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La capacité de la femme mariée en matière du travail en droit français et en droit congolais

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par Yves-Junior MANZANZA LUMINGU
Université de Kinshasa - Licence en Droit 2006
  

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§4. Appréciation critique du nouveau Code du travail

Il est question de comparer l'approche suivie par le législateur congolais à celle de son homologue français avant de fustiger son silence et de proposer des pistes de solutions.

A. Analyse croisée avec le Code du travail français

Le législateur français a évolué de façon graduelle et progressive du régime d'autorisation à celui de liberté totale, mais en passant par la non opposition expresse du mari.

Le code du travail français n'a réglementé que l'âge minimum, l'appartenance à l'un ou l'autre sexe n'ayant aucune incidence sur l'embauche. La capacité de la femme mariée devrait par conséquent être renvoyée au Code civil qui déjà traite les deux conjoints sur un même pied d'égalité et reconnaît à chacun le droit au libre choix d'une profession.

Il s'ensuit que le silence du code du travail français à propos de la capacité de la femme mariée ne cause aucun préjudice à cette dernière, étant donné que le droit commun lui est déjà favorable.

Le législateur congolais quant à lui a emprunté la même procédure, mais pour aboutir à un résultat malencontreux. En effet, parti du régime d'autorisation préalable à celui de non opposition, il retombe encore plus bas, dans la case du départ sans atteindre l'objectif visé qu'est la liberté totale. Ce cercle vicieux qui n'est pas l'unique reflète bien la philosophie de l'amateurisme qui hante les africains à entrer dans l'histoire à reculons.

Loin de ressembler au silence observé dans le Code du travail français, celui du législateur congolais est un silence qui cause un préjudice énorme à la femme congolaise.

B. Le silence coupable

Pourquoi le silence du législateur congolais est-il qualifié de coupable ? Fait-on allusion à un préjudice manifeste qu'il causerait ?

A coup sûr, le silence coupable évoque la situation de la femme mariée dont le législateur congolais, par son silence éloquent, vient de restreindre la liberté d'embauche.

Laissons s'exprimer le professeur Jean-Michel KUMBU ki NGIMBI : « s'il est admis qu'en matière de procédure pénale, le silence de l'inculpé est un droit, dans certaines autres matières, il faut bien parler de peur que le silence ne joue en défaveur de la personne que l'on tient à protéger, à qui l'on veut reconnaître des droits.

[Et] si le silence, par ironie du sort, jouait en sa défaveur, on le qualifierait de coupable » (61(*)).

Il reste à démontrer comment ce silence est-il coupable.

C'est que l'article 23 du Code civil congolais livre III confirme que toute personne peut contracter, à moins d'être déclarée incapable par la loi. Et la loi dont il s'agit ici est bel et bien le Code de la famille au regard duquel la capacité de la femme mariée trouve certaines limitations (62(*)).

Et l'article 448 de ce code exige de la femme mariée une autorisation maritale préalable en ce qui concerne les actes juridiques qu'elle doit poser en personne. Ce texte est qualifié de « loi générale » ou de règle de droit commun. Pour que tel ne soit pas le cas, il faut une loi spéciale qui dérogerait au droit commun en vertu du principe « lex specialis generalibus derogat » (la loi spéciale déroge à la loi générale).

C'est ce que le législateur de 1967 avait fait à travers l'article 3c. Ainsi donc, à travers le mécanisme juridique du spécial qui déroge au général, la femme mariée avait recouvré sa liberté d'embauche.

Malheureusement, le nouveau code du travail a opté pour le silence en écartant la disposition de l'article 3c du texte de 1967 qui, aux yeux des promoteurs de la nouvelle loi, constituerait un frein à l'épanouissement de la femme mariée.

Or, en empruntant la langue de bois pour débattre de cette question, le législateur de 2002 n'a pas spécialement prévu cette pleine capacité et a ainsi arrêté nette la course de la femme mariée à la conquête de sa pleine liberté d'embauche mise à mal par le Code de la famille.

Pour déroger à une règle générale, il eut fallu qu'une loi spéciale existât, prévoyant une autre disposition expresse. Tel n'est pourtant pas le cas.

C'est à ce niveau que mérite d'être rappelé le constat amer que fait le professeur KUMBU ki NGIMBI qui, pour montrer l'impact d'une telle orientation, précise que « la femme mariée a rejoint la maison d'asile de l'incapacité où elle a retrouvé la matière commerciale à côté de la matière civile, [gisant] à même le sol, attendant qu'un illuminé en la matière s'occupe de leur sort. C'est ici que l'on décèle le silence coupable, le silence éloquent, le silence qui parle, conclut-il (63(*)).

Et comme pour se rattraper, les victimes de ce silence en appellent à la CEDEF qui, elle-même, invite les Etats parties à adopter des mesures législatives tendant à supprimer les discriminations que subissent les femmes. Or le législateur congolais s'est tu : il n'a pas adopté ou mieux a adopté, mais en défaveur de la femme.

C'est qu'en cette matière, prétendant se conformer à la CEDEF, le législateur congolais de 2002 l'a courageusement foulée au pied.

Que faire en dernière analyse ? Le non initié pourrait dire avec innocence : « alea jacta est ». Non ! Le dé n'est pas jeté ; le sort de la femme congolaise peut encore être sauvé. Il faut en effet une disposition spéciale qui puisse corriger cet état de choses et qui vienne redorer le blason terni de la femme, mieux rétablir celle-ci dans sa pleine capacité juridique. Et donc, en pareil cas, l'erreur étant consommée, il faut prendre conscience et se déterminer à la corriger. Aussi allons-nous proposer quelques perspectives d'avenir.

* 61 KUMBU ki NGIMBI, « Le silence coupable », in Afrique d'Espérance, n° 2, février-mai 2003, pp. 8-10

* 62 Art. 215, al 2 du Code de la famille

* 63 KUMBU ki NGIMBI, « Le silence coupable », loc.cit.

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