WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

les juridictions administratives et le temps;cas du Cameroun et du Gabon

( Télécharger le fichier original )
par Olivier Fandjip
Université de Dschang - D E A 2009
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

PARAGRAPHE II : L'ALLONGEMENT DES DELAIS AU GABON

Si en droit camerounais, l'action du juge administratif peut être annihilée du fait de l'écourtement des délais, au Gabon par contre, il n'en est pas de même car, des délais longs permettent aux justiciables de mieux se préparer et même d'agir utilement. Il en est ainsi des recours contentieux (A) et même des voies de recours (B) en dépit de quelques atténuations (C).

A- La longueur des délais dans l'instance initiale

Le législateur gabonais a opté pour cette formule autant en matière ordinaire (1) que fiscale (2).

1-Un délai de saisine long en matière ordinaire

La loi n°17/84 du 29 Décembre 1984 précitée prévoit que le silence gardé pendant quatre (04) mois au recours administratif préalable vaut rejet, et la partie lésée dispose d'un délai de trois (03) mois à compter de l'expiration du délai de quatre mois ci-dessus mentionné, pour exercer son recours contentieux. Ainsi, dans tous les recours soumis à l'exigence du recours précontentieux, le justiciable comptera à partir du jour où ce délai est arrivé à son terme pour saisir la juridiction.

Mais, l'on peut aussi voir autrement en faisant valoir que, le requérant disposerait de trois (03) mois à compter du lendemain de la publication ou de la prise de connaissance de l'acte dans l'hypothèse ou son recours n'est pas soumis à l'exigence du recours précontentieux. Cette interprétation cependant a été démentie par le juge qui s'est tenu à la lettre de la loi.

Dans l'espèce EWORE Edouard c/ Etat gabonais, rendue le 27 Février 1987, le juge décida : « Considérant que Edouard EWORE réclame à l'Etat gabonais le paiement ou le remboursement de ce qu'il considère comme son dû ,qu'il fonde son recours sur une faute de l'O.P.T qui selon lui serait coupable d'avoir opéré des retenues sur salaire...  ; qu'il met ainsi en cause la responsabilité de l'administration, qu'il s'agit donc d'un recours dit de « plein contentieux » qui n'est assujetti ni à un délai d'action, ni à une décision administrative préalable, que le recours de Monsieur EWORE Edouard est recevable en la forme. »

Par ailleurs, dans l'espèce RENOMBO Robert le juge affirme : « Que dans son recours Monsieur RENOMBO ne conteste pas la légalité d'un acte administratif précis ;...qu'il s'agit donc d'un contentieux de pleine juridiction dont le code n'assujettit l'exercice du recours ni a une décision préalable de l'administration ni à l'observation d'un délai d'action sous peine de forclusion ; que le recours de RENOMBO est donc recevable. » L'on convient donc que le recours peut s'effectuer dans un délai relativement long comme en matière fiscale184(*).

2- Dans le contentieux fiscal

Le contentieux des contributions aux charges publiques est organisé par le Code Général des impôts et des droits indirects au Gabon. Il est soumis aussi au recours précontentieux qui doit être adressé au ministre en charge des finances qui statue dans les six mois de la réception de la requête du contribuable. C'est dire que comme dans l'hypothèse du contentieux de la légalité, le contribuable dispose d'un délai de trois (03) mois à compter de la date d'expiration de la durée de six mois sus-mentionnée pour introduire son recours contentieux devant la juridiction administrative. Le juge administratif dans l'espèce ANRIS, objet de la décision rendue le 24 Février 1967 a affirmé : « Considérant toutefois qu'aux termes de l'article 142 du code général des impôts ...considérant que la lettre n°1349 du 22 décembre 1964, faisant par contre référence à la réclamation du 14 décembre 1964 adressée par ANRIS au ministre...que cette lettre faisait courir les délais pour saisir la juridiction administrative, que la requête au tribunal administratif en date du 31 août 1965...doit être déclarée irrecevable pour avoir été présentée hors délai. » En effet cela suppose qu'après la lettre n°1349 du 22 Décembre 1964, le requérant avait jusqu'au 23 Mars 1964 au lieu du 03 Août pour saisir la juridiction administrative185(*).

Cet allongement des délais n'est pas légion seulement en cas d'introduction de l'instance, cela se vérifie aussi en matière des voies de recours.

B- Les délais dans l'instance dérivée

En droit gabonais, que l'on se trouve dans l'hypothèse des voies de recours de reformation ou même de rétractation, les délais sont presque uniformes. Le délai est de deux (02) mois dans les deux cas. Ceux-ci découlent des articles 86 à 103 du Code des Tribunaux Administratifs.

Du point de vue du pourvoi en cassation, l'article 38 alinéa 7 de la loi de 2002 organisant le Conseil d'Etat dispose que celui-ci connaît en cassation les pourvois contre les décisions des Cours d'Appel, mais, le code des tribunaux n'apporte aucune précision en ce qui concerne le ou les délais de ce pourvoi. Pour nous, l'on peut admettre qu'il sera recevable dans les deux (02) mois comme les autres voies de recours car, il serait illogique d'estimer que cette action du fait de l'absence de précision pourrait être recevable à tout moment.

En outre, la loi exclut l'opposition parmi les voies de recours. Une seule exception est admise : c'est le cas du référé. Le texte prévoit que, sauf en matière de référé, les jugements ou les arrêts des juridictions administratives ne sont pas susceptibles d'opposition186(*). A ce niveau, quel serait alors le sort des décisions rendues par défaut ? Et dans le cas exceptionnel du référé, la loi ne donne aucune précision quant au délai d'exercice de ce recours. A notre sens, en dépit de l'idée d'uniformisation, étant donné que l'on se trouve en matière d'urgence, ce délai peut être maintenu à quinze (15) jours comme en droit camerounais.

En ce qui concerne la tierce opposition, la loi prévoit expressément que si aucune notification n'a été faite spécialement au tiers opposant, aucun délai ne lui est opposable, lorsqu'il se décide à agir et cela même si une autre partie a interjeté appel187(*).

En ce qui concerne le recours en rectification d'erreur matérielle, il est ouvert à toute partie intéressée et est irrecevable si l'erreur est liée à une appréciation d'ordre matériel.

Dans l'affaire TAYLOR objet de la décision rendue le 26 Mai1989 par la Chambre Administrative, le juge décida : « Considérant que le recours en rectification d'erreur matérielle a été prévu par l'article 103 du code...qu'il est constant que ce texte, réserve l'exercice d'un tel recours aux parties au procès...que dès lors, le ministre...n'est pas fondé à soulever l'incompétence de la Chambre administrative.»188(*).

Si ainsi le droit gabonais a prévu des délais longs, ceux-ci sont relatifs tout de même dans certaines hypothèses.

C-La relativité de l'allongement des délais

On peut dire que l'urgence qui caractérise les matières électorales (1) de même que le référé et le sursis (2) a amené le législateur à réduire les délais de saisine de la juridiction administrative dans ces différents contentieux.

1-Dans le contentieux électoral

Il serait judicieux d'étudier les délais d'introduction de l'instance d'une part (a), et d'exercice des voies de recours (b) d'autre part.

a- Le délai d'introduction de l'instance

Avant l'intervention de la loi n° 07/96 du 12 Mars 1996 portant dispositions communes à toutes les élections politiques, modifiée par la loi n°10/98 du 10 Juillet 1998, la loi du 06 Mars 1960 qui organisait les scrutins n'avait prévu aucun délai relatif à la saisine du juge en la matière. C'est ainsi que, dans l'espèce SOUSATTE, le juge déclara irrecevable la requête de celui-ci pour forclusion. L'on se demandait bien sur quelle base textuelle189(*). Il ressort de toutes les lois électorales votées depuis 1990 notamment la loi n°14/90 du 15 Août 1990, n°13/90 du 11 Mars 1993 portant Code électoral et surtout la loi de 1996 précitée que tout auteur d'une réclamation concernant l'inscription sur les listes électorales peut exercer un recours devant le tribunal administratif dans un délai de dix (10) jours à compter de la publication desdites listes.

Pour le contentieux de la votation, ledit texte prévoit que la réclamation doit être déposée à peine d'irrecevabilité au plus tard le quinzième(15eme) jour suivant la publication des résultats. Par ailleurs, l'on doit préciser que la loi dispose que la partie dont l'élection est contestée dispose après notification d'un délai de dix (10) jours pour présenter sa défense190(*). Entre dix (10) jours et quinze (15) jours, il n'y a pas, à notre avis, sérieuse différence, le législateur aurait pu, afin d'éviter les confusions éventuelles, maintenir un seul délai. Ces confusions sont également susceptibles de nuire au requérant même dans l'hypothèse des voies de recours.

b- Dans l'exercice des voies de recours

La loi électorale gabonaise a prévu que l'appel est porté dans les quinze (15) jours suivants la proclamation des résultats du scrutin devant la Cour d'Appel Administrative. On comprend donc qu'ici, autant qu'en matière de référé, la célérité est renforcée.

Mais la loi ne fait allusion qu'à l'appel, et la question qui peut être posée est celle de savoir si les autres voies de recours ne sont pas admises .La réponse peut découler d'une analyse de l'article 86 du code des tribunaux dont l'alinéa 2 dispose : « Toutefois...la tierce- opposition n'est pas admise en matière électorale ». En effet, en dehors de cette exclusion faite au sujet de la tierce opposition, aucune autre n'existe expressément en ce qui concerne les autres voies de recours. Cela laisse penser qu'en vertu de la règle selon laquelle « ce qui n'est pas interdit est permis », les autres voies de recours peuvent être admises et sans doute dans des délais brefs comme en ce qui concerne l'appel.

En outre, il ne manque pas d'intérêt à préciser que le délai de quinze (15) jours prévu par la loi en cette matière ne concerne que le contentieux de la votation car, pour ce qui est des contestations relatives à l'inscription sur les listes, la loi dispose que le tribunal administratif statut en premier et dernier ressort. De ce fait, l'appel sans doute ne pourra être possible ; uniquement le pourvoi en cassation serait envisageable. L'étroitesse des délais de saisine dans le contentieux administratif gabonais s'observe aussi en matière d'urgence.

2-L'écourtement des délais de saisine en matière d'urgence

En ce qui concerne d'abord le référé, il résulte des dispositions du code des tribunaux que les décisions rendues en matière de référé sont susceptibles de recours devant la Cour Administrative d'Appel dans un délai d'un (01) mois à compter de la notification. En réduisant ainsi le délai de saisine, le législateur marque sa fidélité à l'exigence de promptitude et de célérité qu'exigent les matières urgentes. Au regard du droit camerounais, le droit gabonais a retenu exceptionnellement en cette matière l'opposition qui n'existe pas parmi ses voies de recours191(*).

Mais du point de vue du sursis à exécution, la loi n'apporte aucune précision. Il est tout simplement retenu que, les jugements rendus en matière de sursis par les tribunaux sont susceptibles de recours en appel. Compte tenu de l'urgence, l'on peut penser que ce délai doit être d'un (01) mois comme en matière de référé administratif.

Au total, le législateur gabonais n'a pas choisi comme au Cameroun et en France la formule de la brièveté des délais. Cette option pour la brièveté des délais qui peut s'expliquer par la nécessité de sécuriser au plus vite les décisions administratives, peut apparaître dangereuse car, dans un contexte comme celui du Cameroun l'on peut imaginer toutes les difficultés pouvant empêcher les administrés d'agir à temps, ce qui ne peut qu'empêcher la juridiction de se prononcer et du même coup réduire son action. C'est l'une des raisons pour lesquelles en France, la loi a accordé la possibilité aux requérants de déposer une simple « requête sommaire » dans laquelle ils indiquent leurs arguments qui seront par la suite « ampliés » par un « mémoire complémentaire »192(*).

Le législateur gabonais donne assez de temps aux justiciables pour agir, ce qui paraît adoptable au Cameroun au regard de l'éloignement de l'institution puisque, cette brièveté de délai limite fortement en pratique la possibilité d'accès au juge, étant donné que les administrés ne sont pas parfaitement au fait de la procédure contentieuse administrative193(*). Cette inertie de la juridiction résultant de l'étroitesse des délais est soutenue par le caractère d'ordre public de ces différents temps de saisine.

* 184 C.A.C.S, 27 Février 1987, rep n°6/87, EWORE Edouard c/ Etat gabonais et C.A.C.S, 10 Avril 1987, rep n°8 /87, RENOMBO Robert c/ Etat gabonais.

* 185 C.A.C.S, 24 Février 1967, ANRIS, rep n°20, G.D.J.A.G n°14, p.134, obs. PAMBOU TCHIVOUNDA (G.).

* 186 Article 86, C.T.A.

* 187 Article 88 alinéa 1, C.T.A.

* 188 Lire PAMBOU TCHIVOUNDA (G.), « Note sous C.A, 26 Mai 1989, Taylor, rep n°13. », Recueil Penant, 1990, n°801, p.129.

* 189 Cf. T.A Gab, 25 Juillet 1960, rep n°34. En l'espèce,le juge se fonda sur les articles R 113, 119C de la loi électorale française qui prévoyait un délai de cinq (05) jours. Lire à ce sujet les observations du Professeur PAMBOU TCHIVOUNDA, Op.cit., p. 5.

* 190 Voir les articles 115, 122,123 de la loi n°07/96.

* 191 Voir articles 86 ,142 alinéa 2, C.T.A.

* 192 FOILLARD (P.), Op.cit, p.239.

* 193 LOMBARD (M.), Op.cit, p.220.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius