdes au niveau des boutiques (A. Jean-Baptiste, 2007).

Quant au lait pasteurisé, sa production a commencé en mars 2007 sous un partenariat avec l'État haïtien par l'intermédiaire du Ministère de l'Éducation Nationale. Il est produit dans des sachets d'une capacité de 8 oz et est vendu au prix de 12 gourdes. Sa production est destinée à servir le programme de cantine scolaire pour le compte dudit Ministère au profit des élèves de façon quotidienne. La livraison des produits transformés se fait à domicile avec le support logistique de la Fédération Luthérienne Mondiale (FLM), l'un de ses partenaires (A. Jean-Baptiste, 2007). La Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse (CODAB) assure la livraison du lait pasteurisé aux écoliers par sa responsabilité de gestionnaire du programme de cantine scolaire dans tout l'Arrondissement de Belle-Anse.

Toujours en 2007, les résultats de l'étude réalisée par la direction régionale du Ministère de l'Agriculture, ont présentés les effets produits par la laiterie de novembre 2006 à mai 2007. Les données obtenues à travers cette étude ont montré d'importantes améliorations à la fois sur les pratiques de l'élevage et sur l'amélioration des revenus des éleveurs. Avec l'arrivée de la laiterie, les éleveurs ont changé certaines pratiques du système d'élevage pratiqué grâce aux séances de formation qu'elles sont bénéficiaires. Les parcelles d'herbes

57 1 gallon est égal 3.78 litres

58 Un euro vaut environ 50 gourdes

cultivées mises en place favoriseraient la disponibilité de fourrages pour les bovins en période de disette tout en contribuant à la réduction des pertes de sol par érosion. Des calculs économiques effectués sur une période de 6 mois de fonctionnement de la laiterie ont révélé des revenus variant de 4, 479.00 gourdes à 14, 478.00 gourdes obtenus par un éleveur possédant entre 1-3 vaches en lactation (A. Jean-Baptiste, 2007 : 24).

Tout compte fait, malgré la diversité d'acteurs identifiés à travers la présentation de la Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse (CODAB) pour son existence, il est permis de dire qu'ils construisent leur projet commun autour du développement de toute la région administrative de Belle-Anse. Ils se font toujours le devoir de s'unir autour de la construction d'un territoire. En vertu, de la conception des habitants de deux Sections Communales, il est évident de dire que toute la population de la zone construite leur identité collective autour de toute la zone. Aucune situation de conflits n'a été révélée par les responsables des organisations communautaires avec la CODAB, non plus par les bénéficiaires directs.

Globalement, les branches d'activités initiées ou encouragées par les organisations communautaires paysannes dans l'Arrondissement de Belle-Anse d'Haïti contribuent à l'amélioration des revenus des habitants bénéficiaires de leurs activités. Elles réalisent des projets durables qui incluent une certaine appropriation de la population pour produire du développement territorial. La continuité dans la prise en charge du secteur caféiculture permet aux producteurs de bénéficier des supports à différents niveaux ce qui augmentent la productivité dudit secteur et l'amélioration des revenus des caféiculteurs. L'innovation du secteur agro-industrie dans la zone favorise l'implication des femmes dans cette sphère d'activité. La participation des femmes est tout aussi encouragée dans les prises de décision des organisations et dans l'exécution des projets. La pratique de ces initiatives induit la participation populaire à toutes les étapes de la mise en place des projets. Les bénéficiaires seraient en situation de conduire la gestion des activités grâce aux séances de formation reçue ; cette forme de participation populaire est de type participatif (A. Dumas, 1983 ; Jules Pretty et al., s. d.).

D'après ce qu'a annoncé J- P Platteau (2004 : 160), autour des pratiques « de détournements de fonds d'aide par des élites locales », cette forme de regroupement d'organisations dans la zone peut servir de référence pour l'exécution des activités de développement au niveau local. La population locale bénéficiaire n'est plus considérée comme un « réceptacle » par rapport au modèle de développement pratiqué jusque vers les

années 90. La CODAB via ses structures de base essaye d'intégrer la population locale dans toutes les étapes d'exécution de ses programmes et/ou projets exécutés, donc un bon modèle de développement communautaire participatif.

Mise à part, les organisations paysannes comme acteurs qui déclenchent les initiatives de développement endogène via ces secteurs, l'État et les ONG apportent leur contribution au niveau technique et financier pour la réalisation des activités par les organisations paysannes. Les ONG demeurent des acteurs majeurs au processus de développement en soutenant presqu'exclusivement les organisations communautaires paysannes via la Coordination des Organisations pour le Développement de l'Arrondissement de Belle-Anse (CODAB).

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