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Le contrôle des armes légères et de petit calibre en afrique de l'ouest

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par Salamane YAMEOGO
Institut de Hautes Etudes Internationales et du Dévelppement (IHEID) - Master en Etudes du Développement 2009
  

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DES ALPC

Des transferts d'armes peuvent être indispensables pour répondre aux besoins de sécurité légitime d'un Etat ou pour améliorer les capacités des forces de sécurité car, comme le souligne la Banque Mondiale, la sécurité reste une priorité pour les populations pauvres dans toutes les régions du monde (Conoir et Verna 2005, 486). Cependant, les transferts irresponsables des ALPC peuvent encourager des forces militaires irresponsables et mal entraînées à supprimer les droits humains et entraver le développement démocratique ; faciliter une exploitation brutale des ressources ; contribuer à la dégradation de l'environnement ; et augmenter la violence contre les femmes. La pauvreté peut s'aggraver, les inégalités augmenter, l'accès aux services de base encore plus compromis et des existences menacées (Amnesty International/IANSA/OXFAM, 2004). Ainsi, la circulation incontrôlée des ALPC représente de graves entraves non seulement pour la paix et la sécurité humaine (Small Arms Servey 2002) (§I), mais aussi pour le développement (Small Arms Servey 2003) (§II).

§I : LA PROLIFÉRATION DES ALPC,

UNE MENACE POUR LA SÉCURITÉ HUMAINE

« L'être humain est au coeur de tout. Le concept même de souveraineté nationale a été conçu pour protéger l'individu, qui est la raison d'être de l'Etat, et non le contraire. Il n'est plus acceptable de voir des gouvernements flouer les droits de leurs citoyens sous prétexte de souveraineté ». (Kofi Annan 1999). Ces propos sont la traduction fidèle de la doctrine de la sécurité humaine. La sécurité humaine, aujourd'hui au coeur des stratégies du développement durable et de l'intervention humanitaire, est le résultat de la transition conceptuelle du terme de sécurité.

Pendant longtemps, la sécurité a été le pré-carré des théories réalistes, néo-réalistes, rationalistes pour lesquelles, elle serait axée sur trois composantes essentielles : l'Etat, le principal agent et bénéficiaire de la sécurité ; la menace à la sécurité provient surtout des autres Etats et les réponses aux menaces sont surtout de type diplomatico-stratégique (Rioux 2001, 11). Aujourd'hui, la sécurité n'est plus campée sur l'Etat, sur les domaines militaires et nucléaires. Depuis les années 1960-1970 avec les réflexions de Galtung sur la paix dans « Peace, War and Defense : Studies in Peace Research » (Galtung 1976) au Rapport sur le Développement humain du Programme des Nations Unies pour le Développement (Nations Unies 1994), qui a officiellement utilisé le concept de sécurité humaine, en passant par John Burton dans « World Society » en 1972, Lester Russell Brown dans « Redefining National Security » en 1977, Booth Ken dans « Security and Emancipation » et les développement des constructivistes, (Nicholas 1989), et bien d'autres auteurs comme Keith Krause dans « Approche critique et constructiviste des études de sécurité », le concept de sécurité a connu une réelle mutation pour prendre en compte l'individu. Désormais, il est fortement question de sécurité humaine que Charles-Philippe David et Jean-François Rioux qualifient de « portée universelle, fondée sur l'interdépendance, centrée sur la prévention et axée sur les individus » (David et Rioux 2001, 21). Elle inclue  la sécurité personnelle, politique, collective, économique, alimentaire, environnementale et sanitaire (David et Rioux 2001, Ibid.). Cette approche large tirée de la définition du PNUD n'inclut pas expressément le phénomène des ALPC qui est de plus en plus considéré comme une réelle menace pour la sécurité humaine. Toutefois, sous un angle restreint, la sécurité humaine serait axée sur les personnes, intégrant beaucoup plus de menaces, mais limitée aux plus violentes comme les mines terrestres, les ALPC, la violence et les conflits intra étatiques. Cette définition donne des limites précises à la notion de sécurité humaine. Aussi, une approche sociologique de la sécurité humaine convient-elle d'être retenue car c'est sous cet angle qu'on peut mieux comprendre la problématique des ALPC. Comme le souligne Keith Krause, les ALPC peuvent être assimilées au problème du contrôle des armements, de la criminalité, de la santé publique, de l'humanitaire et des droits de l'homme ou du développement socio-économique (Krause 1997). Elles sont en majorité la source de violence armée (Déclaration de Genève 2008). Mais comment les ALPC peuvent constituer une menace pour la sécurité humaine en Afrique de l'Ouest? Quels éléments plausibles de démonstration existent-ils ? Deux idées sont à développer ici : l'atteinte à la sécurité humaine pendant les conflits armés et/ou pendant les crises socio-politiques et l'atteinte à la sécurité humaine en période post conflit.

Pour l'atteinte à la sécurité humaine pendant les conflits armés et/ou dans les situations de crises socio-politiques, il s'agit des morts, des impacts de la guerre sur les personnes vulnérables comme le phénomène des enfants soldats, des déplacés et des réfugiés y compris d'autres formes de violence. Pour Francis Langumba Kelli, les ALPC sont : «  les principales armes utilisées dans les querelles intra et inter communautaires, les guerres locales, les insurrections armées, les activités rebelles armées et le terrorisme dans toute la sous-région. Chaque pays ouest-africain a été confronté à la violence généralisée qu'engendre ce type d'armes. Les ALPC ont alimenté en Côte d'Ivoire, en Guinée-Bissau, au Libéria, au Mali, au Niger, au Sénégal, en Sierra Leone et au Togo, des conflits qui se chevauchent (...) dans lesquels ces armes jouent un rôle central et déstabilisateur. Cela a entraîné, la mort ou le déplacement de millions de personnes et la destruction d'un nombre incommensurable de biens. Des ALPC ont été utilisées pour commettre des violations atroces des droits de l'homme, favoriser la mauvaise gouvernance, ébranler les constitutions, faire des coups d'État, créer et alimenter un sentiment général de peur, d'insécurité et d'instabilité» (Kelli 2008, 6). Au titre des personnes tuées et fortement blessées, par exemple en Sierra Leone, l'emploi de ces engins ont fait entre 50.000 et 75.000 morts, 30.000 amputés. Au Libéria, la guerre civile a fait entre cent et deux cent milles morts. Plusieurs milliers de personnes mutilées en particulier par amputation des mains (Kelli 2008, 9). Quant aux violences sexuelles, entre 215000 et 257000 femmes ont fait l'objet de violes en Sierra Leone (Ploughshares 2002). Pour ces deux formes d'atteinte à la sécurité humaine, Julia Freedson souligne qu'au cours de la décennie écoulée, « plus de deux millions d'enfants ont été tués et plus de six millions ont été handicapés de façon permanente ou ont été sérieusement blessés dans les conflits armés ». (Freedson 2002, 42). Parmi les victimes de guerre, les civils atteignent 80% à 90% dont une grande majorité étant des femmes et des enfants tués par les ALPC (Freedson 2002, Ibid.). En 2008, Anatole Ayissi a mené une enquête à Monrovia (Libéria) au terme de laquelle, il a recensé 58 viols et 44 vols à main armée en mars et 52 viols et 55 vols à main armée en avril. Les propriétaires sont agressés chez eux, dépouillés de leurs biens, leurs femmes et filles ensuite violées, sous la menace d'ALPC. En dehors de ces cas, il faut ajouter que les rébellions touaregs en cours dans quelques régions du Mali, du Niger et de la Mauritanie ont fait depuis 1990 plus de 5.000 victimes décédées sans compter les blessures et autres formes de violence. Le conflit ivoirien dont les soubresauts remontent à décembre 1999 a fait plus de 300 morts et plus de 600 blessés (Bouko 2006).

De plus, dans ces situations de conflits armés, les enfants y compris les adolescents, les personnes âgées et les femmes sont les plus vulnérables. Les enfants sont généralement enrôlés. Ceux sont aussi bien des potentielles victimes mais aussi des auteurs de multiples formes de violence. Le nombre actuel des enfants soldats dans le monde vacille entre 250.000 et 300.000 répartis dans plus de 30 pays. Le sort des enfants dans les conflits armés est de 2.000.000 de morts, 5.000.000 d'infirmes et environ 12.000.000 se retrouvent dans la rue (Bouko 2006). Ces éléments impitoyables sont aussi mis à nu par Edward Zwick dans son film « Blood Diamond » (Zwick 2006). En Sierra Leone, près de 4 soldats rebelles sur 5 ont moins de 14 ans et on dénombre 20.000 enfants soldats dont certains de moins de 9 ans (Florquin et Berman 2006). Une enquête menée par le Small Arms Servey au Libéria et en Sierra Leone a montré qu'un « pourcentage considérable de sondés provenant de la Sierra Leone et du Liberia a admis avoir été impliqué dans des pillages (56% en Sierra Leone), des massacres de civils (17% au Liberia), des incendies de maisons (19% en Sierra Leone), des viols (18% en Sierra Leone) et des enlèvements (10% en Sierra Leone). Toutefois, les enfants n'ont donné aucune révélation quant à leur participation à des atrocités et à des pillages (Florquin et Berman 2006, 204). Le graphique extrait de cette enquête met en évidence les atteintes à la sécurité humaine par des enfants soldats au Libéria et en Sierra Leone :

ALPC, ENFANTS SOLDATS ET INSECURITE HUMAINE : Source. Florquin et Berman 2006, 204.

Quant aux personnes déplacées, on estime qu'en Afrique de l'Ouest, il y a plus de deux millions de personnes déplacées et de réfugiés (Florquin et Berman 2006, 181-220). En outre, la circulation illicite des ALPC donne lieu à des problèmes de braquage et de vols qualifiés dans de nombreux pays de la sous-région. Aussi enregistre t-on le plus souvent le phénomène du mercenariat et de coup d'Etat (Bouko 2006). Enfin, la circulation non contrôlée et illicite des ALPC constitue la source de divers autres menaces pour la sécurité humaine: entraves aux interventions humanitaires, véritable problème de santé publique (Small Arms Servey 2002, 155-201 ; Meddings 2005) ; atteinte sérieuse à la dignité humaine, aux droits fondamentaux et source sans conteste de violence armée (Florquin et Berman 2006), connexion étroite avec l'éclatement de la guerre, de la violence et des guérillas urbaines et autres menaces asymétriques, comme le souligne aussi bien le Small Arms Servey dans ses Rapports de 2005 et 2007 « Weapon at war » et « Guns and the City » que Beullac et Krempel. C'est un baromètre de la faillite des Etats. Ces armes blessent, traumatisent et tuent.

En outre, l'usage des ALPC en situation post-conflit constitue une menace véritable pour la sécurité humaine. Dans le cas ouest-africain, avec l'accalmie des conflits armés depuis ces cinq dernières années, c'est l'emploi de ces engins dans la violence armée quotidienne qui constitue la réelle préoccupation. Comme le soulignait déjà David Medding en 1997, même plusieurs mois après la fin d'un conflit, les souffrances des civils continuent et les morts liées aux ALPC ne diminuent en moyenne que de 20 à 40% (Medding 1997). Suite à un conflit armé, les ALPC sont recyclés pour être réutilisés dans d'autres conflits ou dans la criminalité au plan local ou encore vendus à d'autres Etats. Et cela en raison de la facilité à les obtenir et à les dissimiler. Toutes choses qui facilitent aussi la participation de milices civiles non entraînées, de combattants insoumis et de mercenaires incontrôlés. La disponibilité des armes aux mains des Etats non démocratiques favorise l'exacerbation de la peur et l'étouffement de l'opposition politique. Par ailleurs, ces armes sont également usées dans des pays ne connaissant pas un conflit armé par des acteurs non étatiques pour contrôler les richesses. Par exemple, au Nigéria, l'État de Delta, une région riche en pétrole, connaît, depuis 2003, un conflit impliquant des milices lourdement armées qui sont motivées notamment par l'intérêt économique que représente le pétrole brut volé. Ces groupes utilisent toute une série d'armes sophistiquées, comme des fusils automatiques et semi-automatiques, ainsi que des armes plus classiques, pour lancer des attaques meurtrières et paralyser des installations gazières et pétrolières. Ils ont fait de nombreux morts parmi les agents de sécurité, endommagé les infrastructures et installations pétrolières et arrêté la production de pétrole. Ils ont également pris en otages des travailleurs étrangers de l'industrie pétrolière. Les violences ont fait des centaines de morts, provoqué le déplacement de plusieurs milliers de personnes et détruit des centaines de propriétés (Kelli 2008, 10). Il y a eu également dans la région nord du Nigeria en fin juillet 2009, des affrontements sanglants entre les forces de défense et de sécurité qui auraient fait entre 300 et 600 morts (Agence France Presse 2009).

En somme, selon la Déclaration de Genève, les conflits dont la majorité est menée au moyen d'ALPC ont des impacts directs et indirects sur les populations. Ces armes ont causé 18,124% de victimes directes entre 2004 et 2007 en Afrique de l'Ouest et 48,997 de victimes directes en Afrique (DG 2008, 16). Par exemple en République Démocratique du Congo (RDC), environs 90% (soit approximativement 4,8 millions) des 5,4 millions de morts pendant la guerre entre août 1998 et avril 2007 sont de victimes indirectes. Celles-ci sont causées par les maladies infectieuses, la malnutrition, la mortalité infantile due aux maladies liées à l'eau et l'environnement de vie (DG 2008, 31). Par ailleurs, autant la circulation désordonnée des ALPC conjuguée avec leur usage irresponsable est à l'origine des atteintes à la sécurité humaine, autant ce foisonnement porte préjudice au développement.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand